II. LES MOYENS D'INTERVENTION : UNE DIMINUTION QUI SE RALENTIT

Regroupés au titre IV, les moyens d'intervention représentent 57 % du budget du ministère et se montent, pour 1996, à 4,1 milliards de francs.

Ils sont essentiellement répartis en trois grandes masses :

- la coopération civile : 2,3 milliards de francs, principalement consacrés à la rémunération des coopérants,

- la coopération militaire : 0,8 milliard de francs,

- les concours financiers aux États : 1 milliard de francs.

Les crédits d'intervention sont en constante diminution depuis plusieurs années, entraînant de ce fait la baisse régulière du budget du ministère.

Pour 1996, et après adoption d'une réduction de crédits de 47 millions de francs par l'Assemblée nationale, la diminution des crédits du titre IV atteindra près de 5 %, ce qui est plutôt inférieur aux baisses enregistrées les années précédentes.

Les crédits de coopération civile passent de 2,6 à 2,3 milliards de francs, soit une diminution de 9,4 % par rapport à 1995 qui traduit la poursuite de la déflation des effectifs de coopérants.

Les crédits de coopération militaire se stabilisent au niveau de l'an passé.

Enfin, les concours financiers aux États, qui représentent le quart des crédits d'intervention, augmentent légèrement sous l'effet de la majoration des bonifications accordée par l'État aux prêts d'ajustement structurel accordés par la Caisse française de développement aux pays à revenus intermédiaires.

A. LA COOPÉRATION CIVILE : POURSUITE DE LA DÉFLATION DES EFFECTIFS DE COOPÉRANTS

Les crédits de coopération civile, pris au sens large, recouvrent les chapitres 42-23 (Actions de coopération pour le développement), 42-24 (Appui aux initiatives privées et décentralisées) et 42-26 (Transport de l'aide alimentaire).

Sur un total de 2.339,6 millions de francs (- 9,4 % par rapport à 1995), la rémunération et les frais de déplacement des coopérants civils, enseignants et techniciens, représente 1.491,5 millions de francs, auxquels il faut ajouter 114,3 millions de francs au titre de l'assistance technique de longue durée sur contrat. C'est sur ces postes qu'on enregistre pour 1996 une baisse de 260 millions de francs.

Les autres postes, d'importance moindre (bourses, appui aux organismes privés, transport de l'aide alimentaire, actions diverses de développement), connaissent une relative stabilité.

Le projet de budget pour 1996 confirme donc le rééquilibrage de notre coopération civile.

La déflation des effectifs d'assistants techniques civils a été particulièrement forte ces cinq dernières années puisque l'on est passé de près de 7.000 postes en 1990 à 3.200 à la fin de 1995 (1.800 enseignants et 1.400 techniciens), le mouvement ayant été plus accentué sur les postes d'enseignants que ceux des techniciens.

Sans remettre en cause la poursuite de la relève, il conviendrait tout de même de veiller à ce que les états partenaires soient bien en mesure d'assurer, dans de bonnes conditions, le remplacement de nos coopérants. Il ne suffit pas de former des enseignants ou des techniciens nationaux, encore faut-il qu'une fois leur formation acquise, ils demeurent dans leurs pays, dans les administrations ou services où nos coopérants exerçaient.

Il est également important que, parallèlement, les efforts soient poursuivis afin de garantir une bonne réinsertion des coopérants.

Enfin, il faut se réjouir que ce rééquilibrage de la coopération civile se traduise par un soutien accru aux organisations non gouvernementales et aux projets de coopération décentralisée.

Évolution des crédits de coopération civile

1. Le recul des crédits de l'assistance technique civile

Le ministère de la coopération a engagé depuis une dizaine d'années une réduction des effectifs de l'assistance technique afin, d'une part, de tenir compte de la relève de nos coopérants par des cadres nationaux et d'autre part, de privilégier la mise en place, sur les secteurs stratégiques, d'un petit nombre d'experts de haut niveau chargés de missions de conseil.

Après 277 suppressions de postes en 1994 et 363 en 1995, le projet de budget intègre l'effet de 294 suppressions en 1996 touchant 274 postes d'enseignants et 20 postes de techniciens.

L'article 10 du chapitre 42-23, consacré à la rémunération des coopérants, voyait ainsi, dans le projet de budget avant sa discussion à l'Assemblée nationale, sa dotation diminuer de 210 millions de francs, la hausse mécanique des rémunérations (+ 25 millions de francs) étant largement compensée par une économie de 236,7 millions de francs provenant :

- pour 96 millions de francs, de la constatation des économies résultant des suppressions de postes des années passées,

- pour 115,7 millions de francs, de la suppression des 294 postes de coopérants prévue en 1996,

- pour 25 millions de francs, de la non-reconduction en 1996 du régime de l'indemnité de logement qui avait été introduit au Cameroun, au Sénégal, en Côte d'Ivoire et aux Comores.

Sur ce dernier point, il faut noter que le décret de décembre 1992 relatif à l'assistance technique avait prévu la généralisation de l'indemnité de logement afin de se substituer au régime actuel de prise en charge du logement par les états bénéficiaires qui, à l'évidence, ne permet pas de résoudre les difficultés matérielles auxquelles sont confrontés nos experts, et cause pour nombre de gouvernements concernés de réelles difficultés. C'est à ce titre qu'une mesure nouvelle de 25 millions de francs avait été inscrite au budget de 1995. La suppression de cette mesure apparaît comme une remise en cause, ou a tout le moins un ajournement, de ce volet du décret de 1992.

Comme on l'a déjà indiqué, les députés ont adopté une réduction de crédits de 48 millions de francs qui portera exclusivement sur l'article 10 du chapitre 42-23. Cette mesure d'économie a reçu l'accord du ministre délégué chargé de la coopération. Il faut espérer que le rythme de déflation des effectifs permettra d'absorber cette diminution sans remettre en cause les actions et les engagements du ministère.

Les dotations de l'article 50 du chapitre 42-23, consacré à l'assistance technique de longue durée sur contrat, passent de 116,3 à 114,3 millions de francs, confirmant une diminution constante depuis plusieurs années.

Ces dépenses correspondent à des contrats d'experts, de moyenne ou de longue durée, passés avec des sociétés ou entreprises pour des opérations de développement. Il faut noter que certaines de ces dépenses n'apparaissent pas au chapitre 42-23 et sont inclues dans des projets financés par le FAC.

L'essentiel de l'assistance technique de longue durée s'effectue au profit de l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA), par l'intermédiaire de la société SOFREAVIA-SERVICE. Les effectifs de coopérants sont cependant en constante diminution puisqu'ils sont passés de 242 en 1983 à 104 en 1995, 95 en 1995 et d'après les prévisions, 74 en 1996.

L'accentuation de l'effort de formation engagé ces dernières années se traduit par la relève des assistants techniques français par des cadres nationaux.

On constate en revanche un transfert sur des contrats d'assistance technique de longue durée de postes relevant de la recherche agronomique, une mesure nouvelle de 16 millions de francs étant prévue à ce titre.

Pour être complet, il faut préciser que les dépenses d'assistance technique civile bénéficient théoriquement d'un rattachement de fonds de concours au titre de la contribution des États. Comme on l'a indiqué lors des commentaires sur l'exécution du budget de 1994, les sommes recouvrées à ce titre sont en constante diminution, les restes à recouvrer dépassant 1,2 milliard de francs.

En pratique, la contribution aux dépenses d'assistance technique a été progressivement supprimée soit en totalité pour les PMA, soit dans le cadre de la "globalisation" pour d'autres pays qui ne prenaient alors en charge que la part supérieure à un certain plafond. Seul le Gabon continue aujourd'hui à être soumis au régime du fonds de concours.

Il semblerait que le ministère de la coopération, qui n'en continue pas moins à émettre des titres de perception, renonce peu à peu à recouvrir des contributions que les états sont bien souvent dans l'impossibilité d'acquitter. Selon les indications fournies à votre rapporteur, le ministère souhaite "réfléchir aux modalités d'une annulation de cette dette dans le cadre plus global d'une redéfinition des obligations des États bénéficiaires en matière d'assistance technique tant pour les rémunérations que pour le logement et les autres moyens d'accompagnement, la priorité étant désormais donnée à une assistance technique certes moins nombreuse mais rendue plus efficace parce que dotée de tous les moyens nécessaires à l'accomplissement de sa mission".

2. La stabilité des autres actions de coopération civile

Les crédits destinés aux autres actions de coopération et inscrits au chapitre 42-23 représentent 733 millions de francs et sont marqués par une relative stabilité.

Il en est ainsi de l'article 31 (Aides diverses au développement), dont les dotations passent de 165,6 millions de francs à 168,6 millions de francs : les mesures d'économies budgétaires, évaluées à 25 millions de francs, sont compensées par des mesures nouvelles représentant 28 millions de francs répartis entre la contribution à l'action audiovisuelle extérieure de la France (+ 17,2 millions de francs), la lutte contre les grands trafics (+ 10 millions de francs) et le réajustement des coûts de personnel de diffusion et de programmes à la charge des opérateurs audiovisuels en matière de francophonie (+ 0,8 million de francs). En outre, l'Assemblée nationale, en seconde délibération, a majoré les crédits de cet article de 0,11 million de francs.

L'article 32, relatif aux missions d'experts, passe de 6,4 à 10,4 millions de francs, au titre de la revalorisation des indemnités journalières de mission. Il s'agit en fait d'un ajustement aux dépenses réellement constatées lors des exercices précédents.

L'article 33, relatif aux mesures d'accompagnement de l'assistance technique, passe de 73,6 à 74,6 millions de francs malgré la régulation budgétaire, afin de renforcer l'appui logistique, apporté aux coopérants dans le cadre d'une optimisation de l'aide-projet. Cette légère augmentation, dans un contexte de déflation des effectifs, traduit le souci du ministère d'améliorer les conditions matérielles de travail des coopérants et appuie la réorientation de notre assistance technique vers des objectifs qualitatifs.

L'article 61 consacré à des subventions à diverses associations, voit sa dotation réduite de 1,1 million de francs et portée à 10,2 millions de francs dans le cadre de mesures d'économies, mais on peut s'interroger sur la réalité de cet effort au vu des dépenses réellement constatées lors des exercices précédents qui, par le jeu de virements entre chapitres, dépassent toujours largement la dotation de la loi de finances initiale.

Enfin, la dotation des bourses, inscrite à l'article 40, progresse légèrement, passant de 194 à 194,9 millions de francs. Il s'agit là d'un coup d'arrêt porté à la constante diminution de cette dotation. Le nombre des bourses accordées, qui était passé de 4.522 en 1993 à 3.921 en 1994, s'est stabilisé en 1995 et devrait se maintenir en 1996.

Il faut rappeler que la politique du ministère de la coopération consiste à privilégier les bourses de stages dans le secteur professionnel et, s'agissant du secteur universitaire, les bourses d'études orientées vers la recherche ou les troisièmes cycles dans des secteurs tels que la santé, l'agriculture, les sciences et les techniques.

Cette réorientation est toutefois modeste compte tenu de l'obligation de renouveler certaines bourses accordées les années précédentes et des demandes exprimées par certains États partenaires.

Parallèlement à l'accueil de boursiers en France, le ministère poursuit la rénovation des différentes structures d'hébergement.

En ce qui concerne les crédits d'appui aux institutions privées et décentralisées, inscrits au chapitre 42-24, leur progression de 5,6 millions de francs (145 au lieu de 139,4 millions de francs) résulte du réajustement des dotations destinées aux ONG et à la coopération décentralisée. Une majoration supplémentaire de 0,75 million de francs a été adoptée en seconde délibération par l'Assemblée nationale.

La dotation aux ONG (article 10) passe de 5,2 à 9,7 millions de francs. Cet article est en forte progression depuis deux ans mais il est loin de retracer l'ensemble de l'apport du ministère en faveur des organisations non gouvernementales, celles-ci recevant, selon une procédure de contractualisation, d'importants crédits provenant du FAC. On rappellera que la principale organisation bénéficiaire des subventions de l'article 10, sous la forme de la prise en charge partielle de postes d'animateurs d'associations, est le fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP) au titre de l'éducation au développement. L'objectif commun des organisations financées par ces crédits est l'information, la formation et la communication auprès de l'opinion publique française. Cette dotation a été en outre majorée de 0,25 million de francs par l'Assemblée nationale.

Les dotations pour les actions de coopération décentralisée passent de 8,4 à 12,1 millions de francs afin de mettre en place les crédits correspondants aux engagements de l'État dans le cadre des contrats de plan État-région. Ces crédits sont essentiellement utilisés pour le cofinancement de projets définis avec les collectivités locales, en particulier avec les régions. Tout en reconnaissant la grande utilité des projets de coopération définis par les collectivités locales et leur complémentarité avec les actions gouvernementales, le ministère de la coopération, qui souhaite consacrer des moyens accrus dans ce domaine, préconise un renforcement des interventions dans les secteurs où les collectivités locales disposent d'un réel savoir-faire, à savoir le développement local, la gestion urbaine ou municipale et l'appui technique et administratif aux collectivités. L'Assemblée nationale a en outre majoré ces crédits de 0,5 million de francs.

L'essentiel des crédits du chapitre 42-24 est consacré aux subventions aux associations de volontaires qui diminuent légèrement, passant de 125,8 à 123,2 millions de francs.

Une large part de ces crédits (74 millions de francs en 1995) est versée à l'Association française des volontaires du progrès (AFVP) pour couvrir les dépenses relatives à l'envoi et à la gestion de ses 450 volontaires.

Sont également imputées sur cet article, les crédits de prise en charge des volontaires européens du développement (VED) et les subventions accordées à diverses associations pour la prise en charge d'une centaine de coopérants du service national affectés auprès de missions religieuses.

Les dépenses d'appui au volontariat, qui correspondaient à la contribution versée à plusieurs associations pour la prise en charge de la couverture sociale des volontaires, ont nettement augmenté en 1995, un décret du 30 janvier 1995 ayant permis d'élargir le soutien du ministère à la formation des volontaires.

Enfin, l'année 1995, a été marquée par le lancement de l'opération "mille volontaires" qui devait encourager la création de nouveaux postes dans des pays ou des secteurs particulièrement déshérités, cet encouragement prenant la forme d'aides complémentaires forfaitaires pour les indemnités, le logement et les voyages. En fait, la régulation budgétaire a fortement handicapé le démarrage de ce programme qui devrait donc s'amplifier, grâce à l'ouverture de nouveaux postes, en 1996.

Enfin, les crédits de transport de l'aide alimentaire (chapitre 42-26, article 10) sont reconduits à leur niveau de 1995, soit 125 millions de francs, une dotation nouvelle de 5 millions de francs étant par ailleurs prévue, à l'article 20, pour l'aide d'urgence.

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