Genève 17 mars 2004 INTERVENTION DE M. ROBERT DEL PICCHIA PRÉSIDENT DU GROUPE FRANÇAIS DE L'UNION INTERPARLEMENTAIRE |
Monsieur le Secrétaire général, Monsieur l'ambassadeur, Mesdames, Messieurs,
Nous sommes réunis ici pour rendre hommage au co-fondateur de l'Union interparlementaire, Frédéric Passy, en inaugurant ce magnifique centre d'archives qui porte désormais son nom.
Le président, Christian Poncelet, m'a demandé de le représenter à cette manifestation et vous dire tout le regret qu'il a de ne pas être parmi nous. Il est retenu dans les Vosges par la campagne pour les élections régionales et les élections départementales qui ont une grande importance pour le Sénat qui est le représentant des collectivités locales françaises et dont l'approfondissement de la décentralisation politique et administrative est l'un de ses axes politiques majeurs .
Frédéric Passy c'est bien évidemment, dès 1867, le fondateur de la " Ligue internationale et permanente de la paix " qui se transformera, en 1871, en " Société française des amis de la paix ", puis, en 1889, en " Société française pour l'arbitrage entre nations ".
Cet engagement pour la paix de ce grand libéral et de ce grand humaniste reposait sur une horreur profonde de la violence, sur le respect du droit et de la liberté, sur la substitution de la justice à la brutalité des armes, sur la solidarité entre les peuples et entre les hommes, sur une vision profondément humaniste et chrétienne mais aussi sur la bêtise de la consommation improductive qu'est la guerre et qui scandalisait cet économiste.
Son engagement politique comme député de Paris en 1881 l'a tout naturellement conduit à promouvoir la notion d'arbitrage en France puis au niveau international. C'est donc très naturellement qu'en, 1889, année où il fut battu aux élections législatives, reprenant une idée d'Henry Richard, le Secrétaire de la Ligue anglaise de la paix, il crée avec son successeur Randal Cremer, l'Union interparlementaire.
Cette action pour l'arbitrage en faveur de la paix et du développement de l'arbitrage valut le prix Nobel en 1901 à Frédéric Passy et en 1903 à Randal Cremer.
Je suis heureux que le Parlement français ait pu contribuer à la rénovation de ce centre d'archives qui mettra en valeur l'extraordinaire fond documentaire de l'Union à la disposition des chercheurs. L'exploitation de ce fond ne peut que contribuer à enrichir nos travaux et nos réflexions.
Je vous ai apporté le projet de loi déposé par M. Raymond Poincaré alors Président du Conseil et par M. Aristide Briand, alors Ministre des Affaires étrangères portant ouverture d'un crédit de 500 000 francs sur le budget de l'exercice 1927 pour faire face aux dépenses d'organisation de la 24ème Conférence interparlementaire qui devait se dérouler à Paris.
L'exposé des motifs est remarquable à deux titres.
Tout d'abord je me suis amusé, grâce au calcul d'actualisation monétaire de notre ministère des finances, à calculer l'équivalent en euros de 500 000 francs de 1927. D'après ces calculs cela équivaut à 250 euros…. Comme quoi nous avons là une illustration concrète des questions budgétaires de notre organisation qui font l'objet, à chacune de nos réunions, de bien des discussions.
En second lieu, comment ne pas être frappé dans ce rapport du gouvernement français par l'intérêt des plus hauts responsables de la République pour l'Union interparlementaire. Je cite Aristide Briand qui déclarait alors : " si l'Union poursuit les mêmes buts que la Société des Nations, dont elle a plus d'une fois préparé, facilité l'action, elle y parvient par des voies différentes, puisque l'Assemblée de Genève est une émanation directe des gouvernements, tandis que la Conférence parlementaire représente une émanation directe des parlements et des peuples. " Aristide Briand ajoutait que " les réunions de l'Union interparlementaire, cela est incontestable, offrent des occasions de nouer des relations personnelles, de collaboration périodique, de compréhension plus complète, de rapprochements d'idées, qui, sans nuire, loin de là, à l'oeuvre de la SDN, permettent des solutions parlementaires nationales plus rapides, parfois plus heureuses et plus complètes, des grandes questions d'intérêt général, en favorisant le développement de l'esprit international de paix ".
Ce bel hommage de l'Exécutif au Législatif correspond tout à fait à notre vision de l'Union interparlementaire et de nos objectifs communs qui sont de donner, à travers nos assemblées et à travers leur organisation, l'UIP, une dimension parlementaire à la coopération internationale. La première conférence des présidents disait en 2000 que " Les parlements sont constitués d'hommes et de femmes élus par le peuple pour le représenter et exprimer ses aspirations; le Parlement est l'institution de l'État qui permet à la société dans toute sa diversité de participer au processus politique. Incarnant la souveraineté du peuple, c'est en toute légitimité que le Parlement peut concourir à l'expression de la volonté de l'État au plan international. "
On ne peut qu'être frappé de la concordance des analyses de 1927 à 2000. C'est bien dans cet esprit que s'inscrivaient Frédéric Passy, Aristide Briand et, je crois chacun d'entre nous.
Je vous remercie.