III. LA DÉLICATE QUESTION DE LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LA PJJ ET LES DÉPARTEMENTS

A. LA COUR DES COMPTES FAVORABLE À UNE COMPÉTENCE EXCLUSIVE DES DÉPARTEMENTS POUR LES MESURES D'ASSISTANCE ÉDUCATIVE

La principale recommandation de la Cour des comptes vise à « parachever le partage des compétences entre les départements , responsables de la protection judicaire civile hors mesures d'investigation, et la PJJ , en supprimant tout fondement juridique à son intervention en assistance éducative (hors investigation) et en adaptant en conséquence les textes régissant ses compétences ».

En effet, le retrait de la PJJ des mesures d'assistance éducative a pu être contesté, par les magistrats notamment, mais aussi par notre ancien collègue sénateur Jean-Pierre Michel qui, dans un rapport récent remis à la ministre de la Justice, garde des Sceaux 13 ( * ) , a évoqué la possibilité de rouvrir des prises en charges civiles par le secteur public de la PJJ. Les opposants à cette spécialisation soulignent qu' elle a supprimé la possibilité de construire un véritable parcours pour un mineur qui ferait d'abord l'objet d'une mesure pénale puis d'une mesure civile .

Pour la Cour des comptes, alors que les imbrications de compétences sont génératrices de doublons et de surcoûts , une telle réforme parachèverait le partage des compétences dont les principes ont été posés en 1983.

De plus, « si la Cour n'a pas vocation à entrer dans des débats sur la conception de l'action éducative dans le cadre civil et pénal, elle observe toutefois que la PJJ n'est pas en mesure de quantifier le risque de rupture de continuité dans l'enchainement entre un dispositif pénal et une mesure d'assistance éducative qui permettrait de calibrer le niveau souhaitable de réouverture des prises en charge civiles par le secteur public ».

Enfin, l'impossibilité de déterminer des critères objectifs d'intervention de la PJJ risquerait de « faire renaître les disparités de traitement sur le territoire » constatées par la Cour en 2009.

Plusieurs membres de la commission des finances ont souligné les risques résultant d'une spécialisation et ont plaidé pour davantage de souplesse : Fabienne Keller a ainsi rappelé « l'importance pour les jeunes, quels que soient les chemins de traverse qu'ils empruntent, d'avoir un référent dans la durée » ; pour Jean-Claude Boulard « nous irons d'échec en échec si nous ne sommes pas capables de prendre en compte l'unité des parcours personnels, au-delà de la répartition juridique des compétences », Marie-France Beaufils considérant quant à elle que « les jeunes doivent avoir un accompagnement continu, même s'ils quittent un dispositif pénal. La rupture de suivi du jeune entre la PJJ et le conseil général peut entraîner des coûts supplémentaires ».

Le président de la quatrième chambre de la Cour des comptes a indiqué à votre commission des finances que « l'unité de parcours est un enjeu très important. On ne peut toutefois pas faire abstraction du système dans lequel on vit , qui a été choisi par la représentation nationale et le Gouvernement, et qui prévoit un partage des compétences entre l'État et les conseils généraux . Si demain, toutes ces compétences sont rendues à l'État, cela sera peut-être plus simple, mais ce n'est pas à la Cour des comptes de le dire. Dès lors, la confusion des opérateurs n'apparaît pas être la bonne solution et il faut organiser la dualité ».

Votre rapporteur spécial n'est pas favorable à la spécialisation stricte proposée par la Cour des comptes, et souhaite que les mesures d'assistance éducative susceptibles de succéder à une mesure pénale, puissent être mises en oeuvre par la PJJ, dans l'intérêt du jeune.


* 13 La protection judiciaire de la jeunesse au service de la justice des mineurs. Rapport remis le 18 décembre 2013.

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