2. Une politique critiquée

La politique communautaire de la recherche a fait l'objet de nombreuses critiques liées tant aux objectifs qu'elle poursuit qu'à ses modalités de mise en oeuvre.

Elles ont été notamment formulées par le groupe d'experts indépendants présidé par M. Etienne Davignon, président de la Société générale de Belgique, chargé en application des décisions relatives au quatrième programme-cadre, de présenter une évaluation de la gestion et de la réalisation des actions communautaires menées au cours des cinq dernières années.

L'absence d'une véritable stratégie européenne de recherche

Rappelant que le programme-cadre ne représente que 3,5 % du total des crédits consacrés à la recherche et au développement dans l'Union européenne, le groupe d'experts souligne que s'il se limite à être un prolongement des politiques nationales, ses « effets seront dérisoires ». La légitimité d'une telle politique demeure, en effet, dans l'élaboration d'une « valeur ajoutée européenne » .

Or, dans un contexte de rigueur budgétaire accrue, force est de constater que les financements communautaires sont de plus en plus souvent sollicités pour remédier à la diminution des budgets nationaux de recherche. Cette tendance se concrétise dans les négociations européennes. Ainsi, comme le note le groupe d'experts , « la méthode de consultation des Etats membres conduit à une négociation entre des intérêts nationaux et sectoriels. Le programme devient alors une liste de priorités nationales, qui manque souvent de cohérence et de valeur ajoutée ».

Ce constat résulte pour une large part de la procédure d'élaboration des programmes-cadre.

En effet, les programmes-cadre ont été, jusqu'à présent, en vertu de l'article 130 I du traité instituant la Communauté européenne, adoptés à l'unanimité. Cette règle permet aux Etats membres d'obtenir la prise en compte de leurs préoccupations nationales afin que la plus grande part possible de leur recherche nationale soit financée par l'Union européenne, même si certaines actions ne relèvent pas, par nature, du niveau communautaire. Dans un contexte marqué par de fortes disparités nationales, certains Etats membres dont le niveau de développement économique est encore insuffisant, tentent de faire financer dans le cadre du programme-cadre des politiques qui ressortissent des fonds structurels, ce qui constitue comme le souligne le rapport d'information de la délégation du Sénat pour l'Union européenne (n° 57, 1997-1998) un détournement de la politique communautaire de la recherche.

Ainsi, au sein du quatrième programme-cadre, 18 programmes spécifiques avaient été mis en oeuvre. Cette forte dispersion des crédits ne peut que nuire à l'efficacité de la politique de recherche .

Un manque de souplesse

La procédure de décision à l'unanimité a privé de souplesse les programmes-cadre .

Chaque programme spécifique étant régi par une décision juridique qui en fixe le domaine et le budget pour cinq ans, et le processus d'adoption pouvant durer jusqu'à deux ans, la durée totale effective du programme-cadre peut aller jusqu'à sept ans. Durant cette période, tout changement ou ajustement n'est possible qu'au prix d'un processus juridique très lent.

Compte tenu notamment de l'accélération des progrès scientifiques, cette inertie des programmes-cadre constitue un inconvénient majeur de politique de recherche européenne, rendant difficile la prise en compte de nouveaux défis sociaux, économiques ou scientifiques. La lenteur avec laquelle le quatrième programme-cadre s'est adapté à l'apparition de l'épidémie d'encéphalite spongiforme bovine en est une illustration.

Des méthodes de gestion peu satisfaisantes

Une des raisons principales de la remise en cause de la politique communautaire de la recherche tient dans la lourdeur des procédures administratives qui régissent l'attribution des aides prévues par les programmes-cadre.

Les bénéficiaires des programmes soulignent notamment la longueur des délais . En effet, plus d'un an s'écoule en général entre la clôture des appels à propositions et le premier versement, l'étape la moins satisfaisante étant celle de la conclusion et de la signature des contrats.

En outre, le groupe d'experts souligne l'absence de transparence des procédures de sélection, les rejets de dossier demeurant insuffisamment motivés.

On ne peut que déplorer cette opacité du processus de décision quand on connaît l'investissement que peut représenter pour les entreprises la constitution d'un dossier.

Enfin, il apparaît que les méthodes d'évaluation des actions entreprises par la Communauté peuvent être améliorées .

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