b) Pour des droits de mutation garantissant la liberté de transmettre ses biens à ceux qui vous sont proches

A moyen terme, il est évident que la France ne pourra pas échapper à une refonte des droits de mutation à titre gratuit. Comme on l'a vu, son barème est beaucoup trop élevé par rapport à celui de ses principaux partenaires européens.

A l'heure actuelle, l'abattement autorisé est particulièrement bas : 500.000 francs pour les conjoints, 300.000 francs pour les ascendants, 150.000 francs pour les frères et soeurs et 10.000 francs (sic !) dans les autres cas. Ces abattements devront donc être progressivement relevés à un niveau compatible avec le souhait de nos concitoyens de pouvoir assurer l'avenir matériel de leurs proches.

En particulier, il est inacceptable que le taux de 20 % s'applique pour la fraction de part nette taxable comprise entre 100.000 francs et 3,4 millions de francs. En effet, cette tranche est beaucoup trop large.

Il convient donc de revoir les premières tranches du barème afin de les relever significativement pour éviter ce paradoxe que des fortunes de 100.000 francs ou de 3,4 millions de francs soient jugées équivalentes, puisqu'elles sont taxées au même taux marginal.

Certes, des dispositions existent en cas de donations anticipées, mais certains dispositifs, ainsi que cela a été signalé à la mission, viennent en atténuer l'efficacité.

Tel est le cas, en particulier, du barème fixant la valeur de l'usufruit, qui constitue une entrave d'autant plus regrettable aux transmissions de patrimoines que l'on s'efforce, au contraire, de favoriser par tous les moyens les donations anticipées. Ceci est de la première importance au regard de notre sujet, dans la mesure où précisément, c'est l'excès de taxation des transmissions d'entreprises qui légitime l'expatriation.

Établi au début du siècle sur la base d'une espérance de vie de près de 20 ans inférieure à celle d'aujourd'hui et de taux d'intérêt sensiblement plus faibles, le barème actuel tend à sous-estimer la valeur de l'usufruit que le donataire conserve et partant surévaluer celle du bien transmis.

La surévaluation de l'assiette de l'impôt et, donc, des droits, est pénalisante pour les transmissions d'entreprises, qui, on le sait, donnent lieu parfois à des comportements d'expatriation de la part de ceux qui cherchent à éviter le poids d'un impôt jugé excessif

LES ATTRAITS DE LA FISCALITÉ BELGE POUR LES PARTICULIERS

I. DES RÉGIMES ATTRAYANTS POUR LES PARTICULIERS

Comparé au système français, l'impôt sur les personnes physiques comporte un certain nombre de zones non taxables ou faiblement taxées qui attirent les contribuables fortunés voulant échapper à la fiscalité sur le patrimoine existant en France. La fiscalité des revenus du travail est en revanche considérée comme confiscatoire.

1. Exonération des plus-values mobilières : Les plus-values provenant de la gestion normale d'un portefeuille privé sont en principe non imposables à l'exception des plus-values résultant de participations substantielles (> 25 %) détenues dans une société belge et cédées à une société étrangère.

2. Taxation proportionnelle des produits financiers : Les dividendes et les intérêts sont, sauf exception, soumis à un prélèvement libératoire compris entre 15 et 25 %. Ils ne sont pas soumis à la progressivité de l'impôt sauf lorsque celle-ci est plus favorable.

3. Il n'existe pas d'impôt sur la fortune.

4. La donation : Les donations manuelles, quel que soit leur montant, intervenues plus de trois ans avant le décès du donateur, sont exonérées des droits de succession.

5. Le secret bancaire : Pour les particuliers, le secret bancaire est quasi absolu sur les comptes privés. L'administration fiscale ne reçoit aucune information des banques sur les revenus perçus (en général soumis au prélèvement libératoire) et l'accès aux comptes bancaires n'est possible, sur autorisation du directeur général des impôts, que lorsqu'une enquête fait apparaître des éléments concrets laissant présumer un mécanisme de fraude fiscale. Dans les faits, les enquêtes sur un compte bancaire sont extrêmement rares (quelques unités par an).

Cette situation incite un certain nombre de nos compatriotes fortunés à venir s'installer en Belgique : pour échapper à l'ISF sur leur patrimoine mobilier présent et à venir, et, jusqu'en 1999, pour anticiper la réalisation de plus-values importantes liées notamment à la cession ou à la transmission d'entreprises créées par le contribuable.

Si elle est un pays de refuge pour une certaine catégorie de contribuables, la Belgique n'est pas particulièrement attractive au plan de la fiscalité personnelle pour un entrepreneur qui voudrait créer sa propre entreprise, compte tenu de la lourdeur de l'imposition des revenus salariaux et professionnels.

II. LES RÉGIMES FISCAUX LIÉS AUX INVESTISSEMENTS DES ENTREPRISES

La Belgique possède un dispositif légal d'agréments préalables et de décisions anticipées qui permet à l'administration d'accorder à certaines catégories d'investisseurs étrangers (essentiellement les groupes multinationaux et une partie de leur personnel) des régimes fiscaux dérogatoires au droit commun.

Les structures de holdings constituent également un outil d'optimisation fiscale internationale, auquel peuvent avoir recours ces mêmes groupes mais aussi les entrepreneurs dans le cadre de la cession de leur outil de travail.

1. Les régimes liés aux agréments et aux « rulings » :

Conçu pour attirer les investisseurs étrangers, le système a pour but de garantir la sécurité juridique des opérateurs économiques en leur donnant la possibilité d'obtenir de l'administration des décisions sur l'application future de la loi fiscale à leur égard.

- Les décisions prises par la Commission des accords fiscaux préalables : Elles sont limitativement définies par les dispositions de l'article 345 du code des impôts et concernent principalement les exonérations liées aux opérations de restructuration des groupes (système équivalent au dispositif français en matière d'agrément, article 210 et suivants du code général des impôts).

- Les accords conclus avec le service des décisions anticipées : Les accords sur les sociétés de service des groupes multinationaux permettent à ces entreprises d'exercer certaines activités au profit des autres sociétés du groupe à des prix très faibles, sans que le caractère réduit des marges bénéficiaires et des résultats imposables qui en résulte, ne soit sanctionné par l'administration fiscale.

L'Arrêté royal du 3 mai 1999 étend la possibilité d'obtenir des décisions anticipées :

- aux projets d'investissements en immobilisations corporelles et incorporelles,

- à la territorialité des implantations,

- à la détermination des prix de transfert,

- à l'application des droits d'enregistrement sur les apports en capital.

Cet outil est particulièrement adapté pour offrir des régimes clefs en main « discrets et efficaces » en terme d'attractivité fiscale sur le territoire belge.

2. Le régime des cadres expatriés des groupes multinationaux : Ces cadres sont considérés fictivement comme des non-résidents et leur imposition est strictement limitée aux revenus de source belge :

- la quote-part des rémunérations afférente aux prestations professionnelles effectuées à l'étranger est totalement exemptée d'impôt en Belgique,

- le solde taxable subit des réfactions et exonérations liées à l'expatriation.

3. Le régime des stocks-options : La particularité réside dans la taxation forfaitaire des options au moment de leur attribution et non, comme généralement, au moment de leur levée.

4. Les holdings : C'est le régime de droit commun de l'impôt sur les sociétés qui s'applique mais il est particulièrement intéressant, puisqu'il permet de cumuler les exonérations prévues en matière de dividendes perçus, de retenues à la source sur les dividendes versés et de plus-values sur les cessions de participations.

L'exonération des plus-values sans condition de taux ou de durée de détention en font l'un des régimes les plus attractifs d'Europe.

Ce dispositif fiscal, qui s'adresse particulièrement aux groupes multinationaux, est décrié par les partenaires européens de la Belgique mais également, de l'intérieur, par une partie du monde politique qui met en avant le manque à gagner fiscal lié à ces régimes.

Le ministre des finances a affirmé à plusieurs reprises que ceux-ci ne seraient supprimés qu'aux dernières échéances prévues suite au sommet de Feira. La réforme de l'impôt sur les sociétés visant à une baisse des taux s'appliquant à une assiette élargie dans laquelle est engagée le gouvernement sera peut-être l'occasion d'une remise en cause anticipée de cette situation.

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