AVANT PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Encore un rapport sénatorial d'information sur La Poste !

Après les deux précédents rapports d'information de 1997 et 1999 1 ( * ) et les deux colloques de 1999 et 2001, qu'y avait-il à dire de plus sur La Poste ? L'avenir du paysage postal n'avait-t-il pas déjà été dessiné, le chemin tracé, les options débattues ?

Pourtant, si la commission des affaires économiques et son groupe d'études « poste et télécommunications » ont décidé, le 14 janvier 2003, de tenter de contribuer à nouveau, par leurs réflexions et propositions, à éclairer et à peser, modestement, sur l'avenir de La Poste, c'est que la question postale se pose, aujourd'hui, avec une acuité renouvelée.

A y réfléchir en effet, en cinq ans, bien peu a été fait. L'avenir de la plus grande entreprise de France, d'un service public de proximité aimé des Français, confronté à un ébranlement sans précédent, n'a même pas été l'objet d'un débat public ! Le grand débat national que nos voisins européens ont conduit, la loi d'orientation postale qu'ils ont discutée puis votée, les orientations pour l'avenir, fixées par la Nation par la voie de ses représentants, rien de tout cela n'a eu lieu en France. Au contraire, la transposition des directives postales européennes -le minimum obligatoire, en quelque sorte- a eu lieu en catimini, par voie d'amendement à un texte traitant... d'aménagement du territoire (la loi du 29 juin 1999) !

Alors que les bouleversements qu'entrevoyaient déjà les précédents rapports se sont concrétisés -choc concurrentiel sur le courrier, accélération de la substitution du courrier électronique, attrition des services financiers postaux- et que les autres postes européennes se sont métamorphosées, La Poste a peu bougé, comme si le temps du monopole devait être éternel.

Devant la peur des changements à conduire dans la première entreprise de France, et faute d'avoir le courage d'un discours de vérité, la tutelle de La Poste n'a pas impulsé la dynamique indispensable à sa survie dans un monde radicalement bouleversé. La Poste n'est pas une entreprise comme les autres : elle a un rôle territorial, un rôle de lien social. Mais cette spécificité, qui devrait être la première motivation pour le changement, a servi d'alibi à l'immobilité .

Il faut le dire clairement : sans réforme, La Poste est condamnée . Condamnée aux déficits, au repli sur soi, à l'appauvrissement. Condamnée au dépérissement de son réseau sur le territoire. Condamnée à ne plus jouer de rôle majeur en Europe et à être, en France, sous perfusion d'aides publiques. Asphyxiée par des charges héritées du temps du monopole, incapable de dégager les bénéfices nécessaires à la modernisation de ses processus de production, elle ne serait dans ce cas plus en mesure d'offrir un avenir aux postiers, d'assurer ses missions de service public, d'offrir à ses clients les services qu'ils attendent ni de jouer son rôle central dans l'économie nationale. Les dommages économiques et sociaux -pour plus de 300.000 postiers !- d'un tel scénario seraient immenses.

La Poste est, plus que jamais, mortelle. Elle se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins.

A l'heure de la négociation de ce qui pourrait être son dernier contrat de plan avec l'État, elle doit parcourir en 5 ans le chemin que d'autres postes européennes ont engagé depuis 10 ou 20 ans.

Le but de ce rapport d'information est de l'accompagner sur ce chemin, celui de l'avenir.

* 1 Rapports d'information de la commission des Affaires économique et du groupe d'études « poste et télécommunication » n° 42, Sénat 1997/1998 et n° 463, Sénat, 1998/1999

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