3. Le « splitting » en Allemagne : une démarche novatrice dont le bilan doit cependant encore être fait

L'Allemagne a mis en place, en 2001, dans le cadre de la réforme « Riester » 38 ( * ) , un dispositif proposant le choix aux couples mariés entre la réversion et un partage égal des droits à retraite acquis par les deux membres du couple au cours du mariage ( Rentensplitting ).

Cette faculté est offerte aux couples mariés à partir du 1 er janvier 2002 ainsi qu'à ceux mariés auparavant, mais dont les deux membres avaient moins de quarante ans à cette date. Pour en bénéficier, il faut prévenir sa caisse d'assurance vieillesse. Dans ce cas, toute pension de réversion est exclue en cas de décès .

Lorsqu'un couple opte pour la solution du splitting, les droits à pension acquis pendant la durée du mariage sont partagés au moment où le plus jeune des deux conjoints prend sa retraite ou atteint l'âge de soixante-cinq ans : chacun perçoit alors une pension correspondant à la totalité de ses droits acquis hors mariage et à la moitié des droits communs acquis pendant le mariage. Les droits à pension peuvent être partagés indépendamment de toute condition d'âge en cas de décès prématuré, mais à condition que le survivant totalise vingt-cinq années d'assurance. Les droits issus du partage sont des droits propres. À la différence de la pension de réversion, ils ne dépendent donc d'aucune condition de ressources et restent acquis si le titulaire se remarie.

Les couples en union libre peuvent également opter pour le partage des droits à pension.

Des dispositifs similaires existent en Suisse et au Liechtenstein.

Le mécanisme, on le voit, pousse à son terme la logique patrimoniale qui n'est que partiellement présente au sein des pensions de réversion. Sa mise en place est, par certains aspects, l'aboutissement du concept de « mariage-partenariat » institué par la réforme allemande du droit matrimonial et du divorce de 1976 qui avait rompu avec le modèle du « mari-nourricier ». Le « mariage-partenariat » correspond au souhait, largement présent au sein de la société allemande, de rendre visible et de faire reconnaître, au moins au moment de la retraite, le travail domestique exercé par la femme sans rémunération dans le cadre du mariage grâce à un partage des droits à la retraite.

Le modèle du splitting peut également satisfaire les tenants d'une conception individualiste des droits sociaux, même s'il ne consiste à proprement parler qu'en une redistribution des pensions au sein du couple. Un des arguments forts en faveur du splitting est ainsi le maintien de la retraite en cas de remariage, alors que la réversion cesse ou diminue dans cette situation.

Pour autant, les assurés semblent avoir très peu choisi cette option jusqu'à présent. Si le manque de recul interdit pour l'instant d'établir un bilan qui reste donc à faire, il est possible cependant de relever les limites du splitting :

- la procédure est complexe et ses effets, en comparaison de la réversion, sont difficiles à anticiper pour les couples qui peinent ainsi à en percevoir les avantages ; beaucoup d'éléments interviennent, comme la durée du mariage, la différence entre les pensions respectives des partenaires et le ratio entre droits acquis en-dehors et au sein du mariage ;

- le mécanisme apparaît en outre clairement désavantageux dans deux cas : pour les femmes au foyer dont le mariage a été de courte durée et qui avaient acquis elles-mêmes peu de droits auparavant ; plus encore, pour les hommes touchant des pensions personnelles élevées, si les droits de leur conjointe sont inexistants ou faibles, dans la mesure en effet où ils doivent céder la moitié de leurs droits, lesquels seront en outre définitivement perdus en cas de décès de celle-ci.

* 38 Cf. : « Préserver la compétitivité du « site Allemagne » : les mutations de la protection sociale outre-Rhin » - Rapport Sénat n° 439 (2005-2006) - établi par Alain Vasselle et Bernard Cazeau au nom de la Mecss.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page