C. UNE PROCÉDURE D'ATTRIBUTION DES CONCOURS TRÈS CENTRALISÉE

La création du compte d'affectation spéciale a répondu à l'objectif de donner un habillage juridiquement satisfaisant à une procédure d'attribution de soutiens publics à des projets de développement local.

Dans les faits, on l'a dit, une partie substantielle des ressources disponibles a été versée au budget général pour satisfaire les exigences financières du moment.

Ce phénomène a été favorisé par la très grande centralisation des procédures de gestion du compte .

Dans les départements d'outre-mer au moins, les crédits sont ordonnancés par le ministre de l'économie et des finances, en pratique, par le directeur du Trésor.

Cette situation a pour conséquence de priver la quasi totalité des acteurs locaux de toute information sur les opérations du compte, voire même sur son existence comme a pu l'observer votre rapporteur.

Ce qui est vrai pour les responsables des collectivités territoriales, l'est aussi d'ailleurs pour les agents de l'Etat qui sont pourtant chargés de gérer des crédits dont l'affectation n'est pas indifférente aux concours publics que peut accorder le Trésor à partir du compte d'affectation spéciale. Cette observation vaut tout particulièrement pour les soutiens publics au logement.

Une gestion très centralisée.

L'exemple de la procédure à suivre pour l'octroi de subvention sur les produits de l'émission dans le cadre des opérations de réhabilitation des SIDOM.

"Les sociétés immobilières des départements d'outre-mer qui restaurent leur patrimoine locatif peuvent, en complément des aides du ministère de l'équipement, percevoir des subventions prélevées sur les crédits d'un compte spécial du Trésor, alimenté par les bénéfices nets de l'IEDOM [2] et dont le directeur du Trésor est l'ordonnateur. La procédure à suivre en vue de l'obtention de ces subventions comporte trois étapes.

1. Présentation des programmes annuels de réhabilitation au conseil d'administration des SIDOM .

Cette première étape nécessaire n'est, toutefois, pas décisive pour l'octroi de la subvention. En effet, l'agrément donné par le conseil à un programme n'équivaut en aucun cas à l'engagement de financer ledit programme sur les produits de l'émission. Seul le directeur du Trésor, ordonnateur du compte d'affectation spéciale précité a juridiquement la capacité de prendre un tel engagement.

Il est donc indispensable de soumettre à l'approbation du directeur du Trésor les programmes déjà agréés par le conseil d'administration.

2. Approbation par le directeur du Trésor.

Cette seconde étape est capitale, l'approbation du directeur du Trésor étant la condition sine qua non de tout versement de subvention.

Seuls sont susceptibles d'être approuvés, les programmes intégralement finalisés, dont le coût définitif est arrêté et qui sont présentés avec un plan de financement précis . Je vous rappelle à cet égard que le montant de la subvention prélevée sur le compte spécial du Trésor précité ne peut en aucun cas dépasser 43,4 % du coût total de l'investissement dans la limite de 70.000 francs par logement, étant précisé que les crédits du ministère de l'équipement contribuent obligatoirement au financement des programmes concernés.

Les travaux projetés doivent, en outre, faire l'objet d'une présentation exhaustive et claire, permettant de vérifier qu'ils relèvent bien de la réhabilitation au sens donné à ce terme par le décret n° 77.851 du 26 juillet 1977 et les textes qui l'ont complété.

Ce n'est qu'après avoir reçu l'approbation formelle de la direction du trésor que les sociétés concernées pourront engager les travaux.

3. Versement des subventions

A l'appui d'une première demande de subvention, les sociétés doivent obligatoirement produire :

- la copie de l'arrêté de la DDE octroyant une subvention sur les crédits du ministère de l'équipement au titre du programme concerné,

- un état d'avancement des travaux.

Une première moitié de la subvention IEDOM peut être débloquée dès lors que l'état d'avancement des travaux atteint ou dépasse 50 %. Le règlement du solde intervient lors de l'achèvement intégral des travaux.

En tout état de cause, toute opération de réhabilitation réalisée par une SIDOM doit se traduire par un réajustement en conséquence des loyers."

Autre inconvénient de cette centralisation, l'éloignement des décideurs, qui conjugué avec les changements très fréquents du titulaire du bureau de l'administration centrale des finances en charge du compte est peu propice à la garantie de décisions toujours opportunes et au contrôle des opérations et des organismes soutenus.

Mais la centralisation est également contreproductive par les délais qu'elle implique. Ceux-ci contribuent sans doute aux difficultés d'exécution des crédits, les délais de procédure se cumulant avec les lenteurs de certaines des opérations éligibles. Ce phénomène n'est pas sans incidence sur les organismes bénéficiaires qui, dans le cas des opérations de réhabilitation évoquées ci-dessus, doivent supporter des préfinancements coûteux.

La confidentialité qui entame les opérations du compte est enfin mal ressentie sur place . Le sentiment que ses interventions privilégient systématiquement certains opérateurs -ceux dont l'Etat détient le contrôle et où le Trésor est représenté- est dès lors inévitable. L'impression d'un traitement inégal réservé à des organismes pourtant semblables par leur objet tend à se diffuser.

C'est ainsi, par exemple, que ni la SIMKO, la société immobilière de Kourou qui, semble-t-il, a pourtant sollicité à plusieurs reprises le soutien du compte ni la société d'aménagement du département de la Guyane, en situation de redressement judiciaire (la SEMAGU), n'ont bénéficié des ressources du compte n° 902-23.

Il y a donc inévitablement un risque d'assimilation d'une gestion discrétionnaire à une gestion arbitraire qu'une meilleure information des partenaires locaux sur les conditions dans lesquelles les concours du compte peuvent être apportés permettrait sans doute d'atténuer.

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