EXAMEN PAR LA COMMISSION

Réunie le Mardi 18 novembre 1997 sous la Présidence de M. Jean François-Poncet, président - La commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Georges Gruillot sur les crédits consacrés aux routes et aux voies navigables dans le projet de loi de finances pour 1998.

M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis,
a, d'abord, signalé qu'il avait à rendre compte de trois catégories de crédits : les crédits des routes, ceux de la sécurité routière et, enfin, ceux des voies navigables.

S'agissant des crédits des routes, il a déclaré qu'ils devraient bénéficier, en 1998, d'une dotation de 7,366 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une progression de 0,4 % par rapport à 1997.

En ce qui concerne, en revanche, les moyens d'engagement (dépenses ordinaires + autorisations de programmes), il a souligné que la dotation prévue pour 1998 enregistrait une diminution de 4,9 % par rapport à 1997 (6,166 milliards de francs).

Le rapporteur pour avis a ensuite relevé que le budget des routes comprenait trois actions : le développement du réseau routier, l'entretien du réseau routier et, enfin, le développement du réseau autoroutier, financé, pour l'essentiel, par des ressources extra-budgétaires.

A propos du développement du réseau routier, M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a souligné que l'enveloppe du programme d'investissements atteindrait, en 1998, 4,071 milliards de francs en crédits de paiement (- 0,6 % par rapport à 1997) et 2,857 milliards de francs en autorisations de programme (- 11,4 % par rapport à 1997).

Il a ensuite relevé qu'une masse importante de crédits en provenance de comptes spéciaux du Trésor viendrait renforcer ces dotations : 1,557 milliard de francs en provenance du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) et 466 millions de francs en provenance du fonds d'aménagement de la région Ile-de-France (FARIF).

Evoquant la ventilation des autorisations de programme entre les différents projets d'investissement, M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a signalé les grands programmes de désenclavement du Massif central : l'A75 Clermont-Ferrand/Béziers ; l'A20 Vierzon-Brives ; le programme d'aménagement spécial de la RN7 Nevers-Balbigny. Ces programmes, a-t-il ajouté, devraient recevoir, en 1998, une dotation -exclusivement financée par le FITTVN- de 1,39 milliards de francs en autorisations de programme contre 1,67 milliard de francs en 1997.

Il a aussi précisé que la section nord Bobigny-Nanterre et la section ouest Pont Becquet-Pont de Rouen (section de l'A86) bénéficieraient de crédits en provenance du FARIF à hauteur de 170 millions de francs.

En dépit d'une augmentation de 6,6 % des programmes liés aux contrats Etat-régions, le rapporteur pour avis a indiqué que le total des investissements routiers enregistrait une baisse de - 4,2 % en 1998.

Pour l'entretien du réseau routier, M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a relevé la progression (+ 4,2 % en crédits de paiement et + 4 % en autorisations de programme) des crédits destinés aux actions de renforcement des chaussées et de réhabilitation des autoroutes urbaines, ainsi que la stabilisation des crédits d'entretien courant (+ 0,8 % en crédits de paiement) constitués pour l'essentiel des moyens de fonctionnement des directions départementales de l'équipement.

Evoquant ensuite le réseau routier autoroutier concédé, le rapporteur pour avis a d'abord signalé que depuis 1994, la politique tarifaire et les conditions du recours à l'emprunt de sept sociétés concessionnaires faisaient l'objet de contrats de plan quinquennal. Il a ajouté que le schéma directeur routier national du 1er avril 1992 avait prévu l'adjonction de 940 kilomètres d'autoroute supplémentaires par rapport au schéma de 1988. En 1997, a-t-il précisé, 211 kilomètres de sections ou de tronçons d'autoroute ont été mis en chantier, 1.029 kilomètres étant actuellement en travaux, notamment l'A20 entre Brives et Montauban, la section de l'A16 entre Abbeville et Boulogne et l'A39 entre Dôle et Bourg en Bresse. Il a, en outre, indiqué que neuf sections concédées et vingt-deux sections non concédées avaient été mises en service en 1997, notamment : l'A85 Angers-Vivy, l'A16 Abbeville-Boulogne, l'A28 Blangy-Neufchatel, et la section de l'A20 contournant Châteauroux.

En 1998, a-t-il souligné, ce sont 373 kilomètres qui devraient être mis en service tandis que les mises en chantier concerneraient, notamment, les sections de l'A29 entre Amiens et Saint-Quentin et celle de l'A85 entre Tours et Vierzon.

M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a enfin indiqué que le budget de l'Etat ne prévoyait, s'agissant du programme autoroutier, qu'une modeste dotation de 35 millions de francs en autorisations de programme pour le financement des études de définition des tracés des autoroutes concédées.

Abordant les crédits affectés à la sécurité routière, le rapporteur pour avis a déclaré que les moyens de paiement affectés aux actions conduites en matière de sécurité routière progresseraient de 1,8 % en 1998 avec une dotation de 437,5 millions de francs. Les crédits du titre III (250,2 millions de francs en 1998, soit une hausse de 5,5 % par rapport à 1997) se décomposent en trois volets : les moyens de fonctionnement de l'exploitation de la route (165,1 millions de francs), les dépenses du délégué interministériel à la sécurité routière (44,7 millions de francs) et, enfin, les crédits affectés à la formation des conducteurs (40,3 millions de francs).

Après avoir relevé que les crédits d'incitation en matière de sécurité routière s'élèveraient à 1 million de francs, en 1998, soit un montant inchangé par rapport à l'année dernière, le rapporteur pour avis a souligné que l'effort d'investissement (183,2 millions de francs en autorisations de programme soit + 7,1 % par rapport à 1997) porterait plus particulièrement en 1998 sur le développement des nouvelles technologies d'information des usagers en vue de réduire les embarras de circulation, en particulier les programmes " Sirius " (Ile-de-France) " Erato " (Toulouse), " Aliénor " (Aquitaine), " Marius " (Marseille), " Alegro " (Lille), et " Sillon Moselan " (Lorraine).

Evoquant, enfin, les crédits des voies navigables, M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a indiqué que, depuis la création de l'établissement public " Voies navigables de France " (VNF), en 1991, et du FITTVN, en 1995, le budget des transports terrestres ne contenait plus, les concernant, qu'un petit reliquat affecté, pour l'essentiel, au plan d'aide à la batellerie -doté en 1998 comme en 1997 de 20 millions de francs-.

Il a indiqué que la plus grande partie des crédits publics destinés aux voies navigables étaient d'origine extrabudgétaire : le FITTVN versera ainsi 430 millions de francs (+ 23%) à VNF qui envisage, en ce qui le concerne, d'investir 590 millions de francs en 1998.

En conclusion, M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a souligné que l'ensemble des autorisations de programme (budget, FITTVN et FARIF) enregistrerait une baisse de 4,2 % tandis que les contrats de plan Etat-régions continueraient de prendre du retard en raison de la forte réduction des crédits de fonds de concours en provenance des régions. Cette réduction (5,4 milliards de francs en 1998 contre 7,4 milliards de francs en 1997), a-t-il souligné, s'explique par le surcroît de dépenses que les régions ont dû consentir par anticipation au moment du gel de la participation de l'Etat en 1997. Sur ce point, le rapporteur pour avis s'est interrogé sur les conséquences du non-respect par l'Etat de ses engagements et partant, sur la valeur juridique des contrats Etat-régions.

Il s'est ensuite demandé s'il était bien dans la vocation du FITTVN de financer des dépenses d'entretien de la voirie routière nationale. Il s'est aussi inquiété de l'éventuelle création d'un établissement public destiné à assurer la péréquation des financements entre voirie routière et autoroutes et qui, en réduisant les sociétés concessionnaires au rôle de simples opérateurs, pourrait déboucher sur l'assèchement des ressources du réseau autoroutier et la débudgétisation des routes.

Il s'est aussi interrogé sur l'avenir du schéma directeur routier national de 1992 en signalant que trois liaisons, au moins, étaient déjà directement remises en cause : l'A58, l'A51 et le débouché en Seine-Saint-Denis de l'A16.

Rappelant que la révision du schéma directeur routier national était subordonnée au schéma d'aménagement et de développement du territoire prévu par la loi d'orientation de 1995, le rapporteur pour avis a relevé que le ministère de l'environnement et de l'aménagement du territoire était en train de mettre au point une modification de ladite loi.

Le rapporteur pour avis, a, en outre, fait observer que les crédits de la sécurité routière faisaient traditionnellement l'objet d'annulations massives dans le cadre de la régulation budgétaire : ainsi, les crédits de paiement réellement disponibles en 1997 ne s'étaient élevés qu'à 373 millions de francs, soit - 13 % par rapport aux crédits votés.

La sécurité routière, a-t-il ajouté, a néanmoins connu une amélioration en 1996 avec une diminution de 3,9 % du nombre de tués, M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a toutefois souligné estimé que les progrès constatés demeuraient très en-deçà des attentes et que si le nombre des accidents enregistrait une baisse, leur gravité avait en revanche tendance à s'amplifier.

Le rapporteur pour avis a encore relevé que la dotation du FITTVN affectée en 1998 aux voies navigables (430 millions de francs) serait très inférieure au produit attendu de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques concédés (1,69 milliard de francs), dont le projet de loi de finances prévoit le doublement du taux.

Evoquant enfin les grands projets fluviaux, le rapporteur pour avis a déclaré que seul demeurait en lice le projet de voie fluviale Seine-nord, qui devrait permettre de relier l'Ile-de-France au bassin de l'estuaire du Rhin, après la décision d'abandonner le projet de construction du canal Rhin-Rhône. Sur ce point, M. Georges Gruillot, rapporteur pour avis, a rappelé les termes du communiqué publié par le groupe d'études sur le canal Rhin-Rhône, présidé par M. Jacques Rocca Serra.

Le rapporteur pour avis a estimé qu'au même titre que pour les contrats de plan, il y avait eu, sur ce sujet, manquement à la parole de l'Etat.

En conclusion, il a estimé que les " atermoiements " gouvernementaux en matière de politique des transports terrestres étaient de mauvais augure pour le redressement de l'emploi et l'avenir économique de la France ainsi que pour son intégration européenne à l'heure de la mise en place de l'euro.

M. Jean François-Poncet, président , s'est déclaré, tout d'abord, choqué par le fait qu'un projet voulu par le Parlement dans une loi -en l'occurrence le financement et l'achèvement de la construction du canal Rhin-Rhône prévus par l'article 36 de la loi d'orientation et d'aménagement du territoire de 1995- puisse être remis en cause par une simple décision ministérielle. A cet égard, il a estimé que le décret ministériel mettant fin au projet paraissait entaché d'illégalité.

Abordant ensuite le problème de la débudgétisation, M. Jean François-Poncet, président, s'est vivement élevé contre la " dénaturation " du FITTVN, dont le législateur avait souhaité qu'il soit un outil financier supplémentaire au service de l'aménagement du territoire, et que les services du ministère des finances tendaient à transformer en simple substitut au budget.

Par ailleurs, a-t-il ajouté, le comité de gestion où les élus sont représentés n'est toujours pas en mesure d'exercer de véritables prérogatives dans le choix des investissements, alors que c'est à cette seule condition que le Parlement avait accepté de renoncer au statut d'établissement public pour le FITTVN.

Il a, encore, vivement critiqué le fait que le fonds soit utilisé pour financer l'entretien de la voirie routière nationale et souligné que le projet de faire financer ledit entretien par les péages sonnerait le glas de tout notre système de financement des autoroutes.

Soulignant enfin le rôle vital du désenclavement dans l'aménagement du territoire, M. Jean François-Poncet, président , s'est demandé si les pouvoirs publics n'avaient pas profondément modifié leur position sur ce sujet.

M. Marcel Deneux s'est interrogé sur le calendrier de réalisation du projet de liaison fluviale Seine-Nord. Il s'est ensuite demandé si le développement du réseau autoroutier n'était pas facilité par le régime de la concession.

Sur ce point, M. Jean François-Poncet, président , a souligné que le niveau d'endettement des sociétés concessionnaires d'autoroutes imposait au système un certain nombre de contraintes.

M. Marcel Deneux a enfin précisé que la section de l'A16 Amiens-Abbeville était mise en service depuis le 26 juin 1997 et qu'une section de l'A29 devrait relier Amiens à Saint-Quentin en 1998.

M. Jean Huchon a rappelé, pour sa part, que le tronçon Angers-Vivy avait été mis en service le 10 janvier 1997 et qu'il comptait bien sur le lancement, en 1998, de l'A87 Angers-Cholet-La-Roche-Sur-Yon.

M. Jean-Paul Emorine s'est déclaré en plein accord avec les observations formulées par le rapporteur et le président Jean François-Poncet sur le problème de la " débudgétisation " ainsi que sur l'abandon du projet de canal Rhin-Rhône.

Sur proposition du rapporteur, la commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits des routes et des voies navigables dans le projet de budget du ministère de l'équipement, des transports et du logement pour 1998, les sénateurs des groupes socialiste et communiste, républicain et citoyen s'abstenant.

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