Loi n° 2004-627 du 30 juin 2004 modifiant les articles 1 er et 2 de la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques et relative au recouvrement , par les institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage, des prestations de solidarité versées entre le 1 er janvier et le 1 er juin 2004 aux travailleurs privés d'emploi dont les droits à l'allocation de retour à l'emploi ont été rétablis ( Journal officiel du 1 er juillet 2004) .

Cette proposition de loi , due à une initiative de M. Alain Gournac, poursuit deux objectifs. Il s'agit, d'une part, de prolonger de six mois le délai de suspension de certaines dispositions de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 et, d'autre part, de permettre à l'UNEDIC de récupérer les sommes versées au titre de prestations de solidarité aux demandeurs d'emploi qui, un temps privés de leur allocation de retour à l'emploi, vont être prochainement rétablis dans leurs droits.

Ce texte vise donc à apporter une réponse rapide à un problème ponctuel.

Il convient de rappeler que certaines dispositions de la loi de modernisation sociale ont été suspendues - et non abrogées - par le législateur, soucieux de laisser aux partenaires sociaux la possibilité de négocier un accord. La date d'expiration de cette période de suspension de dix-huit mois, prévue le 3 juillet 2004, ne permet pas d'envisager que les négociations aboutissent avant cette limite.

L' article premier de la proposition de loi prévoit donc de prolonger de six mois, pour le porter de dix-huit à vingt-quatre mois, le délai de suspension des dispositions en cause de la loi de modernisation sociale. Cette modification a pour objet de permettre aux partenaires sociaux de poursuivre leurs travaux dans la sérénité et d'éviter la conclusion précipitée d'un accord susceptible de ne pas donner entière satisfaction. Il tend aussi, par cohérence, à allonger de six mois le délai pendant lequel peuvent être conclus des accords d'entreprise relatifs à la procédure de consultation du comité d'entreprise en cas de licenciement économique.

L' article 2 vise à tirer les conséquences du rétablissement dans leurs droits des bénéficiaires de l'allocation d'aide au retour à l'emploi ou « recalculés », et à permettre à ceux-ci de recevoir les indemnités correspondant aux allocations non perçues. Il vise en contrepartie à permettre à l'Etat de récupérer les sommes correspondant aux allocations de solidarité dont le versement est devenu indu depuis la réintégration de ces chômeurs dans leurs droits. L' article 2 organise donc la récupération de ces fonds, en autorisant les ASSEDIC à effectuer une compensation entre les sommes qu'elles doivent verser aux assurés et celles qu'ils ont reçues.

La commission des affaires sociales a conclu favorablement à l'adoption de la proposition de loi, sous réserve d'une précision rédactionnelle à l' article 2 visant à écarter la compensation dans les cas où le cumul entre une allocation de solidarité et une allocation de chômage est autorisé.

Au cours de la discussion générale au Sénat , M. Alain Gournac, rapporteur de la commission des affaires sociales, a rappelé la suspension de onze articles de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 décidée par le législateur dans le cadre de la loi du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques. Il a estimé que la loi du 17 janvier 2002 avait « alourdi et allongé de manière déraisonnable » la procédure de licenciement économique, « la rendant peu compatible avec les besoins d'adaptation des entreprises », et que la suspension de onze de ses articles avait pour but d'inciter les partenaires sociaux à négocier un accord national interprofessionnel définissant un nouveau droit du licenciement économique.

La proposition avait donc pour objet, a poursuivi le rapporteur, de décaler de six mois l'échéance prévue en janvier 2003 pour permettre aux négociations de parvenir à leur terme. Il s'agissait parallèlement de consentir le même délai aux entreprises afin de leur donner le temps de conclure des « accord de méthode » portant sur la procédure de consultation du comité d'entreprise en cas de licenciement économique.

Le rapporteur a ensuite fait état de la nécessité de combler une lacune du code du travail en permettant que soit mise en oeuvre une procédure de récupération de l'indu par l'Etat, compte tenu des prestations de solidarité perçues par quelque 70 000 demandeurs d'emploi du fait de l'expiration de leurs droits à l'assurance chômage, allocations qui avait perdu toute légitimité dès lors que leurs droits étaient restaurés avec effet rétroactif.

M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail, a d'emblée annoncé que la proposition de loi recueillait le soutien du Gouvernement, car elle s'inscrivait dans la « démarche de dialogue social et d'équité » qui caractérisait l'action de celui-ci. Il a commenté la simplicité du mécanisme de reversement au budget de l'Etat des sommes perçues au titre du régime de solidarité prévu par l' article 2 , précisant que les sommes versées à ce titre s'élevaient à 86 millions d'euros.

Dans la discussion générale sont également intervenus M. Gilbert Chabroux, qui a qualifié d'« impasse » la « lamentable affaire des recalculés », la proposition ayant pour objet d'« essayer de régler cet imbroglio juridico-financier », Mme Anne-Marie Payet, MM. Alain Dufaut et Roland Muzeau.

Le Sénat, suivant l'avis de la commission et du Gouvernement, a ensuite rejeté la motion tendant à opposer la question préalable déposée par le groupe CRC et présentée par M. Guy Fischer, qui a contesté les « recettes libérales, chères au MEDEF » appliquées par le Gouvernement pour « desserrer l'étau juridique et fiscal pesant sur les entreprises afin que ces dernières réalisent toujours plus de profit ».

Le Sénat a alors abordé la discussion des articles au cours de laquelle sont intervenus MM. Robert Bret, Chabroux, Jean Chérioux, Fischer, Muzeau et Philippe Nogrix.

Il a tout d'abord rejeté 16 amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article premier, présentés (en termes identiques à sept reprises) par les groupes socialiste et CRC.

A l' article premier , il a repoussé deux amendements de suppression des groupes CRC et socialiste, puis a rejeté un amendement du groupe CRC tendant à insérer un article additionnel avant l'article 2 afin de prévoir la prise en charge par l'UNEDIC de l'indemnisation des préjudices subis par les allocataires qui ont vu rétroactivement leurs droits amputés.

A l' article 2 , le Sénat a repoussé un amendement du groupe CRC concernant la situation des intermittents du spectacle. Avec l'accord de la commission et du Gouvernement, il a ensuite adopté un amendement de M. Nicolas About complétant cet article pour préciser la procédure de calcul des reliquats qui devront être versés aux travailleurs réintégrés à titre rétroactif dans le régime d'assurance chômage afin de permettre aux ASSEDIC de s'assurer par tout moyen, y compris par des déclarations sur l'honneur, de l'étendue réelle des droits auxquels chacun peut prétendre, de manière à ce qu'il soit tenu compte des éventuels revenus ou salaires susceptibles de limiter ces droits. L'amendement du président de la commission des affaires sociales a été rectifié à la demande de M. Gérard Larcher pour que le terme de « reliquat d'allocation d'assurance » soit substitué à celui de « reliquat d'assurance ».

Après le retrait d'un amendement de MM. About et Lardeux, le Sénat a entendu les explications de vote de MM. Muzeau, Chabroux et Alain Dufaut. Puis sont intervenus le rapporteur et le ministre délégué, qui a salué le courage des gestionnaires de l'UNEDIC, qu'ils soient représentants des salariés ou des entreprises. Le Sénat a alors adopté la proposition de M. Gournac dans le texte des conclusions de la commission des affaires sociales ainsi amendé.

Puis l' Assemblée nationale a adopté la proposition de loi sans lui apporter de modification, rendant ainsi son texte définitif .