IV. LA REMISE EN CAUSE DU RÉGIME D'AIDE FISCALE AUX INVESTISSEMENTS RÉALISÉS DANS LES DOM-TOM

A. RAPPEL DU DISPOSITIF D'AIDE FISCALE ET BILAN POUR 1996

1. Le cadre juridique

Les dispositions contenues dans l'article 22 de la loi de finances rectificative n° 86-824 du 11 juillet 1986, dite " Loi Pons ", constituent un important dispositif original d'incitation à l'investissement outre-mer, valable dans les départements, les territoires et les collectivités territoriales d'outre-mer.

Ces dispositions couvrent un champ d'application très large (industrie, bâtiment et travaux publics, agriculture, pêche, tourisme et hôtellerie, artisanat et énergies nouvelles) et concernent aussi bien les investisseurs individuels (bénéficiant d'une réduction dégressive d'impôt en cas de construction ou d'acquisition de logements neufs à usage d'habitation principale) que les entreprises qui bénéficient d'une déduction d'impôt de la totalité du montant des investissements réalisés.

Ces dispositions, inscrites dans les articles 199 undecies et 238 bis HA et HC du Code général des impôts étaient valables initialement jusqu'au 31 décembre 1996.

Le régime de défiscalisation pour les investissements réalisés outre-mer a été plusieurs fois modifié afin de remédier à ses dysfonctionnements ou mettre fin à certains excès commis dans les premières années d'utilisation du dispositif. Sur le régime actuel, on peut retenir les éléments suivants :

- droit à l'exercice de la déduction fiscale pour les secteurs industriels (défiscalisation de plein droit en dessous de 30 millions de francs) (LFR pour 1986) ;

- le régime de défiscalisation est prorogé jusqu'au 31 décembre 2001 (LF pour 1992) ;

- extension du champ d'application du dispositif aux investissements réalisés dans le cadre de concessions de service public local à caractère industriel et commercial, aux apports en capital des sociétés en difficulté dans les secteurs d'activité éligibles LFR pour 1993) ;

- avis préalable du Ministre des DOM-TOM dans la procédure d'agrément (LFR pour 1993) ;

- retour à une déduction fiscale de 100 % et délai de détention harmonisé à cinq ans pour tout investissement (LFR pour 1993) ;

- l'imputation des déficits provenant des investissements et des soucriptions en capital dans les secteurs éligibles doit faire l'objet d'un agrément du Ministre chargé du Budget, après avis du Ministre de l'Outre-Mer. Les projets qui sollicitent cette disposition sont soumis à la procédure du double agrément (LF pour 1996).

En définitive, en 1996, les projets d'investissements peuvent être soumis à un agrément préalable à un double titre :

- pour autoriser la déduction de l'investissement pour certaines catégories d'activité (§ III ter de l'article 238 bis HA) ;

- et/ou lorsque les investisseurs sont des personnes physiques ou morales soumises à l'impôt sur le revenu qui n'exercent par leur nouvelle activité à titre professionnel, l'agrément autorise l'imputation des déficits sur le revenu global (§ quater de l'article 238 bis HA).

La liste des secteurs inclut le transport audiovisuel, la navigation de plaisance, la construction d'hôtels et de résidences de tourisme et les concessions de service public.

En règle générale, pour les projets d'investissement, c'est le système de l'agrément au premier franc qui s'applique.

Désormais, les projets d'investissements non soumis à agrément :

- concernent les secteurs de l'industrie, de la pêche, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, de l'artisanat et de l'hôtellerie par des personnes qui exercent l'activité correspondante à titre professionnel ;

- portent sur moins de 1 million de francs, dans les secteurs de l'hôtellerie, des transports, de la navigation de plaisance, de la production et de la diffusion audiovisuelle et sont réalisés par une entreprise qui justifie d'une exploitation effective à titre professionnel, depuis au moins deux ans outre-mer dans l'un de ces secteurs.

2. Le bilan du régime de défiscalisation dans les DOM-TOM en 1996

Ce bilan est établi à partir du rapport déposé devant le Parlement en application du III de l'article 120 de la loi de finances pour 1992, sur les conditions de mise en oeuvre de l'agrément prévu en faveur des investissements réalisés dans certaines secteurs économiques des DOM-TOM en 1996.

1.085 dossiers ont été traités au cours de 1996 pour un montant d'investissements de 9,96 milliards de francs.

Sur ces 1.085 dossiers, 819 ont obtenu un agrément, 217 ont reçu une réponse défavorable et 49 ont fait l'objet d'un désistement ou d'un classement sans suite. Le montant total des projets agréés s'élève à 5,59 milliards de francs.

Le montant des investissements soumis au double agrément s'élève à 4,508 milliards de francs.

La création d'emplois directs liée à ces investissements est estimée à 1.848, mais n'englobe pas les emplois maintenus ni ceux indirectement induits par la réalisation des investissements.

Le montant des investissements agréés en 1996 a augmenté de 1,6 milliard de francs par rapport à 1995. Cette croissance découle pour un milliard de francs du nouvel agrément III quater, et pour 600 millions de francs des investissements agréés au titre du III ter qui ont ainsi progressé de 15 % par rapport à 1995.

Pour les secteurs soumis à l'agrément III ter, après une baisse importante depuis deux ans, le secteur de l'hôtellerie a fortement progressé en 1996 : le montant des investissements agréés a plus que doublé (+ 132 %) et s'élève à 968 millions de francs.

Dans le secteur du tourisme et de la plaisance, le montant des investissements agréés a diminué par rapport à 1995 en raison de l'agrément d'un navire de croisières important en 1995 (773 millions de francs). Hors ce projet, le secteur tourisme/plaisance croît de 17 % en 1996.

Le secteur des transports a fortement augmenté avec un nombre de dossiers multiplié par deux et un montant d'investissements qui a crû de 142 %. Trois bateaux de transport de marchandises ont été agréés pour 443 millions de francs.

Dans le secteur de l'audiovisuel, le nombre de dossiers agréés a doublé. Le montant des investissements agréés croît de 73 % mais un seul dossier représente 110 millions de francs sur un total de 172 millions de francs. Sans ce projet, le montant agréé connaît un fléchissement par rapport à 1994 et 1995.

Le secteur des énergies nouvelles a un nombre de dossiers stable mais le montant des projets agréés est encore en progression par rapport à 1995.

Quatre entreprises concessionnaires de SPIC et une entreprise en difficulté ont bénéficié d'un agrément pour un montant d'investissements agréés sensiblement équivalent à celui des années précédentes dans le secteur des concessions de SPIC et en diminution du tiers pour le secteur des entreprises en difficulté.

RÉPARTITION SECTORIELLE DES INVESTISSEMENTS SOUMIS AU DOUBLE AGRÉMENT

(millions de francs)

1995

1996

1996/1995 en %

Hôtellerie

Tourisme/Plaisance

Transport

Audiovisuel

Industrie

Pêche

Energies nouvelles

Agriculture

Concession SPIC*

Entreprise en difficulté*

Logement

Bâtiment

416,97

1 534,21

702,11

99,33

299,12

0

745,95

0

19,68

32

64,87

0

968,34

889,95

1 704,99

172,39

30,97

40,35

379,55

0

22,51

20,18

136,09

143

+ 132

- 41

+ 142

+ 73

- 89

-

- 49

0

+ 14

- 36

+ 109

-

TOTAL

3 914,2

4 508,36

+ 15

* Ces deux secteurs ont été instaurés à compter du 1er juillet 1993.

Pour les secteurs d'activité soumis au seul agrément III quater depuis le 1er janvier 1996, la mise en place de cet agrément fait apparaître quatre secteurs qui n'avaient jusqu'ici pas obtenu d'agrément : le bâtiment avec un montant de projets agréés de 340 millions de francs, la pêche à hauteur de 141 millions de francs agréés, l'agriculture (135 millions de francs) et dans une moindre mesure, l'artisanat avec 2,6 millions de francs agréés.

On constate qu'en 1996, c'est le secteur de l'industrie qui a bénéficié du montant des projets agréés le plus élevé (environ 530 millions de francs).

Enfin, le secteur de l'habitat locatif connaît une très forte croissance puisque le montant d'investissements agréés est multiplié par deux, à 136 millions de francs : il s'agit pour l'essentiel de projets agréés au titre du logement intermédiaire.

En ce qui concerne la répartition géographique des investissements :

- en 1996, la Martinique, dont le nombre de projets agréés a augmenté de 46 % par rapport à 1995, a dépassé la Guadeloupe, dont le nombre de dossiers reste stable. En revanche, le montant agréé reste plus élevé en Guadeloupe, mais les deux départements connaissent cependant une baisse significative en montant par rapport à 1995.

- le nombre de projets agréés en Guyane a peu augmenté mais le montant des investissements agréés est en forte croissance, notamment avec des projets importants dans les secteurs des transports, de l'audiovisuel et des énergies nouvelles.

- La Réunion a vu presque doubler le nombre des projets agréés par rapport à 1995 pour un coût d'investissements en hausse de 17 %. Après un recul en 1995, le secteur des transports augmente fortement.

Dans chaque département d'outre-mer, la nouvelle procédure d'agrément III quater a presque doublé le nombre d'agréments délivrés. Le montant des projets agréés varie de 173 à 277 millions de francs, selon le département avec une mention particulière pour le secteur industriel réunionnais qui recueille 226 millions de francs.

- la Polynésie est le principal bénéficiaire de la défiscalisation avec 1.272 milliards de francs d'investissements agréés. Certes, ce montant reste stable par rapport à 1995 mais un projet exceptionnel d'environ 800 millions de francs avait été agréé au titre de cette dernière année.

- le niveau des investissements en Nouvelle-Calédonie a été multiplié par trois en 1996. Cette croissance est due notamment aux secteurs du bâtiment, des travaux publics et de l'hôtellerie.

- enfin, Saint-Pierre-et-Miquelon a bénéficié en 1996 de deux projets exceptionnels dans les secteurs de la plaisance et des transports.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES INVESTISSEMENTS SOUMIS AU DOUBLE AGRÉMENT

(millions de francs)

1995

1996

1996/1995 en %

Guadeloupe

Guyane

Martinique

Réunion

Polynésie

Nouvelle Calédonie

Autres*

1 372,66

69,69

759,74

433,82

1 138,68

137,91

1,75

781,65

394,45

608,56

509,27

1 145,13

387,74

681,54

- 43

+ 465

- 19

+ 17

-

+ 181

+ 38 800

TOTAL

3 914,27

4 508,36

+ 15

* dont Saint Pierre et Miquelon

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