Mercredi 30 janvier 2008

- Présidence de M. Philippe Marini, président, puis de M. Gérard Miquel, vice-président -

Audition de M. Daniel Lenoir, directeur général, et Mme Isabelle Millet-Caurier, directeur du service des affaires publiques, du groupe mutualité française

Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la mission a tout d'abord entendu M. Daniel Lenoir, directeur général, et Mme Isabelle Millet-Caurier, directeur du service des affaires publiques, du groupe mutualité française.

A titre liminaire, M. Philippe Marini, président, a constaté que la mutualité française est doublement concernée par le dossier de la dépendance, puisqu'elle gère des maisons de retraite en plus de son activité dans le domaine assurantiel. Puis il a souhaité savoir comment cet acteur majeur de la protection sociale perçoit la spécificité de ce risque et quels sont, à ses yeux, les mécanismes à envisager pour assurer le développement du marché de l'assurance dépendance. Après avoir souligné l'ampleur des dépenses fiscales dont bénéficie aujourd'hui l'épargne investie en assurance vie, il a souligné que la mission d'information doit, dans ce domaine également, se fixer pour ambition de rechercher les meilleurs compromis possible.

M. Daniel Lenoir, directeur général, a tout d'abord considéré que la mutualité française constitue un mouvement social ayant vocation à conjuguer l'esprit de responsabilité avec le principe de solidarité, ce qui l'a conduite à formuler des propositions allant dans le sens de l'intérêt général. La fédération de la mutualité française regroupe des mutuelles et des unions exerçant leurs activités, d'une part, dans le domaine sanitaire et social, d'autre part, dans celui de l'assurance au sens des directives européennes, conformément respectivement aux dispositions des titres III et II du code de la mutualité.

Puis il rappelé que les mutuelles assurent 60 % de la couverture santé complémentaire des assurés sociaux, ce qui les amène déjà à prendre en charge une partie du coût de la dépendance, notamment en ce qui concerne les dépenses s'inscrivant au-delà du ticket modérateur pour les affections de longue durée. A ceci s'ajoutent les produits d'assurance dépendance, que certaines mutuelles intègrent dans leur offre statutaire et pour lesquelles l'union nationale de la prévoyance de la mutualité française propose, à ceux de ses adhérents qui le souhaitent, des garanties individuelles ou collectives.

M. Daniel Lenoir a indiqué que les différentes composantes de la mutualité française gèrent au total 223 établissements accueillant des personnes âgées, soit davantage que les grands réseaux existants.

La mutualité française intervient également dans le domaine des services à la personne, par le biais de ses propres structures, mais aussi dans le cadre de l'enseigne « France domicile » qu'elle a créée avec l'union nationale des centres communaux et intercommunaux d'action sociale (Uncass).

Elle cherche en outre à développer la prévention du vieillissement à travers l'assistance aux aidants ainsi que par la constitution d' « ateliers mémoire ». Il s'agit d'une activité à la fois traditionnelle et importante du mouvement mutualiste, qui donnera lieu prochainement à un programme d'action plus large, baptisé « Priorité santé mutualiste », dont un volet sera spécifiquement consacré à la perte d'autonomie.

M. Daniel Lenoir a précisé que dans le cadre de sa structure de gouvernance la mutualité française s'efforce de favoriser la constitution de réseaux nationaux regroupant ses adhérents dans des domaines spécifiques. C'est déjà le cas avec les services d'optique mutualistes ainsi qu'avec les établissements hospitaliers. Un projet à plus long terme existe pour les établissements d'hébergement pour personnes dépendantes (Ehpad).

M. Daniel Lenoir a considéré que l'architecture globale de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées devrait reposer sur une combinaison de trois piliers complémentaires : tout d'abord la définition d'un socle de base fondé sur la mobilisation de la solidarité nationale, conformément aux travaux de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) sur la cinquième branche ; ensuite la généralisation d'une couverture complémentaire collective ; enfin, le recours, à titre subsidiaire, à des mécanismes assurantiels supplémentaires gérés selon une logique financière de capitalisation à long terme.

Il a estimé que la mise en oeuvre de l'ensemble de cette architecture suppose la création d'un droit universel à la compensation de la perte d'autonomie reposant sur une évaluation personnalisée des besoins de la personne, compte tenu de sa situation. Cette démarche novatrice dans le champ de la protection sociale implique non seulement le rapprochement des outils d'évaluation, mais également celui du niveau des prestations destinées aux personnes âgées, d'une part, aux personnes handicapées, d'autre part. Il faudra aussi, ne serait-ce qu'au regard du principe de bonne gestion des finances sociales, être en mesure de distinguer les dépenses incombant à l'assurance maladie de celles relevant, au sens strict, de la perte d'autonomie.

En ce qui concerne plus particulièrement le premier socle faisant appel à la solidarité nationale, M. Daniel Lenoir a estimé qu'il faudra combiner une gestion nationale avec une gestion locale des sources de financement, passant par des structures du même type que les maisons départementales du handicap auxquelles la mutualité française a tenu à participer, en sa qualité d'organisme complémentaire. Mais il importera aussi de renforcer le niveau de la prise en charge financière réalisée sur des fonds publics.

Considérant, d'une façon générale, qu'il apparaît impossible d'augmenter continuellement les taux d'imposition, M. Daniel Lenoir a jugé que l'effort supplémentaire, rendu indispensable par la couverture des besoins de la population en matière de dépendance, n'est pas si considérable qu'il doive aboutir à déséquilibrer totalement le niveau des prélèvement obligatoires dans notre pays. Il a ensuite considéré que le contexte budgétaire défavorable laisse une place importante aux mécanismes complémentaires.

Pour ce faire, il faut envisager une couverture collective grâce à la mutualisation du risque entre les assurés, quel que soit leur âge. C'est là qu'intervient le deuxième pilier du financement de la dépendance reposant sur un système de prévoyance. Le souscripteur cotise « à fonds perdus » si le risque de dépendance ne se concrétise pas. Il ne perçoit une prestation que si le risque se réalise. Contrairement à une pure logique assurantielle fondée sur la capitalisation, cet « étage » de couverture de la dépendance ne consiste pas à provisionner un risque futur : les exigences de provisionnement de ce type de risque sont en effet beaucoup trop élevées. En laissant de côté la logique assurantielle et en instituant un système de financement « à fonds perdus » pour le bénéficiaire, on peut ainsi obtenir un niveau de cotisations nettement plus raisonnable.

Il a ensuite jugé qu'il faudra non seulement renforcer la prise en charge des personnes âgées dépendantes classées en GIR 1 et 2 par le recours à ce second pilier, mais également faire en sorte que les jeunes générations, au demeurant peu sensibilisées à la perspective lointaine de la perte d'autonomie, entrent dans le cadre de cette mutualisation.

M. Daniel Lenoir a jugé qu'en revanche les dispositifs assurantiels individuels souffrent de certaines limites : la souscription de ces produits est généralement trop tardive, l'existence de questionnaires médicaux en réduit l'accès, le niveau des cotisations apparaît trop élevé et la forte croissance de la fréquence de la prévalence de la perte d'autonomie en fonction de l'âge restreint singulièrement les possibilités d'assurer le risque de dépendance. En outre, seuls 35 % des ménages souscrivent actuellement une assurance vie, de surcroît pour un montant moyen modique de 66 000 euros : les perspectives de transformation d'une partie de ces encours en assurance dépendance sont donc relativement faibles.

M. Daniel Lenoir a souligné en particulier que, compte tenu de l'âge moyen élevé des souscripteurs (soixante-deux ans) des contrats d'assurance dépendance, le montant des cotisations s'établit mécaniquement à un niveau très élevé : le versement d'une rente de 6 000 euros suppose ainsi d'acquitter des primes individuelles de l'ordre de 500 euros. A contrario, dans certaines entreprises, la large mutualisation du risque permise par la prévoyance collective se traduit par des primes beaucoup plus faibles. Il convient donc d'encourager la généralisation de la diffusion, à un âge aussi précoce que possible, des couvertures collectives, ne serait-ce que pour en réduire les coûts d'accès.

Pour autant, il est utile de conserver des mécanismes reposant sur des systèmes de capitalisation, mais à titre de troisième niveau de couverture, en plus de la solidarité nationale et des techniques de prévoyance.

M. Alain Vasselle, rapporteur, s'est demandé si l'union nationale de la prévoyance de la mutualité française (UNPMF) a développé des stratégies spécifiques pour améliorer sa connaissance du risque dépendance et anticiper son évolution. Il s'est également interrogé sur ses critères d'appréciation de la rentabilité des contrats d'assurance dépendance. Par ailleurs, il a souhaité savoir si M. Daniel Lenoir partage les appréciations formulées par le rapport du centre d'analyse stratégique (Cas) tendant à relativiser l'impact des dispositifs d'incitation fiscale dans le développement du marché de l'assurance dépendance.

M. Daniel Lenoir a indiqué que les organismes mutualistes ont effectivement développé une stratégie spécifique pour appréhender la problématique de la dépendance. Cette démarche passe notamment par le développement de bases de données statistiques et d'informations sur ce sujet. Néanmoins, une marge d'incertitude considérable subsiste encore. Il semble ainsi délicat d'évaluer avec précision l'incidence future de la maladie d'Alzheimer. Par ailleurs, personne ne sait calculer ce que seront les prix des services à la personne à l'horizon d'une trentaine d'années.

Au total, l'assurance privée individuelle gérée suivant la technique de capitalisation ne saurait constituer, à court terme, une réponse aux besoins de la population en matière de dépendance, d'autant plus que les règles comptables applicables semblent s'orienter vers un provisionnement intégral des engagements, ce qui a récemment conduit un organisme mutualiste important à se retirer de ce marché.

M. Philippe Marini, président, a souhaité avoir des précisions sur ces obligations de provisionnement qui, d'une façon générale, résultent de plus en plus souvent de règles comptables internationales.

M. Daniel Lenoir a indiqué que les instances communautaires conduisent actuellement des réflexions approfondies, auxquelles participe la mutualité française, sur les règles de solvabilité.

Il existe en conséquence une certaine incertitude sur le classement des garanties d'assurance dépendance. Il apparaît certes logique que les contrats fondés sur une logique d'épargne à long terme et gérés en capitalisation donnent lieu à un provisionnement important. Mais une telle obligation semble excessive lorsqu'il s'agit simplement de permettre aux assurés, notamment lorsqu'ils sont jeunes, de se protéger chaque année contre un tel risque.

M. Philippe Marini, président, a observé qu'à l'instar des systèmes de retraite, il s'agit de distinguer les produits « à cotisations définies » de ceux à « prestations définies ». Puis il a fait valoir l'importance, pour la mission, d'intégrer dans ses travaux la dimension internationale des obligations de provisionnement que les acteurs de ce marché sont tenus de respecter.

Mme Marie-Thérèse Hermange a suggéré sur ce point que la mission se rapproche de l'association internationale des caisses de sécurité sociale.

M. Daniel Lenoir a estimé que si le provisionnement intégral des engagements semble justifié dans le cas d'un jeune de vingt ans, victime d'un grave accident et qui souffrira d'une perte d'autonomie jusqu'à la fin de ses jours, en revanche, une telle exigence serait disproportionnée si elle venait à s'appliquer individuellement à tous les souscripteurs âgés de plus de cinquante ans : le coût en termes de fonds propres serait alors extrêmement élevé et les cotisations atteindraient des niveaux prohibitifs. Enfin, il a considéré que des mesures fiscales incitatives ne sauraient suffire à elles seules à assurer le développement de la couverture du risque dépendance.

Après avoir jugé convaincante la présentation faite par M. Lenoir de l'articulation entre les différents piliers de la prise en charge de la perte d'autonomie, M. François Autain a souhaité obtenir des précisions sur leur part relative dans la couverture du risque. Il a estimé utile, en particulier, de savoir quelle pourrait être la proportion de la solidarité nationale dans un contexte de maîtrise des prélèvements obligatoires. Puis il a observé qu'il apparaît aujourd'hui très difficile de distinguer les dépenses liées à la dépendance de celles relatives aux soins, en raison notamment des modalités de construction de l'Ondam et de ses sous-objectifs.

Mme Marie-Thérèse Hermange s'est demandé si, en dehors des grandes causes naturelles comme la maladie d'Alzheimer, les établissements gérés par la mutualité française prennent également en charge des pathologies très lourdes comme l'autisme.

Au sujet de la question de l'encouragement par les pouvoirs publics de la diffusion de l'assurance dépendance, M. Philippe Marini, président, a rappelé qu'une dépense fiscale présente le même impact sur le solde budgétaire qu'une dépense budgétaire. Puis il s'est interrogé sur l'opportunité d'envisager un certain redéploiement en réduisant quelque peu les avantages dont bénéficient les produits en pure capitalisation pour transférer les marges de manoeuvre ainsi dégagées sur l'assurance dépendance.

En réponse à M. François Autain, M. Daniel Lenoir a indiqué qu'il lui est difficile de donner des pourcentages précis pour chacun des trois niveaux de prise en charge de la dépendance qu'il évoquait dans son exposé liminaire. Mais une augmentation de l'effort public, évalué aujourd'hui globalement entre 17 et 19 milliards d'euros chaque année, apparaît à l'évidence nécessaire dans certains domaines, ne serait-ce que pour des raisons d'équité sociale. Les pouvoirs publics devront néanmoins procéder à des arbitrages délicats, dans la mesure où, d'une part, il est impossible d'accroître indéfiniment le niveau des prélèvements obligatoires et où, d'autre part, l'accumulation de forts déficits fait courir un risque systémique sur l'ensemble de notre système de protection sociale. En ce qui concerne la répartition des dépenses de soins stricto sensu et celles imputables à la prise en charge de la dépendance, une meilleure identification des charges apparaît nécessaire et devrait être réalisable.

M. Alain Milon a souligné que les médecins prescrivent souvent des actes médicaux relevant autant du soin des patients que de la prévention de la dépendance. Les « frontières » entre les différentes sections de tarification apparaissent donc, à l'usage, pour le moins ténues.

Au-delà des problèmes de nomenclature comptable et des règles budgétaires, Mme Marie-Thérèse Hermange s'est inquiétée du caractère récurrent des difficultés imputables aux outils actuels de tarification.

Après avoir confirmé l'attachement de la mutualité française à une gestion personnalisée de la perte d'autonomie, M. Daniel Lenoir a précisé que les établissements qu'elle gère accueillent déjà des personnes souffrant de pathologies lourdes comme l'autisme.

Audition de MM. Denis Morin, directeur, et Bernard Boivin-Champeaux, responsable technique et financier du centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), et de MM. Jean Castagné, conseiller auprès du délégué général, et Pascal Broussoux, directeur technique du groupe d'association générale de retraite par répartition (AG2R)

Puis la mission a entendu MM. Denis Morin, directeur, et Bernard Boivin-Champeaux, responsable technique et financier du centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), ainsi que MM. Jean Castagné, conseiller auprès du délégué général, et Pascal Broussoux, directeur technique, du groupe d'association générale de retraite par répartition (AG2R).

Après avoir souligné l'ancienneté de la présence des institutions de prévoyance dans le domaine de la dépendance, M. Philippe Marini, président, a estimé que la création prochaine d'un cinquième risque reposera probablement sur une combinaison de plusieurs mécanismes fondés sur la solidarité nationale, d'une part, ainsi que sur le recours à la prévoyance, d'autre part. Dans cette perspective, la mission d'information souhaite savoir quels sont aujourd'hui les produits d'assurance dépendance proposés aux Français, quelle est la spécificité du risque dépendance par rapport aux autres risques assurables et quelles dispositions sont susceptibles d'assurer le développement de ce marché. La mission s'interroge également sur l'opportunité d'adosser la diffusion de ces produits à l'assurance vie ou à l'épargne retraite.

M. Denis Morin, directeur général, a tout d'abord précisé que le centre technique des institutions de prévoyance (CTIP) joue un rôle d'appui auprès des institutions de prévoyance qui se définissent, pour leur part, comme des associations à but non lucratif relevant de la loi du 1er juillet 1901, soumises aux dispositions du code de la sécurité sociale. Parmi celles-ci, le groupe d'association générale de retraite par répartition (AG2R) constitue en quelque sorte l'un des « opérateurs historiques » de l'assurance dépendance, dans la mesure où il a conçu, dès 1986, les premiers contrats de ce type.

Après avoir souligné la relative rareté des données statistiques disponibles sur ce marché, pourtant aujourd'hui relativement ancien et développé (il est le deuxième au monde après celui des Etats-Unis), M. Denis Morin a estimé entre 2,5 millions et 3 millions le nombre des personnes couvertes et à 350 millions d'euros le montant annuel des cotisations perçues. Sur ce total, les institutions de prévoyance évaluent leur « part de marché » à environ 20 %, soit 59 millions d'euros de cotisations en 2006, dont 50 millions d'euros pour le seul groupe AG2R.

En dépit d'un essor non négligeable, le développement de l'assurance dépendance apparaît entravé par plusieurs obstacles. L'absence de choix clairs des pouvoirs publics depuis deux décennies sur l'alternative entre la création d'un cinquième risque ou d'une cinquième branche de la sécurité sociale constitue à l'évidence une source d'attentisme pour les assurés sociaux. De fait, une bonne partie de l'opinion publique semble convaincue que l'on fera appel tôt ou tard à la solidarité nationale pour couvrir les besoins des personnes âgées en matière de dépendance et qu'il n'est donc pas nécessaire de recourir à la prévoyance individuelle ou collective pour y faire face.

M. Denis Morin a ensuite mis en avant les facteurs défavorables à l'offre de produits des institutions de prévoyance. Il a constaté tout d'abord que la dépendance constitue un risque à long terme, très difficile à cerner et dont la survenance est parfaitement aléatoire. De fait, il semble délicat d'évaluer l'évolution de la prévalence des pathologies à l'origine de la perte d'autonomie, ainsi que l'espérance de vie des personnes touchées. Il apparaît, en particulier, impossible d'apprécier l'impact positif que pourraient présenter d'éventuels progrès thérapeutiques pour le traitement de la maladie d'Alzheimer. Cet aléa a un impact direct sur le volume des provisions à mettre en place, dont le montant peut s'avérer très élevé. L'assurance dépendance est ainsi un risque coûteux en fonds propres.

D'un point de vue commercial, M. Denis Morin a souligné la difficulté à proposer à des personnes jeunes, notamment celles âgées de moins de trente-cinq ans, des produits susceptibles de leur assurer une protection vers quatre-vingt-cinq ans. Il faut donc coupler le développement de l'assurance dépendance avec d'autres produits.

En ce qui concerne la demande des assurés, M. Denis Morin a souligné le caractère très insuffisant de la sensibilisation de l'opinion publique : l'âge moyen à la souscription est certes revenu de soixante-cinq ans en 2006 à soixante-deux ans en 2007, mais ce niveau demeure encore très élevé et se traduit mécaniquement par des cotisations onéreuses. Par ailleurs, les entreprises semblent quelque peu réticentes à ouvrir le champ du dialogue social à la dépendance en raison d'un agenda paritaire très chargé et d'un contexte économique marqué par une forte pression sur les marges. Néanmoins, il semble que l'année 2007 traduise l'amorce d'un retournement pour la prévoyance collective dans la mesure où l'organisme commun des institutions de prévoyance (Ocirp) est parvenu à commercialiser sa nouvelle offre produit auprès de 100 000 souscripteurs.

M. Denis Morin a ensuite tracé les quatre axes que pourrait revêtir le développement de l'assurance dépendance. Cette démarche supposerait en premier lieu une prise de conscience plus forte de l'opinion publique quant à l'utilité de recourir à ce type de garantie. Il faudrait ensuite que les pouvoirs publics annoncent assez rapidement leurs choix sur le niveau de la prise en charge de la dépendance par des fonds publics. Sans doute faudrait-il d'ailleurs recentrer l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) afin de mieux solvabiliser les revenus les plus faibles, ainsi que les personnes classées dans les groupes iso-ressources (Gir) les plus lourds (1 et 2).

Il conviendrait en troisième lieu de prévoir les modalités de l'articulation des interventions entre, d'un côté, la part de l'effort incombant à la solidarité nationale, de l'autre, celle relevant des acteurs du secteur privé. Contrairement à ce qui se passe dans le domaine de la couverture complémentaire en matière d'assurance santé, les partenaires privés ne doivent pas être cantonnés à un rôle de simples « payeurs aveugles ». Conformément à la logique énoncée par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), M. Denis Morin a estimé que les acteurs du dossier de la dépendance devraient pouvoir disposer d'un référentiel commun et travailler en cessant de s'ignorer les uns les autres. Les partenaires privés doivent aussi avoir leur mot à dire dans l'élaboration des règles.

Renforcer la place de l'assurance dépendance supposerait enfin de promouvoir un maximum de souplesse ainsi qu'une grande diversité dans l'offre contractuelle proposée aux bénéficiaires potentiels et dans les garanties proposées. Dans cet objectif, il serait souhaitable que les institutions de prévoyance concluent des accords de partenariat avec les grands réseaux de prestataires de services à la personne. M. Denis Morin s'est également prononcé en faveur du couplage de la diffusion des contrats dépendance avec des garanties comme celle relative au paiement des frais d'obsèques.

Revenant sur la distinction entre les prestations en espèces et l'offre de services en nature, M. Philippe Marini, président, a fait valoir qu'il s'agit in fine, dans les deux cas, d'une question de solvabilisation des assurés et donc d'un problème de revenus, ce qui revient au même du point de vue économique.

M. Alain Vasselle, rapporteur, s'est interrogé sur les éléments servant de base à la tarification de la couverture du risque dépendance ainsi que sur la façon dont les professionnels apprécient la rentabilité de ces contrats. Puis il s'est demandé s'il convient d'associer le développement de l'assurance dépendance avec celui de l'épargne retraite ou avec les produits d'assurance vie. Tout en relevant le léger frémissement, intervenu en 2007, dans la commercialisation des produits collectifs de prévoyance, il s'est interrogé sur l'évolution récente des contrats souscrits individuellement par les bénéficiaires. Puis, après avoir évoqué lui aussi la distinction existant dans les contrats entre les prestations en espèces et celles en nature ainsi que l'articulation des interventions respectives de la solidarité nationale et des partenaires privés dans la couverture du risque dépendance, il a souhaité connaître le sentiment du CTIP sur l'opportunité de mettre en oeuvre des mesures fiscales incitatives, ainsi que des dispositifs d'aide à l'acquisition d'une assurance dépendance.

M. Denis Morin a estimé que du point de vue des professionnels, il conviendrait idéalement de privilégier le développement de contrats proposant le versement de prestations en espèces en raison de leur plus grande simplicité de gestion. Mais les assurés recherchent en priorité une offre de services diversifiée, à commencer par des heures d'aide à domicile et le recours à des services d'auxiliaire de vie. Cette préoccupation est d'ailleurs beaucoup mieux prise en compte que par le passé dans le cadre des nouveaux contrats récemment commercialisés. A titre d'illustration, il a précisé que 50 % des souscripteurs d'une assurance dépendance bénéficient aujourd'hui d'un contrat prévoyant le versement d'une rente, la télésurveillance ainsi que l'accès à une plate-forme d'assistance téléphonique, tandis que 16 % disposent en outre d'un accès à certains services complémentaires en nature. Enfin, dans 34 % des cas, les titulaires d'une assurance dépendance se voient garantir, en plus d'une rente, un certain niveau de capital destiné à financer les dépenses d'aménagement d'un logement rendues indispensables pour le maintien de la personne à son domicile.

Prenant acte du fort impact des incitations fiscales sur l'opinion publique, M. Denis Morin a estimé que l'on pourrait sans doute, à l'aide d'une mesure appropriée, convertir une partie des encours d'assurance vie en une couverture du risque dépendance par un redéploiement partiel de la dépense fiscale.

M. Jean Castagné, conseiller auprès du délégué général d'AG2R, a rappelé que cette structure dispose d'une grande expérience en matière de dépendance, puisqu'elle a été le premier intervenant à commercialiser une garantie de ce type et ce, dès 1986. Sur la base de cette expérience, il a estimé que les choix individuels des souscripteurs relèvent d'arbitrages individuels très différents les uns des autres. Mais au-delà de ce constat, la perspective de la création d'un cinquième risque de protection sociale conduit à examiner tout particulièrement le cas des ménages modestes et nécessiterait sans doute un débat sur la prise en compte ou non du patrimoine des assurés pour bénéficier de l'aide de la solidarité nationale.

Il a ensuite précisé que le choix de se positionner sur le marché de l'assurance dépendance s'explique par l'histoire de l'AG2R : parallèlement à son rôle traditionnel de caisse de retraite complémentaire dans le cadre de l'Agirc-Arrco, le groupe a développé progressivement une activité dans le domaine de l'assurance et de la prévoyance, ainsi que diverses actions sociales d'aide aux retraités. Or, dès les années quatre-vingt, sont apparus des cas de familles ne pouvant faire face seules aux problèmes posés par la perte d'autonomie de l'un des leurs. C'est pour répondre à cette demande que les premiers contrats de garantie contre ce risque ont été élaborés.

M. Jean Castagné a précisé que l'AG2R avait alors considéré être en mesure de pouvoir à la fois mutualiser et assurer la perte d'autonomie. Toutefois, le groupe ne disposait pas encore, à l'origine, d'éléments suffisants pour établir précisément le niveau de la tarification des garanties offertes, ce qui l'a conduit à recourir à des données fondées sur l'observation du marché américain. Depuis lors, l'AG2R a constamment amélioré ses propres bases de données et progressivement construit une table de calcul de probabilité du risque de devenir dépendant, aujourd'hui utilisable jusqu'à l'âge de quatre-vingt-sept ans. En ce qui concerne l'appréciation de la rentabilité de ce marché, il a indiqué que de nombreuses incertitudes subsistent encore. Toutefois, les institutions de prévoyance sont des organismes à but non lucratif pour lesquelles la question de la rentabilité ne se pose pas dans les mêmes termes que pour les entreprises commerciales.

M. Philippe Marini, président, a tenu à nuancer cette affirmation en faisant valoir que les institutions de prévoyance opèrent sur un marché concurrentiel et sont donc soumises aux mêmes impératifs techniques que les compagnies d'assurance. Leur activité doit permettre de dégager les fonds propres qu'elles ne possèdent pas, faute d'actionnaires, et dont elles ont besoin pour se développer.

M. Jean Castagné a reconnu que s'ils ne poursuivent effectivement pas un but lucratif, les organismes de prévoyance ne constituent pas pour autant des institutions caritatives. Toutefois, l'impératif de rentabilité n'a certainement pas le même poids pour les institutions de prévoyance que pour les assureurs privés.

M. Bernard Cazeau, vice-président, a rappelé que l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) a clairement le caractère d'une prestation en nature, notamment afin d'éviter que les fonds correspondants ne soient détournés de leur objet et utilisés à des fins de thésaurisation sur les comptes bancaires ! Il s'est demandé si, dans l'esprit du CTIP, l'assurance dépendance a vocation à compléter l'Apa, s'il s'agit de garantir la formation d'une rente fondée sur le principe de capitalisation financière ou, à l'inverse, s'il s'agit d'un produit de prévoyance, auquel cas les fonds investis sont perdus par le souscripteur lorsque le risque de perte d'autonomie ne se concrétise pas à un horizon déterminé.

Après avoir observé que les auditions de la mission semblent accréditer l'idée qu'il conviendrait de resserrer le barème de l'Apa sur les revenus les plus faibles ainsi que sur les Gir 1 et 2, M. François Autain s'est demandé si la mise en oeuvre annoncée d'un droit universel à la compensation de la perte d'autonomie permettra de satisfaire les besoins des plus modestes. Puis faisant référence à la situation des Etats-Unis, où cinquante millions de personnes sont dépourvues de toute assurance pour couvrir leurs dépenses de santé, il s'est déclaré totalement opposé à la mise en place en France de nouveaux mécanismes qui ne revêtiraient pas une portée universelle. Enfin, la revendication d'un maximum de souplesse pour assurer le développement de l'assurance dépendance lui a semblé contraire à la démarche proposée par la CNSA reposant sur une approche globale des besoins de la personne.

Après avoir jugé que le « frémissement » constaté en 2007 en matière de prévoyance collective correspond probablement à une sensibilisation accrue des familles aux enjeux du problème de la dépendance, Mme Sylvie Desmarescaux a souhaité savoir si le CTIP a réalisé des études statistiques sur le profil par âge et par niveau de ressources des souscripteurs.

M. Jean Castagné a souligné que le premier contrat dépendance a été créé ex nihilo en 1986, à une époque où ni la prestation spécifique dépendance (PSD), ni l'Apa n'existaient. Aussi, ce produit a-t-il été conçu à l'origine comme un engagement viager payable en espèces, permettant de combler l'absence de prestations de ce type dans le système public. Par ailleurs, on estimait alors ne pas être en mesure d'évaluer sur le long terme le coût d'une offre de services aux bénéficiaires. Après avoir noté que l'Apa constitue effectivement pour une part une prestation en nature, il a ensuite fait valoir que le socle de cette allocation repose sur un barème qui, lui, est exprimé en espèces. En tout état de cause, le plan d'aide de l'assuré social ne couvre pas l'intégralité des besoins de la personne.

M. Philippe Marini, président, a jugé que l'Apa peut, en définitive, être assimilée à un système de tiers payant.

M. Denis Morin a précisé que ses observations sur le nécessaire reciblage de l'Apa sur les cas les plus lourds et sur les personnes les plus démunies se fondent sur les conclusions du rapport de Mme Hélène Gisserot. De fait, il semble bien que la combinaison, en matière de dépendance, de plusieurs mécanismes d'aide budgétaire et de diverses dépenses fiscales se traduise globalement par un certain effet « anti-redistributif » : le taux d'effort des assurés sociaux diminue à mesure que leur revenu augmente. Il est par ailleurs certain que l'Apa n'assure qu'une solvabilisation insuffisante des ménages à bas revenus. Et, dans un contexte où les ressources publiques sont rares, le reste à charge des personnes dépendantes en établissement apparaît souvent élevé.

M. Denis Morin a précisé par ailleurs que son plaidoyer en faveur d'une grande souplesse de l'offre contractuelle repose avant tout sur le principe de la liberté de choix des souscripteurs, mais ne lui semble nullement incompatible avec l'approche globale du patient prônée par la CNSA. Puis il a estimé que l'augmentation, constatée en 2007, de la souscription des contrats collectifs de prévoyance résulte non seulement des fréquentes interventions des responsables politiques sur ce sujet pendant la campagne électorale, mais encore d'une plus grande sensibilité des partenaires sociaux dans les entreprises. Enfin, une étude récente de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) fait état d'une offre de garanties de plus en plus diversifiée dans les nouveaux contrats commerciaux qui peut également constituer un élément d'explication.

Audition de MM. Gérard de La Martinière, président, Jean-Paul Laborde, conseiller parlementaire, Gilles Cossic, directeur des assurances de personnes de la fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), Gérard Meneroud, directeur général adjoint de la caisse nationale de prévoyance (CNP-assurance), et Pierre Beaumin, directeur « Prévoyance-retraite-épargne-vie individuelle » de Groupama

Enfin, la mission a entendu MM. Gérard de La Martinière, président, Jean-Paul Laborde, conseiller parlementaire, Gilles Cossic, directeur des assurances de personnes de la fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), Gérard Meneroud, directeur général adjoint de la caisse nationale de prévoyance (CNP-assurance), et Pierre Beaumin, directeur « Prévoyance-retraite-épargne-vie individuelle » de Groupama.

M. Philippe Marini, président, a rappelé l'objet de la mission commune d'information et a précisé que trois dimensions retiennent plus particulièrement son attention : la place de la solidarité ; celle des capacités contributives, et donc de l'épargne et de la prévoyance ; enfin, l'adaptation au terrain et le besoin de proximité, qui justifient le rôle revenant aux collectivités territoriales dans la gouvernance du système de prise en charge de la perte d'autonomie.

Il a précisé que les auditions de la matinée devaient permettre de mieux appréhender la dimension économique du risque de perte d'autonomie. Après avoir mis en évidence la question de la soutenabilité de l'effort public en matière de protection sociale, il a souhaité savoir si la fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) serait favorable à un redéploiement des aides fiscales, en faveur de l'assurance dépendance et au détriment de l'assurance vie.

M. Gérard de La Martinière a jugé inappropriée l'idée de réduire les avantages fiscaux attachés à l'assurance vie, dès lors que celle-ci s'est développée, sous la forme d'une épargne de long terme tous usages, en substitution des dispositifs publics destinés à couvrir les risques de la vie.

Le risque de dépendance ne constitue pas une nouveauté pour les assureurs, puisque le premier contrat ad hoc a été commercialisé en France en 1985. Aujourd'hui, près de trois millions de personnes sont couvertes par des contrats d'assurance dépendance, pour un chiffre d'affaires d'environ 400 millions d'euros. Le risque dépendance est donc assurable, de différentes manières, et il convient de le confirmer dans le cadre des réformes à venir.

En effet, la couverture d'un tel risque par des systèmes publics fonctionnant par répartition, et donc par un recours aux prélèvements obligatoires, serait structurellement inadaptée et connaîtrait les mêmes difficultés et les mêmes impasses que le financement des régimes de retraite, dans la mesure où il faudra faire face à des besoins croissants, sur le long terme.

La couverture assurantielle ne pourra toutefois répondre à toutes les préoccupations des pouvoirs publics. A cet égard, la prise en charge publique du risque dépendance devrait prendre en compte les revenus des personnes et leur patrimoine, et non retenir le seul critère de revenu. Dans ce schéma, la mobilisation ex ante du patrimoine apparaît nettement préférable à sa mobilisation ex post, par le biais du recours sur succession.

S'agissant des différents types de couvertures assurantielles possibles, une formule basée sur l'épargne capitalisée apparaît plus adaptée qu'une formule plus traditionnelle d'approche du risque, par le biais de contrats « à fonds perdus ». Deux approches complémentaires pourraient être mises en oeuvre : dans le cas de personnes jeunes, greffer une garantie dépendance à des contrats d'épargne retraite ; dans le cas de personnes plus âgées, disposant déjà d'une assurance vie, leur offrir une souplesse dans l'allocation de leurs actifs pour en affecter une partie à la couverture du risque dépendance. Cette dernière possibilité pourrait s'inspirer du mécanisme prévu pour la transformation - dite « transformation Fourgous » - de contrats monosupports en contrats multisupports investis pour une part en unités de compte, cette transformation n'entraînant pas les conséquences fiscales d'un dénouement du contrat. Pour les personnes à faibles revenus, une aide à l'acquisition d'un contrat d'assurance dépendance pourrait être envisagée, sur le modèle de celle qui existe aujourd'hui pour l'acquisition d'un contrat complémentaire santé.

M. Philippe Marini, président, a souligné la contrainte que représente aujourd'hui le taux des prélèvements obligatoires.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé les propos tenus par M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, lors de son audition par la mission commune d'information. Celui-ci avait, en effet, jugé que le développement de l'assurance dépendance ne saurait être une solution sur un horizon à court terme, car sa diffusion resterait encore longtemps relativement restreinte au sein de la population française. M. Alain Vasselle, rapporteur, a donc souhaité savoir si la FFSA partage cette analyse et, si tel est le cas, à quelle échéance l'assurance dépendance pourrait atteindre un niveau de diffusion significatif.

Il s'est également interrogé sur l'articulation entre la solidarité nationale et les ressources propres des ménages pour faire face à la perte d'autonomie : quelle pourrait être, à terme, la part des mécanismes d'assurance, de prévoyance et d'épargne dans la prise en charge globale du coût de la dépendance des personnes âgées ?

Enfin, M. Alain Vasselle, rapporteur, a observé que, selon l'analyse du centre d'analyse stratégique (Cas), certaines études relativisent l'impact des dispositifs d'incitation fiscale dans le développement du marché de l'assurance dépendance. Il a donc souhaité connaître le point de vue de la FFSA sur cette question et, le cas échéant, ses propositions d'amélioration de l'efficacité des dispositifs d'incitation fiscale.

M. Gérard de La Martinière s'est déclaré en opposition avec l'analyse développée par le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, estimant qu'elle conduirait à l'inaction. Or, le phénomène de dépendance prendra des proportions très importantes d'ici 25 ou 30 ans, ce qui laisse le temps de prévoir et de mettre en place un dispositif d'accumulation qui permettra de répondre à une partie significative des besoins.

Le débat autour du phénomène de dépendance est important et utile pour prendre la réelle mesure des enjeux. D'après les données statistiques, la mise en place de la prestation spécifique dépendance (PSD), puis de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa), s'est accompagnée d'un accroissement des souscriptions de contrats d'assurance dépendance. En revanche, l'évocation de l'instauration d'un cinquième risque s'est traduite par une stagnation de ces contrats, les citoyens attendant de connaître les choix des pouvoirs publics. Il convient donc de clarifier ces choix, de façon durable, avant d'examiner les éventuels aménagements à apporter aux incitations fiscales.

M. Gérard Meneroud a indiqué que les assureurs avaient développé deux approches au cours des vingt dernières années :

- d'une part, une offre de couverture collective, souvent dans un cadre professionnel, afin d'inciter les personnes les plus jeunes à s'assurer contre le risque dépendance ;

- d'autre part, une offre de contrats individuels.

Au total, trois millions de personnes sont aujourd'hui couvertes par un organisme d'assurance au titre de la dépendance, dont les deux tiers par des sociétés d'assurance. Ces dernières couvrent environ un million de personnes dans le cadre de contrats souscrits individuellement et 800.000 à 900.000 personnes dans le cadre de contrats collectifs. La couverture collective connaît une forte augmentation et l'on peut envisager une multiplication par deux ou trois du nombre de bénéficiaires de ce type de contrats d'ici deux ou trois ans. Dans cette hypothèse, les personnes couvertes par un contrat, individuel ou collectif, représenteraient 30 à 40 % de la cible à couvrir, une fois retirés de la population totale les mineurs et les personnes de moins de 35 ans. Si l'on permet en outre la réorientation d'une partie de l'épargne accumulée par les personnes les plus âgées pour faire face au risque dépendance, en maintenant un cadre fiscal favorable, on pourra alors considérer que l'essentiel de la population cible sera couvert.

M. Gérard Meneroud a, par ailleurs, mis en évidence les relations qu'entretiennent les assureurs avec les fournisseurs d'offres de services. Il a également souligné l'importance du travail à mener afin de présenter une offre de services structurée et de qualité satisfaisante.

M. Pierre Beaumin a relevé que le nombre d'assurés bénéficiant d'une couverture individuelle, soit un million de personnes, a connu une stagnation au cours des deux dernières années, dans l'attente des choix des pouvoirs publics.

Le contenu lui-même de la couverture individuelle a évolué, puisque la plupart des contrats couvrent aujourd'hui la dépendance partielle (groupe iso-ressources - Gir 3 et, parfois, Gir 4), alors qu'ils ne couvraient à l'origine que la dépendance lourde. Les assureurs essaient de favoriser le maintien à domicile, qui peut se traduire par une amélioration de l'état de dépendance, en offrant des prestations d'assistance, comme des plate-formes de services à la personne. Ils ont donc été capables de faire évoluer l'offre pour tenir compte des besoins des personnes âgées dépendantes. A cet égard, les clients souhaitent aujourd'hui disposer d'un mécanisme de transition de l'assurance vie vers la couverture de la dépendance.

M. Pierre Beaumin a estimé que l'évolution de la couverture du risque dépendance par le biais de l'assurance dépendra à la fois des choix publics opérés et de la capacité des assureurs à s'adapter aux besoins et aux attentes des personnes.

M. Gérard de la Martinière a estimé que le partage des responsabilités entre la prise en charge publique du risque dépendance et la couverture assurantielle doit intervenir en fonction du double critère de revenu et de patrimoine.

La FFSA est très réticente à l'égard de tout système qui accorderait au dispositif public la décision de prise en charge des personnes âgées dépendantes et considèrerait les assureurs comme des supplétifs financiers. Elle est, de ce point de vue, très réservée sur les orientations retenues par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), qui apparaissent éloignées du fonctionnement réel d'un marché d'assurance. Une intervention en seconde ligne des sociétés d'assurance ne permettrait pas aux assureurs d'offrir les mêmes services à la personne ou les mêmes capacités de prévention et d'orientation des personnes âgées dépendantes.

Elle s'inscrit également en faux contre l'analyse du centre d'analyse stratégique. En effet, les incitations fiscales jouent un rôle majeur dans l'orientation des personnes vers tel ou tel type de dispositif d'assurance ou d'épargne. Si l'on envisage de greffer une garantie dépendance sur les contrats d'épargne retraite, qui bénéficient déjà d'incitations fiscales, il n'apparaît pas nécessaire de modifier ces incitations, d'autant que les plafonds sont loin d'être encore atteints par les bénéficiaires. Il en va de même si l'on permet un réaménagement des contrats d'assurance vie en franchise d'impôt, comme tel est le cas avec la « transformation Fourgous ».

Mme Bernadette Dupont a souhaité obtenir des précisions sur les possibilités offerte par la « transformation Fourgous ».

M. Gérard de la Martinière a précisé que cette possibilité a été introduite par la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie. Elle permet aux titulaires de contrats d'assurance vie monosupports de les convertir en contrats d'assurance vie multisupports, sans que cela n'entraîne les conséquences fiscales d'un dénouement, dès lors qu'ils sont pour une part investis en unités de compte. Des contrats ont été transformés de la sorte à hauteur d'environ 50 milliards d'euros au 31 décembre 2007.

M. Alain Milon s'est interrogé sur la distinction opérée entre les notions de dépendance et de perte d'autonomie. Il a souhaité connaître la position de la FFSA sur l'idée de convergence de la prise en charge des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées.

M. Gérard de la Martinière a estimé que le handicap et la dépendance ne relèvent pas de la même nature de risque : les probabilités d'occurrence sont différentes, de même que les modes de compensation. D'un point de vue de tarification et de gestion du risque, il n'apparaît pas utile de mêler ces deux situations, qui ne sont pas comparables.

M. Alain Milon a mis en évidence l'aspect inadapté de la barrière d'âge qui existe aujourd'hui, entraînant une différence de classification des personnes selon qu'elles ont plus ou moins de 60 ans. Il a souhaité connaître le traitement qui serait réservé par une société d'assurance à une personne atteinte de la maladie d'Alzheimer avant l'âge de 60 ans.

M. Gérard Meneroud a indiqué que les contrats d'assurance ouvrent des droits liés à la survenance d'une pathologie et ce, quel que soit l'âge. Si la perte d'autonomie liée à une pathologie survient avant 60 ans, elle sera donc prise en charge dans le cadre du contrat d'assurance. Toutefois, d'un point de vue statistique, la perte d'autonomie intervient à un âge élevé et la tarification du risque par l'assureur en tient compte. A cet égard, la dépendance liée à l'âge ne peut être comparée au handicap de naissance ou au handicap résultant d'un accident, qui est pris en charge dans le cadre des assurances de responsabilité civile lorsqu'il existe un tiers responsable ou qui peut faire l'objet d'une garantie « accidents de la vie », lorsqu'il n'existe pas de responsable.

Mme Marie-Thérèse Hermange a relevé les propos tenus par M. Pierre Beaumin, selon lequel les services d'aide à la personne fournis à domicile peuvent entraîner une amélioration de l'état de dépendance. Elle a souhaité savoir si la FFSA dispose d'études permettant de comparer, pour une pathologie identique, le coût de la prise en charge à domicile et celui de la prise en charge en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

M. Pierre Beaumin a indiqué que des études visant à comparer le coût de la prise en charge à domicile et celui de la prise en charge en Ehpad sont en cours. La constatation de l'amélioration de l'état de dépendance par le biais des services d'aide à la personne délivrés à domicile est elle-même récente. Cette amélioration serait à la fois due à l'environnement psychologique et à la qualité de la prise en charge de la personne âgée dépendante.

M. Gérard Meneroud a indiqué que les demandes de services, les besoins des personnes et les coûts sont très différents suivant les problèmes rencontrés. La Caisse nationale de prévoyance entreprend, avec son réseau de services d'aide à la personne, de définir les prestations les plus adaptées au handicap provoqué par la pathologie. Une prestation adaptée permet en effet une meilleure socialisation de la personne.

M. Gérard de la Martinière a estimé que les sociétés d'assurance doivent disposer de la capacité de traiter les besoins des personnes, et donc d'une liberté de manoeuvre, si l'on attend qu'elles apportent une réelle valeur ajoutée dans la prise en charge de la dépendance. Selon un sondage récent, 66 % des personnes souhaitent que les contrats d'assurance dépendance prévoient une prise en charge directe des bénéficiaires sous forme de prestations de services, contre 22 % qui préfèrent se voir attribuer une rente. Le marché de l'assurance dépendance s'orientera donc vers des contrats offrant, lors de la réalisation du risque, des prestations de services. La coopération entre les assurances et les groupes spécialisés d'aide à la personne va dans ce sens.

M. Gérard Miquel, vice-président, a remercié les intervenants pour la qualité de leurs réponses.

Audition de MM. Henri Lamotte, chef du service des politiques publiques, et Fabrice Pesin, sous-directeur des assurances (service du financement de l'économie), à la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE)

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi sous la présidence de M. Philippe Marini, président, puis de M. Bernard Cazeau, vice-président, la mission d'information a tout d'abord entendu MM. Henri Lamotte, chef du service des politiques publiques, et Fabrice Pesin, sous-directeur des assurances (service du financement de l'économie), à la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE).

M. Philippe Marini, président, a rappelé que la mission se préoccupe de la définition des conditions raisonnables de la mise en place d'un cinquième risque de la protection sociale.

Il semble, au vue des auditions menées jusqu'à présent, que ce cinquième risque pourrait être bâti autour de trois principes :

- la solidarité nationale, financée par les prélèvements obligatoires ;

- l'épargne et la prévoyance, ce qui suppose de s'interroger sur les modalités d'incitation à envisager, particulièrement sur les éventuels redéploiements de dépenses fiscales à opérer ;

- la proximité et l'adaptation au terrain, ce qui implique une redéfinition des compétences des départements, afin que ces derniers ne se cantonnent pas à un rôle de « guichet », mais puissent apporter une réelle valeur ajoutée au dispositif actuel de prise en charge de la dépendance.

A titre liminaire, M. Henri Lamotte a précisé que son intervention abordera les aspects économiques du traitement de la dépendance, dans la mesure où l'enjeu de cette question dépasse la sphère strictement financière.

M. Fabrice Pesin a précisé les caractéristiques du marché français de la couverture privée contre le risque de dépendance. En 2006, 3 millions de personnes étaient assurées contre le risque dépendance : 2 millions d'individus avaient souscrit une assurance auprès d'entreprises régies par le code des assurances, contre 1 million d'individus qui avaient choisi de contracter auprès de sociétés régies par le code de la mutualité ou auprès d'institutions de prévoyance.

Le marché de l'assurance dépendance est relativement concentré. Si l'on considère uniquement les entreprises régies par le code des assurances, quatre opérateurs, la Caisse nationale de prévoyance (CNP), Groupama, Prima (du groupe AG2R) et Prédica (du groupe Crédit agricole) couvrent 83 % du nombre total d'assurés et 73 % des cotisations perçues au titre de l'année 2006.

Les cotisations perçues représentent un chiffre d'affaires total de 350 millions d'euros. Le marché a connu une croissance soutenue jusqu'en 2002. Depuis 2003, un ralentissement net se fait sentir. En 2006, le taux de croissance du marché était ainsi de 2 %. Les données pour 2007 ne sont pas encore connues.

Les provisions mathématiques associées aux contrats d'assurance dépendance s'élèvent à 1,8 milliard d'euro, contre 3 milliards d'euros pour les produits d'épargne-retraite et 1100 milliards d'euros pour les produits d'assurance-vie.

M. Fabrice Pesin a souligné la diversité de l'offre de produits d'assurance dépendance. Les contrats proposés présentent une certaine sophistication, qui peut être un obstacle à leur développement : cette hétérogénéité rend la comparaison entre produits difficile pour l'assuré. La diversité des contrats d'assurance dépendance s'explique par :

- la définition et l'approche différentes de la dépendance retenues. Certains contrats se fondent sur la notion d'actes de la vie quotidienne, d'autres sur une combinaison de la grille nationale Aggir et de cette notion d'actes de la vie quotidienne. Si la définition de la dépendance lourde est relativement homogène, tel n'est pas le cas de la dépendance partielle ;

- les caractéristiques de la couverture proposée. Certains contrats proposent une couverture de la dépendance lourde, d'autres de la dépendance partielle ;

- l'hétérogénéité des garanties offertes. Les contrats anciens notamment couvrent relativement mal les maladies neuropsychiques, comme la maladie d'Alzheimer.

La qualité des garanties proposées est perfectible. En particulier, paraissent nécessaires une harmonisation des définitions de la dépendance, ainsi qu'une simplification de la rédaction des clauses contractuelles.

Fabrice Pesin a précisé qu'il n'existe pas de contraintes d'offre identifiées en termes de réassurance. Il y a, pour ce secteur, une capacité de réassurance qui permet aux compagnies d'assurance d'offrir sans difficultés des contrats d'assurance dépendance. Les principaux obstacles au développement du marché de la dépendance résultent davantage de la sensibilisation insuffisante et trop tardive des particuliers au risque dépendance, ainsi que du coût élevé des cotisations lorsque la souscription intervient à un âgé avancé. Or, l'âge moyen de souscription est aujourd'hui de 62 ans.

L'inflexion observée sur le marché de l'assurance dépendance à partir de 2003 peut s'expliquer, pour partie, par le développement de l'Allocation personnalisée d'autonomie (Apa), et notamment par l'extension de son périmètre et l'absence de mécanisme de récupération sur succession.

S'agissant de la demande, M. Fabrice Pesin a rappelé les deux principaux freins au développement de l'assurance dépendance : en premier lieu, l'insuffisance de la prise de conscience du risque dépendance ; en second lien, le manque de lisibilité sur la qualité des produits offerts, qui ne correspondent pas complètement aux attentes des particuliers. D'une part, la couverture de la dépendance partielle ne semble pas assez développée. D'autre part, les personnes concernées paraissent préférer une sortie en prestations de service plutôt qu'une sortie en rente.

En effet, selon certains sondages, 66 % des français souhaitent une prestation sous forme de services ; 22 % une sortie en rente. Or la garantie de prestations sous forme de services pose des difficultés particulières aux assureurs : elle complexifie la gestion du risque et augmente le coût des contrats, les assureurs prenant un risque supplémentaire lié à l'incertitude de l'évolution des coûts des services à la personne.

M. Philippe Marini, président, s'est interrogé sur la pertinence de la dichotomie souvent faite entre, d'une part, la garantie d'une aide en espèce, d'autre part, la garantie d'une aide en nature. Dans la mesure où un quantum est défini dans le contrat, que celui-ci donne lieu au versement d'une rente ou à l'octroi de prestations de service, seul, en réalité, le mode de paiement change. Il ne semble donc pas que la garantie de prestations en nature fasse peser un risque supplémentaire aux assureurs.

M. Fabrice Pesin a indiqué que cette question dépend des termes des contrats. Il convient de distinguer :

- d'une part, les contrats qui garantissent une rente et proposent parallèlement le versement monétaire de cette rente ou un équivalent en prestations de services. Dans ce cas, le risque supporté par l'assureur est contrôlé ;

- d'autre part, les contrats qui offrent des prestations de service qui n'ont pas d'équivalent monétaire. Dans ce cas, il peut y avoir un risque de dérive potentielle des coûts, liée notamment à l'incertitude sur l'évolution des coûts salariaux.

Les assureurs sont davantage disposés à développer une offre de services accessible à partir de la rente dépendance, c'est-à-dire une offre tarifée séparément et qui ne constitue pas une garantie du contrat. L'assureur joue alors le rôle d'un « acheteur en gros » de prestations de services pour le compte de l'assuré.

S'agissant de l'encadrement législatif et réglementaire des contrats d'assurance dépendance, M. Fabrice Pesin a indiqué que ce type de contrat est aujourd'hui soumis aux dispositions législatives et réglementaires prévues par le code des assurances. Les imperfections du marché, notamment les phénomènes d'anti-sélection, trouvent d'ores et déjà des réponses à travers l'introduction de dispositions contractuelles (périodes de carence, contrôle médical, limite d'âge de souscription). La création de normes additionnelles et spécifiques est cependant délicate : il convient d'éviter qu'une excessive réglementation ne fige la capacité d'innovation des assureurs. Un arbitrage est donc nécessaire entre, d'une part, une réglementation qui pourrait permettre la mise en place d'un contrat standard et, d'autre part, la nécessaire innovation des assureurs en la matière.

M. Henri Lamotte a rappelé la nécessité d'examiner la question plus large des enjeux économiques soulevés par le cinquième risque. Le dispositif actuel de prise en charge de la dépendance est développé et diversifié. L'effort public en la matière est significatif : il représente, en 2007, un point de produit intérieur brut (Pib), soit environ 19 milliards d'euros, ce qui place la France au niveau du Royaume-Uni et de l'Allemagne. Seuls les pays scandinaves consacrent un effort public plus important.

La prise en charge de la dépendance représente :

- à 60 %, des financements supportés par l'assurance maladie dans le cadre d'une prise en charge universelle ;

- à 25 %, des dépenses d'Apa, financées, pour les deux tiers, par les départements et, pour un tiers, par l'Etat à travers la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (Cnsa);

- à 15 %, des aides fiscales (pour 1 milliard d'euros) et sociales, auxquelles il faut ajouter l'aide sociale des départements.

A ce financement public s'ajoutent des dépenses privées par le biais de la souscription à des contrats d'assurance privée. En effet, le dispositif français de prise en charge de la dépendance est un système mixte à un triple niveau :

- il conjugue une socialisation partielle et un recours à la prévoyance individuelle ;

- la partie socialisée de la prise en charge de la dépendance mêle une couverture universelle assurée par l'assurance maladie et des aides fiscales et sociales modulées en fonction du revenu ;

- enfin, le système français repose sur une intervention de l'Etat et des départements.

Du point de vue de l'économiste, le caractère mixte du dispositif de prise en charge de la dépendance n'est pas surprenant et se retrouve dans les modes de financement de l'assurance maladie et de l'assurance vieillesse.

Le risque dépendance n'est en réalité qu'un risque maladie corrélé à l'âge, un risque incertain, d'une ampleur aléatoire en raison du caractère variable de la durée de vie en dépendance et de la gravité de la perte d'autonomie.

M. Henri Lamotte a précisé les trois arguments pouvant plaider en faveur d'un statut quo dans l'organisation actuelle de la prise en charge de la dépendance :

- les besoins de financement ne doivent pas être surestimés, comme le souligne le rapport de mars 2007 de Mme Hélène Gisserot sur les perspectives financières de la dépendance des personnes âgées à l'horizon 2025. Certes les dépenses relatives à la dépendance vont connaître une forte augmentation. Mais le problème porte moins sur les masses que sur le taux de croissance de ces dépenses, dans la mesure où il pourrait être plus rapide que celui de la richesse nationale. Les incertitudes portent donc sur les progressions comparées du Pib à l'horizon de 25 ans et du nombre de personnes âgées dépendantes. Or, celui-ci n'est pas directement corrélé aux évolutions démographiques : le nombre des plus de quatre-vingts ans devrait certes croître fortement, mais celui des personnes âgées dépendantes ne suivra pas la même évolution en raison de l'amélioration de l'état de santé des personnes âgées. A âge donné, le risque de dépendance devrait en effet diminuer. Selon les évaluations de la DGTPE fournies pour l'élaboration du rapport de Mme Hélène Gisserot, les besoins de financement supplémentaires à l'horizon 2025 devraient ainsi être compris entre un tiers de point et un demi point de Pib en plus, ce qui est peu ;

- la complexité du système de prise en charge s'explique par la mixité du dispositif actuel. Cette mixité se retrouve toutefois dans les modes de financement de l'assurance maladie et de l'assurance vieillesse, dans la mesure où la France n'a pas fait le choix d'une socialisation complète, ni d'un désengagement total de l'Etat. Elle est donc cohérente avec ce qui existe par ailleurs ;

- selon un sondage récent, un quart des Français considèrent que la prise en charge de la dépendance relève de l'assurance privée, 36 % souhaitent une intervention publique pour tous, 40 % une intervention publique recentrée sur les plus démunis. Les Français souhaitent donc un système fondé à la fois sur une part de prise en charge socialisée et sur des dispositifs de prévoyance individuels. Il n'existe pas de polarisation des préférences qui pourrait justifier un basculement vers l'une ou l'autre des options extrêmes, à savoir une socialisation complète de la prise en charge de la dépendance ou un recours généralisé à l'effort individuel.

M. Henri Lamotte a ensuite rappelé les arguments plaidant pour une réforme du dispositif actuel, à savoir la nécessité :

- de limiter l'augmentation du niveau des prélèvements obligatoires. Certes, le supplément de financement à trouver pour financer la dépendance devrait être faible, mais le contexte est d'ores et déjà défavorable avec un taux de prélèvements obligatoires particulièrement élevé. Or, tout accroissement des prélèvements obligatoires risque de peser sur l'emploi et la croissance. D'un point de vue macro-économique, un milliard supplémentaire de dépense publique se traduit par une suppression de 10.000 emplois ;

- d'accroître les possibilités d'arbitrage individuel de recours à la prévoyance ;

- de recentrer le système public sur les plus démunis ;

- d'améliorer l'efficacité du système actuel. Il peut être souhaitable d'accroître le poids des assureurs privés afin de réguler les dépenses en matière de dépendance.

M. Henri Lamotte a indiqué que si l'on s'interroge sur l'utilisation de l'outil fiscal comme vecteur d'incitation au développement de l'assurance dépendance, cela signifie que l'on écarte a priori deux scenarii : d'une part, le statu quo, d'autre part, le basculement vers une assurance privée obligatoire. Quel que soit l'outil incitatif utilisé, le développement de l'épargne dépendance ou de l'assurance dépendance n'est possible que si une clarification est opérée sur les choix à venir, s'agissant notamment de la part respective de la solidarité nationale et de l'effort individuel dans le financement de la prise en charge de la dépendance, ainsi que si les dépenses publiques relatives à l'assurance maladie et liées à l'Apa sont maîtrisées.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a souhaité savoir si les imperfections du marché de l'assurance dépendance légitiment un encadrement législatif et réglementaire afin de garantir la protection tant des souscripteurs que des assureurs. Il s'est ensuite interrogé sur l'impact et l'évaluation des aides fiscales tendant à favoriser la constitution d'une épargne dépendance, sur le couplage des produits d'assurance dépendance et d'assurance vie, ainsi que sur le bilan de la mise en place du prêt viager hypothécaire prévu par l'ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés pour la couverture du risque dépendance par la personne âgée.

S'agissant de l'encadrement de la négociation des primes d'assurance, M. Fabrice Pesin, a indiqué que l'Etat ne peut intervenir que pour garantir la plus grande concurrence possible sur le marché, afin que les prix proposés par les assureurs correspondent le plus exactement possible aux risques couverts.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a indiqué qu'étant donné la présence de seulement quatre opérateurs, l'Etat doit s'attacher à prévenir les ententes entre compagnies d'assurance.

M. Fabrice Pesin a précisé que le marché de l'assurance dépendance dans son ensemble est relativement concurrentiel. Certes quatre principaux opérateurs interviennent dans le secteur des compagnies d'assurances régies par le code des assurances. Mais il convient d'y ajouter les mutuelles et les institutions de prévoyance. Afin d'assurer une réelle concurrence sur le marché, l'Etat pourrait veiller à la bonne circulation des données statistiques facilitant ainsi l'installation de nouvelles entreprises. Si une réglementation en la matière était envisagée, il conviendrait de procéder en deux temps : identifier clairement les problèmes, puis s'interroger sur les mesures à envisager, par exemple, la mise en place d'une charte d'engagement des assureurs.

S'agissant de l'encadrement des règles de provision, M. Fabrice Pesin a indiqué que cette question fait l'objet d'une importante codification et que ce sujet ne pose pas de problème particulier. Il a également précisé ne pas disposer d'éléments sur la mise en oeuvre du prêt viager hypothécaire, étant donné le caractère récent de ce dispositif.

M. Henri Lamotte a précisé que deux pistes d'incitation fiscale peuvent être envisagées :

- soit une incitation au moment de la souscription des contrats d'assurance dépendance ;

- soit, en cas de couplage de l'assurance dépendance avec les produits d'épargne-retraite déjà existants, l'application des dispositifs fiscaux en vigueur aujourd'hui pour ces produits, à savoir : la déductibilité des cotisations au moment de la souscription et la taxation des rentes à la sortie. Dans ce cas, des incitations fiscales nouvelles ne sont pas nécessaires.

M. Vasselle, rapporteur, a rappelé que la Mutualité française, dans son audition du matin, a fait part d'une demande de clarification du classement de l'assurance dépendance parmi les autres produits d'assurance et a souligné le caractère prohibitif des montants à provisionner pour le développement de cette activité. Il s'est ensuite interrogé sur la nature dissuasive d'une taxation à la sortie des produits d'épargne dépendance.

M. Fabrice Pesin a indiqué ne pas être en mesure de répondre aux interrogations soulevées par la Mutualité française.

M. Henri Lamotte a indiqué que l'objectif recherché en 2003, par la mise en place d'un dispositif général d'épargne-retraite fondé sur une déductibilité des cotisations au moment de la souscription et une taxation à la sortie, était d'accroître les possibilités d'arbitrage des ménages entre une consommation présente et une consommation future dans un cadre fiscal neutre. La question à se poser est donc celle de la neutralité du cadre fiscal dans les choix des ménages.

M. Gérard Miquel a souligné les problèmes de financement des dépenses liées à l'Apa rencontrés par certains départements. En effet, les départements présentant un nombre élevé de personnes dépendantes ayant de faibles revenus sont le plus souvent ceux dont les bases de fiscalité sont aussi les plus réduites. Il a également précisé que, si l'augmentation des prélèvements obligatoires peut détruire des emplois, en revanche, la mise en place de l'Apa a permis d'en créer de nombreux.

M. Bernard Cazeau, vice-président, a souhaité savoir s'il convient d'aborder la question de la dépendance des personnes âgées et des personnes handicapées selon une approche convergente. Il s'est interrogé sur le coût de la création d'une prestation de compensation de la perte d'autonomie commune à ces deux publics.

M. Henri Lamotte a rappelé que la France a fait le choix d'un système dans lequel l'Apa est financée, pour les deux tiers, par les départements et, pour un tiers, par l'Etat. Un panorama des dispositifs mis en place à l'étranger fait apparaître deux modèles : un premier modèle dans lequel est assurée une couverture identique sur le territoire (modèle allemand de type bismarckien) ; un second modèle dans lequel la prise en charge de la dépendance est décentralisée et variable selon les régions (modèle suédois). En France, les aspirations sont ambivalentes : il existe une aspiration forte pour la garantie de l'égalité devant la loi et le système de protection sociale - qui justifie un système centralisé - et, en même temps, un souhait fort en faveur d'une décentralisation accrue.

Il a indiqué que l'Apa a effectivement été créatrice de nombreux emplois. Cependant, dans un raisonnement macro-économique, un milliard d'euros de dépense publique supplémentaire, financé par un milliard d'euros de prélèvements obligatoires supplémentaires, engendre la destruction de 10.000 emplois.

En réponse à M. Bernard Cazeau, vice-président, il a indiqué qu'il n'y a pas de légitimité à assurer une convergence entre l'Apa et la prestation de compensation du handicap (PCH), dans la mesure où ces deux prestations renvoient à des situations par nature différentes.

M. Charles Guené a souhaité connaître les propositions concrètes de la DGTPE devant permettre de dépasser la mixité du dispositif actuel, mixité qui peut être interprétée comme une absence de choix entre une socialisation totale et un recours généralisé à l'assurance privée.

M. Henri Lamotte a précisé qu'il est possible de trouver des justifications économiques au caractère mixte du dispositif de financement de la dépendance. D'ailleurs, il existe une grande diversité des modèles de prise en charge de la dépendance en Europe, ce qui prouve qu'il est impossible de définir une ligne directrice en la matière.

S'agissant des réformes possibles du système français actuel, quatre options d'évolution sont envisageables :

- deux options polaires : soit une socialisation complète de la prise en charge, soit un mécanisme d'assurance privée obligatoire avec des aides fiscales pour les ménages aux faibles revenus. Le Gouvernement ne semble pas s'orienter vers ces deux voies d'évolution ;

- deux options intermédiaires : en premier lieu, une réflexion sur le financement des prestations et les moyens devant permettre une réduction des dépenses d'assurance maladie et médico-sociales ; en second lieu, la mise en place d'incitations à la souscription d'assurance dépendance.

Table ronde réunissant les représentants des offreurs de services et d'hébergement en institution

Puis la mission a organisé une table ronde réunissant Mme Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa), membre suppléant du conseil de la CNSA, Mme Andrée Barreteau, responsable du pôle « Vieillesse-handicap » à la fédération hospitalière de France (FHF), membre suppléant du conseil de la CNSA, M. Pascal Champvert, président de l'association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), membre du conseil de la CNSA, Mme Véronique Covin, directeur du secteur social et médico-social à la fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif (Fehap), membre suppléant du conseil de la CNSA, M. Claudy Jarry, président de la fédération nationale des associations de directeurs d'établissements et services pour personnes âgées (Fnadepa), Mme Michèle Landreau, administrateur national de l'Union nationale des associations d'aide à domicile en milieu rural (Unadmr), M. Christian Möller, président de la conférence nationale des directeurs d'Ehpad, directeur de l'hôpital Saint-Alexandre de Mortagne-sur-Sèvre, membre du conseil de la CNSA, M. André Perrier, président d'Adessa, M. Didier Sapy, directeur de la fédération nationale avenir et qualité de vie des personnes âgées (Fnaqpa), membre suppléant du conseil de la CNSA, M. Emmanuel Verny, directeur général de l'union nationale des associations de soins et services à domicile (Unassad) et M. Alain Villez, conseiller technique de l'union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss), membre du conseil de la CNSA.

M. Bernard Cazeau, vice-président, a précisé les quatre pistes de réflexions qui seront abordées dans le cadre de la table ronde :

- l'état des lieux de la qualité de la prise en charge des personnes âgées dépendantes ;

- la réalité de l'alternative offerte aux personnes âgées entre les deux modes de prise en charge, à domicile ou en institution ;

- les possibilités d'amélioration de cette prise en charge, avec un accent mis sur l'organisation de l'offre, la médicalisation des établissements et de leurs effectifs, l'impact des nouvelles technologies. La problématique des métiers du secteur médico-social sera également abordée dans ce cadre ;

- l'organisation du cinquième risque.

Dans un propos liminaire, M. Christian Möller a souligné les attentes fortes des familles, des résidents en établissement et des personnels, à la fois, en ce qui concerne l'issue de la présente mission et les futures réformes qui seront décidées dans le domaine de la prise en charge de la dépendance. Tous sont attachés à la lisibilité des modifications qui seront apportées.

Il a également rappelé les espoirs déçus des réformes entreprises à partir des années 1996 et 1997, qu'il s'agisse de la mise en place de la prestation spécifique dépendance (PSD), de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) ou de la réforme de la tarification des établissements.

Il a indiqué que des moyens supplémentaires doivent être apportés à ce secteur en dépit de la situation délicate des finances publiques actuellement. Il faut cesser de demander toujours des efforts aux seuls comptes sociaux, au moment où une exigence forte d'amélioration de la qualité de prise en charge de la dépendance en établissement et à domicile se fait ressentir.

Il a rappelé le principe posé par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, à savoir le rapprochement des modes d'accompagnement de la perte d'autonomie quel que soit l'âge de la personne concernée.

M. Bernard Cazeau, vice-président, a souhaité connaître l'appréciation des différents intervenants sur le paysage actuel de la prise en charge de la dépendance, sur le bilan de l'effort d'équipement et de solvabilisation des ménages accompli ces dernières années, ainsi que sur les plans « Vieillissement et Solidarités » et « Solidarité-Grand âge » (PSAG).

M. Christian Möller a indiqué que le PSGA a été accueilli très favorablement. Les principes mis en exergue par ce plan (augmentation du nombre de places en établissements et à domicile ; objectif d'un ratio d'encadrement de un intervenant pour une personne âgée dépendante à l'horizon 2012) constituaient de bonnes voies d'amélioration de la prise en charge de la dépendance. Néanmoins, les attentes en la matière ne sont pas encore satisfaites, en dépit de la forte augmentation des moyens attribués aux sous-objectifs médico-sociaux de l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam).

Mme Andrée Barreteau a indiqué que le taux d'encadrement en établissement d'hébergement des personnes âgées dépendantes (Ehpad) est de 92 %, soit 0,4 agent par lit. Ce résultat n'est pas satisfaisant. Elle a rappelé que la retraite moyenne d'une personne de plus de quatre-vingts ans est de 1 200 euros, alors que le loyer moyen en Ehpad s'élève à 1 500 euros. Il est donc important de s'interroger sur la façon d'accroître la qualité de la prise en charge en établissement sans augmenter les tarifs pratiqués, afin de garantir des « restes à vivre » convenables aux personnes concernées.

Elle a également souligné la nécessité de veiller à la bonne articulation entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social. Il convient notamment d'éviter que le secteur médico-social ne soit la variable d'ajustement du secteur sanitaire. Les taux d'encadrement en Ehpad doivent être renforcés et le nombre de places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et en hospitalisation à domicile (HAD) doivent augmenter. La Fédération hospitalière de France a ainsi établi une cartographie des besoins en la matière département par département.

Mme Florence Arnaiz-Maumé a souligné le nombre important de réformes intervenues et en cours dans le secteur social et médico-social, ainsi que leur manque de coordination. Elle a indiqué que le PSAG est satisfaisant dans ses objectifs, même si ces derniers restent insuffisants. Elle a attiré l'attention sur l'absence de financement de ce plan à l'horizon 2009.

M. Alain Vasselle, rapporteur, s'est interrogé sur le bilan qui peut être tiré de la qualité de la prise en charge des personnes âgées dépendantes. Il a souhaité obtenir des précisions sur le profil des personnes prises en charge à domicile et en établissement, le niveau de coordination des acteurs intervenant auprès des personnes âgées, la capacité d'un établissement à faire face à tous les types de dépendance, ainsi que les besoins futurs en termes d'encadrement.

Mme Michèle Landreau a précisé que 80 % des personnes âgées souhaitent rester à domicile le plus longtemps possible. L'âge moyen d'entrée en Ssiad est de 83 ans, ce qui révèle un vieillissement de ce type de population. 42 % des patients sont en situation de dépendance forte (Gir 2) ; 11 % en situation de très grande dépendance (Gir 1). 54 % vivent en couple. Ces statistiques doivent inciter les pouvoirs publics à tout mettre en oeuvre pour permettre aux personnes dépendantes d'exercer leur libre choix entre le maintien à domicile et l'entrée en établissement.

Le maintien à domicile nécessite l'intervention de plusieurs types de personnels, notamment celle des aides soignantes, des auxiliaires de la vie sociale, des personnes assurant la livraison à domicile de repas et des infirmières de coordination. Un effort est fait pour éviter de séparer les couples.

Mme Michèle Landreau a rappelé cependant l'insuffisance du nombre d'infirmiers observée dans certaines zones. A cet égard, l'union nationale des associations d'aide à domicile en milieu rural a été sollicitée par les préfets et les directions régionales de l'action sanitaire et sociale pour mettre en place des centres de soins infirmiers. Ces centres travaillent en concertation avec les établissements hospitaliers et les centres locaux d'information et de coordination (Clic). Elle a également indiqué que l'accueil de jour autonome, c'est-à-dire non médicalisé, se développe et est particulièrement préconisé pour les patients atteints de la maladie d'Alzheimer.

M. Bernard Cazeau, vice-président, a fait remarquer que le maintien à domicile englobe à la fois des financements apportés par l'assurance maladie dans le cas des Ssiad et des ressources attribuées par les départements à travers l'Apa.

Mme Véronique Covin a indiqué que l'âge moyen d'entrée en Ehpad est également de 83 ans. Les personnes âgées sont placées de plus en plus tardivement en établissement, mais y demeurent en moyenne plus longtemps et avec un niveau de prise en charge beaucoup plus lourd. Les résidents présentent en effet le plus souvent plusieurs pathologies. Près de 75 % des patients sont en situation de dépendance totale ou partielle (Gir 1 à 4) ; 60 % présentent des syndromes de démence.

La création des unités de soins Alzheimer et le développement de l'hébergement temporaire constituent des améliorations dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes. Cependant, s'agissant de l'hébergement temporaire, se pose la question du financement des frais de transport qu'il nécessite.

M. André Lardeux s'est interrogé sur la maltraitance des personnes âgées, ainsi que sur les moyens permettant de la déceler.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a souhaité savoir comment la coordination est assurée entre les acteurs intervenant dans la prise en charge à domicile des personnes âgées dépendantes.

Mme Sylvie Desmarescaux s'est interrogée sur le rôle de coordination des Clic et sur le désengagement des Caisses régionales d'assurance maladie (Cram) de ces structures, comme c'est le cas dans le département du Nord notamment.

M. Pascal Champvert a indiqué qu'il convient de distinguer plusieurs types de maltraitance : les maltraitances physiques - les plus visibles et les plus simples à traiter-, les maltraitances financières, mais aussi les maltraitances par inadvertance, ou le manque de bientraitance, qui peut, dans ces deux derniers cas, résulter d'un manque d'encadrement.

Il a, par ailleurs, défendu les propositions faites par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) dans son rapport d'activité pour 2007, et s'est déclaré particulièrement attaché à la démarche préconisée, consistant à partir d'une analyse des besoins des personnes âgées dépendantes et de leur situation particulière, pour, ensuite, définir l'équilibre budgétaire vertueux devant permettre d'assurer le financement de la prise en charge de la dépendance. Une démarche inverse serait inappropriée.

Mme Michèle Landreau a indiqué que la coordination des acteurs doit se faire autour et à partir des besoins évolutifs de la personne dépendante, ce qui suppose un travail de collaboration avec les Clic et les aidants, notamment familiaux. Elle a souligné le rôle important assuré, en la matière, par les infirmières coordinatrices et les associations d'aide à domicile.

M. Charles Guené a souhaité savoir si, dans une approche d'efficience budgétaire et d'aménagement du territoire, il ne convient pas d'envisager une spécialisation des établissements par pathologie, plutôt que le développement de services spécialisés au sein d'un même établissement.

Mme Andrée Barreteau a indiqué qu'il est difficile d'assurer l'accueil de publics différents au sein d'un même Ehpad. Elle a souligné, de ce point de vue, le bien fondé des unités spécialisées dans le traitement de la maladie d'Alzheimer. Elle a rappelé la nécessité de disposer d'une offre de soins et de services combinant un maillage territorial satisfaisant, une spécialisation des établissements par pathologie et des formules d'accueil diversifiées.

Répondant à Mme Sylvie Desmarescaux, M. Christian Möller a indiqué que la Cram de la région Pays de Loire a versé 7 000 euros au moment de la création de la Clic de cette même région. Plus largement, il a insisté sur la nécessité de ne plus considérer le secteur médico-social comme la variable d'ajustement du secteur sanitaire. En particulier, il a regretté que les textes récents, notamment ceux relatifs à l'hôpital, aient été signés par la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) seule et non pas aussi par la direction générale de l'action sociale (DGAS). Il a souligné la nécessité d'approfondir la concertation avec les acteurs concernés, notamment dans le cadre des conférences sanitaires de secteur, afin d'établir des plans de soins communs ou de mettre en place le dossier médical personnel (DMP).

Abordant le deuxième thème de la table ronde, M. Alain Vasselle, rapporteur, a souhaité savoir si les personnes âgées dépendantes ont la possibilité d'exercer un réel libre choix entre le maintien à domicile et la prise en charge en établissement. Il s'est interrogé sur l'influence, dans les critères de choix des personnes concernées, des disparités géographiques d'offre de soins, des aides budgétaires et fiscales, ainsi que de l'Apa. Il a également souhaité connaître l'avis des offreurs de soins sur la proposition du centre d'analyse stratégique (CAS) visant à faire porter, dans un premier temps, l'effort sur l'accueil en établissement, puis de mettre l'accent sur le maintien à domicile à partir de 2010. Enfin, il s'est interrogé sur les rigidités actuelles de l'organisation de la prise en charge de la dépendance et sur la réelle volonté des acteurs concernés de développer des solutions intermédiaires, comme l'hébergement temporaire, l'accueil de jour ou l'accueil de nuit.

M. André Perrier a indiqué que les personnes les plus dépendantes n'ont pas la possibilité de choisir entre un maintien à domicile ou un placement en établissement spécialisé. Si les aides budgétaires et fiscales entrent peu en compte dans les critères de choix des personnes concernées, en revanche, le dépeuplement rural, l'isolement, l'absence de famille et le coût prohibitif de certains services constituent des paramètres importants. L'Apa à domicile n'est pas un facteur d'entrée prématurée en établissement. Elle permet, au contraire, d'en retarder l'échéance. S'agissant des rigidités du dispositif actuel de prise en charge de la dépendance, il a souligné le caractère artificiel de la frontière de l'âge sur laquelle repose, pour partie, le versement de la prestation de compensation du handicap (PCH) et de l'Apa. Jusqu'à l'âge de 60 ans, une personne dépendante peut bénéficier de la PCH. Au delà, elle relève de l'Apa. Or, il s'agit bien, dans l'un et l'autre cas, de perte d'autonomie.

Mme Véronique Covin a indiqué que deux éléments déterminent le choix des personnes âgées : d'une part, leur niveau de revenus et, d'autre part, l'offre de soins et de services de proximité. Sur ce dernier point, trois régions paraissent particulièrement bien dotées en Ehpad : l'ouest et le sud de la France, ainsi que l'Alsace. Les disparités géographiques en la matière s'expliquent, en partie, par les choix politiques locaux. La mise en place de la CNSA et des programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (Priac) ont néanmoins permis un travail d'harmonisation qui porte aujourd'hui ses fruits.

M. Didier Sapy a indiqué qu'il convient de ne pas opposer les deux types de prise en charge, maintien à domicile / hébergement en institution. La qualité de l'accompagnement de la perte d'autonomie repose sur une offre de services large tant en établissement qu'à domicile.

M. Emmanuel Verny a considéré que le seul scénario valable est celui reposant sur un développement simultané de l'offre de soins à domicile et en établissement, et non, comme le préconise le centre d'analyse stratégique (CAS), sur une démarche en deux temps, à savoir : privilégier, dans un premier temps, l'augmentation du nombre de places en Ehpad, puis mettre l'accent, dans un second temps, sur le maintien à domicile. A cet égard, le développement des schémas gérontologiques apparaît indispensable.

M. Pascal Champvert a indiqué que le libre choix des personnes âgées dépendantes doit constituer un objectif en soi des politiques publiques menées dans le secteur social et médico-social, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Certaines personnes âgées sont dissuadées de rentrer en établissement pour des motifs de coût. Il a précisé que les pays étrangers ayant une politique active en faveur des personnes âgées sont ceux qui ont également orienté leurs efforts dans les deux domaines concomitamment, le maintien à domicile et l'hébergement en institution. Il a rappelé que la Cour des comptes a bien mis en évidence, dans son rapport de 2005, le fait que seuls 50 % des besoins à domicile et en établissement sont aujourd'hui couverts.

Mme Andrée Barreteau a indiqué que 18 000 places supplémentaires en Ssiad et 9 000 places en hospitalisation à domicile sont nécessaires. Toutefois, le problème ne se pose pas uniquement en termes d'insuffisance du nombre de places offertes, mais aussi en termes d'insuffisance du taux d'encadrement des personnes âgées dont l'une des explications tient à la faible attractivité des métiers du secteur médico-social.

Mme Sylvie Desmarescaux a considéré, en réponse à la remarque de M. Bernard Cazeau, vice-président, qu'il ne faut pas opposer les soins financés par l'assurance maladie à domicile et les aides apportées dans le cadre de l'Apa, insistant sur la nécessité d'appréhender les besoins de la personne dépendante dans leur globalité. Elle s'est interrogée sur le coût moyen d'une prise en charge à domicile, estimant que celui-ci pouvait s'avérer élevé dans le cas de pathologies lourdes.

M. Charles Guené a indiqué qu'il est important de raisonner à pathologie et à services identiques, lorsque l'on souhaite comparer les coûts de prise en charge à domicile et en établissement.

M. Christian Möller a indiqué que certaines études montrent que le coût de la prise en charge à domicile devient particulièrement élevé lorsque les patients présentent des pathologies lourdes qui nécessitent notamment des systèmes de garde de nuit. A l'inverse, il est possible de considérer que le placement en établissement permet une certaine mutualisation des moyens et, donc, est susceptible, dans certains cas, de réduire les coûts de prise en charge.

M. Emmanuel Verny a rappelé que 56 % des personnes bénéficiant de l'Apa à domicile sont en Gir 4 (dépendance partielle) et que 43 % des personnes placés en établissement sont en Gir 2 (dépendance forte). Il a souligné la nécessité de conjuguer le choix de la personne avec ce que la nation est capable de prendre en charge au titre de la solidarité nationale. Il a, à cet égard, rappelé la notion de double subjectivité développée par la CNSA : l'évaluation des besoins de la personne doit se faire au regard, d'une part, de son projet de vie, et, d'autre part, de son environnement. Lorsque la dépendance exige une prise en charge devenue particulièrement lourde, le passage du domicile à un hébergement en institution s'impose de lui-même.

M. Claudy Jarry a indiqué que le libre choix des personnes âgées dépend de l'offre de soins et de services à domicile et en établissement, de la diversité de cette offre, mais aussi du « temps d'opérer un choix » laissé à la personne concernée, de la possibilité qui lui est donnée d'accéder à l'information sur les différents modes de prise en charge et de la coordination entre les intervenants.

M. Pascal Champvert a souligné que le maintien à domicile le plus longtemps possible n'est pas forcément la meilleure solution, dans la mesure où il peut amener à un placement en établissement décidé en urgence en raison de la dégradation rapide de l'état de santé de la personne maintenue trop longtemps à domicile. Au contraire, l'entrée en établissement doit être préparée.

M. Didier Sapy a indiqué qu'il convient de réfléchir, en matière de coûts, à la répartition du poids de ces derniers entre les différents financeurs (l'Etat, les collectivités territoriales et les familles).

M. Bernard Cazeau, vice-président, a ensuite introduit le troisième thème de la table ronde, consacré aux possibilités d'amélioration de la prise en charge des personnes âgées dépendantes, en insistant notamment sur l'organisation de l'offre, la médicalisation des établissements et l'impact des nouvelles technologies. Il a notamment souhaité que des précisions soient apportées sur la situation des métiers du secteur médico-social : difficultés de recrutement, insuffisante attractivité des métiers, formation et qualification des personnels...

M. Alain Vasselle, rapporteur, a souhaité obtenir des précisions sur les expériences d'hébergement temporaire ou d'accueil de nuit et les attentes des personnes dépendantes ou de leur famille en ce domaine.

Il s'est également demandé s'il faut envisager de reconvertir un certain nombre de places de soins aigus devenues disponibles dans les hôpitaux pour accueillir des personnes âgées dépendantes. Pourrait-on ainsi développer la présence d'Ehpad au sein même des établissements de santé ?

M. Claudy Jarry a souligné l'importance de la relation entre le corps et l'esprit et a estimé que l'analyse des questions de dépendance doit intégrer la dimension de la vie sociale. S'appuyant sur des exemples concrets, il a jugé qu'il ne suffit pas de traiter le corps « abîmé », mais qu'il faut également prendre en compte l'être humain, la prise en charge des personnes âgées dépendantes supposant un accompagnement, et non une démarche exclusivement curative. Aujourd'hui, 25 % des personnes de plus de 70 ans ont moins d'un contact privé par semaine et, si l'on sait quantifier les besoins, on ne sait pas répondre aux attentes : parler uniquement de millions d'euros ou de ratios d'encadrement revient à oublier la dimension humaine de ces questions. A cet égard, il convient de développer certains types de métiers, comme les psychologues.

Abordant la question du statut des aidants familiaux, M. Alain Villez a estimé qu'il faut sortir de l'opposition manichéenne entre, d'une part, prise en charge intégrale de la personne âgée dépendante par sa famille et, d'autre part, recours total à un Ehpad. Aujourd'hui, près de 70 % des personnes ayant perdu le plus leur autonomie vivent à domicile et près de la moitié d'entre elles reçoivent une aide familiale. Des expériences visant à offrir aux aidants familiaux des structures d'aide au répit existent mais leur généralisation soulève des difficultés. La logique actuelle se traduit en effet davantage par un saupoudrage des moyens que par une véritable structuration de l'offre de services en matière d'hébergement temporaire.

Mme Michèle Landreau a indiqué que l'Unadmr a mis sur pied un système de garde de nuit itinérante pour les personnes âgées dépendantes vivant à domicile. Il s'agit là d'une demande importante de ce public, mais le financement de telles expériences, qui requièrent du personnel qualifié, est parfois difficile. La mutualité sociale agricole (MSA) participe, par ailleurs, au financement d'expérimentations visant à permettre aux aidants familiaux de prendre quelques jours de repos. Cette logique de mise en place de dispositifs innovants est donc bien intégrée par les acteurs locaux.

Mme Véronique Covin a souligné les difficultés rencontrées dans le secteur médico-social pour recruter des personnels qualifiés et conserver les salariés, en raison d'une faible attractivité de ces métiers. Le taux d'encadrement dans les Ehpad est plus faible que dans l'ensemble du secteur médico-social (6 % contre 15 %) et la qualification des personnels est souvent inférieure au profil des postes occupés, notamment en ce qui concerne les postes d'aides-soignants. Aucun changement ne paraît devoir être attendu de ce point de vue tant que cette filière ne sera pas revalorisée, ce qui pourrait passer par la validation des acquis de l'expérience, le développement de passerelles entre les qualifications et la mise en place de modules de formation spécifiques.

M. Pascal Champvert a estimé que le manque de personnel, souligné par la Cour des comptes elle-même, explique pourquoi les personnes ne souhaitent pas rester travailler dans ce secteur : seule la moitié des besoins est couverte. Par ailleurs, les tâches concernées sont mal rémunérées, certains départements n'hésitant pas à demander aux établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes de ne pas appliquer les conventions collectives. Des crédits supplémentaires pourraient permettre de recruter des profils aujourd'hui insuffisamment présents dans les établissements, comme les psychologues : une personne âgée dépendante ne voit en moyenne un psychologue que dix minutes par mois.

M. Bernard Cazeau, vice-président, a ensuite abordé le dernier thème de la table ronde, consacré aux réflexions en cours sur l'organisation du cinquième risque. Il a, en particulier, demandé aux intervenants de réagir à l'idée de convergence de la prise en charge des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées, évoquée notamment par la CNSA.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a souhaité connaître l'appréciation des offreurs de services et d'hébergement sur l'efficacité du système actuel de prise en charge de la dépendance des personnes âgées, ainsi que sur leur vision du partage entre la solidarité nationale et l'effort individuel. Il s'est ainsi demandé s'il convient de mettre davantage à contribution les revenus et le patrimoine des personnes âgées dépendantes.

Il s'est ensuite interrogé sur la coordination de l'intervention de différents acteurs et a souhaité savoir s'il est possible de mieux coordonner, par exemple par le biais des futures agences régionales de santé (ARS), l'hôpital, le médico-social et la médecine de ville.

Il a, par ailleurs, abordé la question de la viabilité du système actuel de tarification de la prise en charge des personnes âgées en établissement : quelles sont les voies d'un schéma de répartition des coûts plus pertinent et plus juste et quel bilan tirer de la politique de conventionnement tripartite menée depuis dix ans ?

M. Alain Villez a déclaré partager la philosophie développée par le conseil de la CNSA dans son dernier rapport annuel, qui constitue un trait d'union entre les différents acteurs. La perte d'autonomie doit être prise en considération sans distinction d'âge et doit faire l'objet d'un droit universel à compensation, passant par la mise en place d'une nouvelle prestation unique et universelle, reposant sur un financement socialisé. Le panier de services socialisé pris en compte dans cette nouvelle prestation pourrait être extrapolé à partir des éléments de prise en charge couverts par l'Apa et par la prestation de compensation du handicap. Dès lors, les dispositifs de recours sur succession ou d'obligation alimentaire n'apparaissent pas comme des voies à suivre, même si l'on peut envisager de moduler les prestations en fonction des revenus.

S'agissant de la gouvernance, il a salué le partenariat étroit entre la CNSA et les conseils généraux.

Après avoir également apporté son soutien aux conclusions du rapport du conseil de la CNSA, M. Emmanuel Verny a estimé que la prise en charge du risque dépendance nécessitera une augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) et a jugé illusoire toute idée de stabilisation, voire de baisse, des prélèvements obligatoires, ajoutant que les citoyens sont prêts à accepter une augmentation de ces derniers. Dans ce schéma, le recours à l'assurance ne peut venir qu'en supplément d'un financement qui doit rester essentiellement public.

Il a ensuite formulé trois observations :

- le panier de biens et services offert aux personnes à domicile doit prendre en compte toutes les aides nécessaires à l'accomplissement des gestes de la vie quotidienne et pas seulement les aides « essentielles » ;

- les conseils généraux doivent appliquer les mécanismes de tarification. Or près de 50 % d'entre eux ne respectent pas aujourd'hui les dispositions du décret budgétaire paru en 2003, au motif, il est vrai, que le financement qui leur est apporté par l'Etat n'est pas sécurisé ;

- il faut poursuivre la professionnalisation des personnels intervenant dans le secteur médico-social. A cet égard, évoquer un risque de « surqualification » des personnels, comme le fait le rapport de Mme Hélène Gisserot, n'apparaît pas acceptable.

M. André Perrier s'est prononcé en faveur de la mise en place d'une cinquième branche de protection sociale, reposant sur un financement pérenne et diversifié, puis a fait part de son opposition à tout retour aux mécanismes applicables aux prestations d'action sociale - obligation alimentaire et recours sur succession. Il s'est également montré hostile au financement de la prise en charge du risque dépendance par le biais d'une couverture assurantielle, celle-ci pouvant amener une sélection de publics qui serait inacceptable.

M. Pascal Champvert a rappelé l'accord des différents offreurs de services et d'hébergement sur les orientations proposées par la CNSA, soulignant qu'elles sont le fruit d'un compromis, ce qui leur donne une certaine force. Il s'est étonné que le président de la mission commune d'information ait pris certaines distances par rapport à ces orientations.

Il s'est déclaré en faveur d'un financement socialisé de la prise en charge du risque dépendance et opposé à l'introduction du recours sur succession, qui pourrait introduire des inégalités injustifiées dans le traitement des personnes, en fonction de la pathologie dont elles sont atteintes.

Quant à l'assurance privée, elle peut apparaître comme un utile complément à la prise en charge du risque dépendance, mais elle ne saurait en constituer le socle, qui doit demeurer socialisé. Cette position est déjà une concession, qui doit être appréciée comme telle, de la part des membres de la CNSA au départ favorables à un financement exclusivement public.

Mme Véronique Covin a mis en évidence le cloisonnement existant entre la prise en charge sanitaire et la prise en charge médico-sociale. A cet égard, il n'apparaît pas cependant souhaitable de confier aux futures ARS une compétence sur le secteur médico-social, pour deux raisons : d'une part, ceci remettrait en cause la place de la CNSA et des collectivités territoriales, lesquelles pourraient alors se désengager ; d'autre part, on peut craindre que les ARS se mobilisent moins au profit des personnes âgées dépendantes que ne le fait aujourd'hui la CNSA.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a souligné que la mission commune d'information travaille sans a priori et examine l'ensemble des solutions possibles.

M. Charles Guené a remercié les intervenants pour la qualité de leurs propos. Il a confirmé les remarques formulées par le rapporteur, les membres de la mission pouvant apparaître plus ouverts que certaines personnes auditionnées, dont les analyses reposent sur des certitudes très affirmées. Il a, en particulier, indiqué que la mise à contribution du patrimoine pourrait prendre des formes très diverses, évoquant, par exemple, l'idée d'un « ISF dépendance ».

M. Bernard Cazeau, vice-président, a remercié les différents participants à la table ronde puis s'est associé aux propos du rapporteur, soulignant que la mission commune d'information procède à des auditions variées et n'a, à ce stade, abouti à aucune conclusion.