2. Une procédure qui restreint faiblement l'initiative parlementaire

Les statistiques mettent en évidence un taux d'irrecevabilité financière très faible.

Pendant la session ordinaire 2006-2007, et donc sous la procédure précédente, 62 amendements sur 4.712 amendements parlementaires déposés avaient été déclarés irrecevables au Sénat, soit moins de 1,5 %.

A la date du 13 mai 2008, et depuis le 1 er juillet 2007, date d'entrée en vigueur de la nouvelle procédure, 156 amendements sur 4.053 amendements parlementaires déposés ont été déclarés irrecevables au Sénat, soit un taux de 3,8 % . Ce taux reste donc très faible, et bien en-deçà de celui constaté à l'Assemblée nationale , qui s'était établi, au cours de la session 2005-2006, à 8,2 % 4 ( * ) .

Ce faible taux, qui souligne combien la nouvelle procédure n'a pas substantiellement contraint l'initiative parlementaire par rapport au dispositif précédent, s'explique, selon moi, par trois raisons :

- premièrement, l'article 40 de la Constitution, comme l'ensemble des dispositions constitutionnelles de la V ème République, est entré dans les moeurs parlementaires depuis maintenant 50 ans, et, dans une large mesure, nos collègues sénateurs apparaissent acquis, dans leurs amendements, au principe de « sagesse budgétaire » dont l'esprit est à l'origine de l'article 40 ;

- deuxièmement, la commission des finances a souhaité concilier au mieux les exigences constitutionnelles et le principe d'une initiative parlementaire la plus large possible, ce que traduit une jurisprudence se voulant à la fois rigoureuse et bienveillante à l'égard du droit d'amendement ;

- troisièmement, à chaque fois que cela est apparu possible, une recherche de modifications a été menée conjointement par la commission des finances et les auteurs des amendements pour trouver des solutions de conciliation. Plus d'une quinzaine d'amendements ont ainsi pu être déclarés recevables, après modification de leur dispositif, alors qu'ils étaient initialement irrecevables. Sans cet effort de concertation préalable , le taux d'irrecevabilité financière atteindrait un taux d'au moins 4,2 %.

Le taux d'irrecevabilité financière varie bien évidemment selon les textes , sans qu'il soit possible de déterminer quels sont a priori les domaines d'intervention de la loi les plus sujets à irrecevabilité.

Deux textes 5 ( * ) totalisent un taux d'irrecevabilité significativement élevé :

- sur 52 amendements parlementaires déposés sur le projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique en première lecture, 9 ont été déclarés irrecevables, soit un taux de 19,2 % ;

- sur 455 amendements parlementaires déposés sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 , 76 ont été déclarés irrecevables, soit un taux de 16,7 %.

Sur chacun des textes discutés entre le 1 er juillet 2007 et le 13 mai 2008, le nombre d'amendements irrecevables apparaît de manière générale réduit . En nombre d'amendements déclarés irrecevables, il convient de relever, outre les deux projets de loi précités, le projet de loi de finances pour 2008 (20 amendements irrecevables), le projet de loi pour le pouvoir d'achat (11 amendements irrecevables), le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile (8 amendements irrecevables).

Il convient de noter que, sur le projet de loi de finances pour 2008, malgré 20 amendements déclarés irrecevables, le taux d'irrecevabilité apparaît inférieur à la moyenne (3,7 %) ce qui pourrait surprendre a priori s'agissant d'un « texte budgétaire » mais :

- il est nécessaire de se rappeler que, traditionnellement, les amendements parlementaires se concentrent davantage en recettes qu'en dépenses lors de l'examen du projet de loi de finances. Or, les amendements de recettes sont susceptibles d'être « gagés » ;

- il faut aussi prendre en compte les nouvelles facilités offertes par l'article 47 de la LOLF 6 ( * ) qui permet, lors de l'examen du projet de loi de finances, des redéploiements de crédits au sein d'une même mission.

* 4 Taux issu du rapport de notre collègue député Pierre Méhaignerie au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale relatif à l'article 40 de la Constitution.

* 5 Un autre texte, le projet de loi portant réforme de la prescription en matière civile enregistre un taux d'irrecevabilité de 14,3 %, mais sur 13 amendements déposés, 1 amendement a été déclaré irrecevable, soit un taux qui n'apparaît pas significatif au regard du faible nombre d'amendements déposés.

* 6 « Au sens des articles 34 et 40 de la Constitution, la charge s'entend, s'agissant des amendements s'appliquant aux crédits, de la mission. Tout amendement doit être motivé et accompagné des développements des moyens qui le justifient. Les amendements non conformes aux dispositions de la présente loi organique sont irrecevables ».

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