V. DEUX INTERROGATIONS À LEVER RAPIDEMENT

A. LA MAÎTRISE DU « RATIO DE LEVIER »

La réglementation prudentielle bancaire repose notamment sur le suivi de deux ratios prudentiels : le ratio de solvabilité et le ratio de levier.

Le ratio de solvabilité mesure le rapport entre les fonds propres d'une banque et l'ensemble de ses actifs, pondérés par les risques qu'ils représentent. Il vise à ce que les banques disposent de fonds propres suffisants au regard des risques qu'elles prennent.

Le ratio de levier, quant à lui, mesure le rapport entre les fonds propres d'une banque et l'ensemble de ses actifs, sans prendre en compte les risques. Il vise à limiter, dans l'absolu, la taille du bilan des banques au regard de leurs fonds propres.

Les règles prudentielles bancaires issues des accords de Bâle ont d'abord mis l'accent sur le ratio de solvabilité. Puis, après la crise de 2008 et les accords de Bâle III, elles ont été complétées par le ratio de levier. Pour l'instant, au sein de l'Union européenne, seule la publication du ratio de levier est obligatoire 35 ( * ) . La décision d'instaurer un tel ratio de levier comme un élément de réglementation contraignant sera prise en 2016 pour une entrée en vigueur à compter de 2018 ou 2019.

Les actifs de la SFIL étant très majoritairement constitués de contreparties sur des collectivités publiques, ils sont considérés comme très peu risqués. Au 31 décembre 2014, la SFIL ne compte que 104 millions d'euros d'encours impayés et 463 millions d'encours litigieux ou douteux, soit moins de 1 % de la totalité de son bilan. Dès lors, au regard de ses fonds propres, son ratio de solvabilité (qui est supérieur à 20 %) est considéré comme excellent.

En revanche, son ratio de levier est compris entre 1,6  % et 1,8 % alors que les règles de Bâle III (non encore en vigueur) ont fixé un seuil minimum de 3 % Autrement dit, quand les actifs de la banque s'élèvent à 100, le montant de ses fonds propres ne peut être inférieur à 3. Or le bilan de la SFIL s'élève à 86,3 milliards d'euros et ses fonds propres à 1,4 milliard d'euros.

Le ratio de levier, ne reposant pas, par construction, sur une prise en compte du risque, trouve sa limite avec un modèle d'affaires tel que celui de la SFIL. En effet, c'est parce que le bilan de la SFIL est très homogène et ne comporte que des actifs peu risqués que son ratio de levier est si faible. D'ailleurs, ni les agences de notation, ni les investisseurs ne semblent avoir considéré que cet indicateur révélait une situation préjudiciable pour la banque.

Il est envisagé que le futur texte européen qui pourrait rendre contraignant le ratio de levier prenne en compte les banques, comme la SFIL, pour lesquelles l'application formelle du ratio de levier pourrait se révéler problématique alors que les risques qu'elles portent sont faibles. L'étude actuellement en cours de réalisation par la Commission européenne sur les effets du ratio de levier devrait notamment envisager ce cas.

Dans l'hypothèse la plus pessimiste (ratio de levier contraignant, absence de dérogation pour la SFIL), la banque se verrait contrainte d'engager une augmentation de capital de l'ordre d'un milliard d'euros. Seul l'État, actionnaire de référence, participerait à cette recapitalisation, qui nécessiterait l'approbation préalable de la Commission européenne.

La question du ratio de levier a été évoquée plusieurs fois au cours des entretiens conduits par votre rapporteur. Il s'agit clairement d'un élément de vigilance de la part de la direction, des actionnaires ou encore du superviseur bancaire. Néanmoins, aucun d'entre eux n'a paru réellement inquiet, compte tenu de l'incertitude qui entoure le cadre juridique du ratio de levier et qui ne sera levée que dans les prochains mois. En tout état de cause, l'État, conscient du problème, veille à ce qu'il soit correctement pris en compte lors de la négociation d'éventuels textes européens.


* 35 Règlement délégué (UE) 2015/62 de la Commission du 10 octobre 2014 modifiant le règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le ratio de levier.

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