2. La frontière entre public et privé

La frontière entre public et privé n'est pas toujours facile à établir. L'article 40 a rarement vocation à s'appliquer aux entreprises publiques, aux établissements publics à caractère industriel et commercial ou même aux associations. Toutefois, lorsqu'une dépense est mise à la charge d'un de ces organismes par un amendement parlementaire, je suis amené à prendre en considération deux critères principaux pour savoir si ces organismes peuvent être « dans le champ » de l'article 40 :

- l'importance de la ressource publique dans le budget de l'organisme ;

- le lien éventuel entre la ressource publique et la dépense envisagée, qu'elle soit certaine ou éventuelle 10 ( * ) ;

- l'incidence de la disposition proposée en termes de subvention pour charge de service public ou pour perte d'exploitation.

Ainsi, j'ai prononcé l'irrecevabilité d'un amendement renforçant sensiblement les obligations de service public de La Poste et de ses filiales en matière bancaire considérant que la convention prévue entre l'établissement financier et l'Etat comporterait selon toute vraisemblance des compensations budgétaires , un fonds de compensation du service bancaire universel, alimenté par des prélèvements obligatoires, en vue d'assurer l'équilibre financier du service étant par ailleurs créé.

De nombreux amendements visent à créer des fonds , dont la nature juridique est parfois indéterminée. Afin de déterminer la nature publique ou non de ces fonds, j'ai été amené, pour me prononcer, à élaborer deux critères principaux , la simple création d'un fonds par la loi induisant déjà, il convient de le souligner, une certaine présomption de son caractère public :

- mode de gestion du fonds, par un organisme public ou non ;

- financement du fonds, même, en partie, par une ressource publique, prélèvement obligatoire ou subvention.

Dans le cas d'un amendement visant à créer un fonds de développement de la chaleur renouvelable, alimenté notamment par un prélèvement de 5 % des recettes de taxe intérieure sur les produits pétroliers, j'ai ainsi considéré qu'un tel fonds entrait dans le champ des administrations publiques visées par l'article 40 de la Constitution. J'ai eu la même analyse pour la création d'un fonds d'indemnisation du préjudice résultant de la présence accidentelle d'OGM, financé par une taxe sur les exploitants mettant en culture une variété génétiquement modifiée, et géré par l'organisme national interprofessionnel des grandes cultures.

* 10 Une affectation de recettes à un organisme constitue très souvent, même si cela n'est pas explicite, une incitation à dépenser, qui entre mécaniquement dans le champ de l'article 40 de la Constitution.

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