5. Les procédures de gestion des crédits et des ressources humaines : une logique inaboutie

Alors que la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) était entrée en vigueur depuis 2006, les mesures préconisées par la RGPP et la RéATE ont constitué une difficulté supplémentaire pour les gestionnaires dans les services déconcentrés. Les agents ont dû mener deux réformes majeures de front .

Dans ce contexte, on peut s'interroger sur l'articulation de la RéATE avec les nouvelles pratiques de gestion dans les services déconcentrés. D'une manière générale, il apparaît difficile de concilier la logique verticale par ministère, traditionnelle et encore largement portée par la LOLF, et la logique horizontale interministérielle, requise par la mise en oeuvre de la RéATE .

L'analyse qui suit s'appuie non seulement sur les auditions et les déplacements de votre mission mais aussi sur les conclusions du rapport n° 2706 « LOLF et réformes de l'Etat : complémentarité ou contradiction ? » de la mission d'information sur la LOLF (MILOLF) de l'Assemblée nationale (7 juillet 2010).

a) Les difficultés provenant d'une multiplicité d'interlocuteurs

L'un des écueils auxquels sont confrontés les responsables des directions régionales réside dans la multiplicité de leurs interlocuteurs en matière budgétaire et notamment s'agissant de la gestion des effectifs. Par exemple, la direction régionale des entreprises, de la concurrence et de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) est soumise à quatre plafonds d'emplois . Ces derniers ne sont, par ailleurs, pas fongibles entre eux.

De même, les directions interdépartementales ministérielles (DDI) doivent, en règle générale, s'adresser à deux ou trois responsables de budgets opérationnels de programme 82 ( * ) . La direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) se trouve même soumise à une contrainte encore plus forte puisqu'elle peut dialoguer avec cinq responsables de budget opérationnel de programme (RBOP) 83 ( * ) .

Une telle multiplicité ne va pas sans poser des difficultés très concrètes en matière d' harmonisation budgétaire . Par exemple, les dépenses prises en compte pour le calcul des dotations de fonctionnement courant ne sont pas identiques selon les programmes.

b) La complexité des modes de gestion dans le domaine des ressources humaines

Au niveau régional , les affectations des personnels dans les services sont confrontées à des contraintes particulières. Il n'est pas rare qu'un directeur doive d'abord tenir compte de la mission sur laquelle est affecté l'agent avant d'examiner son profil, sa compétence ou son adéquation au poste. Un tel biais n'est pas sans conséquence sur l'optimisation de la gestion des ressources humaines en services déconcentrés.

Lors de son déplacement dans le département du Nord, l'attention de la mission a été appelée sur l'absence de fongibilité qui fige les situations et empêche les redéploiements.

Au niveau départemental , d'autres difficultés sont rencontrées s'agissant toujours de la gestion des ressources humaines. En particulier, la gestion statutaire ne relève pas de calendrier ou de règles identiques pour les commissions administratives paritaires statuant sur les demandes de mutation, pour les règles d'avancement ou encore pour la définition du temps de travail. De même, il peut arriver que celui préconisant une formation pour un agent en DDI ne soit pas celui qui en supporte la charge financière. Un tel état de fait peut être à l'origine de freins ou de dérives dans le domaine de la demande de formation.

Ainsi, lors de son déplacement en Mayenne, la mission a pu notamment faire le constat que le préfet de département ne dispose pas de la latitude nécessaire dans la prise de décision, ce qui entrave sa réactivité .

Au total, la gestion des ressources humaines dans les services déconcentrés se révèle plutôt rigide . Alors que l'optimisation de la gestion des effectifs appellerait une approche horizontale « inter-directions », celle-ci est rendue difficile, voire impossible, du fait de la prédominance d'une gestion encore trop cloisonnée par ministère. Concrètement, il apparaît difficile de faire jouer la mobilité des agents entre des directions dépendant de ministères différents.

Pourtant, en période de contraction des effectifs du fait de la RGPP et de la règle du « un sur deux », un impératif de gestion réside dans une plus grande mobilité des personnels , afin de trouver la meilleure adéquation entre les besoins et les disponibilités.

Afin d'optimiser l'emploi des moyens humains et d'appliquer de manière différenciée la règle du « un sur deux » en fonction des besoins réels des services, votre mission estime nécessaire d'abaisser les barrières statutaires qui brident une gestion des ressources humaines pro-active. En conséquence, elle considère nécessaire de mettre en place un véritable statut unifié d'agents territoriaux placés sous l'autorité du préfet de région . En unifiant les différents statuts, tout en tenant compte de la situation individuelle des agents, de la souplesse serait donnée dans la gestion des effectifs et dans leur répartition entre les directions et les services déconcentrés.

Proposition n° 19 :

Donner plus de marges de manoeuvre aux préfets de région dans le domaine de la gestion des ressources humaines à travers un statut unifié d'agents d'administration territoriale.


* 82 Le budget opérationnel de programme (BOP) regroupe la part des crédits d'un programme mise à la disposition d'un responsable identifié pour un périmètre d'activité (une partie des actions du programme par exemple) ou pour un territoire (une région, un département ...).
Le BOP a les mêmes attributs que le programme : c'est un ensemble globalisé de moyens associé à des objectifs mesurés par des indicateurs de résultats.

* 83 Le responsable de budget opérationnel de programme (RBOP) concourt à l'élaboration des objectifs stratégiques du programme, sous l'autorité du ministre. Il est responsable de leur mise en oeuvre opérationnelle et de leur réalisation. Il décline à cette fin les objectifs stratégiques en objectifs opérationnels, adaptés aux compétences de chacun de ses services, dans le cadre du dialogue de gestion avec les responsables de ces services.

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