La commission des lois du Sénat attentive à l'avenir de Saint-Pierre-et-Miquelon

Le rapport fait au nom de la commission des lois par MM. Bernard Saugey, vice-président (UMP - Isère), Jean-Claude Peyronnet, vice-président (SOC - Haute-Vienne), Philippe Arnaud (UC/UDF - Charente), Christian Cointat (UMP - Français établis hors de France), Bernard Frimat (SOC - Nord) et Nicolas Alfonsi (RDSE - Corse du Sud), membres de la délégation de la commission qui s'est rendue du 20 au 23 septembre 2005 à Saint-Pierre-et-Miquelon, dresse un bilan de la situation et des perspectives d'évolution statutaire de l'archipel.

Le rapport de la mission, que présidait M. Bernard Saugey, rappelle que Saint-Pierre-et-Miquelon, situé à la même latitude que Nantes et à moins de 25 kms de la côte sud de Terre-Neuve, comptait 6.519 habitants au recensement de 1999. Soulignant que pendant près de deux siècles l'archipel n'a vécu que de la pêche, il explique que la disparition progressive de la « grande pêche » à la fin du siècle dernier a rendu indispensable la diversification de ses activités économiques. Il souligne que l'économie de Saint-Pierre-et-Miquelon a connu un revers brutal en 1992 avec, d'une part, une sentence arbitrale qui a considérablement réduit la zone économique exclusive entourant l'archipel, et, d'autre part, la décision du Canada de réduire le quota de pêche à la morue, en raison du risque réel d'épuisement des stocks.

La délégation de la commission a eu le sentiment que la France ne défendait pas suffisamment les intérêts de Saint-Pierre-et-Miquelon dans ses négociations internationales. Elle juge indispensable que la France évite de renouveler cet échec lors de la renégociation, en 2007, du procès verbal d'application de l'accord de coopération franco-canadien du 2 décembre 1994, relatif aux droits de pêche.

Le rapport souligne que l'économie de l'archipel est fortement soutenue par l'Etat, intervenu immédiatement après l'arrêt de la pêche industrielle en 1992, en lançant la construction d'une seconde piste aéroportuaire. Ses auteurs estiment que l'exploitation des produits de la mer doit conserver une place importante dans l'économie de Saint-Pierre-et-Miquelon. Ils indiquent que la délégation a visité les installations d'une entreprise développant depuis 2000 l'élevage des coquilles Saint-Jacques dans la baie de Miquelon-Langlade, avec des techniques inédites sur le territoire national. Ils jugent que le succès de cette activité nécessite la réalisation de réparations urgentes dans le port de Miquelon, pour un montant évalué à 367.000 euros, ainsi que le renforcement de l'expertise scientifique apportée par l'Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (IFREMER), aujourd'hui très insuffisante.

L'archipel se situe dans une région riche en hydrocarbures susceptibles d'être exploités. A cet égard, le rapport relève que l'exploitation de ces ressources est déjà mise en œuvre dans la zone canadienne, la production off shore de la province de Terre-Neuve ayant atteint 123 millions de barils en 2003.

Les membres de la délégation souhaitent unanimement que la France veille au maintien de ses droits maritimes dans la région afin de permettre à Saint-Pierre-et-Miquelon de bénéficier pleinement de l'exploitation d'hydrocarbures. A cet égard, ils estiment que la France doit demander, en tant qu'Etat côtier, l'extension de ses droits au delà des 200 milles de la zone économique exclusive, jusqu'aux limites du plateau continental.

Ils soulignent l'intérêt des acteurs économiques de l'archipel pour les dérogations aux règles d'origine de l'Union européenne, susceptibles d'augmenter l'attractivité de Saint-Pierre-et-Miquelon en tant que porte de l'Europe en Amérique du Nord.

Ils considèrent que les faiblesses de la desserte aérienne représentent un obstacle au développement économique de l'archipel. A cet égard, ils estiment que l'investissement de 58,6 millions d'euros réalisé pour la construction, en 1999, d'un nouvel aéroport, ne peut se justifier avec la rotation de deux seuls avions ne reliant pas l'archipel à la métrople.

Rappelant que les collectivités de l'archipel connaissent des difficultés financières, le rapport de la commission des lois précise que la commune de Saint-Pierre doit en particulier faire face à des dépenses exceptionnelles en matière de déneigement, pour lesquelles Mme Karine Claireaux, maire, souhaite la création d'une dotation spécifique. Il relève que les pompiers volontaires de l'Archipel, en l'absence de services d'incendie et de secours, ne disposent pas d'une protection suffisante en termes d'assurance. Jugeant cette situation inacceptable, les auteurs du rapport souhaitent que le prochain statut de l'archipel prévoie la création d'un service d'incendie et de secours dans des conditions comparables à celles qui régissent le service mis en place à Mayotte.

Les membres de la délégation indiquent que de nombreuses dispositions de la loi du 11 juin 1985 relative au statut de Saint-Pierre-et-Miquelon doivent faire l'objet d'une réforme afin de respecter le nouveau cadre des collectivités d'outre-mer défini par l'article 74 de la Constitution.

La délégation partage le souhait exprimé par Mme Karine Claireaux, maire de Saint-Pierre, et M. Denis Detcheverry, sénateur et maire de Miquelon-Langlade, d'attribuer une compétence aux maires de l'archipel pour la délivrance des permis de construire. Elle souhaite par ailleurs que la mise à jour du statut permette l'attribution d'une compétence fiscale aux communes, afin de mieux garantir leur autonomie par rapport au conseil général. Formant le vœu que la modernisation du statut de l'archipel permette le maintien d'une représentation équilibrée des deux communes, elle estime que toutes les solutions institutionnelles possibles doivent être envisagées en s'inspirant, le cas échéant, des formules adoptées pour d'autres collectivités d'outre-mer. Elle considère que le conseil général de l'archipel pourrait ainsi devenir l'émanation de ces deux communes, afin de rendre l'organisation institutionnelle de l'archipel plus efficace et de favoriser son développement.

Ce rapport est consultable sur le site du Sénat :
 http://www.senat.fr/rap/r05-152/r05-152.html

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