Au cours de la discussion en séance publique, l’Assemblée nationale rejette, par 378 voix contre 97, le texte d’une question préalable défendue par François Mitterrand (extraits) :
" Quel est donc le trublion que M. Marcellin veut mettre à la raison par ce projet de loi ? Quel est l’agitateur à ce point redoutable qu’il faille, pour l’atteindre, mobiliser la science des juristes, la majesté du Parlement ? Quel est cet ennemi de la société qui mérite qu’à cause de lui on attente au droit d’association, loi fondamentale de la démocratie ? Un nihiliste attardé, un maoïste obstiné, un disciple de Bakounine, un sectateur d’Ordre nouveau, un lecteur de Jean-Paul Sartre, un gaulliste de gauche ? Non, mes chers collègues, je vais vous le dire. L’énergumène que le Gouvernement réduira au silence, pour peu que nous votions la loi, c’est la plus haute juridiction administrative de notre pays : le Conseil d’État.
(…) Le Conseil d’État estime en effet que le principe de la liberté d’association est incompatible avec le régime de l’autorisation préalable.
(…) S’adressant aujourd’hui à l’Assemblée nationale, [le ministre de l’intérieur ] demande en somme au pouvoir législatif d’arracher au pouvoir juridictionnel ce que la sagesse de nos anciens avait refusé au pouvoir législatif.
(…) L’idée générale du droit, en la matière, est que l’association est d'abord et surtout la chose des associés et que l’exception est que l’État peut intervenir pour réprimer des abus.
(…) Des lois de circonstance, mes chers collègues. Elles ont deux caractères communs, que l’on retrouve chaque fois que l’on en parle ici, au point que devant cette banalité, on hésite à répéter les mêmes mots : elles sont inutiles et elles sont dangereuses. Le texte dont nous discutons n’échappe pas à ce double label.
(…) La loi de 1901, et c’est tout son sens, refuse le régime préventif de l’autorisation préalable et opte pour le système dit " répressif ", a posteriori, qui ne frappe que les abus. En inversant l’ordre des choses, le Gouvernement, à mon sens, modifie de fond en comble le droit d’association. "
Finalement, un amendement déposé conjointement par Jean Foyer, président de la commission des lois, et Claude Gerbet, rapporteur du texte, rétablit le texte du gouvernement tout en l’assortissant de conditions plus strictes, et est finalement adopté par l’Assemblée par 372 voix contre 97.