SECONDE PARTIE : LA CIEEMG, UNE EXPERTISE ÉPROUVÉE MAIS DONNANT LIEU À DES AMÉNAGEMENTS DE PROCÉDURE

I. UNE PROCÉDURE RIGOUREUSE DE CONTRÔLE DES EXPORTATIONS D'ARMEMENT

A. UN CONTRÔLE EN DEUX PHASES : L'AGRÉMENT PRÉALABLE PUIS L'AUTORISATION D'EXPORTER

Le système de contrôle français d'exportation d'armement repose sur le principe de la prohibition . Toute exportation nécessite une dérogation particulière, répondant à un dispositif en deux étapes successives.

Dans ce cadre, la commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG) , créée en 1955 5 ( * ) , a pour mission d'intervenir dans le contrôle des exportations des matériels d'armement, lesquelles nécessitent l'obtention d'un agrément préalable puis d'une autorisation d'exportation de matériels de guerre :

- dès le début de la négociation avec son client potentiel, l'exportateur français adresse une demande d'agrément préalable (AP) au ministère de la défense, qui transmet cette demande au ministère des affaires étrangères et européennes, d'une part, et au ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, d'autre part ; la durée de validité atteint trois ans pour les « AP » négociation et deux ans pour les « AP » vente permettant la signature du contrat ;

- à l'étape ultérieure d'exportation du matériel , il est délivré une autorisation d'exportation de matériels de guerre (AEMG), suite à une demande également déposée au ministère de la défense ; les demandes d'AEMG ne sont examinées en CIEEMG que si l'une des administrations concernées (ministères de la défense, des affaires étrangères, de l'économie et le SGDN) n'a pas émis un avis favorable

L'encadré ci-dessous détaille la procédure d'agrément préalable puis d'autorisation d'exportation.

La procédure d'agrément préalable et d'autorisation d'exportation

« La première étape consiste en l'obtention, par la société souhaitant exporter, d'un agrément préalable (AP) signé au nom du Premier ministre, après avis de la CIEEMG. Cet agrément préalable est nécessaire dès les premiers stades de la négociation entre l'exportateur français et son client potentiel.

« Les demandes d'agrément préalable sont déposées auprès du ministère de la défense qui vérifie leur recevabilité, puis elles sont transmises aux autres ministères dits « à voix délibérative », c'est-à-dire le ministère des affaires étrangères et le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, et au SGDN pour instruction des dossiers .

« Ces demandes sont ensuite examinées par la CIEEMG qui collationne les avis des différents ministères et émet un avis.

« Enfin, le Secrétaire général de la défense nationale, par délégation du Premier ministre, arrête les décisions sur les demandes d'agrément préalable. Certaines demandes peuvent être portées à la connaissance du cabinet du Premier ministre pour information, décision ou arbitrage en cas d'avis divergents entre les ministères.

« Les agréments préalables sont de deux types :

« - agrément préalable « négociation » d'une validité de trois ans permettant la diffusion de toute information nécessaire à la conclusion des termes d'un contrat mais excluant la signature de ce contrat ;

« - agrément préalable « vente » d'une validité de deux ans permettant la signature du contrat.

« La deuxième étape est l'obtention de l'autorisation d'exportation de matériels de guerre (AEMG) qui permet l'exportation physique des équipements militaires. Les demandes d'AEMG sont déposées auprès du ministère de la défense qui s'assure notamment que le contrat d'exportation signé en vertu de l'agrément préalable auquel elles font référence est conforme aux dispositions de celui-ci. Si le ministère de la défense, le ministère des affaires étrangères et européennes, le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi et le SGDN donnent un avis favorable concernant la demande et qu'aucun n'en demande le passage en CIEEMG, le SGDN informe la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) qu'elle peut délivrer l'AEMG. Dans le cas contraire, la demande d'AEMG est examinée en CIEEMG et la décision est prise par le Premier ministre et notifiée par le ministre chargé des douanes.

« Le processus décrit ci-dessus encadre de bout en bout les démarches entreprises par les industriels français en vue d'une exportation de matériels de guerre. Les industriels préparent donc leurs exportations d'armement en étroite collaboration avec l'administration française en prenant en compte les impératifs de l'Etat dans le cadre de sa politique d'exportation d'armement, en particulier pour garantir le respect de ses engagements internationaux ».

Source : CIEEMG

Pour définir la politique d'exportations d'armements de la France, la CIEEMG définit des directives politiques . Ces directives, destinées à guider la CIEEMG dans la formulation de ses avis, traitent trois questions principales : les pays clients, les équipements sensibles et les procédures.

Dans ce contexte, un certain nombre d'évolutions sont apparues :

- un accroissement des demandes portant sur des équipements considérés comme sensibles, comme les missiles, les drones et les satellites ;

- l'accession d'un nombre croissant de pays au statut de producteur d'armements ;

- l'émergence de nouveaux risques, comme le détournement vers des groupes terroristes ou le copiage de technologies de pointe ;

- la possibilité pour les sociétés à filiales d'obtenir des autorisations dans certains pays dont les procédures sont moins exigeantes ;

- le rôle croissant d'intermédiaires et de sociétés spécialisées dans le courtage d'armements.

Par ailleurs, la France, tout en respectant les décisions de l'Organisation des Nations-Unies (ONU) sur les restrictions au commerce d'armements, s'est engagée, au niveau communautaire, dans une procédure de concertations et d'échanges d'informations avec ses principaux partenaires exportateurs d'armements (l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie, la Suède et l'Espagne).

* 5 La CIEEMG a été créée par le décret n° 55-965 du 16 juillet 1955 portant réorganisation de la commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre.

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