N° 128

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2023

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2024,

Par M. Jean-François HUSSON, 

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 15b

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT

Rapporteur spécial : M. Claude NOUGEIN

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) : 1680, 1715, 1719, 1723, 1745, 1778, 1781, 1805, 1808, 1820 et T.A. 178

Sénat : 127 et 128 à 134 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » s'élèvent en 2024 à 340 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), soit une diminution de 29,17 % par rapport à 2023. Avec des recettes également attendues à 340 millions d'euros, le solde du compte serait à l'équilibre.

I. LA DIMINUTION DES RECETTES DU CAS « GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT » SE POURSUIT, AFFECTANT A TERME SA SOUTENABILITÉ FINANCIÈRE

A. UN OBJECTIF DE RATIONALISATION DE LA GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT

Créé par la loi de finances pour 20061(*), le compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » est l'instrument budgétaire de la politique immobilière de l'État. Placé sous la responsabilité de la direction de l'immobilier de l'État (DIE), il vise à financer les opérations de valorisation et la modernisation du parc immobilier de l'État en recourant, prioritairement, à la cession d'actifs. Les crédits du CAS sont concentrés sur le programme 723 « Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État », qui porte les dépenses d'entretien à la charge du propriétaire, ainsi que les opérations immobilières structurantes réalisées sur le parc immobilier de l'État. En revanche, le programme 721 « Contribution des cessions immobilières au désendettement de l'État » n'est plus abondé depuis 2018.

B. UNE TRAJECTOIRE DE RECETTES DÉCLINANTE

Pour 2024, les recettes du CAS s'élèveraient à 340 millions d'euros, en baisse de 29,2 % par rapport à 2023 (480 millions d'euros), comprenant 210 millions d'euros au titre du produit des cessions de biens immobiliers de l'État ainsi que des droits à caractère immobilier attachés aux immeubles de l'État (en baisse de 40 % par rapport à 2023), 110 millions d'euros au titre du produit des redevances domaniales ou des loyers perçus par l'État et 20 millions d'euros au titre des fonds de concours et versements du budget général. Deux tiers des recettes du CAS en 2024 seraient ainsi constitués des produits de cessions immobilières. La part prédominante des produits de cession reste une source de vulnérabilité : en finançant les dépenses du CAS par ces produits de cession, une érosion excessive du patrimoine immobilier de l'État pourrait survenir.

C. LA DIMINUTION DES DÉPENSES RELATIVES AUX OPÉRATIONS STRUCTURANTES ET AUX CESSIONS EST PARTIELLEMENT COMPENSÉE PAR L'AUGMENTATION BIENVENUE DES DÉPENSES DE GROS ENTRETIEN ET ASSIMILÉS

Suivant strictement l'évolution des recettes, les dépenses connaissent également une baisse de 29,2 % en autorisations d'engagement, à 340 millions d'euros. Dans ce contexte, le solde du CAS serait à l'équilibre en 2024. L'action 14 « Gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état » connaît en 2024 une hausse significative, de 33,01 % en AE, à 137 millions d'euros, et de 30,19 % en CP, à 138 millions d'euros. Désormais, plus de 40 % des crédits de paiement du CAS seraient dévolus à cette action. Alors que le précédent rapporteur spécial préconisait le respect d'une cible de 30 % de crédits consacrés à l'action 14 afin d'éviter la dépréciation des biens, il convient donc de se féliciter de cette évolution. En revanche, l'action 11 « Opérations structurantes et cessions » connait une baisse drastique de 54,84 % en autorisations d'engagement et une diminution, plus modérée mais notable, de 17,65 % en crédits de paiement, pour représenter un montant de 140 millions d'euros (AE = CP).

II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT » NE JOUE PAS LE RÔLE DE DYNAMISATION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L'ÉTAT QUI LUI AVAIT ÉTÉ ASSIGNÉ

A. DES MASSES FINANCIÈRES MINIMES PAR RAPPORT À L'ENSEMBLE DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT

Au 31 décembre 2022, l'État et ses établissements publics occupaient un patrimoine immobilier de 94 millions de mètres carrés de surface bâtie (« surface utile brute »). La valeur comptable de ce patrimoine immobilier est estimée à 73,3 milliards d'euros. Au regard de ce patrimoine très étendu, le CAS « Gestion du patrimoine de l'immobilier de l'État » représente un instrument marginal, équivalent à seulement 13 % des dépenses d'investissement de l'État en moyenne annuelle sur la période 2012-2022.

B. UN INSTRUMENT CONTOURNÉ ET CONCURRENCÉ

Alors que les entités ou ministères occupants ne sont censés pouvoir exercer leurs droits de tirage sur le CAS qu'en contrepartie de la mutualisation de produits de cession, certains ministères ou projets disposent de dérogations. Certains bénéficient aussi d'avances sur cession, dont le montant net s'élevait à 326 millions d'euros en juin 2023. Par ailleurs, la faiblesse des recettes du CAS conduit à sa marginalisation au profit d'autres vecteurs budgétaires. Ainsi, le programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » de la mission « Transformation et fonction publiques » devrait bénéficier en 2024 de 550 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 300 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires pour accélérer la rénovation énergétique du parc immobilier. De même, l'action 01 « Rénovation énergétique » du programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance » est dotée de 683 millions d'euros de crédits de paiement pour 2024.

Réunie le mardi 14 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 98 % des réponses étaient parvenues au rapporteur spécial en ce qui concerne le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

I. LA DIMINUTION DES RECETTES DU CAS « GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT » SE POURSUIT, AFFECTANT À TERME SA SOUTENABILITÉ FINANCIÈRE

A. UN OBJECTIF DE RATIONALISATION DE LA GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT

Créé par la loi de finances pour 20062(*), le compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » est l'instrument budgétaire de la politique immobilière de l'État. Placé sous la responsabilité de la direction de l'immobilier de l'État (DIE), il vise à financer les opérations de valorisation et la modernisation du parc immobilier de l'État en recourant, prioritairement, à la cession d'actifs.

Le compte d'affectation spéciale se compose de deux programmes :

- le programme 721 « Contribution des cessions immobilières au désendettement de l'État » porte la contribution du compte au désendettement de l'État. Cependant, ce programme n'est plus abondé depuis 20183(*) ;

- le programme 723 « Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État » porte les crédits destinés à financer les dépenses d'entretien à la charge du propriétaire, ainsi que les opérations immobilières structurantes réalisées sur le parc immobilier de l'État.

Conçu dans un objectif de rationalisation de la gestion, le fonctionnement du CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » est régi par des règles spécifiques, notamment en termes d'affectation des recettes, qui le distingue d'une mission budgétaire classique.

Le principe de mutualisation des recettes, fondement du fonctionnement du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État »

Les produits des cessions, qui constituent la principale ressource du compte, sont répartis à égalité entre les anciens ministères occupants et le compte d'affectation spéciale.

Cette répartition, qui connaît cependant plusieurs exceptions, vise ainsi à assurer une mutualisation minimale des recettes au profit des dépenses d'entretien du propriétaire financées par le CAS, tout en intéressant les ministères à la rationalisation de leurs emprises.

Source : commission des finances du Sénat

Évolution des dépenses et des recettes du CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » entre 2023 et 2024

(en millions d'euros et en %)

   

LFI 2023

PLF 2024

Part de l'action
dans le programme

Évolution 2023/2024

Dépenses

[721] Contribution des cessions immobilières au désendettement de l'État

0

0

 

-

[723] Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État

AE

480

340

 

- 29,17 %

CP

340

340

 

-

11 - Opérations structurantes et cessions

AE

310

140

41,18 %

- 54,84 %

CP

170

140

41,18 %

- 17,65 %

12 - Contrôles règlementaires, audits, expertises et diagnostics

AE

16

15

4,41 %

- 6,25 %

CP

19

17

5,00 %

- 10,53 %

13 - Maintenance à la charge du propriétaire

AE

51

48

14,12 %

- 5,88 %

CP

45

45

13,24 %

-

14 - Gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état

AE

103

137

40,29 %

+ 33,01 %

CP

106

138

40,59 %

+ 30,19 %

Total des dépenses

AE

480

340

 

- 29,17 %

CP

340

340

 

-

 

Recettes

Produits des cessions immobilières

370

230

 

- 37,84 %

Produits de redevances domaniales

110

110

 

-

Total des recettes

480

340

 

- 29,17 %

 

Solde

140

-

 

- 100 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

B. UNE TRAJECTOIRE DE RECETTES DÉCLINANTE

1. Une nouvelle diminution prévue pour 2024

Pour 2024, les recettes du CAS s'élèveraient à 340 millions d'euros, en baisse de 30 % par rapport à 2023 (480 millions d'euros), comprenant :

- 210 millions d'euros au titre du produit des cessions de biens immobiliers de l'État ainsi que des droits à caractère immobilier attachés aux immeubles de l'État (350 millions d'euros en 2023, soit une baisse de 40 %) ;

110 millions d'euros au titre du produit des redevances domaniales ou des loyers perçus par l'État (même montant qu'en 2023) ;

20 millions d'euros au titre des fonds de concours et versements du budget général (même montant qu'en 2023).

Afin de compenser la diminution structurelle des produits de cession, le CAS bénéficie depuis 2017 d'une partie des redevances domaniales ou des loyers perçus par l'État. Ces redevances proviennent des concessions ou des autorisations de toute nature de la compétence du représentant du ministre chargé du budget dans le département, des concessions de logement dont l'État est propriétaire ou locataire et des locations d'immeubles de son domaine privé, ainsi que des redevances et loyers du domaine public et privé dont le ministre des armées est le gestionnaire.

Les redevances domaniales rapporteraient 110 millions d'euros en 2023, 2024, 2025 et 2026, contre 90 millions d'euros en 2022. Au regard du niveau de redevances enregistré en juillet 2023, de 67,4 millions d'euros, on peut anticiper une exécution correcte de ces recettes. Ces redevances se composent essentiellement des loyers et charges du parc immobilier détenu par l'État, pour 24,2 millions d'euros, et des concessions délivrées sur le domaine public, pour 34,2 millions d'euros4(*).

2. Une répartition encore déséquilibrée entre produits de cessions immobilières et produits de redevances domaniales

Deux tiers des recettes du CAS en 2024 seraient constitués des produits de cessions immobilières, contre plus de trois quarts en 2023.

La part prédominante des produits de cession reste une source de vulnérabilité pour le CAS : en effet, en finançant les dépenses du CAS par ces produits de cession, une érosion excessive du patrimoine immobilier de l'État pourrait survenir, qui nourrirait encore davantage l'attrition des recettes du CAS et les entraînerait dans une spirale baissière.

Au 10 août 2023, 384 biens ont été cédés depuis le 1er janvier 2023. Le montant total des produits de cessions (somme des prix de vente mentionnés dans les actes de vente) s'élève à près de 156 millions d'euros. La cession de 586 biens était encore envisagée avant la fin de l'année, pour une valorisation théorique également de 156 millions d'euros. La réalisation du reste à céder avant la fin de l'année ne permettra pas d'atteindre l'objectif de cessions fixé en LFI, à 350 millions d'euros5(*).

De fait, la sous-exécution observée en 2023 révèle les risques d'une trop grande dépendance des recettes du CAS aux produits de cessions immobilières. En effet, l'écart constaté avec les prévisions de cessions fixées en LFI s'explique en partie par les conséquences conjoncturelles du contexte international sur l'immobilier de l'État.

Ainsi, la hausse tendancielle des coûts et la tension croissante sur le marché du bâtiment et de l'immobilier de bureaux ont un fort impact sur le pilotage des opérations immobilières. La progression constante des taux d'intérêt depuis un an et demi contribue également au ralentissement du marché immobilier.

Répartition des biens cédés par l'État, par ministère occupant,
depuis le 1er janvier 2023

(en unités et en euros)

Ministère

Nombre de biens cédés

Somme des prix de vente

Écologie

182

19 433 632

Économie

7

2 205 102

Biens non affectés

82

12 893 025

Armées

17

5 948 044

Budget

24

12 389 991

Intérieur

10

2 649 735

Affaires étrangères

1

422 200

Agriculture

42

6 248 027

Justice

5

1 173 211

Enseignement supérieur

5

13 022 256

Logement

2

1 316 340

Travail

2

566 309

Culture

4

77 592 022

Santé

1

60 200

Total général

384

155 920 994,00

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Répartition des biens cédés par l'État, par nature de bien,
depuis le 1er janvier 2023

(en unités et en euros)

Ministère

Nombre de biens cédés

Somme des prix de vente

Terrains

214

11 008 179

Logement

85

23 236 989

Bureau

29

91 297 056

Infrastructures

36

4 790 603

Locaux d'activité

20

25 587 267

Total général

384

155 920 994

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Prévues à l'origine pour compenser l'intégration des dépenses du programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État » au sein du compte d'affectation spéciale, les redevances domaniales représentent, par contraste avec les produits de cessions immobilières, une part stabilisante des recettes du CAS sans pour autant être suffisantes pour assurer la pérennité du modèle du compte d'affectation spéciale.

À cet égard, la DIE mène une politique de dynamisation des redevances de manière à valoriser le Domaine de l'État. Cette dynamisation constitue un enjeu majeur pour assurer la préservation des intérêts financiers de l'État et la valorisation de son patrimoine immobilier.

La politique de dynamisation des redevances s'est ainsi traduite par les initiatives suivantes :

- un travail d'accompagnement des gestionnaires du Domaine par la DIE et de mutualisation des bonnes pratiques, qui a nécessité la mobilisation et la collaboration de l'ensemble des acteurs intéressés, avec la DIE et le réseau des services locaux du Domaine ;

- la mise en place, en avril 2018, d'une nomenclature-barème dénommée « AMBRE » (Aide à la modernisation des barèmes portant sur les redevances de l'État), permettant la fixation de montants dynamiques de redevances domaniales qui prennent en compte les avantages de toutes natures que procure le bien ;

l'organisation annuelle d'une réunion à l'échelon régional entre les services locaux du Domaine et les gestionnaires du Domaine, pour renforcer les relations entre les divers acteurs, en particulier dans le cadre de la mise en oeuvre de l'ordonnance du 19 avril 2017 qui a porté notamment sur l'occupation privative du Domaine public ;

- une meilleure valorisation des points hauts, à l'image des antennes de téléphonie mobile, qui s'articule avec les engagements du Gouvernement en faveur d'une meilleure couverture numérique des territoires.

Par ailleurs, la DIE a ouvert au public en juin 2021 un nouveau service, le site des locations immobilières de l'État, afin d'optimiser et de moderniser l'activité de location des biens immobiliers de l'État et de ses établissements publics. En facilitant la consultation des annonces par le public, ce site permet aux services de l'État et aux établissements publics nationaux de mettre en oeuvre les mesures de publicité et de sélection préalables à la délivrance des titres d'occupation du domaine, de manière alternative ou complémentaire aux autres mesures de publicité.

La version 3 du site des locations qui a été déployée en mars 2023 offre désormais la possibilité aux candidats à l'occupation du domaine d'effectuer leur candidature directement en ligne et aux gestionnaires d'effectuer le suivi de celles-ci également en ligne.

Page d'accueil du site des locations immobilières de l'État

Source : site des locations immobilières de l'État

Le développement de l'énergie solaire est un autre axe de valorisation sur des terrains devenus inutiles. À ce titre, le ministère des armées met en oeuvre de nombreux projets sur l'ensemble du territoire national dans le cadre du plan gouvernemental « Place au soleil ». Parallèlement, la mise en place et l'essor d'AGILE6(*) a également pour objectif de développer, pour le compte de l'État, la production d'énergie solaire sur les sites de l'État via l'installation de panneaux photovoltaïques, autant pour valoriser le Domaine que pour contribuer à la transition énergétique.

La DIE a également conçu l'application informatique Figaro, déployée en juin 2022 et raccordée à Chorus, qui sécurise et fiabilise le circuit de recouvrement des redevances grâce à son intégration au système d'information financière de l'État.

Enfin, un processus de revue d'actifs permet de réaliser au minimum deux fois par an une analyse dynamique du patrimoine par les responsables régionaux de la politique immobilière de l'État. Selon la DIE, tous les actifs remis au domaine feraient ainsi l'objet d'une réflexion approfondie sur leur devenir, en envisageant le cas échéant une cession, une mise en location ou un changement de gestionnaire.

Si cette démarche de redynamisation des redevances est louable, sa portée demeure encore limitée au regard du total des crédits du CAS, les redevances représentant seulement un tiers des recettes.

De même, le recours aux baux emphytéotiques pourrait être encore développé. Ces baux, qui constituent des cessions de droits immobiliers pour une durée comprise entre 18 et 99 ans, permettent de préserver le droit de propriété de l'État, sur la parcelle louée comme sur les immeubles éventuellement édifiés par le preneur. À titre d'illustration, en 2022, sur la commune de Langon, un bail emphytéotique a été conclu entre l'État et la société Airbus SAS pour une durée de 18 ans, moyennant une redevance annuelle de 27 000 euros.

Si cette pratique présente l'avantage de concilier l'impératif de dégager des recettes à travers les produits de cession de droits immobiliers et celui de conserver, pour l'État, ses biens emblématiques, la diminution tendancielle du nombre des baux emphytéotiques conclus par l'État, de 761 fin 2020 à 746 fin 2022, devrait appeler une réflexion stratégique sur la durée optimale de ces baux.

3. Un système de décote qui représente un effort financier conséquent pour le CAS

Les recettes des produits de cession peuvent par ailleurs être affectées par le système de décote qui s'applique sur la cession de certains biens du patrimoine immobilier de l'État en vue de favoriser la construction de logements, notamment de logements sociaux. Entre 2009 et 2023, ce système a représenté, pour l'État, un effort financier de 311 millions d'euros7(*).

Le système de la décote sur les cessions des biens de l'État

Ce système comprend en réalité deux mécanismes :

- aux termes de l'article 95 de la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, l'État peut céder un terrain de son domaine privé, bâti ou non, pour un prix inférieur à sa valeur vénale afin de favoriser la production de logements. La part de la décote, qui peut atteindre l'intégralité de la valeur vénale du bien, est négociée de gré à gré ;

- à ce principe général s'ajoute une décote « de droit ». En effet, conformément au dispositif dit de « décote Duflot », introduit par la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, des personnes morales peuvent bénéficier de la décote sur certains terrains éligibles, à condition qu'y soient réalisés des programmes de construction de logements sociaux. Cette décote est toutefois plafonnée en fonction du coût moyen du logement social lorsque les personnes publiques disposent de réserves foncières ou de biens susceptibles d'accueillir un programme de logements sociaux, en vertu du décret n° 2019-1460 du 26 décembre 2019. Aucune vente jusqu'ici n'étant entrée dans le dispositif de plafonnement de la décote, il n'est pas encore possible d'en dresser le bilan.

Source : Cour des comptes, réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Pour limiter le coût pour l'État et le détournement de cette procédure, le Parlement a voté en 20198(*) un mécanisme de plafonnement, précisé par décret9(*), et soutenu par le rapporteur spécial.

Ainsi, l'article R 3211-32-7 au code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) fixe un plafond du taux de décote en fonction du coût moyen du logement social, lorsqu'une collectivité territoriale, un établissement public ou encore une société dispose de réserves foncières ou de biens susceptibles d'accueillir un programme de logements sociaux, pour une surface de plancher au moins égale à celle du programme prévu par le demandeur.

Cependant, d'après les réponses de la DIE, ce dispositif visant à éviter pour l'État de subventionner de manière disproportionnée la construction de logements sociaux n'aurait pas encore été mis en oeuvre, ce qui interroge quant à son caractère opérationnel.

C. LA DIMINUTION DES DÉPENSES RELATIVES AUX OPÉRATIONS STRUCTURANTES ET AUX CESSIONS EST PARTIELLEMENT COMPENSÉE PAR L'AUGMENTATION BIENVENUE DES DÉPENSES DE GROS ENTRETIEN ET ASSIMILÉS

Dans le projet de loi de finances pour 2024, les prévisions de recettes (340 millions d'euros) diminuent nettement, de 29,2 %, revenant à quasiment à leur niveau de 2021 (333 millions d'euros), après deux années de forte croissance (à 370 millions d'euros en 2022 et 480 millions d'euros en 2023).

Suivant strictement l'évolution des recettes, les dépenses connaissent également une baisse de 29,2 % en autorisations d'engagement, pour atteindre 340 millions d'euros.

Dans ce contexte, le solde du CAS serait à l'équilibre en 2024, contre un excédent de 140 millions d'euros en LFI pour 2023 et un déficit de 46 millions en LFI pour 2022.

1. Des dépenses d'entretien qui continuent d'augmenter conformément à la stratégie immobilière de l'État

L'action 14 « Gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état » connaît en 2024 une hausse significative, de 33,01 % en autorisations d'engagement (AE), avec 137 millions d'euros, et de 30,19 % en crédits de paiement, avec 138 millions d'euros. Désormais, plus de 40 % des crédits de paiement du CAS seraient dévolus à cette action, soit un niveau nettement supérieur à celui constaté au cours des dernières années (31,2 % en 2023, 21,6 % en 2022 et 35 % en 2021).

Plus encore, les autorisations d'engagement correspondant à cette action dépassent également la barre des 40 %, soit un doublement par rapport à la proportion de 2023 (21,5 %), ce qui devrait empêcher la proportion en crédits de paiement de diminuer trop fortement dans les prochaines années.

Alors que le précédent rapporteur spécial préconisait le respect d'une cible de 30 % de crédits consacrés à l'action 14 afin d'éviter la dépréciation des biens et de continuer à valoriser le patrimoine immobilier de l'État, il convient donc de se féliciter de cette évolution.

Ce résultat s'inscrit dans une stratégie délibérée de la direction de l'immobilier de l'État (DIE), qui s'était fixée comme cible de maintenir l'ensemble des dépenses d'entretien à la charge du propriétaire, portées par les actions 12 à 14, au niveau de 160 millions d'euros10(*), et même de les augmenter à 200 millions d'euros à l'horizon 202711(*). La cible de 200 millions d'euros consacrés à ces dépenses d'entretien sera donc atteinte en 2024.

La stratégie de la DIE en matière d'entretien à la charge du propriétaire

La stratégie poursuivie par la DIE dans le cadre du programme 723 en matière d'entretien à la charge du propriétaire s'articule autour de trois axes complémentaires dans un souci de gestion efficace et économe du parc immobilier et d'exemplarité :

- développer la maintenance préventive des bâtiments, source d'économies sur le long terme, assurer la réalisation des contrôles réglementaires ;

- financer des travaux lourds et en particulier de remise en état et en conformité, notamment lorsque les exigences de sécurité liées aux bâtiments accueillant des publics ou aux conditions de vie au travail des agents l'imposent ;

- contribuer à la transition écologique en finançant des opérations conduisant à une meilleure maîtrise de la consommation énergétique.

Dans ce contexte, la DIE joue un double rôle :

- en sa qualité de représentant de l'État propriétaire, la DIE renforce, grâce aux schémas de stratégie immobilière, sa politique d'incitation auprès des services de l'État et des opérateurs, pour que les dépenses d'entretien soient maintenues à un bon niveau. La DIE poursuit ses travaux de sensibilisation des occupants à cette nécessité dans le cadre de la CNIP. Un objectif clé des conférences immobilières est de veiller à ce que la programmation budgétaire intègre bien cette nature de dépense et que l'exécution budgétaire soit conforme à la prévision ;

- en sa qualité de responsable du programme 723, la DIE entend préserver les crédits consacrés aux dépenses d'entretien du propriétaire. Elle rappelle régulièrement aux responsables de BOP, et principalement dans sa note de programmation annuelle, que la programmation des opérations financées par le CAS immobilier doit privilégier les opérations d'entretien relevant du propriétaire. Même si le CAS ne couvre pas l'ensemble des financements nécessaires à l'entretien du propriétaire, conduisant ainsi à recourir à d'autres programmes du budget général, le montant global disponible constitue un levier significatif pour orienter les actions de maintenance et d'adaptation du parc domanial.

Dans ces conditions, l'enveloppe destinée à l'entretien du propriétaire est généralement mise à la disposition des RBOP dès le début de l'exercice afin de leur permettre d'engager rapidement leurs opérations d'entretien.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Évolution des crédits destinés à couvrir les dépenses d'entretien du propriétaire sur la période 2022-2024

(en millions d'euros)

 

2022

2023

2024

 

LFI

(hors ministère des armées)

Exécution

(y compris ministère des armées)

LFI

Exécution provisoire au 31 août 2023

(y compris ministère des armées)

PLF

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

12 - Contrôles réglementaires, audits, expertises et diagnostics

21,9

21,9

15,7

14,9

16,0

19,0

8,0

7,0

15,0

17,0

13 - Maintenance à la charge du propriétaire

44,1

43,1

50,9

49,7

51,0

45,0

35,2

28,6

48,0

45,0

14 - Gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état

89,6

90,6

196,8

132,2

103,0

106,0

54,5

96,3

137,0

138,0

Total

155,6

155,6

263,4

196,8

170,0

170,0

97,7

131,9

200,0

200,0

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

2. Un nouveau reflux significatif des opérations structurantes

L'action 11 « Opérations structurantes et cessions » connait une baisse drastique de 54,84 % en autorisations d'engagement et une diminution, plus modérée mais notable, de 17,65 % en crédits de paiement, pour représenter un montant de 140 millions d'euros (en AE comme en CP). Cette évolution fait suite à la forte augmentation de 47,6 % en autorisations d'engagement observée en 2023.

Ces opérations, qui visent à augmenter la valeur vénale des bâtiments concernés par rapport à son niveau initial, recouvrent notamment :

- les projets immobiliers : acquisitions, travaux d'amélioration, de restructuration ou d'agrandissement et, plus largement, tous ceux qui visent, par des modifications structurelles, à en améliorer le potentiel de service ;

- les frais accessoires directement liés à la cession d'un bien : organisation matérielle, expertises techniques, honoraires, etc.

Les principales opérations structurantes prévues pour 2024

Les principales opérations à financer sur l'action 11 « Opérations structurantes et cessions » en autorisations d'engagement sont, comme en 2023, les suivantes, pour un montant total de 120 millions d'euros :

le projet Quai d'Orsay XXI du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ;

le projet de Saint-Mandé mené par le ministère de la transition écologique.

Source : documents budgétaires et réponses de la direction de l'immobilier de l'État aux questions du rapporteur spécial

II. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT » NE JOUE PAS LE RÔLE DE DYNAMISATION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L'ÉTAT QUI LUI AVAIT ÉTÉ ASSIGNÉ À SA CRÉATION

Alors que le CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » a été conçu pour donner une impulsion à une politique immobilière de l'État particulièrement fragmentée (une soixantaine de programmes concourant à cette politique), il connaît une marginalisation croissante.

L'examen de ce compte lors du projet de loi de finances ne présente donc qu'une image incomplète et sans réelle pertinence de la politique immobilière de l'État. Dans ce contexte, on ne peut que se poser la question de l'utilité du CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », et par là même de son existence.

A. DES MASSES FINANCIÈRES MINIMES PAR RAPPORT À L'ENSEMBLE DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L'ÉTAT

Conformément à un constat récurrent, les moyens du CAS pour mener la politique immobilière de l'État sont très limités au regard de l'étendue du parc immobilier de l'État.

Au 31 décembre 2022, l'État et ses établissements publics occupaient un patrimoine immobilier de 94 millions de mètres carrés de surface bâtie (« surface utile brute »), dont 23 millions de mètres carrés de bureaux, 18 millions de mètres carrés de logements et 20 millions de mètres carrés pour les établissements d'enseignement, ainsi que 40 000 kilomètres carrés de terrains non bâtis.

La valeur comptable de ce patrimoine immobilier est estimée à 73,3 milliards d'euros, soit une hausse notable par rapport à la fin de l'année 2019 (+ 7,6 milliards d'euros, soit une hausse de 8 %).

Cette hausse s'explique moins par l'augmentation de la surface que par des réévaluations du patrimoine, dues à une correction d'évaluations initiales s'expliquant souvent par la prise en compte des travaux effectués sur la valeur des biens.

En 2022, l'évolution de la valeur des biens contrôlés par l'État découle principalement de deux réévaluations, d'une part celle du parc des bureaux et logements à 10 %, d'autre part celle du parc pénitentiaire pour 1,180 milliard d'euros avec la mise en service de travaux sur deux sites.

Ainsi, au regard de ce patrimoine très étendu, le CAS « Gestion du patrimoine de l'immobilier de l'État » représente un instrument marginal, un support d'appoint pour la politique immobilière de l'État.

Ainsi, selon le document de politique transversale relatif à la politique immobilière de l'État, le compte d'affectation spéciale ne représente qu'une part infime des crédits de l'État consacrés à l'immobilier : l'effort d'investissement supporté par le CAS représente seulement en moyenne annuelle 13 % des dépenses d'investissement de l'État sur la période 2012-2022.

Part du CAS dans l'effort d'investissement immobilier de l'État

(en millions d'euros et en %)

Investissement (décaissements)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

CAS

293

228

346

314

212

143

278

233

309

234

180

Total investissements de l'État

1 629

1 556

1 613

1 667

1 669

1 795

1 763

1 886

1 934

2 226

3 119

Proportion du CAS

18 %

15 %

21 %

19 %

13 %

8 %

10 %

12 %

16 %

9 %

6 %

Source : document de politique transversale « Politique immobilière de l'État »

B. UN INSTRUMENT CONTOURNÉ ET CONCURRENCÉ

1. Le CAS demeure contourné dans son fonctionnement

Les entités ou ministères occupants ne sont censés pouvoir exercer leurs droits de tirage sur le CAS qu'en contrepartie de la mutualisation de produits de cession. Il est cependant parfois choisi, en accord avec les ministères concernés et le ministère du budget, de ne pas mutualiser tous les produits de cession.

La liste de ces dérogations, qui fragmentent l'action de l'État propriétaire, est longue, et leur impact est néfaste à la politique immobilière de l'État. En particulier, l'absence de mutualisation obère la capacité à mutualiser d'autres financements au profit de la communauté interministérielle, et les dérogations conduisent parfois leurs bénéficiaires à demander des compensations financières pour les biens qu'ils occupaient et qui sont réemployés pour d'autres missions, sans être cédés. Certains projets immobiliers sont ralentis afin de résoudre ce type de difficultés.

Le deuxième processus conduisant à contourner les règles du CAS résulte de l'octroi d'avances. Il s'agit d'éviter de retarder le démarrage de certaines opérations, en octroyant des avances sur les droits de tirage aux entités ou ministère n'en disposant pas assez au moment du lancement desdites opérations.

Le montant net des avances consenties par le CAS s'élevait ainsi à 326 millions d'euros en juin 2023.

2. D'autres vecteurs budgétaires portent la politique immobilière de l'État, pour des montants bien supérieurs à ceux du CAS

Les recettes du CAS sont loin d'être suffisantes pour couvrir l'ensemble des besoins du parc immobilier de l'État. Ses principes de fonctionnement font également obstacle au lancement, par ce vecteur budgétaire historique, de grands projets structurels pour le patrimoine immobilier de l'État. Le Gouvernement a donc procédé par d'autres moyens, comme l'illustrent le programme 348 et le plan de relance.

a) Le programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » de la mission « Transformation et fonction publiques »

La direction de l'immobilier de l'État est responsable du programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » de la mission « Transformation et fonction publiques ».

Initialement destiné à financer la rénovation des sites occupés par plusieurs services de l'État et de ses opérateurs (les « cités administratives »), ce programme a été doté depuis 2023 de financements complémentaires pour mener à bien les opérations du plan de sobriété énergétique, au titre de l'action « Résilience ». Ce programme d'investissement vise à moderniser les bâtiments publics en réhabilitant le parc existant, notamment pour diminuer les consommations d'énergies et en investissant sur des travaux ciblés sur la performance énergétique et sur l'évolution des modes de travail. L'État compte 56 cités administratives dans son réseau déconcentré dont 36 bénéficiaires du programme de rénovation. En 2024, le programme 348 devrait bénéficier de 550 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 300 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires pour accélérer la rénovation énergétique du parc immobilier.

Le choix de recourir à un programme indépendant du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » s'expliquerait par les contraintes fortes pesant sur l'ouverture de crédits sur le CAS. Pour rappel, les dépenses du CAS ne sont normalement engagées qu'à hauteur des recettes issues des produits de cession et des redevances domaniales. Cependant, cette solution conduit à un nouvel éclatement de la politique immobilière de l'État, affectant ainsi son suivi, son contrôle et sa performance.

b) L'action 01 « Rénovation énergétique » du programme 362 « Écologie » de la mission « Plan de relance »

Dans le cadre de la mission « Plan du relance », qui a été introduite dans le projet de loi de finances pour 2021, une nouvelle action, l'action 01 « Rénovation énergétique » du programme 362 « Écologie », a été créée pour porter un plan de plus de 6,29 milliards d'euros pour la rénovation énergétique, dont 4 milliards d'euros pour celle des bâtiments publics. En 2021, 2,86 milliards d'euros de crédits de paiement ont été ouverts sur cette action, 1,51 milliard d'euros en 2022 et 983 millions d'euros en 2023.

Dans le projet de loi de finances pour 2024, l'action 01 « Rénovation énergétique » comprend 683 millions d'euros de crédits de paiement.

En conclusion, le CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » n'est, dans son état actuel, ni nécessaire ni suffisant pour porter les grands projets immobiliers de l'État. S'il n'apparaît plus aujourd'hui comme l'instrument principal de la politique immobilière de l'État, son modèle pourrait cependant faire l'objet d'une révision salutaire dans le futur.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

En première lecture à l'Assemblée nationale, les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » n'ont pas été modifiés par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 14 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de M. Claude Nougein, rapporteur spécial, sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

M. Claude Raynal, président. - Nous en venons au compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

M. Claude Nougein, rapporteur spécial. - Placé sous la responsabilité de la direction de l'immobilier de l'État (DIE), ce CAS vise à financer les opérations de valorisation et la modernisation du parc immobilier de l'État en recourant, prioritairement, à la cession d'actifs. Les crédits du CAS sont concentrés sur le programme 723 « Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État », qui porte les dépenses d'entretien à la charge du propriétaire, ainsi que les opérations immobilières structurantes réalisées sur le parc immobilier de l'État. En revanche, le programme 721 « Contribution des cessions immobilières au désendettement de l'État » n'est plus abondé depuis 2018.

Les crédits du CAS s'élèveront en 2024 à 340 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, soit une diminution de 29,17 % par rapport à 2023. Avec des recettes également attendues à hauteur de 340 millions d'euros, marquée par une diminution de 40 % des produits de cession - 210 millions d'euros en 2024, contre 350 millions d'euros en 2023 -, le solde du compte serait à l'équilibre.

Au 31 décembre 2022, l'État et ses établissements publics occupaient un patrimoine immobilier de 94 millions de mètres carrés de surface bâtie. La valeur comptable de ces actifs est estimée à 73,3 milliards d'euros. Au regard de ce patrimoine très étendu, ce CAS représente un outil marginal, équivalent à seulement 13 % des dépenses immobilières d'investissement de l'État en moyenne annuelle sur la période 2012-2022.

En effet, le CAS demeure un instrument contourné et concurrencé. Alors que les entités ou ministères occupants ne sont censés pouvoir exercer leurs droits de tirage sur le CAS qu'en contrepartie de la mutualisation de produits de cession, certains ministères ou projets disposent de dérogations. D'autres bénéficient d'avances sur cession, dont le montant net s'élevait à 326 millions d'euros en juin 2023. Par ailleurs, la faiblesse des recettes du CAS conduit à sa marginalisation au profit d'autres vecteurs budgétaires. Ainsi que je l'ai rappelé dans ma présentation des crédits de la mission « Transformation et fonction publiques », le programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » devrait bénéficier en 2024 de 550 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 300 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires pour accélérer la rénovation énergétique du parc immobilier.

Je vous propose d'adopter les crédits de cette mission.

M. Olivier Paccaud. - Il n'y a plus beaucoup de cessions. Dans mon département, des sous-préfectures sont effectivement devenues désertiques. À l'inverse, des entreprises cherchent des locaux. Une réflexion est-elle menée sur des locations pour les acteurs économiques ?

M. Michel Canévet. - Comment évolue le patrimoine global de l'État ? Il est évalué à 94 millions de mètres carrés. Augmente-t-il ou diminue-t-il ? Le télétravail permet-il d'optimiser le patrimoine de l'État ? Et qu'en est-il des opérateurs de l'État ? On sait que ceux-ci ont un patrimoine important. La direction de l'immobilier de l'État veille-t-elle à faire respecter les règles en cette matière, comme la règle de 12 mètres carrés pour un bureau ?

M. Claude Nougein, rapporteur spécial. - Monsieur Paccaud, il existe parfois des baux à long terme, des baux emphytéotiques, pour une durée comprise entre 18 et 99 ans, mais ces locations sont peu nombreuses. On constate même une diminution tendancielle du nombre des baux emphytéotiques conclus par l'État, de 761 fin 2020 à 746 fin 2022. Plutôt que de mettre en location les biens dont il est propriétaire, l'État préfère donc céder ses bâtiments, on l'a vu pour les casernes. Nombre d'entre elles ont été transformées, parfois en bâtiments publics, mais également au profit du secteur privé. Le problème principal de ces cessions d'actifs concerne Paris, car la Mairie de Paris préempte les immeubles pour des sommes très modestes, notamment pour en faire des logements sociaux.

Monsieur Canévet, l'État et ses établissements publics occupent 94 millions de mètres carrés de surface bâtie, un nombre globalement stable sur les trois dernières années, dont 23 millions de mètres carrés de bureaux. Cela reste beaucoup trop. Les entreprises ont d'ailleurs diminué leur superficie de bureaux avec l'informatisation, le télétravail. Ces 94 millions de mètres carrés sont évalués à 73 milliards d'euros, mais cette estimation est-elle correcte ? Les prix de l'immobilier ne sont évidemment pas les mêmes à Paris et en province. Il y a une réflexion à mener sur la valorisation du parc.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du compte d'affectation spéciale «Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 23 novembre 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé sa décision.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction de l'immobilier de l'État

- M. Alain RESPLANDY-BERNARD, directeur.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2024.html


* 1 Article 47 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 2 Article 47 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 3 Il ne peut pas être supprimé, car l'article 7 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) impose qu'un compte d'affectation spéciale comporte au moins deux programmes.

* 4 Documents budgétaires et réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 5 370 millions d'euros en incluant les fonds de concours et versements du budget général.

* 6 Agence de l'Immobilier de l'État, société anonyme dont le capital est entièrement détenu par l'État.

* 7 Réponses de la DIE au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 8 Article 274 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 9 Décret n° 2019-1460 du 26 décembre 2019 relatif au plafonnement de la décote prévue à l'article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 10 Comme cela est précisé dans le document de politique transversale sur la politique immobilière de l'État.

* 11 Réponse de la direction de l'immobilier de l'État au questionnaire du rapporteur spécial.

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