Le mercredi 8 novembre 2023, s’est déroulé, l’Atelier régional conjoint sur le renforcement du rôle des parlements dans la défense et la promotion des droits de l’Homme en Afrique australe, organisé par le programme européen INTER PARES, en coopération avec le Forum parlementaire de la Communauté de développement de l’Afrique australe (PF SADC) en visioconférence depuis le Parlement du Malawi.

Cet Atelier régional conjoint a exposé les moyens de renforcer le rôle des parlements dans la protection et la promotion des droits de l’Homme. Une réunion de lancement des indicateurs, outils de l’engagement démocratique des parlements, s’est déroulée le 21 novembre 2023 afin de présenter des outils pour la protection et la promotion parlementaires des droits de l’Homme

1. Devoirs des gouvernements et des parlements en matière de droits de l’Homme

Les parlements jouent un rôle central dans la promotion et la protection des droits de l'homme. Ils ont le devoir central de ratifier les traités relatifs aux droits de l'homme, d’allouer des fonds pour leur mise en œuvre, et de superviser les activités gouvernementales dans ce domaine.

Le Forum parlementaire de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC PF) joue un rôle majeur dans la promotion des principes des droits de l’homme et dans le travail des parlements de la région de la SADC, élaborant en février 2023 des lignes directrices de promotion et protection des droits de l'Homme.

L’obligation de respect requiert de la part des parlements de s’assurer de l’adéquation des lois nationales avec les droits des citoyens ; l’obligation de protection implique la protection par les parlements des citoyens contre les violations des droits de l’Homme. Les parlements ont une obligation de promouvoir et de faire respecter ces droits. Suffisamment de ressources financières et humaines doivent être allouées aux commissions et autres dispositifs de protection des droits de l’Homme. Les parlements doivent faire respecter les principes d’égalité, de non-discrimination, de représentativité, d’éducation continue et d’investissement dans la recherche relative aux droits de l’Homme. La ratification des traités relatifs aux droits de l’homme est centrale.

Mme Kirsten ROBERTS LYER, spécialiste en droit international des droits de l’Homme à la Central European University, a présenté la boîte à outils « Engagement efficace des organes parlementaires en matière de droits de l’Homme, mettant l’accent sur la création et le renforcement de commissions parlementaires nationales des droits de l’Homme. Ces dernières alimentent les débats parlementaires en informant sur la surveillance des droits de l’Homme. Les outils proposent des suggestions pratiques en matière d’établissement du budget, de sélection des membres, de contrôle des procédures et de mise en œuvre des droits de l’Homme au niveau national. L’engagement proactif des parlementaires est crucial à la protection des droits de l’Homme.

2. Création de commissions parlementaires pour les droits humains et sensibilisation des membres à leur rôle protecteur

a) Conseils de création des commissions parlementaires de protection des droits de l’Homme

Les compétences des commissions parlementaires des droits de l’Homme doivent être explicitées dans le Règlement parlementaire. Mme Utaara MOOTU, membre du SADC, a rappelé le rôle primordial des parlements en termes d’allocation de ressources budgétaires et de supervision des lois et traités relatifs aux droits de l’Homme. Les parlements doivent garantir que les questions fondamentales liées aux droits de l’Homme puissent être débattues en séance.

Mme Claudia SANTOS, Vice-Présidente de la commission des affaires constitutionnelles, des droits, libertés et garanties de l’Assemblée Nationale du Portugal, a expliqué les missions de cette commission. Les sous-commissions garantissent et supervisent la promotion des droits de l’Homme dans divers domaines, sous la responsabilité du ministre de la Présidence, du ministre des affaires parlementaires, de la justice et de l’intérieur. Les commissions émettent des avis sur des questions d’interprétation de la Constitution et la constitutionnalité des projets et propositions de loi pour remédier à d’éventuelles lacunes. La composition de la commission vise à respecter la pluralité politique de l’Union européenne et du parlement portugais. Les sous-commissions sont organisées en diverses thématiques, telles que l’égalité et le principe de non-discrimination. La commission contribue à une égalité grandissante et joue un rôle-clef dans les cas d’urgence tels que les épidémies et conflits armés.

Mme Jerónima AGOSTINHO, membre de la commission sur le genre et les nouvelles technologies du parlement du Mozambique, a rappelé qu’il est crucial de soutenir les droits humains pour favoriser le progrès. Le parlement du Mozambique a développé des mécanismes internes utiles à la promotion des droits de l’Homme, tels qu’un examen périodique de la commission nationale des droits de l’Homme. La publication de rapports périodiques, des rencontres avec la société civile et des partenariats stratégiques de recherche en matière de droits de l’Homme sont envisagés.

b) Sensibiliser les parlementaires à leur rôle en matière de sauvegarde des droits de l’Homme

La protection des droits de l’Homme doit être assurée dès la préparation de la législation nationale. M Adam BODNAR, ancien médiateur polonais pour les droits des citoyens et élu au Sénat de Pologne, a évoqué une "chambre de réflexion" sur la loi. Il a observé que les volontés politiques peuvent être contraires aux normes relatives aux droits de l’Homme et que les parlementaires ne connaissent parfois pas ces normes. Pour l’examen d’un projet de loi, les parlementaires doivent avoir une connaissance des conventions internationales afin de rendre le projet de loi conforme. Dans le cadre d’une proposition de loi, les parlementaires coopèrent avec les autorités indépendantes (Ombudsman) ou la société civile (ONG). M. Adam BODNAR a préconisé des évaluations bimensuelles avec la participation d'experts et d'ONG pour garantir la conformité des projets de loi aux normes internationales des droits de l’Homme.

Les parlements ont un rôle-clef lors de la ratification des conventions internationales et régionales en matière de respect des droits de l’Homme, en particulier sur le continent africain qui n’est pas homogène en la matière, comme l’a rappelé M. Darren BERGMAN, député sud-africain.

M. Adam BODNAR a mis en évidence l’effet de levier apporté par les ONG en matière de respect et de promotion des droits de l’Homme, notamment en Pologne. Il a souligné que certaines ONG tendent à utiliser les droits pour défendre des valeurs idéologiques, comme le respect des traditions au détriment du droit à l’avortement. C’est pourquoi les parlementaires doivent intervenir pour protéger les droits de l’Homme contre les tendances liberticides.

3. Lancement des indicateurs pour les parlements démocratiques

Le 21 novembre 2023 a eu lieu la réunion de présentation des indicateurs pour les parlements démocratiques. Pendant quatre ans, plus de 50 pays ont contribué à l'élaboration de nouveaux indicateurs pour mesurer l'efficacité, la responsabilité, la transparence, la réactivité, l'inclusivité, la participation et la représentativité des parlements. Ces indicateurs visent à répondre au défi crucial de modernisation des parlements, les rendant mieux équipés pour relever les enjeux contemporains. Ils ont été élaborés par plusieurs partenaires, dont la « Commonwealth Parliamentary Association » (CPA), le Programme des Nations Unies pour le Développement, l’Institut national démocratique pour les affaires internationales (Think Thank américain), ainsi qu’Inter pares et ont été présentés par M. Andy Richardson, responsable des Médias pour l’Union Interparlementaire.

L'Union Interparlementaire a identifié sept cibles, regroupant 25 indicateurs, qui permettront d'évaluer et d'améliorer la pratique parlementaire et sa qualité. Ces cibles clés ont pour objectif d’évaluer les parlements, notamment l'efficacité organisationnelle, la responsabilité des membres, la transparence, la réactivité, l'inclusivité, la participation citoyenne et la représentativité. Ces critères visent à améliorer la qualité et la pratique des parlements en les rendant plus conformes aux normes démocratiques.

Ces outils facilitent l'évaluation et le suivi des besoins dans la conception de projets avec les parlements mondiaux. Des exemples concrets illustrent leur utilisation, tels que le Sénat pakistanais qui a comparé les outils de l'Union Interparlementaire à une analyse SWOT, et l'Albanie qui a intégré les indicateurs dans un processus de développement institutionnel visant la transparence. Mme Victoria HASSON, affiliée à l'Institut national démocratique pour les affaires internationales, a exposé les quatre étapes clés de la création des indicateurs. La rédaction a débuté par l'accord sur des modèles et le développement d'outils de collaboration en ligne, suivi de phases de tests dans divers pays pour consolider l'ensemble. Les indicateurs ont été préalablement lancés avec la participation active de nombreux parlements et experts, avant leur lancement final. Mme Victoria HASSON a souligné l'importance de la collaboration et du travail d'équipe, mettant en avant la nécessité d'accepter la diversité des points de vue et d'être ouvert aux retours. Les indicateurs reposent sur des données en open-source. Emmanuel BESDRAH, représentant au parlement du Ghana, a illustré leur impact en mentionnant comment ils ont révélé des faiblesses dans la comptabilité publique.