Audition du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (mardi 5 février 2013)

Mme Muguette Dini , présidente. - Mes chers collègues, nos trois auditions de cet après-midi portent sur la question de la formation professionnelle, décisive dans la conduite de notre enquête.

Nous recevons en premier lieu les représentantes du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche :

- Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval, adjointe au chef de service de la stratégie de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle ;

- Mme Dominique Deloche, chef de la mission des formations de santé ;

- Mme Catherine Malinie, chef de la mission des écoles supérieures et de l'enseignement supérieur privé.

La commission d'enquête a souhaité que notre réunion d'aujourd'hui soit ouverte au public et à la presse ; un compte rendu en sera publié avec le rapport.

Je précise à l'attention des personnes auditionnées que notre commission d'enquête s'est constituée à l'initiative de M. Jacques Mézard, président du groupe RDSE, qui est donc notre rapporteur.

Je vais maintenant, conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, demander à Mmes Pradeilles-Duval, Deloche et Malinie de prêter serment.

Je rappelle pour la forme qu'un faux témoignage devant notre commission serait passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal.

Mesdames Rachel-Marie Pradeilles-Duval, Dominique Deloche et Catherine Malinie, veuillez successivement prêter serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, levez la main droite et dites : « Je le jure ».

Les trois personnes se lèvent et prêtent serment.

Mme Muguette Dini , présidente. - Je vous donne donc la parole pour un exposé introductif ; puis les membres de la commission d'enquête interviendront pour poser des questions.

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval, adjointe au chef de service de la stratégie de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle. - Nous remercions la commission d'enquête d'avoir souhaité entendre les représentants de la direction générale pour l'enseignement supérieur et pour l'insertion professionnelle (DGSIP).

Nous sommes en effet conscients de l'importance de notre responsabilité pour l'organisation de la formation initiale de l'ensemble de la population étudiante et, tout au long de la vie, pour l'ensemble de la population qui, au cours de son parcours professionnel, rejoint les formations.

Je suis moi-même en charge de la réflexion sur les développements des formations supérieures, leur organisation et leur articulation, tant avec l'enseignement scolaire qu'avec la future insertion professionnelle des étudiants.

Mme Dominique Deloche est chef de la mission des formations de santé, composante du service de la stratégie, en charge, en partenariat avec le ministère chargé de la santé, de la stratégie des formations supérieures médicales, pharmaceutiques, odontologiques et paramédicales.

Mme Catherine Malinie est chef de la mission des écoles supérieures de l'enseignement supérieur privé, composante du service de la stratégie, en charge de la stratégie relative aux écoles supérieures publiques, et qui accompagne le développement des écoles privées, de l'organisation des relations de l'Etat avec l'enseignement supérieur privé, dont l'objectif prioritaire est d'améliorer les exigences de qualité des formations et de contribuer au rapprochement des écoles et de l'université.

L'Etat français détient le monopole de la collation et de l'attribution des grades et des titres universitaires. Ces grades définissent les principaux niveaux de références communs à tous les domaines de formation de l'enseignement supérieur. Les titres, eux, définissent des niveaux intermédiaires.

Les grades, en France, sont le baccalauréat, la licence, le master et le doctorat. Les diplômes sanctionnent chaque étape du déroulement de ces études supérieures, dans un domaine de formation particulier, mentionné par un intitulé de diplôme particulier.

Pour un certain nombre de diplômes nationaux de l'enseignement supérieur, notamment le brevet de technicien supérieur (BTS) et le diplôme universitaire de technologie (DUT), qui sont des diplômes de cycle court de niveau bac + 2, les objectifs de formation, les contenus, les volumes horaires, les modalités de contrôle de connaissances et les compétences sont fixés par voie réglementaire de façon très stricte.

Cependant, de plus en plus de diplômes ne sont plus définis de façon aussi détaillée par une maquette nationale, mais sont présentés à l'habilitation, dans le cadre de l'autonomie scientifique et pédagogique reconnue aux différents établissements.

Dans le respect des orientations générales définies par les décrets qui réglementent les diplômes - licence, master, doctorat - il appartient aux établissements de formation - et en particulier aux universités - de fixer les objectifs de formation, les perspectives ouvertes aux diplômés, notamment en termes de poursuite d'études mais aussi d'insertion professionnelle, les connaissances et les compétences attendues, la maquette des enseignements, la composition de l'équipe pédagogique, les modalités de contrôle de connaissances et de compétences et la démarche qualité, qui permet d'assurer une amélioration continue de ces formations.

Il est aussi du ressort de ces établissements de soumettre un dossier qui permette de les évaluer et éventuellement de les habiliter.

On doit distinguer l'habilitation des nouveaux diplômes, qui sont créés ex nihilo , et celle des diplômes qui partent de diplômes existants ou de diplômes qui vont évoluer. Dans le premier cas, l'Etat vérifie que la formation respecte les grands principes qui définissent le diplôme en question et s'assure que l'établissement dispose des moyens nécessaires pour mettre en place cette formation - force scientifique, force pédagogique, équipe pédagogique correspondante. L'Etat apprécie l'opportunité d'ouvrir le nouveau cursus, notamment au regard du devenir potentiel des étudiants et de leur capacité d'insertion professionnelle ultérieure.

Dans le cas de diplômes existants et demandés en termes de renouvellement ou d'évolution, l'habilitation est prononcée ou refusée sur la base d'une évaluation proprement dite, fondée d'abord sur le bilan de l'existant, comportant toutes les dimensions évoquées précédemment : force scientifique, équipe pédagogique et ensemble des critères de qualité, notamment en termes de vivier de recrutement et de capacités d'insertion professionnelle ultérieure ou de poursuite d'études.

L'évaluation des formations déjà existantes se fait à plusieurs niveaux. Dans un premier temps, les projets sont évalués par les différentes instances nationales, qui prennent en compte les caractéristiques du secteur et les objectifs propres du niveau considéré.

C'est le cas de l'Agence de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Aeres), qui évalue les licences, les masters, les doctorats des universités et les formations de niveau master et doctorat de certaines écoles.

La commission des titres d'ingénieur évalue les formations d'ingénieurs, la commission d'évaluation des formations et des diplômes de gestion apprécie les formations proposées par les écoles de commerce et de gestion. Les deux premières instances sont membres de l'Association européenne pour l'assurance qualité de l'enseignement supérieur (ENQA) et, à ce titre, doivent répondre à des exigences d'indépendance morale, d'indépendance financière et en termes de ressources humaines.

La commission d'évaluation des formations et des diplômes de gestion est une instance représentative des milieux économiques et académiques - universités, écoles, formations de commerce et de gestion. Elle est composée de seize membres nommés par plusieurs instances, dont les deux ministères de tutelle que sont le ministère chargé de l'enseignement supérieur et le ministère de l'économie, notamment pour les écoles relevant des chambres de commerce et d'industrie.

C'est sur la base de cette évaluation que, dans un second temps, la décision est prise par le ministère de l'enseignement et de la recherche, après une expertise menée par les conseillers scientifiques placés auprès de la Direction générale pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle (DGESIP). L'adossement à la recherche, la cohérence de la formation au regard de l'ensemble de l'offre de formation de l'établissement, les débouchés professionnels, représentent les éléments essentiels de cette évaluation, qui prend aussi en compte les recommandations émises par le comité de suivi de licence et par le comité de suivi du master.

Dans un troisième temps intervient la consultation du Conseil supérieur national de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui assure d'une part la représentation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, d'autre part, la représentation des grands intérêts nationaux, notamment éducatifs et culturels, scientifiques, économiques et sociaux, par les représentants nommés par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Une fois l'habilitation prononcée, la durée correspond, en règle générale, à la durée du contrat conclu entre l'Etat et le ministère. Elle se traduit par une publication au Journal officiel ou au Bulletin officiel de l'enseignement supérieur et de la recherche , selon les cas.

Toute modification de la formation qui fait évoluer sensiblement un des points caractéristiques de la formation doit être signalée à la DGESIP qui, en lien avec les instances d'évaluation de la formation concernée, peut identifier la nécessité de mettre en place une nouvelle évaluation, avant même l'échéance normale de fin d'habilitation.

Les points caractéristiques peuvent concerner les grands équilibres de la formation, les grands équilibres disciplinaires, les modalités pédagogiques, les voies d'accession aux diplômes concernés - voie initiale, par formation continue ou apprentissage - lorsqu'il s'agit de délocalisation de la formation, notamment lorsqu'on a des essaimages « off shore » , par exemple.

La procédure que je viens de détailler sera sans doute amenée à évoluer pour les diplômes de licence et de master, notamment dans le cadre du passage de l'habilitation à l'accréditation des établissements d'enseignement supérieur, tel qu'il pourrait être envisagé au sein de la loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Je veux souligner que cette procédure ne s'adresse qu'aux diplômes nationaux. En dehors des diplômes nationaux, les établissements peuvent aussi organiser, sous leur responsabilité propre, des formations permettant d'obtenir des diplômes préparant parfois à des examens ou à des concours. Ces diplômes d'établissements ne font pas l'objet d'une évaluation par le ministère chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche, car ils sont organisés par les établissements, dans le cadre de leur autonomie pédagogique.

Les formations en santé sont réglementées par des textes relativement anciens. Pour la médecine, ils datent de mars 1992 et de mars 1997, pour l'odontologie de septembre 1994, pour la pharmacie de juillet 1987 et, pour la maïeutique, de décembre 2001. Les habilitations ont été accordées aux établissements sans limitation de durée et les formations ainsi réglementées ne sont pas examinées dans le cadre des différentes vagues contractuelles, contrairement au processus dont j'ai parlé il y a un instant.

Seuls certains diplômes de troisième cycle font l'objet d'habilitations périodiques. L'application du schéma « licence, master, doctorat » (LMD) aux quatre filières de santé a connu une première étape avec la création de la première année commune aux études de santé (Paces). L'arrêté du 28 octobre 2009, qui en organise la formation en semestres et en unités d'enseignement, permet, depuis, l'acquisition de crédits européens. Le programme très précis de la Paces est inclus en annexe de l'arrêté. La Paces est en place depuis la rentrée 2010.

Les arrêtés de mars 2011, qui créent les diplômes de formation générale en sciences médicales, odontologiques et pharmaceutiques, et l'arrêté de juillet 2011 créant le diplôme de formation générale en sciences maïeutique, permettent d'identifier le niveau de licence pour ces formations de santé.

Les projets d'arrêtés relatifs au master sont en cours de finalisation et seront présentés très prochainement au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Cneser), sans doute avant le printemps prochain.

Les établissements seront interrogés, dans le cadre de ces nouvelles réglementations, sur les évolutions de la formation. Il est par ailleurs prévu par les différents textes que la formation sera évaluée dans le cadre de l'évaluation périodique des établissements, contrairement à précédemment...

M. Bernard Saugey . - Tout ce que vous évoquez là, c'est ce qui est normal. J'aimerais avoir des éléments sur les choses anormales. Pouvez-vous nous donner quelques exemples ? Vous avez indiqué dans votre contribution écrite que les faits incriminés sont incompatibles avec la mission d'enseignement. J'aimerais en avoir des illustrations concrètes et précises...

De la même façon, en matière de publicité mensongère, vous évoquez l'université Fernando Pessoa. J'aimerais également vous entendre à ce sujet...

Ce que vous nous dites là est intéressant - et je vous en remercie - mais ne pouvez-vous nous parler de ce qui ne fonctionne pas ? Parlez-nous des trains qui déraillent !

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Le cadre que j'ai rappelé, notamment en termes d'évaluation et de suivi des formations, permet de garantir, lors des évaluations, que les formations présentées soient conformes à un cadre réglementaire, lié au niveau des différents diplômes de licence, de master et de doctorat.

A ce titre, c'est bien sur le niveau scientifique et sur la déclaration des établissements que sont évaluées leurs capacités à mettre en oeuvre une formation au niveau attendu, compte tenu du diplôme obtenu.

M. Bernard Saugey . - L'avez-vous vérifié sur place ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - L'Aeres étudie, à partir des dossiers et de l'évaluation des équipes pédagogiques, déclinée dans les dossiers de présentation à l'habilitation pour la licence et pour les masters, le niveau de ce qui est attendu en termes de soutien des équipes de recherche et de niveau des équipes pédagogiques qui interviendront dans les enseignements.

En revanche, on reste à une échelle relativement globale au sens des grands équilibres de la formation, et non du contenu très fin des maquettes de formation, notamment lorsque, contrairement à la Paces ou à des formations de type BTS ou DUT, le programme n'est pas détaillé dans le cas de la définition d'une licence, d'un master ou d'un doctorat.

Il s'agit donc d'un contrôle du niveau académique attendu en matière de diplômes universitaires.

Le processus est le même pour ce qui est de la commission des titres d'ingénieur, qui étudie la capacité de l'établissement à mettre en place une formation dotée des moyens académiques et scientifiques correspondant au titre qui sera délivré et validé.

M. Bernard Saugey . - On peut écrire n'importe quoi : comment faites-vous si vous ne vérifiez pas sur place ? Le contrôle sur dossier n'est peut-être pas suffisant. Qu'en pensez-vous ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - En matière de licence et de master, le contrôle ne se fait que sur dossier. Cependant, les organisations syndicales, professionnelles et étudiantes sont représentées lors du passage devant le Cneser au cours de séances traitant spécifiquement de l'habilitation. Des remontées peuvent alors avoir lieu quant à la capacité de l'établissement à organiser pédagogiquement et scientifiquement l'accompagnement des étudiants, de façon plus précise que ce que nous pouvons voir apparaître dans les maquettes.

M. Bernard Saugey . - Y a-t-il des plaintes ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Certaines améliorations n'apparaissent pas nécessairement dans les dossiers mais pourraient être soulignées dans le cadre de l'habilitation du nouveau contrat. Ceci peut amener le ministère à faire une proposition d'habilitation, non pour toute la durée de contractualisation, mais pour deux ans au lieu de quatre ou cinq ans.

M. Alain Néri . - Le programme est une chose mais le recrutement en est une autre. Sur quels critères les enseignants sont-ils recrutés ? Le sont-ils uniquement sur titres, sur concours ou sur cooptation ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Pour les équipes pédagogiques, il est de la responsabilité des établissements habilités de mettre en place les moyens en personnels pédagogiques pour garantir une formation adéquate. A ce titre, il est demandé que figurent, dans les dossiers d'habilitation, le nom et le titre des différents intervenants responsables des modules de formation, maîtres de conférence, professeurs d'université, évalués par leurs pairs au niveau national, même s'ils ont ensuite été recrutés dans telle ou telle université ou tel ou tel département.

M. Bernard Saugey . - Il existe également des formations faussement diplômantes, non visées par l'Etat... Pouvez-vous nous donner un exemple ?

Mme Muguette Dini , présidente. - Des universités peuvent-elles délivrer des diplômes non visés par l'Etat ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - L'Etat ne collationne qu'un certain nombre de titres spécifiques que sont les licences, les masters et les doctorats, mais lorsqu'un établissement crée un diplôme d'établissement (DU), l'évaluation reste totalement interne ; elle ne peut être revendiquée au titre de la contractualisation avec l'Etat et n'est pas évaluée.

M. Bernard Saugey . - Comment vous en êtes-vous rendu compte à Toulon, s'agissant de l'université portugaise Fernando Pessoa ?

Mme Dominique Deloche, chef de la mission des formations de santé. - Nous ne sommes pas sur le même domaine. En médecine par exemple, certains DU portant sur des points extrêmement pointus, comme la rythmologie en cardiologie, qui n'est pas enseignée hors du cadre des DU. Certains sont très performants et permettent une formation de qualité.

S'agissant de l'université portugaise Fernando Pessoa, qui souhaitait s'installer à Toulon, les choses sont plus complexes. Nous nous en sommes rendu compte grâce aux remontées du Conseil de l'Ordre, aux journaux et à Internet. Au vu de ce que nous avons constaté sur le site de cette université privée, nous avons diligenté une demande de renseignements, par l'intermédiaire de la direction de relations internationales de notre ministère, auprès des autorités portugaises, qui nous ont fourni un certain nombre de renseignements. La ministre de l'enseignement supérieur a demandé à la rectrice de l'académie de Nice d'entreprendre une action auprès du procureur de la République, la ministre n'ayant pas la possibilité de fermer une université. Seule la justice peut, après enquête, parvenir à sanctionner un établissement.

Dans un premier temps, une plainte a été déposée pour utilisation illégale du terme d'université et manque d'accomplissement des formalités nécessaires à l'ouverture de ce type d'établissement. Nous avons ensuite complété les renseignements de la rectrice de Nice après avoir obtenu d'autres informations des autorités portugaises.

Dans nos universités, les diplômes d'établissement sont délivrés dans le cadre de l'autonomie pédagogique des établissements et évalués par le conseil scientifique ainsi que par le conseil des études et de la vie universitaire. Pour la plupart, ils présentent toutes les garanties de qualité nécessaires.

Mme Muguette Dini , présidente. - Vous avez évoqué des publicités mensongères. Concernaient-elles spécifiquement cette université ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Compte tenu de l'usage de termes anglais, qui permettent des traductions plus ou moins fidèles, nous nous sommes rapprochés de la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF). Une enquête est en préparation, notamment en matière d'usage et d'éventuelles dérives autour de termes comme « master », « master of » etc., qui pourraient donner lieu à une mauvaise interprétation plus ou moins voulue par rapport au titre de master, qui dispose d'un statut particulier dans l'enseignement supérieur français.

Cela fait partie de points sur lesquels nous souhaitons avoir une vision plus systématique et étayée, grâce au soutien de la DGCCRF.

Mme Muguette Dini , présidente. - Avez-vous pu détecter des diplômes d'université qui ne soient pas conventionnels ? On sait que cela existe en matière de médecine parallèle : en avez-vous connaissance ? Avez-vous la capacité d'alerter les universités à ce sujet ?

Mme Dominique Deloche, chef de la mission des formations de santé. - Nous n'exerçons pas de contrôle ni ne recensons les diplômes d'universités. A notre connaissance, il n'y a jamais eu de remontées de ce type de dysfonctionnement que l'on pourrait craindre avec des diplômes non contrôlés par l'Etat.

M. Yannick Vaugrenard . - Les habilitations sans limitation de durée présentent-elles un inconvénient ?

En second lieu, serait-il utile qu'il y ait davantage d'habilitations périodiques ?

Avez-vous eu connaissance de mouvements ou de personnalités fortement influencés par les dérives sectaires susceptibles de participer à ces formations universitaires ?

Enfin, j'ai cru comprendre que les diplômes délivrés dépendaient parfois uniquement des universités elles-mêmes. Un contrôle centralisé s'exerce-t-il sur la délivrance de ces formations ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Initialement, les habilitations avaient été accordées sans limitation de durée. Cela nous satisfait-il pour autant ? Non, bien entendu ! C'est pour cela que, dans le nouveau processus, les habilitations seront d'une durée limitée et d'une périodicité similaire à celle de toutes les autres formations, même dans le domaine de la santé.

Mme Dominique Deloche. - Nous avons profité de l'intégration des formations de santé dans le LMD pour les caler sur les autres diplômes et disciplines universitaires. Nous enverrons, avant l'été, une circulaire aux universités leur demandant de nous informer des conditions de cette mise en place.

Dans le secteur de la santé publique, on est obligé de contrôler l'enseignement dispensé par les universités. C'est pourquoi on ne délivre pas de licence, de master ou de doctorat, mais un grade. Nous avons essayé d'adapter les grands principes du LMD - semestrialisation, parcours personnalisé de certains étudiants dans le domaine de la recherche - mais dans un cadre assez précis, en élaborant les référentiels de formation à partir des référentiels de compétence.

En médecine, il s'agit des compétences qui sont demandées à un étudiant sur le point de prendre des fonctions d'interne : que va-t-il être capable de faire ? Que lui demandera-t-on en tant qu'interne ?

Ce contrôle est selon nous essentiel : on ne voit pas pourquoi les formations de santé y échapperaient, même si la santé, culturellement, a toujours été un peu à part dans l'université. Nous souhaitons que l'Aeres, ou l'instance qui la remplacera, exerce donc son contrôle dans ce domaine...

M. Bernard Saugey . - Madame Malinie, avez-vous quelque chose à ajouter ?

Mme Catherine Malinie, chef de la mission des écoles supérieures et de l'enseignement supérieur privé. - Rien de plus que ce qui a été dit...

Je suis plus particulièrement les formations mises en place par les écoles d'ingénieurs, mais aussi les écoles de commerce et de management. Je dois dire que les instances d'évaluation examinent les diplômes avec beaucoup d'intérêt et d'attention, qu'il s'agisse des maquettes de formation, des contenus pédagogiques ou des cursus bénéficiant de l' European credits transfer system (ECTS), afin de garantir la qualité et faire en sorte que ces formations soient reconnues par l'Etat.

Mme Muguette Dini , présidente. - Certaines universités délivrent des diplômes de reiki. Cela nous inquiète. Vous nous dites n'avoir aucun pouvoir dans ce domaine. N'avez-vous pas de liste ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Non.

Mme Muguette Dini , présidente. - Ne pouvez-vous agir si on vous le signale ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Nous ne sommes pas là dans un cadre d'évaluation. Cependant, un établissement où l'on nous signalerait des formations et des pratiques inappropriées pourrait tomber sous le coup d'une inspection générale et faire l'objet d'un bilan particulier.

Mme Muguette Dini , présidente. - Vous avez donc la capacité de déclencher un contrôle...

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Oui...

En ce qui concerne les diplômes, qu'il s'agisse d'un diplôme national obtenu au sein d'un établissement public ou au sein d'un établissement privé visé par l'Etat, celui-ci donne lieu à signature par le recteur de l'académie.

Un diplôme de master est donc nécessairement signé par le recteur, et bénéficie d'un contrôle sur le nombre de diplômes délivrés par tel établissement, dans telle mention et telle spécialité.

Une fois le diplôme obtenu, le titre ne peut être retiré. Un docteur en chimie qui a obtenu son doctorat restera donc docteur en chimie...

Mme Muguette Dini , présidente. - Ou en médecine...

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - En effet. L'Ordre des médecins dispose toutefois de pouvoirs que nous ne détenons pas...

Mme Muguette Dini , présidente. - Ceux-ci n'ont aucun effet, si ce n'est que les médecins radiés de l'Ordre ne peuvent plus exercer.

M. Yannick Vaugrenard . - Un enseignant médecin radié par le Conseil de l'Ordre a-t-il toujours la possibilité d'enseigner, même s'il n'a plus celle de pratiquer la médecine ?

Mme Dominique Deloche. - Dans le domaine médical, les enseignants sont des praticiens ou des maîtres de conférences hospitalo-universitaires. Un médecin radié de l'Ordre ne peut plus avoir cette activité hospitalière, n'ayant plus l'autorisation d'exercer. Comment pourrait-il donc continuer à enseigner dans une unité de formation et de recherche (UFR) de médecine ?

M. Yannick Vaugrenard . - A-t-il la possibilité d'enseigner dans un établissement privé qui n'est pas sous contrat ?

Mme Catherine Malinie. - Le recteur d'académie valide l'agrément des enseignants des établissements privés, même s'ils ne sont pas sous contrat. Les établissements supérieurs privés peuvent signer un contrat avec l'Etat, mais ne sont pas sous contrat au sens de la loi Debré, qui ne concerne que les établissements scolaires.

Cela étant, s'il exerce de manière permanente, il doit faire l'objet d'un agrément du recteur d'académie, ce qui limite les risques...

M. Yannick Vaugrenard . - Avez-vous le sentiment qu'il existe un véritable contrôle, en dépit de la loi informatique et liberté ? Lorsqu'un médecin ne peut plus exercer son métier, il peut, me semble-t-il, continuer à utiliser son titre pour enseigner dans le privé - sous réserve bien entendu du contrôle du recteur d'académie. De quelle manière ce contrôle peut-il s'effectuer ? Est-il systématique ? Les recteurs ont-ils le réflexe de vérifier que le médecin n'a pas été radié ?

Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval. - Je ne sais pas...

Mme Dominique Deloche. - Si l'enseignant était hospitalo-universitaire, ce genre de sanction remonterait forcément. Je ne pense donc pas que cela puisse se produire, mais je n'en ai pas connaissance. Le monde médical est un monde où tout le monde se connaît. Ce genre de fait grave remonterait tout de suite...

Je ne veux pas m'aventurer dans ce domaine, mais je pense que des sanctions peuvent être prises par la DGRH à l'encontre d'un enseignant qui aurait été ainsi condamné.

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