C. LE SERVICE CIVIQUE, POLITIQUE MAJEURE DE LA JEUNESSE, NE DOIT PAS TOMBER DANS L'OUBLI

518,8 millions d'euros sont consacrés au développement du service civique pour 2024. Cette somme est, à l'euro près, celle qui lui avait déjà été dévolue en 2023. Cet ancrage du service civique comme un dispositif clé des politiques à destination de la jeunesse témoigne de son succès, treize ans après sa création et huit ans après son universalisation décidée par l'ancien Président de la République, François Hollande, dans le contexte des attentats terroristes du 13 novembre 2015.

Cette stabilité des crédits inscrits dans le programme 163 cache toutefois une baisse tendancielle des crédits consacrés au service civique à partir de la fin du plan de relance.

La mission « Plan de relance » avait en effet accordé 201 millions d'euros au service civique en 2022, ce qui portait le montant total des crédits finançant le service civique à 699,8 millions d'euros cette année. En comparaison de ce dernier chiffre, les 518,8 millions d'euros inscrits dans la loi de finances initiale pour 2023 et dans le projet de loi de finances pour 2024 représentent une diminution de 25,8 % des crédits pour le service civique.

Les années précédentes, le rapporteur spécial avait exprimé des critiques sur le recours au service civique dans le cadre du plan de relance. Le service civique est d'abord une politique d'engagement de la jeunesse, et le mobiliser dans un objectif de relance économique ouvrait le risque de le transformer en un traitement social du chômage des jeunes.

Outre cette réserve, le rapporteur spécial mettait également en doute la capacité de créer sur un temps aussi court le nombre de missions nécessaires pour répondre aux cibles du nombre de jeunes effectuant une mission de service civique. Les faits ont confirmé ces craintes.

Pour 2021, la cible était initialement de 245 000 volontaires effectuant un service civique, ramenée en juin 2021 à 200 000 volontaires. En fin de compte, 145 000 volontaires ont effectué un service civique en 2021. Pour 2022, la cible originelle était de 220 000 volontaires, ramenée à 147 000, et finalement, 144 000 jeunes ont réalisé un service civique cette année. En conséquence, l'Agence du service civique s'est constituée une trésorerie d'un montant très élevé (287,1 millions d'euros) à la fin de l'année 2021, en forte augmentation par rapport à la fin 2020 (69,4 millions d'euros), qui était déjà exceptionnelle.

Même si les objectifs n'ont pas été atteints, il est indéniable que le plan de relance a permis la création de nouvelles missions. La réalisation par 145 000 jeunes d'un service civique en 2021 est un record.

Toutefois, la réussite du service civique ne peut pas s'évaluer uniquement en termes quantitatifs. Il convient également de s'assurer que la création de nouvelles missions ne se fait pas au détriment de la qualité de celles-ci. Elles doivent être bien définies et encadrées, tout en représentant un engagement, ce qui signifie qu'elles ne doivent pas être un substitut à un travail étudiant.

La direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative a indiqué dans ses réponses au questionnaire budgétaire qu'une cible de 150 000 jeunes a été retenue en 2023 et en 2024.

Un objectif similaire aux résultats constatés à l'époque du plan de relance, mais avec des moyens plus restreint, pourrait étonner. L'administration précise toutefois que l'atteinte de cet objectif en 2023 et en 2024 doit être rendu possible en mobilisant la trésorerie de l'Agence du service civique. On constate en effet qu'après avoir atteint un pic en 2021, la trésorerie de l'Agence du service civique décroit de manière continue depuis, bien qu'elle reste encore très élevée.

Évolution de la trésorerie de l'Agence du service civique

(en millions d'euros)

Note : l'ensemble des chiffres sont données au 31 décembre de l'année considérées. Les chiffres pour 2023 sont prévisionnels.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Le recours à la trésorerie de l'Agence du service civique pour maintenir une cible de jeunes élevée est raisonnable.

La diminution du nombre de jeunes effectuant un service civique après le plan de relance aurait en effet été dommageable. La création de nouvelles missions de service civique implique pour les organismes d'accueil de modifier la maquette de leur activité pour intégrer au mieux le volontaire et proposer des formations adéquates. Ce processus prend du temps, et n'est pas compatible avec des variations trop importantes des objectifs du service civique. Le rapporteur spécial avait ainsi exprimé à plusieurs reprises son opposition au traitement du service civique comme une politique de « stop and go ».

Cependant, la question de l'avenir du service civique reste en suspens. Rien n'est indiqué sur la façon dont le service civique évoluera une fois que la trésorerie de l'Agence du service civique sera redescendue. L'erreur serait que les objectifs deviennent moins ambitieux, et que le service civique connaisse un retour en arrière dans son développement. Ce risque est réel sachant que les regards sont aujourd'hui tournés vers le service national universel. Au contraire, le service civique ne doit pas tomber dans l'oubli, et le rapporteur spécial rappelle qu'il a vocation à être généralisé.

Comme les années précédentes, le rapporteur spécial affirme son soutien au service civique, qui est une véritable politique d'engagement. À ce titre, il faut rappeler l'engagement du Président de la République de « poursuivre la généralisation du Service Civique qui permet à nos jeunes de compléter leur formation par un engagement citoyen reconnu, l'acquisition de compétences, ce qui là aussi vient compléter et renforcer la résilience de la Nation »27(*).


* 27 Conférence de presse du 17 mars 2022.

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