III. LA CRÉATION D'UNE NOUVELLE STRUCTURE DOIT ÊTRE ARTICULÉE AVEC L'EXISTANT

L'idée de créer une structure parlementaire chargée de procéder à des évaluations législatives peut paraître séduisante a priori. Il convient toutefois d'examiner précisément dans quelle mesure une telle création est susceptible de répondre aux problèmes posés et dans quelles conditions ses interventions trouveraient leur place dans les structures parlementaires préexistantes.

A. LE PARLEMENT DISPOSE D'ORES ET DÉJÀ D'INSTRUMENTS D'ÉVALUATION LÉGISLATIVE DONT L'USAGE POURRAIT ÊTRE AMÉLIORÉ

Avec l'administration, le Gouvernement dispose d'un instrument d'évaluation. Le Parlement peut éventuellement utiliser l'expertise de ces services pour évaluer les lois, celles qu'il va voter comme celles qu'il a votées.

Il dispose par ailleurs de certains moyens propres de suivi et d'évaluation des lois qui ont fait l'objet de descriptions précises à l'occasion du colloque déjà évoqué relatif au contrôle parlementaire et à l'évaluation, organisé au Sénat, en avril 1994.

1. Le Sénat assure un suivi régulier de l'application des lois

Depuis 1972, le Sénat a mis en place un contrôle de l'application des lois dont la responsabilité technique incombe aux secrétariats des commissions permanentes. En outre, depuis 1993, le président de chaque commission permanente présente tous les semestres un bilan quantitatif et qualitatif de l'application, par le Gouvernement, des lois qu'elle a examinées, et définit les mesures que les situations constatées lui paraissent appeler (courrier au ministre concerné, question, ...).

Les notes de synthèse élaborées à cette occasion comportent des données statistiques, des éléments explicatifs (motifs du retard de publication, délais prévisibles) et parfois un jugement qualitatif (respect de la volonté du législateur par exemple).

Un dossier de contrôle semestriel de l'application des lois est élaboré à partir de ces notes et des données statistiques recueillies par les commissions sur les délais de publication des textes d'application. Il est soumis à chacun des membres de la Conférence des Présidents.

Pour sa part, l'Assemblée nationale a tenté plusieurs expériences de suivi de l'application des lois mais, au cours des six dernières années, seule la commission des Finances a persévéré dans cet effort. La commission des Lois, quant à elle, a décidé de confier périodiquement à ses commissaires le soin de lui présenter des communications sur l'état d'application des lois examinées sur leur rapport.

Ces différents travaux ont atteint un rythme et une qualité satisfaisants au Sénat. On peut dès lors s'interroger sur la pertinence du transfert du suivi de l'application des lois, envisagé par la proposition de loi, à un organisme autonome extérieur tant aux groupes politiques qu'aux commissions.

2. Le Parlement dispose de nombreux instruments d'évaluation législative

Plusieurs procédures permettent au Parlement de suivre l'application des lois :

ï les questions écrites (plusieurs centaines de questions portent chaque année sur l'application d'une loi) ;

ï les questionnaires budgétaires : la commission des Lois du Sénat consacre ainsi une partie des rapports pour avis qu'elle élabore à l'application des lois adoptées au cours des années antérieures en matière de Justice, de collectivités locales, de sécurité et d'outre-mer ;

ï les rapports d'application des lois prévus par de nombreuses législations même s'ils sont malheureusement trop souvent transmis avec retard ;


• les travaux que certaines missions d'information consacrent au contrôle de l'application des lois et à leur évaluation ; c'est ainsi que la commission des Lois du Sénat a récemment publié deux rapports d'information évoqués plus haut, l'un sur le secret de l'instruction, l'autre sur la responsabilité pénale des élus.

Ces instruments doivent de toute évidence être améliorés. C'est ainsi qu'à la suite d'une étude effectuée dans le cadre du contrôle de l'application des lois ( ( * )5) , le Sénat a ainsi mis en place un contrôle systématique de la transmission des rapports d'application des lois (depuis le début de la IXè législature). Pour sa part, l'Assemblée nationale envisage de se doter d'un système de contrôle général de l'application des lois.

Il devrait également être envisagé de faire une exploitation plus systématique des rapports fournis par le Gouvernement et par d'autres instances comme le Conseil économique et social ou la Cour des comptes qui produisent également des travaux d'évaluation législative.

Par ailleurs, les travaux d'évaluation conduits par des missions d'information pourraient être multipliés. Il faudrait pour cela renforcer les moyens des commissions permanentes afin qu'elles développent, ce faisant, les missions de contrôle qui leur incombent. Dans la mesure où ces travaux sont conduits par quelques-uns des membres d'une commission permanente, ils présentent en effet l'immense avantage d'être en prise directe avec celle-ci et de s'effectuer sous son contrôle politique, le rapport étant présenté et approuvé par elle.

* (5) Voir le 45e rapport semestriel (16 septembre 1994 -17 mai 1995)

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