2. Un système de reconnaissance mutuelle automatique pour les professions sectorielles

La directive 2005/36/CE modifiée en 2013 institue un régime particulier pour les professions sectorielles que sont les médecins généralistes, les médecins spécialistes, les praticiens de l'art dentaire, les infirmiers responsables de soins généraux, les pharmaciens et les sages-femmes, professions faisant l'objet du présent rapport, mais aussi les vétérinaires et les architectes.

Ce régime concerne les ressortissants des États membres de l'Union européenne, des États membres de l'Espace économique européen (Norvège, Islande et Liechtenstein) et de la Suisse.

Il prévoit la reconnaissance automatique, dans chacun de ces États, de qualifications professionnelles obtenues dans un autre de ces États pour l'exercice des professions sectorielles : les professionnels qui souhaitent faire valoir cette reconnaissance n'ont pas de stage à accomplir ou d'examens à passer. Ceci se justifie par le fait que la directive harmonise les conditions minimales de formation. En effet, elle définit le niveau des diplômes requis pour suivre les formations permettant l'exercice de ces professions. De plus, elle fixe la durée minimale de ces formations, ainsi que les connaissances et compétences qui doivent être acquises lors de ces formations. Enfin, son annexe V détermine, pour chaque État membre, la liste des établissements autorisés à délivrer un diplôme pour exercer ces professions sectorielles. Cette liste est mise à jour chaque année par la Commission européenne. Ainsi, la dernière mise à jour a été publiée au JOUE le 3 février 2020 et une nouvelle campagne de recensement des demandes d'actualisation formulées par les États membres a été lancée.

Les ordres professionnels sont en charge de l'instruction des demandes relevant de la reconnaissance automatique. En cas de doute sur la validité d'un diplôme, l'autorité compétente de l'État membre d'accueil peut contacter l'autorité compétente de l'État membre d'origine aux fins de vérification.

3. Un régime général pour les autres professions et les professions sectorielles quand les conditions de la reconnaissance automatique ne sont pas remplies

À côté de ce régime de reconnaissance automatique qui concerne huit professions sectorielles, a été créé un régime général de reconnaissance des qualifications qui concerne notamment les masseurs-kinésithérapeutes et les aides-soignants, mais aussi les autres professions de santé dans le cas où le professionnel ne remplit pas l'ensemble des exigences prévues par la directive 2005/36/CE. Il s'applique aux ressortissants des États membres de l'Union européenne, des États membres de l'Espace économique européen (Norvège, Islande et Liechtenstein) et de la Suisse.

a) Le régime général de reconnaissance mutuelle pour les professions non sectorielles

Dans le cadre de ce régime général, l'article 11 de la directive 2005/36/CE détermine cinq niveaux de formation. Pour pouvoir prétendre à une reconnaissance, le diplôme obtenu dans l'État membre d'origine doit avoir été délivré par une autorité compétente et être de niveau au moins équivalent à celui exigé dans l'État membre d'accueil.

Une fois ces conditions remplies, l'État membre d'accueil peut procéder à une comparaison entre la formation acquise à l'étranger et ses propres exigences. Il sera alors fondé à demander des mesures de compensation si le contenu de la formation est substantiellement différent ou si le champ des activités professionnelles ouvert à la profession est plus large dans l'État membre d'accueil que dans l'État membre d'origine.

La prescription de mesures de compensation est prévue par les articles 13 et 14 de la directive 2005/36/CE transposés en droit français par l'arrêté du 8 décembre 2017 relatif aux niveaux de qualification pris en compte pour la détermination des mesures de compensation pour la reconnaissance des qualifications des professions de santé. Les autorités compétentes des États membres d'accueil doivent prendre en compte, au-delà des qualifications professionnelles présentées par l'intéressé, toute connaissance, aptitude et compétence acquise par le demandeur au cours de son expérience professionnelle ou de son apprentissage. Ces mesures de compensation peuvent prendre la forme d'un stage d'adaptation d'une durée maximum de trois ans ou d'une épreuve d'aptitude. L'article 14, alinéa 5, de la directive 2005/36/CE rappelle que le principe de proportionnalité est applicable en la matière.

Ainsi, les masseurs-kinésithérapeutes titulaires d'une qualification obtenue dans un autre État membre de l'Union européenne et souhaitant exercer en France sont soumis à ce système de reconnaissance mutuelle.

Une demande d'établissement doit d'abord être adressée au préfet de région (Direction régionale et départementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale) accompagnée des documents nécessaires. Ensuite, une commission d'autorisation d'exercice rend un avis consultatif sur l'opportunité de préconiser des mesures compensatoires. Celle-ci est composée d'un représentant d'un institut de formation (IFMK), d'un représentant du conseil régional de l'ordre, d'un représentant des masseurs-kinésithérapeutes libéraux et d'un représentant des masseurs-kinésithérapeutes salariés. C'est le préfet de région qui décide si des mesures compensatoires sont nécessaires.

b) Le régime général pour les professions sectorielles lorsque les conditions de la reconnaissance mutuelle automatique ne sont pas remplies

Pour les professions sectorielles, des mesures de compensation devront également être demandées :

- aux titulaires d'un diplôme obtenu dans un État membre de l'Union européenne mais non conforme à la directive 2005/36/CE, à la suite de l'arrêt Dreessen de la Cour de justice de l'Union européenne du 22 janvier 2002 (affaire C-31/00) 3 ( * ) ;

- aux titulaires d'un diplôme obtenu dans un État tiers mais reconnu par un État membre de l'Union européenne et ayant permis l'exercice de la profession dans cet État pendant trois ans au moins, à la suite de l'arrêt Hocsman de la même Cour du 14 septembre 2000 (affaire C-238/98) 4 ( * ) .

La commission d'autorisation d'exercice doit prendre en considération l'ensemble des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que l'expérience pertinente de l'intéressé, en procédant à une comparaison entre, d'une part, les compétences attestées par ces titres et cette expérience et, d'autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale. Elle peut ensuite proposer des mesures compensatoires.

Les demandes sont gérées par le centre national de gestion, opérateur du ministère de la santé. La décision est prise, après avis de la commission d'autorisation d'exercice, par le ministre de la santé ou, sur délégation, par le directeur national du centre de gestion.

L es conditions d'exercice en France des médecins et chirurgiens-dentistes ressortissants d'un État membre de l'Union européenne*

Diplôme conforme à la directive 2005/36/CE telle que révisée en 2013 : reconnaissance mutuelle automatique

Diplôme européen non conforme à la directive 2005/36/CE : procédure définie par la jurisprudence Dreessen ;

Diplôme non européen* mais ayant donné lieu à une autorisation d'exercice dans un autre État membre durant trois ans au moins : procédure définie par la jurisprudence Hocsman ;

Diplôme non européen* : procédure d'autorisation d'exercice impliquant la réussite à un concours (liste A pour la voie générale et B pour les personnes ayant le statut de réfugié ou apatride), 3 ans pour les médecins/ 1 an pour les dentistes dans un service agréé pour la formation des internes, puis examen du dossier par la Commission d'autorisation d'exercice qui pourra préconiser des mesures compensatoires.

* Union européenne à laquelle s'ajoutent la Norvège, le Liechtenstein, l'Islande et la Suisse

Les conditions d'exercice en France pour les médecins et chirurgiens-dentistes qui ne sont pas ressortissants européens*

Diplôme français : inscription à l'ordre directement ;

Diplôme européen* conforme ou non à la directive 2005/36/CE : passage devant la commission d'autorisation d'exercice qui pourra éventuellement recommander des mesures compensatoires. Cette procédure est facilitée lorsque le diplôme est conforme à la directive 2005/36/CE et que la personne bénéficie d'un statut particulier tel que membre d'une famille européenne (directive 2004/38/CE relative aux droits des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de séjourner et de circuler librement sur le territoire des États membres) ou résident depuis au moins 5 ans dans un État membre de l'Union (directive 2003/109/CE relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée) ;

Diplôme non européen* : procédure d'autorisation d'exercice impliquant la réussite à un concours (liste A pour la voie générale et B pour les personnes ayant le statut de réfugié ou apatride), 3 ans pour les médecins/ 1 an pour les dentistes dans un service agréé pour la formation des internes, puis examen du dossier par la Commission d'autorisation d'exercice qui pourra préconiser des mesures compensatoires.

* Union européenne à laquelle s'ajoutent la Norvège, le Liechtenstein, l'Islande et la Suisse


* 3 http://curia.europa.eu/juris/showPdf.jsf;jsessionid=EDF5BCD7B9A1F96EC3CE80D209A20DC0?text=&docid=47025&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=7186794

* 4 http://curia.europa.eu/juris/showPdf.jsf?text=&docid=45630&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=7186902

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