8. Le débat élargi sur les activités de l'OCDE en 1995 - Exposé de M. Donald JOHNSTON, Secrétaire général de l'OCDE - Interventions de MM. Bernard SCHREINER, député (RPR), Claude BIRRAUX, député (UDF), Jean VALLEIX, député (RPR), et Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc.) (Mercredi 25 septembre)

Le débat élargi de cette année sur l'OCDE concerne les problèmes auxquels se heurtent de nombreux Etats membres de l'OCDE - notamment le fort taux de chômage et le nouvel ordre du jour du commerce à la suite de la création de l'Organisation mondiale du commerce.

Le rapport montre que la reprise économique tient bon dans certains pays tels que les Etats-Unis, alors qu'elle se ralentit, parfois considérablement, dans plusieurs pays d'Europe.

La croissance dans la zone de l'OCDE est descendue à 2 % en 1995, et elle devrait demeurer à ce niveau en 1996. L'inflation s'est maintenue à 3,3 % en 1995. Elle devrait descendre à près de 2,5 % en 1996. C'est toutefois le chômage qui constitue la principale préoccupation politique, surtout en Europe continentale.

Après l'adhésion de la République tchèque et de la Hongrie à l'OCDE, le rapport étudie les perspectives d'élargissement pour l'avenir. Il traite des relations de l'OCDE avec les économies dynamiques non membres ainsi qu'avec les pays d'Europe centrale et orientale et les nouveaux Etats indépendants.

M. Donald JOHNSTON, Secrétaire général de l'OCDE , intervient en ces termes :

" Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs les parlementaires, anciens collègues, je vous remercie des chaleureux souhaits de bienvenue que vous venez de m'adresser au moment où je prends la parole pour la première fois devant cette assemblée en qualité de Secrétaire général de l'OCDE.

" Bien que le thème de votre débat soit intitulé "Activités de l'OCDE en 1995", nous nous concentrerons sur l'avenir et non sur le passé. Je m'en réjouis  : ayant pris mes fonctions le 1er juin dernier, ma contribution aurait forcément été des plus modestes  ! Mais avant de vous faire part de ma conception de l'avenir de l'Organisation et des difficultés immédiates que l'OCDE et les responsables politiques que vous êtes doivent affronter, je voudrais vous dire en quoi nous avons des intérêts communs et, de fait, pourquoi nous devons mettre à profit nos expériences respectives pour aider les pays membres de l'OCDE à relever les enjeux socio-économiques à court, moyen et long termes auxquels nous sommes tous confrontés à l'aube du XXIe siècle. "

M. Johnston remercie la Présidente d'avoir bien voulu évoquer son passé de parlementaire et de ministre. Il dit l'honneur ressenti à servir ses concitoyens en respectant les exigences de la démocratie.

Les parlementaires sont aussi en première ligne dans ce débat. Ils doivent présenter à leurs électeurs un message qui n'est parfois pas conforme à celui qu'ils défendaient au cours de leur campagne électorale. Ils doivent par exemple promettre la croissance à long terme au prix de sacrifices immédiats. Alors qu'ils ont une expertise limitée, ils doivent se familiariser avec tous les aspects de la politique. En d'autres termes, ils doivent se conformer à la définition que donnait Keynes du professeur d'économie : il leur faut combiner les talents du mathématicien, de l'historien, de l'homme d'Etat et du philosophe  ; ils doivent comprendre les symboles tout en s'exprimant simplement, maîtriser le concret aussi bien que l'abstrait, examiner le présent à la lumière du passé pour préparer l'avenir, être à la fois passionnés et intéressés, incorruptibles comme des artistes et terre-à-terre comme des hommes politiques. Cette combinaison est à l'évidence rare et difficile.

L'OCDE pourtant la possède. Certes, elle n'est pas un homme d'Etat, mais c'est un forum pour les hommes d'Etat. Elle n'est pas un philosophe, mais elle défend une philosophie. Contrairement aux autres organisations, elle a une approche mondiale et pluridisciplinaire des problèmes, une vision à long terme, une vision intégrée. Et c'est en ce sens qu'elle peut être utile aux parlementaires. Instrument de la recherche politique, elle doit permettre aux Gouvernements de résoudre les problèmes qui se posent à eux. Les rencontres avec l'Assemblée favorisent ainsi une synergie utile.

M. JOHNSTON déclare encore :

" Avant d'examiner certains de ces enjeux, je voudrais rappeler la mission fondamentale de l'OCDE, telle qu'elle est définie dans sa Convention. Ses membres doivent se consulter et coopérer pour "réaliser la plus forte expansion possible de leur économie et améliorer le bien-être économique et social de leurs peuples". C'est ce que j'appelle le paradigme triangulaire constitué par la croissance économique, la stabilité sociale et la stabilité politique, un équilibre harmonieux devant s'instaurer entre ces trois éléments pour assurer le progrès social. Plus simplement, l'OCDE a pour rôle d'aider ses membres à maintenir cet équilibre dans leurs sociétés respectives et à veiller à l'équilibre du paradigme à l'échelle mondiale. Etant donné que 1,3 milliard d'individus vit dans les pays en développement avec moins d'un dollar par jour, le paradigme à l'échelle de la planète paraît être sérieusement déséquilibré  ! Ce défi reste le plus important et le plus ardu de tous, mais je voudrais aujourd'hui me concentrer essentiellement sur la situation des pays de l'OCDE.

" Je pense que nous risquons d'assister à une rupture de l'équilibre du paradigme, accompagnée d'une réaction de rejet de l'opinion publique à l'encontre des stratégies économiques qui ont été adoptées, à savoir : une politique macro-économique visant à s'attaquer aux déficits et à assurer la stabilité des prix grâce à une politique monétaire prudente  ; des réformes structurelles, notamment une réduction du rôle de l'Etat, la déréglementation et la privatisation ; et une libéralisation générale des marchés à l'échelle mondiale. Ces politiques, destinées à réaliser une croissance économique soutenue, sont considérées par les sceptiques comme en conflit avec le principe fondamental essentiel pour l'équilibre du paradigme, à savoir que toute politique économique conçue pour favoriser la croissance économique doit comporter des objectifs de politique sociale. Dans la course effrénée engagée pour corriger les déséquilibres provoqués dans le passé par l'intervention gouvernementale excessive prenant la forme de réglementations, du contrôle par l'Etat d'entreprises commerciales, de législations du travail restrictives, de prélèvements obligatoires trop lourds, de marchés intérieurs protégés et d'autres pratiques qui se sont conjuguées pour aggraver les déficits budgétaires et l'endettement public accompagnés d'une progression du chômage et d'un ralentissement de la croissance, les pouvoirs publics ont adopté des mesures correctives énergiques conformément aux recommandations de l'OCDE. Si l'OCDE est convaincue que ces réformes auront à terme d'importantes retombées économiques globales positives, cela ne satisfait pas dans l'immédiat un électorat mécontent comme en témoignent l'agitation sociale, les grèves et les mauvais indices de popularité ainsi qu'un manque général de confiance qui se traduit par un "sentiment de malaise". Il n'est tout simplement pas évident pour les citoyens ordinaires que ces choix économiques pénibles se traduiront par des avantages sociaux pour eux-mêmes et leurs familles.

" Que constatons-nous dans les pays membres de l'OCDE aujourd'hui qui conduise à cette conclusion  ? On oppose souvent la situation en Europe et la situation qui semble s'annoncer sous un jour nettement plus favorable dans certains autres pays de l'OCDE. Les perspectives à court terme dans de nombreux pays européens demeurent précaires avec des perspectives de croissance incertaines et la persistance d'un chômage élevé. Par contraste, les Etats-Unis connaissent actuellement une période de prospérité relative : la croissance de la production et de l'emploi paraît robuste, le chômage se situe à un bas niveau, il n'y a pas de signe de tensions inflationnistes et le déficit budgétaire est en voie de réduction. Dans une perspective à plus long terme, l'économie américaine a créé de nombreux emplois et évité le chômage élevé et en progression constante qui caractérise tant de marchés du travail européens. Le Japon a lui aussi évité un niveau de chômage élevé, et les graves tensions sociales que cela n'aurait pas manqué de provoquer dans la période actuelle de faible croissance de la production, essentiellement grâce à une rétention par les entreprises d'une main-d'oeuvre sous-utilisée.

" Bien entendu, il ne faut pas exagérer ces différences. D'autre part, un grand nombre de débats sur les politiques à suivre qui ont lieu actuellement en Europe ont leurs équivalents aux Etats-Unis et au Japon. A cet égard, je me bornerai à mentionner rapidement quelques exemples. Dans ces deux derniers pays, des préoccupations se font jour au sujet de la réforme budgétaire, des problèmes d'environnement et de la question primordiale qui est celle des moyens d'accélérer le rythme d'une croissance durable sur le long terme. La répartition des revenus constitue un motif de préoccupation particulier aux Etats-Unis. Un aspect très critiqué du marché du travail américain a trait à la forte augmentation de l'inégalité des salaires et des revenus  ; les revenus de ceux qui se trouvent au bas de l'échelle ont en fait diminué en termes réels. Il n'a pas échappé à l'attention des observateurs que l'évolution du marché du travail a suivi une tendance analogue au Royaume-Uni, où le chômage recule et où les inégalités de salaires et de revenus semblent se creuser.

" La question qui doit retenir notre attention aujourd'hui est celle de savoir comment régler les problèmes du chômage, de l'exclusion sociale et des disparités croissantes de salaires à la satisfaction d'une opinion publique de plus en plus sceptique dans les pays membres. En d'autres termes, comment l'OCDE peut-elle contribuer à rétablir l'équilibre du paradigme ? "

L'orateur souligne que l'organisation sociale varie d'un pays à l'autre : à l'évidence, les Etats-Unis n'obéissent pas au modèle européen de l'Etat-providence. Cependant, partout, on en est à une étape critique de la réforme économique  : les Gouvernements pourront-ils résister à la pression de plus en plus forte des électorats, pression qui pourrait remettre en cause une libéralisation des échanges, une mondialisation dont dépend la croissance, notamment dans les pays en développement  ? L'enjeu est considérable. De même, il va falloir s'attaquer à la disparité des revenus et des salaires entre travailleurs non qualifiés et travailleurs hautement qualifiés. Ces inégalités ne font que s'aggraver pour l'heure. Enfin, le vieillissement de la population dans les pays de l'OCDE ne pourra manquer d'influer sur le marché du travail et sur les systèmes de protection sociale.

Dans beaucoup de pays, certaines forces tendent à revenir en arrière pour renouer avec le protectionnisme des années 30. On cherche à réduire les déficits pour se conformer au traité de Maastricht, mais cette consolidation budgétaire a aussi l'avantage de réduire l'endettement et le poids de la fiscalité sur l'économie. Elle permettrait ainsi d'accroître les investissements et la productivité. L'OCDE a présenté des propositions pour chacun des pays membres : il s'agit de mesures propres à améliorer les performances économiques et la distribution des revenus, mais il s'agit de politiques macro-économiques ou structurelles à long terme et l'électorat n'est pas toujours patient. Reste que l'Organisation vise ainsi à aider les Etats à fixer le cap, à travailler au rétablissement de l'équilibre entre politiques économiques et politiques sociales, à redistribuer les bénéfices de la croissance de façon plus égale.

En conclusion, M. Johnston félicite M. Leers pour son rapport très complet et, en même temps, très lisible et très clair.

M. Bernard SCHREINER, député (RPR) , s'exprime sur ce thème de la façon suivante  :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, au nom du Groupe des démocrates européens, permettez-moi tout d'abord de féliciter M. Leers pour son excellent rapport et sa synthèse très lucide des problèmes économiques auxquels nous devons faire face.

" Je voudrais également saluer le nouveau Secrétaire général de l'OCDE, M. Donald Johnston, qui rend visite pour la première fois au Conseil de l'Europe et à cette Assemblée élargie. Permettez-moi d'exprimer le souhait, au nom de mon groupe, que, comme ce fut le cas durant le mandat de votre prédécesseur, M. Jean-Claude Paye, les relations entre cette Assemblée élargie et vous-même, Monsieur le Secrétaire général, soient excellentes et qu'elles s'approfondissent encore dans l'avenir.

" Comme M. le rapporteur l'a fort bien souligné dans son discours introductif, le monde économique actuel est un nouveau monde. Tout est à repenser : notre approche du travail et du chômage, du commerce, de l'émergence de nouvelles puissances économiques dans le monde, qu'elles soient en Asie du Sud-Est, en Amérique latine ou en Europe centrale et orientale. Nous, les pays de l'OCDE, nous ne devons pas nous reposer sur nos lauriers et penser que notre richesse passée est garante de notre richesse future. Nous devons absolument réformer nos économies presque aussi profondément que le font les pays en transition.

" La nouvelle civilisation qui se dessine semble malheureusement se fonder de plus en plus sur le profit, privilégiant ce qui est superficiel et plaçant la consommation au premier rang des valeurs.

" Tout comme le Conseil de l'Europe, l'OCDE doit nous permettre de clarifier la situation nouvelle dans laquelle nous nous trouvons, de réunir les pays membres autour d'initiatives et de propositions qui pourront être soumises à la nouvelle Organisation mondiale du commerce. Je souscris entièrement à l'avis exprimé par M. le rapporteur dans le paragraphe 58 de son exposé des motifs dans lequel il " souhaite ardemment voir le monde entier adopter de nouvelles normes de travail aptes à protéger les droits fondamentaux et le bien-être des travailleurs, en particulier les normes que certains pays de l'OCDE estiment fondamentales, c'est-à-dire liées aux droits de l'homme ". Que l'on insiste aussi sur les devoirs des travailleurs envers la société et que ceux-ci soient précisés  !

" En outre, je me rallie aux délégations canadienne, mexicaine et à d'autres membres de notre Assemblée élargie qui se sont déclarées opposées avec vigueur à la loi récemment adoptée aux Etats-Unis, visant à interdire le commerce d'autres pays de l'OCDE avec certains pays réputés " intouchables " par les Etats-Unis, tels que Cuba. La portée "extra-territoriale" de cette législation constitue une violation des droits de nos pays à exercer librement le commerce international.

" Cela est contraire aux principes de l'OMC et d'autres organisations internationales. J'espère que le moratoire déclaré récemment par le Président Clinton conduira dans les mois à venir, à l'annulation de cette législation qui va tout à fait à l'encontre de ce que nous sommes en droit d'attendre de nos amis américains.

" Nombreux sont les défis auxquels nous avons à faire face.

" Le dialogue entre le Conseil de l'Europe et l'OCDE prend d'ailleurs une tonalité nouvelle dès lors que l'Europe entend sauvegarder son modèle social.

" Nous pensons, en effet, que les droits sociaux sont parties intégrantes des droits de l'homme et qu'ils ne doivent pas être sacrifiés sur l'autel du libre-échangisme. Sans nier le rôle moteur du profit dans le développement économique, ni son importance pour assurer le progrès social, il convient néanmoins de rappeler l'importance des enjeux éthiques auxquels le Conseil de l'Europe est particulièrement attaché. Cela concerne notamment le secteur des médias où le profit ne doit pas occulter les risques que provoquent, par exemple, les excès de la violence sur la jeunesse.

" Je pense que nous devrions mettre à profit la cinquième conférence ministérielle sur la politique de communication de masse, qui aura lieu l'an prochain en Grèce, pour faire avancer les choses sur cet important sujet.

" Je souhaite également que les échanges entre l'OCDE et le Conseil de l'Europe soient plus approfondis dans le domaine social. Les domaines couverts par la Charte sociale du Conseil de l'Europe permettent, sans aucun doute, de renforcer la coopération entre nos deux institutions.

" Il faudrait de même développer la coopération dans le secteur de l'emploi, qui nécessite aujourd'hui des réflexions nouvelles. Dans l'élaboration de ses normes, le Conseil de l'Europe ne peut que bénéficier de l'apport technique et statistique de l'OCDE.

" D'une manière générale, l'OCDE a tout intérêt, me semble-t-il, à se référer aux normes et aux valeurs du Conseil de l'Europe, notamment à l'égard des pays d'Europe centrale et orientale, candidats à une meilleure intégration à l'Europe.

" Telles sont les observations qu'au nom du groupe des démocrates européens et en mon nom personnel, je souhaitais présenter à l'occasion de ce débat élargi qui souligne le rôle de l'Assemblée parlementaire en tant qu'interlocuteur des plus grandes organisations économiques et financières. "

Puis, M. Claude BIRRAUX, député (UDF) , prend la parole en ces termes :

" Permettez-moi tout d'abord de remercier et de féliciter notre rapporteur, je dirais même nos rapporteurs, le rapporteur de la Commission d'économie et permettez-moi de rajouter le rapport de M. Newall, de la Commission de la science et de la technologie, pour la présentation fort instructive de leurs rapports.

" J'aimerais me limiter à quelques remarques concernant la politique scientifique et la politique énergétique.

" Il est clair que les pays membres de l'OCDE concentrent l'essentiel des moyens humains et matériels de la politique de recherche et développement menée dans le monde. Je comprends que l'OCDE adapte les indicateurs à l'économie fondée sur le savoir.

" Premièrement, je pense que dans les processus d'innovations technologiques, l'irruption des technologies nouvelles a bouleversé les schémas traditionnels :

- ce sont des technologies finalisant des produits qui répondent aux besoins de la société et des consommateurs ;

- ce sont des technologies résultant de "l'hybridation" -au sens physique ou botanique du terme- de technologies existantes et connues.

" Leur importance va croissant, comme leur marché et leur influence sur le développement économique des nations qui ne sont peut-être pas encore bien mesurés. D'où la nécessité d'élaborer de nouveaux indicateurs. D'où la nécessité d'adaptation souple et rapide du système de formation et d'éducation.

" Je me permets de rappeler pour mémoire l'excellent rapport de notre collègue Lenzer adopté par notre Assemblée.

" Deuxièmement, les développements technologiques bouleversant les données de base des sociétés traditionnelles. L'interface entre la Science/la Politique et les Citoyens doit être organisée afin que dans les sociétés que nous voulons démocratiques, le citoyen soit informé des enjeux, des conséquences des choix afin que la politique définie par les Etats soit claire, transparente et motivée. Je sais que l'acceptation du public est un domaine traditionnel du travail de l'OCDE ; il ne doit pas être relâché, d'autant que de nouveaux membres arrivent venant des PECO. Pour certains d'entre eux, cette prise en compte de l'acceptation du public marque une rupture avec les schémas du passé. D'autre part, les élus politiques ne sauraient être des idéologues pures et doivent être à l'écoute des demandes sociales des citoyens et doivent être en mesure de leur expliquer la politique qu'ils conduisent.

" Troisièmement, l'adhésion de nouveaux pays, membres de l'ex-bloc de l'Est, marque les progrès remarquables accomplis par ces pays dans la réussite de la transition économique. Pour eux se pose le problème de le réorientation de leur potentiel scientifique et technologique vers cette économie fondée sur le savoir.

" Des coopérations bi ou multilatérales se sont développées. Je vous rappelle le rapport de la Commission de la science et de la technique adopté par notre Assemblée il y a quelques mois. Dans la droite ligne de ses conclusions, je me demande si l'OCDE ne pourrait être, ou créer en son sein, cet observatoire de la coopération scientifique et technique entre les Pays de l'Ouest et les PECO. Cette notion d'observatoire a été reprise lors de la Conférence de Varsovie organisée par la Commission des affaires économiques de notre Assemblée. C'est une idée communément admise et si vous me permettez cette comparaison triviale, je cherche en quelque sorte une "mère porteuse".

" Quatrièmement, dans le domaine énergétique, permettez-moi de citer comme bon exemple d'échange d'expériences le séminaire organisé en novembre 1994 à Prague sur l'information des élus et du public sur le nucléaire.

" La culture de sûreté, et la transparence dont elle est indissociable, sont les ingrédients incontournables d'une culture démocratique.

" L'action à entreprendre dans le domaine de l'efficacité énergétique, de la protection de l'environnement demeure gigantesque vers les PECO.

" Enfin, il semble que l'OCDE abandonne l'idée de la taxe sur le CO 2 , comme l'a souligné Lord Newall, alors qu'elle en avait été l'un des promoteurs, comme si l'effet de serre n'était qu'une idée passée de mode. Récemment, un groupe d'experts a relancé un avertissement sur les dangers de réchauffement de la planète.

" La Conférence de Rio n'était-elle qu'une agréable kermesse ? La météo de l'été 1996 était-elle déjà connue de l'OCDE en 1995 ou bien d'autres considérations ont-elles conduit l'Organisation à changer de discours ?

" En conclusion, je dirai que l'adhésion de nouveaux Etats à l'OCDE démontre les progrès réalisés par des pays dans la conduite des réformes économiques. Cette adhésion ouvre un champ de nouvelles coopérations entre les pays membres.

" Enfin, elle démontre que culture économique et culture démocratique sont ensemble la réponse à la question de l'avenir des sociétés post-communistes, comme de nos sociétés occidentales. "

M. Jean VALLEIX, député (RPR) , s'exprime à son tour en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, cette année encore, nous voici au rendez-vous de l'économie et du développement, que nous souhaitons, plus que jamais, associer à la promotion des droits de l'homme dans son acception la plus large, prenant en compte le droit au travail et à la protection sociale. Bravo d'ailleurs aux rapporteurs, tout spécialement à M. Leers, pour leur prestation !

" Je tiens à saluer, bien entendu, la présence parmi nous du nouveau Secrétaire général de l'OCDE, M. Donald Johnston, pour qui je forme, au nom de la délégation française, des vœux de plein succès. Sa tâche certes ne sera guère facile dans une période de profonde mutation qui remet en cause les fondements du modèle social européen auquel nous sommes, il est vrai, tous très attachés.

" C'est précisément l'intérêt de ce débat, Monsieur le Secrétaire général, que d'ouvrir un dialogue fructueux entre les parlementaires et l'exécutif de l'OCDE. A cet égard, comme vous le savez, nous avons engagé des dialogues avec la BERD, et pourquoi pas demain, avec la Commission économique de l'Europe.

" Ainsi, notre Assemblée du Conseil de l'Europe est-elle désormais la base parlementaire des institutions intergouvernementales comme la vôtre.

" Alors que votre prédécesseur, M. Jean-Claude Paye, avait eu la charge de gérer la période de la fin de la guerre froide, vous avez à conduire l'OCDE dans l'ère nouvelle qui s'amorce, aussi bien à l'Ouest confronté à d'indispensables adaptations qu'entraîne la globalisation des échanges, qu'à l'Est où doivent être consolidés les acquis de la période de transition vers l'économie de marché.

" Il s'agit, en effet, d'une tâche ardue, car la mondialisation de l'économie, comme l'évoquait l'orateur qui m'a précédé, présente de sérieux risques pour la cohésion sociale dans nos pays respectifs. C'est d'ailleurs un thème que le Président de la République, M. Jacques Chirac, évoquait récemment au plan international, ces derniers mois.

" Nous découvrons aujourd'hui que la croissance et l'emploi ne vont pas toujours de pair. L'excellent rapport de notre collègue M. Leers apporte une très utile contribution à notre réflexion. Je lui sais gré d'avoir souligné l'inquiétude que suscite la persistance du chômage, notamment dans notre zone OCDE-Europe qui, à elle seule, représente malheureusement les deux tiers du chômage total de la zone OCDE.

" Ce qui est en jeu aujourd'hui, mes chers collègues, c'est le maintien de la cohésion sociale et des solidarités essentielles face à une accélération des échanges et du progrès des technologies, que nous devons impérativement maîtriser, mais comment ?

" L'année dernière, j'avais évoqué le problème du développement des autoroutes de l'information, lequel demeure malheureusement, me semble-t-il, presque entier et se complique avec le développement fulgurant d'Internet.

" Si la France a fait valoir "l'exception culturelle", il faut bien se rendre compte, mes chers collègues, que cette exception concerne l'Europe tout entière face à la diffusion d'un modèle culturel dominant, s'appuyant sur des modes de consommation adaptés à la nouvelle dimension du marché mondial.

" La question se pose donc de savoir si, dans le domaine culturel, nous voulons transformer la planète simplement en un vaste supermarché qui privilégierait les consommateurs au détriment des citoyens, en observant d'ailleurs qu'ils sont parfois l'un et l'autre.

" Je pense pour ma part que l'économie doit, avant tout, avoir une finalité humaine et sociale. Cela a d'ailleurs été dit et répété, et nous ne pouvons que nous en réjouir. La France souhaite que la conférence ministérielle de l'OMC qui se tiendra à Singapour en décembre prochain, se traduise par des avancées significatives sur ce plan.

" Mes chers collègues, en ce qui concerne l'aide aux pays d'Europe centrale et orientale, nous ne pouvons que nous réjouir de l'action conduite par l'OCDE dans le cadre du programme "Partenaires pour la transition", lequel a certainement aidé à accompagner ces pays bénéficiant également d'autres appuis. Les résultats s'avèrent concluants, mais cette évolution positive des indices macroéconomiques ne doit pas cacher la disparité entre les différents pays et les déséquilibres sociaux importants dans chacun d'entre eux, liés à une transition souvent trop rapide.

" Pour conclure, je voudrais, bien entendu, évoquer les relations que nous devons veiller à renforcer entre l'Asie et l'Europe. Le sommet de Bangkok a été une étape décisive dans le rapprochement entre l'Europe et le continent asiatique.

" Je veux aussi évoquer la situation de l'Afrique qui -je vous cite, Monsieur le Secrétaire général- "n'encombre" pas spécialement nos réflexions. Elle pose pourtant des problèmes à la fois d'équité et de devoir universel et pourrait présenter demain, des risques si nous n'y prenions pas garde.

" Cela étant, mes chers collègues, permettez-moi de rappeler simplement en conclusion que nos actions économiques et financières n'ont de mérite qu'à condition qu'elles ne se départissent jamais de l'obligation fondamentale qui est d'abord la nôtre, pour chacun de nos concitoyens et nos pays en général -et ce dans cette conception universaliste de l'homme et de sa dignité- de ne jamais nous égarer dans nos réflexions économiques et financières sans privilégier le sens de l'homme. "

Mme Josette DURRIEU, sénateur (Soc.) , fait les observations suivantes :

" Monsieur le Président, après avoir remercié notre rapporteur, je reviendrai, moi aussi, sur les problèmes de l'homme et du travail.

" On peut produire plus en travaillant moins. Cela n'est pas nouveau, cela dure depuis l'Antiquité. Mais pour que le développement soit durable, le "travail libéré" doit être réorienté vers la création de nouvelles richesses et vers de plus fortes valeurs ajoutées.

" Le jeu économique simultané doit être un jeu à somme positive. Cela suppose au moins trois conditions : l'innovation, l'éducation, et la mobilité.

" Faute d'innovation, les emplois supprimés ne sont pas remplacés. A quoi serait due aujourd'hui cette absence d'innovation ? Deux causes peuvent être retenues : des taux d'intérêt élevés qui font que la spéculation l'emporte sur la production et des entrepreneurs aujourd'hui devenus d'abord des gestionnaires qui ont à se préoccuper davantage des risques et des coûts que de leur mission naturelle, à savoir entreprendre et innover.

" L'éducation est à la fois la cause et la conséquence de l'innovation. Plus une économie est évoluée, plus elle mobilise l'intelligence et crée des emplois à haute valeur ajoutée. Mais le pari de l'éducation n'est gagné que si l'économie fournit les emplois qualifiés, dégage des surplus et engage de nouveaux progrès. Or aujourd'hui, partout, dans nos pays, beaucoup de jeunes hautement qualifiés n'ont pas d'emploi ou se déqualifient pour obtenir un emploi. Ce n'est pas le travail qui est trop cher, c'est l'économie qui ne joue plus son rôle.

" La mobilité : pour un développement durable dans l'avenir, il faudra savoir et pouvoir changer d'emploi, voire de métier. Mais, et vous avez employé ce matin ce mot essentiel, Monsieur le Secrétaire général, il faudra que la confiance soit établie. Il faudra donc que nous arrivions à vaincre les peurs qui règnent.

" Dans ces conditions, j'ai envie de remettre l'homme au cœur de l'économie de marché, de ce système dont il est le pivot et pour lequel nous devons gérer toutes les finalités.

" Cinquante deux millions de pauvres en Europe, dix huit millions de sans emplois : la froideur des chiffres étale largement cette détresse.

" Tous les discours se rejoignent à un certain moment, mais le vôtre, Monsieur le Secrétaire général, s'est situé à partir de Keynes, entre le mathématicien et le philosophe, le passé et l'avenir.

" Vous avez insisté sur un élément essentiel qui est le long terme. Nous, dans l'immédiat, avons à gérer l'urgence, c'est-à-dire le court terme. Nous sommes tous d'accord pour donner la priorité à l'emploi. Mais si je parle de plein emploi, vous me répondrez immédiatement : non, c'est fini ! Est-ce vraiment fini, même pour le long terme ? Je ne veux pas l'envisager.

" Aujourd'hui, nous gérons et vous gérez le court terme, et vous dites : "le climat est hostile à l'emploi", et vous vous prononcez contre la rigidité, les pièges du chômage, de la pauvreté, de la fiscalité, le poids de la protection sociale. Par souci d'efficacité immédiate, vous dites : "dérégulation", "flexibilité", "réduction de la protection sociale".

" Là, nos philosophies divergent. On pense à deux philosophies alternatives, peut-être trois : modèle rhénan, oui, modèle anglo-saxon, non. Une troisième voie est à peine évoquée dans le rapport. Je ne sais pas quelles sont les normes minima que l'on nous proposerait, et je veux le savoir, en me rappelant que Ford disait : "Ce qui est bon pour moi est bon pour l'Amérique". Je n'en suis pas sûre. Au même moment, un prêtre ouvrier français, disait reprenant Lacordaire : "la liberté opprime, c'est la loi qui libère".

A la suite du débat élargi où se sont exprimés des délégués de pays membres de l'OCDE comme le Canada, l'Australie, le Japon, la Nouvelle Zélande ou le Mexique, la résolution n° 1100 contenue dans le rapport 7615 est adoptée à l'issue du débat, amendée.

9. L'Organisation mondiale du commerce et l'application des accords de l'Uruguay Round - Intervention de M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC) (Mercredi 25 septembre)

Les auteurs du rapport se félicitent de la création de l'Organisation mondiale du commerce et de sa mission, qui consiste à promouvoir " un système d'échanges commerciaux ouvert, multilatéral et mondial " qui puisse servir de " véhicule de paix et de prospérité pour toutes les nations ".

Ils examinent l'incidence que les accords de l'Uruguay Round, signés sous les auspices du GATT, auront sur le commerce mondial. Par ailleurs, ils invitent les Etats membres du Conseil de l'Europe à apporter leur soutien aux travaux de la réunion ministérielle prévue à Singapour vers la fin de l'année, dont le but est de consolider les acquis et de faire progresser les négociations dans de nouveaux domaines tels que les normes en matière de travail, les droits de l'homme et la protection de l'environnement.

Le rapport souligne les enjeux auxquels l'OMC se trouve confrontée, notamment l'accession de grands pays tels que la Russie et la Chine, ou encore le règlement des différents. Ses auteurs lancent un appel pour que davantage de travaux soient consacrés aux pays moins avancés qui ont des problèmes d'endettement et de ressources alimentaires.

M. Daniel HOEFFEL, sénateur (UC) , intervient dans le débat en ces termes :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, venant après notre discussion annuelle sur les activités de l'OCDE, le débat sur l'Organisation mondiale du commerce s'avère particulièrement opportun.

" Débat opportun, en effet, puisque s'ouvrira à Singapour le 9 décembre prochain la première conférence ministérielle de l'OMC.

" Et il est très souhaitable que la conférence ministérielle, qui doit se réunir tous les deux ans, soit véritablement l'organe de supervision de cet ensemble institutionnel et surtout qu'elle soit en mesure d'en assurer le contrôle politique. Nous attendons d'elle également qu'elle fasse évoluer progressivement les règles du commerce international, dans un esprit de concertation et de partenariat, afin d'éviter la dramatisation et les tensions auxquelles avait donné lieu dans le passé chaque cycle de négociation. Le maintien de la pratique du consensus est, me semble-t-il, de nature à favoriser les compromis positifs.

" L'extension de l'OMC est bien sûr à l'ordre du jour, en particulier la Chine et la Russie ont d'ores et déjà présenté leur candidature. Nous y sommes favorables, à condition que ces pays s'engagent à respecter effectivement les règles de l'OMC et renoncent à certaines pratiques en matière d'accès au marché, de propriété intellectuelle ou d'intervention de l'Etat dans le commerce.

" Tel qu'il a fonctionné jusqu'à présent, l'accord de Marrakech a entraîné une libéralisation maîtrisée des échanges internationaux, sans toutefois entraîner, et nous devons nous en réjouir, le bouleversement des échanges que certains redoutaient. Globalement, la structure des échanges, notamment avec l'Asie du Sud-Est, est demeurée stable.

" Il nous faut aujourd'hui aller plus loin et la Conférence de Singapour nous en donne l'occasion. Je rappelle que cette conférence sera la première conférence ministérielle de l'OMC et les décisions qu'elle prendra auront valeur de précédent.

" Nous espérons que la Conférence de Singapour permettra de consolider durablement le cadre multilatéral de l'OMC tout en apportant des réponses nouvelles à des préoccupations qui pour nous sont fondamentales : je veux parler des normes sociales du commerce international. Il est intolérable, en effet, que se poursuivent certaines pratiques, en particulier le travail des enfants dans les pays en développement et à forte croissance.

" Outre la question des normes sociales, il convient d'engager des discussions sur l'investissement afin de garantir une bonne protection pour nos investisseurs dans les pays qui émergent et qui ne seront pas parties à l'Accord multilatéral sur l'investissement.

" Une autre préoccupation est la multiplication des initiatives en matière de zones de libre-échange, avec les risques que cela comporte de créer une fragmentation commerciale.

" Quant aux pays d'Europe centrale et orientale, ils doivent affronter de redoutables défis liés aux difficultés de la période de transition. La Conférence sur les progrès des réformes économiques en Europe centrale et orientale, initiée à Budapest en 1991, et qui s'est une nouvelle fois tenue à Varsovie en mai dernier, a permis un utile débat sur la situation de ces pays et je me réjouis que nous ayons pu bénéficier à cette occasion du précieux concours de la Commission économique pour l'Europe des Nations Unies.

" S'agissant des réductions tarifaires prévues par l'Accord de Marrakech, il n'y a guère de raison de les accélérer.

" Enfin, nous souhaitons que la Conférence de Singapour puisse contribuer à clarifier et à coordonner les indispensables normes environnementales.

" Nous serons très attentifs aux décisions et aux orientations qui seront prises à Singapour, et, d'ores et déjà, nous devons nous préparer à la réflexion sur le suivi qui devra en être donné. "

La résolution n° 1101 contenue dans le rapport 7618 est adoptée à la suite d'un débat là encore élargi à des délégués Australiens, Canadiens et Mexicains.

10. Le projet de convention sur les droits de l'homme et la biomédecine - Interventions de MM. Christian DANIEL, député (RPR), rapporteur pour avis de la Commission des questions sociales, de la santé et de la famille, Jean VALLEIX, député (RPR), Bernard SCHREINER, député (RPR), Jean-François LE GRAND, sénateur (RPR) - Amendements de MM. Nicolas ABOUT, sénateur (Ap. RI), Gabriel KASPEREIT, député (RPR), et Michel ALLONCLE, sénateur (RPR) (Jeudi 26 septembre)

L'Assemblée examine, en seconde lecture, le projet de convention de bioéthique (rebaptisée " Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine ").

La nouvelle rédaction soumise à l'Assemblée respecte la philosophie des propositions d'amendements formulées précédemment par l'Assemblée. Selon le rapporteur, une des préoccupations majeures de l'Assemblée, la question du " consentement ", et en particulier, la protection des personnes qui n'ont pas la capacité de consentir, y trouve une réponse satisfaisante. Par ailleurs, la nouvelle disposition qui confie à la Cour européenne des droits de l'homme le soin de l'interprétation de la Convention constitue une sauvegarde supplémentaire.

De l'avis du rapporteur, ce texte constitue aujourd'hui le meilleur consensus possible à l'échelle européenne et pourra servir de modèle pour les législations nationales.

Il estime cependant que l'article 12 (tests génétiques prédictifs) doit être renforcé pour empêcher la communication des résultats de ces tests à des fins autres que médicales.

Le projet d'avis soumis à l'Assemblée propose ainsi au Comité des ministres d'amender la Convention sur ce point, puis de l'adopter avant la fin de l'année, sans le renvoyer au Comité directeur de Bioéthique. Il propose également l'adoption d'un calendrier pour l'élaboration des protocoles que le Comité des ministres a chargé le CDBI de préparer (génétique, transplantation d'organes, recherche médicale et protection de l'embryon).

L'Assemblée demande que les projets de ces protocoles lui soient soumis pour avis le moment venu.

Deux autres rapports seront présentés à l'Assemblée, portant avis sur le nouveau projet de convention : l'avis présenté par la Commission des questions juridiques et des droits de l'homme et l'avis présenté par Christian DANIEL, député (RPR), au nom de la Commission des questions sociales et de la santé.

Ils proposent d'autres amendements.

Les propositions d'amendement présentées par le rapporteur concernent la primauté de la dignité et des droits de l'être humain sur les intérêts de la société ou de la science (art. 2), l'obligation de toutes les parties contractantes de se donner les moyens de mettre en oeuvre les dispositions de la Convention (art. 1), la communication des résultats des tests génétiques (art. 12), les interventions sur le génome humain (art. 13), l'interdiction absolue de la création d'embryons humains aux fins de recherche et de la recherche sur des embryons humains vivants (art. 18), et la garantie pour l'Assemblée de participer à la rédaction d'amendements à la convention ou des protocoles.

L'avis présenté par Christian DANIEL est favorable au projet de convention qui est tout à fait dans la ligne de la législation française.

M. Christian DANIEL, député (RPR), rapporteur pour avis de la Commission des questions sociales, de la santé et de la famille , fait les observations suivantes en présentant son rapport écrit :

" Madame la Présidente, mes chers collègues, nous sommes pleinement conscients que dans les vingt dernières années, les progrès de la médecine ont été prodigieux. En effet, la vie peut désormais être donnée en dehors du processus naturel, notamment au travers de la procréation naturelle assistée ; la vie peut désormais être secourue au moyen de transplantations de tissus et d'organes ; la vie peut être modifiée avec les thérapies géniques.

" Ces avancées de la médecine ont déjà conduit de nombreux Parlements de nos Etats membres à fonder et à inscrire ces progrès en raison et en droit.

" A son tour et parallèlement, le Conseil de l'Europe s'est légitimement saisi de ce dossier. Il l'a fait après une longue réflexion et avec persévérance. Je tiens d'ailleurs à saluer notre collègue Palacios qui a porté ce dossier pendant de longues années. Grâce au bon héritage qu'il a reçu, M. Plattner peut aujourd'hui nous présenter une convention-cadre qui n'est certes pas un aboutissement, mais qui permettra au Conseil de l'Europe d'adopter une convention qui pourra être déclinée dans nos différents Etats membres.

" Je tiens à féliciter M. Plattner, rapporteur de la Commission de la science et de la technologie pour l'excellent travail qu'il a effectué depuis ces derniers mois en comparant le nouveau texte de projet de convention avec l'ancien texte, à la lumière des propositions d'amendements déjà faites par l'Assemblée parlementaire, notamment dans son avis du 2 février 1995.

" Le tableau comparatif contenu dans son avis facilite la lecture du texte et permet de vérifier que le texte modifié répond en grande partie aux préoccupations de l'Assemblée.

" Je partage le souci du rapporteur de voir réintroduire -car il était là précédemment- l'article sur la communication des résultats des tests prédictifs des maladies génétiques, ainsi que l'amendement qui a été proposé et dont nous avons encore discuté, ce matin, en Commission.

" Je le répète, cette convention-cadre n'est pas un aboutissement. Elle comporte encore assurément de nombreux points d'interrogation, dont un point qui est crucial à nos yeux, le point relatif aux problèmes des embryons. La discussion sur les embryons ne doit pas se limiter à la recherche. Se pose bien aujourd'hui le problème du statut de l'embryon.

" A ce sujet, dans des Etats membres de notre Assemblée, des décisions récentes ou des discussions législatives peuvent éclairer notre débat. La décision du Gouvernement britannique d'ordonner la destruction d'embryons a suscité une polémique et ranimé la discussion en France. La loi française de 1994 sur la bioéthique n'a pas apporté non plus de solution.

" S'agissant du statut des embryons, je livrerai aujourd'hui deux informations au Conseil de l'Europe. En décembre prochain, vous l'avez dit, Monsieur Plattner, se déroulera à Strasbourg un symposium placé sous l'autorité du Conseil de l'Europe, dont l'ordre du jour comportera la nature et le statut de l'embryon, ce qui ouvrira à nouveau des perspectives pour les années futures.

" Parallèlement, le Comité directeur pour la biotechnique, dont nous pouvons saluer également le rôle de partenaire, est bien chargé par le Comité des ministres d'élaborer un protocole sur la protection de l'embryon et du tissu. En effet, aujourd'hui, l'article 18 se limite simplement à empêcher la constitution d'embryons humains aux fins de recherche.

" En conclusion, mes chers collègues, cette convention-cadre sur les droits de l'homme et la biomédecine est très attendue de nos concitoyens. De nombreux sondages l'attestent. Elle permettra de renforcer la confiance des personnes et des familles dans leur médecin et dans les progrès de la médecine. En votant favorablement cette convention-cadre, vous manifesterez également votre confiance dans les progrès de la médecine et des médecins. "

Dans le débat qui suit, M. Jean VALLEIX, député (RPR) , prend la parole en ces termes  :

" Je me réjouis, comme nombre d'entre vous, de l'élaboration par le Conseil de l'Europe d'une convention posant les règles fondamentales du développement de la biomédecine. Notre organisation est là tout à fait dans son rôle, nous l'évoquions hier et avant-hier et je parlais alors de vocation.

" Notre rôle, notre vocation, notre mission consistent à définir un socle de valeurs permettant à notre idéal humaniste commun d'inspirer, demain comme hier, les adaptations de la législation au développement des sciences. Cette fidélité à notre idéal humaniste est particulièrement de rigueur quand il s'agit d'encadrer les sciences qui touchent à la vie humaine.

" Nous sommes tous stupéfaits et souvent émerveillés par les possibilités que nous offre les progrès de la médecine moderne, mais nous devons être d'autant plus exigeants quant aux orientations de ces progrès. Il ne s'agit pas de laisser libre cours aux tentations futuristes et aventuristes. Il s'agit au contraire de subordonner les acquis de la médecine moderne au bien de l'homme et, en particulier, au respect dû aux plus vulnérables, et je pense aux personnes juridiquement qualifiées d'"incapables". Je pense également aux embryons dont nous savons désormais obtenir la conception in vitro . Cela vient d'être rappelé à l'instant.

" Si j'ai tenu, mes chers collègues, à rappeler dans quel esprit nous devons, me semble-t-il, élaborer une convention pour toute l'Europe, c'est parce que je me demande si le texte qui nous est soumis par le Comité des ministres est bien à la hauteur des enjeux. En effet, je ne partage pas, et je le regrette, ce qui est exprimé dans le paragraphe 4 du projet d'avis. On nous invite, en effet, à déclarer que "l'Assemblée considère que le nouveau projet est un texte cohérent et équilibré".

" Les corrections apportées vont heureusement tout à fait dans le bon sens. Je me bornerai donc à relever les nouvelles dispositions relatives à l'expérimentation sur les embryons. Je constate qu'elles paraissent en retrait par rapport à celles dont nous avions délibéré en février 1995.

" Notre rapporteur -et je félicite d'ailleurs tous les rapporteurs pour cette réflexion, certes, difficile mais nécessaire et qui s'oriente dans le bon sens- qualifie les embryons de morituri sur lesquels la recherche serait permise sans autre restriction que celle d'une "protection adéquate" laissée à l'appréciation de chaque loi nationale !

" Encore une fois, je suis au courant de l'évolution des travaux de la Commission et si je trouve indigne de notre Assemblée d'avaliser une formule parfaitement vide, sans aucune portée normative dans un domaine où précisément un encadrement est nécessaire, j'espère que nous pourrons, en fin de journée, constater que l'évolution va dans le bon sens.

" Sans doute nous dit-on que les Etats qui veulent aller plus loin pourront s'engager dans un protocole plus protecteur des embryons. Soit, mais alors, qu'est-ce qu'une convention censée définir un socle minimum de règles qui ne serait qu'un alignement pseudo-juridique sur les faits ?

" C'est pourquoi, mes chers collègues, je ne pourrai pas apporter mon suffrage à un projet d'avis valant accord avec une convention qui éluderait une exigence de protection essentielle. Au surplus, je pense que ce serait un mauvais signal que nous donnerions là aux Etats européens qui ne se sont pas encore dotés de législation en la matière, surtout aux Etats extra-européens qui nous verront, à juste titre, infidèles aux valeurs humanistes qui ont fait la force de la civilisation européenne. Nous devons donner un signal, mais un bon signal.

" Au travers des précisions de ce matin, nous allons, en effet, dans le bon sens, mais je subordonnerai mon vote à la prise en compte de plusieurs des observations ainsi faites, en particulier de notre collègue M. Daniel, au nom de la Commission des questions sociales, de la santé et de la famille, et à l'adoption des amendements qui, comme ceux de notre collègue M. About, bien entendu, mais d'autres également, visent notamment à rétablir dans le texte de la convention l'interdiction de recherche sur les embryons, la protection des personnes dites incapables, c'est-à-dire des plus faibles.

" Je souhaite, mes chers collègues, que nous puissions voter sur un texte qui marque un choix responsable et pas simplement une sorte d'abandon à la situation du moment. Il s'agit, mes chers collègues -n'est-il pas vrai ?- de notre conception de la dignité de l'homme. "

M. Bernard SCHREINER, député (RPR) , intervient à son tour de la façon suivante :

" Madame la Présidente, mes chers collègues, on nous appelle pour la seconde fois à donner un avis sur le projet de convention relatif à la biomédecine. Je voudrais féliciter nos rapporteurs pour le travail approfondi auquel ils se sont livrés, sur un texte particulièrement complexe.

" De même, je pense que nous devrions exprimer au Comité des ministres notre satisfaction d'être à nouveau consultés, comme nous l'avions demandé lors de notre première délibération en février 1995.

" Cependant, le texte qui nous est à nouveau soumis me paraît encore perfectible, et je souhaiterais pour ma part, qu'il y ait encore un échange entre le Comité des ministres et notre Assemblée avant que ne soit arrêté le texte définitif de la convention.

" Le texte que l'on nous demande d'approuver aujourd'hui n'a-t-il pas pour titre : "Convention pour la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine" ? Or, sommes-nous bien sûrs que le texte actuel répond à cet intitulé ambitieux ? En particulier, assure-t-il la protection des droits de l'homme et la dignité de l'être humain ?

" Je pense pour ma part, malheureusement, que cette protection est encore bien insuffisante dans le projet actuel de convention.

" Je dirai même que le compromis qui nous est soumis, est, sur certains points, en retrait par rapport au projet qui nous avait été présenté initialement en février 1995.

" Le rapporteur nous avertit que ce texte "représente le degré optimum de consensus européen qui soit possible à l'heure actuelle". Certains pensent sans doute que mieux vaut ce consensus minimum que pas de convention du tout. A mon sens, en cette matière qui met en jeu des positions de principe, ce choix n'est pas acceptable.

" Je prendrai l'exemple de la recherche expérimentale sur les embryons.

" Le rapporteur, dans son exposé des motifs, nous indique que "ce sujet a donné lieu, en plusieurs occasions, à un débat passionné au sein de l'Assemblée" et il nous présente l'autorisation d'utilisation pour la recherche comme ne devant pas "susciter d'objections" ; le rapporteur précise même que "cette position est éthiquement correcte et prend aussi en considération la situation de fait dans plusieurs pays".

" On nous propose donc rien de moins que d'aligner le droit sur le fait, c'est-à-dire de modeler la convention qui devrait fixer des règles minimales sur l'anarchie qui règne en cette matière sensible dans certains Etats dépourvus de toute réglementation.

" Je ne peux non plus souscrire au dispositif qui prétend encadrer "les expériences menées sur les mineurs ou d'autres sujets incapables".

" Je participe activement, en tant qu'élu, à la gestion d'établissements hébergeant de telles personnes, notamment des malades mentaux. Je demande donc que la convention, selon son titre même, leur assure une protection réellement compatible avec "la dignité de l'être humain".

" Peut-on accepter, comme le suggère le paragraphe 22 de l'exposé des motifs, que des expériences soient menées "sur des mineurs ou des sujets incapables" atteints "de myopathie infantile ou de certains troubles mentaux", sous la seule condition de l'autorisation de leurs représentants légaux et d'un éventuel bénéfice pour "les progrès dans la lutte contre certaines maladies" ? Selon la formulation de ce commentaire, il s'agirait d'un bénéfice scientifique général, sans égard pour l'intérêt particulier de ces pauvres sujets d'expérience.

" Aussi, comme nombre de mes collègues, je ne peux approuver le projet d'avis qui avalise un texte aussi peu protecteur des plus faibles. Je souhaite vivement que soient adoptés les amendements que nous proposent MM. Schwimmer, Daniel, About et nos différents collègues, soucieux, comme moi, de renforcer la protection des personnes et, avant tout, des plus vulnérables.

" C'est à cette seule condition que je pourrai souscrire à un avis amendé. "

M. Jean-François LE GRAND, sénateur (RPR) , intervient à son tour en ces termes  :

" Madame la Présidente, mes chers collègues, Rabelais, qui était médecin, ne l'oublions pas, et aussi un grand humaniste, a dit : "Science sans conscience n'est que ruine de l'âme" . Cette maxime est évidemment d'autant plus vraie aujourd'hui que le développement des sciences, et de la médecine en particulier, nous ouvre des perspectives vertigineuses.

" S'il n'est pas question de modeler uniformément les consciences qui régissent le progrès scientifique, en revanche, il est essentiel de fixer des règles minimales communes. C'est essentiel pour éviter un détestable tourisme vers les pays les "moins-disants" en matière d'éthique.

" Si, par hypothèse, un pays tolérait n'importe quelle pratique en matière de greffes, d'assistance à la procréation, voire d'expérimentation sur l'embryon, la tentation serait forte de voir se diriger ce que je n'ose appeler une clientèle vers ces offres sans concurrence.

" Si le dumping social est déjà critiquable, que dire d'un dumping éthique ? Ce serait odieux.

" Aussi, je voudrais insister, mes chers collègues, sur la responsabilité qui est la nôtre. Nous devons fixer les règles minimales de la biomédecine à un niveau d'exigence conforme à l'idéal que partagent nos pays depuis deux millénaires.

" Il me semble que nous ne saurions nous contenter du projet d'avis que notre rapporteur nous propose d'adopter.

" En effet, notre rapporteur lui-même ne nous indique-t-il pas que : "une fois adoptée, la Convention servira de référence universelle et incitera plusieurs Etats à atteindre et dépasser les normes qui y sont contenues" . Je ne pourrai considérer que cette Convention peut constituer une référence universelle que si notre avis comporte bien les amendements déposés par notre collègue, M. Schwimmer, au nom de la Commission des questions juridiques et des Droits de l'Homme, ainsi que les amendements déposés par nos collègues,  Mme Terborg et M. Haack, nos collègues About, Kaspereit et Alloncle, et enfin M. Figel et ses co-signataires.

" Mon vote final dépendra donc de l'adoption de ces amendements au projet d'avis et je souhaite par conséquent que notre Assemblée soit reconsultée sur le texte finalement arrêté par le Comité des ministres.

" Sans doute cette procédure itérative paraîtra-t-elle un peu longue, mais on ne met pas en chantier une convention sur la bioéthique tous les deux ans et si ce texte doit, en effet, servir de "référence universelle", il convient d'en peser soigneusement tous les termes. "

M. Nicolas ABOUT , sénateur (Ap. RI) , prend la parole dans la discussion des amendements pour s'opposer à une proposition de prohibition totale de recherche ou d'essai thérapeutique concernant une personne juridiquement incapable :

" Monsieur le Président, mes chers collègues, c'est en ma qualité de médecin et de parlementaire que je m'exprime. Cet amendement me révolte ! C'est l'opposé de la liberté consentie à une personne dans l'incapacité de donner son consentement. Il me paraît absolument scandaleux que l'on puisse refuser une chance à un malade. Il appartient bien entendu à ceux qui en sont responsables de s'assurer que la chance est réelle. C'est ce que nous examinerons dans l'amendement suivant.

" Mais comment oserions-nous, nous, politiques, considérer que quelqu'un qui ne peut exprimer son consentement n'a pas les mêmes droits que les autres, c'est-à-dire le droit d'améliorer sa santé et de voir sa situation - souvent extrême - évoluer ? Il s'agit de gens qui ne peuvent exprimer leur consentement : peut-être y a-t-il coma ? D'autres personnes que les handicapés sont concernées. Comment voulez-vous interdire à ces individus d'avoir accès au meilleur de la recherche, éventuellement aux meilleures thérapeutiques ?

" Le médecin et le parlementaire que je suis vous demande de refuser cet amendement ".

Le rapporteur de la Commission ayant déclaré partager l'avis de M. Nicolas About, la proposition d'interdiction est rejetée par l'Assemblée.

Puis, l'Assemblée débat de l'amendement, présenté par MM. Nicolas About et Michel Alloncle, qui vise à préciser que ces recherches et essais concernant des personnes incapables doivent comporter un bénéfice réel et direct pour la santé.

M. Nicolas ABOUT défend l'amendement déposé avec M. Michel ALLONCLE, sénateur (RPR), en ces termes :

" Même si je suis favorable à la recherche, je ne suis pas innocent et le texte de la convention me donne satisfaction parce que je compte sur la responsabilité de chacun. Mais après discussion avec l'association UNAPEI, j'ai déposé l'amendement pour que le bénéfice soit "réel" et "direct" pour la santé. En tant que médecin j'ai eu à manipuler beaucoup de médicaments, j'ai eu à pratiquer un certain nombre d'interventions chirurgicales, et je sais les abus. Je souhaite donc que la mention de "réel" soit adjointe au mot "bénéfice" afin de rassurer les familles de ces personnes dans l'impossibilité d'exprimer leur consentement ".

M. ROSETA , Président de la Commission, déclare alors :

" C'est avec beaucoup de satisfaction que la Commission a approuvé à l'unanimité cette proposition d'amendement de M. About qui renforce ce qui était dans le projet et le renforce très bien. Je vous demande d'adopter aussi cet amendement. "

A la suite de ces observations, l'amendement est adopté à l'unanimité.

M. Nicolas ABOUT prend à nouveau la parole, cette fois pour marquer des réserves à l'égard d'un amendement qui part d'un bon sentiment mais il institue une limitation dangereuse, en prohibant toute recherche sur l'embryon :

" Bien sûr la constitution d'embryons humains aux fins de recherche doit être interdite, c'est évident, j'approuve. Par contre, je ne peux pas approuver, ou alors je nie ma vie de médecin et la vie de beaucoup de chercheurs que la recherche sur des embryons humains vivants soit interdite. C'est stupide, si l'embryon lui-même peut en tirer bénéfice ? Là encore, pourquoi laisser se développer un embryon dans des conditions déplorables si l'on peut intervenir et si une recherche ou une vérification peut permettre d'intervenir à son profit. C'est maintenant très souvent fait sur le fœtus. Cela sera fait demain sur l'embryon dans l'intérêt du fœtus, puis de l'enfant - parce qu'à ces stades-là, ça ne veut rien dire puisque tout est continu.

" Je vous demande de refuser cet amendement, non pas pour me donner la satisfaction de proposer le mien, mais parce que je crois que la rédaction que nous avons proposée avec M. Kaspereit correspond à l'esprit de l'amendement que nous discutons répond peut-être mieux aux exigences de notre temps ".

De fait, l'amendement prohibant de façon générale et absolue toute recherche sur l'embryon est rejeté par l'Assemblée.

L'Assemblée débat alors de l'amendement déposé conjointement par MM. Nicolas ABOUT, sénateur (RI), et Gabriel KASPEREIT, député (RPR) , visant, dans le projet d'avis à insérer un nouvel alinéa rédigé comme suit :

" amender le projet de convention en rédigeant ainsi l'article 18 - recherche sur les embryons in vitro :

- la recherche sur les embryons in vitro n'est admise que dans l'intérêt de leur développement. Elle peut toutefois porter sur le diagnostic des maladies les plus graves ;

- la constitution d'embryons humains aux fins de recherche est interdite."


M. Nicolas ABOUT , pour soutenir cet amendement a fait les observations suivantes  :

" Mon amendement reprend partiellement un amendement de M. Schwimmer, puisqu'il indique que "la constitution d'embryons humains aux fins de recherche est interdite". Nous sommes entièrement d'accord sur ce point.

" J'ajoute simplement que "la recherche sur les embryons in vitro n'est admise que dans l'intérêt de leur développement", c'est-à-dire pour aboutir à la maturité, à l'évolution normale de l'embryon vers le fœtus et vers l'enfant - et non pas, bien entendu, vers tout autre développement.

" Naturellement, cette recherche doit porter sur le diagnostic des maladies les plus graves, faute de quoi elle n'aurait aucune raison d'être. "

Recueillant l'avis favorable de la Commission, l'amendement est adopté par l'Assemblée.

MM. Nicolas ABOUT, sénateur (Ap. RI) et Michel ALLONCLE, sénateur (RPR) , ayant déposé un amendement afin, dans le projet d'avis, d'ajouter un nouvel alinéa visant à encadrer les recherches et essais intéressant des mineurs en disposant que :

" L'autorisation prévue aux paragraphes 2 et 3 de l'article 6 a été donnée spécifiquement et par écrit, selon la loi et en accord avec l'autorité judiciaire chargée de la protection de l'enfance. "

M. Nicolas ABOUT , pour soutenir cet amendement, a formulé les observations suivantes :

" Il nous est apparu particulièrement dangereux de laisser à l'autorité la possibilité d'intervenir pour des prélèvements d'organes sur quelqu'un ne pouvant donner son consentement, en particulier s'il s'agit d'un membre de la famille.

" C'est pourquoi nous proposons, pour protéger cette personne et ne pas la soumettre au risque d'un conflit d'intérêts, c'est-à-dire, par exemple, aux mains d'un parent qui, ayant à choisir entre un enfant souffrant d'un mal pouvant être soigné par une transplantation, pourrait être tenté d'autoriser ce prélèvement sur l'autre enfant. Il faut donc transférer cette autorité et indiquer que "l'autorisation prévue (...) doit être donnée, spécifiquement et par écrit, selon la loi et en accord avec l'autorité judiciaire chargée de la protection de l'enfance. "

Le Président de la Commission ayant déclaré : " C'est encore un amendement que nous avons adopté à une très large majorité et qui enrichit grandement le texte ! "

L'amendement est adopté à l'unanimité par l'Assemblée.

Au terme du débat, l'avis n° 198 contenu dans le rapport 7622 est adopté, amendé .

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