2. Vers un changement de cap ?

Les temps changent : l'Etat change de ton, la FDJ devra-t-elle changer de cap ?

Des problèmes nouveaux surgissent ; et ils sont extrêmement sérieux.

Certains sont d' ordre juridique et concernent le fonctionnement de la concurrence entre les services européens en matière de jeux.

D'autres sont de nature sociale : il s'agit principalement du sort des joueurs dépendants d'un usage excessif des jeux.

Or, les deux problèmes sont liés dans la mesure où, à des procès engagés, ici ou là, par des opérateurs privés contre des opérateurs publics ou semi publics (ou inversement), répond une jurisprudence qui semble en train de s'instaurer, selon laquelle, si les Etats qui défendent leurs monopoles, n'encadrent pas leurs jeux et ne font pas d'efforts pour la prévention du jeu excessif, alors ils risquent de perdre beaucoup car la concurrence aura le droit de s'installer chez eux.

Sur le plan européen, l'Etat doit impérativement donner des preuves de sa volonté d'établir et de pérenniser une politique d'encadrement du jeu.

Nous disons « donner des preuves », car le fondement de l'arrêt Gambelli (s'il n'est pas contredit un jour) est bien de laisser aux Etats la charge de la preuve de leurs efforts dans ce domaine.

Or, il faut être réaliste, les attaques contre les « privilèges » de l'Etat en France vont se multiplier, contre l'Etat lui-même, la FDJ, le PMU, tandis que se profilent, ailleurs en Europe, d'autres manoeuvres analogues : plainte d'un groupe de casinos français contre les monopoles existant dans ce domaine aux Pays-Bas, offensives des bookmakers ...

De fait, que l'Etat soit vertueux ou simplement prudent dans sa lutte contre les concurrences, il doit évoluer et avec lui la FDJ.

Par voie de conséquence, nul ne s'étonnera, ni de la sortie des décrets du ministre du budget de février 2006, ni de la signature au ministère de l'intérieur du protocole avec les casinos instaurant le contrôle général aux entrées pour novembre 2006.

La citadelle est bel et bien assiégée.....

Dans le domaine de l'internet, « l'Etat fait le mort », pour l'instant. Pourtant, là encore, le problème n'est pas mince (voir plus loin).

L'Etat réagit enfin devant cette situation et il le fait très bien :

- il change de ton, innove, prend en compte la « dépendance » au jeu, les « phénomènes » dus au jeu excessif ;

- il décide un « encadrement du jeu » de nature à lutter contre l'une et les autres ;

- il se penchera à tout instant sur l'impact possible des nouveaux jeux de la FDJ au regard de ses objectifs, ainsi que sur les évolutions des jeux existants, du réseau et de la commercialisation des jeux ;

- il demande à la FDJ un « plan d'action 25 ( * ) » en vue de prévenir le jeu excessif et favoriser une pratique raisonnable du jeu ;

- il institue un « Comité consultatif pour la mise en oeuvre de la politique d'encadrement des jeux et du jeu excessif ».

C'est incontestablement un très grand pas en avant. Toutes ces dispositions sont, sur le papier, éminemment utiles. Encore faut-il qu'elles ne restent pas lettre morte et que l'ensemble vive et s'active.

Espérons que le Comité consultatif, qui disposera de beaucoup de moyens d'étudier le jeu sous toutes ses coutures, ne se contentera pas de la réunion unique et minimale de l'année qui lui est prescrite.

On regrettera surtout que ces dispositions, excellentes, restent réservées aux loteries et ne soient pas étendues aux courses et aux casinos où le jeu a autant besoin d'être « encadré »

Votre rapporteur estime que cette nouvelle notion d'étude d'impact des nouveaux jeux étudiés et envisagés est particulièrement bien venue.

C'est l'application, dans ce domaine, d'où il était pratiquement absent, du principe de précaution qui régente aujourd'hui mille choses.

Depuis que Nicot nous a ramené le tabac du Portugal en 1561, combien de temps s'est-il écoulé avant que l'on ait identifié les dangers potentiels de cette herbe ? Mieux ! Combien avant que ne soient mises en oeuvre ces campagnes anti-tabac si pressantes, oppressantes, répressives et prohibitionnistes.

La Thalidomide a pu exercer ses effets dystrophiques sur nos foetus pendant des années avant qu'elle ne soit « repérée » et interdite. Le laboratoire US Merck avait pris des années pour tester le médicament anti-hypertenseur qui a fait sa fortune ; il lui aura fallu des années pour déceler ses effets toxiques et le retirer du commerce.

En regard de ces douloureuses aventures de la chimie et de la médecine, l'avatar du Rapido de la FDJ parait relativement anodin car deux ans se seront écoulés seulement entre sa mise en service et le coup de frein nécessaire sur un jeu un peu trop entreprenant.

* 25 Ce plan d'action de la FDJ existe d'ailleurs déjà depuis septembre 2005.

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