2°) La procédure suivie par la Commission

La proposition de directive qui fait l'objet de la proposition de résolution a été formulée par la Commission des Communautés sur la base de l'article 90, alinéa 3 du Traité de Rome. Votre rapporteur croit utile de rappeler les termes de cet article 90 dont l'objet consiste à prévoir un équilibre entre, d'une part, les règles de concurrence prévues au sein de la Communauté et, d'autre part, les "droits exclusifs ou spéciaux" accordés par certains Etats à certaines entreprises oeuvrant dans des secteurs économiques déterminés : entreprises publiques, monopoles publics, entreprises investies d'une mission de service public.

article 90

1. Les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques, et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles du présent traité, notamment à celles prévues aux articles 7 et 85 à 94 inclus.

2. Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles du présent traité, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté.

3. La Commission veille à l'application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions appropriées aux Etats membres.

Ainsi, comme le précise le dernier alinéa de l'article, un pouvoir de surveillance est reconnu à la commission quant à l'application des dispositions en question, qui lui permet d'adresser, "en tant que de besoin", les directives ou décisions appropriées aux Etats membres.

Ce pouvoir normatif reconnu à la Commission pose deux problèmes principaux :

- D'une part, ni le Conseil, ni le Parlement européen ne sont appelés à intervenir dans le processus d'élaboration de la directive, alors même qu'ils constituent, comme le rappelle opportunément notre collègue Jacques Oudin ( ( * )1) , "les seules instances communautaires pourvues d'une légitimité démocratique".

- D'autre part, ces directives communautaires mettent en jeu, non seulement d'importantes questions de principes -faculté de chaque pays de laisser à la puissance publique la maîtrise principale de réseaux et d'infrastructures majeurs- mais de substantiels intérêts industriels et économiques.

C'est sur la base de ce constat que le gouvernement français avait, à deux reprises, contesté devant la Cour de justice des Communautés la procédure du 90-3 suivie par la Commission.

En 1988, lorsque la Commission eut pris la directive précitée relative à la concurrence dans les marchés de terminaux de télécommunications, la France, pour des raisons de principe et non de fond, puisqu'elle avait déjà procédé à la libéralisation du secteur, fît un premier recours mais vit celui-ci rejeté par la CJCE, celle-ci considérant que "le pouvoir de surveillance confié à la Commission comporte la possibilité, fondée sur l'article 90-3, de préciser les obligations découlant du Traité. Par conséquent, l'étendue de ce pouvoir dépend de la portée des règles dont il s'agit d'assurer le respect ".

Une seconde fois, après l'adoption de la directive de 1990 relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunications, la CJCE renouvela son analyse faisant valoir que "le pouvoir de la Commission ne se limite pas à la simple surveillance de l'application des règles communautaires déjà existantes".

* (1) Rapport Sénat n° 6 (1993-1994) : rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour les Communautés européennes sur l'Europe et les services publics.

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