III. L'ACCÈS DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT AUX    MÉDICAMENTS

1. La base de l'accord ADPIC

L'accord ADPIC (Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) (9 ( * )) , qui constitue l'annexe 1C de l'accord de Marrakech instituant l'OMC, est à ce jour l'engagement multilatéral le plus complet en matière de propriété intellectuelle. Cet accord, relatif aux brevets, aux droits d'auteurs et aux marques de commerce, reconnaît notamment au détenteur de brevets un monopole sur les droits de vente pour une longue période. Lors de la Conférence de Doha, les ministres sont convenus de prévoir une interprétation particulière de cet accord dans le cadre particulier de la santé publique.

La question de l'accès des pays les plus pauvres aux médicaments s'est trouvée au centre des discussions de la Conférence de Doha. Elle est devenue, en quelque sorte, le symbole de la prise en compte des spécificités des pays en voie de développement et de leur intégration à un monde globalisé et elle a conditionné, pour une large part, leur ralliement au principe de l'ouverture d'un nouveau cycle de négociations commerciales internationales.

L'enjeu du problème est en effet immense : selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le tiers de la population mondiale, soit deux milliards de personnes environ, n'a pas accès aux médicaments essentiels. Or, la situation sanitaire des pays en développement - notamment en raison de l'épidémie de sida qui touche 42 millions de malades à travers le monde, massivement en Afrique, et dont 90 % ne disposent pas de médicaments - est dramatique. Son ampleur justifie que soient mises à leur disposition les substances pharmaceutiques auxquelles ils ne peuvent pour l'instant avoir accès compte tenu de leur prix sur le marché. À titre d'illustration, on évalue à 6,8 millions le nombre de personnes touchées par le virus du sida en Afrique de l'ouest. Au prix pratiqué sur le marché européen, le traitement de ces populations coûterait six milliards d'euros par an, à rapprocher des 500 millions d'euros que l'ensemble des pays concernés consacre chaque année aux budgets de santé.

Il n'est pas inutile de préciser pourquoi cette problématique, qui relève plutôt a priori d'une approche de santé publique, de solidarité et d'aide humanitaire, s'est trouvée directement mêlée à des négociations internationales de type commercial.

Le problème se pose à travers l'accord ADPIC qui régit la protection, au niveau mondial, des droits de propriété intellectuelle et dont la réforme était inscrite à l'agenda de Doha. Cet accord instaure des droits pour ceux qui en sont titulaires et prévoit des mécanismes permettant de les faire respecter. La réglementation s'applique notamment aux médicaments et participe de la détermination de leur prix de vente. L'attente des pays en développement, qui sont désormais majoritaires au sein de l'OMC, était très forte à l'égard des pays développés sur l'assouplissement des règles internationales en matière thérapeutique.

Les débats conduits lors de la Conférence de Doha ont donc tendu à trouver une solution juridique acceptable pour tous, permettant de réduire le prix des médicaments, en autorisant l'exemption des droits, sans pour autant porter atteinte aux moyens financiers qui en découlent et qui servent à alimenter la recherche.

* (9) En anglais, accord TRIP : Trade Related Intellectual Property agreement.

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