C. LE RECOURS AUX OPERATEURS RELAIS

L'action du ministère de l'Industrie se caractérise par un recours très fréquent à des « organismes relais » qu'il charge de gérer tel ou tel type d'interventions. Cette pratique constitue une réponse à l'insuffisance de moyens administratifs et surtout à la difficulté de les redéployer pour faire face aux besoins, mais, outre qu'il appartient en principe aux administrations d'assurer leurs missions avec leurs moyens propres, la Cour a relevé les conséquences dommageables de ces pratiques, selon les cas : contournement de la réglementation des marchés publics, de l'annualité budgétaire ; diversité et opacité des conditions de rémunération des opérateurs relais ; perte de lisibilité budgétaire (difficulté à suivre l'affectation et la consommation des crédits)...

4. Les organismes relais au plan national

a) L'APRODI

L'APRODI, créée en 1969 (sous le nom de CEFAGI), a toujours gravité dans la périphérie du ministère de l'Industrie. Depuis 1995, elle assure pour environ 3 M€/an des prestations de services pour la gestion de la procédure ATOUT : bilans, statistiques et indicateurs de gestion ; assistance aux régions avec la mise en place dans les DRIRE de dix chargés de mission ; commande d'expertises de certains projets sur demande des DRIRE ; animation du programme avec, en particulier, des actions de sensibilisation et de conseil des entreprises, ainsi que des actions d'information et de formation. Ces activités, assurées (en principe) en direct par l'administration pour les autres types d'interventions, représentent plus de 80 % des ressources de l'association, qui apparaît donc comme un démembrement de l'Etat.

b) L'ACTIM

Association d'entreprises et d'organismes professionnels utilisés pour partager les opérations de promotion en faveur de l'économie française à l'étranger, l'Agence pour la promotion internationale des technologies et des entreprises françaises (ACTIM), qui a fusionné en 1997 avec le Comité français pour les manifestations économiques à l'étranger (CFME), est surtout utilisée par la DREE, mais est parfois aussi le relais des directions du ministère de l'Industrie. Un contrôle précédent de la Cour, portant sur les exercices 1992-1996, avait critiqué la pratique des dépenses dites hors-budget pratiquées pour le compte de l'Etat et financées par des subventions de celui-ci, le recours à une association para-administrative permettant aux services de l'Etat de s'affranchir des règles d'exécution des dépenses budgétaires et du principe de l'annualité budgétaire. L'ACTIM a continué à recevoir après 1996 des subventions du ministère de l'Industrie (entre 152 et 183 K€/an entre 1997 et 2000).

c) La SODIE

La Société pour le développement de l'industrie et de l'emploi, société de conversion du groupe USINOR, intervient dans des opérations où sont par ailleurs mis en oeuvre des crédits de politique industrielle. Ainsi, tandis que l'Etat finançait en partie le plan social de l'établissement Chausson de Creil après 1995, la SODIE a été chargée d'animer l'« antenne emploi » et d'accorder des aides (sous forme de prêts bonifiés) à la réindustrialisation du bassin d'emploi.

Ces interventions s'inscrivent dans le cadre de deux conventions successives, passées suite à la privatisation d'USINOR, par lesquelles la SODIE s'est engagée sur des enveloppes financières consacrées à des opérations dites de reconversion ou d'industrialisation « programmées par l'Etat » et menées sous forme de prêts, soit 133,39 M€ sur les exercices 1996-1999 et 123,18 M€ sur les exercices 2000-2004. Ces montants résultent apparemment 18 ( * ) du « recyclage » de dotations de l'Etat antérieures à la privatisation d'USINOR et non consommées (ou consommées sous forme de prêts dont les remboursements doivent à nouveau être recyclés). Il s'agit donc, en quelque sorte, de la mobilisation décalée dans le temps de crédits d'Etat, ce qui n'en facilite certes pas le suivi, et nuit à la lisibilité budgétaire : on découvre ainsi qu'aux 136 M€ d'autorisations de programme nouvelles inscrites de 1996 à 1999 sur les crédits budgétaires de reconversion et restructuration 19 ( * ) , il convient en fait d'ajouter (notamment) l'enveloppe de 133 M€ susmentionnée, disponible aux mêmes fins pour les mêmes exercices... De plus, les montants inscrits dans les deux conventions présentent manifestement un caractère négocié et forfaitaire 20 ( * ) qui ne permet pas d'être assuré que l'intégralité des dotations antérieures de l'Etat sont bien « récupérées » à travers ce dispositif.

Le contrôle de l'Etat sur les actions qu'il programme est assuré par divers mécanismes : l'Etat fixe les zones d'intervention de la SODIE et des objectifs en termes d'emploi, qui font l'objet de compte-rendu périodiques, et est représenté au comité d'engagement, qui semble se réunir régulièrement (dix réunions en 2001) et prend ses décisions à l'unanimité. 85,14 M€ ont été engagés au titre de la convention 1996-1999, soit 64 % du montant prévu, et les objectifs de création d'emplois ont été atteints selon le bilan produit (17 000 emplois créés).

d) La SADEF

Filiale de la BPME et de Natexis, la SADEF a été utilisée dans la passé par le secrétariat du CIRI pour gérer un dispositif de prêts d'honneur à des repreneurs de petites et moyennes entreprises qui, compte tenu de son taux de sinistre supérieur à 50 %, a été supprimé. Cette intervention est proche d'être soldée (le comité du contentieux s'est réuni en décembre 2001 pour statuer sur les derniers prêts non remboursés).

La SADEF a également été utilisée pour financer des audits d'entreprises dans le cadre des interventions du CIRI, le recours à une société de droit privé permettant de contourner la réglementation des marchés publics. Il a été indiqué que la convention de 1976 instituant ce dispositif avait été abrogée le 18 mars 2002.

* 18 Il n'a pas été produit d'explication détaillée sur leur calcul.

* 19 Totalisation des AP ouvertes en lois de finances initiales et rectificatives, après défalcation des annulations, sur les chapitres 62-01 et 64-96 de 1996 à 1999.

* 20 Par ex., dans la convention 1996-1999, l'article 3, listant les « sommes utilisables » pour les actions de la SODIE, mentionne diverses sommes dont une de 490 MF « fixée d'un commun accord », puis dispose que seulement 70 % de certaines de ces sommes seront effectivement consacrées aux actions programmées par l'Etat...

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