2. Une nécessité économique

A niveau de ressource équivalent, il n'est pas neutre pour une collectivité de bénéficier de transferts de l'Etat plutôt que de ressources fiscales.

Le système actuel de financement des collectivités à la fois par des dotations de l'Etat et par des ressources propres, fiscales notamment, est protecteur pour les collectivités locales car il leur permet d'avoir des ressources d'origines différentes, dont le montant ne fluctue pas en fonction des mêmes paramètres. Lorsque l'Etat connaît une situation budgétaire tendue, les collectivités peuvent s'ajuster en maîtrisant leurs dépenses mais aussi en recourant à la fiscalité. Lorsque les bases augmentent faiblement en raison de la conjoncture économique, les concours de l'Etat, qui progressent de manière relativement stable, jouent un rôle contra-cyclique efficace. La complémentarité des modes de financement des collectivités locales est donc source de sécurité pour les budgets locaux.

La fiscalité locale est source de dynamisme économique , puisque l'augmentation des bases qui résultent de la mise en oeuvre des politiques locales (constructions de logements, attraction d'entreprises, etc.) permet d'intéresser les collectivités au succès de leurs actions. Il peut en résulter une baisse des taux d'imposition puisque les bases augmentent.

L'existence de ressources propres dont les collectivités déterminent le montant leur permet de s'administrer de manière plus libre puisqu'elles sont à même de mobiliser les ressources nécessaires au financement d'action qu'elles jugent prioritaires.

Les collectivités ne financent évidemment pas la totalité de leurs investissements par des hausses d'impôts mais, comme le souligne notre collègue député René Dosière, " le pouvoir fiscal donne à la collectivité une plus grande capacité d'endettement et donc de programmation de ses dépenses d'investissement ". Cette analyse est corroborée par les critères utilisés par les agences de notation financière, dont le rôle est de déterminer la capacité des collectivités locales à rembourser leur dette : " la flexibilité fiscale étant une variable d'ajustement très importante en cas de tensions financières, elle représente un facteur d'analyse majeur et peut avoir une influence significative sur les notes attribuées par Standard & Poor's " 363( * ) .

En d'autres termes, si l'existence d'une fiscalité locale est importante dans la mesure où une collectivité doit pouvoir mobiliser des ressources soit pour financer une action prioritaire ou pour faire face à ses engagements financiers, il convient que la pression fiscale soit modérée de manière à pouvoir utiliser l'impôt lorsque c'est nécessaire. La fiscalité locale constitue donc une puissante incitation à une gestion locale prudente et responsable, puisque de faibles taux d'imposition ne peuvent être durablement atteints que par la maîtrise des dépenses de fonctionnement.

Plus généralement, l'intérêt économique de l'existence d'une fiscalité directe locale a été bien résumée par l'OCDE, dans les termes suivants 364( * ) :

" La responsabilisation des collectivités locales - Dans un contexte décentralisé, les niveaux d'administration locaux doivent financer leurs actions par des ressources locales, et essentiellement fiscales. L'obligation de maintenir ou d'augmenter la base fiscale est une forme d'incitation à la mobilisation locale en faveur du développement économique. Des attitudes malthusiennes des collectivités locales face au développement d'activités économiques, comme par exemple un faible intérêt pour l'aménagement de zones d'activités et une préférence pour une activité résidentielle, cèdent le pas à de véritables stratégies de croissance économique. Un élu local dont les ressources se composent essentiellement de subventions centrales se trouve placé dans la position d'un quémandeur ; un élu local responsable des rentrées fiscales devient un acteur du développement. "

La fiscalité locale renforce l'initiative locale

Lorsque, dans les observations qu'il a présentées à la suite de la saisine du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 1999, le Gouvernement estime que " la libre administration repose essentiellement, pour être effective, sur la libre dispositions des sommes nécessaires à l'exercice de leurs compétences par les collectivités locales ", il raisonne comme si les collectivités étaient des services déconcentrés de l'Etat ou des préfets auxquels on confie des enveloppes de crédits globalisées.

Or, la gestion locale ne se résume pas à la mise en oeuvre de politiques décidées par l'Etat, mais implique l'élaboration de stratégies territoriales qui nécessitent de pouvoir moduler le montant des recettes en fonction des priorités du moment.

La fiscalité locale est la contrepartie de l'interdiction des déficits de fonctionnement

Les raisonnements de l'Etat en matière de libre administration des collectivités locales témoignent des libertés que prennent les Gouvernements successifs avec les règles de gestion comptable.

L'Etat emprunte pour financer ses dépenses de fonctionnement, pour payer ses fonctionnaires par exemple. Dans la loi de finances initiale pour 2000, le déficit de la " section de fonctionnement " du budget de l'Etat s'élevait à près de 50 milliards de francs.

La loi interdit de telles largesses aux collectivité locales. Par conséquent, la fiscalité doit pouvoir jouer le rôle de variable d'ajustement des budgets locaux et financer leurs dépenses obligatoires lorsque les dotations reçues ne permettent pas de couvrir les dépenses.

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