CHAPITRE TROIS :
LA RÉPARTITION D'UNE SUBVENTION IMPLICITE DE L'ETAT AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS LOCALES LES PLUS IMPOSÉES

Bien que les dégrèvements législatifs de taxe d'habitation aient le caractère d' aides individuelles accordées par l'Etat à certains contribuables, ils équivalent à une subvention accordée aux collectivités locales où résident ces contribuables. Ces subventions sont « implicites » en ce sens qu'elles ne sont pas connues des collectivités locales bénéficiaires puisqu'elles ne figurent pas dans leurs budgets ; elles diffèrent en cela des compensations d'exonérations qui sont des subventions « explicites » inscrites en recettes budgétaires ; mais économiquement, ces deux types d'allègements de taxe d'habitation sont de même nature et doivent être analysés ensemble.

Globalement, l'Etat a pris à sa charge en 2001 29,2 % des ressources que les collectivités locales tirent de la taxe d'habitation frappant les résidences principales.

La part prise en charge par le contribuable national regroupe le montant des dégrèvements législatifs et la compensation des exonérations. Cette compensation est versée aux collectivités locales avec un décalage d'un an ; mais on intégrera dans les ressources de taxe d'habitation de 2001 la compensation versée en 2002 pour assurer une homogénéité dans les données.

Cette part financée par l'Etat doit être rapportée à l'ensemble des ressources tirées de la taxe d'habitation par les départements, les communes et leurs groupements. Ces ressources comprennent le produit fiscal voté, dégrèvements compris auquel s'ajoute la compensation des exonérations versée par l'Etat 44 ( * ) . De plus, les ressources de taxe d'habitation prises en considération correspondent aux seules résidences principales , à l'exclusion des résidences secondaires qui ne bénéficient ni d'exonérations, ni de dégrèvements législatifs 45 ( * ) .

Part financée par l'État=

(dégrèvements législatifs 2001 + compensation d'exonérations 2002)

(Imposition 2001 des résidences secondaires + compensation d'exonérations 2002)

Pour que puisse être appréciée l'aide apportée par l'Etat à chaque collectivité locale, une difficulté majeure devait être surmontée : les dégrèvements sont accordés directement aux contribuables au vu de leur cotisation globale de taxe d'habitation et ne sont donc pas ventilés entre les diverses collectivités locales (commune, département et le cas échéant EPCI) et l'Etat (pour la part correspondant aux frais d'assiette ). Pour déterminer la subvention « implicite » à chaque collectivité locale et nonobstant certaines difficultés présentées dans une note méthodologique figurant en annexe III, on a procédé à une ventilation, commune par commune, du montant des dégrèvements législatifs au prorata de la part des cotisations allant à l'échelon communal, au département et à l'Etat 46 ( * ) . On a de plus été dans l'obligation de regrouper dans un niveau dit « semi-global » la part communale et la part de taxe d'habitation levée au profit de l'EPCI dans la même commune. La répartition du produit de la taxe d'habitation entre commune et groupement dépend en effet d'un facteur extérieur au cadre de cette étude, l'adoption ou non de la TPU comme mode de financement de l'intercommunalité 47 ( * ) .

On présentera d'abord la répartition entre collectivités de la part financée par l'Etat (I) avant de montrer que cette répartition se calque sur celle de la pression fiscale locale mesurée en termes de revenu (II).

I. LA RÉPARTITION SPATIALE DU FINANCEMENT NATIONAL DE LA TAXE D'HABITATION

Cette répartition duplique évidemment celle des effectifs de contribuables bénéficiant d'un allègement, présentée dans le chapitre deux. Elle s'en écarte cependant pour trois raisons essentielles.

D'abord la part des ressources provenant de l'Etat, 29,5 %, est très inférieure au pourcentage des effectifs dégrevés, 49,5 %, les contribuables de condition modeste n'occupant pas de logements à haute valeur locative, sauf exception.

Ensuite, la répartition spatiale des ressources étatiques n'est pas la même pour les deux échelons semi-global et départemental. Cette séparation en deux échelons n'avait pas de raison d'être pour l'analyse du nombre de bénéficiaires, une personne dégrevée l'est aussi bien pour l'impôt départemental que pour l'impôt communal.

Enfin, les dégrèvements partiels correspondent à des taux moyens d'allègement des impositions qui varient d'une collectivité à l'autre.

On présentera en conséquence la répartition spatiale des dégrèvements et exonérations à trois niveaux, au niveau semi-global (communes + EPCI), au niveau départemental et enfin au niveau dit global (commune + EPCI + département).

A. UNE PRISE EN CHARGE PAR L'ETAT DE 29,5 % DE LA TAXE D'HABITATION SEMI GLOBALE (COMMUNES ET EPCI)

Le contribuable national prend en charge 26,2 % des ressources communales de taxe d'habitation des communes rurales au titre de leurs résidences principales et 30 % de celles des communes urbaines . Mais ces données moyennes recouvrent d'importantes inégalités.

Un ensemble de tableaux fera ressortir pour chaque niveau :

(1) le montant par habitant des ressources de taxe d'habitation (montant des impositions dégrèvements compris et de la compensation des exonérations) ;

(2) le montant par habitant des ressources de taxe d'habitation financé par le contribuable national ; ce montant se décompose en trois parts : dégrèvements totaux, dégrèvements partiels et compensation des exonérations

(3) = (2) / (1) le pourcentage des ressources de taxe d'habitation pris en charge par le contribuable national.

1. Une forte concentration de la participation de l'Etat dans les grandes communes urbaines, sauf Paris

La colonne (3) du tableau 3-1 révèle que le montant moyen par habitant de taxe d'habitation à la charge du contribuable national augmente très fortement lorsqu'on s'élève dans les strates de communes urbaines : il passe de 74,6 francs dans les communes de moins de 500 habitants à 465,7, soit six fois plus, dans les villes de plus de 200 000 habitants, à la notable exception de Paris. Cette augmentation est principalement due aux dégrèvements totaux et surtout partiels (le montant de ces derniers décuple lorsqu'on passe de la strate 1 à la strate 15) alors que le produit des compensations d'exonérations ne fait que tripler dans le même intervalle.

Cette tendance à la concentration de la participation de l'Etat dans les grandes villes résulte de la superposition de deux facteurs. D'abord, le produit des ressources par habitant de taxe d'habitation s'accroît au fur et à mesure que l'on s'élève dans la hiérarchie urbaine (colonne 1), Paris exclu ; ensuite la part prise en charge par le contribuable national s'élève également de 20 % environ dans les petites communes urbaines à 35 % en moyenne dans les plus grandes villes, Paris une fois encore exclu (colonne 2).

Tableau 3-1
Montant moyen par habitant des ressources semi-globales de taxe d'habitation
Communes rurales et urbaines classées par strates de population.

(en francs 2001)

On remarquera enfin que la part de l'Etat est nettement plus forte dans les communes rurales de moins de 2.000 habitants - 26 % en moyenne- que dans les communes urbaines de même taille - 20 % en moyenne, en raison du montant plus élevé des compensations d'exonérations dans les premières dont la population est souvent vieillissante.

* 44 Au lieu et place de celle perçue effectivement en 2001.

* 45 On utilisera de ce fait pour calculer des données par habitant la population totale de chaque collectivité en 1999 et non sa population DGF qui incorpore un habitant supplémentaire par résidence secondaire.

* 46 Une ventilation au prorata des seuls taux d'imposition est incorrecte car ces taux dépendent eux-même des politiques d'abattement : à produit constant, une majoration des abattements nécessite une augmentation des taux.

* 47 Le passage à la TPU d'un EPCI levant antérieurement une fiscalité additionnelle sur les quatre taxes entraîne généralement la suppression de la part communautaire de la TH et son report sur la fiscalité communale.

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