CHAPITRE PREMIER UN CONTEXTE ÉCONOMIQUE QUI TEND À S'AMÉLIORER

Le projet de loi de finances pour 1997 est construit sur la base d'une croissance de 1,3 % en 1996 et 2,3 % en 1997.

Ces perspectives sont partagées par la quasi-totalité des instituts de prévision.

I. UNE ACTIVITÉ EN QUÊTE DE RESSORTS

A. UNE CROISSANCE ACCÉLÉRÉE PAR LE RESTOCKAGE

1. L'hypothèse d'un rebond en 1996

Le scénario économique qui sous-tend le projet de loi de finances pour 1997 retient une hypothèse de reprise de la croissance au second semestre de 1996, qui amplifierait un peu son rythme au long de l'année 1997.

La croissance en volume du PIB au cours du premier trimestre de 1996 navigue sur un rythme annuel de 0,6 %. L'hypothèse retenue pour 1996 suppose qu'au second semestre la croissance annuelle du PIB s'accélère sensiblement.

Évolution du PIB sous-jacente à la prévision du gouvernement

(en milliards de francs)

Le tableau qui précède illustre l'ampleur du rebond nécessaire pour atteindre le rythme de croissance retenu par la prévision associée au projet de loi de finances.

2. Le rôle-clé des entreprises

Le scénario de cette reprise repose sur le maintien d'un rythme de croissance modéré de la consommation des ménages, sur une contribution quasiment nulle du solde du commerce extérieur à l'activité, mais sur une modification très favorable du comportement des entreprises.

Les estimations de la contribution à la croissance des différents éléments de la demande confirment cette analyse.

Contributions à la croissance du PIB

(contributions à la croissance du PIB en points)

1. Entreprises individuelles

L'environnement international de la prévision

La prévision retient l'hypothèse d'une reprise modérée de l'activité chez nos partenaires de l'OCDE.


• Le redémarrage de l'activité en Europe serait soutenu dans un premier temps par la demande des entreprises, relayée par la suite par celle des ménages.

La croissance allemande serait de 1,2 % en 1996, puis 2,2 % en 1997, ce qui suppose une évolution conjoncturelle en phase avec celle de l'économie française.


• L'"atterrissage en douceur" de l'économie américaine se confirmerait avec une croissance de 2,2 % en 1997 (après 2,4 % en 1996).

Au Japon, la croissance ralentirait en 1997 (2 % après 4,5 % en 1996).

Parmi les pays émergents, ceux d'Asie resteraient les plus dynamiques. Ils seraient suivis des pays d'Amérique latine et d'Europe de l'Est, alors que l'Afrique noire demeurerait une zone de faible croissance.


• Au total, la demande mondiale de produits manufacturés s'accélérerait en 1997 (7 % après 5 % en 1996).


• Sur un plan plus qualitatif, on peut qualifier de raisonnablement optimistes les hypothèses d'environnement international qui viennent d'être décrites. Elles sont peu différentes de celles que retiennent les grandes organisations internationales. Elles traduisent le retour progressif des économies européennes vers leur sentier de croissance tendancielle, une fois réalisés les redressements des finances publiques à l'oeuvre dans la plupart des pays européens.

Les effets restrictifs de ces ajustements budgétaires seraient ainsi sensibles surtout en 1996 et moins en 1997 1 ( * ) . Il faut toutefois noter que les effets négatifs en Europe de la récession de 1993 (que l'on peut mesurer par l'écart entre le niveau effectif du PIB et le niveau qu'il aurait atteint s'il avait suivi sa trajectoire d'évolution tendancielle) seraient loin d'être effacés.

Le scénario ainsi décrit, prolongé à moyen terme, peut être considéré comme une moyenne entre deux scénarios opposés :

- celui d'une forte reprise cyclique, favorisée par la baisse des taux d'intérêt, et qui permettrait à terme d'effacer complètement les effets négatifs de la récession de 1993 ;

- un scénario plus pessimiste, dans lequel la reprise de la demande privée ne serait pas suffisamment soutenue, ce qui freinerait l'évolution des recettes fiscales et conduirait à de nouvelles restrictions budgétaires pour réaliser le redressement des finances publiques.

a) Une baisse du taux d'épargne des ménages

La consommation des ménages, à elle seule, expliquerait 1,3 point de croissance en 1996 et, seulement 0,8 point l'an prochain.

Le chiffre retenu pour 1996 est compatible avec une stabilité du niveau de la consommation des ménages au cours des deux derniers trimestres de l'année.

La consommation des ménages devrait ainsi s'accroître de l'ordre de 2 % en 1996 alors que l'acquis de croissance à la fin du premier trimestre s'élevait à 2,6 %.

L'acquis de croissance

L'acquis est le taux de croissance annuel qui serait observé si la variable concernée restait au niveau atteint au dernier trimestre connu.

Il ne s'agit pas d'un élément permettant d'établir une prévision sûre mais d'un outil au service de la prévision et de l'analyse des phénomènes conjoncturels.

L'ampleur et le caractère erratique des variations de la consommation des ménages en 1996 illustrent la fiabilité relative de l'instrument.

En 1995, la croissance de la consommation des ménages s'était établie à 1,8 %. L'année 1996 reproduirait ainsi à peu près le rythme de croissance observé l'an dernier tandis qu'en 1997 une nette inflexion se produirait puisque cet élément de la demande ne progresserait que de 1,4 % en volume.

Le lien entre consommation et revenu des ménages est évidemment très fort mais, ces dernières années, la montée du taux d'épargne des ménages l'avait singulièrement perturbé.

Ainsi, la croissance du revenu disponible brut des ménages en 1995 de 2,6 % s'était accompagnée cette année-là d'une progression de la consommation limitée à 1,8 % du fait du gonflement du taux d'épargne des ménages passé de 13,6 à 14,3 % entre 1994 et 1995.

La prévision pour 1996 et 1997 suppose, compte tenu des estimations portant sur l'évolution du revenu des ménages, que leur taux d'épargne baisse significativement -de 1,7 point entre 1995 et 1996- et se stabilise en 1997.

b) Une accélération du restockage

La composante la plus dynamique des "contributions" à la croissance proviendrait des entreprises.

L'investissement expliquerait 0,7 point de croissance en 1997 et les stocks 0,5 point.

L'investissement des entreprises s'accroîtrait de 2 % en 1996 puis de 5 % en 1997.

Quant aux variations de stocks, après avoir exercé une influence négative sur la croissance en 1996 à hauteur de 0,6 point, leur contribution serait favorable en 1997 (+ 0,5 point).

En bref, l'accélération de la croissance en 1997 proviendrait pour l'essentiel du comportement des entreprises en matière de stocks.

Hors variation des stocks, la croissance se serait élevée en 1996 à 1,9 % et serait en 1997 de 1,8 %.

Le tableau qui suit illustre l'influence de l'évolution des stocks sur la croissance entre 1991 et 1997.

Hors accident conjoncturel de 1993, la croissance, calculée comme si les stocks ne variaient pas, évolue le plus souvent dans une fourchette de 1,5 à 1,9 % alors que, compte tenu des stocks, la fourchette des taux de croissance est beaucoup plus large : 0,8

Les mouvements des stocks sont à l'évidence une variable pesant très significativement sur l'activité.

Stocks et activité

Dans la définition qu'en donne le système élargi de comptabilité nationale, "les stocks comprennent tous les biens autres que les biens de capital fixe, détenus à un moment donné par les unités productrices résidentes".

Dans les comptes de patrimoine des secteurs institutionnels, le montant des stocks est estimé à 1.817,4 milliards de francs pour 1995 -dont 1.557,6 milliards de francs pour les sociétés et quasi-sociétés non financières- en diminution de 2,2 % par rapport à 1994 (- 41,1 milliards de francs).

Les stocks constituent une production non vendue. Leur niveau résulte donc d'un décalage entre l'offre et la demande de produits. Lorsque celle-ci augmente moins que celle-là, le niveau des stocks s'accroît mécaniquement puis se résorbe à mesure que les producteurs s'adaptent à la demande.

Mais, si les variations de stocks résultent de la croissance, elles l'influencent aussi. Les phénomènes de déstockage amortissent la croissance de l'activité dès lors que la progression de la demande peut être satisfaite par la production déjà réalisée que sont les stocks.

A ces relations mécaniques, il faut ajouter deux phénomènes qui revêtent une certaine actualité. Le niveau des stocks ne dépend en effet pas que de réglages automatiques ; il résulte aussi de comportements des entreprises. A ce propos il convient de souligner :

- que les entreprises ont adopté ces dernières années un comportement de plus en plus marqué de réduction de leurs stocks, popularisé sous la dénomination de politique de "zéro stock" ou encore de "flux tendus" ; ce comportement structurel pourrait expliquer la tendance au déstockage observée sur moyenne période ;

- et, surtout, que le niveau jugé souhaitable des stocks dépend de l'appréciation que se forment les entreprises d'une série de variables économiques.

Celles-ci peuvent être objectives : le coût financier de détention des stocks dépend du niveau du coût de l'argent. Elles peuvent être plus conjecturales lorsqu'il s'agit d'estimer la croissance future de la demande ou encore l'évolution prévisible du prix de vente de leurs secteurs d'activités.

Les relations entre les stocks et l'activité emprunteront donc deux voies :

- les stocks contribuent, par leur variation, à expliquer le rythme de croissance ;

- le rythme de croissance escompté et la valeur attendue des biens expliquent les variations des stocks.

La contribution des stocks à la croissance a été faiblement positive en 1995 et serait très négative en 1996 du fait du déstockage intervenu dans les secteurs des biens intermédiaires et d'équipement.

Le rebond escompté pour 1997 serait lui très conséquent.

* 1 Une simulation réalisée à l'aide du modèle multinational MOSAÏQUE, commun à l'OFCE et au CEPII, montre que l'impact restrictif des politiques budgétaires rigoureuses menées de manière concomitante en Europe représenterait 1,2 point de croissance pour l'ensemble de l'Europe en 1996 et 0,8 point en 1997. On déduit de cette simulation que (sans ces ajustements budgétaires) la croissance européenne aurait été de 2,4 % en 1995, puis 2,6 % en 1996 et 3,1 % en 1997, soit une évolution plus conforme aux reprises cycliques observées par le passé à la suite d'un épisode récessif.

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