2. La prise en charge des internés

La loi de 1964 de défense sociale est particulièrement laconique sur les modalités de prise en charge des internés. Son article 14 précise seulement : « l'internement a lieu dans l'établissement désigné par la commission de défense sociale. Celui-ci est choisi parmi les établissements organisés par le Gouvernement. La commission peut toutefois, pour des raisons thérapeutiques et par décision spécialement motivée, ordonner le placement et le maintien dans un établissement approprié quant aux mesures de sécurité et aux soins à donner (...). Au moment où l'internement est ordonné, si l'inculpé se trouve en observation, il est maintenu à l'annexe psychiatrique en attendant la désignation d'un établissement par la commission de défense sociale (...) ».

L'internement peut en principe se dérouler :

- en établissement de défense sociale ;

- en établissement psychiatrique « classique » ;

- dans d'autres structures psychiatriques dans le cadre d'une libération à l'essai.

Il n'existe actuellement que trois lieux de défense sociale en Belgique :

- l'établissement de défense sociale de Paifve, dépendant du ministère de la justice, susceptible d'accueillir 205 internés et géré par l'administration pénitentiaire ;

- la section de défense sociale du centre régional de soins psychiatriques « Les Marronniers », dépendant de la région wallonne, dont la capacité d'accueil est de 376 internés. L'encadrement est exclusivement médical, la sécurité périmétrique étant déléguée à une structure privée ; l'établissement compte 215 équivalents temps plein de soignants (175 infirmiers ou éducateurs et quarante personnels paramédicaux et psychosociaux), ainsi que onze médecins (huit psychiatres et trois généralistes) ;

- la section de défense sociale du centre hospitalier psychiatrique du « Chêne aux Haies », dont la capacité d'accueil est de trente lits réservés aux femmes internées.

Les tableaux suivants retracent la répartition des internés en avril 2009.

Nombre total des internés

Wallonie

Flandre

Belgique

Internés non libérés à l'essai

800

50 %

507

30 %

1 307

Internés libérés à l'essai

796

50 %

1 203

70 %

1 999

Total

1 596

100 %

1 710

100 %

3 306

Répartition des internés « non libérés à l'essai »

Wallonie

Flandre

Belgique

Internés incarcérés

343

505

848

Prison

175

505

680

EDS Paifve

168

0

168

Internés placés

457

2

459

EDS tournai

344

0

344

EDS Mons

30

0

30

Clinique psychiatrique générale et MSP

40

2

42

Homes, logements protégés, ambulatoire

43

0

43

Total

800

507

1 307

Ces deux tableaux montrent que la distinction opérée par la loi de défense sociale entre la peine et l'internement est loin de conduire à une dichotomie aussi affirmée en ce qui concerne les modalités de prise en charge.

Ainsi, en avril 2009, sur les 1 307 internés ne faisant pas l'objet d'une libération à l'essai, 680 exécutaient cette mesure en prison (en pratique, dans les annexes psychiatriques de celles-ci). 542 étaient accueillis dans un établissement de défense sociale, que celui-ci soit placé sous l'autorité de l'administration pénitentiaire ou relève du ministère de la santé. Ces données relativisent quelque peu l'idée selon laquelle la défense sociale permet une prise en charge médicale véritablement personnalisée des malades en les soustrayant à la prison.

Lors de sa visite à la section de défense sociale du centre régional de soins psychiatriques « Les Marronniers », le groupe de travail a pu constater l'importance du travail pluridisciplinaire réalisé pour bâtir des parcours individualisés aux patients de l'établissement.

Les internés présentent des profils différents qui justifient des analyses approfondies pour la définition de leurs parcours de soins. Ces analyses reposent sur deux concepts :

le risque risk ») , qu'il s'agisse du risque pour la société, du risque de récidive de la maladie mentale ou du risque pour le personnel soignant et les autres patients.

Les éléments pris en compte pour évaluer ce risque sont les suivants : données insuffisantes concernant le patient, inadaptation du comportement dans un cadre défini, risque de récidive, contexte social défavorable, non-stabilisation de la maladie mentale, aménagement psychopathique, comorbidités (par exemple schizophrénie - personnalité antisociale ou schizophrénie - troubles liés aux substances) ;

la prise en charge care ») , qui s'entend dans une acception très large incluant soins médicaux, thérapies, travail social, situation économique du patient, rééducation, resocialisation. Les éléments pris en compte pour évaluer le niveau de prise en charge souhaitable sont les suivants : admission récente, contexte social défavorable, difficultés de réinsertion socio-professionnelle, comportement inadapté dans un cadre défini, confiance faible, comorbidité, maladie mentale non stabilisée, retard mental moyen à sévère.

Schématiquement, les internés classés « high risk » ont vocation à être admis en établissement de défense sociale ou en établissement pénitentiaire, les patients « médium risk » relèvent de projets pilotes de prise en charge pouvant se dérouler aussi bien en établissement de défense sociale qu'à l'extérieur, tandis que les patients « low risk » sont pris en charge par le réseau psychiatrique traditionnel sans encadrement particulier. La section de défense sociale du CHR de Tournai, visitée par le groupe de travail, comporte dix unités, dont quatre sont réservées aux patients « high risk » (158 lits au total) et six aux patients « médium risk » (238 lits).

D'après les informations recueillies par le groupe de travail, les internés accueillis dans la section de défense sociale du CHR « Les Marronniers », qui ne sont pas mélangés avec les autres patients de l'hôpital psychiatrique, passent en moyenne quatre ans dans l'établissement. Le taux de rotation y est cependant faible puisque trente-quatre libérations ont été prononcées en 2008 et trente-neuf en 2009. Le nombre de sorties temporaires, seules ou accompagnées, y est très élevé et le nombre de fugues très bas.

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