B. MAIS NE RÉPONDENT PAS À L'ENSEMBLE DES BESOINS

Ce panorama financier positif doit faire l'objet de quatre tempéraments.

1. L'État ne finance toujours pas l'ANRU à hauteur de ses engagements

L'État se dispense toujours de payer son écot au NPNRU . Au début du quinquennat, le Président de la République avait pris l'engagement de porter la part de l'État à 1 milliard et d'en payer 200 millions sur cinq ans. Preuve de cet engagement irrévocable, 185 millions d'autorisations de programme avaient même été inscrites au budget 2019 ! Mais à peine la première marche franchie, c'est-à-dire de porter les crédits de paiement de 15 à 25 millions, la détermination a manqué et ce sont désormais 15 millions d'euros qui sont versés chaque année. Au total, sur cinq ans, moins de 80 millions d'euros ont été versés par rapport aux 200 millions annoncés !

Certains se félicitent que l'État reste un financeur du NPNRU, d'autres estiment qu'une augmentation de sa contribution n'est pas nécessaire puisque l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, ne les dépenserait pas dans l'immédiat. Pourtant si l'État ne respecte pas ses engagements actuels, on peut craindre qu'au final ce soient à nouveau Action Logement et les bailleurs sociaux qui assurent le financement de la rénovation des QPV !

2. Le financement des « Quartiers d'été - Quartiers d'automne » n'est pas garanti

Les programmes « Quartiers d'été » et « Quartiers d'automne » ont été lancés, en 2020, après le confinement, en complément des dispositifs de l'Éducation nationale visant à rattraper ou consolider les acquis pédagogiques pendant les congés d'été. Il s'agissait aussi d'ouvrir ces quartiers et ces jeunes sur l'extérieur et de lutter contre la relégation et l'oisiveté estivale.

« Oui, ce programme coûte cher, mais combien coûtent les dégradations ? Une compagnie de CRS dans un quartier c'est 40 000 euros par jour.
Quelle société voulons-nous ? »

Les retours d'expérience sont très positifs. En 2021, près d'un million de jeunes et familles (un jeune sur deux, un habitant sur quatre) a été touché. Selon le ministère de la ville, cela fait près de 20 ans que l'État n'a pas touché autant de bénéficiaires. Ce sont également 500 communes et 3 000 associations qui se sont mobilisées.

Malgré cela, ces programmes rencontreraient une vraie résistance du ministère des Finances de telle sorte que les crédits ont été délégués très tard en 2021, en mai-juin pour juillet-août. Si le principe de la reconduction est normalement acquis, les moyens ne sont pas fléchés. Qu'en sera-t-il l'année prochaine avec les élections ? Quelle sera la visibilité des communes et des associations ?

3. La nécessaire reconnaissance de la surcharge scolaire

La plupart des villes abritant des QPV sont des villes jeunes à la démographie dynamique. Elles ont beaucoup plus d'écoles que les autres. Grigny en est peut-être l'archétype. 45 % des habitants sont en dessous du seuil de pauvreté, 45 % ont moins de 25 ans. La natalité est celle d'une ville deux fois plus importante. 10 % de la population est sans titre régulier de séjour. De ce fait, dans certains quartiers, le taux de scolarisation est supérieur à 100 % ! Sans être confrontés à une situation aussi difficile, à Chanteloup-les-Vignes toutes les écoles et tous les collèges sont classés en Réseau d'éducation prioritaire, REP ou REP +. Ces villes demandent légitimement que leurs charges spécifiques soient reconnues. Il serait nécessaire de créer une dotation pour surcharge scolaire qui a été évaluée à 40 millions d'euros par an.

« Entre les annonces et les réalisations,
ce sont les maires qui assurent le dernier kilomètre »

Philippe Rio,
maire de Grigny (Essonne)

4. Les « Bataillons de la prévention », une coordination insuffisante avec les collectivités

Concernant le déploiement des « Bataillons de la prévention », l'État semble s'être aperçu un peu tardivement que la prévention spécialisée était de la compétence des départements et que la médiation était assumée par les communes.

Dans les Yvelines par exemple, 16 binômes ont été attribués à Trappes et aux Mureaux par l'État quelques jours après que le département avait déjà pris la même décision. De ce fait, il faut maintenant trouver une solution pour que les moyens puissent être redéployés.

« Ce n'est pas de la communication que nous demandons,
c'est de travailler sur les territoires ! »

Catherine Arenou,
maire de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines)

Réaction assez similaire à Grigny (Essonne) dont la ville est déjà dotée, même si un complément est bienvenu, et dont le maire Philippe Rio s'est étonné que les effectifs n'aient pas été attribués à des secteurs complètement dépourvus, pointant un manque de dialogue avec les territoires.

Par ailleurs, l'État finance des CDD de 18 mois. Comment organiser une action dans la durée dans ces conditions ? Le sujet est renvoyé aux prochains contrats de villes, c'est-à-dire après les échéances de 2022...

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