Service des commissions

BUDGET " VILLE " :
LE SENAT DENONCE UN BUDGET EN TROMPE L’ŒIL,
LE RENFORCEMENT DE L’INSECURITE
ET LES MENACES SUR LES ZONES FRANCHES URBAINES

-----A l’occasion de l’examen des crédits du ministère de la ville, le 5 décembre 1998, MM. Alain Joyandet, sénateur de Haute-Saône, rapporteur spécial de la commission des finances, Paul Blanc, sénateur des Pyrénées-Orientales, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales et Gérard Larcher, sénateur des Yvelines, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, constatent leur parfaite convergence de vue sur les ambiguïtés du budget consacré à la politique de la ville.

- Un projet de budget artificiellement gonflé ?

La volonté de présenter un projet de budget qui atteigne le cap symbolique du milliard de francs n’a-t-elle pas conduit le gouvernement à majorer artificiellement l’évaluation de ses besoins ? La question peut légitimement se poser lorsque l’on constate que les crédits de la DIV augmentent de 54 %, son budget de communication de 47 %, que les dépenses d’animations déconcentrées sont multipliées par 3,5, sans parler des crédits d'études, multipliés par quatre et que le Sénat a proposé de réduire.

Cette hausse des crédits du ministère de la ville ne sera que très partiellement érodée par les réductions proposées par le Sénat.

Les subventions d’investissement sont, en revanche, le parent pauvre du projet de budget, et régressent de -6,6 % alors qu’elles ont pour vocation de financer des opérations concrètes dans les quartiers défavorisés.

- L’effort global de l’Etat en faveur de la ville : le poids croissant des emplois jeunes

La politique de la ville est par nature interministérielle, et le budget du ministère de la ville ne représente qu’une partie de l’effort financier que lui consacre l’Etat. Les rapporteurs s’inquiètent donc de la contraction des financements versés par les autres ministères au titre des contrats de villes (–6,9%) ou du volet ville des contrats de plan Etat-Région (-2%).

La hausse de l’effort de l’Etat s’explique pour l’essentiel par le coût croissant des emplois jeunes, dont le gouvernement a décidé a priori qu’ils concouraient à hauteur de 20 % à la politique de la ville.

 - Ne pas se défausser sur les collectivités territoriales du coût de l’indispensable effort de démolition-reconstruction dans les quartiers les plus dégradés

Les rapporteurs du Sénat jugent fondamentale la rénovation de l’habitat, mais estiment que les nécessaires opérations de démolition-reconstruction ne doivent pas être laissées entièrement à la charge des collectivité locales, avec pour seul encouragement des prêts de la Caisse des Dépôts et Consignations. Ils souhaitent une participation plus directe de l’Etat dans une restructuration " des quartiers défavorisés " qui ne doit pas se limiter pas aux seules aires des 13 sites de grands projets urbains, et qui devrait faire l'objet d'un programme pluriannuel.

- Pour un rétablissement de la sécurité

Les trois rapporteurs ont souligné que le rétablissement de la sécurité constituait une priorité absolue et rappelé que le sentiment d’insécurité était très fort dans les quartiers parce que les victimes d’agressions, de délits, et d’actes d’incivisme et d’incivilité n’ont pas l’impression que les pouvoirs publics apportent une réponse efficace et appropriée.

Ils ont mis en évidence l’aggravation due à la progression de la délinquance des mineurs et à la diffusion de la violence urbaine dans les zones rurales périurbaines et dans les communes suburbaines. Enfin, ils ont regretté l’absence d’une augmentation significative d'effectifs de police chevronnés sur le terrain, constatant l’inexpérience des adjoints de sécurité et des agents locaux de médiation sociale que le gouvernement met en place, souvent pour pallier des départs en retraite.

- Préserver les zones franches urbaines (ZFU)

Evoquant les critiques dont les zones franches urbaines font parfois l'objet, ils ont observé que ces zones avaient permis d’implanter 4.600 entreprises et commerces et 20.000 emplois -dont 10.000 créations- alors que le chômage y dépassait souvent 20 % de la population active. Ils ont également souligné que les objectifs fixés par le Pacte de Relance pour la ville avaient été dépassés, puisque près de la moitié des emplois créés étaient occupés par les habitants des ZFU.

Ils ont déploré le retard pris dans l’évaluation des résultats des ZFU par le gouvernement et vivement regretté que le rapport annuel d’application du pacte de relance pour la ville de 1996 -que le Sénat avait demandé voici deux ans- ne soit toujours pas publié.