EXAMEN EN COMMISSION

La commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées a examiné le présent projet au cours de sa réunion du mercredi 13 mai 1998.

A l'issue de l'exposé du rapporteur, un débat s'est instauré entre les commissaires.

M. Christian de La Malène a fait état de la grande perplexité qu'il éprouvait devant le projet d'élargissement de l'OTAN. Il avait le sentiment que des décisions très importantes étaient prises en dehors du Parlement : l'OTAN se transformait, les rapports avec la Russie étaient modifiés, de même la portée de l'article 5... En bref, a-t-il estimé, c'est la réalité du Pacte atlantique qui se trouvait ainsi fondamentalement changée sans que le Parlement en ait été suffisamment informé. C'est la raison pour laquelle il ne pouvait, pour sa part, approuver les projets de loi proposés.

M. André Dulait, rapporteur, a convenu que l'OTAN s'était transformée, mais dans le but de s'adapter au nouveau contexte stratégique prévalant aujourd'hui en Europe. Dès lors, a-t-il estimé, l'adhésion des trois nouveaux Etats à l'Organisation n'affectait pas les intérêts essentiels de l'Europe ou de la France.

M. Pierre Biarnès a estimé que cet élargissement était contraire à nos intérêts nationaux. Il allait, selon lui, à l'opposé de notre volonté de voir naître une Europe politique et militaire. Rappelant son hostilité constante à l'OTAN, M. Pierre Biarnès a estimé que la position des Etats-Unis révélait à la fois un désir d'hégémonie sur l'Europe occidentale et la nostalgie du "partenariat" avec Moscou.

M. Nicolas About s'est demandé si l'élargissement proposé contribuerait réellement à la défense de l'Europe, la Pologne, la Hongrie et la République tchèque étant trois pays stables de l'Europe centrale. Il a craint par ailleurs que, derrière les règles de l'interopérabilité des équipements militaires, n'apparaisse par trop le souci des industries d'armement américaines de conquérir de nouveaux marchés. Il a enfin estimé que cet élargissement traduisait l'incapacité de l'Europe à prendre ses responsabilités en matière de défense et de sécurité. A son avis, les dépenses consacrées à l'élargissement auraient pu trouver meilleur emploi pour lutter contre les risques du nucléaire civil, contre la prolifération ou encore contre les mafias. M. Nicolas About a conclu en souhaitant que nous ne nous fassions pas les complices de la lutte d'influence conduite par les Etats-Unis en Europe.

M. Jean-Luc Bécart, après avoir salué la qualité de la présentation des projets de loi par le rapporteur, a déclaré que l'élargissement de l'OTAN vers la Russie était, selon lui, une erreur qui ne servait pas les intérêts militaires ou politiques de l'Europe. L'élargissement des compétences de l'OTAN lui paraissait par ailleurs dangereux. Il convenait, a estimé M. Jean-Luc Bécart, de ne pas sous-estimer les "crispations" russes et leurs conséquences éventuelles sur la période de l' "après-Eltsine".

M. Xavier de Villepin, président, a relevé les déclarations du rapporteur concernant l'article 5 du traité de Washington et il s'est interrogé sur la portée et la signification de cet article dans le cadre d'une OTAN qui évolue considérablement. Il s'est également inquiété de l'avenir de l'UEO dans ce nouveau contexte. Il a enfin souligné les risques liés à l'instabilité de certaines régions européennes, à l'exemple du Kosovo aujourd'hui.

M. André Dulait, rapporteur, a fait observer que l'article 5 demeurait un élément central de l'Alliance atlantique, mais que l'évolution stratégique rendait son éventuelle mise en oeuvre, au sens d'une riposte militaire globale, plus improbable que du temps de la guerre froide. Il a reconnu que pour les pays candidats à l'élargissement de l'OTAN, celle-ci représentait -de par l'implication des Etats-Unis- une garantie de sécurité que ne leur offrait pas encore le cadre européen.

M. Xavier de Villepin, président, a alors estimé que l'intérêt de la France était de ratifier cet élargissement, compte tenu notamment de l'attente très forte des trois pays concernés, traditionnellement amis de la France. Il a souligné que les réserves légitimes exprimées par certains commissaires ne devaient en aucune manière conduire à rejeter un processus d'élargissement qui répondait à l'évolution du continent européen dans le contexte de l'après-guerre froide.

Après que M. Pierre Biarnès eut invité le rapporteur à informer notre Assemblée des vives réserves exprimées au cours du débat en commission, M. André Boyer a indiqué qu'il voterait les trois projets de loi proposés. Il s'est cependant inquiété des rapports futurs entre l'OTAN et l'ONU ainsi que de la pertinence des efforts déployés pour doter l'UEO de forces militaires propres.

La commission a alors, suivant l'avis de son rapporteur, approuvé les trois projets de loi qui lui étaient soumis.

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