III. DES PROGRAMMES ÉPHÉMÈRES QUI INTERROGENT QUANT AUX INTENTIONS DU GOUVERNEMENT ET AUX AMBITIONS DÉVOLUES À LA MISSION « SANTÉ »

A. LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE : QUEL RESPECT DES DÉCISIONS DU PARLEMENT ?

Créé à l'occasion de la loi du 16 août 2022 de finances rectificatives pour 202221(*) aux fins de lutter contre la fraude aux prestations sociale par le développement d'une solution d'identification des assurés sociaux par la biométrie, le programme 378 « Carte Vitale biométrique » n'a été que faiblement exécuté avant sa disparition, le Gouvernement n'ayant pas daigné faire prospérer le dispositif.

Initialement doté de 20 millions d'euros en AE et en CP, le programme 378 a fait l'objet d'une exécution que le rapporteur spécial d'alors avait qualifié de « peu soucieuse des prérogatives parlementaires22(*). » En effet, les crédits ouverts au titre de ce nouveau programme n'ont été exécutés qu'à hauteur de 4,3 millions d'euros.

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2023, le texte initial ne comprenait plus le programme 378. Réintroduit par le Sénat contre l'avis du Gouvernement, qui s'y était opposé en indiquant qu'une mission de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) était en cours, il n'a pas été retenu lors de l'engagement de la responsabilité du Gouvernement en lecture définitive.

Faisant suite à ces débats, un rapport conjoint de l'Inspection générale des finances (IGF) et de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) a été demandé par le Gouvernement. Remis en avril 2023, ce rapport a considéré que la mise en oeuvre d'une solution biométrique intégrée à la carte Vitale serait onéreuse (925 millions d'euros) et difficile à mettre en oeuvre. Pour les inspections, il existe des solutions alternatives à la biométrie afin d'atteindre les objectifs fixés :

- l'Application carte Vitale (ApCV), en cours de développement, offre la possibilité de disposer d'une version dématérialisée de la carte Vitale sur un smartphone. Elle permettrait aux usagers de suivre leurs dépenses ; quant aux professionnels de santé et à l'assurance maladie, elle leur permet de facturer plus facilement. L'assurance maladie prévoit à terme un large déploiement de ce dispositif. Dans ce cadre, un enrôlement biométrique, par reconnaissance faciale, est prévu pour activer l'application et garantir la cohérence entre l'identité de l'assuré et l'utilisateur du smartphone.

- l'inscription du numéro de sécurité sociale sur la carte d'identité électronique (CNIe), qui est également à l'étude, y compris dans le « plan fraude » du ministre des Comptes publics. Cette option présente plusieurs avantages, bien que la direction de la sécurité sociale ait informé le rapporteur des potentielles difficultés pratiques que soulèverait sa mise en oeuvre.

Désireux de réaffirmer la volonté du Sénat que soient utilisés les crédits ouverts en 2022 tout en prévoyant une solution qui puisse être utile à l'administration dans le développement d'une réponse commune contre les fraudes, le rapporteur a souhaité proposer une nouvelle fois la création d'un programme dédié.

Ne reste plus, pour le Gouvernement qu'à s'emparer de cette opportunité de faire progresser l'effort de lutte contre les fraudes.


* 21 Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

* 22 M. Christian Klinger, Rapport n° 771 (2022-2023), Annexe n° 28, 28 juin 2023.

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