Rapport d'information n° 432 (2005-2006) de M. Joël BOURDIN et Mme Nicole BRICQ , fait au nom de la commission des finances, déposé le 28 juin 2006

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N° 432

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 28 juin 2006

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur l' enquête de la Cour des comptes relative au fonctionnement du service public de l' équarrissage ,

Par M. Joël BOURDIN et Mme Nicole BRICQ,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM.  Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM. Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Roger Karoutchi, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

Animaux.

SOMMAIRE

Pages

AVANT-PROPOS 5

I.  LA PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE RELATIVE AU FONCTIONNEMENT DU SERVICE PUBLIC DE L'ÉQUARRISSAGE 7

II. L'ÉVOLUTION DU CADRE JURIDIQUE DU SPE 9

A. DU SERVICE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU SERVICE PUBLIC (1975-1996) 9

B. L'EXTENSION DES MISSIONS DE L'ETAT (1997-2005) 9

C. LA RÉFORME VOTÉE EN LOI DE FINANCES POUR 2006 10

III. LA GESTION ET L'EXÉCUTION DU SPE 11

A. L'IMPUISSANCE DE L'ETAT À FAIRE JOUER LES RÈGLES DE LA CONCURRENCE 11

B. LES CARENCES DE L'INFORMATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE 13

C. LES DIFFICULTÉS ET L'HÉTÉROGÉNÉITÉ DU CONTRÔLE DU SERVICE FAIT 13

IV. L'ÉVOLUTION DES AIDES PUBLIQUES ET DU FINANCEMENT DU SPE 14

A. DES AIDES PUBLIQUES COMPLEXES ET CHANGEANTES 14

B. LE COÛT DES AIDES PUBLIQUES 15

C. L'ÉVOLUTION DU FINANCEMENT DU SPE 16

1. Une taxe sur les achats de viande contestée par les instances européennes 16

2. Une taxe sur les abattoirs récusée par la filière viande 17

3. La réforme du financement du SPE par la loi de finances pour 2006 19

V. LA GESTION BUDGÉTAIRE, FINANCIÈRE ET COMPTABLE PAR LE CNASEA 20

A. UNE GESTION BUDGÉTAIRE DIFFICILE ET COÛTEUSE 20

B. UN COÛT D'INTERVENTION NON NÉGLIGEABLE 20

C. LES DÉLAIS DE PAIEMENT DES DÉPENSES DU SPE 20

TRAVAUX DE LA COMMISSION : AUDITION POUR SUITE À DONNER À L'ENQUÊTE RÉALISÉE PAR LA COUR DES COMPTES, EN APPLICATION DE L'ARTICLE 58-2° DE LA LOLF, SUR LE SERVICE PUBLIC DE L'ÉQUARRISSAGE 23

ANNEXE : COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES À LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT SUR LE FONCTIONNEMENT DU SERVICE PUBLIC DE L'ÉQUARRISSAGE (SPE) 49

AVANT-PROPOS

En application des dispositions de l'article 58-2° de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), notre collègue Jean Arthuis, président de votre commission des finances a, par lettre du 1 er mars 2005, demandé à M. Philippe Séguin, Premier président, la réalisation par la Cour des comptes d' une enquête sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage (SPE) .

Cette enquête a été adressée à la commission des finances le 26 janvier 2006, soit près de trois mois après le délai maximum de huit mois fixé par l'article 58-2° de la LOLF. Toutefois ce retard s'explique par le fait qu'une réforme significative du service public de l'équarrissage a été mise en oeuvre par la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances initiale pour 2006, réforme dont tient compte la présente enquête.

Elle a donné lieu à une audition pour suite à donner en présence de MM. Jacques Sallois , président de la 7 ème chambre de la Cour des comptes, Jean-Pierre Lafaure , conseiller-maître, Francis Brun-Buisson , conseiller-maître, Jean-Pierre Sekely , rapporteur, Olivier Mary , chef de mission à la direction générale de l'alimentation du ministère de l'agriculture et de la pêche, Philippe Vinçon , sous-directeur de l'élevage et des produits animaux à la direction des politiques économique et internationale du ministère de l'agriculture et de la pêche, Bernard Bezeaud , directeur général adjoint du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA), Bertrand Oudry , attaché principal à la sous-direction des produits agricoles et alimentaires de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, Jean-Jacques Pinet , adjoint au chef du bureau du commerce, de la distribution et de l'artisanat à la direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales du ministère des petites et moyennes entreprises, commerce, de l'artisanat et des professions libérales, enfin Olivier Caillou , chef de bureau à la 7 ème sous-direction de la direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Selon l'usage, l'audition a été ouverte aux membres de la commission des affaires économiques et à la presse.

Les principales observations de la Cour des comptes sont résumées par vos rapporteurs spéciaux dans l'encadré ci-après.

Les principales observations de la Cour des comptes sur le fonctionnement du SPE

- L'encadrement législatif et règlementaire de l'activité d'équarrissage a été progressivement précisé et renforcé , souvent dans l'urgence , en particulier pour répondre aux crises sanitaires et économiques dites de la « vache folle » ;

- D'un service d'utilité publique en 1975, l'équarrissage est devenu un service public en 1996, caractérisé par l'extension de son champ à la collecte, l'élimination et la transformation des sous-produits animaux et des matériels à risque spécifié (MRS) issus de l'activité des abattoirs, ateliers de découpe et boucheries . Le maintien de la gratuité, pour les éleveurs, de ce service a conduit à la prise en charge par l'Etat de son coût et à son financement par des ressources fiscales spécifiques ;

- En 2005, une nouvelle réforme du SPE a réduit le périmètre du SPE et en a limité la charge pour le budget de l'Etat. En outre, plusieurs mesures visant à moderniser la gestion du SPE ont été mises en oeuvre ;

- La Cour des comptes a mis en évidence les failles de la gestion du SPE , à savoir notamment l'impuissance de l'Etat et de ses représentants locaux à faire jouer les règles de mise en concurrence et de passation des marchés locaux ; la dissociation de la fonction d'ordonnateur entre les préfets et le directeur général du CNASEA ; l'insuffisance du contrôle du « service fait » par les équarrisseurs ; les difficultés financières associées à la gestion du SPE ;

- la Cour des comptes estime que le financement du SPE a été compliqué par le refus de mise à contribution des éleveurs et par le mécanisme d'assujettissement à la taxe sur les achats de viande , non notifié aux autorités européennes et dont la non-conformité au droit communautaire a eu pour conséquence des contentieux coûteux et non encore soldés ;

- La Cour des comptes souligne également les incertitudes liées à la mise en oeuvre de la réforme votée en loi de finances initiale pour 2006 , notamment économiques et financières, susceptibles de continuer à affecter la gestion et le coût du SPE : le recours à un appel d'offres national pour l'exécution de ce service ne suffira pas à instaurer d'emblée un régime de concurrence dans une profession très concentrée ; en outre des incertitudes continuent d'affecter le bilan financier du SPE : contentieux administratifs en cours, capacité des pouvoirs publics à obtenir des éleveurs une participation significative, conformément aux règles imposées par la Commission européenne.

I. LA PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE RELATIVE AU FONCTIONNEMENT DU SERVICE PUBLIC DE L'ÉQUARRISSAGE

L'équarrissage consiste à collecter, à dépecer les animaux et à en extraire la peau, les os, les graisses et d'autres matériaux issus de l'abattage. Ces divers sous-produits animaux sont ensuite transformés et valorisés, notamment sur les marchés de la lipochimie et des cosmétiques ; ils l'étaient également pour l'alimentation des animaux de production et des animaux domestiques mais l'arrêté du 14 novembre 2000 ayant interdit l'incorporation de farines animales dans l'alimentation de tous les animaux, cette possibilité de valorisation des sous-produits animaux a pris fin.

La demande d'enquête formulée par la commission des finances auprès de la Cour des comptes sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage le 1 er mars 2005 est intervenue dans un contexte de refonte du SPE suite à des remises en cause d'ordre juridique, économique et financière.

Après la promulgation de la loi relative au développement des territoires ruraux précitée, qui a engagé une réforme en profondeur du service public de l'équarrissage en tenant compte des nouvelles règles de financement mises en oeuvre, en 2004, en conformité avec les lignes directrices de l'Union européenne, le ministre de l'agriculture et de la pêche avait diligenté deux missions d'inspection afin d'organiser un audit des coûts du SPE et d'établir des propositions opérationnelles de réforme de la gestion du SPE 1 ( * ) .

A l'issue de ces travaux, le gouvernement a décidé de mettre en oeuvre une nouvelle réforme du SPE au début de l'année 2006 2 ( * ) , en s'appuyant sur le dispositif suivant : d'une part, la réduction progressive du périmètre du SPE aux seuls animaux trouvés morts en exploitation agricole et ceux dont la collecte relève de l'intérêt général, d'autre part, l'alignement progressif des dispositions techniques et sanitaires nationales sur la réglementation communautaire dans un but de simplification du dispositif et de moindre coût pour les abattoirs et les boucheries, enfin, l'adaptation du financement de ce service public.

Ainsi, depuis le début de l'année 2006, le financement du SPE provient de trois sources :

- une subvention de l'Etat, à hauteur de 44 millions d'euros en 2006 ;

- les paiements par les éleveurs de porcs et de volailles, au niveau minimum requis par les lignes directrices de l'Union européenne, et la contribution des autres éleveurs, selon des modalités à définir, a priori par le biais d'un système participatif interprofessionnel, qui fera donc l'objet d'une négociation au sein des interprofessions, et plus particulièrement de l'interprofession bovine, le tout à hauteur de 8 millions d'euros en 2006 ;

- la taxe d'abattage, instituée par la loi de finances initiale pour 2004, qui contribuera au financement du solde : le niveau de cette taxe sera déterminé selon le résultat des marchés publics passés suite à l'appel d'offre européen pour le marché national d'élimination des cadavres d'animaux lancé le 29 novembre 2005 3 ( * ) par le ministère de l'agriculture.

Ainsi, d'après les informations contenues dans le projet annuel de performances (PAP) pour 2006 relatif à la mission interministérielle « Sécurité sanitaire », pour 2006, le coût global du SPE est estimé à 136 millions d'euros . L'Etat contribuera à hauteur de 44 millions d'euros, en crédits de paiement, le solde étant réparti entre les éleveurs (participation aux coûts de 8 millions d'euros) et les filières par le produit de la taxe d'abattage, dont le rendement minimum attendu pour 2006 s'élève à 84 millions d'euros .

En outre, le PAP indique que le SPE réformé fonctionnera au travers d'un marché public national prévu pour le début de l'année 2006. Ce marché est prévu pour une durée de trois ans. Le coût annuel est de 44 millions d'euros pour 2006, soit 132 millions d'euros sur la période 2006-2008. A cette somme, il convient d'ajouter l'apurement du passé soit 110 millions d'euros d'encours. Dès lors, le montant total des autorisations d'engagement à ouvrir dès 2006 s'élève donc à 242 millions d'euros .

D'après les informations fournies au moment du vote du budget par le ministère de l'agriculture et de la pêche, la modification du périmètre du SPE aurait pour conséquence une réduction de son coût potentiel d'environ 94 millions d'euros .

Toutefois, ainsi que le souligne la Cour des comptes dans la présente enquête, « la réforme en cours apporte des réponses, non encore exhaustives, à de nombreuses questions soulevées dans son rapport mais (...) son efficacité dépend encore largement des mesures d'application qui restent à mettre au point en 2006 ».

II. L'ÉVOLUTION DU CADRE JURIDIQUE DU SPE

La Cour des comptes relève que l'encadrement législatif et réglementaire de l'activité traditionnelle d'équarrissage a été progressivement précisé et renforcé . En effet, au sein de l'activité d'équarrissage, la définition légale et le périmètre de la mission de service public qu'elle comporte ont varié en fonction des objectifs assignés aux interventions de l'Etat. A cet égard, la Cour des comptes constate que les interventions de l'Etat ont souvent été précisées dans l'urgence, en particulier pour répondre aux crises sanitaires et économiques successives dites de la « vache folle » .

A. DU SERVICE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU SERVICE PUBLIC (1975-1996)

La Cour des comptes rappelle que la loi n° 75-1336 du 31 décembre 1975 a reconnu à l'enlèvement et au traitement des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoir la qualité de « service d'utilité publique ».

Toutefois la crise de l'ESB a nécessité l'adoption, en urgence, de mesures règlementaires imposant la destruction par incinération des matériels à risque spécifié (MRS) des bovins ainsi que des cadavres d'animaux et des saisies d'abattoirs qu'il était interdit d'introduire dans la chaîne alimentaire et d'utiliser dans la fabrication des farines animales.

Dès lors, la loi du 26 décembre 1996 a fait de l'équarrissage un service public et a organisé la collecte et l'élimination des cadavres, des saisies sanitaire en abattoirs et des MRS.

B. L'EXTENSION DES MISSIONS DE L'ETAT (1997-2005)

La Cour des comptes indique que le champ des interventions financières de l'Etat a connu, sous l'empire de la loi de 1996, deux extensions successives :

1 - La loi de finances initiale pour 2002 a confirmé la prise en charge par l'Etat des opérations de collecte et d'élimination des matériels à risque spécifié .

Depuis lors, l'élimination des déchets et des sous-produits animaux effectuée par les équarrisseurs a reposé sur :

* le service public de l'équarrissage créé en 1996, qui assure la collecte et l'élimination des cadavres, des saisies d'abattoirs et des MRS, sous la responsabilité sanitaire et aux frais de l'Etat ;

* un régime indemnitaire au bénéfice des entreprises productrices de farines et de graisses animales, l'Etat stockant sous sa responsabilité plus de 60 % de ces farines avant d'en assurer la destruction 4 ( * ) .

2 - L'article L. 226-1 du code rural, modifié par la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, a ajouté la transformation à la collecte et à l'élimination parmi les opérations susceptibles d'être prises en charge au titre du SPE tout en autorisant l'Etat à modifier le périmètre du SPE par voie règlementaire. Par ailleurs la même loi permet à l'Etat de se substituer, par décret, aux opérateurs pour assurer l'élimination des déchets qui ne relèvent pas du SPE, notamment pour ce qui concerne l'élimination des farines animales.

C. LA RÉFORME VOTÉE EN LOI DE FINANCES POUR 2006

La Cour des comptes relève que, tenant compte de l'évolution favorable de la situation sanitaire des troupeaux, le gouvernement et le législateur, en accord avec les professions, ont sensiblement réduit le champ du SPE à compter du 1 er octobre 2005 , en excluant le traitement des déchets des abattoirs par décret du 28 septembre 2005.

En outre, la Cour des comptes indique qu'en vertu de « l'article 86 de la loi de finances pour 2006 » 5 ( * ) , le SPE ne concerne plus que la collecte, la transformation et l'élimination des animaux trouvés morts en exploitation ou des cadavres d'animaux et matières animales lorsque leur élimination est nécessaire dans l'intérêt général et sous certaines conditions limitatives, ainsi que des MRS collectés auprès des 15.000 boucheries autorisées à désosser les carcasses jusqu'au 31 décembre 2006.

La collecte des déchets d'abattoirs et des cadavres chez les vétérinaires et les particuliers, exclue du périmètre du SPE, relève désormais de contrats commerciaux .

Ainsi, la loi de finances pour 2006 exclut la partie « déchets » de la taxe d'abattage destinée au financement du SPE, prévoit la participation des éleveurs au financement de la destruction des cadavres et transfère la gestion du SPE à l'office chargé des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL) 6 ( * ) .

Parallèlement, il est désormais prévu que l'exécution du SPE sera attribuée sous la forme d'un marché public national à lots départementaux, dont l'appel d'offres a été lancé le 29 novembre 2005 .

III. LA GESTION ET L'EXÉCUTION DU SPE

La Cour des comptes relève les i nsuffisances liées à la gestion du SPE, du point de vue notamment de l'application des règles de la concurrence . Elle estime en effet que l'institution par la loi de 1996 d'un service public de l'équarrissage n'a pas donné lieu à la création d'une instance propre de pilotage, de gestion ou de contrôle d'un système géré pour l'essentiel au niveau local.

Selon le schéma théorique, dans chaque département, le préfet passe les marchés publics de prestations avec les industriels agréés ou, le cas échéant, prend les arrêtés de réquisition. Les services déconcentrés du ministère de l'agriculture instruisent les dossiers d'agrément des sociétés d'équarrissage et assurent l'inspection des établissements. Responsable de l'instruction des dossiers constitués par les sociétés d'équarrissage pour le paiement des prestations, ils sont ainsi chargés du contrôle du service fait.

Toutefois, la Cour des comptes constate que le SPE, qui repose aussi en principe sur la passation de marchés locaux se caractérise en fait par l'absence de concurrence, la grande opacité des données économiques du secteur et la difficulté du contrôle du service fait .

A. L'IMPUISSANCE DE L'ETAT À FAIRE JOUER LES RÈGLES DE LA CONCURRENCE

La Cour des comptes souligne qu'en instituant l'équarrissage comme un service régi par l'Etat et organisé sur des territoires exclusifs d'intervention attribués par arrêté préfectoral, la loi du 31 décembre 1975 a assuré la couverture exhaustive du territoire par les sociétés opératrices. Elle constate cependant que cette loi a abouti, en fait, à la mise en place d'un duopole dominé par deux filiales d'entreprises à l'époque publiques 7 ( * ) . Cette situation, confortée par la concentration économique du secteur et la privatisation des deux principales sociétés, a, en pratique, compromis la mise en oeuvre du principe de concurrence .

Ainsi, la Cour des comptes note que la concentration de l'industrie de l'équarrissage et les monopoles territoriaux dont disposent leurs établissements agréés, ajoutés à la dispersion et à la complexité des circuits de transport et de traitement des déchets et des cadavres, placent l'administration en situation défavorable et empêchent non seulement la concurrence de s'exercer mais aussi les prix de se former librement .

Dès lors, la Cour des comptes constate que, la concurrence ne trouvant pas à s'appliquer dans la grande majorité des départements et, devant l'urgence, les préfets ont eu systématiquement recours, dès 1997, à la réquisition des entreprises d'équarrissage . Cette procédure peut être justifiée par des nécessités d'ordre public, incontestables en matière de sécurité alimentaire, mais elle est normalement réservée à des situations exceptionnelles. Or, dans les faits, la procédure de réquisition a été utilisée comme un mode de gestion permanent, les arrêtés de réquisition étant assortis de décision de prix fixés pour de longues périodes .

La Cour des comptes relève que ce recours à la réquisition a entraîné d'importantes conséquences sur la transparence et le coût du système : dans la pratique, les autorités sont privées des références qui leur permettraient de fixer l'indemnisation sur la base d'un prix commercial, elles incorporent dans les indemnités tous les éléments produits par les équarrisseurs sans pouvoir les discuter. Les prix établis par l'administration lui sont en fait imposés par les entreprises, ce qui ouvre la voie à des abus 8 ( * ) .

A cet égard, la Cour des comptes observe que depuis 1997, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a été saisie de plusieurs indices de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de l'équarrissage , tant pour les activités entrant dans le cadre du SPE que pour celles relevant du secteur privé. Elle a constaté que les tarifs relevant du SPE sont plus élevés que ceux des prestations correspondantes exercées à titre privé , pour lesquelles la concurrence semble effectivement avoir exercé un effet modérateur, notamment dans les zones où la concurrence transfrontalière peut s'exercer. D'après la réponse fournie par la DGCCRF aux questions de la Cour des comptes, « certains de ces indices ont fait l'objet d'un classement, soit parce que les éléments qu'ils apportaient n'étaient pas suffisamment précis pour justifier une enquête, soit parce que les délais afférents à une enquête et à la saisine éventuelle du Conseil de la concurrence étaient trop longs et inadaptés au traitement d'une situation du marché de l'équarrissage en évolution rapide ».

Ainsi, la Cour des comptes relève que, de fait, plusieurs enquêtes ont été classées en dépit du sérieux des indices et des constats, compte tenu d'une appréciation juridique négative sur la possibilité de saisir le Conseil de la concurrence ou - dans un seul cas - de raisons d'opportunité .

En outre, elle note que les services reconnaissent que l'instauration d'un système d'appels d'offres nationaux à lots départementaux en 2006 ne suffira pas à instaurer d'emblée la concurrence dans une activité dominée par deux grands groupes nationaux , juxtaposant des monopoles territoriaux suscités à l'origine par l'Etat et où les barrières à l'entrée de nouveaux intervenants sont élevées en raison de la lourdeur des investissements exigés par la réglementation. Dans une telle situation, l'Etat aura la tâche difficile de conduire une politique d'achats publics établie sur des informations de prix pertinentes, en évitant que la situation de monopole des entreprises les conduise à s'entendre sur les prix et la répartition des lots.

B. LES CARENCES DE L'INFORMATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

La Cour des comptes relève, dans cette partie, qu'il est particulièrement difficile et même risqué de se fonder sur les comptes et données fournis par les entreprises d'équarrissage pour fixer les montants des indemnités dues au titre du SPE .

Elle rappelle, en effet, que, pour fixer les indemnités dues aux équarrisseurs, les préfets peuvent prendre en compte la comptabilité des exploitations d'équarrissage et leurs résultats mais que le contrôle des informations données par les bénéficiaires de l'indemnisation est extrêmement difficile.

En outre, la Cour des comptes déplore que le bilan annuel détaillé et chiffré de l'exécution locale du SPE prévu par l'article L. 226-10 du code rural pour l'information du Parlement n'ait jamais été établi au titre des années 2002 et 2003.

Dans ces conditions, seules les statistiques d'origine professionnelle fondent, pour l'essentiel, l'information des pouvoirs publics.

C. LES DIFFICULTÉS ET L'HÉTÉROGÉNÉITÉ DU CONTRÔLE DU SERVICE FAIT

La Cour des comptes rappelle que les directions départementales des services vétérinaires (DDSV), en charge de l'instruction des demandes de paiement présentées par les équarrisseurs, doivent contrôler le service fait et sa conformité aux arrêtés de réquisition, notamment en ce qui concerne les quantités traitées.

Toutefois, elle a constaté que les contrôles sont exercés, souvent avec peu de moyens et, en l'absence de guide de contrôle, de façon très hétérogène malgré une circulaire récente du 1 er février 2005 .

Les contrôles tendent à ne concerner que la cohérence entre les déclarations des producteurs de déchets et celles des établissements d'équarrissage : la Cour des comptes a ainsi noté que l'obligation de pesée, instaurée seulement en 2004, laisse subsister des dérogations et qu'en pratique le poids des déchets reste simplement estimé dans la moitié des abattoirs.

En outre, certains abattoirs, contrairement aux dispositions règlementaires, n'ont même pas transmis aux DDSV la copie de leurs déclarations fiscales. La sincérité de plusieurs de ces déclarations a d'ailleurs été mise en cause par l'administration.

De même, le contrôle de la collecte en ferme ne s'exerce que sur documents et par sondage a posteriori ; sa qualité est inégale. Enfin, la complexité de la réglementation relative à la collecte des vertèbres chez les bouchers rend son contrôle lourd et difficile.

Selon la Cour des comptes, ces difficultés ne peuvent cependant justifier les insuffisances qui affectent la rigueur des contrôles du service fait 9 ( * ) .

IV. L'ÉVOLUTION DES AIDES PUBLIQUES ET DU FINANCEMENT DU SPE

A. DES AIDES PUBLIQUES COMPLEXES ET CHANGEANTES

Depuis la mise en oeuvre de la loi de 1996, l'obligation de destruction des déchets d'animaux interdits à la consommation animale et humaine a pour contrepartie un financement public dont le périmètre et les conditions d'attribution ont été modifiés plusieurs fois, notamment en fonction des évolutions de la réglementation sanitaire.

Entre 1997 et 2003 , l'enlèvement et la destruction des cadavres d'animaux, des déchets d'abattoirs et des MRS ont été assurés gratuitement par le SPE , au profit des éleveurs et des abattoirs financés par la taxe sur les achats de viande. En outre, un décret du 1 er décembre 2000 a prévu l'indemnisation des entreprises productrices de farines et de graisses dont l'arrêté du 14 novembre 2000 avait suspendu l'incorporation dans l'alimentation des animaux. Cette indemnisation a été rendue dégressive d'octobre 2002 à fin 2003, afin d'inciter les opérateurs de la filière à prendre en charge progressivement une partie du coût du traitement des déchets.

Les règles d'attribution des aides publiques à l'équarrissage ont été précisées par les lignes directrices agricoles de la Commission européenne concernant les aides d'Etat liées aux tests EST 10 ( * ) , aux animaux trouvés morts et aux déchets d'abattoirs, applicables au 1 er janvier 2003 .

Le nouveau dispositif d'aide mis en place par la France, qui n'a pas été notifié à la Commission européenne avant novembre 2003, a toutefois été approuvé le 30 mars 2004 pour les aides prévues en 2004. Les aides versées en 2003 n'ont en revanche été validées que le 5 juillet 2005 et le régime spécifique des aides pour la collecte des vertébrés auprès des bouchers a été approuvé le 5 février 2005.

La réforme du régime des aides, définie par un décret du 25 octobre 2004 , présente les principaux points suivants :

- fin de la gratuité totale de l'enlèvement des cadavres d'animaux en exploitation, dans des conditions différentes selon les catégories d'animaux ;

- prise en charge par le SPE des déchets d'abattoirs et prise en charge partielle par le SPE des coûts d'élimination des vertèbres chez les bouchers.

Par la suite, la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a exclu les déchets d'abattoirs du champ du SPE au 1 er octobre 2005. A compter du 1 er janvier 2006, seule l'élimination des vertèbres collectées auprès des bouchers reste prise en charge à ce titre, dans la limite d'un plafond. La Cour des comptes relève toutefois qu'une lettre interministérielle du 29 juin 2005 au directeur général du CNASEA avait autorisé le paiement intégral des demandes d'indemnisation exposées par les opérateurs à ce titre, abolissant de fait le plafond d'aide publique imposé aux bouchers .

B. LE COÛT DES AIDES PUBLIQUES

* D'après la Cour des comptes, l'ensemble des dépenses liées à la mise en oeuvre de l'équarrissage atteignait 2,043 milliards d'euros au 31 août 2005, répartis comme suit :

- 1,407 milliard d'euros au titre du seul SPE, soit deux tiers des dépenses totales : la Cour des comptes observe que les dépenses prises en charge par le SPE ont principalement servi à indemniser quatre entreprises d'équarrissage qui ont reçu, de 2001 à 2005, 81 % des aides publiques. Plus de deux tiers du total ont bénéficie à deux entreprises ;

- 626 millions d'euros de dépenses relatives aux co-produits animaux (farines). Ces dépenses sont décroissantes à partir de 2004.

* En complément des aides liées à la mise en oeuvre de l'équarrissage, des aides publiques à l'investissement ont été, sur l'ensemble de la période, accordées aux entreprises de transformation procédant au traitement ou à la destruction de certains co-produits.

De 1994 à 1999, le champ de ces aides excluait en principe les entreprises représentant plus de 5 % du marché. La Cour des comptes note cependant que toutes les entreprises ont bénéficié d'une aide ponctuelle visant à mettre les installations en conformité avec une norme communautaire de traitement des farines.

Le montant de ces aides a représenté plus du tiers des dépenses totales d'investissement engagées par les entreprises, soit 10,04 millions d'euros d'aides européennes et 4,54 millions d'euros d'aides nationales sur un total de 43,06 millions d'euros.

C. L'ÉVOLUTION DU FINANCEMENT DU SPE

La Cour des comptes relève que, pour assurer le financement des aides accordées aux professionnels de l'équarrissage, plusieurs dispositifs de taxes ont été successivement mis en oeuvre et qu'ils se sont heurtés aux résistances des professionnels assujettis à ces taxes et aux critiques de la Commission européenne .

1. Une taxe sur les achats de viande contestée par les instances européennes

La loi de finances initiale pour 1997 a institué une taxe sur les achats de viande et produits assimilés, dite « taxe d'équarrissage ».

La Cour des comptes indique que les pouvoirs publics ont été contraints d'alourdir la taxation mise en place par cette loi pour répondre aux besoins du SPE, quitte à aggraver les contestations de ce dispositif et l'ampleur des contentieux prévisibles.

Parallèlement, afin de dissimuler la fragilité juridique de la taxe, en particulier au regard des règles communautaires, le produit de la taxe a cessé d'alimenter le SPE par l'intermédiaire du CNASEA et a abondé le budget général, le financement du SPE et des mesures consécutives à la décision du 14 novembre 2000 étant ainsi assuré sur crédits budgétaires .

A partir de 2002, les aides de l'Etat aux producteurs de farines « bas risque » ont été progressivement diminué sans que les taux de la taxe soient pour autant révisés à la baisse.

Enfin, la Cour des comptes rappelle que la contestation de la taxe par les professionnels de la grande distribution a conduit la Cour de justice des communautés européennes, par une décision du 20 novembre 2003, à qualifier le versement du produit de la taxe, non notifiée aux autorités européennes, d'aide d'Etat incompatible avec le droit européen de la concurrence . Cette décision, faisant suite à la publication des lignes directrices de la Commission européenne, le 24 décembre 2002, a entraîné la suppression de la taxe sur les achats de viande, intervenue le 1 er janvier 2004.

Bien que la Commission européenne ait notifié cette décision le 14 décembre 2004, elle a autorisé, à titre rétroactif, le dispositif de financement du SPE instauré en 1997 dont la taxe sur les achats de viande constituait l'élément central, dans la limite du montant notifié par les autorités françaises, soit 829 millions d'euros . Cette autorisation était cependant subordonnée au remboursement partiel des sommes perçues sur le marché intérieur et au remboursement intégral de la taxe ayant frappé les viandes importées entre 1997 et 2000.

La Cour des comptes note que les remboursements réclamés par la grande et moyenne distribution portaient sur un montant total estimé à 1,8 milliard d'euros en 2004. Cependant, après avoir engagé le remboursement des sommes indûment perçues dès septembre 2004, le gouvernement a décidé de l'arrêter au montant de la taxe collectée de 1997 à 2000, évalué à 400 millions d'euros . Les distributeurs ont, en conséquence, engagé en 2005 une nouvelle campagne de réclamations et de contentieux afin d'obtenir le remboursement intégrale des sommes versées au titre de la taxe d'équarrissage 11 ( * ) .

S'agissant du bilan financier de la taxe d'équarrissage, la Cour des comptes relève que, au total, elle aura rapporté à l'Etat, entre 1997 et 2005, un produit net proche de 2,1 milliards d'euros, dont 1,6 milliard d'euros aura été affecté au financement du SPE. Le bilan financier de cette taxe aura cependant été fortement affecté par les suites des contentieux qui obligent l'Etat à rembourser 400 millions d'euros aux distributeurs assujettis, montant qui pourrait être aggravé par l'issue des contentieux en cours.

2. Une taxe sur les abattoirs récusée par la filière viande

La Commission européenne a validé, le 30 mars 2004, le double dispositif mis en place par la France à partir du 1er janvier 2004 , à savoir :

- l'autorisation des aides à l'élimination des cadavres d'animaux d'espèces victimes d'EST ou susceptibles de l'être, et la participation directe, pour les autres espèces (porcs et volailles), des éleveurs, à hauteur de 25 % au moins, aux coûts de transformation et d'incinération, ou, alternativement, l'instauration d'un prélèvement obligatoire sur les filières viandes en excluant la distribution ;

- l'autorisation, à titre dérogatoire, du financement de l'élimination des déchets d'abattoirs qualifiés de MRS pris en charge par le SPE, par le produit de la taxe d'abattage assis sur le tonnage de ces déchets.

En outre, la Commission a exigé la mise en place d'une comptabilité indépendante du SPE, d'où la création, dans les comptes du CNASEA, d'un fonds à comptabilité distincte auquel est rattaché le produit de la taxe.

Dès lors, la Cour des comptes rappelle que l'article 28 de la loi de finances initiale pour 2004 a supprimé la taxe d'équarrissage et instituée la taxe d'abattage, assise pour partie sur le poids des animaux abattus et pour partie sur le poids des déchets d'abattoirs. Le produit de cette taxe est affecté à un fonds spécifique du CNASEA, qui contribue au financement des dépenses du SPE et des mesures concourant au stockage, au transport et à l'élimination des farines animales. Les prévisions associées à la loi de finances pour 2004 escomptaient un rendement de 156 millions d'euros de la taxe d'abattage .

Toutefois, la Cour des comptes relève que cette taxe a fait l'objet de plusieurs contestations :

- une contestation des abatteurs en raison de l'exonération des éleveurs autres que les éleveurs de porcs et de volailles : les abatteurs n'ont pas accepté de payer pour ces éleveurs. En outre, la demande formulée en 2003 par les organisations professionnelles de l'abattage, visant à obtenir la mise en place d'un mécanisme obligatoire et forfaitaire de répercussion vers l'aval, a été refusée par les pouvoirs publics ;

- une résistance des éleveurs de porcs et de volailles au paiement de leur participation : le recouvrement par les établissements d'équarrissage de la participation des éleveurs de porcs et de volailles au financement de l'élimination des cadavres de ces espèces s'est révélé irréalisable ; ces opérateurs ont donc présenté au CNASEA des factures correspondant au coût total du service, sans abattement pour la participation des éleveurs. Une lettre interministérielle du 28 décembre 2004 a autorisé le paiement des factures présentées par les équarrisseurs, sans abattement au titre de la participation des éleveurs, non recouvrée 12 ( * ) . La Cour des comptes précise, en outre, que les problèmes rencontrés dans le recouvrement des participations demandées aux éleveurs ont aggravé les difficultés de gestion du CNASEA, auxquelles l'Etat a remédié sous la forme d'une avance remboursable décidée par une lettre interministérielle du 10 mai 2004.

Enfin, la Cour des comptes relève les limites financières du nouveau financement SPE ainsi que les obstacles économiques à ce financement :

- s'agissant du rendement de la taxe d'abattage, la Cour des comptes note qu'escompté à 156 millions d'euros par la LFI pour 2004, il a finalement été estimé à 129 millions d'euros en 2004 par l'IGF et à 91 millions d'euros au 31 août 2005. En outre, la Cour des comptes note que les besoins résiduels de financement du SPE en 2004 et 2005 s'élèvent à 76 millions d'euros en 2004 et 93 millions d'euros au total pour la période 2004-2005 ;

- la Cour des comptes constate également que la répercussion de la taxe d'abattage sur l'aval de la filière par les abattoirs est difficile puisqu'elle ne peut être imposée sans être contraire au droit communautaire. De ce fait, n'a été édictée qu'une obligation d'information au bas des factures sur les charges dont les abattoirs s'acquittent au titre du SPE.

Dès lors, la Cour des comptes relève que, face à ces difficultés, les différentes parties ainsi que le gouvernement et le Parlement ont convenu que la seule solution possible aux problèmes de financement de l'équarrissage était de réduire le périmètre du service public à la collecte et à la destruction d'animaux trouvés morts, et de revenir à des relations contractuelles pour le traitement des déchets d'abattoirs .

3. La réforme du financement du SPE par la loi de finances pour 2006

Avant 2006, la Cour des comptes relève qu'au total, sur la période 1997-2005, les dépenses liées au SPE (2,1 milliards d'euros) sont restées inférieures aux produits des taxes destinées à les financer (2,3 milliards d'euros). L'écart ne compense cependant pas la charge des remboursements accordés aux distributeurs au titre des contentieux relatifs à la taxe sur les achats de viande.

La loi de finances initiale pour 2006 permet d'assurer le financement du SPE, dont la charge est évaluée à 136 millions d'euros (hors coût du déstockage des farines animales), par une taxe d'abattage dont l'assiette est réduite au poids de viande des animaux abattus, la partie de la taxe pesant sur les déchets d'abattoirs étant éliminée.

En outre, le régime d'aide instauré en faveur des bouchers, nonobstant leur sortie du champ du SPE, aura un coût de 10 millions d'euros tandis que la contribution des éleveurs de porcs et de volailles doit fait l'objet d'une nouvelle définition dans le cadre fixé par la loi de finances pour 2006 qui prévoit la possibilité d'une participation des éleveurs de toutes espèces animales évaluée à 8 millions d'euros en 2006.

Du point de vue de la nomenclature budgétaire, les crédits destinés au SPE sont désormais inscrits au sein de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire », et plus particulièrement du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » qui relèvent de la responsabilité du ministre de l'agriculture et de la pêche. Réunis au sein de l'action « Elimination des farines et des co-produits animaux », les crédits se répartissent de la façon suivante pour 2006 :

- 44 millions d'euros en crédits de paiement (CP) et 242 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) pour la « collecte et élimination des cadavres et sous-produits animaux ».

Ainsi, le financement du SPE, pour une dépense estimée à 136 millions d'euros, est assuré par le budget de l'Etat à hauteur de 44 millions d'euros, la participation des éleveurs à hauteur de 8 millions d'euros et le produit de la taxe d'abattage à hauteur de 84 millions d'euros 13 ( * ) ;

- 55 millions d'euros en CP et 164,4 millions d'euros en AE pour le « stockage et élimination des farines animales accumulées jusqu'en 2003 ».

Toutefois , la Cour des comptes relève que la nouvelle présentation des crédits ne permet toujours pas d'évaluer l'ensemble des dépenses administratives affectées au fonctionnement du SPE , incluses notamment dans des programmes de soutien des budgets de l'agriculture et de l'environnement.

V. LA GESTION BUDGÉTAIRE, FINANCIÈRE ET COMPTABLE PAR LE CNASEA

Dans cette dernière partie, la Cour des comptes indique que la direction générale de la comptabilité publique ayant refusé de confier à son réseau la charge d'assurer le paiement du SPE, celle-ci a été confiée au CNASEA qui gère le fonds par lequel transitent les ressources qui financent le SPE.

A. UNE GESTION BUDGÉTAIRE DIFFICILE ET COÛTEUSE

La Cour des comptes relève l'existence d'un décalage de trésorerie permanent d'origine administrative entre les besoins et les ressources depuis la création de la taxe d'abattage par la loi de finances initiale pour 2004. En effet, le décret fixant les modalités de calcul de la taxe a été pris tardivement (23 avril 2004) et les premiers encaissements ne sont parvenus au CNASEA qu'au mois de juin suivant.

Afin d'assurer la continuité des paiements une subvention de 54 millions d'euros inscrite en LFI a été consentie par l'Etat au CNASEA en début d'exercice 2004. Celle-ci s'étant révélé insuffisante, le CNASEA a, en plus, bénéficié d'une avance remboursable du Trésor dans la limite de 70 millions d'euros notifiée au CNASEA par lettre interministérielle du 10 mai 2004. Seulement 57 millions d'euros remboursables au 31 décembre et assortis d'intérêts ont été effectivement versés.

B. UN COÛT D'INTERVENTION NON NÉGLIGEABLE

La Cour des comptes indique que le CNASEA a estimé que la charge qu'il supporte au titre du SPE est lourde. Le nombre de factures à traiter a atteint un maximum de 13.000 en 2002 y compris pour les co-produits alors que 17 agents étaient affectés à ce traitement la même année.

Sur la période 1998-2005, le fonctionnement supporté par le CNASEA pour la gestion du service public de l'équarrissage serait déficitaire de 1,8 million d'euros.

C. LES DÉLAIS DE PAIEMENT DES DÉPENSES DU SPE

La Cour des comptes relève que les paiements à partir de la réception des dossiers dans les délégations régionales du CNASEA s'effectuent dans un délai de deux à trois mois auquel il convient d'ajouter le temps nécessaire aux vérifications réalisées par les DDSV. Ces vérifications ne garantissent toutefois pas un contrôle rigoureux du service fait.

En outre, elle constate que les intérêts de retard dus par le CNASEA ne sont pas payés systématiquement et spontanément, mais seulement sur réclamation, et demeurent exceptionnels. Ils ne figurent pas dans la comptabilité du fonds SPE du CNASEA : seul un suivi extra-comptable a permis de constater que leur montant a atteint la somme élevée de plus de 205.000 euros en 2003.

En conclusion , la Cour des comptes souligne que la récente réforme du SPE laisse subsister un certain nombre d'incertitudes qui nécessitent une vigilance soutenue des pouvoirs publics :

- l'Etat encourt le risque de voir les contentieux administratifs suscités par son refus de rembourser les assujettis à la taxe sur les achats de viande pour la période 2001-2003, dont le produit est de 1,7 milliard d'euros, tourner en sa défaveur ;

- la capacité de l'Etat à assurer un regain de concurrence dans le secteur de l'équarrissage et à obtenir des baisses de prix sur les prestations d'équarrissage reste incertaine ;

- l'évaluation de la charge budgétaire future du SPE est soumise à aléas : le coût du service ne sera connu qu'au vu des résultats de l'appel d'offres national lancé le 29 novembre 2005 ; la participation attendue des éleveurs dépend de leur consentement individuel aux engagements pris par les interprofessions concernées ;

- dans le cadre d'un cahier des charges non encore précisé, l'Etat aura à s'assurer des performances de gestion attendues du nouvel opérateur (OFIVAL) et de son aptitude à maîtriser une information pertinente sur la situation et les coûts des entreprises d'équarrissage ainsi que de sa capacité à réaliser les contrôles de l'exécution du service exigés de l'ordonnateur et du comptable.

TRAVAUX DE LA COMMISSION : AUDITION POUR SUITE À DONNER À L'ENQUÊTE RÉALISÉE PAR LA COUR DES COMPTES, EN APPLICATION DE L'ARTICLE 58-2° DE LA LOLF, SUR LE SERVICE PUBLIC DE L'ÉQUARRISSAGE

Présidence de M. Jean Arthuis,

Président

Séance du

Mercredi 28 juin 2006

Ordre du Jour

- Audition de MM. Jacques Sallois, président de la 7 ème chambre de la Cour des comptes, Olivier Mary, chef de mission à la direction générale de l'alimentation, Philippe Vinçon, sous-directeur de l'élevage et des produits animaux à la direction des politiques économique et internationale au ministère de l'agriculture et de la pêche, Bernard Bezeaud, directeur général adjoint du CNASEA, Olivier Caillou, chef de bureau à la 7 ème sous-direction de la direction du budget au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, et de MM. Bertrand Oudry, attaché principal à la sous-direction des produits agricoles et alimentaires à la DGCCRF, Yves Berger, directeur général de l'ONIEP et Jean-Jacques Pinet, adjoint au chef de bureau à la direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales représentant le ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes relative au fonctionnement du service public de l'équarrissage (SPE).

__________

La séance est reprise à 11 heures 30.

M. le président - La séance est reprise.

Mes chers collègues, nous voici à nouveau réunis pour une audition de suivi d'une enquête réalisée par la Cour des comptes, en application des dispositions de l'article 58-2 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, qui prévoit la réalisation par la Cour des comptes « de toute enquête demandée par les commissions de l'Assemblée Nationale et du Sénat chargées des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elles contrôlent ».

Il s'agit aujourd'hui d'une communication sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage que la Cour des comptes a transmis à notre commission à la fin du mois de janvier 2006.

C'est un sujet complexe et particulièrement d'actualité puisque le service public de l'équarrissage a fait l'objet d'une réforme d'envergure dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2006, réforme sur laquelle la commission des finances du Sénat a dû se prononcer dans l'urgence et sans la base de cette enquête de la Cour des comptes qui lui aurait pourtant apporté un éclairage précieux.

Il m'a semblé, conformément à la procédure déjà suivie, qu'était nécessaire une audition conjointe des représentants des administrations compétentes sur le sujet du service public de l'équarrissage, en présence de M. Jacques Sallois, président de la 7 ème chambre, de MM. Jean-Pierre Lafaure et Francis Brun-Buisson, conseillers maîtres, et de M. Jean-Pierre Sekely, rapporteur.

S'agissant de l'administration, le ministère de l'agriculture et de la pêche sera représenté par M. Alain Cirot, directeur général adjoint de l'alimentation, et M. Philippe Vinçon, sous-directeur de l'élevage et des produits animaux à la direction des politiques économiques et internationales. Je voudrais également saluer la présence du directeur général adjoint du CNASEA, M. Bernard Bezeaud, ainsi que celle de M. Yves Berger, représentant l'Office national de l'élevage et des productions.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sera représenté par M. Bertrand Oudry, attaché principal à la sous-direction des produits agricoles et alimentaires à la DGCCRF et M. Olivier Caillou, chef de bureau à la 7 ème sous-direction de la direction du budget.

Enfin, le ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales est représenté par M. Jean-Jacques Pinet, adjoint au chef du bureau commerce, distribution et artisanat.

Cette audition est ouverte à la presse afin d'assurer un débat le plus ouvert et fructueux possible. Notons que, dans la même perspective, les membres de la commission des affaires économiques ont été invités à participer à cette discussion.

Vous avez tous reçu, mes chers collègues, copie de l'enquête de la Cour des comptes. Dans cette perspective, je compte sur chaque interlocuteur invité pour présenter très brièvement ses principales conclusions et laisser ensuite toute sa place à un débat le plus interactif et constructif possible dans lequel je donnerai prioritairement la parole aux deux rapporteurs spéciaux concernés. L'un, Joël Bourdin, avait suggéré fin 2004 le thème de cette enquête au nom de la commission des finances ; l'autre, Nicole Bricq, est l'actuelle rapporteure spéciale des crédits de la mission « sécurité sanitaire » qui englobe aujourd'hui le financement du service public de l'équarrissage.

Pour replacer les choses dans leur contexte, je souhaite rappeler que la communication de la Cour des comptes a notamment mis en évidence les failles de la gestion du SPE, et plus particulièrement l'impuissance de l'Etat et de ses représentants locaux à faire jouer les règles de mise en concurrence et de passation des marchés locaux, la dissociation de la fonction d'ordonnateur entre les préfets et le directeur général du CNASEA, l'insuffisance du contrôle du « service fait » par les équarrisseurs et enfin les difficultés financières associées à la gestion du SPE.

En outre, la communication de la Cour des comptes a souligné les incertitudes liées à la mise en oeuvre de la réforme votée en loi de finances initiale pour 2006, notamment économiques et financières, susceptibles de continuer à affecter la gestion et le coût du SPE. Elle estime ainsi que le recours à un appel d'offres pour l'exécution de ce service ne suffira pas à instaurer d'emblée un régime de concurrence dans une profession très concentrée et que des incertitudes continuent d'affecter le bilan financier du SPE : contentieux administratifs en cours, capacité des pouvoirs publics à obtenir des éleveurs une participation significative, conformément aux règles imposées par la Commission européenne.

Je rappelle aux membres de la commission des finances que nous aurons à prendre une décision sur la publication de l'enquête de la Cour des comptes au sein d'un rapport d'information à la fin de cette audition.

Pour commencer, je donne la parole à M. Jacques Sallois, président de la 7 ème chambre de la Cour des comptes pour présenter les principales conclusions de l'enquête réalisée par la Cour des comptes sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage.

M. Jacques Sallois - Monsieur le Président, Madame le rapporteur spécial, Monsieur le rapporteur général, Mesdames et messieurs les sénateurs, avant de vous rappeler les observations que la Cour vous a communiquées sur ce sujet que vous avez qualifié fort justement d'austère, je voudrais, si vous le permettez, formuler deux observations liminaires.

La première concerne le contexte dans lequel la Cour est intervenue. A votre demande, le 1 er mars dernier, nous avons commencé nos investigations alors même que s'engageaient deux enquêtes.

Vous le savez, Monsieur le Président, les éléments d'information dont disposait l'Etat au début 2005 pour piloter ce service étaient, de l'avis général insuffisantes, irrégulières, peu fiables et au surplus, disparates dans leur origine et quant à leur contenu. C'est dans ces conditions que deux enquêtes ont été engagées, l'une sous le pilotage du COPERCI et visant à dresser le bilan du SPE et à proposer les principes de sa révision, l'autre confiée aux inspections générales des finances et de l'agriculture, visant à étudier le financement, le coût, le contrôle du SPE pour 2004.

Dès lors que ces travaux étaient engagés avant les siens, la Cour a veillé à conduire ses contrôles sur le terrain en évitant de redoubler les enquêtes des inspections.

Ayant pris connaissance, au début de l'automne, des conclusions des travaux des inspections, et, le 28 septembre, du projet de réforme confirmé par la loi de finances pour 2006, la Cour s'est placée dans une situation qui ne visait pas à apprécier la réforme mais à tenir compte des leçons du passé pour voir dans quelles conditions elle était susceptible de s'appliquer fructueusement.

Ma seconde observation sera pour rappeler les modifications fréquentes dont ce service a été l'objet depuis vingt-cinq ans. Je n'en ferai pas l'historique : le rapport de M. Rigaudière l'a fait remarquablement il y a peu d'années. J'en rappellerai seulement les grandes dates.

En 1975 s'instaure un service d'utilité publique basé sur un « subtil équilibre » - comme le qualifiait le sénateur Rigaudière - qui repose sur le monopole du traitement des sous-produits animaux destinés notamment à être transformés en farines pour l'alimentation du bétail, en contrepartie de l'obligation faite aux bénéficiaires d'assurer la collecte des animaux morts en élevage.

La viabilité économique de cette organisation était assurée par la valorisation des produits d'origine animale obtenus à partir des cadavres collectés par les équarrisseurs. Cette réglementation a permis à l'outil de production d'évoluer fortement. Il s'est considérablement concentré et remarquablement modernisé en l'espace de vingt ans.

En 1996, la crise de la vache folle, qui avait déjà suscité, depuis 1990, de nombreuses mesures réglementaires d'organisation sanitaire, rompt définitivement cet équilibre : les sous-produits animaux perdent toute valeur marchande et doivent être détruits, le champ de la collecte obligatoire des sous-produits est étendu aux matières à risques issues de l'activité des abattoirs, des ateliers de découpe et boucheries, dont la liste est progressivement étendue. Le maintien de la gratuité pour les éleveurs est assuré par un concours public et une taxe sur les achats de viande est simultanément instaurée.

En 2005, la conjugaison de la régression de l'épizootie, la multiplication des contestations professionnelles et communautaires, les problèmes posés par l'équilibre financier du système imposent une nouvelle réforme. Il s'agit de réduire le périmètre, désormais cantonné à l'élimination des cadavres d'animaux trouvés morts en exploitation, l'exclusion des déchets d'abattoir désormais sous-traités dans le cadre de relations contractuelles et d'une aide aux boucheries agréées pour la collecte des colonnes vertébrales prises en charge par le ministère chargé de l'artisanat.

Plusieurs mesures sont décidées : modification du système de la commande publique, nouvel équilibre financier avec le concours recherché des professionnels dans un nouveau mode de financement et enfin transfert de la gestion du CNASEA à l'OFIVAL devenu l'ONIEP (après fusion avec l'ONILAIT), qui doit intervenir dans les prochains jours.

Pour conclure ce propos introductif, et sans reprendre dans le détail l'essentiel du rapport de la Cour, extrêmement détaillé et précis, je voudrais simplement rappeler en deux points les grandes leçons qu'il tire du passé et les grandes questions qui subsistent aujourd'hui, en dépit de la mise en oeuvre de cette réforme.

La Cour tire deux grandes catégories de leçons de l'expérience passée.

Premièrement, elle constate l'impossibilité de faire jouer la concurrence et de maîtriser les tarifs dans le cadre d'un oligopole que l'Etat a organisé au cours des décennies précédentes.

Le secteur de l'équarrissage est fortement concentré. Il était géré à l'origine par deux grandes compagnies nationales peu à peu privatisées, dans le cadre de monopoles locaux départementaux.

De ce fait, la passation des marchés publics prévus par la loi de 1996, adoptée après la crise de la vache folle, et le bouleversement économique que cette crise a entraîné s'est avéré irréaliste. Comment faire jouer la concurrence dans un système où chacun, localement, est assuré d'un monopole, dans le cadre d'un pays où ces monopoles sont répartis entre deux grandes sociétés oligopolistiques ?

Devant cette impossibilité de mettre en oeuvre les dispositions de la loi de 1996 et la nécessité impérative d'assurer l'exécution du service public, les préfets ont logiquement eu recours à des réquisitions, parfaitement irrégulières au demeurant en raison de leur caractère systématique et permanent.

J'ajoute que vous ne disposiez pas d'informations économiques et financières fiables, malgré l'obligation de nature législative de présenter chaque année un rapport d'exécution au Parlement - rapport qui n'a été présenté que pour les premières années, de 1997 à 2000 - vous vous êtes sans doute lassés de le réclamer, puisque vous avez constaté dans la loi de février 2005 le fait que ce rapport n'était plus publié et ne l'avez même plus exigé.

Deuxième constat : l'extrême difficulté pour l'Etat de maîtriser les problèmes de gestion, de contrôle du service fait et de financement.

Dans le cadre d'un contrôle du CNASEA dont les conclusions avaient été communiquées en 2004 à votre commission, la Cour avait regretté la séparation entre l'ordonnateur et le comptable, le CNASEA et les préfets.

La Cour constate également que les prestations facturées au service public de l'équarrissage font l'objet d'un contrôle essentiellement documentaire et très inégal de la part des services déconcentrés de l'Etat. Il est de ce fait à l'origine de tolérances qui nous sont apparues excessives vis-à-vis des opérateurs, de telle sorte que la sincérité, la fiabilité, voire la régularité des déclarations peuvent fréquemment être mises en cause : mort des animaux non avérée, éligibilité non assurée au SPE en raison de la modicité des poids collectés, pesées imprécises, recours au SPE gratuit en lieu et place d'un service obligatoire et payant d'élimination des déchets de cliniques vétérinaires, déplacements systématiques générateurs de facturations rentables.

Une telle carence des administrations compétentes est difficilement compréhensible sur une aussi longue période.

Enfin, les fréquentes modifications de la réglementation en fonction de l'évolution des dispositions sanitaires visant à pallier dans l'urgence la conséquence de la maladie de la « vache folle », sans que les conditions de leur mise en oeuvre administrative soient précisément définies, ont lourdement affecté le bilan financier du SPE.

Je rappelle à cet égard que les dépenses publiques liées à la mise en oeuvre de la politique d'équarrissage ont dépassé 2,1 milliards d'euros à la fin de 2005.

Les difficultés financières ont été amplifiées par le refus de mettre à contribution les éleveurs en vertu du principe pollueur-payeur -qui trouve très difficilement à s'appliquer en agriculture- et par les conséquences des contentieux européens et professionnels suscités par l'assujettissement des grandes surfaces à la taxe sur les achats de viande, mode de financement qui n'avait pas été notifié aux autorités européennes et qui a été déclaré non conforme au droit communautaire, ce qui a conduit l'Etat à rembourser 387 millions d'euros.

Mais, au-delà de ces deux grandes catégories de leçons que la Cour tire du passé, je voudrais mettre l'accent sur les quatre grandes questions qui, selon nous, subsistent pour l'avenir en dépit de la réforme engagée.

La première concerne le risque contentieux qui continue d'affecter le bilan du SPE. Le refus par l'Etat de rembourser les taxes sur les achats de viande perçues entre 2001 et 2003, comme il l'a fait sur la période 1997-2000 - dans la mesure où ces recettes étaient budgétées dans la deuxième période afin de rompre le lien trop apparent entre le produit de la taxe et les aides publiques à l'équarrissage - fait l'objet d'un contentieux devant les juridictions administratives.

Les sommes en jeu sont très importantes puisque le produit de la taxe sur les achats de viandes entre 2001 et 2003 est de près de 1,7 milliard d'euros alors que, dans le même temps, le financement du SPE a représenté 1,1 milliard d'euros.

Un premier jugement du tribunal administratif de Marseille, en novembre dernier, avait ordonné le remboursement des taxes perçues après 2001. La cour administrative d'appel de Marseille, en décembre 2005, a rendu une décision favorable à l'administration en annulant la décision du tribunal administratif.

Pour autant, nous ne pouvons considérer la situation comme parfaitement réglée car 9.500 contentieux restent pendants.

Deuxième grande question : les objectifs et les conditions du transfert de la gestion du SPE à l'ONIEP, qui regroupe l'OFIVAL et l'ONILAIT, mériteraient d'être précisés.

Le transfert de la gestion du SPE, qui doit intervenir dans les tout prochains jours doit permettre de mettre un terme à la séparation entre ordonnateur et comptable, mais ce transfert n'est pas de lui-même, à nos yeux, de nature à résoudre l'ensemble des difficultés de gestion constatées par la Cour.

Dans l'immédiat, ce nouvel office ne pourra en effet que reprendre la gestion du marché public négocié après, nous allons le voir, un échec récent. Sans trahir le caractère confidentiel d'enquêtes soumises à contradiction, nous travaillons aujourd'hui sur la gestion de l'OFIVAL. Ce n'est qu'à l'issue de cette contradiction que nous pourrons être rassurés sur ses capacités à gérer, dans des conditions améliorées, le SPE.

En tout état de cause, il serait utile que l'ONIEP et ses administrations de tutelles précisent le dispositif qu'ils ont mis en place pour assurer la reprise de ce service de manière plus efficace, s'il est possible, que le CNASEA précédemment.

Troisième question, sans doute majeure : l'Etat est confronté à l'échec d'une nouvelle procédure de passation des marchés publics d'équarrissage.

La Cour avait souligné les incertitudes, voire l'impossibilité de lancer un appel d'offres national à lots départementaux dans les conditions d'organisation de la profession. L'administration elle-même reconnaissait que la décision de recourir désormais, pour l'exécution du service, à des appels d'offres nationaux ne suffirait pas, par elle-même, à instaurer d'emblée un régime de concurrence dans une profession très concentrée, juxtaposant des monopoles territoriaux de fait, suscités à l'origine par l'Etat lui-même.

Les premiers éléments dont dispose la Cour concernant cet appel d'offres confirment le bien-fondé de ces observations.

Le résultat de la passation du marché se traduit en effet par une forte hausse du coût du SPE et laisse apparaître des indices sérieux de concertation entre les opérateurs au point qu'on peut se demander si la réduction des coûts obtenus sur la sortie des abattoirs n'aurait pas pour contrepartie dans l'augmentation de ceux payés dans le cadre du SPE.

En tout état de cause, il serait souhaitable que les administrations concernées - agriculture et finances - précisent les suites qu'elles ont réservées à l'engagement d'une procédure de marché négocié, leur incidence sur les modes de gestion du SPE en cours de réforme et les enseignements qu'elles tirent, pour le moyen terme, des difficultés rencontrées pour instaurer un degré minimum de concurrence sur les marchés concernés.

Enfin, l'équilibre financier du SPE, au coeur de la réforme en cours, ne semble pas encore garanti.

Cette réforme a pour objectif essentiel de profiter du retour à une situation sanitaire normale pour alléger la charge des finances publiques en réduisant le périmètre du SPE au traitement des cadavres d'animaux, à l'exclusion des autres déchets soumis à réglementation.

Sur la base d'une estimation réalisée par les inspections générales des finances et de l'agriculture, la charge totale du SPE a été réduite à 136 millions d'euros selon les prévisions de la loi de finances pour 2006. Le lancement d'un appel d'offres national le 29 novembre 2005 visait un abaissement des tarifs des équarrisseurs, abaissement qui n'a pas été obtenu puisqu'au terme de cet appel d'offres, le coût du SPE serait nettement plus élevé que prévu, de l'ordre de 152 millions d'euros.

Selon l'arbitrage rendu par le Premier ministre en juin 2005, le financement du SPE devait être assuré par une contribution des éleveurs de 8 millions d'euros, une dotation budgétaire de 44 millions d'euros, le solde, soit 84 millions d'euros, devant être financé par le produit de la taxe d'abattage.

Or, la participation des seuls éleveurs de porcs et de volailles - 4 millions d'euros - pourrait être inférieure de moitié aux prévisions, en dépit des engagements d'un ensemble d'organisations professionnelles.

Par ailleurs, le produit net de la taxe d'abattage devrait s'élever à 77 millions d'euros, à taux inchangés. En conséquence et au total, une contribution du budget de l'Etat à hauteur de 44 millions d'euros laisserait subsister une impasse de 27 millions d'euros.

Un surcoût budgétaire viendra alourdir le coût de la réforme pour l'Etat, à la charge duquel reste, outre une moins-value fiscale de 13 millions d'euros du fait de la récupération de la TVA par les bouchers - 3 millions d'euros - et par les abattoirs - 10 millions d'euros - l'aide de 10 millions d'euros prévue en faveur des bouchers, soit 23 millions d'euros au total.

Enfin, les modalités de la prise en charge budgétaire de l'aide de 10 millions d'euros accordée aux entreprises de boucherie pour l'élimination des colonnes vertébrales par la direction des entreprises commerciales, artisanales, de service et des professions libérales ne semblent pas encore avoir été définitivement arrêtées -en tout cas elles ne l'étaient pas lors de l'audition que nous avons organisée à la Cour des comptes.

La Cour constate en conséquence que les objectifs d'économies associés à la réforme du SPE ne seront pas atteints, du moins à court terme et estime qu'il est utile que l'administration précise le montant des charges non financées dans le cadre prévu par la loi de finances, les modalités envisagées pour leur couverture, soit par le budget de l'Etat, soit par le relèvement des taux de la taxe d'abattage, ainsi que les solutions étudiées pour le retour à une situation normale de la commande publique.

En conclusion, il nous paraît difficile de nous résigner à la persistance de graves dysfonctionnements, qu'il s'agisse du coût global du SPE, qui demeure très élevé alors que son équilibre pèse toujours fortement sur les finances publiques, ou encore au constat que la réforme en cours n'a toujours pas réussi à mettre en place un mécanisme de régulation efficace des marchés et des prix face à un solide oligopole d'opérateurs.

M. le président - Merci pour le rappel que vous venez d'effectuer, les grandes leçons que vous avez tirées de vos investigations et la formulation de quatre questions auxquelles, j'espère, cette audition va permettre d'apporter des réponses.

Graves dysfonctionnements avez-vous dit, réformes vaines, y compris l'ultime puisqu'on reste avec des atteintes réelles aux règles du marché et subsistance de déficits qui affectent considérablement les finances publiques.

Avant de donner la parole aux rapporteurs spéciaux, les représentants de l'Etat ont-ils des observations à formuler ?

Qui se sent responsable du service public de l'équarrissage ?

M. Philippe Vinçon - La sous-direction de l'élevage du ministère de l'agriculture s'est beaucoup investie au cours des quatre dernières années...

M. le président - C'est donc le ministre de l'agriculture qui est responsable du SPE ?

M. Philippe Vinçon - Après le discours qui a été tenu, c'est une tâche difficile à assumer, j'en ai conscience mais, au regard du temps que l'on y a passé, notamment avec les services de la Cour des comptes, oui - sauf si quelqu'un d'autre le revendique, mais je n'en suis pas certain !

M. le président - Voulez-vous nous faire partager les impressions que vous ressentez, ayant entendu la Cour ?

M. Philippe Vinçon - Nous avons eu des échanges approfondis avec la Cour. Il y a eu une audition fort complète et fort longue du directeur au mois de décembre. Cela a permis de travailler ensemble sur ce sujet et je remercie chacun de l'état d'esprit dans lequel on a travaillé.

Je me retrouve très bien dans les grandes lignes de ce qui a été dit, en particulier sur l'absence de concurrence. La genèse de cette absence de concurrence, encouragée par l'Etat, a été très bien rappelée. Chez nos concurrents européens, en Allemagne, il y a un opérateur, en Belgique, un opérateur, aux Pays-Bas, un opérateur, et je ne suis pas certain que l'on ait les mêmes difficultés.

Pendant trop longtemps, l'Etat a payé l'ensemble des charges liées au SPE sans trop de difficulté dans la mesure où la taxe sur les achats de viandes lui permettait de couvrir largement cette dépense.

M. le président - La DGCCRF a fait de nombreuses observations accréditant des ententes répréhensibles. Qu'est-ce qui explique que les rapports sévères de la DGCCRF n'ont jamais eu de suite au plan judiciaire ?

M. Bertrand Oudry - C'est à la DGCCRF, que je représente, de répondre. Vous faites sans doute référence aux enquêtes qui ont pu être effectuées par nos services sur la partie de l'équarrissage hors SPE.

M. le président - Oui.

M. Bertrand Oudry - Cela visait les mêmes opérateurs et les constatations faites concernant le fonctionnement de l'équarrissage pouvaient être transposées sans difficulté pour la partie relevant du SPE lui-même.

Comme on l'a expliqué à la Cour en réponse aux questions qu'elle nous a posées, en fait, on a eu, durant cette période, l'occasion de faire deux enquêtes dans des conditions assez différentes. La première a été réalisée dans la période qui précédait la deuxième phase de la crise de l'ESB et la décision d'interdiction des farines animales, fin 2000.

Cette enquête, qui a été faite par notre direction nationale des enquêtes, avait effectivement mis en évidence un certain nombre de pratiques qui pouvaient être considérées comme des pratiques anticoncurrentielles au sens du code de commerce, principalement des concertations sur la répartition des volumes de déchets traités, donc sur la répartition des marchés et, dans une moindre mesure, des pratiques d'entente ou d'échange d'informations sur les prix, pas strictement au sens classique du terme, avec fixation d'un prix commun...

M. le président - Tout cela aurait pu justifier des poursuites !

M. Bertrand Oudry - A ce stade, ce rapport pouvait justifier une saisine du conseil de la concurrence. Ainsi qu'on l'a expliqué à la Cour, compte tenu du contexte dans lequel le rapport nous a été transmis - déclenchement de la deuxième crise de l'ESB, suspension de l'utilisation des farines et des graisses de viande dans l'alimentation animale, qui faisaient disparaître le principal débouché commercial de ces produits, modifiant les conditions de fonctionnement économique du secteur - la DGCCRF a estimé, en opportunité, que le moment n'était pas choisi pour saisir le conseil de la concurrence et le dossier a été conservé sous le coude.

Lorsque, ultérieurement, compte tenu de l'évolution de la situation, la possibilité de saisir le conseil de la concurrence a de nouveau été évoquée, la direction de la DGCCRF a estimé que les faits étaient trop anciens, qu'on était à la limite de la prescription et la décision a été prise de classer ce rapport.

M. le président - C'est une décision de la DGCCRF elle-même ?

M. Bertrand Oudry - Effectivement.

M. le président - A quel moment ?

M. Bertrand Oudry - En janvier 2004.

M. le président - Et le premier cas que vous avez décrit ?

M. Bertrand Oudry - C'est celui-là.

M. le président - Qu'est-ce qui se passe entre 2000 et 2004 ?

M. Bertrand Oudry - Il n'y a pas eu de décision.

M. le président - Je comprends bien, mais vous faites un rapport en 2000 et c'est en 2004 que vous décidez de le classer. Il se passe quatre ans !

M. Bertrand Oudry - Cela fait trois ans. Pendant cette période, on a continué à suivre l'évolution du secteur, mais il n'y a pas eu de décision de saisir le conseil de la concurrence.

M. le président - Qui le décide ?

M. Bertrand Oudry - Le directeur. La décision de classement a été prise en janvier 2004 par le directeur lui-même.

M. le président - Il décide de ne pas donner suite parce que l'agriculture fait pression sur lui ?

M. Bertrand Oudry - Non, pas spécialement, parce que les faits étaient trop anciens et qu'on était au bord de la prescription.

M. le président - Mais entre les deux, les faits n'étaient pas trop anciens ?

M. Bertrand Oudry - Début 2001, le rapport arrive à la DGCCRF, qui l'examine, qui constate qu'il existe un faisceau d'indices graves, précis et concordants qui laissent penser qu'il y a matière à saisine du conseil de la concurrence.

Le contexte de l'époque - déclenchement de la deuxième crise de l'ESB, suspension de l'utilisation des farines animales, perturbation complète de l'équilibre du secteur, puisque l'enquête portait sur les conditions de fonctionnement de l'équarrissage relatives aux déchets valorisables jusqu'au moment de la décision de suspension de novembre 2000 - conduit la hiérarchie à estimer qu'il n'est pas opportun de saisir le conseil de la concurrence, à la fois parce qu'on estime que le secteur est déjà suffisamment conflictuel, que la gestion de la situation est suffisamment difficile, que les équarrisseurs, quoi qu'on en pense, sont des interlocuteurs encore plus incontournables. Effectivement, le rapport d'enquête a été conservé en attente.

Au bout d'un certain temps, la question s'est posée de la suite à donner et c'est à ce moment-là, fin 2003-début 2004, que la direction de la DGCCRF a estimé qu'il fallait classer.

La deuxième enquête faite par nos services dans le secteur des déchets valorisables a été conduite début 2004, à la demande du cabinet du ministre délégué des PME, et soumise à des conditions de délais beaucoup trop strictes, pour des raisons que j'ignore, qui n'ont pas permis de mettre en évidence des pratiques anticoncurrentielles. Elle a constaté qu'il y avait une situation peu concurrentielle, sans pour autant que cette concurrence soit totalement absente.

Il y a quand même, à la marge, une légère concurrence entre opérateurs. Elle existe surtout là où il y a valorisation. Il y a alors un effort de la part des opérateurs pour essayer d'obtenir des parts de marché supplémentaires en se faisant concurrence.

Quand il n'y a pas valorisation, les opérateurs ne cherchent pas à se faire concurrence. Les conclusions ne mettaient pas en évidence l'existence de pratiques anticoncurrentielles. Peut-être qu'entre temps les opérateurs avaient appris à être plus prudents.

Il faut aussi souligner que l'efficacité des enquêtes que l'on peut mener dépend des pouvoirs d'enquête que l'on utilise. Dans le premier cas, l'enquête réalisée en 2000, on avait pu utiliser des pouvoirs d'enquête renforcés, ce qui avait aidé à obtenir des résultats plus convaincants. L'enquête de 2004 a été faite avec les pouvoirs classiques. Si à l'avenir, on devait faire à nouveau des investigations concurrentielles dans le secteur de l'équarrissage, voire de l'élimination-incinération des farines, qui n'est pas assurée par les équarrisseurs, il faudrait faire ces investigations avec des pouvoirs d'enquête renforcés si on veut trouver quelque chose.

Ceux-ci nécessitent une autorisation judiciaire ; or, pour cela, il faut produire un certain nombre d'éléments pour emporter la conviction du juge.

M. le président - Et vous n'aviez pas ces éléments à l'époque ?

M. Bertrand Oudry - En 2004, on n'avait pas le temps de les rassembler.

M. le président - Je lis une sorte de scepticisme sur le visage du président Sallois.

M. Jacques Sallois - Je me demande s'il y a lieu de faire beaucoup d'enquêtes pour constater qu'il n'y a pas de situation concurrentielle quand l'Etat a organisé lui-même le monopole local, réparti entre deux grandes sociétés, dont l'une fait 50 % du marché et l'autre un tiers.

M. le président - Quelles sont ces deux sociétés ?

M. Jacques Sallois - La SARIA et Caillaud. Chaque département fait l'objet d'un monopole.

Effectivement, sur les marges que se répartissent les entreprises, on constate de temps en temps, par exemple dans le sud du Cantal et le nord de la Corrèze, des zones de frottement mais, pour le reste, il y a peu de concurrence.

M. le président - Ces deux sociétés appartiennent-elles à des groupes ?

M. Jacques Sallois - A l' origine, il s'agit de l'entreprise minière et chimique d'un côté, et d'Elf de l'autre, qui ont été privatisées. La situation s'est donc transformée.

Je voudrais donner un autre élément. Lorsque, à l'automne dernier, on a sorti les produits d'abattoir du SPE et que la négociation s'est engagée sur des bases contractuelles, les prix ont chuté de 20 % entre les mêmes opérateurs, mais dans des conditions différentes.

M. le président - C'est un indice !

M. Jacques Sallois - C'est une constatation...

M. Bertrand Oudry - La question est de savoir s'il y a des conditions objectives qui permettent ou non un fonctionnement concurrentiel du marché. La DGCCRF peut, avec les moyens qu'elle a, constater des pratiques anticoncurrentielles et les faire sanctionner ; elle ne peut faire en sorte que la concurrence existe sur un marché où il n'y a pas, pour des raisons techniques et économiques, d'incitation à la concurrence entre opérateurs.

Les équarrisseurs ne voient pas d'intérêt à se faire une concurrence féroce. Leur préoccupation première est de trouver un volume de déchets suffisant pour rentabiliser leurs installations et leurs investissements. Compte tenu de l'héritage de l'histoire, des monopoles territoriaux instaurés par la loi de 1975, de la concentration des entreprises qui a fait disparaître un grand nombre de petits opérateurs qui n'avaient pas les moyens de suivre l'évolution de la réglementation, il existe très peu d'opérateurs, sur des territoires relativement bien délimités.

Dans la mesure où les coûts de collecte sont la partie la plus lourde des coûts d'équarrissage, il est évident que la recherche de parts de marché supplémentaires suppose de mettre en place des circuits coûteux.

M. le président - Pourrait-on imaginer une différenciation entre ceux qui font la collecte et ceux qui traitent les cadavres d'animaux ?

M. Bertrand Oudry - Je laisserai le soin à mes collègues de l'agriculture de répondre sur le plan réglementaire.

M. Philippe Vinçon - C'est déjà assez largement le cas. Les coûts de collecte représentent 60 % des coûts d'équarrissage. C'est l'élément essentiel, notamment pour les espèces bovines et ovines.

M. Jacques Sallois - Lors des contrôles sur place, les interlocuteurs de la Cour eux-mêmes ont reconnu dégager des marges très confortables, que certains ne pouvaient même pas redistribuer aux actionnaires en raison des contraintes associées à certaines structures juridiques, comme les SICA.

Historiquement, le choix qui a été fait a été celui de la modernisation de notre réseau. Il a été réussi et fructueux, il faut le souligner. Nous avons aujourd'hui un réseau technique remarquable, mais ce résultat a été obtenu au prix d'une situation désormais monopolistique localement et oligopolistique nationalement.

Il ne faut pas faire preuve d'hypocrisie en imaginant instaurer une situation de concurrence dans de telles conditions.

M. le président - Peut-être faudra-t-il prévoir que ceux qui sont chargés de ces missions rendent compte de ce qu'ils accomplissent pour plus de transparence et que l'on essaie de fixer une juste rémunération de ces services rendus.

La parole à Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Je voudrais revenir sur les conclusions de l'appel d'offres du 29 novembre 2005. Quel a été le nombre de réponses ? C'est un appel d'offres européen. Pourquoi cela n'intéresse-t-il pas des opérateurs européens ?

M. Philippe Vinçon - Des marchés ont été passés au niveau départemental. Sur les 92 lots, on a eu 96 réponses, avec des réponses multiples sur un nombre très limité de départements -les points de friction évoqués par le président Sallois.

Une concurrence sur certains départements notamment frontaliers était espérée mais elle n'a pas été observée. S'il existe plusieurs équarrisseurs en France (8 sociétés différentes ont répondu à l'appel d'offres), ils sont le plus souvent en situation de monopole de fait dans le département où ils interviennent. Ainsi, dans le Var ou les Alpes maritimes, un seul opérateur -une PME- est intervenu sur le lot concerné.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Concernant les problèmes financiers, il y a eu des difficultés financières importantes en 2004-2005, à hauteur de 93 millions d'euros. Quelles en sont les raisons ? Comment l'Etat a-t-il couvert ce besoin de financement ?

M. Olivier Caillou - La réforme intervenue en LFI 2004 qui visait à remplacer la taxe sur les achats de viande, contestée au niveau communautaires, en la remplaçant par une taxe d'abattage, a conduit à un système théoriquement équilibré, avec une dépense estimée à 220 millions d'euros, une recette estimée à 156 millions d'euros et une subvention de l'Etat estimée initialement à 34 millions d'euros, abondée de 20 millions d'euros en loi de finances rectificative.

Le rapport de l'inspection des finances évoqué par le président Sallois a constaté une sous exécution de la recette liée sans doute à la contestation de la légitimité de la taxe par certains opérateurs et à une dépense supérieure à ce qui avait été escompté de la réforme de 2004 - une réduction du montant des dépenses à la faveur d'un certain nombre d'abus supposés dans le passé, qui n'est pas apparue.

Le montant de 93 millions d'euros annoncé par l'IGF semble être le cumul de l'ensemble des dossiers présentés par les équarrisseurs dans les directions départementales avant d'être présentés au CNASEA pour paiement et finalement acquittés.

Il y a dans le financement public du SPE un décalage technique de 2 à 3 mois entre le moment où un équarrisseur effectue une prestation et le moment où la facture est présentée au CNASEA.

M. le président - Qui est chargé du contrôle du service rendu ? Qu'est-ce qui fait qu'il y a un tel décalage dans le temps ?

M. Philippe Vinçon - C'est la direction départementale des services vétérinaires qui atteste du service fait.

M. le président - Sur quelle base ?

M. Philippe Vinçon - Sur la base de contrôles qu'ils effectuent. Le service est fait, même trop bien puisqu'il n'y a pas, en France, de problèmes de cadavre d'animaux non collectés. La collecte est exhaustive.

M. le président - La rémunération est-elle fonction du nombre de cadavres ramassés ?

M. Philippe Vinçon - Du tonnage traité. Il en va de même des déchets avant que la réforme n'intervienne.

Les services vétérinaires s'assurent qu'il n'y a pas de défauts - et on n'en constate pas. En revanche, nous avons demandé aux services vétérinaires, qui n'ont pas souhaité s'engager parce que ce n'est pas leur travail, de s'assurer de la bonne cohérence entre les déchets d'abattoir traités et la taxe d'abattage acquittée sur ces déchets. C'est là qu'il n'y a pas forcément d'adéquation, mais c'est un problème à caractère fiscal et c'est ce qui explique le déficit.

Il y a un point que je voudrais souligner que le rapport de la Cour ne met pas suffisamment en avant : c'est l'importance de la décrue du SPE pour les finances publiques. En 2001, on était, entre SPE et traitement des déchets « bas risques », sur des budgets pour l'Etat de 450 millions d'euros, quand la taxe sur les achats de viandes rapportait plus de 500 millions d'euros. On est passé à un total de 404 millions d'euros en 2002, dont 230 millions d'euros pour le SPE et 174 millions d'euros pour l'élimination des farines, de 359 millions d'euros en 2003, dont 252 millions d'euros pour le SPE et de 107 millions d'euros pour les farines, et de 248 millions d'euros en 2004, dont 209 millions d'euros pour le SPE et 39 millions d'euros pour l'élimination des farines animales.

En 2005, on est à 216 millions d'euros, 180 millions d'euros pour le SPE et 36 millions d'euros pour les farines.

Il y a eu en effet un transfert considérable de tout ce volet sur les filières viandes même si l'Etat a facilité la répercussion de cette charge nouvelle en pied de facture. C'est ce qui explique les difficultés. L'Etat s'est désengagé de manière relativement significative et sous une pression communautaire. En juillet 2003, la Commission a adopté des lignes directrices sur les aides d'Etat en expliquant qu'il fallait resserrer le dispositif, contraignant ainsi l'Etat au désengagement financier.

Ceci s'est fait au détriment des entreprises d'abattage. Les éleveurs ont été exonérés de l'effort, alors que c'est l'éleveur qui appelle l'équarrisseur pour venir chercher un animal. Il n'y a là-dessus aucun ticket modérateur, aucune internalisation du coût. L'éleveur est libre et a été assuré qu'il n'y aurait pas de paiement direct. C'est là toute la difficulté qui fait qu'au moment initial, la taxe d'abattage a été placée à un niveau relativement optimiste, compte tenu de la pression politique exercée par la filière de l'abattage, qui est relativement fragile et qui emploie beaucoup de monde. Ensuite, il a été difficile de relever ce taux, ce qui devrait quand même être fait dans les jours qui viennent.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Vous n'avez pas l'air très sûr des causes de ce cumul -mais je passe.

Comment l'Etat a-t-il couvert le financement ?

M. Olivier Caillou - Par une ouverture de crédits de 20 millions d'euros en LFR pour 2003, de 50 millions d'euros en LFR pour 2004 et de 34 millions d'euros en LFR pour 2005 pour compléter les dotations inscrites en LFI pour 2003, 2004 et 2005 (34 millions d'euros), dont 20 millions d'euros chaque année au titre des subventions aux filières « porc » et « volaille ».

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Vous avez redéployé des crédits ?

M. Olivier Caillou - Absolument.

M. Philippe Vinçon - On peut détailler l'explication de la moins-value du fait des retards pris dans les arrêtés fixant la taxe, des difficultés de recouvrement, notamment sur le volet déchets, d'un geste fait sur les filières de jeunes bovins, au moment où la filière engraissement a rencontré une certaine fragilité, notamment dans l'Est de la France. On a fixé pour les jeunes bovins le même taux que pour les veaux, alors que ce n'était pas prévu initialement.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Vous nous le récapitulerez par écrit.

M. Philippe Vinçon - On peut vous l'adresser.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Actuellement, on arrive à une impasse budgétaire de 25 millions d'euros.

Vous sentez-vous capable d'obtenir des éleveurs des filières porcs et volailles une participation significative ?

On a voté une réforme du système d'équarrissage dans la LFI pour 2006 sans avoir tous les éléments d'appréciation. L'argument qui a emporté la décision de la commission des finances était que cela réduisait la charge de l'Etat du fait de la contribution de la filière et du rendement estimé de la taxe d'abattage.

Aujourd'hui, on nous dit que ces estimations sont confrontées à des difficultés d'exécution et qu'on aboutira à une impasse budgétaire. C'est une vraie difficulté pour le Parlement. Vous la comprenez.

Je veux donc savoir aujourd'hui où on en est de la première partie de la gestion 2006. Les éleveurs devaient accepter une participation. Où en est-on ?

La taxe d'abattage connaît-elle des perspectives d'évolution ? Dans quelles proportions ? On sait que les interprofessions ne sont pas d'accord avec l'augmentation. Si ces deux éléments de l'équation ne sont pas satisfaisants, c'est une fois encore l'Etat qui va apporter la différence, car il faudra bien faire face au financement.

M. Philippe Vinçon - La situation est en train de s'éclaircir. Les éleveurs de porcs participent. L'interprofession du porc a mis sur pied un dispositif qui fonctionne et qui doit permettre de rapporter les 2,5 millions d'euros que vous évoquez, qui seront versés directement aux équarrisseurs.

La filière porcine veut continuer à avancer sur ce dossier. En effet, pour un éleveur de porcs, le passage des équarrisseurs à un rythme hebdomadaire constitue un risque sur un plan sanitaire.

La filière volailles connaît une situation de crise récurrente depuis plusieurs années et la récente crise de l'influenza aviaire l'a encore fragilisée. Une structure se met en place sur le modèle du porc mais, à ce stade, le recouvrement escompté de 1,5 M€ reste incertain.

Pour ce qui concerne les éleveurs bovins, un dispositif interprofessionnel particulier devrait faire en sorte que les éleveurs allègent la charge des abatteurs. Il y aurait donc une certaine compensation au sein de l'interprofession. Les discussions sont en cours mais sont difficiles. Enfin, la semaine prochaine, une réunion est programmée qui devrait fixer les nouveaux taux de la taxe d'abattage. Une augmentation significative est envisagée, en particulier dans le secteur bovin.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Je vois bien la difficulté pour la volaille. Etant donné les conséquences économiques de l'influenza aviaire, je pense qu'ils ne paieront pas. La taxe d'abattage est très contestée. Je ne vois pas trop une augmentation en période préélectorale. Comment va-t-on faire ? C'est le budget d'Etat qui va être mis à contribution ?

M. Olivier Caillou - Je ne veux pas laisser donner l'impression d'une indifférence de la direction du budget à propos de ce financement complexe.

Le ministère du budget a été extrêmement actif dans ce dossier depuis 2004, d'une part en essayant de sécuriser le dispositif de financement mis en place à partir de 1997. C'est nous qui avons demandé la suppression de l'affectation de la taxe sur les achats de viandes au CNASEA, qui est un indice du fait que le SPE public n'était pas financé selon le principe pollueur-payeur et qu'on avait donc un risque de ce point de vue.

Nous défendons devant les tribunaux le fait que, sur la partie de la taxe sur les achats de viande 2001-2003, du fait de l'absence de lien contraignant entre la taxe et le financement du service, cette taxe est un impôt affecté au budget de l'Etat et que, ne finançant plus le SPE, il n'a pas à être remboursé aux grandes surfaces.

D'autre part, nous avons plaidé, pour tenir compte de l'amélioration de la situation sanitaire, du retour des prix de la viande bovine à un niveau supérieur à celui d'avant la crise de l'ESB. Nous avons plaidé pour une libéralisation du dispositif. Nous avons été partiellement entendus avec cette libéralisation partielle qui est intervenue dans le domaine des déchets d'abattoir, à la faveur de la loi sur le développement des territoires ruraux et de la loi de finances pour 2006.

Nous plaidons aujourd'hui - nous avons demandé un arbitrage à ce sujet - pour le respect du schéma de financement indiqué par le président Sallois, c'est-à-dire une subvention budgétaire limitée à 44 millions d'euros, une contribution des éleveurs de 8 millions d'euros, et qu'elle prenne la forme de 4 millions d'euros payés directement et 4 millions d'euros à travers une majoration de la taxe, schéma dans lequel est le ministère de l'agriculture...

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Quel est le montant de la majoration ?

M. Olivier Caillou - 4 millions d'euros sont payés directement par les éleveurs de porcs et de volailles aux équarrisseurs, soit par l'intermédiaire de l'interprofession, soit directement...

M. le président - La facture est établie par l'équarrisseur ?

M. Olivier Caillou - Absolument. 4 millions d'euros concernant les bovins ont plutôt vocation à passer au travers d'une majoration de la taxe d'abattage.

Nous plaidons pour que ce soit la taxe d'abattage qui soit, comme prévu, le facteur d'ajustement du dispositif.

M. le président - Pourquoi y a-t-il une différence avec les bovins ? Les porcs passent aussi par les abattoirs.

M. Olivier Caillou - Je me suis mal exprimé : la taxe d'abattage est payée par tout le monde.

M. le président - On la paye aussi bien sur les porcs que sur les bovins ?

M. Olivier Caillou - Absolument.

M. le président - Les porcs payent deux fois !

M. Philippe Vinçon - C'est le dispositif communautaire. Tout cela a été mis en place à cause de l'ESB. Il y a un risque sanitaire beaucoup plus important dans le secteur bovin-ovin. L'aide de l'Etat peut donc être plus importante dans le secteur bovin-ovin.

En revanche, dans le secteur porcs et volaille, une aide peut être apportée par l'Etat à condition qu'il y ait une contribution directe des éleveurs.

Il est impératif pour la France que les éleveurs de porcs et de volailles payent directement ; c'est ce que la France a notifié en 2004 aux services de la Commission. On court toujours le risque d'avoir des difficultés de ce côté. C'est pourquoi il y a cette différence entre les trois filières.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Dans la variable d'ajustement de la taxe d'abattage, vous tenez compte du fait que l'on n'a pas obtenu d'abaissement des tarifs du fait de la non-concurrence et que l'estimation du coût est passée de 136 à 152 millions d'euros.

M. Olivier Cailloux - Avec un élément : cette augmentation du coût va se mettre en place au moment où les marchés seront notifiés. On va en fait se retrouver en demi-année.

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Quand allez-vous le faire ?

M. Philippe Vinçon - Courant juillet.

M. le président - On peut dire aussi que les 8 millions d'euros demandés aux éleveurs sont peu de choses par rapport au budget global. On se donne beaucoup de mal pour pas-grand-chose et cela va donner lieu à de nombreuses réunions !

M. Philippe Vinçon - Pour les volailles, c'est une obligation communautaire.

Par ailleurs, pour la filière bovine, il faut comprendre qu'aujourd'hui un abatteur contractualise directement avec un équarrisseur pour le ramassage et la destruction des déchets à hauts risques qu'il produit. Par ailleurs, il acquitte une taxe d'abattage qui sert, en complément de la dotation budgétaire, à assurer la gratuité de service d'enlèvement des cadavres des éleveurs bovins sur leur exploitation. Dans la situation actuelle où la viande bovine est rare et chère et où les industries des viandes sont en situation délicate, une telle situation est souvent mal acceptée même si la répercussion de cette charge en pied de facture se fait, au moins pour les viandes commercialisées en France.

M. le président - La parole est à Joël Bourdin.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial - La Cour a mis en évidence les difficultés et l'hétérogénéité du contrôle du service fait par les équarrisseurs et exercé par les directions départementales des services vétérinaires - dérogations à l'obligation de pesée, non transmission aux DSV par les abattoirs de leurs déclarations fiscales, inégale qualité du contrôle de la collecte en ferme, etc.

Quelles sont les mesures envisagées par l'administration pour remédier à ces carences ?

M. Philippe Vinçon - Le transfert de cette mission à l'office de l'élevage nous paraît une manière de répondre à cet élément, dans la mesure où l'office a des contrôleurs de terrain, est déjà présent dans certains abattoirs et peut, de notre point de vue, mieux jouer ce rôle de contrôle et surtout, connaissant bien les filières viandes, avoir une meilleure évaluation des coûts et des dépenses de façon à aider la gestion du dispositif. Il peut enfin faciliter la réflexion avec l'ensemble des acteurs sur les évolutions à apporter à l'organisation actuelle.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial - Des orientations ont-elles été données en ce sens ?

M. Yves Berger - L'office ne fera pas de miracles. Vers le 2 ou le 3 juillet, l'office va se voir confier la gestion de l'ancien dispositif en lieu et place du CNASEA, avec des constatations de service fait qui nous seront adressées par les DDSV. Je pense que cela ne changera rien. Peut-être les délais seront-ils plus courts pour le paiement parce que le périmètre a changé.

En revanche, nous avons déjà prévu une autre façon de prendre les coûts en compte, avec des pesées, dans la mesure où cela peut être fait si les camions de ramassage sont dotés de bascules, et avec de nouveaux bordereaux d'enlèvement normalisés. On se donne la possibilité de contrôler de façon impromptue que les pesées se font bien et que les données sont correctes.

Si les camions ne sont pas équipés de bascules, nous avons mis au point, avec l'institut technique, les équarrisseurs et les fédérations d'éleveurs, un système d'abaque où, en fonction du cadavre enlevé, on peut avoir une estimation la plus proche possible du poids.

Il y aura systématiquement, à l'arrivée sur le lieu de transformation des cadavres en farines animales, une pesée avec des contrôles organisés. Nous avons actuellement une équipe d'une trentaine de contrôleurs. Ils ne feront pas que cela et seront amenés, à certaine période de la journée ou de la semaine, à faire ce qui était leur métier. Aujourd'hui, nous avons du temps à consacrer à cette opération parce que les métiers traditionnels - essentiellement les opérations d'intervention, d'achat, de stockage et de déstockage de viandes - sont réduits à leur plus simple expression.

Cela fait à peu près une quinzaine d'agents de terrain. Ce ne sera pas un contrôle exhaustif, mais il y aura une pression de contrôle plus forte qu'aujourd'hui, où il s'agit de vérifier un service fait.

J'insiste sur le fait que c'est dans l'organisation même du système que l'on a fait un certain nombre de choix qui doivent nous permettre d'avoir une meilleure connaissance.

Dernier élément : même si c'est plus anecdotique, on met en place une commission au sein de laquelle vont siéger toutes les parties prenantes de la filière.

Aujourd'hui - et cela transparaît bien à travers les divers propos que j'ai entendus ce matin - on dit que deux oligopoles font la pluie et le beau temps, le reste - éleveurs, abatteurs, pouvoirs publics - étant soumis au bon vouloir des équarrisseurs. On dit aussi que les pouvoirs publics, avec la hausse de la taxe, reprennent d'une main ce qui avait été accordé de l'autre aux abatteurs avec la libéralisation du système, le 15 octobre dernier.

Facialement, c'est vrai, mais les équarrisseurs, lors de différentes séances, nous ont indiqué qu'il existait une incertitude sur la durée de ce système nouveau. On sait que l'appel d'offre a vocation à durer trois ans mais personne ne se cache, les éleveurs de porcs cherchant en particulier à se doter de systèmes internes aux exploitations qui pourront, essentiellement pour des raisons sanitaires, leur permettre d'être dispensés du ramassage des cadavres. Les éleveurs de volailles se posent également ces questions.

C'est plus compliqué pour les éleveurs bovins, les volumes à traiter nécessitant des coûts plus élevés, mais il existe également des systèmes d'assurance qui font dire aux équarrisseurs que l'Etat leur a demandé énormément d'investissements, avec des usines comportant une séparation hauts risques/bas risques, que ces investissements ne sont pas totalement amortis et que, ayant une incertitude sur la durée, ils ont pris des assurances maximum.

Second élément : certains abattoirs ont vu baisser le coût d'enlèvement de leur MRS de plus de 20 %. En effet, l'abattoir est un lieu de collecte unique. S'il est de taille importante et peu distant de l'usine de transformation en farines, le coût d'enlèvement sera assez proche du coût de revient de l'élimination de ces sous-produits. Des prix très intéressants ont parfois pu être obtenus.

D'autres abattoirs, suite à la libéralisation intervenue en octobre dernier, ont eu des coûts plus importants qu'avant.

Pour en revenir à la question du contrôle, nous considérons que l'équarrissage fait partie intégrante de la filière de l'élevage.

M. le président - J'ai reçu, en tant que parlementaire, de la part des représentations régionales des offices, un courrier disant : « On va nous confier cette responsabilité, mais chacun sait qu'il n'y a pas de concurrence ; on ne sait donc pas comment s'y prendre ». J'imagine que chaque sénateur a reçu les mêmes lettres...

C'est une situation singulière à la veille de l'entrée en vigueur du nouveau dispositif !

M. Yves Berger - Je suis très surpris. Ce courrier émane sans doute de représentants syndicaux. Nous avons fait depuis trois mois un certain nombre de sessions de formation à l'utilisation du logiciel, en expliquant ce qu'ils allaient avoir à faire...

M. le président - Je vous ferai parvenir la lettre qui m'a été adressée il y a quelques semaines, qui est déjà un début de protestation, qui dit : « On a en face de nous des opérateurs qui sont en oligopole. On ne sait pas comment on va pouvoir s'en sortir ».

M. Yves Berger - Le seul document dont j'ai eu connaissance émanant du terrain était une critique où il était dit que le ministre de l'agriculture prônait la simplification et que cela se traduisait, pour l'équarrissage, par l'existence de bordereaux de plus en plus complexes, avec davantage de renseignements à donner. Si on collecte le cadavre d'une vache laitière ou d'une charolaise, le poids n'est pas le même. Il faut donc bien préciser un certain nombre de renseignements.

Nous avons indiqué que, du point de vue informatique, nous allions travailler avec la DGAL pour nous connecter avec la base de données d'identification nationale, pour assurer la bonne fluidité de l'information, mais je n'ai pas d'échos d'inquiétudes d'agents de l'office.

M. le président - Tous les animaux sont-ils sur le fichier national ?

M. Yves Berger - A 99,9 %. Il y a toujours quelques animaux qui peuvent s'en échapper, mais c'est aussi un des éléments qui va améliorer le dispositif.

M. le président - Y a-t-il un lien entre la collecte du cadavre...

M. Yves Berger - Un lien va être fait grâce à un logiciel de la DGAL. Une information sera donnée directement pas l'équarrisseur, confirmée par l'office de l'élevage, pour renseigner la base et indiquer que l'animal a été traité par les équarrisseurs.

M. le président - Il va donc y avoir un contrôle à partir de maintenant...

M. Yves Berger - Il va y avoir un nouveau système de contrôle. Si je vous réponds oui, je laisse entendre qu'il n'y avait pas de contrôle auparavant.

M. le président - C'est quand même un peu ce qu'on a compris !

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial - Quelles sont les modalités pratiques pour la mise en oeuvre des aides aux bouchers depuis le début de cette année et quelles sont les difficultés associées à une répercussion, en pied de facture, de l'augmentation de la taxe d'abattage ? Pourquoi cette répercussion est-elle si contestée par les bouchers ?

M. Jean-Jacques Pinet - Il convient de faire une relative séparation entre la sortie du SPE et cette aide, qui n'est pas une aide à l'élimination des déchets puisque, à la demande de M. Dutreil, nous laissons l'aspect sanitaire du SPE à la responsabilité de nos amis de l'agriculture. Nous considérons donc que le soutien à la boucherie est le soutien à la poursuite du savoir-faire artisanal des bouchers et nous ne lions pas cette aide au SPE.

En clair, les dispositions qui sont effectivement prévues laissent le soin d'aider les artisans bouchers pour le maintien du traitement de la carcasse, mais il n'y a pas de lien par rapport à l'élimination des déchets.

M. le président - Pourquoi pas une aide à la pâtisserie ou à la boulangerie ?

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial - C'est curieux comme réponse !

M. Jean-Jacques Pinet - En effet, il existe aussi des aides. C'est un effort qui est fait en faveur d'un secteur.

M. le président - Qu'est-ce que cela représente sur une année ?

M. Jean-Jacques Pinet - 500 euros.

M. le président - Quel est le coût du traitement administratif ?

M. Jean-Jacques Pinet - Le traitement administratif n'a pas été estimé à ce jour.

M. le président - Cela ne doit pas être neutre. C'est peu par boucherie...

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - J'ai entendu parler de 3 millions d'euros.

M. Jacques Sallois - Si ma mémoire est fidèle, il y a 10 millions d'euros d'aide aux bouchers. La question que je souhaiterais poser, en prolongeant la vôtre, Monsieur le Rapporteur, est de savoir si le financement de ces 10 millions d'euros, qui me semblait encore faire problème lorsque nous avons organisé l'audition à la Cour, est maintenant tranché.

Il y a d'un autre côté les problèmes de récupération de TVA, à hauteur de 3 millions d'euros pour les bouchers et de 10 millions d'euros pour les abattoirs...

M. le président - Je ne comprends pas le problème de TVA. Quel est-il ?

M. Jacques Sallois - C'est une moindre recette fiscale.

Nous avons eu un débat très franc sur toutes ces questions et nous étions convenus que nous nous reposerions la question des 10 millions d'euros d'aide aux bouchers après qu'un débat soit né devant nous, à l'époque, entre la direction chargée de l'artisanat et celle du budget. Le débat est-il aujourd'hui clarifié ?

M. Olivier Caillou - Jusqu'en janvier 2006, l'élimination des déchets des bouchers était partie prenante du SPE. A ce titre, il était prévu qu'elle soit prise en charge par l'Etat à hauteur de 1.000 euros, dans le plafond du « de minimis » agricole autorisé par l'Union européenne. La sortie du SPE des déchets des bouchers renvoie ce coût à la profession.

Pour assurer la transition, il a été examiné l'éventualité de mettre en place un dispositif d'accompagnement qui récupère cette charge, effectivement minorée par le fait que les bouchers récupèrent la TVA qu'ils ne récupéraient pas auparavant, soit une charge nette de l'ordre de 7 millions d'euros.

La question était de savoir qui, du ministère de l'agriculture ou de la direction du commerce et de l'artisanat assumait cette charge. L'orientation donnée par le cabinet du Premier ministre est plutôt un dispositif d'accompagnement du type de ceux qui sont gérés par le ministère du commerce et de l'artisanat.

M. le président - Sur quoi ne récupéraient-ils pas la TVA ?

M. Olivier Caillou - Auparavant, les équarrisseurs payaient la TVA sur les prestations qu'ils réalisaient.

M. Jean-Jacques Pinet - Les 1.000 euros HT dont bénéficiaient les bouchers étaient prélevés sur les recettes de la taxe TTC. Ce n'était donc pas un échange commercial, avec une facturation où l'on trouve une TVA déductible. C'est ce que reproche l'ensemble de la profession qui fait que, par le biais de l'existence de ce service public, nous sommes obligés d'avoir une taxe fiscale pour assurer une recette à l'Etat et cette taxe est prélevée en TTC. Dans un régime libéralisé, comme c'est le cas maintenant pour les déchets d'abattoirs et les colonnes vertébrales de bouchers, le client contracte avec son fournisseur et paye du HT. Il récupère donc immédiatement la TVA.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial - Il s'agissait de 500 ou de 1.000 euros ?

M. Jean-Jacques Pinet - C'était 1.000 euros en année pleine HT et c'est 500 maintenant.

M. Olivier Caillou - Compte tenu de l'avantage dont bénéficient les bouchers, du fait de la déductibilité de la TVA...

M. le président - Les grandes surfaces bénéficient-elles du même avantage ?

M. Olivier Caillou - Non, les grandes surfaces ne bénéficieront pas de cet avantage, dans la mesure où ce soutien est attribué aux opérateurs qui ont un atelier de découpe certifié conforme par les services vétérinaires.

M. le président - Les grandes surfaces n'ont pas d'ateliers de découpe ?

M. Olivier Caillou - Environ 16.500 ou 17.000 opérateurs sont concernés par ce soutien.

M. le président - Dans les grandes surfaces, il y a des ateliers de découpe certifiés...

M. Olivier Caillou - Non, pour l'instant, les grandes surfaces ne sont pas concernées par cette mesure.

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial - Mais pas à cause de l'absence ou de la présence d'ateliers de découpe ?

M. Olivier Caillou - Les ateliers de découpe intégrés dans les grandes surfaces ne sont pas, à ma connaissance, compris dans ce dispositif.

M. le président - Cela ne pose donc pas de problème...

Et s'agissant des pieds de facture ?

M. Bertrand Oudry - La DGCCRF a eu l'occasion de se préoccuper de cette revendication des professionnels de la viande. Lorsqu'ils ont été soumis à la taxe d'abattage instaurée début 2004, ils ont demandé aux pouvoirs publics la possibilité de répercuter de manière systématique et forfaitaire l'incidence de la taxe sur le prix des viandes facturé à leur client, en faisant valoir que c'était une charge nouvelle pour eux.

M. le président - C'est pédagogique.

M. Bertrand Oudry - C'est aussi anti-concurrentiel et ce n'est pas conforme aux règles de facturation. La taxe d'abattage est en effet une charge pour les entreprises qui en sont redevables. Il leur appartient de l'intégrer dans leur coût de revient et de décider de manière autonome si elles doivent la répercuter dans les prix facturés à leurs clients et à quelle hauteur.

Il existe une jurisprudence du Conseil de la concurrence sur des questions similaires et le fait que des entreprises s'entendent pour décider de la manière dont elles répercutent une charge sur leurs clients, ainsi que du niveau de celle-ci, constitue une forme d'entente sur un élément du prix.

D'autre part, le fait de le faire porter sur la facture signifie que le redevable d'une taxe transfère cette charge à son client, alors que la facture doit uniquement servir à faire apparaître le prix des produits ou des prestations.

Pour les professionnels, le pied de facture est une ligne de facturation. L'abattoir facture à son client, grossiste ou boucher, telle quantité de viande, à tel prix unitaire, HT, et ajoute une ligne « taxe d'abattage » ou « contribution coproduit », terme utilisé par les professionnels. En fait, au regard des règles du code de commerce, cette disposition n'est pas conforme.

M. le président - N'est-ce pas une réplique à certains messages de la grande distribution que le ministère de l'économie et des finances encourage volontiers à pratiquer pour que le pouvoir d'achat ne soit pas amputé ? Vous auriez d'ailleurs pu prendre là argument pour constater qu'elle était en abus de position dominante puisqu'elle faisait supporter à ses fournisseurs le poids de cette taxe.

M. Bertrand Oudry - La taxe sur les achats de viande pesait avant 2004 sur la grande distribution qui, selon les cas, l'a effectivement répercutée ou non dans ses prix de vente aux consommateurs...

M. le président - Elle l'a répercutée sur ses fournisseurs !

M. Bertrand Oudry - Elle l'a répercutée sans doute aussi en partie.

M. le président - C'était donc un indice d'abus de position dominante de la grande distribution par rapport à ses fournisseurs. Comme tel, vous auriez dû les poursuivre...

M. Bertrand Oudry - Si on avait été saisis d'indices.

M. le président - ... Avant qu'ils ne se délocalisent dans un autre pays que la France !

M. Bertrand Oudry - La répercussion par le redevable de la taxe sur une ligne de facturation, en tant que telle, n'est pas possible.

M. le président - C'est à relier à l'attitude assez agressive de la grande distribution qui, à un moment, disait ne pas vouloir répercuter cela sur les consommateurs - mais c'est une hypothèse ; oubliez donc ce que je viens de dire !

A ce stade, nous allons devoir nous prononcer sur l'opportunité de publier cette communication et cet échange qui ont largement permis de répondre aux quatre questions posées devant nous par le président Sallois.

Première question : sur le risque contentieux, on n'a pas vraiment argumenté. Il serait intéressant que le président Sallois nous dise si ce risque justifie qu'au 1 er janvier 2006, au moment où l'Etat va devoir présenter son bilan d'ouverture, l'on constitue une provision pour permettre à la Cour d'exprimer une opinion sur la sincérité des comptes...

M. Jacques Sallois - Nous avons reçu il y a deux jours seulement la maquette du ministère des finances. Permettez-moi de vous répondre que nous allons d'abord analyser la maquette ; nous verrons ensuite comment répondre à la question.

M. le président - Nous nous permettrons de vous interroger à nouveau sur ce point particulier.

M. Jacques Sallois - Je pense que vous n'aurez pas besoin de nous interroger, car nous serons obligés de nous prononcer dès l'année prochaine.

M. le président - Sur la deuxième question - la reprise par l'ONIEP de ce qui était accompli jusqu'à maintenant par le CNASEA - il semble qu'il y avait des délais entre le moment où l'on facturait et le moment où l'on payait. Est-ce à dire qu'au 1 er janvier 2006, il faut constater une dette sur ce qui n'est pas encore réglé et qui correspond à des charges effectives ?

M. Bernard Bezeaud - En effet, le dispositif était tel qu'entre le moment où la prestation est réalisée, la vérification du service fait assurée par la direction des services vétérinaires, la transmission des factures à notre établissent, l'instruction et le délai de traitement dans notre établissement, il y a forcément un écart entre la date de réalisation de la prestation et le paiement.

M. le président - Quel est le délai moyen ?

M. Bernard Bezeaud - Entre 3 et 4 mois selon les départements.

M. le président - Cela fait une charge de combien au 31 décembre ?

M. Bernard Bezeaud - Un peu plus de 80 millions d'euros.

M. Jacques Sallois - La Cour a commencé à regarder, l'an passé, la manière dont les patrimoines de certains opérateurs s'articulaient avec celui de l'Etat. Nous avions notamment choisi l'ONILAIT. Nous allons probablement étendre notre champ jusqu'à l'OFIVAL. De cette manière, nous serons en mesure de répondre à votre question.

M. le président - Au 1 er janvier 2006, c'était le CNASEA.

M. Jacques Sallois - Nous nous y préparons, Monsieur le Président...

M. le président - Non, mais vous aurez à certifier le bilan au 1 er janvier 2006.

M. Jacques Sallois - Absolument. Nous allons tenter de le faire, s'il est en état d'être certifié.

M. le président - On sait que les procédures sont en place et qu'elles constituent une avancée qualitative en termes de contrôle interne. La qualité du contrôle interne facilitera la certification des comptes.

Troisième question : l'échec de la procédure d'appel à concurrence. On n'a pas vraiment de réponse. Peut-on avancer dans la voie d'une plus grande transparence des comptes de ceux qui sont chargés d'une mission de service public ? Cela peut-il être une proposition, Nicole Bricq et Joël Bourdin ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale - Il n'y a que comme cela qu'on y arrivera !

M. le président - Il faut demander plus de transparence, puisqu'il n'y a pas de concurrence. On comprend qu'il n'y en ait pas, puisque la montée en puissance des normes sanitaires a entraîné une concentration des opérateurs, du fait de la pression des exigences sanitaires, de l'environnement, que sais-je encore. Toutes ces normes ont un effet de concentration et constituent donc une atteinte au potentiel de concurrence.

Enfin, s'agissant de l'équilibre financier du SPE, Nicole Bricq a exprimé quelques doutes sur l'effectivité des recouvrements.

Globalement, nous avons incontestablement avancé. Je remercie le président Sallois et les magistrats qui l'ont entouré, les représentants des trois ministères présents, ainsi que du CNASEA.

Je remercie mes collègues ici présents, tout spécialement Nicole Bricq et Joël Bourdin.

La commission des finances est-elle favorable à la publication d'une communication sur l'enquête de la Cour et sur l'audition d'aujourd'hui ?

Réponse unanime. Cette communication fera donc l'objet d'une publication.

Y a-t-il d'autres questions ?

(...)

M. le président - La séance est levée.

La séance est levée à 13 heures 20.

ANNEXE : COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES À LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT SUR LE FONCTIONNEMENT DU SERVICE PUBLIC DE L'ÉQUARRISSAGE (SPE)

INTRODUCTION

L'enquête de la Cour a été menée alors même qu'une nouvelle réforme du service public de l'équarrissage, engagée dans le cadre de la loi du 23 février 2005 sur le développement des territoires ruraux, faisait l'objet de deux missions d'étude 14 ( * ) qui ont conduit à l'adoption de nouvelles dispositions réglementaires (décret en Conseil d'Etat du 28 septembre 2005), puis au vote de l'article 86 de la loi de finances pour 2006.

Cette réforme a pour objet la réduction du périmètre du service public à l'élimination des animaux morts, le lancement d'un appel d'offres national à lots départementaux pour les prestations d'équarrissage maintenues dans ce périmètre, le rééquilibrage des charges respectivement supportées par l'Etat et les professions des filières de la viande et la substitution de l'office chargé des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL) au Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) comme organisme gestionnaire du service.

Prenant acte de ces décisions, la Cour s'est attachée à examiner les conditions de fonctionnement du service public de l'équarrissage afin d'en tirer des leçons utiles au succès de la mise en oeuvre de la réforme.

Les constatations de la Cour 15 ( * ) ont fait l'objet d'une contradiction écrite approfondie puis d'une large audition à laquelle tous les services ont participé. Au terme de ces échanges, la Cour constate que la réforme en cours apporte des réponses, non encore exhaustives, à de nombreuses questions soulevées dans son rapport mais que son efficacité dépend encore largement des mesures d'application qui restent à mettre au point en 2006.

Ses observations portent sur l'évolution du cadre juridique du service (partie I), de la gestion de ce service (partie II), des aides publiques et de leur financement (parties III et IV) et sur l'intervention du CNASEA (partie V).

LE CADRE JURIDIQUE

L'équarrissage consiste à collecter, à dépecer les animaux et à en extraire la peau, les os, les graisses et d'autres issues d'abattage. Ces divers sous-produits sont ensuite transformés et valorisés, notamment sur les marchés de la lipochimie et des cosmétiques, de l'alimentation des animaux de production et des animaux domestiques.

L'encadrement législatif et réglementaire de cette activité traditionnelle, motivé par des préoccupations de salubrité publique et de prophylaxie des épizooties, a été progressivement précisé et renforcé.

C'est ainsi qu'ont été rendus obligatoires, dès 1942, dans des périmètres fixés par arrêtés préfectoraux, la collecte et le traitement par les équarrisseurs des cadavres d'animaux de plus de 75 kilos ainsi que des déchets d'abattoirs.

Par ailleurs, les abattoirs de boucherie et les entreprises de collecte, transformation et destruction des produits et co-produits animaux sont tenus, en tant qu'établissements classés, de respecter les normes et contrôles techniques visant à limiter leurs atteintes à l'environnement, sous l'empire des lois n° 75-633 du 15 juillet 1975 et n° 76-663 du 19 juillet 1976, modifiées, et de leurs règlements d'application.

La première des lois précitées, relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux, établit la responsabilité du producteur de déchets et instaure le principe du « pollueur payeur ». La seconde détermine le régime légal des installations classées pour la protection de l'environnement, dont la réglementation applicable a été précisée en dernier lieu par un arrêté du 30 avril 2004.

Le règlement (CE) n° 1774/2002 du Parlement européen et du Conseil du 3 octobre 2002 a par ailleurs établi les règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à l'alimentation humaine, en adoptant une classification en trois catégories, en fonction des risques pour la santé publique.

Au sein de l'activité d'équarrissage, la définition légale et le périmètre de la mission de service public qu'elle comporte ont varié en fonction des objectifs assignés aux interventions de l'Etat. Celles-ci ont souvent été précisées dans l'urgence, en particulier pour répondre aux crises sanitaires et économiques successives dites « de la vache folle ».

A- DU « SERVICE D'UTILITÉ PUBLIQUE » AU « SERVICE PUBLIC » (1975-1996)

La loi n° 75-1336 du 31 décembre 1975 a reconnu à l'enlèvement et au traitement des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs la qualité de « service d'utilité publique ». Elle garantissait à l'équarrisseur un monopole territorial de ramassage des animaux de plus de 40 kg en contrepartie de la gratuité du service rendu aux éleveurs. Cette gratuité était compensée par la valorisation des produits issus de l'activité de transformation. La loi n'excluait pas cependant une indemnisation, si le prix de vente des produits finaux ne permettait pas de couvrir les frais de collecte. À cette fin, le préfet était assisté d'une « commission départementale de l'équarrissage », chargée notamment d'apprécier le déficit du service et devant laquelle les sociétés étaient tenues de produire les documents comptables relatifs à leur activité.

La crise de l'encéphalite spongiforme bovine (ESB) a nécessité l'adoption, en urgence, de mesures réglementaires imposant la destruction par incinération des matériels à risque spécifié (MRS) 16 ( * ) des bovins ainsi que des cadavres d'animaux et des saisies sanitaires d'abattoirs qu'il était interdit d'introduire dans la chaîne alimentaire et d'utiliser dans la fabrication de farines animales (arrêtés des 12 avril, 13 juin et 28 juin 1996) 17 ( * ) . En outre, l'interdiction d'utilisation les farines pour l'alimentation animale, restreinte par des règlements successifs depuis 1990, était généralisée 18 ( * ) .

Dès lors, le « subtil équilibre » 19 ( * ) de la loi de 1975 était durablement compromis : les sociétés d'équarrissage, qui valorisaient des matières premières d'origine animale, sont devenues des prestataires de services, assurant le retrait et l'élimination des cadavres et des déchets crus produits par les abattoirs et les ateliers de découpe. Ce changement, introduit par voie réglementaire, a imposé l'intervention du législateur.

La loi du 26 décembre 1996 a fait de l'équarrissage un « service public » et a organisé la collecte et l'élimination des cadavres, des saisies sanitaires en abattoirs et des MRS. L'utilisation des farines issues de déchets à bas risques demeurait interdite.

B- L'EXTENSION DE LA MISSION DE L'ÉTAT (1997-2005)

Le champ des interventions financières de l'Etat a connu, sous l'empire de la loi de 1996, deux extensions successives.

1°) La loi de finances pour 2002 20 ( * ) a confirmé la prise en charge par l'Etat des opérations de collecte et d'élimination des matériels à risque spécifié. Ces derniers sont désormais éliminés quel que soit leur lieu de détention 21 ( * ) , notamment auprès des ateliers de découpe et des bouchers détaillants autorisés à retirer des vertèbres de bovins. Ce dispositif s'inscrivait dans la suite des mesures prises par le Gouvernement pour faire face aux effets de la deuxième « crise de la vache folle » et en particulier de l'édiction, par l'arrêté du 14 novembre 2000 22 ( * ) , d'une obligation de destruction pour la majeure partie des déchets à bas risque, assortie d'une mesure d'interdiction de l'utilisation des farines et de retrait immédiat des stocks existants.

Depuis lors, l'élimination des déchets et sous-produits animaux effectuée par les équarrisseurs et les cimentiers a reposé sur :

1 - le service public de l'équarrissage créé en 1996, qui assure la collecte et l'élimination des cadavres, des saisies d'abattoirs et des MRS, sous la responsabilité sanitaire et aux frais de l'Etat,

2 - un régime indemnitaire au bénéfice des entreprises productrices de farines et de graisses animales, l'Etat stockant sous sa responsabilité plus de 60 % de ces farines avant d'en assurer la destruction.

2°) L'article L 226-1 du code rural a été de nouveau modifié par la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, qui a notamment ajouté la « transformation » à la collecte et à l'élimination parmi les opérations susceptibles d'être prises en charge au titre du SPE tout en autorisant l'Etat a modifier le périmètre du service public de l'équarrissage par la voie réglementaire.

Par ailleurs, sans qu'il s'agisse d'une extension du champ du SPE, la même loi permet à l'Etat de se substituer par décret aux opérateurs pour assurer l'élimination des déchets qui ne relèvent pas du service public de l'équarrissage.

Cette disposition couvre notamment les opérations engagées par l'Etat entre 2001 et 2003, sous l'égide de la mission interministérielle pour l'élimination des farines animales (MIEFA), pour stocker et éliminer ces farines à partir de 2004, afin de réserver par priorité les capacités d'incinération à la destruction des farines issues de déchets à « haut risque » éligibles au SPE. Les procédures ainsi que les modes de financement et de gestion sont identiques à ceux du SPE.

C- LA REFORME EN COURS

Tenant compte de l'évolution favorable de la situation sanitaire des troupeaux qui ne justifie plus une intervention massive de l'Etat au titre de l'élimination des sous-produits animaux, le gouvernement et le législateur, en accord avec les professions, ont sensiblement réduit le champ du service public de l'équarrissage à compter du 1 er octobre 2005, en excluant le traitement des déchets des abattoirs par décret du 28 septembre 2005.

En vertu de l'article 86 de la loi de finances pour 2006 , le SPE ne concerne plus que la collecte, la transformation et l'élimination des animaux trouvés morts en exploitation ou des cadavres d'animaux et matières animales lorsque leur élimination est nécessaire dans l'intérêt général et sous certaines conditions limitatives 23 ( * ) , ainsi que des matériels à risque spécifié (colonnes vertébrales de bovins) collectés auprès des 15000 boucheries 24 ( * ) autorisées à désosser les carcasses jusqu'au 31 décembre 2006 25 ( * ) .

La collecte des déchets d'abattoirs et des cadavres chez les vétérinaires et les particuliers, exclue du périmètre du SPE, relève désormais de contrats commerciaux.

La loi de finances pour 2006 exclut en conséquence la partie « déchets » de l'assiette de la taxe d'abattage, prévoit la participation des éleveurs au financement de la destruction des cadavres et transfère la gestion du SPE à l'office chargé des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL).

Parallèlement, il est prévu que l'exécution du SPE sera attribuée sous la forme d'un marché public national à lots départementaux, dont l'appel d'offres a été lancé le 29 novembre 2005.

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Au total, le SPE a concerné jusqu'en 2005 trois opérations - la collecte, la transformation et l'élimination - de trois catégories de sous-produits animaux - les cadavres, les saisies sanitaires en abattoirs et les MRS, ces dernières étant collectées principalement en abattoir mais aussi, pour les colonnes vertébrales de bovins, auprès des ateliers de découpe et des boucheries.

Un accroissement sensible des quantités de produits à éliminer dans le cadre du SPE a résulté initialement des abattages de bovins, puis de l'adoption d'arrêtés successifs qui ont étendu la liste des "matériels à risque spécifié" retirés de la chaîne alimentaire.

Les données disponibles montrent toutefois que les volumes de déchets traités au titre du SPE ne sont pas les plus importants des tonnages de matière crue transformée par les équarrisseurs (874 000 tonnes en 2003, soit moins du tiers des sous-produits animaux qui ont totalisé 2 889 000 tonnes).

L'EXECUTION DU SERVICE PUBLIC DE L'EQUARRISSAGE

L'institution par la loi de 1996 d'un « service public de l'équarrissage » (SPE) n'a pas donné lieu à la création d'une instance propre de pilotage, de gestion ou de contrôle d'un système géré pour l'essentiel au niveau local.

Dans chaque département, le préfet passe les marchés publics de prestations avec les industriels agréés ou, le cas échéant, prend les arrêtés de réquisition. Les services déconcentrés du ministère de l'agriculture instruisent les dossiers d'agrément des sociétés d'équarrissage et assurent l'inspection des établissements. Ils procèdent à la vérification de la conformité à la réglementation des opérations de collecte, de transport et de transformation des produits à détruire. Responsables de l'instruction des dossiers constitués par les sociétés d'équarrissage pour le paiement des prestations, ils sont ainsi chargés du contrôle du service fait.

Le service public de l'équarrissage, qui repose aussi en principe sur la passation de marchés locaux se caractérise en fait par l'absence de concurrence, la grande opacité des données économiques du secteur et la difficulté du contrôle du service fait.

A- L'IMPUISSANCE DE L'ETAT À FAIRE JOUER LES RÈGLES DE LA CONCURRENCE

En instituant l'équarrissage comme un service régi par l'Etat et organisé sur des territoires exclusifs d'intervention attribués par arrêté préfectoral, la loi du 31 décembre 1975 a assuré la couverture exhaustive du territoire par les sociétés opératrices. Elle a abouti, en fait, à la mise en place d'un duopole dominé par deux filiales d'entreprises à l'époque publiques 26 ( * ) . Cette situation, confortée par la concentration économique du secteur et la privatisation des deux principales sociétés, a en pratique compromis la mise en oeuvre du principe de concurrence.

Le nombre des établissements d'équarrissage a décru dans le temps, parallèlement à celui des abattoirs, les uns et les autres étant confrontés à la nécessité de réaliser des économies d'échelle pour réduire les coûts de production et financer des investissements de modernisation exigés par les réglementations nationale et européenne.

Ainsi, comme le notait le sénateur Rigaudière dans son rapport sur le projet de loi de 1996, le nombre de points d'abattage a diminué d'environ 19 000 (dont 18 000 tueries particulières) à 350 (dont 60% de services publics locaux) entre 1945 et 1995, cependant que le nombre d'établissements d'équarrissage (ateliers et dépôts) passait de 375 à une vingtaine d'entreprises. La situation est stabilisée depuis lors autour de deux groupes et quatre entreprises indépendantes.

La concentration de l'industrie de l'équarrissage, et les monopoles territoriaux dont disposent leurs établissements agréés, ajoutés à la dispersion et à la complexité des circuits de transport et de traitement des déchets et des cadavres, placent l'administration en situation défavorable. Alors que les autres activités des équarrisseurs sont soumises à une certaine concurrence, qui n'empêche pas les plaintes des abattoirs et des bouchers relatives aux prix qui leur sont imposés, la répartition géographique des marchés du SPE entre quelques entreprises, empêche non seulement la concurrence de s'exercer mais aussi les prix de se former librement.

Les premiers marchés départementaux ont été conclus après la loi de 1996, au terme de négociations conduites par les préfets avec l'appui des services départementaux et nationaux du ministère de l'agriculture (services vétérinaires) et du ministère de l'économie (services de la concurrence), au sein de commissions départementales et de groupes de travail nationaux chargés d'apprécier les coûts et les modalités d'attribution des marchés. Mais les réponses reçues aux consultations ne répondant pas aux critères de choix entre les concurrents, les appels d'offres ont, en règle générale, été déclarés infructueux. La tentative d'appels d'offre régionaux lancée en 1999 n'a pas connu de meilleure fortune.

Dans certains départements, comme en Haute-Vienne, l'unique offre présentée lors des appels lancés en 1997 et 2001 a cependant été retenue, alors même que manquaient des éléments essentiels (schéma d'organisation de la collecte et description des mesures techniques de séparation des produits à valoriser et à incinérer).

La concurrence ne trouvant pas à s'appliquer dans la grande majorité des départements et devant l'urgence, les préfets ont eu systématiquement recours, dès 1997, à la réquisition des entreprises d'équarrissage. Cette procédure peut être justifiée par des nécessités d'ordre public, incontestables en matière de sécurité alimentaire, mais elle est normalement réservée à des situations exceptionnelles. Or, dans les faits, la procédure de réquisition a été utilisée comme un mode de gestion permanent, les arrêtés de réquisition étant assortis de décisions de prix fixés pour de longues périodes. Cette procédure a même pu, à l'occasion, être détournée de son objet pour combler une défaillance administrative : ainsi le préfet du Cantal a-t-il pris un arrêté de réquisition portant sur le mois de juillet 2002 à la seule fin de permettre le paiement des prestations exécutées dans le cadre d'un marché qui n'avait pas été notifié.

Ce recours à la réquisition a entraîné d'importantes conséquences sur la transparence et le coût du système.

Les indemnités sont versées aux équarrisseurs sur la base des prix fixés par les arrêtés préfectoraux de réquisition et reposent sur les pièces justificatives produites par les prestataires réquisitionnés. Dans la pratique, les autorités préfectorales sont privées des références qui leur permettraient de fixer l'indemnisation sur la base d'un prix commercial, comme le prévoient les textes sur la réquisition. Elles incorporent dans les indemnités tous les éléments produits par les équarrisseurs sans pouvoir les discuter. Les prix établis par l'administration lui sont en fait imposés par les entreprises, ce qui ouvre la voie à des abus.

Ainsi, une entreprise d'équarrissage installée en Bretagne a inclus dans ses demandes d'indemnités des investissements à venir, pour des montants élevés, qui n'ont finalement pas été réalisés en totalité. Pour un marché conclu en 1997 dans le département du Morbihan, la présentation à la commission spécialisée des marchés (CSM) fait état d'un rapport de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes qui envisage la possibilité d'une intégration a posteriori de prestations réalisées depuis juillet 1996, mais non intégralement payées à la date de remise de l'offre par la société, dans le cadre d'un nouvel arrêté de réquisition.

Dans le département du Var, l'équarrissage a été confié jusqu'à la fin 2001 à une société privée dans le cadre de marchés publics qui lui ont été attribués alors que la concurrence est inexistante : une seule réponse est parvenue lors de la consultation pour le marché conclu pour l'année 2001. Depuis, le préfet de ce département a recours à la réquisition mais les services déconcentrés de l'Etat n'ont pas suffisamment analysé les conditions économiques de réalisation des prestations : la forte rentabilité de l'entreprise et la légère baisse des prix du gazole, observée en 2002 et 2003 auraient dû être mises à profit pour réviser les indemnités de niveau élevé versées au titre de la réquisition.

Depuis 1997, la DGCCRF a été saisie de plusieurs indices de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de l'équarrissage, tant pour les activités entrant dans le cadre du SPE que pour celles relevant du secteur privé. Elle a constaté que les tarifs relevant du SPE sont plus élevés que ceux des prestations correspondantes exercées à titre privé, pour lesquelles la concurrence semble effectivement avoir exercé un effet modérateur, notamment dans les zones où une concurrence transfrontalière peut s'exercer.

Dans un rapport d'enquête de 2001, relatif aux activités de collecte et de traitement des déchets à bas risque, elle a constaté que ce marché donnait lieu à :

une concertation sur la politique de prix et une homogénéisation des tarifs ;

une coordination des investissements, des plans de rationalisation de la logistique et de rapprochement des lieux de transformation (par l'échange de sites, de zones de collecte ou de fonds de commerce) ;

des échanges de fournisseurs et compensations de volumes ;

un front commun contre la concurrence des abattoirs intégrés.

D'après la réponse fournie par la DGCCRF aux questions de la Cour, « certains de ces indices ont fait l'objet d'un classement, soit parce que les éléments qu'ils apportaient n'étaient pas suffisamment précis pour justifier une enquête, soit parce que les délais afférents à une enquête et à la saisine éventuelle du Conseil de la concurrence étaient trop longs et inadaptés au traitement d'une situation du marché de l'équarrissage en évolution rapide. »

De fait, plusieurs enquêtes ont été classées en dépit du sérieux des indices et des constats, compte tenu d'une appréciation juridique négative sur la possibilité de saisir le Conseil de la concurrence 27 ( * ) ou - dans un seul cas - de raisons d'opportunité 28 ( * ) .

Les services reconnaissent que l'instauration d'un système d'appels d'offres nationaux à lots départementaux en 2006 ne suffira pas à instaurer d'emblée la concurrence dans une activité dominée par deux grands groupes nationaux, juxtaposant des monopoles territoriaux suscités à l'origine par l'Etat et où les barrières à l'entrée de nouveaux intervenants sont élevées en raison de la lourdeur des investissements exigés par la réglementation.

Dans une telle situation, l'Etat aura la tâche difficile de conduire une politique d'achats publics établie sur des informations de prix pertinentes, en évitant que la situation de monopole des entreprises les conduise à s'entendre sur les prix et la répartition des lots.

B- LES CARENCES DE L'INFORMATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

a) Pour fixer les indemnités dues aux équarrisseurs, les préfets peuvent prendre en compte la comptabilité des exploitations d'équarrissage et leurs résultats.

Cependant, dans la mesure où l'activité des équarrisseurs s'exerce sur plusieurs départements, l'appréciation de l'équilibre d'exploitation et la détermination des tarifs des prestations sont extrêmement malaisées au seul plan départemental. L'individualisation des coûts et la distinction entre les diverses branches de l'activité, dont certaines ne relèvent pas du service public, facilitent de surcroît des transferts de charges et de marges qui peuvent être contraires aux intérêts publics.

Le système est donc dépendant des informations données par les bénéficiaires de l'indemnisation, dont le contrôle est extrêmement difficile.

L'exemple du Morbihan est caractéristique de ces difficultés. Dans ce département, le troisième par l'importance des produits d'équarrissage collectés, une société dispose d'une usine de traitement d'une capacité de 60 000 tonnes. Mais les cadavres et déchets qui y sont traités ne représentent que 50 000 tonnes. Une partie de la production locale, issue de l'ouest et du nord du département, est en effet traitée dans une usine située dans les Côtes d'Armor. Inversement, l'usine du Morbihan assure le traitement et la transformation de produits en provenance de sept autres départements. Ainsi, des cadavres collectés dans le Morbihan transitent par le Finistère pour être traités en Côte d'Armor tandis que des produits du Maine et Loire ou de la Sarthe sont traités dans le Morbihan.

Il est donc particulièrement difficile et même risqué de se fonder sur les comptes et données fournis par les entreprises pour fixer les montants des indemnités dues au titre du SPE, comme l'ont montré les problèmes rencontrés par l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'agriculture pour évaluer les prix de revient des équarrisseurs.

b) L'article L-226-10 29 ( * ) du code rural prévoyait l'établissement d'un bilan annuel détaillé et chiffré de l'exécution locale du SPE pour l'information du Parlement. Or, malgré plusieurs questions parlementaires, les bilans des années 2002 et 2003 n'ont pas été établis.

Dans ces conditions, les statistiques d'origine professionnelle fondent, pour l'essentiel, l'information des pouvoirs publics.

C- LES DIFFICULTÉS ET L'HÉTÉROGÉNÉITÉ DU CONTRÔLE DU SERVICE FAIT

Les directions départementales des services vétérinaires (DDSV), en charge de l'instruction des demandes de paiement présentées par les équarrisseurs, doivent contrôler le service fait et sa conformité aux arrêtés de réquisition, notamment en ce qui concerne les quantités traitées.

Les informations recueillies auprès des six directions départementales visitées par la Cour montrent que les contrôles sont exercés, souvent avec peu de moyens et, en l'absence de guide de contrôle, de façon très hétérogène malgré une circulaire récente du 1 er février 2005. Dès lors, selon le rapport des inspections du ministère de l'agriculture, « les informations sont partielles ou imprécises et ne permettent pas d'assurer un véritable pilotage du dossier ».

Les contrôles tendent à ne concerner que la cohérence entre les déclarations des producteurs de déchets et celles des établissements d'équarrissage. Alors qu'ils sont facilités pour l'enlèvement des cadavres d'animaux des espèces soumises à des procédures de traçabilité, ces contrôles sont moins probants auprès des abattoirs en dépit de l'obligation de déclarer les quantités de déchets au titre de la taxe d'abattage. La Cour a noté que l'obligation de pesée, instaurée seulement en 2004, laisse subsister des dérogations et qu'en pratique le poids des déchets reste simplement estimé dans la moitié des abattoirs.

Certains abattoirs, contrairement aux dispositions réglementaires, n'ont même pas transmis aux DDSV la copie de leurs déclarations fiscales. La sincérité de plusieurs de ces déclarations a d'ailleurs été mise en cause par l'administration.

Dans un département breton, la comptabilité matières d'un équarrisseur a été jugée peu probante par les services, qui estiment qu'elle ne permet d'assurer ni la sécurisation de la traçabilité des animaux, ni la fiabilité des coefficients de rendement en farines animales des déchets crus.

Le contrôle de la collecte en ferme ne s'exerce que sur documents et par sondage a posteriori ; sa qualité est inégale.

Enfin, la complexité de la réglementation relative à la collecte des vertèbres chez les bouchers rend son contrôle lourd et difficile.

Ces difficultés ne peuvent cependant justifier les insuffisances qui affectent la rigueur des contrôles du service fait, par exemple dans un département tel que le Var où la situation paraît excessivement dégradée. De nombreuses anomalies n'y ont ainsi pas été détectées :

- la certification du service fait a été effectuée alors que, dans certains cas, selon les pièces justificatives, l'abattage ou la mort des animaux n'étaient pas avérés,

- la non éligibilité de certaines prestations au SPE en raison de la modicité des poids collectés,

- l'existence d'incertitudes sur la précision de la pesée,

- le recours au SPE, gratuit pour l'usager mais financé sur fonds publics, afin de satisfaire à l'obligation, à titre payant, d'élimination des déchets hospitaliers produits par certaines cliniques vétérinaires, depuis peu transférés par contrat à un prestataire spécialisé,

- la pratique de déplacements systématiques deux fois par semaine auprès d'un éleveur, génératrice de facturations rentables dont la réalité n'a jamais été contrôlé

L'EVOLUTION DES AIDES PUBLIQUES ET LEUR COÛT

Le principe de la gratuité du service d'enlèvement assuré aux éleveurs en 1975, en contrepartie de l'exploitation des sous produits de l'équarrissage, n'excluait pas la possibilité d'aides compensatoires si l'équilibre de l'activité n'était pas assuré. Ces aides ont été pérennisées et étendues dès lors que cet équilibre a été systématiquement et durablement compromis par les crises successives de la « vache folle » à partir de 1996.

A - DES AIDES PUBLIQUES COMPLEXES ET CHANGEANTES

Depuis la mise en oeuvre de la loi de 1996, l'obligation de destruction des déchets animaux interdits à la consommation animale et humaine a pour contrepartie un financement public dont le périmètre et les conditions d'attribution ont été modifiés plusieurs fois, notamment en fonction des évolutions de la réglementation sanitaire.

a) Un dispositif central et des indemnisations complémentaires

Entre 1997 et 2003, l'enlèvement et la destruction des cadavres d'animaux, des déchets d'abattoirs et des MRS ont été assurés gratuitement par le SPE, au profit des éleveurs et des abattoirs et financés par la taxe sur les achats de viande.

Parallèlement au dispositif du service public de l'équarrissage, une indemnisation transitoire a été mise en place en 1998 pour le retraitement et l'élimination des farines non conformes aux normes de traitement thermique fixées par la décision n° 96/449/CE du 18 juillet 1996.

Ultérieurement, un décret du 1 er décembre 2000 a prévu l'indemnisation des entreprises productrices de farines et de graisses dont l'arrêté du 14 novembre 2000 avait suspendu l'incorporation dans l'alimentation des animaux. Cette indemnisation a été rendue dégressive d'octobre 2002 à fin 2003, afin d'inciter les opérateurs de la filière à prendre en charge progressivement une partie du coût du traitement des déchets.

b) Le régime applicable depuis 2003 par transposition des règles européennes

Les règles d'attribution des aides publiques à l'équarrissage ont été précisées par les lignes directrices de la Commission européenne concernant les aides d'Etat liées aux tests EST 30 ( * ) , aux animaux trouvés morts et aux déchets d'abattoirs, applicables au 1 er janvier 2003.

Le dispositif d'aide, qui n'a pas été notifié à la Commission européenne avant novembre 2003, a toutefois été approuvé le 30 mars 2004 pour les aides prévues en 2004. Les aides versées en 2003 n'ont en revanche été validées que le 5 juillet 2005 et le régime spécifique des aides pour la collecte des vertébrés auprès des bouchers a été approuvé le 5 février 2005.

Dans ce cadre, la réforme du régime des aides a été définie par un décret qui n'est intervenu que le 25 octobre 2004.

1°) Il est mis fin à la gratuité totale de l'enlèvement des cadavres d'animaux en exploitation, dans des conditions cependant différentes selon les catégories d'animaux :

- les éleveurs de porcs et de volailles, en application de l'article 29 des lignes directrices, doivent participer à la couverture du coût de la collecte et de la transformation des cadavres, à hauteur de 25 %.

- les éleveurs de bovins soumis aux tests EST ne sont assujettis à aucune contribution, la couverture de la totalité des coûts pouvant être assurée par un financement d'Etat aux termes de l'article 31 des lignes directrices ;

- les éleveurs des autres animaux (les ovins et caprins notamment) ne sont pas appelés à contribuer à la couverture des frais d'équarrissage, dans la mesure où, selon l'article 30 des lignes directrices, leur financement est assuré par la filière.

2°) Les déchets d'abattoirs sont pris en charge par le SPE, tandis que les ateliers de découpe supportent l'intégralité des coûts d'élimination des vertèbres, et que les bouchers bénéficient d'une prise en charge de ces coûts par le SPE dans les limites de 500 euros pour 2004 et de 1000 euros pour 2005.

La loi sur le développement des territoires ruraux du 23 février 2005 a permis d'exclure les déchets d'abattoirs du service public de l'équarrissage au 1 er octobre 2005.

A compter du 1 er janvier 2006, seule l'élimination des vertèbres collectées auprès des bouchers reste prise en charge à ce titre, dans le cadre d'une aide sous plafond de 1 000 € par établissement établie pour un an. La Cour relève toutefois qu'une lettre interministérielle du 29 juin 2005 au directeur général du CNASEA, partant du constat de la lourdeur et des difficultés du contrôle des plafonds fixés par voie réglementaire, avait autorisé le paiement intégral des demandes d'indemnisation exposées par les opérateurs à ce titre, abolissant de fait le plafond d'aide publique imposé aux bouchers.

B - LE COÛT DES AIDES PUBLIQUES

a) La charge des dépenses liées au SPE

L'ensemble des dépenses liées à la mise en oeuvre de l'équarrissage (y compris le SPE, le FODREFA 31 ( * ) et les dépenses de stockage et de destruction des farines induites par l'interdiction, décidée le 14 novembre 2000, de l'emploi des farines en alimentations animale) atteignait 2 043 M€ au 31 août 2005 32 ( * ) , répartis comme suit.

1°) Les dépenses du seul SPE représentent près des deux tiers du total, soit 1 407 millions d'euros. Elles résultent pour 54 % des charges de collecte de cadavres et de déchets, pour 27 % du coût de la transformation et pour 13 % des dépenses d'incinération. La proportion des charges de collecte a toutefois tendance à augmenter depuis 2004.

La Cour observe que les dépenses prises en charge par le SPE ont principalement servi à indemniser quatre entreprises d'équarrissage qui ont reçu, de 2001 à 2005, 81 % des aides publiques. Plus des deux tiers du total ont bénéficié à deux entreprises.

2°) Les dépenses relatives aux co-produits (farines) s'élèvent à 626 M€. Elles n'atteignent des montants significatifs qu'à partir de 2001 : en 2000, celles qui ont été prises en charge par le compte du SPE ne représentaient que 850 000 € 33 ( * ) .

Ces dépenses sont décroissantes à partir de 2004, les aides aux entreprises ayant alors cessé et la dépense relative aux « co-produits » ne concernant plus que le stockage et la destruction progressive des farines en stock.

b) Les aides à l'investissement des entreprises

En complément des aides liées à la mise en oeuvre de l'équarrissage, des aides publiques à l'investissement ont été, sur l'ensemble de la période, accordées aux entreprises de transformation procédant au traitement ou à la destruction de certains co-produits.

De 1994 à 1999, le champ de ces aides excluait en principe les entreprises représentant plus de 5 % du marché. La Cour note cependant que toutes les entreprises ont bénéficié d'une aide ponctuelle visant à mettre les installations en conformité avec une norme communautaire de traitement des farines 34 ( * ) .

Le montant de ces aides a représenté plus du tiers des dépenses totales d'investissement engagées par les entreprises, soit 10,04 millions d'euros d'aides européennes 35 ( * ) et 4,54 millions d'euros d'aides nationales sur un total de 43,06 millions d'euros.

A partir de 2000, les aides à l'investissement ont été concentrées sur les techniques innovantes contribuant à une meilleure valorisation des produits. Dès lors, les demandes qui concernaient de simples mises aux normes ont été rejetées. Au total, depuis le 1 er janvier 2000, 5,95 millions d'euros d'aides européennes et 3,37 millions d'euros d'aides nationales ont été versées. Elles ont concerné quelques opérateurs : 4,52 millions d'euros ont été versés à une entreprise de Bretagne, 2,44 M€ à une entreprise de Franche-Comté et 1,34 M€ à une autre entreprise pour deux de ses sites en Bretagne et en Normandie.

Ces aides à l'investissement ont renforcé le soutien apporté par le SPE à la modernisation des entreprises d'équarrissage. Celles-ci, en effet, ont pu autofinancer leurs investissements et les amortir sur une durée courte, grâce aux marges élevées dégagées sur un système tarifaire favorable 36 ( * ) .

La modernisation des installations, qui a permis leur adaptation aux exigences de la réglementation en matière sanitaire et d'environnement, a eu pour effet également de stabiliser les structures du secteur et de consolider les périmètres et conditions d'intervention des professionnels.

LE FINANCEMENT DU SERVICE PUBLIC

Pour assurer le financement des aides accordées aux professionnels de l'équarrissage, plusieurs dispositifs de taxes ont été mis successivement en oeuvre. Ils se sont heurtés aux résistances des professionnels assujettis à ces taxes et aux critiques de la Commission européenne. Leur produit, qui a excédé le montant des dépenses, a été réduit par des contentieux qui ne sont pas encore soldés. Le système mis au point par la dernière réforme n'est pas à l'abri de ces contestations.

A - UNE TAXE SUR LES ACHATS DE VIANDE CONTESTÉE PAR LES INSTANCES EUROPÉENNES

Aucune des solutions envisagées en 1996 pour financer les charges imposées à l'équarrissage n'a résisté à l'opposition des professionnels de la filière viande (éleveurs, abatteurs et bouchers) ou des collectivités territoriales. Ont ainsi été écartés les mécanismes reposant sur un financement par les éleveurs, les collectivités publiques ou les organismes professionnels et interprofessionnels agricoles.

L'instauration d'une redevance additionnelle à la redevance sanitaire d'abattage, initialement retenue par le Gouvernement, a été finalement écartée au profit d'une solution faisant peser sur le consommateur le financement des charges liées au service public de l'équarrissage. La loi de finances initiale pour 1997 a ainsi institué une taxe sur les achats de viande et produits assimilés, régie par l'article 302 bis ZD nouveau du code général des impôts.

Cette taxe, coutumièrement dénommée  « taxe d'équarrissage, » était :

- assise sur la valeur (hors TVA) des achats de viandes et de produits assimilés, soit sur un volume estimé à l'époque - compte tenu des exonérations décidées - à plus de 112 milliards de francs ;

- recouvrée dans les mêmes conditions que la TVA ;

- payée par les entreprises de distribution dont le chiffre d'affaires de l'année civile précédente était supérieur ou égal à 2,5 MF. Le seuil de déclenchement de la taxe exonérait en conséquence quelque 66 000 points de vente et le nombre des redevables, réalisant près de 20 % de la valeur des achats concernés, était d'environ 9 000 ;

- les taux d'imposition étaient fixés par arrêté conjoint des ministres des finances et de l'agriculture, par tranches d'achats mensuels hors TVA dans les limites suivantes : 0,6 % jusqu'à 125 000 F et 1 % au-delà de 125 000 F. Ils ont été respectivement fixés à 0,5 % et à 0,9 %.

Les pouvoirs publics ont été contraints d'alourdir la taxation mise en place par cette loi pour répondre aux besoins du SPE, quitte à aggraver les contestations de ce dispositif et l'ampleur des contentieux prévisibles.

a) La taxe additionnelle temporaire de 1998

Afin de financer, dans l'urgence, l'adaptation des abattoirs aux normes communautaires a été votée, en 1998, une taxe additionnelle temporaire à la taxe sur les achats de viande, applicable aux achats réalisés entre le 1 er juillet 1998 et le 31 mai 1999. Sur ces deux exercices, le produit de cette surtaxe affecté au financement de farines produites entre le 6 février et le 30 juin 1998 ou appartenant au stock non commercialisé existant, a été de 4 179 324 €.

b) L'adaptation de la taxe en 2001

En novembre 2000, afin de faire face à l'augmentation prévisible des dépenses du SPE et pour prendre en charge les dépenses résultant de la suspension de l'utilisation des farines et graisses animales dans l'alimentation des animaux, le gouvernement a arrêté  deux mesures applicables au 1 er janvier 2001 37 ( * ) : l'extension de l'assiette de la taxe à tous les produits à base de viande et le relèvement substantiel des plafonds. Le rehaussement du seuil d'imposition de 2,5 à 5 MF du chiffre d'affaires (763 000 € au 1 er janvier 2002) était destiné à limiter l'alourdissement de la taxation sur les artisans bouchers et charcutiers, dont la quasi-totalité s'est de fait trouvée exonérée à l'exception d'une centaine d'entreprises qui ont vivement protesté.

Parallèlement, afin de dissimuler la fragilité juridique de la taxe, en particulier au regard des règles communautaires, le produit de la taxe a cessé d'alimenter le SPE par l'intermédiaire du CNASEA et a abondé le budget général, le financement du SPE et des mesures consécutives à la décision du 14 novembre 2000 étant ainsi assuré sur crédits budgétaires.

À partir de 2002, les aides de l'Etat aux producteurs de farines « bas risque » ont progressivement diminué sans que les taux de la taxe soient pour autant révisés à la baisse.

c) La suppression de la taxe au 1er janvier 2004

La contestation de la taxe par les professionnels de la grande distribution a conduit la Cour de justice des Communautés européennes, par décision préjudicielle du 20 novembre 2003 (arrêt GEMO), à qualifier le versement du produit de la taxe, non notifiée aux autorités européennes, d'aide d'Etat incompatible avec le droit européen de la concurrence.

Cette décision, faisant suite à la publication des lignes directrices de la Commission européenne, le 24 décembre 2002, a entraîné la suppression de la taxe, intervenue le 1 er janvier 2004.

Bien que la Commission européenne ait confirmé cette décision le 14 décembre 2004, elle a néanmoins autorisé à titre rétroactif le dispositif de financement du SPE instauré en 1997, dont la taxe sur les achats de viande constituait l'élément central, mais dans la limite du montant notifié par les autorités françaises, soit 829 M€.

Cette autorisation était cependant subordonnée au remboursement partiel des sommes perçues sur le marché intérieur et au remboursement intégral de la taxe ayant frappé les viandes importées entre 1997 et 2000.

Le remboursement des taxes, qui avaient été répercutées sur le consommateur, devait avoir pour effet une baisse du prix à la consommation de la viande et des aliments d'origine carnée, dans le contexte de l'accord signé le 17 juin 2004 entre l'Etat, les producteurs, fournisseurs et distributeurs, qui comportait un engagement de la profession de baisser les prix des produits de grande consommation de marques nationales de 2 %.

Les remboursements réclamés par la grande et moyenne distribution, tant devant les services fiscaux que devant les tribunaux administratifs, portaient sur montant total estimé à 1,8 milliard d'euros en 2004. Cependant, après avoir engagé le remboursement des sommes indûment perçues dès septembre 2004, le gouvernement a décidé de l'arrêter au montant de la taxe collectée de 1997 à 2000, évalué à 400 millions d'euros. Les modalités du remboursement publiées au bulletin officiel des impôts du 6 juin 2005, sont les suivantes :

- pour la période 1997-1998, restitution de la totalité de la taxe (sur demande gracieuse préalable ou renouvellement d'une demande rejetée précédemment pour forclusion de délai) ;

- pour la période 1999-2000,  délai de réclamation fixé au 31/12/2005 et remboursement assorti d'intérêts moratoires.

Les distributeurs ont, en conséquence, engagé en 2005 une nouvelle campagne de réclamations et de contentieux afin d'obtenir le remboursement intégral des sommes versées au titre de la taxe d'équarrissage, en arguant de la non rupture du lien entre la taxe et le dispositif d'aides 38 ( * ) .

d) Bilan financier de la taxe sur les achats de viande

La taxe d'équarrissage a rapporté une centaine de millions d'euros en moyenne par an au cours de la période 1997-2000, soit 387 M€ au total. Son produit net, après prélèvement des frais de recouvrement des services fiscaux, était alors directement confié au CNASEA, conformément à la législation en vigueur. Affecté au budget général de l'Etat entre 2001 et 2003, après relèvement des plafonds d'imposition et extension de l'assiette, le produit de cette taxe s'est élevé à environ 1,7 milliard d'euros au total (638 M€ en 2001, 527 M€ en 2002, 515 M€ en 2003), dont 1,1 milliard consacré au financement du SPE.

Au total, la taxe assise sur les achats de viande aura rapporté à l'Etat, au cours de la période 1997-2005, un produit net proche de 2,1 milliards d'euros à l'Etat, dont 1,6 milliard aura été affecté au financement du SPE.

Le bilan financier de la taxe d'équarrissage aura cependant été fortement affecté par les suites des contentieux qui obligent l'Etat à rembourser 400 millions d'euros aux distributeurs assujettis, montant qui pourrait être aggravé par l'issue des contentieux en cours.

B - UNE TAXE SUR LES ABATTOIRS RÉCUSÉE PAR LA FILIÈRE VIANDE

a) La décision des autorités européennes

La Commission a validé, le 30 mars 2004, le double dispositif mis en place à partir du 1 er janvier.

1°) La Commission a autorisé les aides à l'élimination des cadavres d'animaux d'espèces victimes d'encéphalopathies spongiformes transmissibles, ou susceptibles de l'être, mais a imposé, pour les autres espèces (les porcs et les volailles), que les éleveurs participent directement à hauteur de 25 % au moins des coûts de transformation et d'incinération ou, de façon alternative, que l'aide soit financée à 100 % par un prélèvement obligatoire sur les filières viandes en excluant la distribution.

Dès lors qu'elles s'appliquent dans tous les États membres, ces règles ne peuvent donc, en principe, constituer une cause de distorsion de concurrence au profit des produits carnés européens. La Cour a cependant constaté que l'information disponible dans l'administration sur les systèmes équivalents existant en Europe était d'un niveau relativement faible.

2°) La Commission a également admis le financement, à titre dérogatoire, de l'élimination des déchets d'abattoirs qualifiés de « MRS » pris en charge par le SPE, par le produit de la taxe d'abattage assis sur le tonnage de ces mêmes déchets.

En outre, la Commission a exigé la mise en place d'une comptabilité indépendante du SPE ; il en est résulté la création, dans les comptes du CNASEA, d'un fonds à comptabilité distincte auquel est rattaché le produit de la taxe.

b) Le dispositif de la taxe d'abattage

L'article 28 de la loi de finances pour 2004 a supprimé la taxe d'équarrissage et institué la taxe d'abattage, assise pour partie sur le poids des animaux abattus et pour partie sur le poids des déchets d'abattoirs.

Le produit de cette taxe, perçue auprès des abattoirs agréés, en application de l'article L. 233-2 du Code rural, est affecté à un fonds spécifique du CNASEA, qui contribue au financement des dépenses du SPE et des mesures concourant au stockage, au transport et à l'élimination des farines d'origine animale.

Selon l'annexe financière du rapport transmis à l'Union Européenne, le produit annuel de la taxe d'abattage acquitté par les abatteurs et affecté au financement du SPE devait s'élever à environ 143 M€, dont 74 M€ pour la partie de la taxe assise sur les volumes des animaux trouvés morts et 69 M€ pour la partie assise sur les volumes des déchets des abattoirs et des ateliers de découpe. Le produit de la taxe d'équarrissage, par comparaison, était de 550 M€ par an 39 ( * ) .

Les prévisions associées à la loi de finances pour 2004 escomptaient en revanche un rendement de 156 M€ de la taxe acquittée par les abattoirs. Dans cette hypothèse, le financement du SPE aurait été assuré par les contributeurs suivants :

- l'État, pour l'élimination de tout ou partie des cadavres en exploitation agricole, à hauteur de 54 millions d'euros (dont 20 millions d'euros spécifiquement consacrés à la collecte et à l'élimination des cadavres de porcs et de volailles) ;

- les éleveurs de porcs et de volailles pour 25 % des coûts de transformation des cadavres d'animaux collectés dans leurs exploitations, à payer directement aux équarrisseurs ;

- les ateliers de découpe choisissant d'éliminer les vertèbres de bovins, qui acquittent la taxe ou rétribuent directement les équarrisseurs ;

- les bouchers-charcutiers artisans, qui bénéficient d'une aide plafonnée à 1 000 euros par an et par entreprise, financée par la taxe d'abattage (pour 26 M€) : au-delà du plafond, ils doivent régler directement la prestation d'enlèvement et de transformation aux équarrisseurs.

c) La contestation des abatteurs

Si la désignation des abattoirs comme redevables de la taxe est conforme au principe « pollueur-payeur », l'exonération des éleveurs autres que les éleveurs de porcs et de volailles ne l'est pas.

De fait, les abatteurs ont mal accepté de payer à ce titre pour les éleveurs, y compris dans les filières porcine et avicole où la majeure partie des dépenses du SPE provient des animaux trouvés morts dans les exploitations (ATME).

Les éleveurs refusant cependant de payer toute charge au titre de l'enlèvement des ATME et souhaitant éviter tout risque de répercussion de la charge vers l'amont, leurs syndicats ont en conséquence soutenu la demande formulée en 2003 par les organisations professionnelles de l'abattage, visant à obtenir la mise en place d'un mécanisme obligatoire et forfaitaire de répercussion vers l'aval, qui a été refusée par les pouvoirs publics.

d) La résistance des éleveurs de porcs et de volailles au paiement de leur participation

Le recouvrement par les établissements d'équarrissage de la participation des éleveurs de porcs et de volailles au financement de l'élimination des cadavres de ces espèces 40 ( * ) s'est révélé irréalisable ; ces opérateurs ont donc présenté au CNASEA des factures correspondant au coût total du service, sans abattement pour la participation des éleveurs.

L'agent comptable du CNASEA ayant régulièrement suspendu le paiement des factures lorsqu'elles ne tenaient pas compte des sommes dues par les éleveurs, une lettre interministérielle du 28 décembre 2004 a cependant autorisé le paiement des factures présentées par les équarrisseurs, sans abattement au titre de la participation des éleveurs, non recouvrée : cette lettre a, de fait, suspendu l'application de l'article 1 de l'arrêté du 25 octobre 2004 pris en application de l'article R 226-6 du Code Rural. « S'agissant de la participation financière des éleveurs de porcs et de volailles, nous vous précisons que votre établissement est déchargé de toute opération de contrôle et régularisation, notamment par voie de recouvrement », écrivaient les ministres au directeur général du CNASEA, en évoquant la définition d'une nouvelle procédure qui n'est pas encore intervenue.

Les problèmes rencontrés dans le recouvrement des participations demandées aux éleveurs ont aggravé les difficultés de gestion du CNASEA, auxquelles l'Etat a remédié sous la forme d'une avance remboursable décidée par une lettre interministérielle du 10 mai 2004 ( cf. infra ).

e) Les limites financières du nouveau financement du SPE

Le produit de la taxe d'abattage, qui devait s'élever à 156 M€ puis a été comptabilisé à hauteur de 109 M€ au titre du SPE a toutefois été estimé à 129 M€ en 2004 par l'Inspection générale des finances (dont 100 M€ recouvrés en 2004 et 29 M€ en janvier 2005 au titre de l'année précédente). En 2005, il s'élevait à 91 M€ au 31 août.

Pour faire face au déficit prévisionnel de financement du SPE, résultant notamment d'un rendement de la taxe d'abattage inférieur aux prévisions et des difficultés de recouvrement de la participation des éleveurs, une augmentation des taux de la taxe a été étudiée. Le Premier ministre a cependant décidé un moratoire sur l'augmentation des taux, dans l'attente de la mise au point d'une réforme du financement du SPE compatible avec les engagements européens de la France, en particulier au plan budgétaire.

Cependant, les besoins résiduels de financement du SPE en 2004 et 2005 s'élèvent, selon le rapport IGF-IGA à 76 M€ en 2004 et 93 M€ au total pour la période 2004-2005, dans l'hypothèse où les taux de la taxe seraient maintenus à leur niveau actuel 41 ( * ) .

f) Les obstacles économiques au financement du SPE

Le décret d'application relatif à la taxe d'abattage, en date du 24 avril 2004 comporte certaines dispositions relatives à la répercussion de la taxe d'abattage sur l'aval de la filière par les abattoirs, mais leur portée est limitée et leur mise en oeuvre difficile. Une telle répercussion ne peut en effet être imposée sans être contraire au droit communautaire et au droit de la concurrence.

De ce fait, n'a été édictée qu'une obligation d'information au bas des factures sur les charges dont les abattoirs s'acquittent au titre du SPE.

Dans la filière porcine, les abatteurs estimaient toutefois ne pouvoir répercuter qu'au mieux 15 à 20 % de la charge de la taxe sur leurs clients. Ils ont donc tenté de la répercuter en amont par la voie d'une retenue sur la valeur des animaux enlevés dans les fermes. Cette retenue a été déclarée illégale au printemps 2004 par un jugement en référé du tribunal de commerce de Quimper, obligeant les établissements d'abattage à rembourser aux groupements de producteurs les sommes retenues.

Le ministère de l'agriculture estimait, quant à lui, que la répercussion sur le consommateur de la taxe d'abattage restait limitée : il l'évaluait à 70 % pour le boeuf mais seulement à 30 % pour le porc et la volaille. Par ailleurs, cette administration estimait alors que cette répercussion avait « tendance à s'éroder et à être intégrée dans le prix » payé aux abatteurs.

Les organisations interprofessionnelles INAPORC puis INTERBEV ont alors tenté de négocier une prise en compte accrue de ces charges par la distribution et de renforcer la solidarité de la filière par l'instauration d'une « contribution volontaire obligatoire » (CVO) à la charge des éleveurs et des distributeurs, pour compenser le montant de la taxe payée par les abatteurs pour l'enlèvement et la destruction des cadavres en ferme.

Les producteurs - notamment de porc - s'y sont toutefois en définitive opposés, craignant que ce mécanisme n'aboutisse à reporter de fait sur eux la charge représentée par la taxe, les distributeurs n'acceptant pas, en tout état de cause, d'y participer.

Il reste que le principe même du recours à une créance privée de ce type pour financer un service public peut être mis en doute et suppose, pour chaque secteur, l'existence d'une organisation interprofessionnelle reconnue.

Face à ces difficultés, les différentes parties ainsi que le Gouvernement et le Parlement ont convenu que la seule solution possible aux problèmes de financement de l'équarrissage était de réduire le périmètre du service public à la collecte et à la destruction des animaux trouvés morts, pour en alléger la charge, et de revenir à des relations contractuelles pour le traitement des déchets d'abattoirs .

C. - LE FINANCEMENT DU SPE ET SA RÉFORME PAR LA LOI DE FINANCES POUR 2006

a) Le financement du SPE avant 2006

Le budget de l'Etat a été sollicité, soit en complément, soit en substitution des recettes d'origine fiscale pourtant théoriquement seules affectées au financement du SPE.

1°) Entre 1997 et 2000, le produit de la taxe sur les achats de viande a financé une dépense publique de 387 M€. En 2000, toutefois, une partie des crédits du chapitre 44-70 du budget de l'agriculture, relatif à la promotion et au contrôle de la qualité, a été utilisée afin de contribuer au financement du SPE, à hauteur de 30,5 M€, alors que ses charges étaient en principe financées directement et exclusivement par le produit de la taxe sur les achats de viande.

2°) Entre 2001 et 2003, le produit de la taxe sur les achats de viande n'étant plus affecté au CNASEA mais budgétisé, les dépenses ont été exclusivement financées sur crédits budgétaires (chapitre 44-71), pour un volume total de 1,2 milliard d'euros. Ces crédits ont néanmoins été abondés, en 2001, par l'abandon au CNASEA d'un reliquat de 25 M€ de taxe d'équarrissage non récupéré par l'Etat.

3°) En 2004 et 2005, le nouveau mode de financement par la taxe d'abattage, qui a rapporté plus de 200 M€ sur ces deux exercices, a eu pour effet de réduire notablement les dotations budgétaires fixées respectivement à 82 M€ et 86 M€ pour ces deux exercices.

4°) Au total, les dépenses liées au SPE (2,1 Md€) sont restées inférieures aux produits des taxes destinées à les financer (2,3 Md€). L'écart ne compense cependant pas la charge des remboursements accordés aux distributeurs au titre des contentieux relatifs à la taxe sur les achats de viande.

b) La réforme du financement du SPE décidée pour 2006

1°) Le projet de loi de finances pour 2006 propose, dans le dispositif prévu à l'article 86, d'assurer le financement d'un SPE dont la charge est évaluée à 136 M€ (hors coût du déstockage des farines MIEFA) par une taxe d'abattage dont l'assiette sera parallèlement réduite au poids de viande des animaux abattus, la partie de la taxe pesant sur les déchets d'abattoirs étant par définition éliminée. L'arrêté d'application du décret du 28 septembre 2005 prévoit, dans l'attente de l'entrée en vigueur de la LFI pour 2006, de ramener à zéro dès le 1 er octobre 2005, le taux d'imposition applicable à cette partie de l'assiette de la taxe d'abattage.

Ce décret, ayant réduit le périmètre du SPE à l'élimination des animaux morts, sous des conditions limitatives, les abattoirs, à partir du 1 er octobre 2005 et les bouchers, à partir du 1 er janvier 2006, négocieront dorénavant directement avec les équarrisseurs les tarifs d'élimination de leurs déchets qui présentent un risque sanitaire.

Le régime d'aide instauré en faveur des bouchers, nonobstant leur sortie du champ du SPE, aura un coût de 10 M€. Les bouchers agréés bénéficieront également de la récupération de la TVA à hauteur de 3 M€ environ.

La contribution des éleveurs de porcs et de volailles résultant aujourd'hui de textes réglementaires restés partiellement inappliqués devra faire l'objet d'une nouvelle définition, dans le cadre fixé par l'article 86 de la loi de finances initiale pour 2006 qui prévoit la possibilité d'une participation des éleveurs de toutes espèces animales évaluée à 8 M€ 42 ( * ) .

2°) Le projet de loi de finances présenté selon les normes établies par la LOLF, inscrit les crédits du ministère de l'Agriculture destinés au SPE dans la mission interministérielle « Sécurité sanitaire », au sein de laquelle le ministère a la responsabilité du programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » et dont l'action n° 05 « Elimination des farines et des coproduits animaux » récapitule les transferts aux entreprises liés à « l'aide économique apportée aux filières chargées du ramassage et de l'élimination des coproduits et des farines animales ».

Dotée de 99 M€ en CP et 406, 4 M€ en autorisations d'engagement, cette action regroupe les crédits d'intervention affectés au financement du SPE en les ventilant, selon leur nature, entre deux rubriques héritées des anciens articles 10 et 20 du chapitre 44-71.

1. La rubrique « Collecte et élimination des cadavres et sous-produits animaux » est dotée de 44 M€ en CP (242 M€ en AE 43 ( * ) ).

Le financement du SPE réduit à la collecte, la transformation et l'élimination des cadavres d'animaux (dans des conditions plus restrictives que par le passé), pour une dépense estimée à 136 M€ 44 ( * ) , est assuré par :

- le budget de l'Etat : 44 M€ (32 %),

- la contribution attendue des éleveurs : 8 M€ (6 %),

- le produit de la taxe d'abattage, estimé dans les prévisions de la loi de finances établies en juin 2005, à 84 M€ (contre 74 M€ en 2005 pour l'assiette « viande »), l'assiette « déchets » de la taxe (57 M€ en 2005) disparaissant à la suite de la sortie du périmètre du SPE.

Les taux de la taxe d'abattage pourront être modifiés en 2006 en fonction du résultat de l'appel d'offres national lancé le 29 novembre 2005, qui déterminera la charge finale prévisionnelle du SPE.

2. La rubrique « Stockage et élimination de farines animales accumulées jusqu'en 2003 » est dotée de 55 M€ en CP (164,4 M€ en AE45 ( * ))

La dotation en CP demandée au Parlement correspond au montant des loyers d'entrepôts à payer (30 M€) et aux frais de déstockage de 200 000 tonnes de farines (25 M€).

La Cour relève en outre que la nouvelle présentation des crédits ne permet toujours pas d'évaluer l'ensemble des dépenses administratives affectées au fonctionnement du SPE, incluses notamment dans des programmes de soutien des budgets de l'agriculture et de l'environnement 46 ( * ) .

LA GESTION BUDGETAIRE, FINANCIERE ET COMPTABLE PAR LE CNASEA

La direction générale de la comptabilité publique ayant refusé de confier à son réseau la charge d'assurer le paiement du SPE, celle-ci a été confiée au CNASEA qui, en vertu de l'article 313-3 du code rural, dans sa rédaction résultant de la loi du 26 décembre 1996, gère le fonds par lequel transitent les ressources qui financent le SPE.

Un décret du 30 octobre 1997 fixe les modalités de gestion de ce fonds, qui retrace également les crédits attribués à l'élimination des farines animales (dotés d'une comptabilité distincte en ce qui concerne spécifiquement le FODREFA jusqu'en 2001).

À partir de 2001, le produit de la taxe sur les achats de viande étant affecté au budget général, le CNASEA enregistre en comptabilité générale les crédits qui lui sont délégués sur le budget du ministère de l'agriculture au titre du SPE et des coproduits, et assure un suivi extra comptable des dépenses de l'établissement public, jusqu'en 2003 inclus.

Enfin, depuis la mise en oeuvre de l'article 28 de la loi de finances pour 2004 créant la taxe due par les abattoirs, le produit de cette taxe est affecté au CNASEA et géré par l'établissement public dans le cadre d'un fonds à comptabilité distincte. Le produit de la taxe et les opérations du SPE sont rattachés à ce fonds.

Par lettre du 30 janvier 2004, le directeur général de la comptabilité publique a autorisé l'agent comptable du CNASEA à créer ce fonds, sous la forme d'un « service à comptabilité distincte » (SACD) et approuvé une nomenclature comptable spécifique. Le SACD n'a cependant pu être créé par le CNASEA qu'au mois d'octobre 2004.

Entre-temps, les opérations ont été suivies en comptabilité générale, selon les pratiques jusqu'alors en vigueur, mais sur des comptes dédiés basculés dans le fonds lors de sa création. Les opérations subventionnées par l'Etat, de même que les réserves propres au SPE (11 832 904,61 €), jusqu'alors traitées en comptabilité générale, ont été reprises pour leur solde net dans le fonds, ainsi que le solde de l'avance de trésorerie consentie à l'établissement par l'Etat (47 M€).

A - UNE GESTION BUDGÉTAIRE DIFFICILE ET COÛTEUSE

La Cour relève l'existence d'un décalage de trésorerie permanent d'origine administrative entre les besoins et les ressources depuis la création de la taxe d'abattage par la loi de finances du 31 décembre 2003.

Le décret fixant les modalités de calcul de la taxe a été pris tardivement le 23 avril 2004 et les premiers encaissements ne sont parvenus au CNASEA qu'au mois de juin suivant.

Afin d'assurer la continuité des paiements, une subvention de 54 M€ inscrite en LFI a été consentie par l'Etat au CNASEA en début d'exercice 2004. Celle-ci s'étant révélée insuffisante, le CNASEA a, en plus, bénéficié d'une avance du Trésor dans la limite de 70 M€ par décision du ministre de l'économie et des finances du 29 avril 2004 notifiée au CNASEA par lettre interministérielle du 10 mai. Seulement 57 M€ remboursables au 31 décembre et assortis d'intérêts ont été effectivement versés.

Deux nouvelles décisions du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'agriculture en date du 26 novembre 2004 et du 20 décembre 2004 ont autorisé le CNASEA à reporter le remboursement au 28 février 2005 « à partir des subventions qui lui seront versées en gestion 2005 sur le chapitre 44-71 du budget de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité en loi de finances initiale pour 2005 et en loi de finances rectificative pour 2004 ». Cette subvention a permis d'apurer le résultat négatif de l'exercice 2004. À nouveau, une lettre du ministre de l'agriculture et du ministre du budget du 7 mars 2005 a autorisé le report jusqu'au 31 octobre 2005 du remboursement du montant restant de 47 M€ assorti des intérêts. Un remboursement de 13,1 M€ a été effectué le 31 août 2005 sur instruction du ministre du budget qui a demandé, le 8 août, au CNASEA d'affecter au remboursement de l'avance les sommes qu'il avait indûment reçues au titre de la taxe sur les achats de viande 47 ( * ) . Le reliquat d'avance (33,9 M€ plus 1,4 M€ au titre des frais financiers) a été intégralement remboursé le 18 novembre 2005.

B. - UN COÛT D'INTERVENTION NON NÉGLIGEABLE

Le CNASEA a estimé que la charge qu'il supporte au titre du SPE est lourde. Toutefois, le nombre de factures à traiter, certes variable, a atteint un maximum de 13 000 en 2002 y compris pour les co-produits alors que 17 agents étaient affectés à ce traitement la même année.

En 2001, lors de la modification du circuit de financement du service public de l'équarrissage reposant sur l'affectation au budget de l'Etat du produit de la taxe d'équarrissage et sur des subventions au CNASEA, ce dernier a considéré qu'une partie de la dotation du ministère de l'agriculture était affectée au financement de ces frais de gestion. Ce niveau de financement n'aurait permis de couvrir, selon le CNASEA, que 50 % des dépenses de fonctionnement annuelles du secteur. Ces frais de gestion ont cependant représenté 484 400 € en 2001, 479 604 € en 2002 et 465 008 € en 2003.

L'article 1-IV du décret du 23 avril 2004 relatif à la taxe d'abattage a toutefois prévu que « la part du produit de cette taxe destinée à financer la gestion des opérations imputées sur le fonds auquel est rattaché le produit de ladite taxe est fixée à 1,5 % ».

Ces frais de gestion viennent en réduction des recettes brutes de la taxe d'abattage reçues par le CNASEA et seuls les montants nets sont enregistrés en recettes dans la comptabilité du SPE. Ce mode de comptabilisation par compensation n'est ni transparent ni régulier. Le montant de ces frais, supérieur à celui que l'établissement a exposé de 2001 à 2003, s'est élevé à 1 632 319 € en 2004 et à 1 342 965 € au 31 août 2005. Néanmoins, sur la période 1998-2005, le fonctionnement supporté par le CNASEA pour la gestion du service public de l'équarrissage serait déficitaire de 1,8 M€.

C. - LES DÉLAIS DE PAIEMENT DES DÉPENSES DU SPE

Les paiements, à partir de la réception des dossiers dans les délégations régionales du CNASEA, s'effectuent dans un délai de 2 à 3 mois auquel il convient d'ajouter le temps nécessaire aux vérifications réalisées par les DDSV. La succession des vérifications par les DDSV, les délégations régionales du CNASEA, les services centraux du CNASEA et, enfin, l'agent comptable de cet établissement ne garantit cependant pas un contrôle rigoureux du service fait.

Ces délais, loin d'être toujours imputables à l'administration, peuvent être le fait des bénéficiaires eux-mêmes, en raison de la fourniture de dossiers insuffisamment justifiés. Il n'en reste pas moins que la longueur des procédures de paiement se comprend mal, s'agissant d'un organisme censé échapper aux contraintes de la comptabilité publique. Elle a aussi des conséquences financières.

Les intérêts de retard dus par le CNASEA ne sont pas payés systématiquement et spontanément, mais seulement sur réclamation, et demeurent exceptionnels. Ils ne figurent pas dans la comptabilité du fonds SPE du CNASEA. Seul un suivi extra comptable a permis de constater que leur montant a atteint la somme élevée de 205 629,38 € en 2003.

???

La substitution de l'office chargé de l'élevage, des viandes et de l'aviculture au CNASEA devrait mettre un terme à l'incohérence née de la dissociation, critiquée par la Cour en 2004, de la fonction d'ordonnateur, le directeur général de l'établissement chargé de la gestion du SPE étant également personne responsable du marché (PRM) lancé le 28 novembre 2005. Les actes de réquisition éventuellement nécessaires restent cependant de la compétence des préfets à titre exceptionnel.

CONCLUSION

L'enquête de la Cour met en évidence l'écart entre les dispositions législatives et réglementaires arrêtées au cours des dix dernières années et les modalités de gestion du service public de l'équarrissage : absence de concurrence ; faiblesse des contrôles ; difficultés de financement.

En relevant que les aléas de cette politique ont néanmoins contribué à la modernisation des installations d'équarrissage, la Cour croit utile de souligner que la réforme du SPE, dont les principes sont en cours d'adoption et qui connaît un début de mise en oeuvre, laisse subsister un certain nombre d'incertitudes qui nécessitent une vigilance soutenue des pouvoirs publics.

1° L'Etat encourt le risque de voir les contentieux administratifs suscités par son refus de rembourser les assujettis à la taxe sur les achats de viande pour la période 2001-2003, dont le produit est de 1,7 Md€, tourner en sa défaveur. Dans cette hypothèse, la charge financière de l'Etat serait alourdie en proportion des contentieux perdus.

2° La capacité de l'Etat à assurer, dans le cadre d'un marché national dont le périmètre d'exécution reste le département, un regain de concurrence dans le secteur de l'équarrissage - toujours marqué par un niveau élevé de concentration et par l'exercice de monopoles géographiques - et à obtenir des baisses de prix sur les prestations d'équarrissage, à l'instar de ce qu'ont obtenu les abattoirs dans le nouveau cadre contractuel qui est le leur, reste incertaine.

3° L'évaluation de la charge budgétaire future du SPE (44 M€ sur un coût total de 136 M€ en 2006) est soumise à des aléas. En effet, d'une part le coût du service ne sera connu qu'au vu des résultats de l'appel d'offres national lancé le 29 novembre 2005, d'autre part la participation attendue des éleveurs - au demeurant plafonnée à 8 M€ - dépend de leur consentement individuel aux engagements pris par les interprofessions concernées, enfin le financement d'une aide aux artisans bouchers, pour un an seulement dans les hypothèses actuelles, reste à confirmer.

4° Dans le cadre d'un cahier des charges non encore précisé, l'Etat aura à s'assurer, non seulement des performances de gestion attendues d'un nouvel opérateur, l'OFIVAL, mais aussi de l'aptitude de cet organisme, appelé à devenir PRM, à maîtriser une information pertinente sur la situation et les coûts des entreprises d'équarrissage ainsi que de sa capacité à réaliser, dans de meilleures conditions qu'antérieurement, les contrôles de l'exécution du service exigés de l'ordonnateur et du comptable.

* 1 Une enquête placée sous la responsabilité du comité permanent des inspections du ministère de l'agriculture visant à dresser le bilan du SPE et à proposer les principes de sa révision, en concertation avec les acteurs concernés ; une enquête réalisée par l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'agriculture sur le financement, le coût et le contrôle du SPE datant de 2004.

* 2 Dispositif issu de l'article 151 de la loi de finances initiale pour 2006 précitée.

* 3 Les candidats avaient 52 jours pour proposer leurs offres au ministère de l'agriculture et de la pêche pour un marché de trois ans fermes renouvelable deux fois un an.

* 4 L'arrêté du 14 novembre 2000 a édicté l'obligation de destruction de la majeure partie des déchets dits à « bas risque » assortie d'une mesure d'interdiction totale de l'utilisation des farines animales dans la nourriture animale et de retrait immédiat des stocks existants.

* 5 Il s'agit, en fait, de l'article 86 du projet de loi de finances pour 2006, devenu article 151 de la loi de finances pour 2006, n° 2005-1719 du 30 décembre 2005.

* 6 Conformément aux dispositions de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole et au décret du 30 décembre 2005, l'OFIVAL est devenu l'Office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions.

* 7 Elf Aquitaine et Entreprise minière et chimique.

* 8 Ainsi, la Cour des comptes fait référence à une entreprise d'équarrissage installée en Bretagne qui a inclus dans ses demandes d'indemnités des investissements à venir, pour des montants élevés, qui n'ont finalement pas été réalisés en totalité.

* 9 La Cour des comptes cite notamment l'exemple du département du Var où la situation paraît excessivement dégradée.

* 10 Encéphalopathie spongiforme transmissible.

* 11 La Cour des comptes indique que le TA de Marseille a ordonné le remboursement à un opérateur sur cette base et que la cour administrative d'appel et le Conseil d'Etat seront amenés éventuellement à se prononcer sur cette question en 2006.

* 12 « S'agissant de la participation financière des éleveurs de porcs et de volailles, nous vous précisons que votre établissement est déchargé de toute opération de contrôle et de régularisation, notamment par voie de recouvrement ».

* 13 Les taux de la taxe d'abattage pourront être modifiés en 2006 en fonction du résultat de l'appel d'offres national lancé le 29 novembre 2005.

* 14 - une enquête placée sous la responsabilité du comité permanent des inspections du ministère de l'agriculture (COPERCI) et plus précisément du vice-président du Conseil général vétérinaire, visant à dresser le bilan du SPE et à proposer les principes de sa révision, en concertation avec les acteurs concernés ;

- une enquête réalisée par l'inspection générale des Finances et l'inspection générale de l'Agriculture sur le financement, le coût et le contrôle du SPE en 2004.

* 15 Les rapporteurs ont conduit des entretiens avec les représentants de la profession de l'équarrissage et les responsables du SPE dans les administrations compétentes, tant au ministère de l'agriculture (DGAL et DPEI), qu'au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministère chargé des PME. Les investigations sur place ont été concentrées sur le CNASEA et sur les services de l'Etat dans les Régions du Limousin et de Bretagne, les départements de la Haute-Vienne, du Cantal, de l'Allier, de l'Ille-et-Vilaine, du Morbihan et du Var.

* 16 L'encéphale, les yeux, la moelle épinière, le thymus, les amygdales, la rate et les intestins.

* 17 Les bovins français nés avant le 31 juillet 1991 et les bovins importés en France avant cette date.

* 18 Interdiction des farines animales dans l'alimentation des bovins (juillet 1990) ; interdiction de l'utilisation des matières d'origine animale dans les fertilisants et supports de culture (août 1992) ; extension de l'interdiction d'utilisation des farines et des protéines d'origine animale à tous les ruminants (décembre 1992) ;

* 19 Expression employée par les parlementaires rapporteurs de la loi de 1996 (M. Angot, député et M. Rigaudière, sénateur).

* 20 n° 2001-1275 du 28 décembre 2001

* 21 « Article L 226-1 : La collecte et l'élimination des cadavres d'animaux, celles des viandes, abats et sous-produits animaux saisis à l'abattoir reconnus impropres à la consommation humaine et animale, ainsi que celles des matériels présentant un risque spécifique au regard des encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles, dénommés matériels à risque spécifié et dont la liste est arrêtée par le ministre chargé de l'agriculture, constituent une mission de service public qui relève de la compétence de l'Etat. »

* 22 Ce texte - modifiant l'arrêté du 30 décembre 1991 déjà modifié en 1996 (arrêté du 28 juin) qui a classé les déchets utilisables à cet effet en deux catégories, suivant le degré de risque sanitaire - « haut » ou « bas » - qu'ils présentent (seuls les premiers étant obligatoirement incinérés) (à l'exception de celles qui proviennent du lait, des produits laitiers, des ovo-produits et de la gélatine de non ruminants, porcs ou volailles, utilisées pour la production d'aliments pour animaux de compagnie, ainsi que des farines de poissons destinées à l'alimentation des poissons), des graisses animales issues des os ou de cuisson des farines animales (non issues de fondoirs alimentaires) et de toutes les graisses de ruminants dans l'alimentation des animaux de rente.

* 23 Il s'agit : des animaux d'élevage morts en exploitation agricole ; des cadavres ou lots de cadavres d'animaux d'élevage mentionnés à l'article L 226-1 du code rural, morts au cours de déplacements hors de l'exploitation agricole, à l'exception des animaux morts au cours de leur transport vers l'abattoir ou dans le cadre d'une activité de spectacle ; des cadavres ou lots de cadavres d'animaux de toute espèce de plus de 40 kilogramme morts dans les fourrières, les refuges mentionnés à l'article L 214-6 du code rural et les parcs zoologiques ; des cadavres, ou lots de cadavres d'animaux de plus de 40 kilogrammes de toute espèce et dont le propriétaire est inconnu ou inexistant ; des cadavres ou lots de cadavres d'animaux de toute espèce dont la destruction, pour des raisons de santé et de salubrité publique est décidée par le préfet de département, à l'exception des cadavres d'animaux abattus sur ordre du préfet dans le cadre des mesures de lutte contre les maladies animales réputées contagieuses.

* 24 Celles qui sont autorisées à désosser les carcasses de bovins non débarrassés de ces matériels et ne disposant pas de l'agrément leur permettant de s'inscrire dans la catégorie des ateliers de découpe.

* 25 Au premier janvier 2006, il est prévu de sortir du SPE par décret les colonnes vertébrales des bovins issus des ateliers de boucherie. L'aide de minimis attribuée aux bouchers pourrait être, pour l'année 2006, financée sur le budget du ministère chargé des petites et moyennes industries.

* 26 Elf Aquitaine et Entreprise Minière et Chimique.

* 27 En 1999-2000 sur les pratiques d'une société, qui occupe une situation prépondérante dans le sud-ouest.

En 2000 sur des indices de pratiques anti-concurrentielles en Bourgogne.

En 2004 sur le fonctionnement concurrentiel de l'équarrissage, hors SPE.

* 28 En 2000 sur les marchés de collecte et de transformation des co-produits animaux dans le domaine de l'équarrissage privé.

* 29 Cet article du code rural a été abrogé par la loi du 23 février 2005

* 30 EST= Encéphalopathie Spongiforme Transmissible

* 31 FODREFA= Fonds pour le Retraitement et l'Elimination des Farines Assimilées non-conformes.

* 32 Ce montant représente une moyenne d'environ 227 M€ par an. Cependant les montants ne peuvent être comparés d'une année à l'autre compte tenu des nombreux changements de réglementation.

* 33 Antérieurement, un fonds pour le retraitement et l'élimination des farines assimilées non conformes à la directive européenne de 1996 (FODREFA), clôturé début 2000, a permis d'assurer neuf millions d'euros de dépenses.

* 34 Chauffage à 133° C, pendant 20 mn, sous 3 bars.

* 35 FEOGA-Orientation, Programme 5 A.

* 36 L'administration a pu constater que la sortie des déchets d'abattoirs du périmètre du SPE, en octobre 2005, avait entraîné un mouvement à la baisse du prix des prestations depuis lors facturées dans un cadre contractuel : alors que leur tarif était de 197 €/tonne au titre du SPE (taux de la taxe d'abattage sur la partie « déchets » de l'assiette), elles ont été négociées en moyenne sur la base de 140 €/tonne (voire, dans une région, de 110 €/tonne).

* 37 Mises en place par la loi de finances pour 2002

* 38 Le tribunal administratif de Marseille a ordonné le remboursement à un opérateur sur cette base. La Cour administrative d'appel et le Conseil d'Etat seront amenés éventuellement à se prononcer sur la question en 2006, soit pour trancher le débat, soit en posant une question préjudicielle à la Cour de justice des communautés européennes.

* 39 Le différentiel de ressources pour le budget de l'Etat a été compensé, au titre de l'équilibre de la loi de finances initiale pour 2004, par un relèvement des taux de la TACA assorti d'un réaménagement des taux supportés par les distributeurs suivant le volume de leur chiffre d'affaires.

* 40 La décision de la Commission européenne n'impose aucune participation aux éleveurs de bovins.

* 41 92 M€ selon l'estimation du besoin de crédits en LFR établi par DPEI en juin 2005.

* 42 Elle sera inscrite dans la loi comme une créance de droit privé et il est prévu de réviser l'arrêté relatif à cette participation qui sera fondé sur le tonnage de cadavres enlevés et non sur le tonnage de carcasses abattues par l'éleveur. Aucune contribution n'est à ce jour envisagée de la part des éleveurs de bovins, même si la loi n'en exclut pas la possibilité.

* 43 Le montant (242 M€) des autorisations d'engagement est justifié par le cumul du coût du marché public national pour 3 ans (2006-2008), soit 132 M€ et des charges d'apurement du passé, le montant des encours étant estimé à 110 M€.

* 44 131 M€ au titre des animaux trouvés morts et 5 M€ au titre des autres cadavres.

* 45 L'équilibre de la collecte et du traitement des farines animales est établi, sur un besoin d'AE pour 2006 concernant l'élimination des « farines MIEFA » estimé à 164,4 M€, correspondant à un encours sur engagements antérieurs de 109,4 M€ et à un montant de nouveaux contrats de loyers et de déstockages de 55 M€, compte tenu des capacités d'incinération utilisables (pour un stock de 750 000 tonnes, dont le traitement s'étalera au moins jusqu'en 2008).

* 46 qui pourraient être au demeurant complétés, ne serait-ce qu'à titre d'information, par ceux que l'AFSSA, qui fait l'objet de l'action n° 04, affecte aux actions menées en matière d'évaluation des risques et d'appui scientifique et technique, ainsi que par l'indication d'aides éventuelles à la recherche et à l'investissement.

* 47 La fin de l'affectation au CNASEA de la taxe sur les achats de viande a nécessité des mesures correctrices: les modifications informatiques mises en place par la DGI permettant le rattachement du produit de la taxe n'ont été opérationnelles qu'à compter du 1er septembre 2001 et le CNASEA a continué à percevoir jusqu'à cette date le produit de la taxe sur les achats de viande comme si elle avait continué à être affectée à cet établissement public, alors qu'une partie seulement lui revenait (la taxe dont le fait générateur est antérieur au 31/12/2000, mais dont le versement n'est intervenu qu'au début 2001). Cette part a été estimée forfaitairement à 24,7 M€ et un reversement de 215,9 M€ a été effectué fin 2001, conformément à une décision de la ministre du Budget le 17 octobre 2001.

Toutefois des versements de taxe sur les achats de viande ont continué à parvenir au CNASEA bien après le 1 er septembre 2001. Au 20 mai 2005, l'agent comptable du CNASEA, qui détenait 12 601 146,45 € au titre de la taxe sur les achats de viande et 421 750 € au titre de la taxe additionnelle, a demandé des instructions au ministre du Budget concernant ces fonds.

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