II. SIMPLIFIER ET RENFORCER LA PROCÉDURE POUR LA RENDRE PLUS EFFICIENTE

A. RACCOURCIR LES DÉLAIS ET SUSPENDRE LE PLUS RAPIDEMENT POSSIBLE LES BOURSES DES ÉTUDIANTS DÉCLARÉS NON ASSIDUS

Compte tenu des difficultés à faire aboutir les procédures de récupération des indus, l'amélioration du contrôle d'assiduité des étudiants passe prioritairement par la détection rapide des étudiants ne respectant pas leur obligation en la matière et par la suspension, dans les plus brefs délais, du versement de leurs bourses . Il convient également de rendre plus fluide la procédure applicable jusqu'au recouvrement des sommes indûment perçues.

1. Rendre effectif le contrôle de l'inscription pédagogique

Jusqu'à la rentrée 2014, l'inscription administrative à l'université suffisait à justifier que l'étudiant comptait bien suivre une formation ouvrant droit à bourse. Dans ce cas, jusqu'au contrôle de son assiduité, qui intervenait généralement lors de la session d'examens à la fin du premier semestre, il percevait chaque mois le montant de sa bourse.

À la suite d'un courrier adressé le 21 juillet 2014 par la directrice de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle à l'ensemble des recteurs, il a été demandé que l'absence d'inscription pédagogique soit identifiée et constitue désormais un critère de la non-assiduité du boursier .

Votre rapporteur spécial ne peut que souscrire à cette évolution et s'étonne même qu'elle n'ait pas été opérée plus tôt tant il paraît inconcevable qu'une bourse soit versée alors même que l'étudiant n'a pas réalisé les démarches nécessaires pour suivre les cours et les travaux dirigés associés à la formation à laquelle il s'est inscrit.

Par ailleurs, l'absence d'inscription pédagogique a le mérite de pouvoir être détectée tôt dans l'année universitaire et de justifier pleinement la suspension rapide d'une bourse , évitant ainsi des montants importants de paiements indus qui feraient ensuite l'objet d'ordres de reversement.

Ainsi, même si le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche décidait à l'avenir de substituer l'obligation d'assiduité aux cours et de présence aux examens à une obligation de résultat, l'obligation d'inscription pédagogique devrait en tout état de cause être maintenue car, sans demander un important travail de contrôle pour les établissements, elle permet de déceler bien en amont l'étudiant « fantôme ».

Pour autant, malgré ce courrier, l'absence d'inscription pédagogique ne semble pas avoir réellement fait l'objet de remontées dans les semaines ou mois suivant la rentrée universitaire. Ainsi, à quelques exceptions près, les des bourses ne semblent pas être suspendues dans les premiers mois de l'année universitaire pour défaut d'inscription pédagogique, la liste des étudiants non assidus continuant, la plupart du temps, à être transmise à l'issue du premier semestre au plus tôt.

En conséquence, votre rapporteur spécial réaffirme la nécessité de vérifier l'inscription pédagogique de l'étudiant boursier au-delà d'une date raisonnable qui pourrait être fixée à la fin du mois de novembre . Bien sûr, il devrait être tenu compte des éventuelles exceptions , à l'instar des étudiants qui ne seraient amenés à suivre des cours qu'au second semestre ou des éventuelles formations pour lesquelles l'inscription pédagogique pourrait ne pas être close d'ici là. En tout état de cause, cette dernière hypothèse ne concernerait probablement pas une grande partie des boursiers qui se concentrent parmi les étudiants de licence.

Idéalement , votre rapporteur spécial considère que l'inscription pédagogique devrait même constituer une condition préalable au premier versement de la bourse . Toutefois, cela pourrait être préjudiciable aux étudiants car cette inscription n'est généralement possible dans les universités qu'au cours du mois de septembre. En conséquence, sauf pour les formations dont le calendrier le permet, il n'est pas possible d'aller jusque-là.

Recommandation n° 4 : Rendre effectif le contrôle de l'inscription pédagogique des étudiants boursiers au-delà d'une date préalablement définie et qui pourrait se situer vers la fin du mois de novembre pour le premier semestre.

Le cas échéant, lorsque le calendrier universitaire le permet, subordonner le premier versement de la bourse à l'inscription pédagogique de l'étudiant.

2. Améliorer les systèmes d'information et leurs interfaçages

Compte tenu de la pluralité des acteurs intervenant dans le cadre de la gestion des bourses, plusieurs logiciels sont utilisés et, pour certains, interfacés. Il s'agit principalement :

- du logiciel APOGEE (Application pour l'organisation et la gestion des enseignements et des étudiants) qui, développé par l'Agence de mutualisation des universités et des établissements (AMUE), est destiné aux universités et à d'autres écoles pour l'inscription des étudiants et la gestion de leurs dossiers au cours de leur formation. Ce choix technologique n'est, toutefois, pas imposé aux établissements qui peuvent librement choisir leur système d'information ;

- du logiciel AGLAE (Application de gestion du logement et de l'aide à l'étudiant) qui permet aux CROUS de gérer le dossier social de l'étudiant, tant pour les aides sociales directes que pour le logement ;

- du logiciel CHORUS, outil de gestion financière, budgétaire et comptable de l'État, utilisé, en particulier, par les rectorats et les DRFiP pour la gestion des crédits, la mise en paiement des bourses et le recouvrement des sommes indûment perçues.

Parmi les nombreuses améliorations qui pourraient globalement être apportées à ces logiciels afin de faciliter le travail des services compétents et réduire les délais , votre rapporteur spécial en retient plusieurs qui amélioreraient plus spécifiquement le contrôle des conditions de maintien des droits des étudiants boursiers.

Ainsi, afin de faciliter les échanges entre les établissements d'enseignement supérieur et les CROUS , l'interfaçage entre les logiciels APOGEE et AGLAE devrait être amélioré . Concernant, en particulier, l'inscription pédagogique qui doit être vérifiée pour l'ensemble des étudiants boursiers, une remontée automatique des données devrait pouvoir être permise depuis les universités vers les CROUS . En effet, seule l'inscription administrative ferait actuellement l'objet d'une synchronisation entre les deux logiciels.

Des dispositifs permettant de « badger » pourraient également être retenus afin de faciliter la vérification de l'assiduité aux cours des étudiants, qu'ils soient d'ailleurs boursiers ou non. Directement connecté au logiciel de gestion des étudiants, ils permettraient ainsi d' éviter un important travail de saisie pour les enseignants (lorsque l'appel est directement entré sur un ordinateur) ou les services administratifs (en cas d'appel ou d'émargement des étudiants sur une liste papier).

Si le coût initial d'installation est souvent avancé pour repousser cette évolution technologique, certains représentants d'universités se sont montrés plus réceptifs avec le développement des cartes multiservices (restauration, bibliothèque...), qui ne dispenserait cependant pas d'équiper l'ensemble des salles de cours.

En outre, plusieurs interlocuteurs ont fait valoir qu'un étudiant serait en mesure de « badger » pour plusieurs autres dès lors qu'il disposerait de leurs cartes. Cependant, de telles pratiques seraient immanquablement repérées si elles devenaient massives.

Par ailleurs, il paraît incroyable que les établissements d'enseignement supérieur et les CROUS continuent à remplir et à s'échanger des listes sous forme de fichiers Excel . Généralement source d'un important travail de retraitement par les différents acteurs, cette pratique contribue à la lenteur de la procédure.

Enfin, le logiciel AGLAE ne permettrait actuellement de gérer les dossiers qu'individuellement, étudiant par étudiant. Certains CROUS ont ainsi émis le souhait de pouvoir procéder à une gestion groupée dans le cadre du contrôle d'assiduité.

Recommandation n° 5 : Développer l'interfaçage et la synchronisation entre les logiciels APOGEE et AGLAE afin notamment que l'inscription pédagogique de l'étudiant boursier dans son université soit automatiquement remontée vers les CROUS.

Plus globalement, améliorer les systèmes d'information afin d' automatiser davantage les contrôles et limiter les interventions humaines répétées (listes à remplir et à pointer notamment).

Enfin, les logiciels devraient permettre de traiter davantage « au fil de l'eau » le cas des étudiants non assidus . En particulier, il conviendrait de prévoir que les universités puissent elles-mêmes suspendre les bourses , comme c'est déjà le cas pour les lycées ou, par exemple, pour l'Université de technologie de Troyes.

Cela permettrait de responsabiliser davantage les universités dans le contrôle d'assiduité de leurs étudiants.

Recommandation n° 6 : Permettre une gestion plus fluide et continue , en prévoyant notamment la possibilité pour les universités de suspendre elles-mêmes le versement des bourses (comme c'est déjà le cas pour les lycées et certaines écoles).

3. Envisager de confier aux CROUS la gestion des crédits des aides sociales directes

L'intervention de multiples acteurs dans le cadre de la gestion des bourses sur critères sociaux et, plus généralement, des aides sociales directes, favorise la dilution des responsabilités pour le contrôle d'assiduité des étudiants et ralentit considérablement la procédure applicable 21 ( * ) .

Parallèlement, il apparaît que, bien qu'ayant la qualité d'ordonnateur, les rectorats jouent un rôle secondaire dans la gestion des bourses . S'agissant du contrôle d'assiduité en particulier, les recteurs d'académie auraient dû impulser le renforcement et l'harmonisation des règles applicables , pour s'assurer du respect de l'équité entre les boursiers ainsi que de l'efficacité de la dépense publique.

Aussi, votre rapporteur spécial estime que mériterait d'être étudiée l'hypothèse de confier l'intégralité de la gestion des bourses au réseau universitaire des oeuvres universitaires et scolaires , à savoir le CNOUS et les CROUS qui deviendraient ainsi l'ordonnateur. Les rectorats seraient, quant à eux, exclus du processus .

La perspective d'une telle évolution n'a engendré aucune opposition forte lorsqu'elle a été évoquée devant certains rectorats ou des établissements d'enseignement supérieur.

Pour le réseau des oeuvres universitaires et scolaires, la gestion des bourses pourrait être facilitée, d'autant que les CROUS gèrent déjà certaines aides directement (les bourses du ministère de la culture notamment). Certains représentants ont toutefois émis la crainte que la gestion d'un budget de deux milliards d'euros dont les crédits sont votés chaque année en loi de finances initiale ne pèse trop sur la trésorerie actuelle des CROUS et que les aides indirectes (logement, restauration) n'en subissent les conséquences.

Sans que cela soit de nature à remettre en cause l'hypothèse d'une telle réorganisation, votre rapporteur spécial entend cette réserve, d'autant que, au cours des années passées, le programme 231 « Vie étudiante » a connu une importante sous-dotation des crédits consacrés aux bourses sur critères sociaux 22 ( * ) . Il serait donc essentiel , dans cette hypothèse, que le budget actuel des CROUS ne constitue pas une variable d'ajustement . Il pourrait également être imaginé que le CNOUS assure lui-même la gestion des crédits et la mise en paiement.

Bien entendu, une telle réforme, qui impliquerait un changement d'échelle en termes de gestion de crédits par les CROUS, ne pourrait se mettre en place rapidement et nécessiterait un important travail de préparation, notamment pour s'assurer de la qualité de la chaîne comptable.

Recommandation n° 7 : Étudier la possibilité de transférer des rectorats vers les CROUS la gestion des bourses sur critères sociaux et autres aides sociales directes relevant du programme 231 « Vie étudiante ».


* 21 Cf. le A du I de la présente partie.

* 22 Cf . le B du I de la première partie.

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