B. LA FORTE MONTÉE DE L'ENDETTEMENT DES CHU

1. Un recours massif à l'endettement en raison de plans mal encadrés

Le mauvais calibrage du nombre et des montants des opérations financées dans le cadre du plan Hôpital 2007 a entraîné un recours accru à l'emprunt par les établissements publics de santé.

La dette des hôpitaux publics a triplé en moins de dix ans, pour s'établir à 28,1 milliards d'euros en 2012 . Les CHU comptent parmi les établissements qui ont le plus largement recouru à l'emprunt : leur dette représente 37 % de la dette hospitalière totale , soit 10,5 milliards d'euros cumulés en 2012 . L'encours de leur dette a ainsi augmenté de 250 % durant les dix dernières années, contre 171 % pour l'ensemble des établissements publics de santé.

La Cour des comptes souligne dans son enquête le caractère « préoccupant » de la montée de l'endettement hospitalier, et ce d'autant plus que les intérêts d'emprunt représentent une charge de plus en plus lourde pour les CHU . Ces derniers se sont élevés à 327 millions d'euros en 2012, soit une progression de 46 % entre 2009 et 2012.

2. Une capacité des CHU à financer leurs investissements désormais limitée
a) La dégradation de la capacité d'autofinancement des CHU

Même si elle s'est améliorée au cours de l'exercice 2012, la situation financière des CHU demeure dans l'ensemble dégradée. Leur déficit s'est élevé à 321 millions d'euros en 2011 . Selon les résultats provisoires, les comptes des CHU devraient renouer avec l'équilibre en 2012, pour atteindre un résultat global de + 26 millions d'euros.

L'IGF et l'IGAS estiment que la capacité future des établissements publics de santé à investir se reconstitue même si elle reste très insuffisante pour garantir l'investissement courant. La mission conclue que : « la phase d'investissement massif a laissé, globalement, les établissements dans une situation d'endettement élevé, mais pas dans une situation structurellement déséquilibrée » 4 ( * ) .

Dans son rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de septembre 2013, la Cour des comptes souligne « les fragilités du redressement financier des hôpitaux publics » 5 ( * ) . Ce rétablissement serait en effet principalement imputable à des recettes exceptionnelles (cessions d'actifs, aides d'urgence aux hôpitaux les plus fragiles) et à des ajustements comptables 6 ( * ) . Les charges hospitalières continuent quant à elles de progresser, selon un rythme de + 4,2 % enregistré en 2011.

b) La saturation du recours à l'emprunt

L'écart entre un haut niveau d'investissement et une faible capacité d'autofinancement ne peut plus être comblé par le recours à l'emprunt bancaire, en raison :

- des niveaux d'endettement élevés de la plupart des CHU . La mission IGF-IGAS a relevé que neuf CHU (Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, Dijon, Amiens, Nancy, Metz, Clermont-Ferrand, les Hospices civils de Lyon, La Réunion, Fort-de-France) détenaient une dette non soutenable 7 ( * ) en 2011 ;

- de la dégradation des conditions d'accès au crédit bancaire , dans le contexte de l'adaptation des établissements bancaires aux nouvelles normes prudentielles dites « Bâle III » et du démantèlement de Dexia Crédit Local, qui représentait environ 40 % des financements du secteur hospitalier public.

c) Le gel de la deuxième tranche du plan Hôpital 2012

Enfin, les subventions publiques en faveur de l'investissement immobilier hospitalier ont été moins importantes ces dernières années. Si la première tranche du plan Hôpital 2012 a bien donné lieu au versement de 2,2 milliards d'euros d'aides - pour un investissement total de 5,6 milliards d'euros - les décisions concernant la deuxième tranche du plan ont été suspendues . Le gel de ces financements a été confirmé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 8 ( * ) , qui a réduit la dotation de l'assurance maladie au Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP).


* 4 IGAS et IGF, « Evaluation du financement et du pilotage de l'investissement hospitalier », mars 2013.

* 5 Cour des comptes, rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2013.

* 6 La circulaire du 6 juillet 2012 relative aux évolutions d'ordre budgétaire et comptable à compter de l'exercice 2012 pour les établissements de santé antérieurement financés par dotation globale demande notamment aux établissements d'enregistrer au compte d'exploitation et non au bilan les aides exceptionnelles accordées en cas de difficultés de trésorerie.

* 7 Le caractère soutenable de l'endettement est calculé par la mission à partir du taux de marge brute non aidée de l'établissement, du taux d'intérêt de l'emprunt et de sa durée.

* 8 Article 81 de la loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011.

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