B. POINTS DE VUE SUR LES EFFETS PERVERS DU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE

De multiples propositions de réforme du PSC ont été faites pour prévenir les effets indésirables du pacte sur certaines dépenses publiques . Les participants au colloque ont, presque tous, évoqué ces propositions. Dans l'ensemble, à quelques importantes nuances près auxquelles peut se rallier votre Délégation compte tenu de ses positions antérieures, leur jugement sur ces propositions a été plutôt négatif .

Il est possible de présenter l'esprit des propositions sous revue en indiquant qu'elles s'inspirent d'une préoccupation d'éviter que la discipline budgétaire ne conduise à sacrifier des dépenses jugées utiles . Parmi celles-ci, sont fréquemment citées les dépenses d'investissement , les dépenses de recherche-développement ou encore les dépenses militaires .

Avec cette dernière catégorie de dépenses, on touche à une seconde justification de ces propositions, qui est de traiter plus équitablement des Etats de l'UEM en tenant compte des efforts particuliers réalisés dans certains domaines présentés comme d'intérêt général.

A ces propositions, plusieurs intervenants ont opposé des arguments convaincants , tout en reconnaissant, d'une part, que les ajustements budgétaires conduisent souvent à sacrifier les dépenses les moins inertes qui sont aussi les plus utiles et, d'autre part, que la qualité de la dépense publique est une composante importante des conditions de la croissance en Europe.

Jean PISANI-FERRY a judicieusement fait observer que la raison d'être du PSC était non d'améliorer la qualité de la dépense publique mais d'assurer la discipline budgétaire en Europe.

Jean PISANI-FERRY :

« ... Il me semble que le Pacte de Stabilité est un dispositif qui vise à assurer la discipline budgétaire et qu'il n'est pas un dispositif qui vise à améliorer la qualité de la dépense publique et que nous avons intérêt à spécialiser les instruments. »

Abondant dans ce sens, Marco BUTI a fait valoir les difficultés concrètes à introduire les dépenses publiques utiles dans le mécanisme du PSC, ne serait-ce que parce qu'elles sont extrêmement difficiles à circonscrire.

Marco BUTI :

« ... Je voudrais citer une autre étude du Professeur Modigliani avec M. Padoa-Schiopa, un peu plus ancienne où ils essayaient de voir à l'intérieur du budget total de l'Italie et des dépenses publiques ce qu'étaient les dépenses favorables à la croissance. A l'époque -c'était avant la « new economy », peut-être que maintenant nous pourrions en rajouter- nous arrivions, si je ne m'abuse, aux alentours de 16 % du PIB. Nous exclurions 16 % du PIB du calcul du déficit ? Je me pose la question.

Lisbonne, par ailleurs, dessine une stratégie de croissance où il y a les dépenses de recherche et développement, de formation, etc... qui sont des « dépenses soft » plutôt que des dépenses d'infrastructures. C'est un peu la nouvelle voie pour une stratégie de croissance. Tout cela devient très flou. Il me semble difficile, même avec une décision du Conseil Européen, d'appliquer de telles règles. »

Il semble à votre Délégation qu'il est très difficile de dépasser les objections adressées aux propositions visant à prendre en compte la seule qualité de la dépense publique dans le formatage des règles de surveillance budgétaire en Europe.

Celui-ci doit être principalement déterminé en se référant aux risques de survenance d'externalités négatives pour les Etats partenaires du fait d'une dérive des besoins de financement, et, plus globalement, d'une mauvaise orientation donnée aux politiques budgétaires.

Toutefois, une considération raisonnable doit être portée , selon votre Délégation, à la nature de la dépense publique .

Dans son rapport de l'automne dernier, votre Délégation avait déjà évoqué cette question en estimant qu'il convenait de réserver la question des investissements publics . Elle avait relevé que les règles de la surveillance budgétaire en Europe mentionnent expressément ce type de dépenses que l'évaluation de la situation budgétaire des Etats peut être amené à prendre en compte. Par ailleurs, elle avait rappelé les termes de la règle d'or appliquée au Royaume-Uni qui permet, sous certaines réserves, le lancement d'emprunts publics susceptibles de financer l'investissement.

Surtout, sans adhérer complètement à l'idée que les investissements publics sont systématiquement porteurs de croissance, elle n'avait pas été insensible à cette considération mais, également, ce qui est peut-être encore plus important, au fait que les investissements publics réunissent deux propriétés particulières :

• l'absence de récurrence de la dépense ;

• l'utilité prolongée des biens qu'ils produisent.

Il avait, par conséquent , semblé à votre Délégation raisonnable que la discipline budgétaire en Europe n'interdise pas de financer, au moins en partie, de telles dépenses par l'emprunt .

Ce parti pris fonde la proposition de votre Délégation d' admettre l'existence d'un déficit structurel qu'il paraît toutefois raisonnable de contenir par une limite qui pourrait être de 2 points de PIB.

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