Assurons l'avenir de l'assurance

LAMBERT (Alain)

RAPPORT D'INFORMATION 45 (98-99), Tome II - COMMISSION DES FINANCES

Table des matières




N° 45

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès verbal de la séance du 29 octobre 1998.

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1),

sur

la situation et les perspectives du secteur des assurances en France .

TOME II

ANNEXES

Par M. Alain LAMBERT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Assurances.

ANNEXE 4

RAPPORT DU COMMISSARIAT GENERAL DU PLAN
SUR LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES
DE L'ASSURANCE FRANÇAISE


COMMISSARIAT GENERAL

DU PLAN

RAPPORT SUR

LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES

DE L'ASSURANCE FRANCAISE

Rapporteurs :

Bernard Cherlonneix

Annick Guilloux


Assistance technique et secrétariat assurés par :
Muriel Badin, Patricia Germain, Marie-Ange Guimelli,
Sophie Lapize de Salée, Bénédicte Maître, Nicole Rampon, Marie-Françoise Roux

AOÛT 1998 RÉSUMÉ

Chapitre Premier : Points de repère sur l'assurance française

Ce chapitre est consacré à définir l'activité de l'assurance et à confronter à ce stade les différences d'approche entre écoles de pensée et traditions nationales, et s'efforce de clarifier les concepts clés autour desquels tourne l'assurance : association, mutualité, solidarité. On constate, à ce niveau des définitions, qu'il n'y a pas de véritable définition de ce qu'est l'assurance en droit français, ce qui n'est pas sans conséquences sur la qualification juridique et fiscale d'actes d'assurance par nature, lorsqu'ils ne sont pas le fait d'entreprises d'assurance.

Les activités d'assurance sont ensuite classifiées. Un repérage historique synthétique est ensuite présenté, ainsi qu'une chronologie de la réglementation remontant jusqu'à l'édit royal de 1604 visant à assurer des secours spirituels et matériels aux mineurs pour revenir rapidement à la troisième génération de directives européennes. Ce détour historique permet de faire ressortir le rôle important de l'intervention publique dans cette activité depuis l'origine, en France en particulier (mais non exclusivement). La chronologie de la réglementation fait place à l'impact de l'instauration de la Sécurité sociale en 1945 sur les activités de l'assurance et des mutuelle de santé.

Ce chapitre insiste sur l'histoire des cinquante dernières années et s'efforce également de souligner les spécificités " classiques " mais " réelles " de l'assurance française et du marché français de l'assurance. On insiste en particulier sur le rôle des assurances mutuelles sur ce marché. Le monde de l'assurance est ensuite présenté sous ses différentes facettes et notamment d'un point de vue juridique et en rapport avec les autorités de contrôle. On sépare ici nettement les entreprises d'assurance de toute nature relevant du code de l'assurance et les mutuelles relevant du code de la mutualité. Enfin, un rapide cadrage de l'assurance est esquissé, en terme de valeur ajoutée et de capacité d'intermédiation, en rapport avec les contributions parallèles des banques au produit intérieur brut et à l'intermédiation financière.

Chapitre II : Forces et faiblesses relatives sur l'assurance française à la veille du passage à la monnaie unique

On se reportera à la synthèse de ce chapitre aux pages 169 et 170.

Chapitre III : Euro, marché unique et de déréglementations. Quelles influences sur le marché français de l'assurance et sur la frontière assurance publique/assurance privée.

Les diverses causes évoquées dans l'intitulé de ce chapitre exercent des effets distincts mais complémentaires qui vont dans le sens d'une compétition renforcée sur le marché français de l'assurance. Il ressort en effet des leçons paradoxales de l'expérience anglo-saxonne et de la déréglementation nationale liée à un harmonisation réglementaire et fiscale européenne très partielle, que le marché européen de l'assurance va prendre beaucoup de temps à exister réellement. Aux Etats-Unis, malgré une langue et une culture juridique commune, il n'existe pas de véritable marché national de l'assurance, mais une mosaïque de marchés parcellaires soumis à des réglementations disparates et parfois encore à un contrôle a priori ; la structure de l'offre d'un état à un autre est très hétérogène ; en dépit des nombreuses fusions-absorptions, et à cause de l'arrivée permanente de nouveaux compétiteurs, l'offre sur le marché ne se concentre pas ; les petites structures sont les plus performantes.

L'effet de libéralisation globale attachée aux nouvelles règles du jeux sera inversement proportionnel sur chaque marché national à l'ancienneté de la déréglementation et de l'ouverture de ce marché.

Les effets de réallocation des placements financiers de l'assurance française devraient se faire plus volontiers selon le critère géographique que selon la nature des valeurs mobilières. La structure des placements est en effet très déterminée par la réglementation. En ce sens on observe que la structure des placements américains est plus proche de celle des placements européens continentaux que de celle des placements britanniques en raison des effets du " risk based capital " (RBC), qui conduit des entreprises d'assurance à privilégier les placements obligataires.

Malgré une réglementation française des placements généralement jugée comme adaptée et justifiée, certaines étroitesses réglementaires et fiscales sont comparativement handicapantes (3.3.2.). C'est le cas en particulier des limites dans la déductibilité fiscale de certaines provisions de bonne gestion (admise ailleurs), le caractère trop global de la règle de fonctionnement de la réserve de capitalisation (dite de " capi ") et les restrictions excessives à l'heure actuelle dans l'utilisation des produits dérivés. Par ailleurs les perspectives de compétition renforcée entre entreprises d'assurances européennes font ressortir le niveau élevé de la fiscalité des contrats d'assurance en France, alors que la fiscalité des entreprises d'assurance n'apparaît pas comme handicapante. Mais plus encore que le niveau élevé de la fiscalité des contrats, c'est l'instabilité de ces règles fiscales (voir annexe 3 de ce chapitre) notamment en assurance vie dont la fiscalité n'a pas bougé moins de 19 fois depuis 1980 et 12 fois depuis le 1 er janvier 1990 (il serait utile de procéder à des enquêtes comparatives sur ce plan).

Enfin ce chapitre (la partie 5) aborde l'impact des directives et de la monnaie unique, dans le cadre des contraintes actuelles budgétaires et d'endettement des Etats nationaux, sur la frontière entre assurances sociales publiques et assurances sociales privées, en examinant assez en détail l'évolution et l'état du système de santé et de la couverture du risque maladie aux Etats-Unis. Sont ensuite décrits les systèmes d'assurance santé de plusieurs pays européens en s'efforçant de faire ressortir la place respective actuelle de l'assurance publique et de l'assurance privée " substitutive " ainsi que les évolutions en cours, qui vont dans le sens d'un rôle plus important des divers types d'assurances non publiques en général (assurance commerciale privée ou systèmes mutualistes). Enfin sont présentées dans le chapitre ou en annexe de ce chapitre (en fonction de la disponibilité des données) diverses propositions d'expérimentation soumises à la commission Soubie dans le cadre des dispositions des ordonnances d'avril 1996 sur la Sécurité sociale.

Chapitre IV : Distribution de l'assurance en France et en Europe : adaptation plutôt que bouleversement.

Partant de la spécialisation initiale des modes de distribution selon les marchés et les segments de marché, la crise de l'intermédiation classique est examinée ainsi que les voies de la modernisation des rapports entre agents généraux et sociétés d' assurance. Les difficultés du courtage, à rapprocher du recul des sociétés d'assurance sur le marché des risques de l'entreprise, sont mises en rapport avec le décalage des règles fiscales qui a facilité l'absorption des premières sociétés de courtage françaises par les grands courtiers anglo-saxons. La percée des mutuelles sans intermédiaire sur le marché de l'assurance dommages et plus récemment de la bancassurance sur le marché de l'assurance vie est à rapprocher des écarts de coûts d'acquisition et de distribution liés à la désintermédiation de la relation entre assureurs et assurés. Elle explique la faible percée de la vente directe en France. Elle réserve en revanche un certain avenir à la distribution de produits d'assurance par la grande distribution.

Une comparaison européenne des structures de distribution permet de dégager une certaine typologie entre pays à forte tradition de courtage (Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique) qui sont des pays a forte culture internationale où la couverture du risque industriel joue un rôle important, et les pays latins et plus continentaux dominés par les mandataires exclusifs. Nulle part ailleurs qu'en France, la place de la bancassurance n'est aussi poussée, quoiqu'elle joue désormais un rôle non négligeable partout. Une comparaison plus poussée de la place des assurances mutuelles en Europe et aux Etats-Unis est esquissée et l'on sera sans doute surpris d'apprendre le rôle important joué par les mutuelles sans intermédiaire dans la couverture du risque industriel sur le plan national américain, qui montre ainsi que le potentiel du " circuit court " production-distribution n'est pas limité au marché des particuliers.

On trouvera en annexe de ce chapitre une brève présentation sur le développement du commerce électronique dans l'assurance.

Chapitre V : Emploi et relations sociales dans l'assurance française

Ce chapitre montre comment le secteur de l'assurance a réagi, en matière d'emploi, aux évolutions fortes et diversifiées de ces dernières années.

On constate qu'après avoir accru son volume d'emplois directs jusqu'au milieu des années 80, l'assurance a, depuis lors, globalement maintenu ce volume malgré le développement de nouvelles technologies et les gains de productivité importants qui en ont résulté. En parallèle les métiers ont fondamentalement évolué quant à leur nature et aux compétences requises.

La relative stabilité de l'emploi dans les sociétés d'assurances et la progression de l'emploi dans les mutuelles du GEMA (+ 35 % en dix ans) s'expliquent par un effort de formation important, une combinaison réfléchie de la réduction et de l'aménagement du temps de travail, une modération de l'évolution des coûts salariaux, une bonne anticipation des évolutions et, semble-t-il aussi, un écart de dynamisme entre types de sociétés.

Le chapitre consacre ensuite une partie aux relations sociales dans l'assurance. L'évolution de ces dernières est liée à la nouvelle convention collective des partenaires sociaux des sociétés d'assurance et elle est également marquée par l'évolution des rapports entre agents généraux et sociétés d'assurance.

La convention collective nationale a largement décentralisé la négociation sociale et se veut porteuse de modernisation et de dialogue social. Le dialogue social rénové a permis d'aboutir à de nombreux accords d'entreprise.

Le renouvellement du partenariat entre la profession des agents généraux et les sociétés d'assurance est quant à lui justifié par la concurrence avec les nouveaux modes de distribution et a permis une modernisation de ces rapports et une clarification des rôles respectifs.

Chapitre VI : L'avenir de la mutualité en France

Une place importante est réservée à ce sujet dans le rapport du Commissariat général du plan en fonction de son importante actualité et de l'intérêt manifesté par le législateur sur ce thème, qui est par ailleurs l'objet de certaines confrontations entre les divers types d'acteurs du monde de l'assurance au sens large.

Dans un premier temps, ce chapitre s'efforce de cerner l'avenir prévisible des mutuelles de la mutualité en toute probabilité, en repartant d'une description de la mutualité 45, de son régime juridique et de ses objectifs particuliers, en entrant plus dans le détail de ses activités, de sa situation financière et de ses résultats tant financiers que sociaux, ce que la rapide description introductive du premier chapitre n'avait pas permis de faire.

On retiendra qu'en 1995 l'effectif annuel moyen des mutuelles 45 a augmenté de 3 %, que la rentabilité financière de la mutualité en 1995 est de 9 %, soit deux points de plus que les assurances commerciales affiliées à la FFSA en 1997, et que la situation financière de la mutualité et sa solvabilité sont apparemment très bonnes. On retiendra également que le monde de la mutualité est en réalité beaucoup plus concentré (1 280 groupements mutualistes servent 97 % des prestataires, 128 les trois quart, 7 un quart) qu'il n'apparaît, compte tenu du nombre très important des petites mutuelles dans l'ensemble de la mutualité. D'où, peut-être, une certaine surreprésentation des mutuelles de la fonction publique dans la plus grande des fédérations mutualistes françaises, en dépit du nombre de sociétaires plus élevé dans les mutuelles interprofessionnelles.

Les scénarios d'évolution prévisible des mutuelles de la mutualité vont entre :

- l'indépendance préservée, très improbable pour les petites mutuelles puisqu'on s'accorde à situer à environ 100 000 adhérents le seuil de viabilité d'une mutuelle disposant de l'équipement informatique et de l'investissement bureautique adéquats ;

- jusqu'à l'absorption vraisemblable d'un certain nombre de mutuelles par d'autres mutuelles plus grandes, ou par des institutions mutualistes proches comme les mutuelles du GEMA, ou des institutions de prévoyance, plus lointaines, voire, pour un nombre très réduit, par des compagnies classiques ;

- en passant par la délégation de gestion, la constitution de GIE, ou le développement de la réassurance, qui permettrait de concilier le souci de proximité entre l'échelon politique de la mutuelle et ses adhérents et la nécessaire rentabilisation de la gestion par économie des moyens ;

- sans négliger, à partir d'un certain seuil, la mise en réseau des mutuelles et l'animation de ce réseau par un centre de services, ce qui est le choix d'une nouvelle fédération mutualiste, la FNIM, qui veut proposer par là un modèle alternatif au modèle plus pyramidal de la FNMF ;

- ni oublier le simple regroupement en fonction de diverses affinités : région, profession, sensibilité.

La mutualité " 45 " n'échappera de toute façon pas à une forte concentration déjà largement entamée puisque le nombre de (petites) mutuelles est passé de 8 635 en 1973 à 5 780 (-3 155) en 1995. Mais les voies de cette concentration restent largement ouvertes aux affinités diverses.

Cette concentration sera accélérée par la vraisemblable transposition des directives européennes dans le droit de la mutualité ne serait-ce que compte tenu du précédent de transposition de ces directives dans le code des institutions de prévoyance, lesquelles, même si l'on doit saluer la cohérence de la position de la FMF qui considère que la spécificité mutualiste ne peut être maintenue que si la mutualité demeure hors du champ des directives, n'étaient pas incluses a priori dans leur champ d'application.

A cet égard une information détaillée est donnée sur les allers et retours du dossier de la mutualité entre Paris et Bruxelles (puisque l'initiative est venue de la France) et sur l'état actuel de la question, la vision européenne des choses ayant d'ailleurs été largement influencée informellement, par le rapport " Bacquet " du nom du Président de la section sociale du Conseil d'Etat auquel le ministre des affaires sociales Madame Simone Weil avait demandé une consultation sur les difficultés liées à la transposition des directives européennes (demandée dès 1991 par le Gouvernement français) dans le code de la mutualité et dans la vie des mutuelles.

Enfin le chapitre aborde les problèmes communs à l'ensemble des sociétés mutuelles à but non lucratif, en considérant que les limitations dont se plaignent les sociétés mutuelles dans la constitution de fonds propres et l'apport public à l'épargne, en particulier les mutuelles d'assurance, ne sont pas incontournables et qu'il existe déjà à l'heure actuelle, sans sortir du statut de société mutuelle, des moyens de contourner ces contraintes par divers assouplissements réglementaires. Connaissant leurs problèmes communs de gouvernement d'entreprise, les divers mondes mutualistes sont de moins en moins libres de les ignorer tellement ils nuisent à l'image de la mutualité et à " la différence mutualiste " revendiquée. Il est ainsi fait état de diverses solutions, dont certaines avancées par les organes professionnels qui permettraient d'améliorer le contrôle interne de ces sociétés : en particulier la mise à niveau du droit des sociétés mutuelles par rapport au droit commun des sociétés. La réflexion porte aussi sur la modernisation du droit des sociétés mutuelles en général, avec par exemple l'adoption d'un statut de l'élu tenant compte de la complexification du contrôle, avec l'apparition d'administrateurs indépendants, avec la création d'un droit d'interpellation pour les sociétaires, voire avec l'assouplissement des règles de dévolution de l'actif en cas de dissolution d'une mutuelle.

LISTE DES PERSONNES CONSULTÉES PAR LE COMMISSARIAT GÉNÉRAL DU PLAN POUR LA RELECTURE DE LA VERSION PROVISOIRE DU RAPPORT

Le Commissariat général du Plan est particulièrement reconnaissant à l'égard des experts qui ont accepté de participer aux travaux de validation du rapport provisoire.

M. Jean-Louis Bancel , directeur général, Mutualité française

M. Jean-Louis Bellando , secrétaire général, Commission de contrôle des assurances

M. Jean-Luc Besson , directeur des études et des statistiques, FFSA

M. Bruno Bézard , sous-directeur des Asurances, direction du Trésor

M. Etienne Caniard , secrétaire général, FNMF

Mme Janina Cohen , directrice des Etudes, Société française des analystes financiers

Mme Chantal Cossaltère , professeur, conseiller scientifique, Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance

M. Henri Debruyne , directeur général, CAPA

M. Denis Dominique , délégué général, FNSAGA

M. Thomas Frauenfelder , Etudes économiques, Compagnie suisse de réassurances

Mme Catherine Gerst , directrice générale, Moody's France SA

Mme Marie-Pierre Gontard , Crédit Agricole Indosuez

M. Laurent Gratieux , secrétaire général, CCMIP

M. Jean-Christophe Huard , Société Générale

M. André Laboul , administrateur, OCDE

M. Patrick Lefas , directeur des Affaires européennes et internationales, FFSA

M. Jean-Michel Lesage , délégué général, Fédération française des courtiers d'assurance et de réassurance

M. Francis Lohéac , secrétaire général, Comité européen des assurances

M. Martin Mills , vice-president, Senior Credit offices financial institutions, Moody's Investors Service Limited

M. Roland Nussbaum, chef du service des Affaires économiques, GEMA

M. Cyril Roux , responsable Assurances de personnes, AXA

M. Michel Thovert , président, Commission consultative du conseil national des assurances

M. Etienne de Varax , directeur du département " Risk management ", AIG

Mme Cécile Vignal , consultante, direction des affaires financières fiscales et des entreprises, OCDE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE COMMISSARIAT GÉNÉRAL DU PLAN POUR L'ÉLABORATION DE CE RAPPORT

Le Commissariat général du Plan remercie tout particulièrement les personnes, dont la liste suit, qui ont accepté d'être auditionnées dans le cadre de ce rapport.

- M . Jacques André , secrétaire général, Mutuelle Santé Côte-d'Or 21 MDI

- M. Gérard Andreck , directeur général, MACIF

- M. Bruno Angles d'Auriac , délégué général, MEDERIC Prévoyance

- M. Jack Avry , directeur général, NSM-VIE

- Mme Ghislaine Bailly , direction des services financiers, GAN

- Mme Elisabeth Bauby , responsable du département Emploi, formation, enseignement, FFSA

- M. Jean-Louis Bellando , secrétaire général, Commission de contrôle des assurances

- M. Jean-Luc Besson , directeur des études et des statistiques, FFSA

- M. Bruno Bézard , sous-directeur, sous-direction des assurances, Direction du Trésor

- M. Alain Brouhmann , Fédération des secteurs financiers, CGT

- M. Didier Brulé , Fédération des assurances, CFDT

- M. Christian Cabin-Saint-Marcel , conseiller fiscal, associé d'un cabinet de gestion de patrimoine

- M. Etienne Caniard , secrétaire général, FNMF

- M. Dominique Chérasse , directeur, URCAM Ile-de-France

- M. Jean-Michel Cornudet , directeur de la communication, Caisse nationale du Crédit Agricole, directeur général Pacifica

- Mme Chantal Cossaltère , professeur, conseiller scientifique, Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance

- M. Henri Debruyne , directeur général, Capa

- M. Pierre Defrétasse , Fédération des assurances, FO

- M. Dominique Denis , délégué général, FNSAGA

- M. Gilbert Duplan , directeur général, Groupama

- M. Jean-Paul Feucher , directeur, ADAP

- Dr Paul Fleury, président, Groupe Pasteur Mutualité

- M. Jean Fourré , président de la Commission de contrôle des assurances, président de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance

- M. Thierry Goeddertz , OPCASSUR

- M. Laurent Gratieux , secrétaire général adjoint, CCMIP

- M. Pascal Guéniot , directeur financier, La Poste

- M. Jean-François Guéritault , directeur général, Fédération des mutuelles de France

- M. Yves Horrière , responsable du secteur Recherches et études, CAPA

- M. Alexandre d'Hauteville , juriste consultant, FFCA

- Mme Nathalie Huet , directeur adjoint, Mutuelle Santé Côte-d'Or 21 MDI

- M. Dominique Jani , secrétaire général, MEDERIC Prévoyance

- M. André Laboul , administrateur, direction des Affaires financières, fiscales et des entreprises, OCDE

- M. Gilbert Lafargue , directeur du département des Eudes, Groupe Pasteur Mutualité

- M. Daniel Laurent , conseiller scientifique, AXA

- M. Thierry Laurent , directeur général, Groupe Pasteur Mutualité

- M. Elie Lazarévitch , Fédération des assurances, CFE-CGC

- M. Patrick Lefas , directeur des Affaires européennes et internationales, FFSA

- M. Alain Lemaire , président de l'Association pour le management des risques et des assurances de l'entreprise (AMRAE), directeur du département Assurances, Nestlé France

- M. Jean-Michel Lesage , délégué général, FFCA

- M. Gérard Lobjois , chargé de mission, Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance

- M. Francis Lohéac , secrétaire général, CEA

- M. Claude Maffioli , président, CSMF

- . Michel Martin , président, Mutualité de la Côte-d'Or

- Mme Véronique Mattei , directrice Gestion actif-passif, GAN

- M. Roger Moiroud , secrétaire général, Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance

- M. Jacques Monier , délégué général, direction des Affaires sociales, FFSA

- M. Michel Monmont , Fédération des assurances, CFTC

- . Jean-Louis Morand , président, RAM-GAMEX

- M. Serge Nossereau , attaché de direction, Mutualité de la Côte-d'Or

- M. Roland Nussbaum , chef du service des Affaires économiques, GEMA

- M. Gérard Outters, délégué général de la ROAM et de l'AISAM "

- M. Jean-Paul Panzani , secrétaire général, Fédération des mutuelles de France

- M. Jean-Pierre Pellan , délégué général, Mouvement pour la liberté de la protection sociale

- M. Jean-Marc Piéronne , responsable du département statistique des entreprises d'assurances et internationales, FFSA

- M. Michel Revest , responsable du pôle Assurance, La Poste

- Mme Salima Rairy , responsable du secteur Ressources humaines et Formation, Capa

- M. Thierry Robichon , Fédération des assurances, CFE-CGC

- M. Cyril Roux , responsable du secteur Assurance de personnes, AXA

- M. Jean-Claude Seys , président directeur général, MAAF

- M. Jean Simonnet , président, MACIF

- M. Matthieu de Sorbay , directeur, FNIM Nouvelle Mutualité

- M. Etienne de Varax , directeur du département " Risk management ", AIG

- Mme Velentza , Commission européenne - DG IV

- M. Régis Versaveau , Fédération des assurances, CFDT

- M. Jean-Luc Vicherat , directeur, APESA

- Mme Cécile Vignal , consultante, direction des affaires financières, fiscales et des entreprises, OCDE

- M. Pierre de Villeneuve , directeur général, CARDIF - SOCIETE VIE

- M. Jean-François Vulpière , président, Ecole nationale des assurances sociales (ENASS)

- M. Franz-Josef Werle , secrétaire général adjoint, CEA

INTRODUCTION
CHAMP D'INVESTIGATION DU RAPPORT
DEMANDÉ AU COMMISSARIAT GÉNÉRAL DU PLAN
SUR LA SITUATION ET LES PERSPECTIVES DE L'ASSURANCE FRANÇAISE

Le rapport a été élaboré par le Commissariat général du Plan, à la demande de la Commission des finances du Sénat. Celle-ci a en effet constitué en son sein un groupe de travail sur la situation et les perspectives du secteur des assurances en France. Son président a obtenu l'accord du Premier ministre pour le concours du Commissariat général du Plan à ces travaux. Le groupe de travail est présidé par Monsieur Alain Lambert, rapporteur général de la Commission des finances 1( * ) .

Le champ du rapport a été délimité en accord avec Monsieur Alain Lambert de manière à se concentrer sur les questions susceptibles d'intéresser plus particulièrement le législateur et les pouvoirs publics, ainsi que la profession et la communauté financière, sans prétention à l'exhaustivité.

La Commission des finances du Sénat ayant saisi parallèlement le Conseil de la concurrence sur la situation concurrentielle interne et externe du marché français de l'assurance, au regard du droit de la concurrence, cet aspect des choses n'est abordé dans le rapport que d'un point de vue économique et marginalement.

Il a été établi à partir des diverses études citées en bibliographie et des avis des experts sollicités (dont la liste est également indiquée en début de rapport). Après avoir posé quelques points de repère sur un secteur de l'économie assez mal connu du public, il s'efforce de répondre aux questions suivantes :


Quelle est la situation du marché français de l'assurance à la veille du passage à la monnaie unique ? Quelles sont les forces et les faiblesses relatives à partir d'une analyse économique, financière et, le cas échéant, boursière comparée des entreprises françaises d'assurance ? Quel est le bilan de la recomposition du secteur de l'assurance et que faut-il penser de la concentration et de la course à la taille critique qui semblent partout s'imposer ? Quelles évolutions sont envisageables notamment en matière de bancassurance ?


• Quelles sont les conséquences prévisibles de la mise en place du marché européen de l'assurance et de la monnaie unique sur le secteur français de l'assurance et sur les marchés nationaux de l'assurance ? Quels enseignements peut-on tirer de l'expérience anglo-saxonne et américaine en particulier ? Quel est l'impact général prévisible sur l'actif et le passif des sociétés d'assurance ? Quelles sont les contraintes réglementaires et fiscales susceptibles comparativement d'handicaper les sociétés d'assurance françaises ? Quelles sont les évolutions possibles de frontières, entre l'assurance sociale publique et l'assurance privée à la lumière des expériences étrangères ? Quelles sont les propositions novatrices venant des professionnels de l'assurance commerciale ou mutualiste en matière d'évolution de gestion de la protection sociale ?


Quelles sont les conséquences des évolutions du marché de l'assurance sur les mobilités traditionnelles de distribution de l'assurance pour les agents généraux et les autres ? Quelle est la répartition actuelle des canaux de distribution en Europe ? Quelle est la place prévisible des nouveaux canaux de distribution avec quelles conséquences pour le marché futur de l'assurance national et européen ? Quelle peut être l'évolution de la bancassurance ? Quel est l'impact des nouvelles technologies sur la distribution de l'assurance ?


Quelle a été l'évolution passée et quelle est l'évolution prévisible des métiers de l'assurance, des emplois et de la qualification dans l'assurance ainsi que celles des relations sociales ?


Quelles sont les problématiques communes aux divers types de sociétés mutuelles et quel est en particulier l'avenir prévisible des mutuelles du code de la mutualité ?

Chaque fois que cela était possible, ce rapport s'est efforcé de procéder à une comparaison internationale, en se servant des critères de comparaison habituellement utilisés.

Compte tenu du champ d'investigation limité de ce rapport, il ne sera fait qu'allusivement référence à des sujets importants et proches comme celui de l'épargne retraite complémentaire par capitalisation (qui, techniquement, relève bien de l'assurance vie) et des problèmes de retraite en général. C'est pourquoi les institutions de prévoyance, qui gèrent les retraites complémentaires et supplémentaires à titre d'activité principale, sont également hors du périmètre de ce rapport.

Deux autres observations liminaires, pour faciliter la lecture de ce rapport, ou du moins pour prévenir le lecteur, paraissent s'imposer.

Il est souvent fait mention dans ce rapport de " l'assurance française " sans préciser si l'on entend désigner par là l'ensemble des sociétés de droit français, quelle que soit la nationalité du contrôle capitalistique ou de la direction, ou seulement les sociétés de droit français qui ne relèvent pas d'un centre de décision étranger ou extérieur au domaine de l'assurance. Dans les faits, et compte tenu des bouleversements très récents du secteur et notamment de l'évolution du contrôle des anciennes sociétés nationales, il est difficile de faire une claire et surtout conséquente distinction. Peut-on dire que les Agf ne font plus partie de l'assurance française ? Oui et non. Trancher dans un sens ou dans l'autre amènerait vraisemblablement à de longs débats. Ce rapport assume l'ambiguïté de la notion.

Il est difficile de disposer de statistiques, notamment internationales, homogènes, cohérentes et fiables, et surtout comparables en toute rigueur, compte tenu de la faible harmonisation comptable au niveau européen concernant les chiffres d'avant 1997 et de la non-harmonisation internationale des principes et des plans comptables. Fallait-il renoncer pour autant à l'approche comparative internationale ou européenne chaque fois qu'elle était raisonnablement possible ? Il nous a paru que l'un des intérêts de ce rapport pour son destinataire et plus largement pour les professionnels, l'environnement administratif et universitaire et le public intéressé, consistait dans cette tentative de comparaison et de rapprochement. Il ne faut toutefois pas en sous-estimer les limites, compte tenu notamment de l'hétérogénéité des sources incontournables de données quantitatives (pour l'essentiel Eurostat et Sigma).

premier

CHAPITRE PREMIER

POINTS DE REPÈRE SUR L'ASSURANCE FRANÇAISEPOINTS DE REPÈRES SUR L'ASSURANCE FRANÇAISE

L'assureur est le banquier de l'exceptionnel

Hubert de Raemy 2( * ) 1

I. LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DE L'ASSURANCE FRANÇAISE

A. DÉFINITIONS

Alors qu'il existe de nombreuses définitions historiques ou économiques de l'assurance, on ne dispose pas en droit français de définition véritable de ce qu'est l'assurance.

" L'assurance a été établie de sorte que la perte pèse légèrement sur beaucoup, plutôt que lourdement sur peu " selon les statuts de la reine Elisabeth 1ère d'Angleterre. L'assurance est une " conventio qua unus infortunium alterius in se suscipit, pretio periculi convento " (" convention par laquelle, le prix d'un risque ayant été convenu, l'un prend pour lui le risque de l'infortune de l'autre ") selon Pedro de Santarem, jurisconsulte portugais, auteur d'un des premiers ouvrages consacrés à l'assurance maritime, publié en 1552 3( * ) . " L'assurance est une opération par laquelle une personne (l'assureur) groupe en mutualité d'autres personnes (les assurés) afin de les mettre en situation de s'indemniser mutuellement des pertes éventuelles (les sinistres) auxquelles les expose la réalisation de certains risques, au moyen des sommes (primes ou cotisations) versées par chaque assuré à une masse commune gérée par l'assureur " 4( * ) .

L'assurance est une technique de couverture des risques de perte pouvant affecter les biens d'une personne physique ou morale (incendie, accident, vol, dégât des eaux, catastrophe naturelle...) ou résultant de la survenue d'un événement aléatoire frappant directement la personne elle-même (maladie, invalidité, accident du travail, décès) et sa capacité de générer les revenus et le pouvoir d'achat lui permettant de vivre et faire vivre les siens. Autrement dit, l'assurance est ce service coûteux qui permet de remédier aux maux économiques qui peuvent éroder les biens possédés ou générés par une personne.

Ces maux sont les risques de pertes attendus avec incertitude. Leur vente - l'acquisition d'une couverture de risque - se fait donc à un prix négatif 5( * ) , la " prime ", payé par le vendeur du risque en contrepartie du transfert du risque. L'acquisition de ces maux économiques et l'assomption de ces risques de pertes incertains n'a de sens qu'à la condition technique que l'assureur puisse transformer un ensemble de risques individuels et aléatoires de pertes en un savoir approximativement certain de perte mutuelle à attendre, permettant de proportionner la prime perçue à la valeur moyenne estimée du sinistre ou du dédommagement. C'est dans cette transformation d'une ignorance individuelle en un savoir statistique à peu près certain que réside le métier et le savoir-faire fondamental de l'assurance. Son fonds de commerce est donc dans la connaissance et l'analyse du risque, et sa capacité de le tarifer de manière fine et avec un objectif ou non de profitabilité 6( * ) .

Selon Maxime Malinski, " l'assurance est traditionnellement définie comme une opération par laquelle l'assuré, moyennant paiement d'une prime, se fait promettre en cas de réalisation d'un risque une prestation de l'assureur qui, prenant en charge un ensemble de risques, les compare conformément aux lois de la statistique " 6( * ) .

Selon Warren Buffett, dans un style plus direct : " c'est un métier qui consiste à encaisser les primes tout de suite et à régler des dettes plus tard. Dans une opération d'assurance, un décalage apparaît du fait que les primes sont reçues avant que les charges soient payées, cet intervalle pouvant parfois durer un grand nombre années. Pendant ce temps l'assureur investit l'argent " 7( * ) . C'est une autre manière de signaler cette distinction entre la banque et l'assurance faite humoristiquement par Maurice Lauré, selon laquelle le métier d'assureur est un bien beau métier puisque dans l'assurance on encaisse l'argent tout de suite et on s'efforce de pas le rendre, tandis que dans la banque on donne l'argent tout de suite et l'on n'est jamais sûr d'être remboursé.

Grâce à son rôle protecteur, l'assurance est un facteur de développement. Selon Horace Say, l'assurance est un remède contre le mal de l'incertitude, sans lequel le développement des entreprises humaines ne serait pas imaginable. " Chaque branche d'entreprises ne tend à se développer que lorsque les chances de succès l'emportent de beaucoup sur les chances de mauvaise nécessité ou de perte " 8( * ) . Le développement de l'assurance est la condition d'une économie complexe et hautement industrialisée.

Sans annuler le risque, l'assurance en permet la couverture par la mutualisation, c'est-à-dire la division du coût des conséquences de sa survenue entre plusieurs. On n'imagine pas sans elle le développement des entreprises et la sophistication du monde de l'entreprise.

Cet ensemble de définitions et de rappels permet de cerner la notion d'assurance. Il est cependant caractéristique de ne pas disposer de définition légale de l'assurance dans le code français de l'assurance (en particulier dans le livre premier consacré au contrat) alors que le code civil est si riche en définitions. Une certaine ambiguité existe entre contrat d'assurance et opération d'assurance. Il en résulte qu'est assurance, très pragmatiquement, ce qui est accompli par une entreprise d'assurance telle qu'elle a été définie dans sa diversité en 1938, lors de la première grande réglementation d'ensemble des sociétés d'assurance. Or, cette définition peut avoir des conséquences pratiques importantes, selon que l'on considère en France comme relevant ou non de l'assurance ce qui est considéré à l'étranger comme en relevant (cela peut être le cas de montages à base de captives d'assurance et de la fiscalité associée à ces montages).

La Belgique, dont le droit est également fondé sur le code Napoléon, a défini le contrat d'assurance par une loi du 25 juin 1992 comme : " un contrat en vertu duquel, moyennant le paiement d'une prime fixe ou variable, une partie, l'assureur, s'engage envers une autre partie, le preneur d'assurance, à fournir une prestation stipulée dans le contrat au cas où surviendrait un événement incertain que, selon le cas, l'assuré ou le bénéficiaire, a intérêt à ne pas voir se réaliser ".

B. ASSURANCE, ASSOCIATION ET MUTUALITÉ

L'assurance repose sur l'association des hommes et le principe de mutualité : il est dans l'intérêt individuel bien compris de chacun de répartir contractuellement sur plusieurs le risque individuellement imprévisible pour chacun, et ainsi de le diminuer a priori.

C'est ce que comprennent bien au XIX e siècle les frères séparés de la mutualité que sont Bastiat et Proudhon, puis Walras et que rappelle Denis Kessler.

Bastiat évoque par une fable, la genèse de la convention d'assurance mutuelle : " Des hommes ont chacun une maison. L'une vient à brûler, et voilà le propriétaire ruiné. Aussitôt, l'alarme se répand chez tous les autres. Chacun se dit : " autant pourrait m'arriver ". Il n'y a donc rien de surprenant à ce que tous les propriétaires se réunissent, répartissent autant que possible les mauvaises chances en fondant une assurance mutuelle contre l'incendie. Leur convention est très simple. En voici la formule : " Si la maison de l'un de nous brûle, les autres se cotiseront pour venir en aide à l'incendié ". Par là chaque propriétaire acquiert une double certitude : d'abord qu'il prendra une petite part à tous les sinistres de cette espèce ; ensuite, qu'il n'aura jamais à essuyer le malheur tout entier (...) Voilà l'association 9( * ) . "

Proudhon fait écho à cette définition, de manière plus militante : " comment donc se fait-il que l'assurance mutuelle n'ait pas, depuis longtemps remplacé toutes les autres ? Ah ! c'est qu'il est bien peu de particuliers qui veuillent s'occuper des choses qui intéressent tout le monde, mais ne rapportent rien à personne ; c'est que le gouvernement qui pourrait prendre cette initiative, s'y refuse...

" Ce qu'il y a lieu de craindre ici, comme toujours, c'est que le gouvernement, sous prétexte d'utilité publique ne crée un grand monopole (...) monopole qui servirait à doter plus d'un fidèle serviteur que la pénurie du Trésor ne permet pas de récompenser de ses longs services. Ainsi dans le régime d'insolidarité mutuelle où nous vivons, nous allons de l'exploitation des compagnies à l'exploitation par le gouvernement, le tout parce que nous ne savons pas nous entendre ...

" L'assurance mutuelle, abandonnée par l'autorité publique à qui il appartenait de la prendre en main, n'est encore qu'une idée.

" Lorsque l'esprit d'initiative et le sentiment de collectivité qui sommeillent en France auront pris leur essor, l'assurance deviendra un contrat entre les citoyens, une association dont les bénéfices profiteront à tous les assurés " 10( * ) .

Walras confirme le point de vue de Bastiat : " Toute espèce d'assurance n'est au fond qu'un mode d'association. Association est le mot qui explique tous les miracles de l'assurance. Ainsi, vous voulez éviter les conséquences désastreuse de l'incendie de votre maison et de votre maladie. Supposons qu'il brûle, en moyenne, 1 maison sur 1000 par an. Si vous pouviez vous assurer avec 999 propriétaires ayant une maison semblable à la vôtre, vous conviendriez avec eux que celle d'entre les 1000 maisons qui aura brûlé dans l'année sera rebâtie et remeublée à frais communs. L'association une fois conclue, celui dont la maison brûle gagne 999/1000 de la valeur de la maison et du mobilier, et les 999 autres perdent chacun 1/1000 de cette valeur. Le gain de l'un est exactement égal à la perte de tous les autres. On répète souvent, d'après Lapalice, que l'assurance est le contraire du jeu. Cela est très vrai mais en ce sens que, par l'assurance, on substitue un moindre aléa à un plus grand. L'homme qui ne s'assure pas contre l'incendie court 999 chances sur 1000 de ne rien gagner ni perdre contre 1 chance sur 1000 de perdre la valeur de sa maison et de son mobilier. Celui qui s'assure court 999 chances de perdre 1/1000 de cette valeur et 1 chance de gagner 999/1000. Le point essentiel est d'avoir supprimé la chance unique de perdre la valeur totale " 11( * ) .

Et Denis Kessler, rappelle (lui aussi) ce fondement " mutualiste " de l'assurance dans son " Très petit dictionnaire d'économie de l'assurance " que la devise fondatrice du Lloyd's : " la contribution de beaucoup à la mauvaise fortune de quelques-uns " 12( * ) immortalise. " L'assurance est le moyen de limiter les conséquences adverses de l'incertitude. Certains états du monde possibles sont défavorables à l'agent, alors que d'autres sont évidemment favorables. L'assurance permet, par des transferts monétaires, de limiter l'écart entre les divers états du monde. Ainsi, au travers d'une société d'assurance, les individus ou les entreprises échangent des risques entre eux , les mutualisent, de façon non pas à supprimer l'incertitude, mais à minorer ses effets négatifs. Il faut insister d'emblée sur le caractère ambivalent de l'assurance. Le concept même de l'assurance est à la fois profondément individuel - je cherche à me protéger moi-même contre les conséquences négatives de la survenance de tel ou tel état du monde défavorable - et profondément collectif - en me protégeant moi-même, je protège aussi les autres -. En réduisant les conséquences négatives de l'occurrence des risques sur le patrimoine physique (assurance dommages) et sur le patrimoine humain (assurance vie) l'assurance parvient à être un puissant " générateur de sécurité " propice à la poursuite et à l'essor des activités économiques et sociales, au bon dénouement des contrats de toute nature, à la réduction des disparités issues nécessairement du règne généralisé de l'aléa " 13( * ) .

Cependant, l'assurance va au-delà de la simple mutualisation du risque : elle anticipe la valeur moyenne annuelle des sinistres. Elle transforme une quote part indéterminée au financement de pertes aléatoires (la cotisation variable " mutualiste ") en une prime annuelle fixe connue d'avance. Le risque de dépassement éventuel de la charge des sinistres et des frais généraux par le montant des primes est garanti par l'appel aux réassureurs et par les fonds propres de l'assureur.

Le passage de l'assurance mutuelle à l'assurance commerciale est ainsi décrit par Bastiat : " L'assurance mutuelle a développé au sein de la société une connaissance expérimentale, à savoir : la proportion, en moyenne annuelle, entre les valeurs perdues par sinistres et les valeurs assurées.

Sur quoi un entrepreneur ou une société (un intermédiaire parasite selon les socialistes utopiques) ayant fait tous ses calculs, se présente aux propriétaires et leur dit :

" En vous assurant muutellement, vous avez voulu acheter votre tranquillité ; et la quote-part indéterminée que vous réservez annuellement pour couvrir les sinistres est le prix que coûte un bien si précieux. Mais ce prix ne vous est jamais connu d'avance ; d'un autre côté, votre tranquillité n'est point parfaite. Eh bien ! je viens vous proposer un autre procédé.

Moyennant une prime annuelle fixe que vous payerez, j'assume toutes vos chances de sinistres ; je vous assure tous, et voici le capital qui vous garantit l'exécution de mes engagements.

Les propriétaires se hâtent d'accepter, même alors que cette prime fixe coûterait un peu plus que la quantum moyen de l'assurance mutuelle ; car ce qui importe le plus, ce n'est pas d'économiser quelques francs, c'est d'acquérir le repos, la tranquilité complète " 14( * ) .

Les sociétés d'assurance, quelle que soit leur forme juridique, rassemblent des contributions individuelles pour faire face aux sinistres de chacun. Dans l'assurance, la mutualisation est principielle, volontaire dans son origine et incertaine dans son effet (qui gagnera le plus est indéterminé, sauf pour les fraudeurs). Elle aboutit à une redistribution involontaire, mais inévitable et même souhaitable des revenus, des assurés qui ont plus de chances (en l'absence d'aléa moral) vers ceux qui en ont moins. L'assurance est un outil de redistribution directe, volontaire et cependant limitée.

Les développements qui précèdent ne doivent pas conduire à surestimer les effets de la loi des grands nombres. Certes la loi des grands nombres joue un rôle central en assurance, mais néanmoins, tout ne repose pas entièrement sur elle.

En effet, dans le cas où le risque connaît une volatilité importante d'une année à une autre, la tarification ne peut pas se faire de manière proportionnelle à la prime pure (coût moyen du risque par contrat) mais également en prenant en compte une mesure de la dispersion (l'écart type par exemple).

On peut, en effet, montrer que la tarification à la prime pure sans intégration d'un coefficient de sécurité lié à la dispersion conduirait à la ruine de la société.

La mutualisation des risques se fait non seulement en vertu de la loi des grands nombres sur l'ensemble du portefeuille, mais aussi dans la durée, c'est-à-dire au cours du temps.

La tarification en assurance ne peut pas reposer seulement sur l'accumulation des statistiques à caractère rétrospectif que l'on extrapole dans l'avenir, mais aussi grâce à une anticipation de ce que sera le risque à l'avenir. C'est notamment le cas des risques nouveaux pour lesquels on ne connaît pas le passé. Un bon exemple en est l'assurance des satellites (Ariane) pour lesquels au début on ne disposait pas de statistique. La tarification résulte alors d'un processus d'apprentissage.

C. ASSURANCE ET SOLIDARITÉ

C'est la politique de tarification qui détermine le caractère plus ou moins solidaire de la gestion pour les assurés, d'un point de vue intergénérationnel notamment. C'est autour de ces différences tarifaires que s'exprime le débat entre assurances commerciales, assurances mutuelles et mutuelles de la mutualité, la tarification d'assurance pure tendant à être proportionnelle au risque et " désolidarisante ", la tarification mutualiste tendant à être plus " solidarisante " et à moins segmenter les populations assurées.

Cependant les assurances mutuelles, comme d'ailleurs les mutuelles du code de la mutualité, ont appris à pratiquer des tarifs plus " assuranciels " pour garder leurs adhérents.

Cette analyse " classique " s'applique moins bien aux risques d'entreprise, notamment en dommages ou d'autres considérations sont prises en compte en particulier pour les " grands risques ".

L'Etat a toutefois organisé une autre forme de solidarité pour le risque de catastrophes naturelles, par la loi du 13 juillet 1982, en posant le principe d'un droit à indemnisation des dommages qui ont pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel. Jusque là, les victimes ne pouvaient bénéficier que d'aides publiques sans commune mesure avec les dommages subis. Le nouveau dispositif " Cat Nat " repose fondamentalement sur l'habilitation qui a été donnée, en 1982, à la Caisse centrale de réassurance de réassurer avec la garantie de l'Etat les risques de catastrophes naturelles couverts par les assureurs de dommages aux biens sans limitation de somme et donc, sans possibilité de trouver une réassurance privée 15( * ) . Ce régime soulève la question de savoir si l'assurance privée pourrait gérer mieux ce risque, en différenciant les primes correspondantes et en développant ainsi l'incitation à une meilleure prévention du risque 16( * ) Il est en un sens paradoxal que les métiers de l'assureur et du réassureur, qui sont celui de la couverture du risque d'amplitude, plutôt que du risque de fréquence, ne puissent pas s'exercer face au risque de catastrophe naturelle.

D. CLASSIFICATION DE L'ASSURANCE

La distinction la plus générale, la plus complémentaire et la plus commode est celle qui est faite au niveau européen entre assurances vie et assurances non-vie. Elle recoupe la distinction traditionnelle entre assurance-vie et assurance dommages (ou Iard pour Incendie Automobile et Risques Divers dont l'équivalent anglo-saxon est " Property Casualty ") qui coïncide elle-même à peu près avec la distinction la plus adéquate entre assurance des personnes et assurance des biens. Il suffit en effet d'ajouter l'assurance santé à l'assurance-vie pour aboutir à l'assurance de personnes.

La distinction entre assurance de personnes et assurance de (dommages de) biens (et des responsabilités) 17( * ) semble la plus puissante intellectuellement et la plus réaliste, même si elle est en pratique peu employée en dehors de la France.

Elle conserve la distinction vie/non-vie tout en laissant une place nécessaire à des assurances de personnes autres que l'assurance-vie (assurance maladie, invalidité, etc.).

Elle permet un classement assez logique des " risques de l'entreprise " dans le sous-ensemble " assurance des biens ".

Dans le système français de couverture des catastrophes naturelles, il n'existe pas actuellement de couverture des dommages corporels, il s'agit d'une assurance de biens.

Aussi, peut-on proposer le tableau de classification suivant :

Tableau des assurances 18( * )

Assurance des personnes

Assurance (dommages) de biens

et des responsabilités

Assurance vie

• assurances en cas de décès

• assurances en cas de vie

• assurances mixtes

• ou épargne capitalisation (sans assuré parfois) ou  " tontinière " (après abus des assurances mixtes)



Autres assurances de personnes

• assurance accident

• assurance incapacité-invalidité

• assurance remboursement des frais médicaux



Assurances collectives

• assurances couvrant les emprunteurs (souscrites par les banques)

• assurances souscrites par les entreprises (prévoyance et retraite)

Assurance automobiles

Assurances de dommages aux biens
:

• des particuliers (ex : multirisques habitation, avec volet responsabilité)

• des professionnels (ex : multirisques commerciales)

• agricoles (ex : multirisques avec volet dommage et responsabilité)

• protection juridique
Assistance

Assurances de la construction (branche gérée en capitalisation )
• dommages à l'ouvrage

• responsabilité civile décennale
Assurances de responsabilité civile
• hors volet responsabilité de l'assurance-dommages, risques professionnels et d'entreprises
Assurance transport
• maritime

• aéronautique

• spatial

• assurance des marchandises
Assurance crédit

II. REPÈRES HISTORIQUES

Le besoin d'assurance est fonction croissante du risque encouru. Ainsi, l'histoire de l'assurance est elle corrélée à la géographie des risques et à leur hiérarchie dans l'expérience des hommes.

Le droit romain incorpore déjà le contrat de rente viagère de personne à personne. Le Moyen-âge reprendra ce contrat hérité de l'antiquité : on retrouve en 1228 une police de rente viagère de 25 livres parisis acquise sur la ville de Tournai par un bourgeois d'Arras.

Ce n'est cependant qu'au XVII e siècle qu'apparaîtront les lois de mortalité et l'évaluation mathématique des rentes viagères. En 1671, Jean de Witt, bourgmestre d'Amsterdam, distribue aux Etats généraux des Pays-Bas un mémoire intitulé " Valeur des rentes viagères ", afin de les empêcher de contracter des emprunts trop onéreux en rentes viagères. En 1662 était déjà paru à Londres l' " Arithmétique politique " de William Petty, inaugurant la statistique de la mortalité.

Les premiers contrats commerciaux d'assurance remonteraient au début du XIV e siècle dans le transport maritime à Gênes. Contrat d'assurance et de " nolisement " (transport) se concluent dans le même acte, pour se développer rapidement à partir de 1340. Du 21 août au 15 septembre 1393 par exemple, on enregistre plus de 80 contrats reçus par un seul notaire de Gênes 19( * ) .

Ce n'est cependant qu'à la fin du XVII e et au début du XVIII e siècle que se créent des sociétés spécialisées dans les assurances maritimes, en particulier les Lloyd's et leurs fameux names, constitués sous forme d'une société de personnes avec engagement des associés de couvrir les risques sur leur fortune personnelle (reconnue comme société d'assurances par charte royale en 1720) 20( * ) .

L'assurance terrestre semble être née sous la forme de l'assurance incendie au XVII e siècle après l'incendie de Londres en 1666 (où les quatre cinquièmes de la Cité furent détruits par le feu) à partir de 1684, véritable point de départ de l'assurance-dommages moderne.

En France, lorsque Colbert codifie les activités liées à la mer par son ordonnance de 1681, il ne prévoit aucun rôle particulier pour l'assurance. La même année, il prohibe les assurances sur la vie, comme " pari immoral ". Le Genevois huguenot Etienne Clavière, formé au métier de l'assurance à Londres, obtient en 1785 de Louis XVI un privilège lui permettant de créer une société d'assurances contre l'incendie, grâce à l'appui de banquiers suisses. En 1787, un arrêt du Conseil d'Etat du roi autorise à perpétuité une Compagnie royale des assurances sur la vie, constituée avec les mêmes actionnaires que la précédente.

En août 1793, la révolution française décrète, avec sa fécondité coutumière, la suppression de ces entreprises d'assurances considérées comme spéculatives une interdiction qui persiste pendant le Consulat et l'Empire, pour les mêmes raisons. Le retard de la France sur l'Angleterre s'accumule alors aussi en matière d'assurance.

Les sociétés d'assurances renaissent avec la Restauration. Une Compagnie royale d'assurances maritimes est fondée en 1817 par Benjamin Delessert, ainsi qu'une nouvelle compagnie d'assurance entre l'incendie et l'assurance-vie. Les Assurances générales sont créées en 1819, l'Union en 1828, ainsi que le Phénix, le Soleil, l'Urbaine etc. Les grands groupes français d'assurance en sont issus en droite ligne. Les promoteurs de l'assurance sont les banquiers de la haute banque (Laffitte, Hottinguer, Rotschild, Callaghan) dont les descendants resteront les administrateurs de ces compagnies jusqu'en 1946. Ce sont les entreprises d'assurance dites " à cotisations fixes " par opposition aux mutuelles qui vont se développer tout au long du XIX e siècle avec l'appui de l'Etat (Société mutuelle immobilière de Paris, créée en 1816, Société d'assurances mutuelles de Seine-et-Oise, Immobilière incendie du Mans fondée en 1828 par des rentiers du foncier) et qui perçoivent, elles, des " cotisations variables " pour compenser leur absence de capital social puisqu'elles sont constituées sous forme de sociétés de personnes.

L'assurance contre les accidents du travail nait en 1861 avec la création de la Préservatrice (mutuelle).

Un décret de 1868 permet la création des sociétés d'assurance " non-vie " sans autorisation préalable. Il s'agit d'une conséquence de la loi de 1867 sur les sociétés anonymes, qui en définit les conditions de constitution et en permet la création sans autorisation préalable 21( * ) .

Les sociétés d'assurance bénéficient alors des lois sur les assurances obligatoires : loi de 1898 sur les accidents du travail, qui rend obligatoire l'indemnisation des ouvriers victimes de ces accidents ; loi de 1910 sur les retraites ouvrières et paysannes.

Le montant des capitaux assurés par les sociétés françaises d'assurance sur la vie progresse de 35 % en moyenne annuelle de 1907 à 1913, moins vite cependant que celui de l'assurance incendie.

Après la loi de 1930, qui établit un système d'assurances sociales obligatoires pour les salariés modestes, les sociétés d'assurance proposent des " polices d'assurance groupe ", assurances collectives souscrites par les employeurs pour les salariés non couverts par l'assurance sociale.

En 1939, le personnel de l'assurance-vie est de 90 000 contre 42 200 en 1921 22( * ) .

L'inflation réprimée de la guerre et l'inflation d'après guerre ont réduit à presque rien la valeur du capital à l'issue des contrats d'assurance-vie, ce qui explique largement la méfiance prolongée des Français à l'égard de l'assurance-vie.

III. CHRONOLOGIE DE LA RÉGLEMENTATION FRANÇAISE ET DES DIRECTIVES EUROPÉENNES

A. RÉGLEMENTATION PUBLIQUE D'ORIGINE NATIONALE

• L'édit royal du 14 mai 1604, décidé par Henri IV, stipule que le trentième de la production sera consacré à assurer des secours spirituels (les sacrements et la sépulture) et matériels aux mineurs 23( * ) .

• Colbert crée (en 1680) la Caisse des invalides de la marine. " A l'égard des estropiés, j'ai proposé au Roy de faire quelque establissement pour leur donner de quoy vivre " écrit-il au Comte d'Estrées, vice-amiral de Ponant. " Ce fut l'établissement des 4 deniers par livre des invalides " 24( * ) .

• Par décret impérial du 26 mai 1812, après plusieurs catastrophes dans les mines de l'Ourthe dans la région de Liège, l'Etat crée une vraie caisse locale d'assurance ouvrière contre la vieillesse, la maladie, l'accident, analogue à celles que créera plus tard Bismarck en Allemagne.

• Un décret du 3 janvier 1813 fait obligation aux exploitants de mines de fournir à leurs ouvriers blessés secours médicaux et médicaments. Cette origine généralement publique des caisses d'assurance et sociétés de prévoyance sur les débris du monde corporatif de l'ancien régime n'empêche pas l'initiative patronale de se développer à côté et souvent avant les caisses de prévoyance mutuelles : en 1843, la Compagnie houillère de Bissèges crée une caisse de secours et de prévoyance qui sera, dès 1869, financée à égalité d'apport par les cotisations ouvrières (3 % des salaires) et de la Compagnie.

• Création par la loi du 18 juin 1850 d'une Caisse des retraites pour la vieillesse (qui deviendra avec les lois de 1884 et 1886 la Caisse nationale des retraites). Elle fédère la vingtaine de caisses pour les fonctionnaires (qui ont souvent déjà une retraite) ainsi que pour les ouvriers de grandes entreprises (mines, chemins de fer, forges) mais ce dernier point du programme ne sera pas accompli (voir plus loin 1868). En fait, cette loi stimulera la naissance de caisses patronales. Le 18 juin 1853, une loi sur les pensions civiles des fonctionnaires décide que les fonds de toutes les caisses de retraite (elles étaient une vingtaine en 1838 financées moitié par les cotisations et les versements de l'Etat) seront versées au Trésor, lequel se charge du versement des pensions des agents publics 25( * ) .

• 1850 (loi du 15 juillet) : premier texte légal consacré aux sociétés de secours mutuel. En dehors des Eglises jouant ce rôle traditionnel, au travers notamment de la dîme, une société philanthropique avait été créée en 1780. Elle avait été interdite par la loi Le Chapelier de juin 1790 prohibant les associations, à peu près en même temps qu'était abolie la dîme 26( * ) . Cette société est rétablie en 1802. En 1823, 143 sociétés de secours mutuels regroupent 12 000 membres et fonctionnent bien.

• 1852 (décret loi du 26 mars 1852) : les avantages (capacité civile, autorisation de constituer des pensions de retraite et d'assurer une protection en cas de maladie, possibilité de recevoir des subventions) sont accordées aux sociétés de secours mutuel. En 1889, les SCM comptent 248 000 membres.

• 1868 (décret du 22 janvier 1868) : première réglementation définissant les conditions de constitution d'une société anonyme d'assurance et permettant la libre création, sous cette forme juridique, des sociétés d'assurance " non-vie ".

• 1868 (loi du 11 juillet 1868) : création d'une " Caisse nationale d'assurances en cas de décès ", afin de " réserver un refuge aux risques que rejetterait l'assurance libre et pour opposer, le cas échéant, aux prétentions de cette assurance, le frein d'une concurrence officielle ". Chroniquement déficitaire, cette caisse ne représente en 1936 que 0,55 % du marché face aux 133 sociétés d'assurance couvrant les accidents du travail 27( * ) . C'est en fusionnant en 1949 la CNAD avec la Caisse des retraites pour la vieillesse (CRV) créée en 1850 que naîtra la Caisse nationale d'assurance sur la vie (CNAV) qui deviendra rapidement la CNP (1954) 28( * ) .

• Après la faillite de plusieurs grandes sociétés (mine, banque) entraînant la caisse de prévoyance de la société dans la débâcle et laissant les ouvriers et les salariés démunis, la loi du 21 décembre 1895 prescrit que les sommes retenues sur les salaires seront déposées soit à la Caisse des dépôts et consignations, soit à la Caisse nationale des retraites, soit dans les caisses patronales ou syndicales autorisées par l'administration.

• 1898 (loi du 8 avril 1898) : la " première grande loi sociale française ", d'après J-J. Dupeyroux, reconnaît la responsabilité patronale en cas d'accident du travail (elle concerne les ouvriers des industries utilisant des " machines dangereuses ") et soumet au contrôle de l'administration les sociétés pratiquant l'assurance des accidents du travail. Date de création du corps des commissaires contrôleurs, toujours en fonction. A partir de cette date de naissance de l'assurance obligatoire, " étape majeure dans l'évolution de notre droit " selon Gilles Johanet, " la prime ne correspond plus automatiquement au risque " 29( * ) . Reconnaissance et réglementation par la loi du 4 juillet 1900 (art. L 322.27 du code des assurances et art. 1235 du code rural) des Caisses d'assurances et de réassurances mutuelles agricoles, système d'assurance mutuelle facultative garantissant uniquement les risques professionnels des agriculteurs (il s'agit des " mutuelles 1900 ").

• 1905 (loi du 17 mars 1905) : édiction d'une réglementation et d'un contrôle des sociétés d'assurance-vie, en vue de protéger les assurés, à la suite d'une faillite retentissante.

• 1930 (loi du 13 juillet 1930) : codification du droit des contrats d'assurance terrestre 30( * ) .

• 1938 (décret loi du 14 juin 1938 unifiant le contrôle de l'Etat sur les entreprises assurances de toute nature, décret d'application du 30 décembre 1938) : véritable point de départ de la réglementation publique française et mise en place du contrôle administratif sur les entreprises d'assurance (création du Comité d'organisation des assurances et de l'Office des assurances privées). Reconnaissance des sociétés mutuelles d'assurance sans intermédiaires à but non lucratif, et des sociétés d'assurance à forme mutuelle ayant un but lucratif et rémunératrices d'intermédiaires. L'ensemble forme les " mutuelles 1938 ".

• 1940 (loi du 12 juillet 1940) : transfert de la tutelle administrative sur les entreprises d'assurances du ministre du travail au ministre des finances 31( * ) .

• 1945 (ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945 sur le contrôle des prix ) : autorisation de fixer par arrêté des plafonds et des planchers aux tarifs d'assurance et aux commissions de courtage.

• 1945 (ordonnance du 29 septembre 1945 sur la centralisation et la concentration de l'assurance) : suppression du Comité d'organisation des assurances et de l'Office des assurances privées et transfert de leurs compétences au ministère des Finances, ainsi rendu juridiquement compétent pour organiser la concentration du secteur de l'assurance et des canaux de distribution des produits d'assurance (agents généraux et courtiers). L'administration des finances peut s'opposer aux accords conclus entre sociétés en matière de tarifs, aux conditions générales des contrats. Elle peut rendre obligatoire l'usage de clauses-types dans les contrats, fixer des maxima et minima de la tarification et des taux de rétribution des intermédiaires, déterminer la gestion financière des sociétés d'assurance 32( * ) .

• 1945 (ordonnance du 4 octobre 1945 portant organisation de la Sécurité sociale et ordonnance d'application sur l'assurance des risques du travail du 2 novembre 1945) : application du plan Parodi, visant à passer d'un principe de réparation du dommage à un principe de " solidarité ". L'article premier de l'ordonnance n° 45-2250 du 4 octobre 1945 décide que : " Il est institué une organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leur famille contre les risques de toute nature de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu'ils supportent. L'organisation de la Sécurité sociale assure dès à présent le service des prestations sociales prévues par les législations concernant les assurances sociales, l'allocation aux vieux travailleurs salariés, les accidents du travail et maladies professionnelles et les allocations familiales et le salaire unique aux catégories de travailleurs protégés... "
L'exposé des motifs de l'ordonnance d'application n° 45-2635 du 2 novembre 1945 tire les conséquences de ce principe :
- " à partir du 1 er janvier 1947, les entreprises d'assurance et la Caisse nationale d'assurance en cas d'accidents ne peuvent plus pratiquer l'assurance du risque " accidents du travail " ;

- les entreprises dont l'activité principale était constituée par l'assurance accidents du travail entreront en liquidation. Celles qui disposent d'un portefeuille d'autres risques suffisant pour leur permettre de subsister pourront continuer à fonctionner ;

- le personnel des institutions de Sécurité sociale sera obligatoirement et exclusivement recruté parmi le personnel des Caisses d'assurances sociales et de leurs unions, des Caisses d'allocations familiales, des services régionaux des assurances sociales, des services de la Caisse des dépôts et consignations et de la Caisse générale de garantie, des services des entreprises d'assurances, les agents et courtiers d'assurances, le personnel des sociétés et unions de sociétés de secours mutuels ".
Face à ce qu'André Burlot appelle " un véritable traumatisme collectif professionnel " se déroulant dans l'indifférence générale, la Fédération des sociétés d'assurances, la Fédération des agents généraux et le syndicat des courtiers organisent un meeting le 16 octobre 1945 au Palais de la mutualité où " le voeu ", peut-être prophétique, est émis " que le gouvernement, tout en maintenant les principes de la Sécurité sociale, laisse aux usagers le libre choix de l'organisme chargé d'assurer leur sécurité ... " 33( * ) .
• 1945 (ordonnance du 19 octobre 1945) : abrogation de la loi du 1 er avril 1898 sur la Mutualité et adoption d'un corps de règles qui forme les mutuelles 1945, qui sera codifié en 1955 dans le code de la mutualité.

• 1946 (loi du 25 avril 1946) : nationalisation de 34 sociétés d'assurance-vie et IARD appartenant à 11 groupes (voir infra 1.5.) ; création du Conseil national des assurances, organisme consultatif présidé par le ministre et de la Caisse centrale de réassurance 34( * ) .

• 1947 (arrêté du 30 décembre 1947) : restauration provisoire de la liberté de fixation des tarifs pour les sociétés d'assurance conformément à leur voeu (cf. rapport au président de la République du Conseil national des assurances, 1946, page 6).

• 1976 : fusion de la réglementation publique de l'assurance au sein du code des assurances.

• 1986 (ordonnance 86-1243 du 1 er décembre 1986 d'abrogation du contrôle des prix) : libération de principe des tarifs d'assurance et des commissions de courtage.

• 1989 (loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989, dite loi " Evin ") :

- institution de la " Commission de contrôle des institutions de prévoyance et des mutuelles " pour les mutuelles d'assurance et les institutions de prévoyance soumises au code de la mutualité ;

- (loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989) : création de la Commission de contrôle des assurances (CCA) 35( * ) autorité administrative " indépendante " du ministère des Finances, dotée de pouvoirs juridiques élargis par rapport à ceux dévolus au ministre, et chargée de la surveillance permanente de l'activité des entreprises d'assurance à l'aide du corps des commissaires contrôleurs mis à sa disposition 36( * ) (voir annexe 2 de ce chapitre) ;

- entrée en vigueur de la libre concurrence sur le marché de l'assurance maladie complémentaire.

• 1991 (décret du 28 juin 1991) : abrogation en droit du contrôle des tarifs de l'assurance abandonné en fait depuis le milieu des années 80 dans le contexte de la concurrence entre mutuelles d'assurance et compagnies traditionnelles.

B. RÉGLEMENTATION PUBLIQUE D'ORIGINE EUROPÉENNE : LES DIRECTIVES ASSURANCE37( * )

On convient, comme dans le domaine bancaire, de parler de trois séries de directives européennes en matière d'assurance. Toutefois, la double série de trois direectives a été précédée par la directive 64/225 Cee du 25 février 1964 visant à supprimer, en matière de réassurance et de rétrocession, les restrictions à la liberté d'établissement et à la libre prestation des services. Très anticipative, cette direction intervient dans un champ de l'assurance qui est traditionnellement très internationalisée. Elle ne définit qu'une liberté pour l'offreur de réassurance, en aucun cas une contrainte pour le demandeur de réassurance. Elle sera d'ailleurs complétée en décembre 1976 par une directive corollaire établissant la liberté d'établissement et des prestations de services pour les intermédiaires d'assurance, courtiers et agents généraux, en réassurance. La chronologie des directives " vie " et " non-vie " est décalée.

• 1973 (première directive " non-vie " 73/239/CEE du 24 juillet 1973) : l'ouverture d'une filiale ou d'une succursale dans un pays de la Communauté européenne doit faire l'objet d'un agrément par l'autorité compétente de l'Etat d'accueil. Entrée en vigueur au plan national : le 31 décembre 1975.

• 1988 (deuxième directive " non-vie " 88/357/CEE du 22 juin 1988) : directive mettant en oeuvre la libre prestation de services " passive ", c'est à dire permettant au consommateur de rechercher un assureur au-delà de ses frontières nationales, l'assureur n'étant pas encore autorisé à démarcher une clientèle non résidente. Entrée en vigueur le 9 mai 1993.

• 1992 (troisième directive " non-vie " 92/49/CEE du 18 juin 1992) : troisième directive établissant le passeport unique par renversement du principe antérieur et adoption du principe de l'agrément unique par le pays d'origine, de la reconnaissance mutuelle des agréments nationaux et du contrôle par le pays d'origine. Transposition dans le droit français par la loi 94-5 du 4 janvier 1994. Entrée en vigueur le 1 er juillet 1994.
" L'adoption formelle des troisièmes directives assurances en 1992, entrées en vigueur le 1er juillet 1994, marque la fin des travaux législatifs nécessaires à la mise en place du marché unique de l'assurance . Le marché unique s'étend à l'espace économique européen " 38( * ) . On verra plus loin cependant, selon l'expression de la Société Générale, pour le " marché unique, la route est encore longue " 39( * ) en pratique.

Au terme de cette évolution réglementaire européenne, chaque entreprise d'assurance a accès, soit par l'ouverture de bureaux, soit en libre prestation de services, à l'ensemble du marché européen sans autorisation préalable, mais à la seule condition d'informer préalablement l'autorité nationale compétente du pays d'origine. Inversement, le système autorise en principe tout preneur d'assurance à s'adresser, à l'intérieur de l'Espace Economique Européen, à l'entreprise de son choix en acceptant que l'engagement soit soumis aux règles financières et à la compétence du pays d'origine.

Une série équivalente de directives européennes est adoptée, plus tardivement, en assurance-vie :
• première directive 79/267/CEE du 5 mars 1975 ;

• deuxième directive 90/619/CEE du 8 novembre 1990 (entrée en vigueur : le 9 mai 1993) ;

• troisième directive 92/96/CEE du 10 novembre 1992 (entrée en vigueur le 1 er juillet 1994) mettant en oeuvre la libre prestation de services et la liberté d'établissement des entreprises d'assurance-vie ;
A ces directives, il convient d'ajouter :
• la directive 84/641/CEE du 10 décembre 1984, modifiant, en ce qui concerne notamment l'assistance touristique, la première directive 73/235/CEE, et établissant que " l'aide peut consister en des prestations en espèces ou en nature. Les prestations en nature peuvent également être fournies par l'utilisation du personnel ou du matériel propre au prestataires " ;

• la directive européenne 91/674/CEE du 19 décembre 1991 aligne la présentation des comptes annuels et des comptes consolidés des entreprises d'assurance sur celle des entreprises non financières, sauf si celle-ci est insuffisante ou inadaptée ;

• la proposition de directive 95/245 - JO C 341 du 19.12.1995 " sur la surveillance complémentaire des entreprises d'assurance faisant partie d'un groupe d'assurances " adoptée par la Commission le 4 octobre 1995 et communiquée au Parlement européen et au Conseil le 20 octobre 1995, a fait l'objet d'un avis du Parlement européen comportant 24 amendements. A partir de cet avis, la commission a établi une " proposition modifiée " de directive du Parlement européen et du Conseil le 28 janvier 1998, qui est en cours d'examen.
En conclusion de cette rapide chronologie de la réglementation publique de l'assurance, on observera que :
- à l'instar de la réglementation bancaire, c'est à la fin des années trente et au début des années quarante que l'organisation de la profession de l'assurance et la conception de la réglementation et du contrôle de ses activités se met en place qui, grosso modo, prévaut encore aujourd'hui et même se transpose au niveau européen (même si l'abandon du contrôle " matériel ", c'est-à-dire des clauses et des tarifs, et " a priori " représente une évolution significative) ;

- aujourd'hui encore, la création d'une entreprises d'assurance est soumise à l'agrément préalable du ministre de l'Economie et des Finances (c'est-à-dire en pratique à la sous-direction des assurances de la direction du Trésor) lequel est également l'autorité compétente pour décider les transferts de portefeuilles de contrats d'une entreprise à une autre, tandis que le contrôle des entreprises d'assurance relève d'une autorité administrative indépendante également compétente pour en décider la liquidation.

IV. RÉSUMÉ DE L'HISTOIRE DES CINQUANTE DERNIÈRES ANNÉES DE L'ASSURANCE

Depuis la fin de la guerre, l'histoire de l'assurance est essentiellement l'histoire des relations entre l'Etat et les sociétés d'assurance, qu'il s'agisse de la propriété des société d'assurance ou bien encore de leur champ d'application.

Cette histoire française va de la nationalisation de la plus grande partie des sociétés d'assurance en 1946 à la dénationalisation de ces sociétés qui est, en 1998, en voie d'être achevée par la privatisation du Gan après la privatisation des Agf et de l'Uap.

Elle est jalonnée par plusieurs dates :

• la loi du 25 avril 1946 de nationalisation de 34 sociétés d'assurance représentant environ 50 % de l'encaissement national des primes en 1945 ;

• 17 janvier 1968, le ministre de l'Economie et des Finances (Michel Debré) prend trois arrêtés de " concentration " du secteur de l'assurance pour remédier aux difficultés de certaines sociétés et " mieux faire face à la concurrence internationale ", par le biais desquels les huit groupes existants sont ramenés à trois, formant dès lors le secteur public de l'assurance : UAP, AGF, GAN ;

• le 4 janvier 1973, une loi autorise l'Etat à céder le quart des actions de chaque société d'assurance nationalisée (à tire gracieux ou onéreux) et impose la création, à l'intérieur de chaque groupe public, d'une société centrale holding, qui aura pour objet la détention de la totalité des actions des sociétés exploitantes du groupe. L'Etat leur apporte ses actions et reçoit en échange la totalité des actions des sociétés centrales, seules déclarées cessibles par la loi ;

• en 1977, les actions AGF, GAN ET UAP sont introduites en bourse ;

• le 17 juin 1977, une loi à contre courant de la tendance de clarification des structures capitalistiques du secteur public de l'assurance permet aux entreprises nationalisées de prendre des participations dans le capital des sociétés soeurs. Des entreprises d'assurance-vie acquièrent jusqu'à 60 % du capital des compagnies IARD, ce qui contribuera à l'échec des privatisations de 1987, en compliquant la fixation des prix des privatisables ;

• la loi du 2 juillet 1986 place les dix sociétés nationalisées des trois groupes d'assurance parmi les soixante cinq entreprises que le gouvernement est autorisé à privatiser ;

• la loi du 31 décembre 1987 permet aux sociétés centrales de devenir des sociétés anonymes à part entière, les actions des sociétés nationales deviennent accessibles à n'importe quel investisseur étranger ou national : l'interdiction par les sociétés centrales de céder des actions de leur filiales d'assurance est levée ;

• la loi du 15 juillet 1993 relance la privatisation inaboutie des entreprises d'assurance en actualisant la loi du 2 juillet 1986. La privatisation de l'UAP a lieu en mai 1994 et celle des AGF au printemps 1996 40( * ) ;

• en décembre 1997, le gouvernement lance l'opération de privatisation du GAN. Le 30 juin 1998, Groupama rachète le GAN.

V. SPÉCIFICITÉS FRANÇAISES

Elles sont au nombre de trois :

- la nationalisation au lendemain de la guerre d'une grande partie de l'industrie de l'assurance ;

- le nombre particulièrement important et toujours croissant d'assurances obligatoires ;

- le rôle important joué par les assurances mutuelles dans l'assurance dommages et par les mutuelles dans l'assurance complémentaire santé.

A. LA NATIONALISATION A FORTEMENT MARQUÉ L'INDUSTRIE DE L'ASSURANCE

La thèse a été soutenue que la nationalisation des sociétés d'assurance s'est faite sans étatisation 41( * ) . A l'appui de cette thèse, il y a la liberté provisoire de tarification obtenue brièvement dès 1947 pour toutes les sociétés d'assurance, et également, de manière paradoxale, le fait que toutes les sociétés d'assurance ont été soumises à un contrôle a priori de leurs contrats et à une étroite réglementation de leurs placements jusqu'à l'entrée en vigueur des dernières directives européennes.

Il est donc difficile de séparer l'effet propre de la réglementation et de la nationalisation, qui se conjuguent jusqu'au moment où la déréglementation commence à jouer sans que les sociétés nationales sachent en tirer parti pour se renforcer, au contraire. La nationalisation a très vraisemblablement eu un certain nombre de conséquences propres et le devenir des sociétés récemment dénationalisées tend à le prouver.

La nationalisation a détaché le secteur des assurances du secteur bancaire auquel il était attaché par des liens d'actionnariat anciens pour les rattacher à la toute puissance supposée de l'Etat propriétaire. La stabilité des groupes d'assurance constituant dès lors une certitude non discutable, étayée par le très faible nombre de défaillances constatées sur le marché français (à la différence de ce que l'on pouvait constater sur le marché britannique ou nord-américain). La nationalisation a donc largement eu pour effet de sacrifier le souci de la rentabilité et de la solvabilité au profit d'une recherche de la part de marché et au détriment de la spécialisation des acteurs. Elle a conduit à une utilisation des groupes publics comme des investisseurs institutionnels, outils d'une stratégie non intrinsèquement économique (noyaux durs, tentative d'OPA sur la Société Générale). La fragilité de certains groupes, dans le cadre d'une compétition mondiale accrue, a été largement sous-estimée.

Les sociétés d'assurances, depuis leur nationalisation, ont été dirigées exclusivement par d'anciens hauts fonctionnaires, non issus du monde de l'assurance, comme le souligne l'étude de Michel Bauer et Bénédicte Bertin Morot 42( * ) . La succession rapide des dirigeants et la discontinuité stratégique qu'elle implique n'ont pas été sans conséquences sur les performances et la qualité de la gestion, ainsi que la mobilisation des personnels et des cadres.

D'un autre côté, la nationalisation a certainement favorisé la situation de l'assuré et elle a permis, sur le plan social, que l'assurance prenne le virage de l'informatisation et des nouvelles technologies sans drame social, en gérant dans la durée les sureffectifs induits par la modernisation et les gains de productivité.

En revanche, tout génie entrepreneurial mis à part, comment penser la réussite exceptionnelle d'Axa sans la continuité stratégique de sa direction. On pourrait également citer l'exemple d'AIG présidé par Maurice R. Greenberg, qui a été créé en 1919 et n'a connu jusqu'à maintenant que deux dirigeants. Il est le groupe d'assurance le plus rentable au monde (avec une rentabilité financière des fonds propres, " return on equity " -Roe- de 15 %) et la première capitalisation boursière mondiale dans l'assurance avec une capitalisation de 90 milliards de dollars.

En ce qui concerne les performances, d'une manière générale la part des encaissements des sociétés nationalisées, de 50 % au moment de la nationalisation, revient à 38 % en 1968. L'évolution du chiffre d'affaires d'Uap-Vie avant et après reprise par AXA mérite d'être étudiée à titre d'exemple 43( * ) . En ce qui concerne la gestion, Claude Tendil note qu'au moment de l'absorption d'Uap par AXA le ratio sinistres sur primes d'AXA était de 71 %, celui de l'Uap de 77 %. Or, selon lui " ce que nous avions obtenu dans AXA, il n'y a pas de raison que nous ne le réalisions pas avec l'UAP. Ce qui signifie que notre marge de progression est de 6 points techniques pour 6 milliards de chiffre d'affaires". Les incitations à la bonne gestion dans une société nationale sont moindres que dans une société privée.

Ensuite, le classement boursier des sociétés nationales d'assurance en termes de capitalisation n'est pas à leur avantage. En décembre 1997, les AGF se situent au 15e rang européen, le GAN au 25e (en représentant respectivement un huitième et un quatorzième de la capitalisation d'Allianz) 44( * ) bien après les premiers groupes britanniques, hollandais, belges et suisses. La capitalisation boursière d'AXA-UAP représente moins de la moitié de celle d'Allianz, avant même l'absorption des AGF par cette dernière.

Enfin, l'issue des " nationalisations ", c'est-à-dire le sort des groupes d'assurance français après leur dénationalisation, corrobore les " indices " précédents 45( * ) . L'absorption de l'UAP par AXA, celles des AGF par Allianz et celle du GAN par Groupama, traduisent la faiblesse dans laquelle se trouvaient ces groupes publics.

B. LE NOMBRE PARTICULIÈREMENT IMPORTANT ET TOUJOURS CROISSANT DES ASSURANCES OBLIGATOIRES

La revue " Risques " en recensait 95 en France à la fin de 1992, contre 18 à la même date en Allemagne 46( * ) . " La France est le pays qui a le plus privilégié cette approche dirigiste de l'assurance, qui existe néanmoins dans la plupart des législations, mais à dose plus discrète ", résume l'universitaire Yvonne Lambert-Faivre 47( * ) . L'archétype en est l'assurance automobile. La pratique, même répandue, de l'assurance obligatoire n'est pas incompatible avec un régime concurrentiel (même si certaines règles s'imposent à tous les offreurs, comme celle du système de bonus-malus) d'offre assurancielle. La prise en compte statistique des primes et indemnités des assurances obligatoires est ainsi faite au travers des déclarations des entreprises d'assurance aux autorités de tutelle et aux organismes professionnels.

Il convient de noter, pour atténuer cette spécificité, que les assurances obligatoires importantes se retrouvent à peu près dans tous les grands pays : automobile, responsabilité civile, chasse, garantie de construction, garantie dommage ouvrage, risque nucléaire, risque de pollution, pour citer les principales. L'obligation d'assurance est issue en France, dans un certain nombre de cas d'obligations propres à certaines professions. C'est pour cela d'ailleurs qu'on ne les retrouve pas dans le livre deuxième du code des assurances, qui traite des assurances obligatoires.

Le caractère obligatoire de l'assurance, généralement lié au risque de responsabilité civile de l'assuré, a pour avantage notable de limiter, voire de supprimer les effets de la sélection adverse susceptibles de conduire à l'inassurabilité du risque, au cas où seuls les assurés certains d'être sinistrés s'assuraient. En même temps les responsables sont ainsi associés aux risques qu'ils font encourir aux autres, qui ne peuvent se trouver en principe face à quelqu'un d'insolvable. C'est le rôle à la fois économique et social du caractère obligatoire, qui a conduit la quasi totalité des pays à instaurer l'obligation de responsabilité civile automobile (en effet seul cet aspect de l'assurance auto est obligatoire).

La croissance continue en France des assurances obligatoires en matière de risques collectifs et le recours public à la contribution de l'assurance montrent cependant que la réflexion entre ce qui relève de l'assurance et n'en relève pas n'est pas assez poussée à ce jour. Elle contribue à nourrir dans l'esprit du public l'équivoque entre l'impôt et la cotisation d'assurance et le sentiment que l'assurance n'est pas vraiment soumise aux règles de fonctionnement normales d'un marché. On voit à nouveau que le flou définitionnel expose la profession à un certain arbitraire, que ses compétiteurs n'ont pas nécessairement à subir.

C. LE RÔLE IMPORTANT JOUÉ PAR LES ASSURANCES MUTUELLES DANS L'ASSURANCE DOMMAGES FRANÇAISE48( * )

La forte implantation des sociétés d'assurance mutuelles sur le marché de l'assurance dommages, en particulier dans la couverture du risque automobile (jusqu'à faire de la MACIF le premier assureur français auto puisque son portefeuille couvre 4,7 millions de véhicules soit 16 % du parc automobile français) est le produit d'une longue persévérance et d'une lente diversification commerciale : des produits, des clientèles et géographique.

A fin 1997, les sociétés d'assurance mutuelles de tête du GEMA au nombre de 12 (pour 24 sociétés adhérentes avec les filiales), regroupent 15 millions de sociétaires en assurance non-vie. Elles ont encaissé en 1997 40 GF de cotisations, avec une croissance de 2 % (malgré un déclin du chiffre d'affaires global de la profession en assurance non-vie de la même année de 1 %, après une croissance de 1,2 % en 1996). Elles disposaient d'un encours de placements de 62 GF à fin 1996. Leur part de marché en assurance auto est de 32 %. Elles assurent 40 % des véhicules de particuliers, 33 % du parc de logements des particuliers. Leur taux moyen de frais généraux en 1996 est de 21,8 %, très inférieur à la moyenne du marché qui est de 26,3 %.

En assurance-vie, les filiales ou " soeurs " des SAM du GEMA et le groupe Assurances Banques Populaires regroupent 2 millions de sociétaires pour 20 GF de primes émises en 1997 49( * ) .

L'histoire de la MAAF est assez illustrative de ce lent déploiement des mutuelles sans intermédiaires (MSI), qui n'apparaît rapide que rétrospectivement et aux yeux de ceux qui n'ont pas voulu croire à la crédibilité de mutuelles longtemps réputées sauvages, et qui ont aujourd'hui pignon sur rue grâce à leur succès auprès des consommateurs, fondé sur leur capacité à être les pionniers de l'industrialisation de l'assurance en amont et en aval de la relation avec le sociétaire assuré.

La MAAF a été créée en 1951 par la Chambre des métiers des Deux-Sèvres pour couvrir le risque automobile des artisans du département. Les artisans étant " un mauvais risque ", à la différence des instituteurs, pris en charge par la MAIF, qui sont " un bon risque ", la MAAF a été d'abord poussée à la diversification de sa clientèle en commençant par les " salariés " des artisans qui sont un meilleur risque, pour, en élargissant son périmètre de mutualisation, améliorer son risque médian en diluant son risque initial. La sélection du risque par l'orientation du marketing a donc été au coeur de cette stratégie de diversification de la clientèle.

Puis, sur cette base de clientèle élargie, et d'élargissement de son rayon d'action géographique, est intervenu progressivement l'enrichissement en produits de portefeuille de la MAAF qui a abordé dans les années 60 l'assurance habitation, l'assurance des professionnels dans les années 70, l'assurance-vie dans les années 80, enfin l'assurance santé dans les années 90. C'est en 1976 qu'elle a mis fin à tout obstacle statutaire à sa diversification. En 1992, la mutuelle éclate pour répartir ses activités entre une filiale commerciale à 99 % et la société mutuelle maintenue. A fin 1996, le groupe assure plus de 2 millions de sociétaires pour un chiffre d'affaires de 8,3 GF en non-vie, 161 000 souscripteurs de contrats d'assurance-vie, pour une collecte de 1,9 GF (12,5 GF de provisions mathématiques).

Chaque stratégie de développement de chaque mutuelle est bien entendu marquée par la qualité de sa clientèle originelle : l'Association générale de prévoyance militaire a commencé par développer des produits d'assurance-vie, avant de s'étendre à l'automobile ; en créant une filiale d'assurance dommages FILIA-MAIF ouverte à tout assuré parrainé par un sociétaire MAIF, la MAIF s'est également ouverte avec succès à la clientèle des non-enseignants.

Bien que certaines mutuelles d'assurance aient traditionnellement exercé une activité d'assurance-vie, la plupart ont développé plus récemment leurs activités d'assurance-vie.

En 1997, sur 165 sociétés d'assurance mutuelles 148 étaient des mutuelles d'assurance dommages, 14 d'assurance-vie, 3 mixtes. (On se reportera au chapitre II pour une comparaison européenne des SAM et de leur place sur chaque marché, ainsi qu'à l'encadré ci-après pour les caractéristiques juridiques des mutuelles d'assurance).

Les caractéristiques des sociétés d'assurance mutuelles *

Régies par le code des assurances, les sociétés d'assurance mutuelles (SAM) présentent les caractéristiques essentielles de la mutualité d'assurance :

- objet non commercial et but non lucratif ;

- cotisations fixes ou variables, susceptibles de faire l'objet d'une ristourne et, le cas échéant, d'un rappel de cotisation lorsqu'elles ont adopté la forme variable de celle-ci ;

- assurance des risques des seuls sociétaires qui sont à la fois individuellement les assurés et collectivement les assureurs ;

- absence de capital social et donc de titres représentatifs ;

- exercice démocratique du pouvoir (un homme, une voix), qui n'est donc pas lié au montant des apports de cotisation d'assurance.
- Pour des raisons juridiques (champ d'application, règles prudentielles, souplesse de fonctionnement), les sociétés d'assurance mutuelles doivent être distinguées des mutuelles régies par le code de la mutualité, et qui ont pour objet la prévoyance et la protection sociale des personnes.

Ainsi, contrairement aux sociétés anonymes, les mutuelles d'assurance sont des sociétés de personnes qui fonctionnent sans capital actions (décret loi de 1938), avec seulement un fonds d'établissement ayant la nature de fonds propres, car constitué le plus souvent à fonds perdus par les fondateurs et les sociétaires. Elles se différencient par là également des coopératives, qui remettent à leurs sociétaires des titres représentatifs de leur capital social. A cet égard, il est intéressant de noter que par une curiosité de l'histoire, on peut exercer, en France, l'activité bancaire sous forme de coopérative mais pas de mutuelle, et l'activité d'assurance sous forme de mutuelle mais pas de coopérative.

Conformément au code des assurances, les sociétés d'assurance mutuelles sont des sociétés civiles par nature soumises à un statut particulier.

Les SAM ont également comme spécificité que les excédents non ristournés appartiennent à la collectivité indivise et intemporelle des sociétaires. C'est la raison pour laquelle, en cas de dissolution, l'excédent d'actif net est dévolu soit à d'autres sociétés d'assurance mutuelles, soit à des associations reconnues d'utilité publique. Enfin, il faut souligner le lien très fort de la relation juridique établie entre le sociétaire assuré et sa mutuelle, et les deux principes qui en découlent :
- tout sociétaire doit pouvoir, directement ou indirectement, participer aux instances dirigeantes de la société ;

- chaque sociétaire dispose de droits égaux ; aucun traitement préférentiel ne peut être accordé à un sociétaire, par exemple en fonction d'élément financier. La démocratie mutualiste repose sur les principes propres aux organismes de l'économie sociale, à savoir un homme, une voix.
* Extrait de Gérard Andreck, La force d'une idée simple, Banque Stratégie, n° 147, mars 1998.

Les trois spécificités françaises qui viennent d'être évoquées traduisent, sous des aspects divers, la même préoccupation de protection poussée des personnes et ce que l'on peut appeler la présence indirecte de l'Etat-providence. Les modalités d'intervention de l'Etat à des fins de protection des citoyens ne sont d'ailleurs pas sans faire réfléchir aux évolutions possibles des modalités de la protection sociale publique, à l'heure actuelle directement organisée sous forme de monopoles.

VI. LE MONDE DE L'ASSURANCE FRANÇAISE : UN ORIENT COMPLIQUÉ

Il faut s'efforcer d'aborder cet orient compliqué avec des schémas simples, même si cette complexité est d'abord le produit d'une longue histoire et d'une diversité qui concourt à sa richesse et qui ne sont pas là pour faciliter l'analyse, mais par service des sous ensembles des populations très différentes.

On distinguera dans cette approche les sociétés qui composent l'ensemble du secteur en fonction du régime juridique et du contrôle dont elles relèvent.

A. GÉOGRAPHIE DE L'ASSURANCE FRANÇAISE

Le paysage de l'assurance française est composé de trois grands sous-ensembles distincts par leur régime juridique et leur organisme de contrôle. Il s'agit premièrement des entreprises d'assurance commerciales et des assurances mutuelles soumises au code des assurances, deuxièmement des mutuelles soumises au code de la mutualité, et troisièmement des institutions de prévoyance soumises au code des institutions de prévoyance (qui ne sont pas prises en compte dans ce rapport, comme il est signalé en introduction).

Le marché de l'assurance santé complémentaire se répartit entre ces trois catégories d'acteurs : 5 780 mutuelles versent 40 milliards de francs (GF) de prestations en espèces au titre de cette assurance, 200 entreprises soumises au code des assurances gèrent 20 GF de prestations, 85 institutions de prévoyance gèrent 16 GF.

1. Les entreprises d'assurance régies par le code des assurances et contrôlées par la commission de contrôle des assurances

Tableau 2
Nombre d'entreprises d'assurance contrôlées par la CCA
50( * ) :
Situation au 31 décembre 1996

Forme juridique

Vie et capitalisation

Non-vie

Mixtes

Total

Entreprises nationales

3

3

-

6

Sociétés anonymes

101

145

12

258

Sociétés d'assurance mutuelles avec intermédiaires

14

54

2

70

Sociétés d'assurance mutuelles sans intermédiaires

-

19

-

19

Mutuelles agricoles, locales ou professionnelles

-

106

-

106

Succursales de sociétés étrangères (siège hors EEE)

5

16

-

21

Divers

3

2

-

5

TOTAL

126

345

14

485

Source : rapport d'activité 1996 de la CCA.

On constate donc d'après ce tableau que les entreprises soumises au code de l'assurance sont très diverses. Il existe en particulier, à côté des compagnies d'assurance commerciales traditionnelles ayant la forme juridique de SA en principe, divers types de sociétés d'assurance mutuelles (bien distinctes des mutuelles soumises au code de la mutualité, quoique juridiquement parentes) :

- les sociétés d'assurance mutuelles (SAM) sans intermédiaires, souvent appelées MSI (telles que MAIF, etc.), regroupées professionnellement au sein du GEMA (Groupement des entreprises mutuelles d'assurance) ;

- les SAM avec intermédiaires, fonctionnant comme une compagnie traditionnelle avec un but lucratif mais ayant la forme d'une société d'assurance mutuelle, société de personnes (telles que les Mutuelles du Mans, le groupe Azur) rattachées professionnellement au ROAM (réunion des organismes d'assurance mutuelles), proche de la FFSA ;

- les SAM agricoles, locales ou professionnelles (telle que Groupama qui est historiquement la première SAM, même si l'enseigne Groupama est tardive) et que fédère l'AREMPA.
Il faut ajouter à ce total 22 entreprises de réassurance ayant leur siège social en France, 24 sociétés de participations d'assurance, 17 entreprises d'assurance-dommages ayant cessé leurs opérations, 34 pools et 2 sociétés d'épargne, soit un total de 584 unités relevant de la Commission.

En 1996, ces entreprises ont collecté 704 milliards de francs (GF) de primes et elles disposaient de 2 514 MF. de placements et de liquidités (hors plus-values latentes) pour faire face à 2 474 MF. d'engagements envers les assurés 51( * ) .

2. Mutuelles régies par le code de la mutualité et soumises au contrôle de la Commission du contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance52( * )

Les mutuelles du code de la mutualité sont des groupements à but non lucratif, qui interviennent dans le champ de la protection sociale principalement pour fournir une couverture sociale complémentaire à l'assurance maladie des organismes de Sécurité sociale mis en place en 1945.

Depuis les lois du 19 mars 1947 (dite loi Morice) et du 9 avril 1947, la possibilité est offerte aux mutuelles de gérer la part obligatoire des prestations d'assurance maladie servies par le régime général aux salariés et aux fonctionnaires 53( * ) . Les sociétés mutualistes peuvent s'organiser en sections locales de la Sécurité sociale, et c'est ce que feront seules les mutuelles de fonctionnaires. Puis la gestion des prestations obligatoires pour les étudiants est confiée aux mutuelles d'étudiants par la loi du 23 septembre 1948. L'assurance maladie des exploitants agricoles est confiée à la mutualité agricole ou à l'assurance commerciale (GAMEX) par la loi du 25 janvier 1961 et celle des professions non salariées non agricoles à la mutualité et à l'assurance commerciale (GAMEX-RAM, voir chapitre III, 5.4) par la loi du 12 juillet 1966.

Elles assurent les risques sociaux principalement de courte durée liés à la personne à l'exclusion des dommages survenant à des biens ou à des tiers. L'adhésion à ces mutuelles ou groupements est en principe facultative. Elles se regroupent en unions ou fédérations. Elles sont contrôlées depuis 1989 par la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance (voir annexe 3 de ce chapitre sur le rôle, la composition et les pouvoirs de cette Commission).

La réglementation actuelle prescrit aux mutuelles garantissant des engagements longs à titre accessoire (incapacité, invalidité, vieillesse, décès, vie) de gérer ces risques au sein de structures propres, dotées de l'autonomie comptable et financière, mais non de la personnalité morale. Il s'agit des caisses autonomes. Cette gestion peut être également déléguée à la Caisse nationale de prévoyance. Les caisses autonomes sont soumises à des règles de provisionnement technique et de représentation des provisions par les actifs équivalents analogues à celle des sociétés d'assurance et des institutions de prévoyance.

98 caisses autonomes mutualistes sont en activité en 1996. Elles ont levé en 1996 11,3 GF de cotisations brutes et ont servi 6,3 GF de prestations brutes. Le montant de leurs provisions techniques s'élève à 83,5 GF. Leurs excédents ne peuvent bénéficier qu'aux adhérents des mutuelles qu'elles prolongent.

Les petites mutuelles protégeant moins de 3 501 personnes ne sont en fait contrôlées par aucune autorité de tutelle. Elles forment le plus grand nombre : 4 500 sur 5 780 groupements mutualistes soumis au code de la mutualité. Les mutuelles servant jusqu'à 150 MF de prestations par an sont contrôlées par les préfets de région au travers des directions régionales des affaires sanitaires et sociales. De sorte que 115 groupements sont soumis au contrôle direct de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance.

Les mutuelles dominent assez largement le marché global (individuel ou collectif) de l'assurance complémentaire santé en 1996 avec une part de marché de 61,66 % contre 8,76 % pour les institutions de prévoyance et 29,58 % pour les assureurs, alors que leur part de marché de l'assurance décès est de 35,96 % contre 64,04 % pour les assureurs et que leur part de marché de l'assurance incapacité-invalidité (prévoyance) n'est que de 3,80 % contre 96,20 % pour les assureurs (selon les chiffres de l'Observatoire de l'environnement de la Fnmf).

Tableau 3
La mutualité en 1995


52 150 millions de prestations

10 370 millions de francs de chiffres d'affaires

 
 
 
 

5 780 groupements mutualistes

Prestations en millions de francs

%

Types de prestations

343 unions ou fédérations

5 410

39,4

soins ambulatoires

 
 

38,6

pharmacie, optique, orthopédie

 
 

14

hospitalisation

945 mutuelles de plus de 3 500 personnes protégées

43 090

2,2

autres prestations en nature

 
 

5,8

prestations en espèces (indemnité journalières à moins d'un an, prestations décès)

4 600 mutuelles de moins de 3 501 personnes protégées

1 330 (e)

 

structure des prestations inconnues

TOTAL

49 830

 

millions de prestations

89 Caisses autonomes

5 320

73

27

retraite - vie - décès

accident - invalidité

1 325 réalisations sociales

7 670

 

production de services (sanitaires, sociaux, de loisirs)

 

2 700

 

vente de marchandises (pharmacie, lunettes, prothèses)

Source : rapport présenté au Conseil supérieur de la mutualité, direction de la Sécurité sociale, ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

VII. MACRO-ÉCONOMIE SCHÉMATIQUE COMPARÉE DE L'ASSURANCE ET DE LA BANQUE

En 1997, la valeur ajoutée brute dans le secteur des assurances représente 44,24 milliards de francs (GF) pour un PIB total de 8 137,1 milliards de francs, soit 0,54 % de ce dernier. L'emploi total est de 207 800 soit 1 % de l'emploi national. A titre de comparaison la valeur ajoutée des organismes financiers est à cette même date de 282,1 milliard de francs soit 3,5 % du PIB.

Le tableau ci-dessous donne l'évolution comparée de la valeur ajoutée (en francs 80) et de sa part dans le pib total des secteurs assurances et organismes financiers.

Tableau 4 :

Valeur ajoutée des assurances et des organismes financiers en valeur et
en % du PIB (1959-1997)

Année

Valeur ajoutée

Part Valeur ajoutée dans PIB

 

Assurances

Organismes
financiers

Assurances

Organismes
financiers

1959

7095

30187

-

-

1960

7693

29349

0,63

2,40

1961

7323

30982

0,57

2,42

1962

6725

31142

0,49

2,28

1963

6977

33600

0,48

2,33

1964

7935

36581

0,52

2,39

1965

9868

36941

0,62

2,31

1966

10674

37706

0,64

2,25

1967

10804

40788

0,62

2,33

1968

11157

46656

0,62

2,57

1969

12134

57122

0,63

2,97

1970

13239

61769

0,65

3,04

1971

11044

72725

0,52

3,42

1972

11605

74059

0,52

3,34

1973

13232

84274

0,57

3,60

1974

15659

104189

0,65

4,32

1975

17383

91528

0,72

3,80

1976

19212

92111

0,77

3,67

1977

20287

83016

0,78

3,21

1978

20266

84021

0,76

3,14

1979

20932

88051

0,76

3,19

1980

22101

100497

0,79

3,58

1981

23811

101776

0,84

3,58

1982

22804

103902

0,78

3,57

1983

20828

100051

0,71

3,41

1984

20383

102428

0,69

3,45

1985

21881

107965

0,72

3,57

1986

20921

124736

0,67

4,02

1987

19732

134768

0,62

4,23

1988

19891

127975

0,60

3,86

1989

20212

120564

0,58

3,49

1990

19859

105179

0,56

2,97

1991

23938

99022

0,67

2,77

1992

25733

95614

0,71

2,65

1993

22539

93608

0,63

2,62

1994

24470

107206

0,67

2,92

1995

23440

97532

0,63

2,61

1996

20632

83501

0,54

2,20

1997

18710

82908

0,48

2,13

Source : Comptes de la nation 1998

Les variations de la part de la valeur ajoutée des assurances dans le pib total peuvent être très fortes d'une année sur l'autre puisqu'elles vont de -13 % à + 19 % entre 1959 et 1997.

Le taux de croissance annuel moyen de la valeur ajoutée de ces quatre dernières années a été de 8 %, ce qui correspond à l'évolution du secteur " organismes financiers ".

Il n'a malheureusement pas été possible d'entreprendre une analyse critique de ces chiffres issus des comptes de la nation et d'arbitrer le débat entre l'insee et la profession de l'assurance, quant à la question de savoir si les chiffres de la comptabilité nationale reflétaient bien ou sous estimaient  plutôt la contribution du secteur des assurances au sens large à la valeur ajoutée nationale.

Il n'a pas non plus été possible, comme le souhaitaient légitimement certains experts de mesurer le rôle et la place de l'assurance dans l'économie nationale en analysant la création de valeur ajoutée de ce secteur et sa répartition entre les différentes parties prenantes au système assuranciel (clients, salariés, actionnaires, sous-traitants, intermédiaires...) faute de disposer des éléments permettant de conduire une telle analyse. Ainsi que le fait remarquer, à propos de l'assurance, Jean-Louis Bancel, directeur général de la fnmf, " comme pour toute fonction d'intermédiation, ce type d'analyse n'est souvent que peu développé ".

Il serait effectivement souhaitable, à l'initiative du Commissariat général du Plan ou non, de favoriser le lancement de ce type d'analyse à l'avenir, qui équilibrerait utilement les analyses sectorielles unilatérales du côté " offre " du marché à partir d'indicateurs classiques. Il est à l'heure actuelle difficile de s'en départir, même si l'on est conscient que dans un type d'économie qui répartit plus volontiers la valeur ajoutée au consommateur, lequel est le destinataire final de l'activité d'assurance et dont la satisfaction est l'ultima ratio de cette industrie, la comparaison avec d'autres types d'économie, qui répartissent la valeur ajoutée plutôt au profit de l'actionnaire, défavorise manifestement le diagnostic économique et financier que l'on peut porter sur le premier.

Le tableau ci-après montre l'importance croissante en valeur absolue et relative du secteur de l'assurance dans le financement de l'économie ainsi que dans le financement intermédié.



Comme le fait ressortir le commentaire du rapport du CNCT : " l'apport des sociétés d'assurance a enregistré une vive progression passant de 94,7 milliards de francs (GF) en 1995 à 144,4 GF en 1996. Le niveau constitue un sommet historique. Le flux des financements fournis par les sociétés d'assurance est ainsi devenu très proche de celui provenant des établissements de crédit (153,6 GF). Le taux d'intermédiation des sociétés d'assurances a ainsi fait un bond de 12,7 % en 1995 à 17,8 % en 1996. Il se situe à un maximum historique, confirmant la place croissante prise par ces entreprises dans le financement de l'économie française notamment du fait du succès des produits d'assurance-vie, qui leur a fourni d'abondantes ressources et un désintérêt relatif pour l'investissement immobilier, qu'a suscité les placements ou les titres obligataires ". Ainsi, l'Etat a-t-il été le principal bénéficiaire de cette part croissante de l'assurance dans le financement de l'économie (voir des émissions de valeurs mobilières ci-après).

Tableau 6 : Emissions brutes de valeurs mobilières
(en milliards de francs)

 

1992

1993

1994

1995

1996

1997

ACTIONS ET CERTIFICATS D'INVESTISSEMENT (hors OPCVM)

247,4

240,4

267,6

260,5

286

292,9

Valeurs cotées (cote officielle

et second marché)



47,2

66,3

74,6

35,9

40,3

52,2

Valeurs non cotées

200,2

174,1

193,0

224,6

245,7

240,7

OBLIGATIONS (hors Codevi)

ET TITRES participatifs (émis sur le

marché intérieur

359,6

526,2

403,4

371,2

475,1

470,2

Administrations publiques

178,7

363,4

286,2

264,9

351,3

348,1

Etat

176,1

360,2

261,5

263,9

301,4

336,0

Organismes divers d'administration centrale

-

-

-

-

48

10,6

Administrations publiques locales

2,6

2,6

1,9

1,0

1,9

1,5

Administrations de Sécurité sociale

-

0,6

22,7

-

-

-

Etablissements de crédit et assimilés

139,8

114,1

67,8

68,2

68,6

75,6

Banques

50,8

37,8

18,2

27,0

20,8

32,2

Sociétés financières et assimilées

34,9

28,1

10,0

8,4

8,5

8,0

Caisses d'épargne

5,8

5,7

7,3

5,3

6,2

8,0

Institutions financières spécialisées

et assimilées

39,2

39,8

30,9

27,1

33,1

25,2

Institutions financières diverses

9,1

2,7

1,4

0,4

-

1,1

Sociétés et quasi sociétés non financières

39,1

48,2

44,4

32,1

55,2

46,2

Grandes entreprises nationales

(y compris La Poste)

28,1

29,0

18,1

17,6

18,6

14,1

Autres sociétés

11,0

19,2

26,3

14,5

36,6

32,2

Compagnies d'assurances

-

0,9

-

-

-

-

Non résidents

2,0

-

5,0

6,0

-

0,2

Source : Banque de France, COB.

A la fin 1996, l'encours des placements des sociétés vie s'élevait à 2 620 GF en progression moyenne annuelle de 22 % depuis 1987. L'encours des sociétés d'assurances dommages s'élevait lui à 470 GF, en croissance annuelle moyenne de 6 % sur dix ans 54( * ) .

ANNEXES

Annexe 1 : Organisations professionnelles des entreprises d'assurance régies par le code des assurances

Annexe 2 : Composition, organigramme, missions et pouvoirs de la Commission de contrôle des assurances (extraits du rapport d'activité de la Cca 1996)

Annexe 3 :  Composition, missions et pouvoirs de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance

Annexe 4 :  Principales directives européennes sur l'assurance

ANNEXE 1


ORGANISATIONS PROFESSIONNELLES DES ENTREPRISES D'ASSURANCE RÉGIES PAR LE CODE DES ASSURANCES

ORGANISMES PROFESSIONNELS DU SECTEUR FRANÇAIS DE L'ASSURANCE

FFSA GEMA

(Fédération Française des Sociétés d'assurances) (Groupement des Entreprises Mutuelles

d'Assurance)



MACIF

MAIF

MAAF

MATMUT

FFSA FFSAM

(Fédération Française des Sociétés (Fédération Française des Sociétés

Anonymes d'Assurance) d'Assurances Mutuelles)

ROAM AREMPA

(Réunion des Organismes (Association pour le

d'Assurances Mutuelles) Renouvellement du

Mutualisme à caractère

Mutuelles du Mans Professionnel dans

Groupe Azur l'Assurance)

Groupama GMF

ANNEXE 2


COMPOSITION, ORGANIGRAMME, MISSIONS ET POUVOIRS DE LA COMMISSION DE CONTROLE DES ASSURANCES

COMPOSITION DE LA COMMISSION DE CONTROLE
DES ASSURANCES

Président

Jean FOURRÉ, conseiller d'Etat

Président suppléant

Marie-Aimée LATOURNERIE, conseiller d'Etat

Membres titulaires

Paul FOURET, conseiller à la Cour de cassation

Jean-Michel de MOURGUES, conseiller maître à la Cour des comptes

Denis PLOTON

Robert BERTAUX

Membres suppléants

Agnès CAVELLAT-DELAROCHE, conseiller à la Cour de cassation

Philippe ADHEMAR, conseiller maître à la Cour des comptes

Bernard SCHAEFFER

Pierre PETAUTON

Commissaire du gouvernement

Le directeur du Trésor ou son représentant

Secrétaire général

Jean-Louis BELLANDO, commissaire contrôleur général, chef du service de contrôle des assurances

Adjoint au chef du service de contrôle des assurances

Daniel BUCHETON, commissaire contrôleur en chef, chef de brigade

Secrétariat central de la Commission

Catherine LEZON, commissaire contrôleur

La Commission de contrôle des assurances 55( * ) assume les missions de contrôle des entreprises d'assurance opérant en France.

Composée de cinq membres, nommés pour cinq ans et non révocables 56( * ) , la Commission de contrôle des assurances a la qualité administrative indépendante, ce qui lui confère une large autonomie de décision dans son domaine d'activité. Elle est dotée de pouvoirs de sanctions disciplinaires et pécuniaires.

Le contrôle s'effectue dans l'intérêt des assurés et bénéficiaires de contrats.

La loi définit les missions de la Commission et lui donne les pouvoirs qui lui permettent de les remplir.

Président de la commission

Jean Fourré

Relations internationales Monique Gaultier

Secrétaire centralde la Commission Catherine Lozon

Secrétaire GénéralChef du service de contrôle Jean Louis Bellando

Brigade 2 : Patrick de Malherbe

Patrick de Malherbe

Adjoint au chef de service de contrôle Daniel Bucheton

Administration Générale Rose Marie Bontant

Placements Marie Cécile Levoyer

Informatique et statistiques Jean Marie Mesnard

Division I : Elie Charles Garbarz

Elie-Charles Garbarz

Division II Elie-Charles Garbarz

Relations avec le public Nicole Lehoczky

Fiscalité et comptabilité Jean claude Monteil

Brigade 3 Paul Granboulan

Brigade 4 Gérard Neudin

Brigade 7 Alain Tosette

Brigade 6 Philippe Roux

Brigade 5 Marc Porin

Brigade 1 : Noël Guibert

Noël Guibert

MISSIONS ET METHODES DE LA CCA

Le contrôle mené par la Commission de contrôle des assurances est permanent : il s'exerce à l'égard de chaque société soumise à son contrôle, tout au long de son activité.

Missions de la CCA

La Commission de contrôle des assurances a pour mission principale le contrôle des activités des entreprises d'assurance. La loi lui a, de surcroît, conféré certaines autres tâches, concernant notamment les associations d'actuaires, les experts immobiliers ou les statuts des entreprises.

La Commission est investie d'une mission permanente consistant à vérifier que les entreprises d'assurance tiennent et restent en mesure de tenir les engagements qu'elles ont contracté envers les assurés. L'examen des situations financières et des conditions d'exploitation des entreprises forme donc la base de ses travaux. En particulier, la Commission s'attache à vérifier que les entreprises évaluent correctement leurs engagements réglementés, les représentent par des actifs équivalents admis en couverture, et disposent de la marge de solvabilité réglementaire.

Par l'analyse économique et financière qu'elle mène, le Commission est ainsi en mesure d'apprécier si les entreprises sont en situation d'assumer leurs engagements contractuels en respectant la réglementation en vigueur. Cette analyse est permanente et prospective.

La Commission veille au respect par les entreprises des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'assurance, et en particulier à la stricte application des principes prudentiels et comptables. Elle examine avec la plus grande attention si les contrats sont exécutés dans le respect des droits des assurés. Elle est amenée, enfin, en tant qu'autorité morale de contrôle des marchés, à définir ses interprétations de la réglementation sur certains aspects qui ont soulevé son attention.

Plusieurs fonctions de contrôle a priori sont également confiées à la Commission.

Ainsi, la réforme de la réglementation des activités d'assurance sur la vie et de capitalisation, en vigueur depuis juillet 1993, met fin à l'obligation pour les compagnies d'assurance de calculer leurs tarifs sur la base des tables statistiques (tables de mortalité) réglementaires. De même, deux arrêtés de mars et décembre 1996 mettent fin à l'obligation pour les compagnies d'assurance de calculer les provisions correspondant aux rentes d'invalidité sur la base de tables réglementaires. Des actuaires sont désormais habilités à établir des tables différentes s'ils sont agréés à cette fin par une association d'actuaires. Le code des assurances confie à la Commission la mission d'habiliter les associations d'actuaires autorisées à délivrer de tels agréments. La Commission rappelle à cet égard que l'usage des tables réglementaires reste obligatoire en l'absence d'intervention d'un actuaire dûment agréé.

Par ailleurs, les actifs immobiliers propriétés des compagnies doivent être évalués au moins tous les cinq ans de façon à permettre aux comptes des entreprises de traduire fidèlement la situation réelle. Ces évaluations sont faites par des experts acceptés par la Commission.

Enfin, l'accord de la Commission doit être obtenu avant toute modification des statuts d'une entreprise d'assurance agréée.

La loi n° 94-5 du 4 janvier 1994 destinée à transposer le régime des troisièmes directives du Conseil des communautés européennes, a modifié le champ du contrôle de la Commission. Ce régime est entré en vigueur le 1 er juillet 1994.

Ce texte marque, pour les entreprises régies par le code des assurances, l'achèvement du marché unique de l'assurance, avec notamment l'établissement du principe du " passeport unique " pour les entreprises établies dans un pays européen et qui souhaitent diffuser leurs produits en libre prestation de services dans d'autres pays de l'Union. Ainsi, les entreprises d'assurances régulièrement agréées dans un autre Etat de l'Union européenne peuvent exercer en France en libre prestation de services et en libre établissement.

En 1996, 86 entreprises d'assurance agréées dans un autre Etat membre de l'Union exerçaient une activité en France par le biais de succursales (dont 15 depuis 1996), et 458 avaient déclaré leur intention d'y opérer en libre prestation de services (dont 116 depuis 1996). De façon analogue, les entreprises françaises peuvent commercialiser dans ce même cadre des contrats dans les autres pays européens. Le contrôle prudentiel des activités des entreprises est de la seule compétence des autorités du pays du siège social. Ainsi, le contrôle financier des activités à l'étranger des entreprises françaises en libre prestation de services ou en libre établissement est du ressort de la Commission française de contrôle des assurances. 80 entreprises d'assurance françaises pratiquaient en 1996 la libre prestation de services au sein de l'Union européenne dont 9 depuis 1996, et 79 succursales d'entreprises d'assurance françaises étaient établiesnionUUU jjflqsjfljotruz' -* en 1996 dans un autre pays de l'Union européenne, dont 6 depuis 1996. Les succursales communautaires en France restent quant à elles soumises aux textes d'intérêt général, et la Commission de contrôle des assurances est chargée de veiller à leur correcte application, notamment en ce qui concerne les dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'assurance.

La loi n° 94-679 du 8 août 1994 a prévu l'extension du domaine de contrôle de la Commission, à compter du 1 er janvier 1995, aux sociétés de réassurance ayant leur siège social en France et aux sociétés de participations d'assurance.

Par " sociétés de participations d'assurance ", la loi désigne les entreprises dont l'activité principale consiste à prendre et à gérer des participations dans des entreprises d'assurance ou de réassurance, et qui détiennent, directement ou indirectement, un pouvoir effectif de contrôle sur au moins une société d'assurance ayant son siège social en France.

La loi a également prévu la publication de comptes consolidés, ou de comptes combinés pour les ensembles dont la cohésion ne résulte pas de liens de capital.

Ce texte a donc étendu la mission de la Commission : il a fait entrer dans le secteur contrôlé une vingtaine d'entreprises de réassurance et davantage de sociétés de participations d'assurance. Il lui permet surtout d'exercer cette mission de façon plus efficace en lui donnant la possibilité de prendre en compte les imbrications existant entre sociétés d'assurance ou de réassurance.

Méthodes de contrôle

Pour mettre en oeuvre l'ensemble de ses missions, la Commission de contrôle des assurances dispose du Corps de contrôle des assurances. Les commissaires contrôleurs, répartis en brigades regroupées dans le service du contrôle, sont chargés des activités de contrôle sur place et sur pièces. Le Corps de contrôle des assurances apporte également son appui aux autres services du secrétariat général de la Commission. Ces services comprennent également d'autres fonctionnaires du ministère de l'Economie et des Finances. Au 31 décembre 1996, l'effectif des services de la Commission était de 128 personnes dont 49 commissaires contrôleurs, parmi lesquels figuraient 5 commissaires contrôleurs élèves et 8 commissaires contrôleurs mis à la disposition d'autres organismes (Commission européenne, direction du Trésor...). Les vérifications menées sur pièces et sur place par les commissaires contrôleurs servent de base aux travaux de la Commission.

Le service de contrôle est organisé en 7 brigades. L'étude de chaque société est confiée à une brigade unique et, en général, à un seul commissaire contrôleur, qui est ainsi l'interlocuteur privilégié de l'entreprise concernée. L'expérience a montré qu'un suivi permanent dans une perspective de continuité de la surveillance était une méthode bien adaptée aux missions de la Commission. Dans la même logique, les sociétés d'un même groupe sont suivies par des contrôleurs d'une même brigade.

Le contrôle sur pièces

L'examen du dossier annuel conduit, chaque fois que cela est nécessaire, à des observations écrites aux entreprises concernées, complétées le cas échéant, par des entretiens des commissaires contrôleurs avec les dirigeants.

La Commission est amenée à demander aux entreprises d'assurance, quand cela lui semble nécessaire, la communication des rapports des commissaires aux comptes ou d'autres documents comptables ou administratifs.

Le contrôle sur place

L'analyse des documents fournis par les entreprises d'assurance s'accompagne d'investigations approfondies sur place, organisées en tant que de besoin.

Les commissaires contrôleurs peuvent à tout moment vérifier sur place les opérations effectuées par les entreprises auprès desquelles ils sont accrédités : ils peuvent examiner l'ensemble des documents de l'entreprise, et en particulier tous les livres, registres, contrats, bordereaux, procès-verbaux et pièces comptables.

La procédure de contrôle sur place revêt un caractère contradictoire 57( * ) . Dans chaque cas, le rapport de contrôle est communiqué aux dirigeants de l'entreprise concernée, qui sont invités à fournir leurs observations avant que le commissaire contrôleur ne formule ses conclusions définitives.

L'extension du contrôle

Le pouvoir d'investigation des commissaires contrôleurs porte sur toutes les opérations des organismes d'assurance agréés. Le code des assurances 58( * ) prévoit, de plus que si cela lui semble nécessaire, la Commission peut étendre la vérification à " toute société dans laquelle l'entreprise d'assurance contrôlée détient, directement ou indirectement, plus de la moitié du capital ou des droits de vote, ainsi qu'aux organismes de toute nature ayant passé, directement ou indirectement, avec cette entreprise une convention de gestion, de réassurance ou de tout autre type susceptible d'altérer son autonomie de fonctionnement ou de décision ".

Le contrôle sur place peut aussi être étendu, lorsque l'entreprise fait l'objet de mesures de redressement et de sauvegarde, aux personnes morales qui la contrôlent directement ou indirectement afin de vérifier que ces personnes morales sont en mesure d'apporter un appui financier suffisant à l'entreprise en cause.

La Commission peut enfin décider de soumettre au contrôle toute personne physique ou morale ayant reçu d'une entreprise d'assurance surveillée par elle un mandat de souscription de gestion, ou exerçant, à quelque titre que ce soit, le courtage d'assurance 59( * ) .

L'usage de ces possibilités permet à la Commission de statuer sur la situation des sociétés en disposant d'éléments d'analyse complets.

POUVOIRS DE LA CCA

Comme suite aux possibilités d'investigation très vastes citées ci-dessus, la loi dote la Commission de contrôle de pouvoirs qui sont principalement : le pouvoir de prendre des mesures de sauvegarde, le pouvoir d'injonction et le pouvoir de sanction.

Sur la base du rapport établi par le commissaire contrôleur, des réponses des dirigeants de l'entreprise concernée et des conclusions du contrôle, la Commission de contrôle analyse et apprécie la situation de l'entreprise.

Mesures de sauvegarde

Lorsque la situation financière d'une entreprise d'assurance est telle que les intérêts des assurés sont compromis ou susceptibles de l'être, la Commission prend les mesures d'urgence nécessaires à la sauvegarde de l'intérêt des assurés. Elle peut mettre l'entreprise sous surveillance spéciale, et notamment exiger que lui soit soumis pour approbation, dans le délai d'un mois, un programme de rétablissement. Elle peut aussi restreindre ou interdire la libre disposition des actifs de l'entreprise.

Elle peut également désigner un administrateur provisoire à qui sont transférés les pouvoirs nécessaires à l'administration de l'entreprise (art. L 323-1-1).

Enfin, lorsque la marge de solvabilité n'atteint pas le montant réglementaire, la Commission exige un plan de redressement.

Ces décisions peuvent être prises sans qu'une procédure contradictoire d'audition ait été préalablement engagée, la loi autorisant la Commission à n'entendre les dirigeants qu'a posteriori. Cependant, lorsqu'elle restreint ou interdit la libre disposition des actifs ou désigne un administrateur provisoire, la Commission dispose d'un délai de trois mois pour lever ou confirmer ces mesures, après avoir mis les dirigeants à même de présenter leurs observations.

Pouvoir d'injonction

La Commission utilise, lorsqu'elle l'estime nécessaire, les pouvoirs que lui confère l'article L 310-7 du code des assurances : elle peut adresser une mise en garde à l'entreprise qui aurait enfreint une disposition légale ou aurait un comportement mettant en péril l'exécution de ses engagements envers les assurés et bénéficiaires de contrats.

De façon analogue, elle peut adresser aux entreprises, dont le fonctionnement ou la situation le justifient, une injonction à l'effet de prendre, dans un délai déterminé, toutes mesures destinées à rétablir ou renforcer leur équilibre financier ou à corriger des pratiques jugées contraires aux intérêts des assurés.

Les pouvoirs de mise en garde et d'injonction s'appliquent également, en vertu de l'article L 310-18-1 aux entreprises de réassurance soumises au contrôle de l'Etat, et aux sociétés de participations d'assurance enfreignant une disposition législative ou réglementaire applicable en vertu du livre III du code des assurances.

Pouvoir de sanction

A la suite d'une injonction qu'elle a prononcée, la Commission est amenée à apprécier les mesures que l'entreprise d'assurance concernée a mises en oeuvre pour y satisfaire. Dans les cas où la Commission considère que les dispositions prises n'ont pas été suffisantes, elle a le pouvoir d'engager une procédure disciplinaire à l'encontre de la compagnie concernée ou de ses dirigeants.

Ce pouvoir est également à la disposition de la Commission lorsqu'elle constate un manquement aux textes en vigueur.

La procédure disciplinaire est contradictoire : les responsables de l'entreprise sont entendus par la Commission après audition des commissaires contrôleurs rapporteurs.

Les cinq membres de la Commission, réunis en la seule présence du secrétaire général et du commissaire du gouvernement, peuvent alors prononcer une ou plusieurs des sanctions prévues à l'article L 310-18 du code des assurances :

- l'avertissement ;

- le blâme ;

- la suspension temporaire d'un ou plusieurs dirigeants de l'entreprise ;

- le retrait total ou partiel d'agrément ;

- le transfert d'office de tout ou partie du portefeuille de contrats.
En outre, la Commission peut prononcer des sanctions pécuniaires dans la limite de 3 % du chiffre d'affaires hors taxes de la société concernée pour le dernier exercice clos (5 % en cas de récidive).

Lorsqu'une entreprise de réassurance soumise au contrôle de l'Etat ou une société de participations d'assurance enfreint une disposition législative ou réglementaire qui lui est applicable, ou ne défère pas à une injonction, la Commission peut, dans les mêmes conditions que pour les entreprises d'assurance, prononcer un avertissement ou un blâme, en décider la publication, et prononcer des sanctions pécuniaires.

Autres aspects de l'exercice des pouvoirs de la Commission

La Commission de contrôle des assurances dispose également d'autres pouvoirs destinés, d'une part, à lui permettre d'obtenir les éléments d'appréciation suffisants pour se prononcer en pleine connaissance de cause d'autre part, à coopérer avec les autres autorités en charge des dossiers qu'elle est amenée à traiter.

Elle peut ainsi se faire communiquer des informations sur l'activité d'une entreprise d'assurance par les commissaires aux comptes qui se trouvent alors déliés, à l'égard de la Commission, du secret professionnel 60( * ) .

Elle est aussi en contact avec la Commission de contrôle des institutions de retraite ou de prévoyance et des mutuelles, la Commission bancaire, la Commission des opérations de bourse, le Conseil de discipline des organismes de placements collectifs en valeurs mobilières, le Conseil de la concurrence, le Conseil des marchés financiers et les représentants légaux des entreprises de marché et des chambres de compensation, afin que soit assurée la communication des renseignements nécessaires à l'accomplissement de leurs missions respectives. Les renseignements ainsi recueillis sont couverts par le secret professionnel en vigueur dans les conditions applicables à l'organisme qui les a communiqués et à l'organisme destinataire.

D'autres pouvoirs sont également conférés à la Commission, notamment lorsque celle-ci constate des pratiques anticoncurrentielles 61( * ) .

La Commission a en outre le devoir de saisir le procureur de la République territorialement compétent de tout fait de nature à justifier des poursuites pénales qu'elle relève, sans préjudice des sanctions qu'elle peut prononcer en application des article L 310.18 ou L 310.18.1 du code des assurances.

Enfin, tout dirigeant d'une société soumise au contrôle de la Commission qui mettrait obstacle à l'exercice par celle-ci de sa mission, lui communiquerait sciemment des renseignements inexacts, ou ne répondrait pas, après mise en demeure, à ses demandes d'information, s'expose à un emprisonnement de deux ans et à une amende de 2 MF : les personnes morales peuvent également être déclarées responsables pénalement de ces infractions et encourir les amendes prévues au code pénal (article L 310.28 du code des assurances).

2

composition, missions et pouvoirs de la commission des contrôles des mutuelles et des institutions de prévoyance

Source : Rapport 1994-1995 de la CCMIP, Code de la mutualité.

ANNEXE 3


COMPOSITION, MISSIONS ET POUVOIRS DE LA COMMISSION DE CONTROLE DES MUTUELLES ET DES INSTITUTIONS DE PREVOYANCE62( * )

COMPOSITION DE LA COMMISSION DE CONTROLE DES MUTUELLES ET DES INSTITUTIONS DE PRÉVOYANCE

Président : M. Jean FOURRÉ (conseiller d'Etat honoraire)

Suppléant : M. Jacques BONNOT (conseiller d'Etat honoraire)

Membres :

M. Yves CHAGNY (conseiller à la Cour de cassation)

M. Guy ROSIER (conseiller-maître à la Cour descomptes)

M. Pierre JEANSON (personnalité qualifiée choisie pour ses compétences dans le secteur de la mutualité)

M. Jacques TEILLARD (personnalité qualifiée choisie pour ses compétences dans le secteur des institutions soumises au contrôle de la Commission)

Membres suppléants :

M. François GOUGÉ (conseiller à la Cour de cassation)

Mme Rolande RUELLAN (conseiller-maître à la Cour des comptes)

M. Jean DUCHANGE (personnalité qualifiée choisie pour ses compétences dans le secteur de la mutualité)

M. Marcel FERCOQ, (personnalité qualifiée choisie pour ses compétences dans le secteur des institutions soumises au contrôle de la Commission)

Commissaires du Gouvernement :

M. le directeur de la Sécurité sociale au ministère de l'Emploi et de la Solidarité

M. le directeur des exploitations, de la politique sociale et de l'emploi au ministère de l'Agriculture

Secrétaire général :

M. Christian ROLLET, chef de l'Inspection générale des affaires sociales

Secrétaire général adjoint :

M. Laurent GRATIEUX, membre de l'Inspection générale des affaires sociales

Le secrétariat général est assuré par :

Mme Danièle Jayberlinos, MM. Serge HORVILLE, Michel RADENAC et Denis SOULATGES.

MISSIONS ET POUVOIRS DE LA COMMISSION DE CONTROLE DES MUTUELLES ET DES INSTITUTIONS DE PRÉVOYANCE 63( * )

Article L 531.1

Le contrôle des mutuelles est effectué, dans l'intérêt de leurs membres, par la Commission de contrôle mentionnée à l'article L 951.1 du code de la Sécurité sociale.

Toutefois, le contrôle des mutuelles dont les engagements sont inférieurs à des seuils déterminés par arrêté du ministre chargé de la mutualité, pris après avis de la Commission de contrôle, est exercé au niveau régional par l'autorité administrative, dans les conditions prévues aux articles L 531.1.1 à L 531.4 et L 531.6.

La Commission de contrôle dispose d'un pouvoir d'évocation et demeure seule compétente pour prononcer les sanctions disciplinaires mentionnées à l'article L 531.5.

Article L 531.1.1

La Commission veille au respect par les mutuelles des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont propres.

Elle s'assure que les mutuelles sont toujours en mesure de remplir les engagements qu'elles ont contractés à l'égard des adhérents et qu'elles présentent la marge de sécurité prescrite ; à cette fin, elle examine leur situation financière et leurs conditions d'exploitation.

Article L 531.1.2

Le contrôle des mutuelles est effectué sur pièces et sur place.

La Commission organise le contrôle et en définit les modalités; à cette fin, sont mis à sa disposition, en tant que de besoin, les membres de l'inspection générale des affaires sociales et les agents du contrôle des services extérieurs du ministre chargé de la mutualité ainsi que les autres fonctionnaires commissionnés par elle qui sont nécessaires à l'exercice de sa mission.

Article L 531.1.3

La Commission peut demander aux mutuelles toutes informations nécessaires à l'exercice de sa mission.

Elle peut également leur demander la communication des rapports des commissaires aux comptes et, d'une manière générale, de tous documents comptables dont elle peut, en tant que de besoin, demander la certification.

Elle peut porter à la connaissance du public toute information qu'elle estime nécessaire.

Article L 531.1.4

La Commission peut demander aux commissaires aux comptes d'une mutuelle tout renseignement sur l'activité de celle-ci. Les commissaires aux comptes sont alors déliés, à son égard, du secret professionnel.

Article L 531.1.5

Si cela est nécessaire à l'exercice de sa mission et dans la limite de celle-ci, la Commission peut décider d'étendre le contrôle sur place d'une mutuelle à toute personne morale liée directement ou indirectement par une convention à celle-ci et susceptible d'altérer son autonomie de fonctionnement ou de décision concernant l'un quelconque de ses domaines d'activité.

Cette extension du contrôle ne peut avoir d'autre objet que la vérification de la situation financière réelle de la mutuelle contrôlée ainsi que le respect par cette mutuelle des engagements qu'elle a contractés auprès des adhérents

Lorsque l'organisme lié à la mutuelle relève du code des assurances, la Commission et la Commission de contrôle des assurances instituée par l'article L 310.12 du code des assurances peuvent échanger toutes les informations nécessaires à l'accomplissement de leurs missions respectives et organiser, conjointement, le contrôle des organismes qui relèvent de leurs compétences ; elles veillent à la coordination de leurs travaux ; à cette fin, elles peuvent tenir des réunions communes.

Article L 531.1.6

En cas de contrôle sur place, un rapport est établi. Si des observations sont formulées par le vérificateur, il en est donné connaissance à la mutuelle. La Commission prend connaissance des observations formulées par le vérificateur et des réponses apportées par la mutuelle.

Les résultats des contrôles sur place sont communiqués au conseil d'administration de la mutuelle. Ils sont également transmis aux commissaires aux comptes.

Article L 531.2

En cas de difficultés financières de nature à compromettre le fonctionnement normal d'une mutuelle, la Commission peut, sur proposition de l'assemblée général, confier, pour une durée maximum d'un an, tout ou partie des pouvoirs dévolus au conseil d'administration de cette mutuelle, et notamment celui de fixer les montants ou les taux des cotisations, à un ou plusieurs administrateurs provisoires choisis par l'assemblée générale en dehors des membres du conseil d'administration.

L'assemblée générale est spécialement convoquée à cet effet par le conseil d'administration ou à la demande du quart des membres de la mutuelle. Sa décision, qui doit être motivée, est prise à la majorité des deux tiers des membres présents ou représentés.

Si le ou les administrateurs provisoires bénéficient d'une dévolution complète des pouvoirs du conseil d'administration, ils provoquent des élections avant la fin de leur mandat, afin de renouveler le conseil d'administration.

Article L 531.3

Lorsque le fonctionnement d'une mutuelle n'est pas conforme aux dispositions de présent code ou aux dispositions de ses statuts ou qu'il compromet son équilibre financier, la Commission peut enjoindre à la mutuelle de présenter un programme de redressement. Si ce programme ne permet pas le redressement nécessaire, la Commission peut, après avertissement adressé à la mutuelle, recourir à la procédure prévue à l'article L 531.4.

Article L 531.4

En cas d'irrégularité grave constatée dans le fonctionnement d'une mutuelle, ou si des difficultés financières de nature à mettre en cause l'existence d'une mutuelle persistent sans que les instances dirigeantes réunissent à y faire face, la Commission peut confier les pouvoirs dévolus au conseil d'administration à un ou plusieurs administrateurs provisoires.

Le ou les administrateurs provisoires prennent toutes les mesures qui s'avèrent nécessaires pour assurer le fonctionnement régulier de la mutuelle et provoquent des élections afin de renouveler le conseil d'administration.

La durée du mandat des administrateurs provisoires est fixée à six mois. Elle est renouvelable une fois.

Article L 531.5

Si une mutuelle n'a pas déféré à une injonction, la Commission peut prononcer à son encontre, compte tenu de la gravité du manquement, l'une des sanctions disciplinaires suivantes :

1. L'avertissement ;

2. Le blâme ;

3. L'interdiction d'effectuer certaines opérations et toutes autres limitations dans l'exercice de l'activité ;

4. Le retrait d'approbation.
Lorsqu'une sanction prononcée par la Commission est devenue définitive, la Commission peut, aux frais de la mutuelle sanctionnée, ordonner l'insertion de sa décision dans trois journaux ou publications qu'elle désigne et l'affichage dans les lieux et pour la durée qu'elle indique.

A dater de la publication de la décision portant retrait d'approbation, le fonctionnement de la mutuelle est suspendu. La liquidation s'opère conformément aux dispositions de l'article L 126.5.

La décision de retrait d'approbation peut ordonner le transfert des services et établissements gérés par la mutuelle en application des articles L 411.1 et L 411.3. Elle détermine, dans ce cas, les conditions de ce transfert.

Dans le cas où la mutuelle gère une caisse autonome, sa dissolution entraîne l'application du deuxième alinéa de l'article L 321.8.

Article L 531.6

Dans tous les cas mentionnés aux article L 531.2, L 531.3, L 531.4 et L 531.5, la Commission statue après une procédure contradictoire. Les intéressés peuvent demander à être entendus. Ils peuvent se faire représenter ou assister. Les mutuelles sanctionnées peuvent, dans le délai de deux mois qui suit la notification et la décision, former un recours de pleine juridiction devant le Conseil d'Etat.

- : -

ARRÊTÉ DU 14 SEPTEMBRE 1992 RELATIF À LA DÉCONCENTRATION DU CONTRÔLE DES MUTUELLES

Article 1 er . - Les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article L 531.1 et de l'article R 531.7 du code de la mutualité s'appliquent aux mutuelles, autres que les fédérations et les groupements mutualistes gérant une caisse autonome, dont les prestations versées en 1990 ont été inférieures à un montant de cent cinquante millions de francs.

La Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance est une autorité administrative indépendante. Elle a été créée par la loi du 31 décembre 1989 dite loi Evin renforçant les garanties des personnes assurées contre certains risques. Ses membres ont été nommés par arrêté du 28 décembre 1990 et elle a été installée officiellement par le ministre des Affaires sociales le 8 avril 1991.

Son contrôle s'est substitué à celui exercé auparavant par le ministre chargé de la Sécurité sociale et de la mutualité. L'indépendance de la Commission est garantie par son fonctionnement collégial et par les modalités de nomination de ses membres.

Conformément à l'article L 951.3 du code de la Sécurité sociale, elle est composée de cinq membres, nommés pour une durée de six ans par arrêté conjoint du ministre chargé de la Sécurité sociale et du ministre chargé de l'Agriculture :

un membre du Conseil d'Etat ayant au moins le titre de conseiller d'Etat, président, proposé par le vice-président du Conseil d'Etat ;

un membre de la Cour de cassation, ayant au moins le rang de conseiller à la Cour de cassation, proposé par le premier président de la Cour de cassation ;

un membre de la Cour des comptes, ayant au moins le rang de conseiller maître, proposé par le premier président de la Cour des comptes ;

deux membres choisis en raison de leur compétence, l'un dans le secteur de la mutualité, après avis du Conseil supérieur de la mutualité, l'autre dans celui des institutions de prévoyance complémentaire.

Cinq membres suppléants sont nommés dans les mêmes conditions. Les membres titulaires et suppléants de la Commission ne peuvent être révoqués. Le directeur de la Sécurité sociale ou son représentant siège auprès de la Commission en qualité de commissaire du gouvernement (il est remplacé par le directeur des exploitations, de la politique sociale et de l'emploi du ministère de l'Agriculture lorsque la Commission traite des institutions du code rural). Le secrétariat général est assuré par le chef du service de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS). Un secrétaire général adjoint est nommé par la Commission, parmi les membres de l'Inspection générale des affaires sociales, sur proposition du chef de service.

TEXTES DE LOIS DÉFINISSANT LES POUVOIRS DE DÉCISION DE LA CCMIP


 

Code de la Sécurité sociale

Code de la mutualité

Mise en garde

article L 951-9

-

Injonction

article L 951-9

article L 531-3 64( * )

Restriction ou interdiction de la libre disposition des actifs

article L 931-18 3 e alinéa

-

Mise sous surveillance

article L 931-18 2 e alinéa

-

Requête ou avis conforme d'ouverture de liquidation judiciaire

article L 951-14

-

Requête de désignation d'un mandataire de justice en cas de liquidation et désignation d'un membre de l'IGAS pour assister le juge

article L 931-21

-

Non communication aux autorités de l'Etat membre des documents nécessaires à l'exercice en LPS

article L 951-2 3 e alinéa

-

Retrait de l'approbation hors sanction disciplinaire

-

article L 321-8 (caisses autonomes)

article L 411-8 (établissements sociaux)

Sanctions disciplinaires

article L 951-10 : 6 sanctions possibles

article L 531-5 : 4 sanctions possibles

ANNEXE 4


PRINCIPALES DIRECTIVES EUROPÉENNES SUR L'ASSURANCE

2


THÈME

TITRE OFFICIEL

CONTENU

STADE DE LA PROCÉDURE ET OBSERVATIONS

DATE DE LA MISE EN APPLICATION DANS LES ÉTATS MEMBRES

Assurance directe autre que l'assurance sur la vie.

Première directive du Conseil du 24 juillet 1973 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et son exercice (73/239/CEE).

(JO L. 228 du 16.08.1973)

Cette directive concerne seulement la liberté d'établissement et prévoit que toute entreprise qui souhaite entreprendre une activité d'assurance directe dans un État membre, soit en fixant son siège social dans cet Etat, soit en y ouvrant une succursale, doit être agréée par l'autorité compétente de l'Etat concerné. Elle pose également les principes prudentiels fondamentaux : chaque entreprise d'assurance directe doit constituer des réserves techniques ainsi qu'une marge de solvabilité.

 

31.12.1975

 

Deuxième directive du Conseil du 22 juin 1988 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 73/239/CEE

(88/357/CEE)

(JO L. 172 du 04.07.1988)

Cette directive complète la première directive de coordination et introduit des dispositions en matière de libre prestation de services. Elle fait une distinction entre grands risques et risques de masse. Les grands risques peuvent être assurés indifféremment dans un autre Etat membre par l'entremise d'un établissement stable ou directement à partir du siège et sont soumis au contrôle des autorités compétentes du pays du siège. Pour les risques de masse, en revanche, la compagnie devra choisir entre assurer ces risques dans un autre Etat membre à partir du siège social, ou par l'entremise d'un établissement stable ; les risques de masse sont soumis au contrôle des autorités compétentes du pays d'accueil.

 

31.12.1989

 

Directive 92/49/CEE du Conseil du 18 juin 1992 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239/CEE et 88/357/CEE (troisième directive " assurance non-vie ").

(JO L. 228 du 11.08.1992)

Cette directive instaure le principe de l'agrément unique et généralise le principe du contrôle par le pays d'origine. Toute entreprise agréée dans un Etat membre peut librement effectuer les opérations " l'assurance non-vie " sur toute l'étendue du territoire de la Communauté, soit en établissant une succursale soit en prestant des services à partir de son siège.

 

Adoption des règles nationales 31.12.1993. Entrée en vigueur de ces règles nationales 01.07.1994

Assurance vie

Première directive du Conseil du 5 mars 1979 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives en matière d'assurance sur la vie (79/267/CEE

(JO L. 63 du 13.03.1979)

Cette directive concerne seulement la liberté d'établissement et prévoit que toute entreprise qui souhaite entreprendre une activité d'assurance-vie dans un Etat membre, soit en fixant son siège social dans cet Etat, soit en y ouvrant une succursale, doit être agréée par l'autorité compétente de l'Etat concerné. Elle pose également les principes prudentiels fondamentaux : chaque entreprise d'assurance doit constituer des provisions techniques ainsi qu'une marge de solvabilité. Elle pose également le principe de la spécialisation selon lequel une entreprise ne peut exercer simultanément l'activité d'assurance-vie et d'assurance " non-vie ".

 
 
 

Deuxième directive du Conseil du 8 novembre 1990 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive (79>/267/CEE) (90/619/CE)

(JO L. 330 du 29.11.1990)

Elle complète la première directive de coordination, notamment en ce qui concerne les relations avec les pays tiers (régime de réciprocité) et établit des dispositions en matière de libre prestation de services. Le principe du contrôle par le pays d'origine s'applique aux contrats d'assurance sur la vie souscrits à l'initiative du preneur d'assurance dans un autre Etat membre. En revanche, le principe du contrôle par le pays d'accueil s'applique aux contrats d'assurance sur la vie souscrits à l'initiative de l'entreprise d'assurance.

 

20.11.1992

 

Directive 92/96/CEE du Conseil du 10 novembre 1992 portant coordination des dispositions législatives,réglementaires, et&nb sp;administratives concernant l'assurance directe sur la vie et modifiant les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE

(troisième directive " assurance-vie ").

(JO L. 360 du 03.12.1992)

Elle instaure le principe de l'agrément unique et généralise le principe du contrôle par le pays d'origine. Toute entreprise agréée dans un Etat membre peut librement effectuer des opérations d'assurance-vie sur toute l'étendue du territoire de la Communauté, soit en établissant une succursale soit en prestant des services à partir de son siège. Elle renforce les mesures de coordination en ce qui concerne les provisions techniques et les conditions de police

 

Adoption des règles nationales 31.12.1993. Entrée en vigueur de ces règles nationales 01.07.1994.

Réassurance

Directive du Conseil du 25 février 1964, visant à supprimer, en matière de réassurance et de rétrocession, les restrictions à la liberté d'établissement est à la libre prestation des services représentant un traitement discriminant par rapport aux organismes nationaux

 
 

Transposition en droit français par une ordonnance et trois décrets du 27 novembre 1968

Assistance

Directive du Conseil du 10 décembre 1984 modifiant, en ce qui concerne notamment l'assistance touristique, la première directive (73/239/CEE) portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, et son exercice (84/641/CEE)

 
 

01.01.1988

Comptes

annuels des entreprises d'assurance

Directive du Conseil du 19 décembre 1991 concernant les comptes annuels et les comptes consolidés des entreprises d'assurance (91/674/CEE)

(JO L. 374 DU 31.12.1991)

Cette directive oblige les entreprises d'assurance à établir leurs comptes annuels ainsi que leurs comptes consolidés conformément aux dispositions des quatrième et septième directives sur les sociétés. Il n'est dérogé à ces dispositions que dans la mesure où elles ne sont pas appropriées ou suffisantes pour les entreprises d'assurance.

 

01.01.1994

Assurance

crédit à l'exportation

Proposition de directive du Conseil du 13 juillet 1994 concernant l'harmonisation des dispositions essentielles en matière d'assurance crédit à l'exportation d'opérations garanties à moyen et à long terme (COM (94) 297 final).

(JO (1994) C 272 - 30.03.1994)

La proposition établit des principes communs d'assurance crédit à l'exportation pour :

- les conditions techniques des éléments de garantie (par ex. pourcentage de couverture) ;

- systèmes de fixation des primes ;

- politiques de couverture.

A la demande du Conseil,

la Commission est en train de revoir la proposition.

 

Surveillance

des groupes d'assurances

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la surveillance complémentaire des entreprises d'assurances faisant partie d'un groupe d'assurances (COM(95) 406 final - 95/0245 (COD))

(JO C 341 du 19.12.1995)

Prévoit des dispositions en vue de la surveillance des groupes d'assurances (prévention du double emploi des fonds propres, transactions intra-groupe, etc).

Conseil :

première lecture

01.07.1997

CHAPITRE II


FORCES ET FAIBLESSES RELATIVES
DE L'ASSURANCE FRANÇAISEA LA VEILLE DU PASSAGE A LA MONNAIE UNIQUE

Dans quelle situation relative se trouvent globalement les groupes et sociétés d'assurance français avant la disparition de la monnaie nationale et dans le contexte du marché intérieur européen ?

On s'efforcera de répondre à cette question de manière comparative par le crible des critères classiques de l'analyse économique financière et boursière, permettant de mesurer la place et la densité, l'efficacité, la rentabilité, la solvabilité, le poids financier et économique des entreprises d'assurance française par rapport à leurs principales concurrentes, c'est-à-dire leur potentiel dans le regain de concurrence européenne et mondiale qui s'affirme.

I. MARCHÉ MONDIAL ET PAYSAGE EUROPÉEN DE L'ASSURANCE

A. CONFIGURATION DU MARCHÉ MONDIAL, STRUCTURE DES MARCHÉS RÉGIONAUX ET CLASSEMENT DES MARCHÉS NATIONAUX

En 1995, le volume mondial des primes s'est élevé à 2 143,4 G USD, réparti en 1 236,6 G USD (ou 57,7 %) primes d'assurance-vie et 906,8 G USD 42,3 %) de primes d'assurance non-vie. C'est la première fois que le " chiffre d'affaires " de l'assurance dépassait le niveau des 2 000 G USD. 90 % de ce chiffre sont réalisés par les pays industriels, qui représentent par ailleurs 15 % de la population mondiale et 75 % du PIB mondial.

L'évolution de la croissance réelle de l'assurance mondiale est assez cyclique comme en témoigne le graphique 1.

Graphique 1
Croissance réelle des primes par rapport à l'année précédente
(en %)



Source : Suisse de Ré, Sigma n° 4/1998.

Ce sont les Japonais qui ont dépensé le plus pour l'assurance cette même année, à savoir 5 088 USD par habitant, devant les Suisses qui ont dépensé 4 507 USD par habitant, loin devant la plupart des autres pays industriels qui dépensent entre 1 200 et 2 400 USD (comme la France avec 2 268 USD) par habitant, et très loin devant les pays en développement qui ont dépensé moins de 100 USD par habitant. Le niveau de vie se combine avec la place et le rôle national de l'industrie de l'assurance privée, notamment par rapport au niveau de protection sociale publique, pour expliquer des résultats si différents.

Tableau 7
Evolution comparée des parts de marché mondial de l'assurance
(1985-1996)
65( * )

 

1985

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Ensemble des affaires (en %)

Japon(1)

17,4

20,5

21,8

21,8

30,4

31,1

29,7

24,7

Etats-Unis

47,7

35,6

34,4

35,6

31,3

30,5

29,1

31

Union européenne (2)

21,5

26,7

28,6

27,1

23,8

25,9

27,3

31,3 *

Total

86,6

82,8

84,8

84,5

85,5

87,5

86,1

87,0

Reste du monde

13,4

17,2

15,2

15,5

14,5

12,5

13,9

13

Assurance de dommages (en %)

Japon

9,1

11,6

12,3

12,0

14,7

15,2

14,0

n.c.

Etats-Unis

56,9

42,6

42,3

43,9

41,5

40,5

39,6

n.c.

Union européenne

22,4

29,1

30,6

28,9

26,8

29,2

31,8

n.c.

Total

88,4

83,3

85,2

84,8

83,0

84,9

85,4

n.c.

Reste du monde

11,6

16,7

14,8

15,2

17,0

15,1

14,6

n.c.

Assurance vie (en %)

Japon

27,2

28,7

30,3

30,8

42,6

42,5

41,3

n.c.

Etats-Unis

39,8

29,1

27,3

28,2

23,3

22,4

21,4

n.c.

Union européenne

20,5

24,6

26,8

25,6

21,4

23,6

24,2

n.c.

Total

87,5

82,4

84,4

84,6

87,3

88,5

86,9

n.c.

Reste du monde

12,5

17,6

15,6

15,4

12,7

11,5

13,1

n.c.

(1) Pour le Japon : inclus Kampo (service d'assurance de la Poste) et Zenkyoren (mutualité agricole) depuis 1993.

(2) Union européenne : évolution à périmètre courant (1985 à 10 ; à partir de 1986 à 12 ; à partir de 1995 à 15).

* Il s'agit vraisemblablement de l'Espace économique européen.

Source : Sigma n° 4/1997 et Sigma n° 4/1998.

Après avoir été largement dominé par les Etats-Unis, le marché mondial est à peu près également réparti entre Amérique du Nord, Asie et Europe. L'Europe (voir cependant la note (2) ci-dessus qui commente le changement de périmètre et donc de poids de l'Europe) pèse presque le même poids que les Etats-Unis qui ont été rejoints par le Japon grâce à l'assurance-vie.

Tableau 8
Structure régionale du marché mondial de l'assurance
en 1995 et en 1996

 

GUSD

en %

 

1995

1996

1995

1996

Amérique du Nord

661,1

689,2

30,8

32,7

Amérique latine

31,0

32,9

1,4

1,6

Europe

638,4

674,7

29,8

32,0

Europe de l'Ouest

626,4

658,3

29,2

31,3

Europe de l'Est

12,0

14,5

0,6

0,7

Asie

756,2

647,1

35,3

30,7

Japon

637,3

519,6

29,7

24,7

Asie du Sud et de l'Est

108,7

118,4

5,1

5,6

Asie antérieure

10,3

9,1

0,5

0,4

Afrique

25,1

24,7

1,2

1,2

Océanie

31,6

37,2

1,5

1,8

Monde entier

2 143,4

2 105,8

100,0

100,0

Source : Sigma n° 4/1997 et n° 4/1998.

Graphique 2
Parts nationales du marché mondial de l'assurance en 1995
(en %)



Source : Eurostat.

On notera que la structure de chaque marché régional est assez typique.

Grossièrement :

- le marché américain est dominé à 60 % (1993) par l'assurance dommages, l'assurance-vie y étant certainement plus faible à cause du poids des fonds de pension ;

- le marché asiatique et en particulier japonais est au contraire largement dominé par l'assurance-vie (près de 80 % du marché de 1993) en raison vraisemblablement de la faiblesse de l'Etat-providence et du niveau des fonds de pension ;

- le marché européen est à peu près également réparti entre assurance dommages (53 % en 1993) et assurance-vie pour des raisons similaires mutatis mutandis ;

- globalement le marché français de l'assurance est le quatrième marché mondial, loin derrière le Japon et les Etats-Unis (tableau 9).

Tableau 9
Classement mondial de l'assurance en 1995 66( * )

 

Total Assurances

Assurance-vie

Assurance dommages

 
 

Primes

 

Primes

 

Primes

 
 

G USD

%

G USD

%

G USD

%

G USD

%

Japon

1

637

29,7

1

510

41,3

2

127

14,0

USA

2

624

29,1

2

265

21,4

1

359

39,7

Allemagne

3

155

7,2

5

62

5,0

3

93

10,2

France

4

132

6,1

3

83

6,7

5

48

5,3

Grande-Bretagne

5

128

6,0

4

73

5,9

4

55

6,1

Corée du Sud

6

60

2,8

6

47

3,8

10

13

1,5

Italie

7

39

1,8

12

14

1,2

6

24

2,7

Canada

8

37

1,7

10

16

1,3

7

21

2,3

Pays-Bas

9

35

1,7

8

19

1,5

8

17

1,8

Suisse

10

32

1,5

7

20

1,7

13

11

1,3

MONDE

2 143

100,0

1 237

100,0

907

100,0

Source : BIPE à partir de Sigma.

B. CONTRASTES DE L'ASSURANCE EUROPÉENNE

Le secteur européen de l'assurance est dominé par les trois poids lourds nationaux que sont l'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne, qui représentent plus des deux tiers du marché européen de l'assurance. Le marché européen, bien qu'arrivé à maturité dans certains pays, continue à croître fortement : le chiffre d'affaires de l'assurance a progressé de 10 % en moyenne annuelle de 1990 à 1994 67( * ) .

Dominé globalement en nombre par les entreprises d'assurances dommages (graphique 3), le paysage européen de l'assurance est contrasté :

- quant au poids des marchés nationaux ;

- quant à la densité des entreprises d'assurance ;

- quant au statut juridique des entreprises d'assurance ;

- quant aux parts de marché des principaux produits.

Graphique 3
Répartition des entreprises d'assurance de l'EEE
selon le type d'entreprise, 1995

Source : Eurostat.

On trouvera ci-dessous le classement des marchés nationaux de l'assurance en Europe, qui fait ressortir l'écart entre les trois pays leaders et les autres pays, indépendamment de leur population (tableau 10).

Tableau 10
Classement européen de l'assurance en 1995

 

Total Assurances

Assurance-vie

Assurance dommages

Pays

 

Primes

 

Primes

 

Primes

 
 

G USD

%

 

G USD

%

 

G USD

%

Allemagne

1

155

24,3

3

62

19,1

1

93

29,8

France

2

132

20,6

1

83

25,5

3

48

15,5

Grande-Bretagne

3

128

20,0

2

73

22,2

2

55

17,7

Italie

4

39

6,0

6

14

4,4

4

24

7,8

Pays-Bas

5

35

5,5

5

19

5,7

5

17

5,3

Suisse

6

32

5,0

4

20

6,2

7

11

3,6

Espagne

7

27

4,2

7

11

3,4

6

16

5,1

Belgique

8

14

2,1

9

6

1,9

9

7

2,4

Autriche

9

13

2,0

12

5

1,4

8

8

2,6

Suède

10

11

1,7

10

6

1,7

10

5

1,7

EUROPE

638

100,0

327

100,0

311

100,0

Source : BIPE à partir de Sigma Compagnie Suisse de Réassurance

On n'a retenu ici, pour mieux faire ressortir les contrastes, que les pays européens de taille à peu près comparable : Allemagne, Espagne, France, Grande-Bretagne, Italie.

La population des entreprises d'assurance des pays comparables de l'Europe est sensiblement différente.

Tableau 11
Nombre total d'entreprises d'assurance en 1995 68( * )


 

Assurance-vie

Assurance non-vie

Assurance mixte

Total

Réassurance spécialisée

Pays

Total

dont succursales pays tiers

Total

dont succursales pays tiers

Total

 
 

Allemagne

125

4

337

12

 

462

36

Espagne

151

4

245

 

72

468

5

France

131

 

345

 

1

483

20

Italie

73

2

128

 

22

223

8

Royaume-Uni

171

 

521

 

54

746

48

Total Europe 15

1034

 

2649

 
 

3933

 

Total EEE

1047

 

2770

 
 

4067

 

Suisse

31

 

95

 
 

126

 

Source : Eurostat.

On retrouve un peloton de trois pays dont la population est assez comparable en nombre et en structure (si l'on tient compte du nombre important de sociétés d'assurance mixte en Espagne) : Allemagne, Espagne, France, qui se détachent de l'Italie et sont assez nettement distancées par le Royaume-Uni qui est le pays de la plus grande densité assurancielle absolue.

On notera la très grande proximité du nombre des entreprises d'assurance allemandes et françaises, ainsi que de leur répartition par grande catégorie d'assurance.

Les sociétés d'assurance des cinq plus grands pays européens représentent 60 % du total des sociétés d'assurance de l'Europe des 15.

- Des diversités nationales apparaissent également en matière de nature juridique des entreprises d'assurance, même si les totalisations d'Eurostat relatives aux mutuelles sont inférieures à la réalité (voir sur ce point, le chapitre IV, 3.2.3) en raison du caractère moins détaillé des données publiques sur la forme juridique des entreprises d'assurance de certains pays de l'Union européenne par rapport à celles recueillies en France par la Commission de Contrôle des Assurances (tableau 12).

Tableau 12
Nombre d'entreprises d'assurance selon leur statut en 1993 69( * )
(en nombre et en pourcentage) hors réassurances

Pays

Sociétés commer-ciales

% total

Mutuelles d'assurance

% total

Filiales étrangères

% total

Autres statuts

%

Total

Allemagne

280

53

132

26

77

14

37

7

5126

Espagne

353

40

507

57

28

3

-

-

888

France

263

43

221

36

124

21

1

-

609

Italie

211

80

12

5

35

15

2

-

265

Royaume-Uni

 
 
 
 

146

18

682 *

82

828**

* En chiffre global, le Royaume-Uni cache une grande diversité de formes juridiques, y compris diverses formes de mutuelles vie ou non-vie, Property and Indemnity Clubs-Mutuelles d'armateurs-Friendly Societies-Mutuelles de prévoyance).

* * Chiffre incluant des sociétés spécialisées de réassurance.

Source : Eurostat.

On remarquera que la part des filiales étrangères sur chaque marché national est très différente d'un pays à l'autre, ainsi que le poids contrasté des assurances mutuelles selon les pays.

La présence institutionnelle, le nombre et le poids économique des mutuelles sont loin d'être négligeables chez plusieurs membres de l'Union européenne (sur 162 entreprises d'assurance en Finlande, 136 sont des mutuelles d'assurance), comme on le voit d'après le tableau suivant :

Tableau 13
Nombre et poids des mutuelles d'assurance en Europe
(15 pays de l'Union européenne)

Pays

Nombres d'entreprises

Chiffre d'affaires en millions d'Ecus

 

Mutuelles

Marché

Mutuelles

Marché

Allemagne

122

459

26 930

123 332

Espagne

54

365

2 690

23 284

France

198

485

19 693

118 864

Italie

0

225

0

16 643

Pays-Bas

144

407

2 906

29 215

Finlande

136

162

1 468

4 184

Royaume-Uni

0

814

0

130 298

Div. pays UE

120

992

2 901

52 870

Total UE

774

3 909

56 588

498 690

Source : GEMA.

L'importance relative des mutuelles d'assurance est toutefois plus significative en nombre qu'en chiffre d'affaires.

- Même les parts de marché des principaux produits d'assurance dommages sont étonnamment disparates (tableau 14).

Tableau 14
Place des principaux produits d'assurance dommages
(en % des primes d'assurance non-vie émises) 70( * )

 

Véhicules à moteur

Accident Santé

Incendie et autres dommages

Responsabilité générale

Autres 71( * )

Allemagne

33,14

29,41

22,25

8,49

6,71

Espagne

45,93

20,08

5,00

3,47

25,52

France

34,58

20,37

25,13

5,27

14,65

Italie

56,00

14,59

14,89

6,81

7,71

Royaume-Uni

19,53

7,20

20,97

6,15

45,15

Source : Eurostat.

Le poste d'assurance auto est en principe le plus important sur l'ensemble des marchés d'assurance dommages (le poste " autres " étant composite par définition). Son importance particulière en Italie tient au fait qu'il s'agit de la seule assurance obligatoire de masse, qui progresse donc nécessairement avec le taux d'équipement des ménages en automobiles.

La disparité du poste d'assurance santé selon les pays et sa plus grande importance en Allemagne traduit la place plus importante de l'assurance maladie privée, comme couverture de substitution au système d'assurance maladie par la Sécurité sociale publique (" compulsory social security system ") comme on le verra plus loin (chapitre III, 5.).

Sur la base de ces quelques critères, et notamment du classement européen des groupes d'assurances, l'assurance française ne semble pas spécialement mal placée dans la perspective du Marché unique : elle dispose d'une bonne taille critique et elle est bien internationalisée, quoique de manière partielle, en direction du sud de l'Europe et de l'Afrique. " La position de l'industrie française des assurances est particulièrement forte en Europe " va pourtant jusqu'à dire le BIPE de manière optimiste quant à l'Europe du Nord.

Tableau 15
Classement européen des compagnies d'assurance en 1995
(en milliards de francs)

Rang

Raison sociale

Pays

Primes 95

1

Allianz + AGF (Proforma)

Allemagne

308

2

UAP-AXA

France

277

3

Zurich Group

Suisse

112

4

Generali

Italie

105

5

Winterthur

Suisse

95

6

CNP

France

84

7

Commercial Union

Royaume-Uni

73

8

ING

Pays-Bas

66

9

Prudential

Royaume-Uni

63

10

Predica-Pacifica

France

53

11

GAN

France

52

12

AMB

Belgique-Pays-Bas

52

13

Fortis

Royaume-Uni

51

Source : Les Echos, mars 1997, d'après l'Argus, hors sociétés exerçant principalement en réassurance.

C. PERSPECTIVES D'ACTIVITÉ DE L'ASSURANCE FRANÇAISE

1. Evolution passée de l'activité de l'assurance française

Au terme d'une montée en puissance très importante du marché de l'assurance-vie en France (voir encadré sur l'assurance-vie) en 1996 le chiffre d'affaires mondial de l'assurance française a dépassé pour la première fois les 1 000 GF de primes pour atteindre 1 097 Mds F en 1997. Le chiffre d'affaires national en 1997 est dominé par l'assurance-vie (509 GF). Le chiffre d'affaires de l'assurance dommages s'élève en tout à 272 GF (dont 91,1 GF pour l'automobile, 41 GF pour les dommages corporels, 104,9 GF pour les autres dommages aux biens, transport, responsabilité civile et risques divers).

La capitalisation s'élève à 29,7 GF. Le chiffre d'affaires à l'étranger des filiales françaises s'élève au total à 258 GF, réalisé à 65 % en Europe, à 24 % en Amérique du Nord et à 7 % en Océanie et par les trois premiers groupes français à 80 % (en incorporant UAP à AXA).

Après une progression annuelle moyenne en valeur de 18 % de 1990 à 1996, le chiffre d'affaires mondial de l'assurance française continue à croître, de 6,1 % en 1997 par rapport à 1996 (soutenu par une croissance des primes des filiales étrangères de 11,3 % très supérieure à la croissance du marché domestique, et constamment supérieur aux taux de croissance du PIB en valeur). L'assurance-vie demeure en 1996 le premier rapport de placement des ménages en recueillant plus de 70 % de leurs flux de placements financiers et en constituant 20,8 % de l'encours total des placements financiers.

On observera avec le tableau 16, l'importance et la répartition de l'offre d'assurance entre les dix premiers groupes français en 1996. Deux sociétés d'assurance mutuelles en font partie : GROUPAMA, mutuelle sans intermédiaire, qui accède après rachat du GAN au 3 e rang en chiffre d'affaires, et les Mutuelles du Mans, mutuelle de la ROAM, au 9 e rang en 1997.

Tableau 16
Classement français des compagnies d'assurance 1996
avec reclassements (proforma) - Montant des cotisations
(en milliards de francs)

 

France

Rang

Raison sociale

Consolidé

Vie

Dommages

1

AXA/UAP

364,6

68,5

44,3

2

CNP

110,8

103,3

7,5

3

Groupama + GAN

87,4

32,8

37,1

4

AGF

71,6

23,5

26,8

5

Predica/Pacifica

58,9

57,4

1,5

6

Generali France

29,6

18,7

10,9

7

Natio Vie

29,2

29,2

-

8

Union France

26,9

19,4

7,5

9

Mutuelles du Mans

25,8

8,8

12,6

Source : FFSA, Estimations.

Le développement de l'assurance-vie en France depuis 1945

Il est loin le temps où Maxime Malinski dans sa réflexion générale sur " la place des assurances dans la formation de l'épargne au cours du V e Plan (1966-1970) " expliquait que : " l'assurance sur la vie et capitalisation est encore dans notre pays une industrie largement sous-développée ", pour en conclure que " le développement de l'assurance-vie est conforme à l'intérêt général ". En effet soutenait-il " l'assureur est en permanence un incitateur d'épargne "... Il suscite l'épargne, la cueille au besoin à domicile, donnant à chacun et en permanence le moyen d'épargner en continu et sans effort ".

Par rapport aux pays à monnaie stable, l'assurance-épargne a, en France, 50 ans de retard et ce, malgré l'extension de la clientèle assurable qui, traditionnellement, avant la guerre en 1914 était limitée aux classes aisées de la société, alors que les autres couches de la population n'ont été touchées par l'assurance sur la vie qu'à partir de 1930, grâce à l'introduction sur le marché des assurances populaires et des assurances de groupe.

De ce fait, " l'épargnant ne peut plus être considéré comme un " capitaliste-égoïste, mais comme le levain indispensable de l'économie... et l'assuré, épargnant complet, doit bénéficier... de la sollicitude constante et bienveillante des pouvoirs publics ".

En 1963, le chiffre d'affaires total des compagnies d'assurance s'élevait à 12 GF, dont 9 GF pour les assurances dommages, 3 GF pour les assurances sur la vie et les opérations de capitalisation. La cotisation annuelle par habitant en assurance-vie, en francs constants 1995, n'était passé que de 230 F à 285 F de 1945 à 1960. La période 1945-1960 est caractérisée par une forte inflation : 16,4 % en moyenne annuelle, principalement concentrée sur les quatre années de sortie de guerre.

De 1960 à 1983, la cotisation annuelle par habitant passe de 285 F 95 à 1 200 F 95. Le chiffre d'affaires de l'assurance-vie, en monnaie constante, croît de 7,4 % en moyenne annuelle de 1960 à 1985, alors que la croissance annuelle réelle moyenne en PIB sur la même période est de 4,3 % (multiplication du PIB réel en 23 ans par 2,6).

De 1983 à 1995, la cotisation individuelle passe de 1 200 F 95 à 7 140 F. Le chiffre d'affaires de l'assurance-vie croît de 16,5 % en francs constants sur la période et est multipliée par 5,4 en monnaie constante (par 7,5 en francs courants) alors que le PIB réel croît de 2,1 % l'an en moyenne, pendant que la hausse annuelle moyenne des prix est ramenée à 3,3 %. En valeur absolue le chiffre d'affaires annuel de l'assurance-vie atteint 415 GF et représente 5,5 % du PIB 1 .

Cet avenir radieux de l'assurance-vie est-il aujourd'hui derrière elle ?

Le graphique ci-dessous permet d'illustrer l'importance de la place prise par l'assurance-vie dans les réserves des sociétés d'assurance et surtout dans le patrimoine financier global des ménages 72( * ) .

Graphique 4
Encours des réserves mathématiques d'assurance (RMA)
(en % du patrimoine financier) 73( * )

2. Les perspectives de croissance de l'assurance française jusqu'en 2002 74( * )

La dynamique de l'assurance française est sous-tendue par la tendance mondiale à la baisse progressive des revenus de transfert et par l'avènement de l'euro.

Cependant le BIPE, dans ses prévisions sectorielles (seules prévisions disponibles à l'horizon 2002) pour l'assurance jusqu'en 2002, s'attend à un rythme de croissance très ralenti du chiffre d'affaires métropolitain des sociétés d'assurance françaises, puisqu'elle serait de 2,6 % en moyenne annuelle en valeur de 1996 à 2002 (tableaux 17 et 18) par rapport à une croissance annuelle moyenne de 12,6 % de 1981 à 1996.

Tableau 17
Taux de croissance annuel moyen en valeur des primes d'assurance (1981-2002)
(en %)

 

81-96

92-96

96-99

99-2002

96-2002

Capitalisation

13,6

0,0

 
 
 

Vie

19,8

17,4

 
 
 

Total vie-capitalisation

19,3

15,9

2,2

2,1

2,1

Dommages corporels

9,3

3,8

4,1

1,3

2,7

Automobile

6,0

5,7

2,6

3,8

3,2

Autres dommages

7,8

5,4

4,4

3,4

3,9

Total dommages

7,4

5,1

3,7

3,1

3,4

Total affaires directes, France métropolitaine

12,7

11,5

2,7

2,5

2,6

Réassurance

7,8

8,4

-6,1

-1,9

-4,0

Rappel : PIB en valeur

 
 
 
 
 

Source : Rétrospectif : FFSA ; Prévisions : BIPE.

Les prévisions du BIPE (édition 1997) en matière d'assurance paraissent assez fragiles. Pour la période 1996-1999, si l'on extrapole les résultats de 1997 à l'année 1998 et 1999, elles sont d'ores et déjà partiellement démenties : ainsi en assurance automobile, pour 1997 on obtient -1,2 % ; pour 1998 : -1 % et les évolutions sont parallèles pour les autres risques.

Ces prévisions sont démenties cependant dès 1997, où pour la première fois la " croissance " de l'assurance dommages a été négative pour la première fois en valeur.

Tableau 18
Réalisation et prévisions de primes collectées
(en milliards de francs courants en moyenne annuelle)

 

81-96

92-96

96-99

99-2002

96-2002

Capitalisation

5,3

15,3

27,8

 
 

Vie

35,2

76,5

438,0

 
 

Total vie-capitalisation

40,5

91,8

465,8

497,0

528,7

Dommages corporels

15,1

23,1

55,4

62,5

65,0

Automobile

44,3

57,5

91,7

99,0

110,8

Autres dommages

40,9

63,1

104,7

119,0

131,7

Total dommages

100,3

143,7

251,8

280,5

307,5

Total affaires directes, France métropolitaine

140,8

235,5

717,6

777,5

836,2

Réassurance

26,8

36,5

77,0

64,0

60,3

Source : Rétrospectif : FFSA ; Prévisions : BIPE.

On semble cependant rentrer, sur tous les marchés de l'assurance, dans une période de croissance très ralentie par rapport à la croissance observée entre 1981 et 1996, notamment dans le domaine de l'assurance-vie, où l'évolution de la fiscalité jouera un rôle déterminant.

II. NIVEAU DE DÉVELOPPEMENT COMPARÉ DE L'ASSURANCE DANS LES GRANDS PAYS DE L'OCDE

" Le développement, indique Patrick Lefas, des marchés d'assurance se mesure à l'aide de deux indicateurs : la densité d'assurance (primes par habitant) et la pénétration de l'assurance (part des primes d'assurance dans le PIB) " 75( * ) . Il ressort du tableau 19 et des graphiques 5 et 6, que l'assurance française connaît un niveau de développement tout à fait comparable, voire supérieur à celui des autres grands pays de l'OCDE, à l'exception du Japon et de la Suisse. Dans la mesure où il peut y avoir une certaine corrélation négative entre densité et pénétration assurancielle et niveau des prélèvements obligatoires ou des dépenses publiques, ce résultat est d'autant plus remarquable pour ce secteur de l'économie, et révèle très certainement à nouveau, cet extrême souci de sécurité de la population française.

Tableau 19
Densité et pénétration de l'assurance sur divers marchés en 1995 76( * )

 

Densité en USD (primes/habitant)

Pénétration en % PIB

 

Total

Dommages

Vie

Total

Dommages

Vie

Etats-Unis

2 372,2

1 366,6

1 005,6

8,60

4,95

3,65

Union européenne dont :

1 496,9

718,4

778,5

6,83

3,28

3,55

Allemagne

1 899,2

1 136,1

763,1

6,42

3,84

2,58

Espagne

688,1

405,7

282,4

4,82

2,84

1,98

France

2 268,4

833,9

1 434,5

8,55

3,14

5,41

Italie

674,4

425,0

249,4

3,83

2,41

1,42

Luxembourg

1 761,1

1 221,8

539,3

4,51

3,13

1,38

Pays-Bas

2 283,2

1 068,9

1 214,0

8,93

4,18

4,75

Royaume-Uni

1 694,2

615,5

1 078,7

10,33

3,75

6,58

Japon

5 088,3

1 012,5

4 075,8

12,78

2,54

10,24

Source : Sigma n° 4 (1997).

Graphique 5
Densité de l'assurance par pays 77( * )
(en dollars US)

Source : Sigma.

Graphique 6
Pénétration de l'assurance dans chaque pays 78( * ) (en %)

Source : Sigma.

Dans la mesure où l'assurance est un bien supérieur (tableau 20) dont la croissance est plus que proportionnelle à celle du revenu, sa pénétration devrait se poursuivre si le taux de croissance des pays reste positif.

Tableau 20
Croissance des cotisations et élasticité par rapport au PIB
de 1985 à 1995
79( * )

Pays

Croissance annuelle réelle

moyenne des primes (1) en %

Elasticité des cotisations

par rapport au PIB

 

Vie

Non-vie

Vie

Non-vie

Allemagne

7,5

5,5

2,1

1,6

Belgique

9,6

4,8

2,9

1,5

Canada

5,4

6,4

2,0

2,3

Espagne

30,0

14,8

9,5

2,8

Etats-Unis

6,5

4,3

2,1

1,5

France

17,7

3,3

7,5

1,2

Grèce

28,3

14,6

4,3

1,7

Italie

20,6

8,3

5,7

1,8

Japon

6,8

5,7

2,1

1,7

Royaume-Uni

10,7

9,8

3,2

2,5

Suisse

7,0

3,5

2,3

1,3

Ensemble

12,8

6,5

3,7

1,7

(1) Primes déflatées des indices de prix de consommation par pays.

Source : F. Bourguignon et S. Faudemer.

On notera que la croissance annuelle des primes est inversement proportionnelle au degré de maturité des marchés, que la croissance annuelle de l'assurance-vie est double en moyenne de celle de l'assurance dommages, que l'élasticité des cotisations de l'assurance non-vie par rapport au PIB est très supérieure à celle de l'assurance-vie, dénotant peut-être une hiérarchie à l'intérieur des biens supérieurs assuranciels. Un certain effet de rattrapage est lié à la baisse de l'inflation pour les pays du sud de l'Europe.

III. UN POSITIONNEMENT DE L'ASSURANCE FRANÇAISE TRÈS INÉGAL SELON LES MARCHÉS ET EN GÉNÉRAL TRÈS DÉFENSIF SUR LES GRANDS RISQUES

On se ferait une idée vraisemblablement embellie de l'assurance française à partir de la considération de sa bonne position sur le marché des particuliers et des risques de masse et de la considération complémentaire selon laquelle le marché des particuliers génère, en France du moins, 80 % du total des primes encaissées.

Cependant, la haute technologie de l'assurance est du côté du risque industriel ou du risque de transport, et le dynamisme d'un marché dépend largement de la capacité durable des offreurs sur ces segments de marché. Par ailleurs, une maîtrise suffisante de ces marchés est une des clés de la compétitivité internationale dans la mesure où la composante assurance du commerce international (le " A " du CAF) et des projets internationaux est loin d'être négligeable.

Or, l'assurance française est vraisemblablement en grave régression sur la couverture des divers risques de l'entreprise et même, quoique dans une bien moindre mesure, sur celle des particuliers. Elle est dans une position très défensive sur le marché des risques industriels et associés qui, compte tenu de sa situation financière peu florissante, augure mal de l'avenir de ces branches d'assurance françaises dans la compétitition internationale très vive qui est engagée depuis plusieurs années. En particulier, le positionnement des groupes étrangers sur le marché du risque crédit va jusqu'à poser un problème d'intelligence économique pour l'industrie française.

Un certain retard technique, un manque d'innovation et une frilosité générale à l'égard des grands risques dont la couverture échappe à la loi des grands nombres, semblent caractériser les acteurs français de l'assurance, qui préfèrent travailler sur des produits standardisés où le prix est l'argument de différenciation le plus important. Cela est vrai en particulier du risque industriel (toute la cartographie du risque de catastrophe naturelle par exemple est allemande ) mais cela peut être vrai aussi en assurance-vie où les acteurs les plus innovants sont plutôt britanniques.

Par ailleurs, les positions de l'assurance française sur son propre marché se sont récemment fortement dégradées à l'occasion des restructurations qui se sont produites dans l'industrie de l'assurance. On peut mesurer ce recul en observant la part du marché français qui est désormais celle des acteurs de l'assurance détenus par des capitaux non-français.

Parts de marché français détenues par les sociétés d'assurance

sous contrôle étranger en % (sans AGF, ATHENA et GAN) en 1996

Particuliers 13,4 %

Risques industriels 25,2 %

Transport 16,5 %

Construction 9,9 %

Crédit caution 7,5 %

Autres 5 %

Parts de marché français détenues par les sociétés d'assurance sous contrôle étranger en % (y compris AGF et ATHENA, mais sans le GAN) en 1996 80( * )

Particuliers 24,8 %

Risques industriels 39,3 %

Transports 42,9 %

Construction 15,9 %

Crédit caution* 84,4 %

Autres 8,9 %

* Chiffres calculés avec la part de marché de la Coface, dont les AGF étaient l'actionnaire de référence avant la séparation. Les AGF restent en revanche l'actionnaire de référence de la SFAC.

Il serait bien sûr intéressant de connaître l'évolution de ces chiffres en France et de disposer des données complémentaires sur les autres marchés nationaux européens en prenant en compte l'ancienneté de la déréglementation sur ces marchés pour former un jugement parfaitement éclairé. Cependant, dans les grandes restructurations récentes, il ne paraît pas y avoir eu d'acquisitions françaises équivalentes en Europe (à l'exception du rachat par AXA de la Royale Belge, deuxième assureur belge, en mai 1998). Les acquisitions françaises ont plutôt eu lieu aux Etats-Unis. Par ailleurs, le positionnement international traditionnel de la croissance française s'est très orienté vers le Sud et très peu vers l'Europe du Nord.

Ces quelques chiffres concernant les divers segments du marché de l'assurance en France, montrent cependant que l'optimisme n'est guère de mise au sujet du devenir de l'assurance française et de la maîtrise même de son propre marché. La prise en compte de l'identité des acteurs de la réassurance qui sont, pour les plus importants, allemand ou alémanique (la Suisse de Ré qui est le premier réassureur mondial est zürichoise) alors que les réassureurs forment la clé de voûte des marchés de l'assurance et qu'une certaine désintermédiation de la relation d'assurance entre grands groupes et réassureurs au détriment de l'assurance directe peut être observée, ne peut que renforcer cette inquiétude.

En sens contraire, en vingt ans l'assurance française a pris un pied important sur le marché de la réassurance grâce en particulier à la SCOR et à AXA RÉ. La rentabilité technique et globale de la réassurance française s'est d'ailleurs bien améliorée ces dernières années (voir annexe 8 de ce chapitre).

Ce mouvement positif n'est cependant pas suffisant pour empêcher le déplacement des centres de décision en matière de risque industriel vers Zürich, Münich et Londres.

IV. LA CONCENTRATION TRADITIONNELLEMENT IMPORTANTE DE L'ASSURANCE FRANÇAISE S'EST ACCÉLÉRÉE MAIS ELLE PARVIENT À SON TERME À UN HAUT NIVEAU D'INTÉGRATION AVEC LA BANQUE

A. STATIQUE ET DYNAMIQUE DE LA CONCENTRATION EN FRANCE

On peut l'apprécier grossièrement par le nombre d'entreprises d'assurance des pays voisins et de taille comparable (voir plus haut 1.2). Mais il est difficile de tirer des conclusions de ces chiffres, en l'absence de la connaissance des tailles et de la répartition de la population des entreprises d'assurance.

On peut également la mesurer classiquement par le degré de concentration absolu et relatif de l'offre d'assurances sur les marchés de l'assurance.

Tableau 21
Structure de l'offre d'assurance dans certains pays de l'OCDE 81( * )

Pays

Nombre de sociétés

Part de marché des 10

plus grandes sociétés

 

Vie

Non-vie

Vie

Non-vie

Allemagne*

1 351

897

42,6

51,8

Espagne*

137

376

48,8

31,7

Etats-Unis

2 005

3 899

67,6

42,0

France*

145

469

67,7

59,7

Italie*

99

180

57,6

51,9

Japon

30

55

nd

nd

Royaume-Uni*

194

575

44,6

40,8

Suisse*

nd

nd

84,3

78,8

* Les parts des dix premiers dans ces pays sont celles de 1995 contre 1994 pour les autres

Source : FFSA 96, CEA 1996, F. Bourguignon et S. Faudemer.

De manière statique, comparativement, le secteur français de l'assurance est nettement plus concentré que dans les pays en développement ou de taille comparable en Europe et dans le monde. Ceci est certainement le résultat de l'action de l'Etat pendant la période de nationalisation, qui a donc ainsi profité de la période où il était propriétaire de l'assurance pour entreprendre une certaine restructuration du secteur, contrairement à l'inaction qui lui a été reprochée dans le domaine bancaire.

Cependant la concentration de l'assurance française s'est accélérée ces dernières années. Elle devrait encore se prolonger, même si le mouvement de concentration, après les récentes opérations importantes de fusion absorption, semble parvenir à un palier.

C'est ce qu'indique l'évolution du classement des groupes d'assurances réalisée par la FFSA, ainsi que la projection réalisée pour ce rapport, qui intègre dans les chiffres futurs, les opérations de rachat déjà connues.

Tableau 22

Classement des dix premiers groupes (1990-1998)

(primes en milliards de francs et parts de marché en %)

 

1990

1995

1996

1997

1998 (p.)

 

Primes

Part de marché

Primes

Parts de marché

Primes

Part de marché

Primes

Part de marché

Estimation

Part de marché

1

47,7

11,7

84,3

11,7

101,5

13,1

110,9

13,6

13,6

2

31,0

7,6

67,2

9,4

66,7

8,6

110,8

13,6

13,6

3

30,0

7,3

52,6

7,3

57,0

7,3

67,2

8,2

8,6

4

29,0

7,1

52,4

7,3

46,4

6,0

59,9

7,3

8,2

5

25,3

6,2

40,7

5,7

42,4

5,5

40,8

5,0

7,3

6

24,0

5,9

37,9

5,3

41,0

5,3

40,5

5,0

4,9

7

20,3

5,0

34,8

4,8

39,5

5,1

34,6

4,2

4,2

8

14,6

3,6

26,2

3,6

26,4

3,4

30,1

3,7

3,7

9

13,2

3,2

22,5

3,1

23,6

3,0

29,2

3,6

3,6

10

10,7

2,6

20,6

2,9

23,4

3,0

28,4

3,5

3,1

Total

245,8

60,2

439,2

61,1

467,9

60,3

552,4

67,7

70,8

Source : FFSA.

B. LA CONCENTRATION FRANÇAISE A LIEU DANS UN CONTEXTE GÉNÉRAL DE REGROUPEMENT DE L'ASSURANCE AU NIVEAU MONDIAL MAIS SURTOUT AU NIVEAU EUROPÉEN

Comme le signale le titre de l'étude de la Société Générale 82( * ) , le monde de l'assurance (et de la finance en général) est " à l'heure des grandes manoeuvres ". Il se concentre fortement en anticipation du marché européen de l'assurance encore à venir.

La plus grande partie du mouvement de restructuration assurancielle a lieu en Europe. Sur l'ensemble des transactions bancassurance qui ont eu lieu de 1992 à 1997 (prises de participation majoritaires ou minoritaires) au nombre de 203, 147 ont eu lieu en Europe (73 %), 24 ont eu lieu en Amérique du Nord (12 %), 32 ont eu lieu en Asie et dans les marchés émergents (15 %).

Sur un montant total des transactions entre 1992 et 1997 de 39,5 G USD, le montant des transactions européennes s'élève à 28,5 G USD, soit 72 % à nouveau, à 9,5 G USD pour l'Amérique du Nord (soit 24 %) 83( * ) .

Les mouvements dans l'assurance et la réassurance européenne, ont été importants en 1996 et 1997 en nombre et en volume.

Tableau 23
Mouvements dans l'assurance européenne en 1996/1997 : assureurs

Métier cible

Opérations domestiques

Opérations transfrontières

Assurance

• Fusion de Royal Insurance et de Sun Alliance (Royaume-Uni)

• Acquisition par Zurich de Kemper (assurance-vie, Etats-Unis) pour 2 G USD

 

• OPE d'AXA sur UAP (France)

• Prise de contrôle par Allianz de Bemer (Suisse)

 

• Acquisition par Prudential de Scottish Amicable (Royaume-Uni)

• Fusion de Zurich et BAT Financial Services (Royaume-Uni et Etats-Unis, valorisé à 19,6 G USD)

 

• OPE du Crédit suisse sur Winterthur (Suisse)

• Acquisition par ING de Equitable of Iowa (assurance-vie, Etats-Unis) pour 2,2 G USD

 

• OPA amicale de SE Banken sur Trygg-Hansa (Suède)

• Acquisition par Aegon de Providian Insurance (assurance-vie, Etats-Unis) pour 3,5 G USD

 

• Fusion de Hamburg Mannheimer et Victoria donne naissance à Ergo (Allemagne)

• Acquisition par General Accident de Canadian General Insurance (assurances dommages, Canada) pour 0,5 G USD

 
 

• Acquisition par Commercial Union de Houston General Insurance Company (Etats-Unis) pour 50 G USD

 
 

• Acquisition par Fortis de Pierce National Life (Etats-Unis) pour

230 G USD

 
 

• En cours, OPA d'Allianz sur AGF

 
 

• Acquisition d'AMB par Generali

Banque

• Acquisition par Fortis de MeesPierson (banque d'affaires et gestion de fonds, Pays-Bas) pour 0,6 G USD

• Acquisition par Zurich de Scudder (banque d'affaire et gestion de fonds, Etats-Unis) pour 1,6 G USD

 
 

• Acquisition par ING de Furman Selz (banque d'affaires, Etats-Unis) pour 0,6 G USD

 
 

• OPE de ING sur BBL (5,4 G USD)

Source : Société Générale Euro Research.

Tableau 24
Mouvements dans l'assurance européenne en 1996/1997 : réassureurs

Acquéreurs

Cibles

Montant des transactions

. Swiss Re

Mercantile & General Re (Royaume-Uni)

Uniorias (Italie)

SAFR, rétrocédée à Partner Re (France)

2,9 G USD

0,1 G USD

0,6 G USD

. Munich Re

American Re (Etats-Unis)

3,3 G USD

Source : Société Générale Euro Research.

Les mouvements du secteur ont lieu pour l'essentiel à partir d'un nombre limité de groupes acheteurs, dont les objectifs professionnels et géographiques sont différents.

Tableau 25
Les principaux prédateurs dans le secteur de l'assurance en Europe

Compagnies

Capitalisations boursières

(G USD)

Marchés ciblés

Allianz

55

France, Royaume-Uni, Asie

Zurich

20*

Etats-Unis, Asie, marchés émergents

Gestion de fonds aux Etats-Unis

ING

34

France, marchés émergents,

Gestion de fonds aux Etats-Unis

AXA

25

Assurance dommages aux Etats-Unis et en Asie

Generali

20

France, Allemagne

Gestion de fonds en Europe

Fortis

16

Gestion de fonds aux Etats-Unis, Assurance dans un pays en Europe (Royaume-Uni, Allemagne...)

* 38 G USD estimés avec BAT.

Source : Société Générale Euro Research.

On notera qu'au lendemain de l'opération moyenne d'absorption d'UAP par AXA, la capitalisation boursière d'AXA-UAP reste inférieure à la moitié de celle d'Allianz, avant intégration boursière des AGF dans Allianz. AXA-UAP se trouve au troisième rang européen devant ING en termes de capitalisation boursière.

Compte-tenu du nombre de " cibles " potentielles cotées ou non cotées, le mouvement de fusion absorption va se poursuivre, mais va atteindre rapidement ses limites.

Tableau 26
Les principales cibles cotées du secteur en Europe

Sociétés

Capitalisations boursières

(G USD)

Estimation % flottant

Activités principales

ASR

1,9

43

Vie et dommages aux Pays-Bas

Helvetia-Patria

1,6

34

Vie et dommages en Suisse

La Bâloise

3,8

87

Vie et dommages en Suisse

SAI

1,3

40

Vie et dommages en Italie

La Fondiaria

1,9

47

Vie et dommages en Italie

Guardian Royal

Exchange

4,5

83

Dommages au Royaume-Uni

Norwich Union

12,1

100

Vie au Royaume-Uni

Legal and General

10,3

90

Vie au Royaume-Uni

AMB

4,8

30

Vie et dommages en Allemagne

Nürnberger

0,8

15

Vie et dommages en Allemagne

Source : Société Générale Euro Research.

Il est intéressant de souligner que ce mouvement de concentration européen du secteur de l'assurance, même s'il est étroitement lié à la perspective d'un marché européen unifié et de l'euro, est en pratique déconnecté des textes des dernières directives européennes et lié en réalité à la liberté de circulation des capitaux et de l'investissement en Europe.

C. ANALYSE COÛTS-AVANTAGES DE LA CONCENTRATION :
UNE LOGIQUE INQUIÉTANTE ?

Le vaste mouvement de concentration en cours dans l'assurance, en particulier en Europe, permet de se faire une idée de la structuration du marché de l'assurance à l'avenir. Les grands groupes internationaux en seront les gagnants et joueront sur ce marché ou sur divers marchés nationaux le rôle de grands opérateurs (" global players "). Ils laisseront la place à un certain nombre de petites sociétés très performantes opérant sur des niches (segments de marché où elles bénéficient d'un avantage à long terme). Les groupes les plus faibles, à faible rentabilité sans réel savoir-faire spécifique, disparaîtront dans le processus de restructuration par absorption.

Les groupes généralistes de taille moyenne seront amenés à évoluer et à faire à court terme des choix stratégiques majeurs s'ils ne veulent pas être à leur tour emportés dans le mouvement 84( * ) .

Un des choix gagnants possible semble être la coopération de groupes de taille moyenne, comme le groupe Eureko candidat au rachat du GAN, qui associe des sociétés néerlandaise (Achmea, premier assureur dommages néerlandais), anglaise (Friends), danoise (Wasa), allemande (Parion) et portugaise (Banco Commercial Português) et qui réalise au total un chiffre d'affaires de 130 GF avec 70 GF de fonds propres et 500 GF d'actifs gérés.

Un autre exemple peut être donné de stratégies coopératives réussies entre groupes moyens par ailleurs concurrents au niveau français. En effet, les mutuelles d'assurance constituant le GEMA ont, avant l'heure des mégafusions et concentrations, montré la voie de la coopération entre acteurs concurrents par le biais d'outils :

- de synergies commerciales , avec des filiales communes et des produits communs :

• en assistance touristique : Intermutuelles Assistance, premier acteur du marché français européen de l'assistance ;

• en assurance-vie : MUTAVIE, filiale de MACIF et de certaines autres mutuelles ;

• en crédit automobile : SOCRAM ;

- ou d'économies d'échelle :

• avec la mise en commun de moyens de gestion de sinistres dans les GIE de gestion : NAVIMUT, JURIMUT ;

• par le développement d'échanges de données informatisées avec les experts et les réparateurs, au sein d'une filiale commune, DARVA, désormais ouverte à l'ensemble du marché de l'assurance automobile, sur laquelle elle fait référence ;

• par l'achat pour compte commun de certaines couvertures de réassurance ;

• par la création d'une société de gestion d'actifs : OFIVALMO.

En dépit d'une rationalité discutable sous certains aspects, la concentration dépend d'une logique d'accroissement de pouvoir de marché dans le contexte d'un marché européen arrivé à maturité.

Elle vise d'abord à répondre à l'européanisation et à la globalisation de l'économie : face à des acteurs économiques à vocation mondiale, des partenaires financiers globaux sont requis pour accompagner et soutenir les stratégies mondiales des entreprises et des groupes industriels.

Les fusions sont une occasion incontestable :

- de synergies commerciales par complémentarité des produits ou sur certains segments de marché ;

- d'économies d'échelle par la mise en commun de certains services d'informatique, de gestion financière ou administratifs générateurs de coûts fixes élevés.
Ainsi, Royal et Sun Alliance ont annoncé des économies à 2-3 ans de 175 millions de livres. AXA-UAP d'un milliard de francs d'ici à 1999-2000. Zürich-BAT de 250 millions de dollars sur trois ans. Allianz compte réaliser 300 millions de marks par an d'économies à partir de l'an 2000 en cas de succès de son OPA sur les AGF 85( * ) .

Logiquement donc, les fusions permettent de développer le chiffre d'affaires global des sociétés fusionnées en abaissant le coût moyen des opérations.

Dans le cas de l'assurance, les fusions absorptions ont un autre intérêt, comme dans les banques : elles permettent une plus large mutualisation des risques en assurance dommages et elles améliorent la probabilité de réussite des choix tarifaires dont la rentabilité dépend. Elles répondent ainsi à l'un des besoins fondamentaux de l'assurance. Elles permettent donc un meilleur amortissement des disparités de sinistralité dans telle ou telle zone géographique. Dans la mesure où, pour les risques de masse, la réassurance joue bien ce rôle, l'argument vaut plus pour les grands risques.

En réalité, au-delà des arguments avancés et qui sont réels - sans être exclusifs d'autres conséquences plus négatives - c'est une rivalité des grands groupes pour le pouvoir de marché et la maîtrise des politiques tarifaires qui est en cause. Et il est possible que dans cette concurrence pour la domination du marché, de manière classique, la lutte pour l'accroissement de la part de marché l'emporte sur le souci de rentabilité, voire de solidité et qu'ainsi la concentration infuse une dose d'aléa moral non négligeable dans le système financier susceptible de produire des effets négatifs en cas de crise.

En effet, le coût d'acquisition du contrôle des sociétés cibles sur le marché financier et les limites des rendements d'échelle peuvent restreindre sérieusement l'intérêt objectif pour les actionnaires d'un certain nombre d'absorption et du processus de concentration au-delà de certains seuils. L'avenir de ces mastodontes n'est donc pas nécessairement rassurant.

Les prix d'acquisition de nouvelles filiales par des groupes d'assurance intégrant souvent une prime de contrôle parfois élevée comportant un " goodwill " important, peuvent mettre en cause la rentabilité de ces opérations.

D'autre part, les économies d'échelle ne sont pas infinies. Une étude Sigma sur cette question montre que les économies d'échelle dans l'assurance sont réelles jusqu'à 500 millions de dollars (de primes émises). Rien à l'inverse n'empêche des sociétés de taille plus modeste de bénéficier d'économies d'échelle en externalisant certaines de leurs activités (sous-traitance, partenariat, filiales communes) et en faisant ainsi en quelque sorte jouer la sous-additivité des coûts par la soustraction plutôt que par l'addition des activités. Le succès de cette stratégie d'externalisation dépendra ultimement du coût et de la qualité du travail du sous-traitant. En tout état de cause, l'assureur doit toujours conserver la maîtrise de l'activité sous-traitée car c'est lui qui est responsable de la bonne fin des engagements pris envers les assurés. Dans le même sens, les grands groupes s'efforcent de compenser les inefficacités de la concentration par la décentralisation de la gestion.

Par ailleurs, la même étude Sigma a montré que les petites structures d'assurance opérant sur des niches ont des marges moyennes supérieures à celles des plus grands groupes grâce à des frais généraux et une sinistralité mieux maîtrisés 86( * ) .

Certaines réactions américaines négatives enregistrées à l'occasion des " mégafusions " en cours, par exemple entre Citicorp (deuxième groupe bancaire commercial américain) et Travelers (premier groupe américain de bancassurance) soulignent les risques impliqués par cette tendance de centralisation du marché autour de géants financiers " à tout faire " (la bancassurance est encore au-delà de la banque universelle) en se demandant s'il est opportun d'adopter aux Etats-Unis, le modèle bancaire européen du " one stop shopping " qui n'a pas toujours été très convaincant. La réaction boursière immédiate a d'ailleurs été négative, avant de se convertir en réaction positive.

Selon ces réactions " la quête du graal de la distribution croisée (" cross-selling ") pourrait s'avérer vaine " avec le temps, à cause des écarts culturels entre les métiers et des risques propres issus de la confusion des genres et de l'addition des métiers. Ainsi John Keefe de Keefe Worldwide Information a déclaré au Wall Street Journal que " la diversification ne marche pas, qu'elle n'a pas marché dans le passé et que l'environnement actuel n'est pas plus facile aujourd'hui qu'hier " 87( * ) . Le risque est grand en effet que cette diversification n'aboutisse à la création d'un panier de produits " ingérable " et à une tendance irrépressible à utiliser les profits des branches performantes pour masquer et renflouer les pertes ou les moins bons résultats des branches non performantes ou moins performantes. Le risque est grand que la diversification (" cross-selling ") n'aboutisse à la subvention croisée (" cross-subsidizing ") incompatible avec une gestion tournée principalement vers la rentabilité (" yield management ") et une organisation interne facilitant le contrôle actionnarial et l'observation par l'actionnariat des performances managériales des dirigeants (" good governance ").

Cette dérive serait d'autant moins inimaginable que la concurrence se resserrant entre un nombre d'acteurs limités et puissants, la vraisemblance d'un comportement s'écartant de la pure logique économique s'accroît, en même temps que la capacité de négociation auprès des pouvoirs publics en cas de crise.

Quoi qu'il en soit, à la question de savoir ce qu'il en est du devenir de la bancassurance en particulier, vue du point de vue de l'assurance, et de l'évolution plus généralement des conglomérats financiers, la réponse est que, malgré les réserves et les craintes, la tendance vers la bancassurance et les conglomérats financiers se généralise. On remarquera néanmoins que ce phénomène est limité au marché des particuliers.

D. BANCASSURANCE ET CONGLOMÉRATS FINANCIERS :
UNE TENDANCE QUI SE CONFIRME

L'assurance est en mouvement dans le cadre notamment d'une interpénétration des métiers (bancassurance) et d'un affrontement entre conglomérats financiers à dominante bancaire ou assurancielle 88( * ) .

1. Le phénomène bancassurance se généralise

La vision communautaire ancienne de prestataires financiers intégrés fait son chemin sur le terrain grâce à la technologie et aux glissements de frontière entre acteurs financiers entraînés par le développement de la sphère financière, même si " les Pays-Bas constituent le seul exemple achevé d'un marché où l'interpénétration des services financiers avec des réels groupes de bancassurance tels Fortis et ING ". En même temps, cette tendance à l'unification et à la constitution de conglomérats financiers se fait à l'initiative de deux types d'acteurs et de groupes.

On vérifie ces tendances à partir de la multiplication des rachats d'acteurs financiers (tableau 27) et des accords de distribution réciproque de produits (tableau 28), ainsi que par le sens dominant variable dans lequel des opérations se font (tableaux 29, 30, 31 et 32).

Tableau 27

Total des transactions bancassurance 1992-1997

(participations minoritaires et majoritaires)

 

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Etats-Unis/Canada

1

4

1

3

6

9

Europe

27

26

13

23

32

26

Asie/Marchés émergents

1

2

5

9

9

6

Total

29

32

19

35

47

41

Valeur des transactions Etats-Unis

0

151

0

60

48

9 316

Valeur des transactions Europe

3 633

3 575

283

2 464

3 568

14 789

Valeur des transactions-Asie/Marchés émergents

5

72

586

143

306

447

Valeur totale des transactions (G USD)*

3 639

3 798

869

2 667

3 922

24 552

Source : Banque Stratégie n° 147, mars 1998.

Tableau 28

Accords domestiques avec des banques et autres distributeurs

Pays

Banque

Type d'accord

Allianz

Allemagne

Hypo Bank

Dresdner Bank

Raissisen Kassen

Distribution de produits d'assurance-vie principalement un peu de produits dommages aux particuliers

Generali

Italie

Banca Commerciale Italiana

+ 7 Caisses d'épargne régionales

Distribution

Fortis

Belgique

CGER-Banque

Filiale de Fortis à 74,9 %

Pays-Bas

VSB

Filiale de Fortis

AXA

France

BNP

Assurance dommages

 

NSM

Joint-venture en assurance-vie (" NSM Vie ") dont AXA détient 40 %

 

Robecco

Assurance-vie

 

Carrefour

Assurance-vie

Zurich

Suisse

SBS

Distribution de produits diassurances vie et dommages

AGF

France

Société Générale

AGF détient 20 % de Sogésur, la filiale dommages de la SG dont elle conçoit et assure la gestion des produits

Source : Société Générale Euro Research.

Tableau 29

Transactions bancassurance :

rachat d'assureurs par des banques 1992-1997


(participations minoritaires et majoritaires)

 

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Etats-Unis/Canada

1

3

0

3

5

4

Europe

17

18

10

15

23

15

Asie/Marchés émergents

1

2

3

6

6

4

Total

19

23

13

24

34

23

Valeur des transactions

Etats-Unis

nc

81

0

60

48

144

Valeur des transactions

Europe

2 901

3 329

244

1 839

3 257

9 117

Valeur des transactions-

Asie/Marchés émergents

5

72

72

73

292

nc

Valeur totale des transactions

(G USD)

2 907

3 482

316

1 973

3 596

9 261

Source : Banque Stratégie, n° 147, mars 1998.

Tableau 30
Les cinq premières transactions :
rachat d'assureurs par des banques
(en milliards de dollars)

Acquéreur/Cible

Montant

Date

1. Crédit Suisse Group/Winterthur (Suisse)

8 506

août 1997

2. Lloyds TSB/Lloyds Abbey Life (38 %) (Grande-Bretagne)

2 701

sept. 1996

3. Skandinaviska Enskilda (Suède)/Trygg-Hansa AB (Suède)

2 224

oct. 1997

4. Cie de Suez/Victoire (35 %) (France)

1 903

déc. 1993

5. Deutsche Bank/Gerling (30 %) (France)

1 350

juil. 1992

Source : Banque Stratégie, n° 147, mars 1998.

Tableau 31

Transactions bancassurance :

rachat des banques par des assureurs 1992-1997


(participations minoritaires et majoritaires)

 

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Etats-Unis/Canada

0

1

1

0

1

5

Europe

10

8

3

8

9

11

Asie/Marchés émergents

0

0

2

3

3

2

Total

10

9

6

11

13

18

Valeur des transactions

Etats-Unis

0

70

nc

0

nc

9 172

Valeur des transactions

Europe

732

246

39

624

311

5 672

Valeur des transactions/

Asie/Marchés émergents

0

0

515

70

14

447

Valeur totale des transactions

(G USD)*

732

316

553

694

326

15 291

Source : Banque Stratégie, n° 147, mars 1998.

Tableau 32

Les cinq premières transactions :

rachat des banques par des assureurs


(en milliards de dollars)

Acquéreur/Cible

Montant

Date

1. Travelers Group/Salomon Bro (Etats-Unis)

9 000

sept. 1997

2. ING/BBL (87 %) (Pays-Bas/Belgique)

4 688

nov. 1997

3. Instituto Nazionale delle Assicurazioni/

Banco di Napoli (60 %) (Italie)

871

janv. 1997

4. Colonial Mutual Life Assurance/

State Bank of New So. Wales (Australie)

425

sept. 1994

5. Generali-Lombardo Veneto-Crédit agricole/

Banco Ambrosiano (19 %) (Italie)

421

juil. 1995

Source : Banque Stratégie, n° 147, mars 1998.

En 1993, les conglomérats financiers européens étaient plutôt dominés par les banques (voir à ce sujet annexe 1 du chapitre II sur l'importance et la nature des conglomérats financiers européens).

L'intégration financière bancassurance a lieu sur fond d'envolée du marché de l'assurance-vie (voir encadré plus haut sur le développement de l'assurance-vie, 1.3.1 de ce chapitre) même si cette envolée est en partie apparente et procède largement d'une substitution de produits au passif des banques.

Au total, ce mouvement d'intégration financière bancassurance, bien qu'il n'aille pas sans provoquer un certain nombre d'interrogations de fond quant à l'avenir et à son succès durable, a dépassé le stade de la mode, de la proximité passagère ou de l'intersection partielle à laquelle faisait songer le produit quasi financier d'assurance-vie par lequel la coopération entre ces métiers s'était engagée. En effet (on le verra plus loin) la complémentarité, quoiqu'avec retard, entre banque et assurance dommages est également en train de confirmer sa réalité, en étant déjà très avancée dans certains pays comme l'Espagne ou les Pays-Bas. Elle est en réalité orientée par le client, à qui de nouvelles technologies permettent d'apporter plus de services sur un même point de vente, quitte à sous-traiter en interne le suivi de la relation propre aux contrats d'assurance pour pouvoir faire face aux contraintes propres au métier de l'assurance dommages du particulier.

Bien que le phénomène de la bancassurance se soit développé jusqu'à présent quasi exclusivement sur le marché des particuliers, la liaison bancassurance joue également un rôle d'avenir dans un certain nombre de garantie contre les événements naturels (cat bonds) ou pour la couverture des grands risques via les techniques de titrisation.

En même temps qu'il préfigure l'avenir d'intégration des services financiers, le développement de la bancassurance est aussi dans une certaine mesure un retour aux sources, puisque l'articulation de la bancassurance se refait naturellement, quoique de manière plurivoque, après la parenthèse d'une économie de financement administré ayant artificiellement coupé les ponts essentiellement capitalistiques entre la banque et l'assurance pour rattacher l'une et l'autre directement à l'Etat au lendemain de la seconde guerre mondiale.

V. EFFICACITÉ RELATIVE DE L'ASSURANCE FRANÇAISE : MÉDIOCRE AVEC DE MEILLEURES PERSPECTIVES

On peut mesurer l'efficacité des entreprises d'assurance en comparant les valeurs prises par quatre indicateurs à divers moments et/ou dans divers pays :

- le ratio sinistres à primes, mesuré en pourcentage ( gross claims incurred ) ;

- le taux de chargement, mesurant le rapport des frais généraux et des commissions par acquisition des contrats au montant annuel des primes collectées ( gross operating expenses ) ;

- le ratio combiné des sinistres et frais généraux rapporté aux primes, plus synthétique et de plus en plus utilisé, est laissé de côté faute d'une disponibilité équivalente des données (on trouvera cependant, mais sous toutes réserves, une comparaison des ratios combinés moyens en Europe dans le graphique suivant, extrait de Single Market Review, Insurance , étude pour la Commission européenne) ;

Graphique 7
Ratio combiné en 1994 de l'assurance non-vie
(en % des primes)

Source : Eurostat.

- le résultat technique obtenu en soustrayant des primes nettes collectées pendant un exercice les sinistres nets et les frais d'acquisition et de gestion nets et exprimés en pourcentage des primes nettes aux fins de comparaison 89( * ) . On verra plus loin (voir ci-dessous 5) le rapport entre rentabilité technique et rentabilité globale.

Comme les effets de l'harmonisation comptable au niveau européen n'entrèrent en vigueur qu'à partir de 1995, il est difficile de comparer réellement encore, compte tenu des différences de règles comptables, notamment dans le calcul des provisions mathématiques des sociétés d'assurance-vie, l'efficacité des entreprises d'assurance d'un pays à l'autre. La comparabilité est malheureusement équivalente pour les taux de chargement en dépit de ces différences comptables et pour les résultats techniques.

Il est également nécessaire de distinguer ici les deux grandes catégories techniques de l'assurance que sont l'assurance-vie et l'assurance dommages (techniquement l'assurance maladie qui est une assurance de personnes est plus proche de l'assurance dommages que de l'assurance-vie).

Tableau 33
Efficacité relative des sociétés d'assurance-vie (1993)

Pays

Primes émises

(en M ECU)

Créances recouvrées

(en % des primes)

Taux de chargement

(en % des primes)

Allemagne

39 243

53,42

19,65

Espagne

6 881

65,76

13,59

France

50 034

42,26

9,30

Grande-Bretagne

63 892

78,81

16,75

Italie

9 117

30,64

15,14

Suisse

14 867

68,78

12,93

Source : Eurostat.

Tableau 34

Efficacité relative des sociétés de l'assurance non-vie (1993)

Pays

Primes émises

(en M ECU)

Sinistres

(en % des primes)

Taux de chargement

(en % des primes)

Allemagne

49 389

75,55

23,79

Espagne

12 058

71,89

31,66

France

37 802

83,33

28,51

Grande-Bretagne

54 464

53,77

16,51

Italie

18 898

80,73

18,90

Suisse

15 527

78,39

30,20

Source : Eurostat.



Le taux de chargement des sociétés françaises d'assurance-vie est comparativement bas (ne sont voisins de ce taux que les sociétés d'assurance-vie suédoise et danoise) et les sociétés françaises d'assurance-vie se situent de ce point de vue parmi les plus efficaces 90( * ) . Eurostat d'ailleurs ne se livre cependant à aucune véritable interprétation de ces résultats avant l'harmonisation des méthodes comptables, qui ne se traduira que dans les chiffres de l'année 1997.

En revanche, le ratio sinistres à primes des sociétés françaises d'assurance dommages est le plus élevé de l'espace économique européen à l'exception de la Finlande (90,56) et du Danemark (91,74), et leur taux de chargement est parmi les plus élevés (le rapport s/p n'est une grandeur pertinente que lorsqu'on compare des modes de distribution ayant des coûts d'intermédiation semblables).

Parmi les pays retenus pour la comparaison internationale européenne, seule l'Espagne présente un taux de chargement des sociétés d'assurance non-vie supérieur à celui de la France, qui n'est dépassé dans l'espace économique européen, outre l'Espagne, que par la Belgique (41,83 %) et le Portugal (34,70 %) et au-delà de cet espace, par la Suisse. L'Irlande réalise le meilleur taux (12,23 %) devant la Grande-Bretagne.

La différence des niveaux de frais généraux entre assurances vie et non-vie est liée aux différences structurelles entre les deux types d'assurance, c'est-à-dire essentiellement le coût de gestion des sinistres en assurance dommages, les premières fonctionnant selon un mode de sociétés de capitalisation, avec des niveaux de primes par contrat relativement élevés, les secondes selon un mode de sociétés de répartition, plus consommatrices en main-d'oeuvre 91( * ) .

La tendance anticipée, dans les divers pays, compte tenu des efforts engagés pour réduire les frais d'administration et de distribution, a une baisse significative des taux de chargement en Europe.

Tableau 35
Résultats techniques des sociétés d'assurance (non-vie) 1975-1992
(en % des primes, hors réassurance)

Pays

1975

1980

1985

1990

1992

Moyenne

Volatilité

Moyenne/volatilité

Etats-Unis

- 8,83

-3,55

- 18,97

- 10,20

- 15,44

- 8,20

5,79

- 1,42

Japon

- 5,70

0,59

2,32

0,10

0,10

0,33

2,58

0,15

Allemagne

1,80

0,30

1,20

1,20

- 2,20

0,51

1,05

0,49

France

- 7,91

-12,54

- 12,51

- 12,72

- 15,70

- 11,62

2,51

- 4,62

Grande-Bretagne

- 3,77

-4,17

- 14,00

- 19,43

- 15,65

- 8,72

6,82

- 1,28

Suisse

- 6,04

-7,73

- 11,57

- 7,78

- 11,71

- 8,48

1,84

- 4,61

Source : Sigma.



Cette comparaison des résultats techniques, dont on ne dispose malheureusement pas sous forme chiffrée après 1992 (pour visualiser la rentabilité technique après 1992, sous forme graphique, on se reportera au paragraphe sur la rentabilité globale et à l'annexe 2 de ce chapitre) permet de dégager un certain nombre de conclusions, en dépit du fait que l'inégale répartition des catastrophes par zone géographique, qui pèse sur les résultats techniques nationaux, relativise la portée des interprétations.

Pour la France, l'analyse de l'efficacité des sociétés d'assurance non-vie à partir du critère de la rentabilité technique confirme l'indication dégagée par la comparaison des taux de chargement : la France est comparativement mal placée avec la rentabilité technique négative moyenne la plus élevée de  - 11,6 % sur une période allant de 1975 à 1992 couvrant diverses conjonctures. Cette conclusion est aggravée par la volatilité comparativement plus faible de ces résultats.

Cette comparaison permet d'opérer un regroupement :

- entre pays anglo-saxons, marqués plus particulièrement par la crise mondiale de l'assurance dans les années 80, et dont la rentabilité est plus volatile ;

- les pays à rentabilité technique moyenne constante et positive comme le Japon et l'Allemagne, qui sont en même temps les marchés sur lesquels la restriction de concurrence par les autorités de contrôle ou les accords sectoriels était la plus importante ;

- les pays à rentabilité technique structurellement dégradée comme la France et dans une moindre mesure la Suisse (l'impôt sur les sociétés est intégré en Suisse dans les charges d'exploitation et entre comme coût dans le résultat technique, rendant difficile la comparaison sur cet indicateur simple).

VI. RENTABILITÉ GLOBALE COMPARÉE DE L'ASSURANCE FRANÇAISE : FAIBLE, SURTOUT APRÈS INTÉGRATION DU RISQUE 92( * )

La rentabilité globale sur longue période calculée par Sigma que nous utilisons ici combine résultat technique et rendement des placements selon le schéma suivant.

Graphique 8
Eléments du résultat dans l'assurance
(indicateurs unidimensionnels classiques)

Rendements courants des placements+ Produit des placements / - pertes sur placements

- frais sur revenu des placements

Primes nettes acquises

- sinistres nets (réglés et réservés)

- frais d'acquisition et de gestion, nets

= Rendement des placements

= Résultat technique

= Résultat global (en % des primes : rendements sur chiffre d'affaires)

Source : Sigma / Suisse de Réassurances 1/95.

Le rendement global (après impôt) sur chiffre d'affaires, ou rendement commercial, est la somme algébrique du rendement technique et du rendement net financier 93( * ) . Il est calculé en pourcentage des primes.

Les résultats agrégés graphiques présentés ci-après sont tirés, pour la plupart des données publiées, par les autorités nationales de contrôle et les fédérations nationales d'assurance.

La comparaison des rentabilités globales des sociétés d'assurance non-vie accentue les différences constatées au niveau des résultats techniques et les précise pays par pays 94( * ) :

Graphique 9
Evolution de la rentabilité globale de l'assurance française 1975-1996



Source : Sigma.

Graphique 10
Evolution de la rentabilité globale de l'assurance en Grande-Bretagne 1975-1996

Source : Sigma.

Graphique 11
Evolution de la rentabilité globale de l'assurance allemande 1975-1996

Source : Sigma.

Graphique 12
Evolution de la rentabilité globale de l'assurance italienne
1975-1996
1

1 Bien que la somme des données italiennes soit commune (ANIA), on constate un certain écart entre les données graphiques parues dans Sigma n° 7/1996 et de Sigma dans l'International Journal of Business du printemps 1998, à partir desquelles ce diagramme a été composé. Jusqu'en 1995, nous avons suivi Sigma n° 7/1996.

Source : Sigma.

- la volatilité de la rentabilité positive des pays anglo-saxons est confirmée à ce niveau, mais souligne en particulier celle du Royaume-Uni, qui est devenue négative de 1990 jusqu'à 1992, pour évoluer rapidement à partir de 1993 vers une rentabilité positive élevée, qui décline à nouveau à partir de 1996 et en 1997 (voir annexe 2 sur la rentabilité comparée des sociétés d'assurance dans six pays) ;

- la rentabilité constante et élevée (entre 4 et 6 %) de l'assurance allemande, suivie de près respectivement par la japonaise et la suisse (jusqu'en 1992) ;

- la situation atypique de la France, dont la rentabilité technique pour le moins médiocre, est confirmée par une rentabilité globale constamment faible, qui devient négative de 1990 à 1994 et redevient positive à un faible niveau en 1995 et 1996, sans augmenter en 1997 et 1998 (voir annexe 2). Cette faiblesse de la rentabilité globale est encore plus frappante comparativement après intégration du risque comme le propose Sigma 95( * ) (voir graphique 13). Cependant, la rentabilité apparente qui ressort ici est largement dépendante de la politique de provisionnement adoptée par les entreprises d'assurance françaises, qui minore constamment le résultat global, même si elle tend à une amélioration des produits financiers, lesquels ne sont cependant comptabilisés en droit comptable français que lorsqu'ils sont réalisés. Or les politiques de provisionnement française et allemande sont beaucoup plus conservatrices que les politiques anglo-saxonnes.
On notera cependant dans le tableau ci-dessous l'amélioration des résultats de l'assurance française en 1997, essentiellement due à la progression des résultats des sociétés d'assurance-vie.

Graphique 13
Comparaison des résultats globaux de l'assurance
après intégration de la volatilité



Source : Sigma / Suisse de Réassurances 1/95.

- la rentabilité globale des Etats-Unis est en moyenne et surtout ces dernières années particulièrement élevée en raison d'une rentabilité exceptionnelle des placements financiers et en dépit de résultats techniques très mauvais dans la décennie 1980 et au-delà (voir annexe 2).
On trouvera ci-dessous, pour compléter les informations sur la rentabilité commerciale, une comparaison des rentabilités financières des principaux groupes d'assurances européens, à partir d'une étude de Salomon Brothers sur l'assurance française 96( * ) .

Tableau 36
Comparaison des rentabilités financières
des principaux groupes d'assurances européens

 

Capitalisation boursière

 
 

ROE** (%)

En monnaie locale

USD

Flottant (%)

Prévision ROE* 1998

France

AGF

9,0

31,519

5,169

78

 

AXA

10,7

130,870

21,461

62

11,1

GAN

3,2

8,466

1,388

20

 

Allemagne

Allianz

8,5

98,029

54,025

40

 

Hannover Re

13,5

2,255

1,242

25

10,0

Munich Re

8,5

49,958

27,533

34

9,9

Italie

INA

 

10,480

5,931

48

9,1

Pays-Bas

Aegon

18,0

44,604

21,825

54

14,0

ING Group

-

75,633

37,008

90

14,0

Espagne

Corporacion Mapfre

11,4

258,386

1,688

48

11,5

Mapfre Vida

16,7

142,400

930

29

15,5

Suisse

Swiss Re

14,6

29,956

20,125

91

13,0

Winterthur

11,5

12,149

8,162

80

9,0

Zurich

13,5

28,283

19,001

95

 

Royaume-Uni

Commercial Union

13,1

5,145

8,183

91

14,2

General Accident

11,9

4,552

7,240

100

15,0

GRE

12,5

2,550

4,056

100

12,0

Royal & Sun Alliance

14,2

7,915

12,589

100

16,5

Legal & General

11,3

5,794

9,215

100

 

Norwich Union

11,0

6,838

10,875

100

 

Prudential

12,2

12,297

19,558

100

 

* Cette colonne a été établie à partir de l'étude de Goldman Sachs Investment Research, Europe/UK Research, Insurance, 1998. Issues and Outlook, Competition, Consolidation and Restructuring, décembre 1997.

** Return on equity ou Rentabilité financière (des fonds propres).

Source : Goldman Sachs Investment Research, Capitalisation au cours de bourse du 9 septembre 1997.

Le principal problème de l'assurance française est donc un problème de rentabilité apparente insuffisante, qui traduit l'inefficacité relative constatée plus haut, laquelle fait certainement, compte tenu du poids passé des sociétés nationales, écho au passé de capitalisme sans capital ni actionnaires véritables d'une fraction importante de l'assurance française. Cette rentabilité insuffisante est soulignée par l'écart frappant entre la valeur boursière du groupe AXA-UAP par rapport au groupe Allianz, malgré une part de marché et un chiffre d'affaires supérieurs du premier (voir plus haut classement européen de l'assurance). On soulignera cependant, au regard de ce constat, la réussite des MSI, acteurs de l'économie de marché sans capital ni actionnaires, qui ont réussi à réduire les coûts et à développer des groupes mutualistes de manière significative.

Cependant on doit se rappeler que l'indicateur de rentabilité dans le domaine de l'assurance est très largement fonction de la politique de provisionnement adoptée par les sociétés d'assurance, laquelle est fonction d'une culture nationale assurancielle en général assez marquée.

VII . SOLVABILITÉ COMPARATIVE DE L'INDUSTRIE FRANÇAISE DE L'ASSURANCE

A. LA SPÉCIFICITÉ DE L'ASSURANCE EST LOURDE DE CONSÉQUENCES EN MATIÈRE DE SOLVABILITÉ RÉGLEMENTAIRE

La question de la sécurité et de la solidité de l'industrie de l'assurance est, par vocation, particulièrement importante. Historiquement d'ailleurs, l'assurance résiste mieux aux grandes crises qui ont amené à la faillite de nombreuses banques. La crise financière scandinave et diverses faillites au Royaume-Uni ont aussi illustré les conséquences redoutables pour les entreprises d'assurance de leur imbrication avec d'autres opérateurs financiers.

Or la manière d'assurer cette sécurité, d'assurer la solvabilité, la liquidité et la rentabilité de cette industrie particulière est compliquée par le fait distinctif de cette industrie, généralement caractérisé comme " l'inversion du cycle de la production ", la prime, prix de la prestation, est encaissée avant la fourniture du service et l'événement qui déclenche et justifie cette prestation. Cette " différence spécifique " de l'industrie de l'assurance entraîne un certain nombre de conséquences quant à la manière d'assurer la pérennité de cette industrie, quant aux règles de sécurité de l'assurance, incluant les règles de solvabilité sans s'y réduire, et différentes selon le type d'assurance dont il s'agit.

Ces conséquences sont les suivantes :

- les fonds reçus des assurés doivent être placés dans des emplois sûrs, variés, suffisamment rémunérateurs et mobilisables dans l'attente de la réalisation de la prestation, ce qui se traduit par des exigences réglementaires ou non en matière de qualité et de répartition des actifs adéquats au but de l'assureur ;

- des écarts importants, notamment en assurance IARD, peuvent apparaître entre l'estimation des dettes à inscrire au passif et les sommes réellement exigibles, ce qui conduit à une exigence d'estimation prudente des engagements techniques et à la nécessité, en cas de surestimation des actifs ou de variation des taux de rendements pendant la durée du contrat, de se ménager un matelas de ressources supplémentaires, qu'on appelle marge de solvabilité ;

- le coût de la prestation est déterminé a priori sur des bases statistiques, alors que le prix de revient réel n'est connu bien souvent que tardivement ;

- alors que dans une entreprise industrielle ou commerciale classique, les risques se situent à l'actif : dépréciation des stocks des créances clients, les risques de l'assurance se situent dans le passif technique essentiellement et consistent dans l'insuffisance possible des provisions qui peuvent représenter jusqu'à 90 % du bilan d'une société d'assurance ;

- les engagements techniques résultant des contrats étant exprimés en différentes devises, les actifs correspondants doivent obéir au principe de " congruence " (adossement en devise en valeur et en maturité) afin d'éliminer les risques de change.
Toutes ces conséquences soulignent en particulier l'importance de l'existence de fonds propres en adéquation avec l'activité permettant de faire face aux écarts importants et imprévisibles d'actifs ou de passifs 97( * ) , ainsi que la nécessité de règles prudentielles en matière de provisions techniques et de placement des sociétés d'assurance, l'ensemble rentrant dans la préoccupation générique de solvabilité et de pérennité de ces sociétés.

On trouvera en annexe 4 de ce chapitre, un bilan " réglementaire ", qui exprime en résumé la traduction en état de synthèse comptable de l'ensemble des exigences spécifiques et réglementaires exprimées nécessaires au bon fonctionnement pérenne des entreprises d'assurance.

On mettra ici en relief l'exigence réglementaire européenne de fonds de garantie et de marge de solvabilité avant de passer à l'examen comparatif direct ou indirect (par la notation) de la solidité des entreprises d'assurance en Europe et de par le monde. Enfin, l'on essaiera de prendre en compte l'existence et la logique des groupes d'assurance ou des conglomérats financiers dans l'appréciation de la solvabilité réelle des entreprises d'assurance et d'indiquer les tests prudentiels complémentaires qu'il est prévu d'appliquer dans ce cas de figure.

B. EXIGENCE RÉGLEMENTAIRE EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE SOLVABILITÉ98( * )

La solvabilité, essentielle à toute entreprise, est particulièrement cruciale dans l'industrie de couverture des risques des autres agents économiques qu'est l'assurance. C'est pourquoi elle est réglementée et surveillée à plusieurs niveaux :

- il existe d'abord une exigence de fonds de garantie minimum, exprimé en valeur absolue et indépendamment du niveau d'activité de la société d'assurance ;

- puis une exigence plus élevée de fonds de garantie, définie comme le tiers de la marge de solvabilité ;

- ensuite une exigence de marge de solvabilité minimale ;

- ensuite encore, en vitesse de croisière, les règles de provisions techniques, qui doivent être suffisantes pour le respect intégral des engagements pris envers les assurés et dont le calcul a été largement harmonisé par les directives " assurance ", dont le contenu et le niveau restent jusqu'à présent très largement nationaux ;

- enfin, la couverture des provisions techniques doit être assurée par des actifs adéquats sûrs, liquides et rentables.
1. Présent et avenir probable du " fonds de garantie minimum " en Europe

Depuis les premières directives de coordination (73/239/CEE pour l'assurance non-vie, 79/267/CEE pour l'assurance-vie), un fonds de garantie minimum, qui est un montant en valeur absolue, a été fixé comme plancher de l'exigence de solvabilité, sans changement ni relèvement pour suivre l'inflation depuis 1973 et 1979 respectivement.

a) Fonds de garantie minimum en assurance non-vie

Les compagnies et les mutuelles d'assurance ayant été classées par l'assurance non-vie en quatre catégories de risque, il existe quatre niveaux de fonds de garantie minimum (Fgm).


 

Niveau du FGM

(M Ecus)

Catégorie 1

1,4

Catégorie 2

0,4

Catégorie 3

0,3

Catégorie 4

0,2

Le montant de fonds propres minimum exigé en matière d'assurance-vie est de 800 000 Ecus.

Compte-tenu de l'invariance de ces niveaux de solvabilité minimum exigée depuis l'origine, une réflexion a été entreprise à l'initiative de la Commission européenne au niveau de la conférence des services de contrôle des assurances des Etats membres de l'Union européenne dans le cadre d'un groupe de travail sur la solvabilité dans l'assurance, présidé par le Dr. Helmut Müller, alors vice-président de l'Office fédéral allemand de contrôle des assurances et devenu président depuis. Le groupe a publié un rapport en avril 1997, dit rapport Müller. Ce rapport, qui a ouvert une large réflexion sur les risques dans l'assurance, recommande notamment une évolution des niveaux de fonds de garantie minimum, visant à les relever d'un niveau au moins égal à l'inflation intervenue entre-temps. Par ailleurs le groupe Müller propose de procéder à une refonte simplificatrice des catégories de risque, en fusionnant la plupart des risques de la catégorie 2 avec ceux de la catégorie 1, et en classant divers dommages entrant dans la catégorie 4 (grêle, gel ...) au même niveau que les sinistres causés par les incendies et les catastrophes naturelles.

La nouvelle grille de FGM de l'assurance non-vie pourrait alors devenir :


 

(en M Ecus)

Catégorie 1

3

Catégorie 2

2

Catégorie 3

1,5 ou 1

Le groupe n'est pas parvenu à un accord sur la question de savoir si l'option donnée aux Etats membres jusqu'à présent d'autoriser les assurances mutuelles à diminuer de 25 % le fonds de garantie minimum devait ou non être abrogée. Une majorité des membres du groupe de travail a jugé opportun que des dérogations soient à la rigueur accordées aux entreprises déjà créées.

On ne peut que constater ici qu'une exigence de fonds de garantie minimum de près de 20 MF, ou au minimum de 10 MF, est prohibitive pour la survie d'un certain nombre de mutuelles en particulier les plus petites, qui ne sont pas nécessairement les plus mal gérées. Ceci pose en même temps la question plus générale de savoir si l'inspiration réputée libérale de la réglementation prudentielle européenne n'est pas de nature à exercer un effet protectionniste en empêchant le maintien ou l'entrée sur le marché d'un certain nombre d'acteurs qui remplissent bien leur fonction (les problèmes de la mutualité sont étudiés plus loin) mais ne peuvent satisfaire à des conditions de solvabilité exorbitantes par rapport à leur niveau d'activité et de risques par conséquent. Par ailleurs, il semble à certains étrange que l'on puisse par le biais d'une directive européenne porter atteinte à la densité du tissu économique national.

L'idée de distinguer entre petites et grandes sociétés d'assurance a également été émise pour les nouvelles sociétés, la distinction se ferait à partir d'un critère du montant de primes brutes. La suggestion de respecter un rapport de 1 à 5 entre primes et fonds de garantie a été faite, avec toutefois des minima absolus imposés.

b) Fonds de garantie minimum en assurance-vie

Le fonds de garantie minimum dans l'assurance-vie, par application d'une évolution d'indice des prix à la consommation EUR 12/15 base 100 en 1979, s'élèverait quant à lui, après arrondi, à un niveau de 2,3 M ECU, que le groupe proposait majoritairement de remonter à 2,5 M ECU. Une minorité, on peut imaginer laquelle, a proposé un relèvement substantiel jusqu'à 4 ou 5 M d'ECU de fonds de garantie minimum en s'inspirant de la réglementation applicable au secteur bancaire (capital minimum de 5 M ECU).

Le groupe ne s'est pas non plus mis d'accord sur la question de maintenir le droit concédé aux mutuelles d'avoir un fonds de garantie minimum inférieur de 25 %, alors que la prolongation de cet avantage pour les tontines n'a pas été discuté 99( * ) .

Entre le fonds de garantie minimum et la marge de solvabilité minimale exigée sous forme de rapports minimum entre fonds propres et primes de sinistres, il existe une exigence de solvabilité minimale, de fonds de garantie, exprimée sous la forme relative du tiers de la marge de solvabilité telle que le calcul est indiqué ci-après.

2. Les niveaux réglementaires de marge de solvabilité minimum

La marge de solvabilité représente, au-delà des provisions techniques qui sont la source principale de solvabilité d'une entreprise d'assurance, le matelas de sécurité contre l'aléa dans la réalisation des divers risques qui peuvent affecter le passif ou l'actif d'une société d'assurance. Il s'agit d'une notion équivalente à celle des fonds propres qui est utilisée dans le domaine des entreprises et des banques.

Pour les sociétés d'assurance-vie, la marge de solvabilité doit représenter 4 % des provisions mathématiques et 1 % des provisions mathématiques des contrats en unités de compte.

Pour les sociétés d'assurance non-vie, la norme pour la marge de solvabilité est le plus élevé des deux chiffres suivants 100( * ) :

- 16 à 18 % (selon la taille) des primes émises ;

- 23 à 26 % (selon la taille) des charges moyennes de sinistres sur les trois dernières années (brutes de réassurance, le chiffre de charges est diminué du coefficient de sinistres cédé aux réassureurs).

Les plus-values latentes sont incorporées dans la marge de solvabilité en raison de l'harmonisation européenne.

Les sociétés mixtes effectuent un calcul séparé de leur besoin de marge de solvabilité selon la norme réglementaire et additionnent les deux exigences de fonds propres pour trouver le montant de fonds propres minimal requis.

Les sociétés d'assurance dommages traditionnelles se situent en général très au-dessus des exigences minimales, à un niveau de marge de solvabilité compris entre deux et trois fois le minimum.

Les sociétés d'assurance-vie se situent quant à elles juste au-dessus de l'exigence réglementaire, hors plus values latentes.

Quoi qu'il en soit, comme le souligne Cyril Roux, " la marge de solvabilité est un indicateur insuffisant, en dépit de son nom, pour estimer la solvabilité à moyen terme. Cette marge s'appuie en effet principalement sur les éléments du bilan sans que les produits ou les pertes d'exploitation des années à venir soient suffisamment pris en compte. La solvabilité d'une société disposant de fonds propres suffisants mais engagée dans une branche déficitaire est plus menacée qu'une société disposant d'une marge juste égale au minimum réglementaire qui dégage des profits réguliers. La politique tarifaire, la rédaction des contrats, le suivi du portefeuille, l'évolution des relations avec les réassureurs et les marchés financiers sont les éléments particulièrement importants de la solvabilité à moyen terme " 101( * ). Sigma a d'ailleurs bien montré l'influence de la profitabilité sur l'évolution de l'insolvabilité 102( * ) , qui n'est d'ailleurs nullement spécifique à l'assurance.

On se reportera, en annexe 5 de ce chapitre, à la comparaison du contrôle de solvabilité en Europe et aux Etats-Unis.

On notera également qu'une nouvelle réflexion sur l'appréciation de la solvabilité des entreprises au sein de groupes d'assurances (proposition de directive sur la surveillance des entreprises d'assurance faisant partie d'un groupe) ou de conglomérats financiers (travaux du groupe de Bâle) est entreprise qui situe les vrais enjeux de concurrence au niveau des prestataires globaux de services financiers.

C. SOLVABILITÉ EFFECTIVE ÉLEVÉE ET BONNE SOLIDITÉ COMPARÉE, AU NIVEAU CONTINENTAL, DE L'ASSURANCE FRANÇAISE

La solvabilité comparée des entreprises d'assurance, et leur évolution, peut être mesurée instantanément, avec les limites indiquées, en rapprochant les marges de solvabilité 103( * ) , dans l'espace et dans le temps. L'appréciation de la solidité réelle des sociétés d'assurance doit aussi faire appel à d'autres indicateurs comme le ratio de provisions techniques : réserves techniques/primes nettes ou brutes 104( * ) , le taux de couverture des provisions techniques par les investissements, qui traduit la capacité d'une compagnie à faire face à ses provisions techniques, même s'il est mesuré par rapport aux primes.

Tableau 37
Total des capitaux propres et solvabilité effective nationale
en 1993 et 1995
105( * )
(en millions d'Ecus et en % des primes brutes)

 

Assurance-vie

Assurance non-vie

 

1993

1995

1993

1995

 

M ECU

%

M ECU

%

M ECU

%

M ECU

%

Allemagne

3 459

9

4 306

9

13 876

22

18 774

25

Espagne

1 569

40

1 352

28

1 240

27

1 496

30

France

13 504

27

14 476

22

16 890

45

16 835

40

Italie

6 919

148

6 386

105

3 493

42

3 082

39

Royaume-Uni

 
 
 
 
 
 
 
 

Suisse

1 129

8

1 302

7

6 141

40

7 361

52

Source : Eurostat.

On voit d'après le tableau 37 que les marges de solvabilité effective des entreprises d'assurance françaises sont comparativement bonnes. Elles sont supérieures à celles de l'Allemagne notamment. Eurostat ne dispose pas des données concernant le Royaume-Uni.

On pourra regarder plus en détail à partir du tableau ci-dessous le bon niveau de solvabilité des sociétés d'assurance françaises, vie et non-vie.

Tableau 38

Résultats des sociétés vie, capitalisation et mixtes

(en milliards de francs)

 

1993

1994

1995

1996

1997

Résultats techniques

7,6

5,0

3,6

4,5

9,5

Résultats nets comptables

-

5,9

5,7

5,8

9,6

Sources : FFSA, Commission de contrôle des assurances.

Extrait de " L'assurance française en 1997 ".

Tableau 39

Provisions techniques brutes

(en millions d'Ecus et en % des primes brutes) 1993

 

Assurance-vie

Assurance non-vie

 

M ECU

%

M ECU

%

Allemagne

294 162

740

63 451

101

Espagne

13 460

347

3 357

74

France

244 318

488

60 102

159

Italie

20 023

427

11 920

145

Grande-Bretagne

-

-

-

-

Suisse

86 900

585

23 647

152

Source : Eurostat

Sur le plan des provisions techniques, qui est l'un des indicateurs les plus importants de la solvabilité effective en temps normal, la France est à nouveau très bien placée, en l'absence de données sur la Grande-Bretagne et elle se trouve en première position en ce qui concerne le niveau de provisionnement dans l'assurance non-vie.

Tableau 40
Montant des investissements
(en millions d'Ecus et en % des primes brutes) 1993

 

Assurance-vie

Assurance non-vie

 

1993

1996

1993

1996

 

M ECU

%

M ECU

%

M ECU

%

M ECU

%

Allemagne

307 562

774

402 873

825

88 218

140

128 038

173

Espagne

12 339

318

18 785

322

2 856

63

4 635

88

France

243 315

486

270 147

527

60 494

160

73 558

172

Italie

25 095

536

40 788

537

11 028

134

13 915

152

Grande-Bretagne

590 411

924

738 318

 

95 631

176

108 117

 

Suisse

86 736

583

128 137

603

31 167

201

43 548

306

Source : Eurostat.

Derrière la Grande-Bretagne et l'Allemagne, la France est bien placée, en niveau absolu comme en valeur relative, au point de vue du montant des investissements par rapport aux primes.

D. L'APPRÉCIATION INDIRECTE DE LA SOLIDITÉ DES ENTREPRISES D'ASSURANCE PAR LA NOTATION ET LE TAUX DE DÉFAILLANCE106( * )

La solidité et la solvabilité d'une compagnie d'assurance peuvent être mesurées à l'aide de ratios. L'inconvénient est qu'elle ne l'est alors qu'après coup. Elle fait également l'objet d'une appréciation globale en principe en temps réel pour les divers acteurs du marché de l'assurance. Sous la forme de la notation par des agences spécialisées, qui s'appuient sur les mêmes types de ratios que ceux évoqués plus haut, mais également sur une analyse plus large, prenant en compte le contexte économique, la stratégie et la gestion, les résultats techniques, la capitalisation boursière, la liquidité des titres, la flexibilité financière.

La solidité et la solvabilité du secteur de l'assurance, au niveau national, régional ou mondial peuvent également être appréciées a posteriori par l'évolution du taux de défaillance que mesure le pourcentage des entreprises d'assurance en faillite rapporté au nombre total des entreprises d'assurance.

1. La notation des assureurs fait ressortir une fragilité accrue des compagnies d'assurance au niveau mondial

La notation ne va pas sans poser de problèmes, comme celui du caractère volontaire ou non de la notation ainsi que celui de la difficile comparaison des notes attribuées par chaque agence de notation. On trouvera ci-dessous un tableau comparatif des échelles de notation des trois principales agences mondiales de notation (voir tableau 41).

Tableau 41

Difficile comparaison des notes attribuées par chaque agence

 
 

Standard & Poor's 1

Moody's 1

A.M. Best 2

Forte sécurité financière

1

AAA

extrêmement forte

Aaa

exceptionnelle

A++, A+

supérieure

 

2

AA+, AA, AA-

excellente

A1, A2, A3

excellente

A, A-

excellente

 

3

A+, A, A-

bonne

Baa1, Baa2, Baa3

bonne

B++, B+

très bonne

 

4

BBB+, BBB, BBB-

suffisante

Ba1, Ba2, Ba3

adéquate

 
 

Faible sécurité financière

5

BB+, BB, BB-

peut-être suffisante

B1, B2, B3

moyenne

B, B-

satisfaisante

 

6

B+, B, B-

vulnérable

Caa

faible

C++, C+

juste suffisante

 

7

CCC

extrêmement vulnérable

 

très faible

C, C-

tangente

 

8

R, (U,S)

intervention

Ca

extrêmement faible

D

très vulnérable

 

9

 

nécessaire

C

la plus basse

E, F

sous contrôle de l'Etat/en liquidation

 

10

 
 
 
 

NA 1-10 4

note non attribuée

1. Les lettres suivies d'un + ou d'un - (S&P's) ou des chiffres 1, 2, 3 (Moody's) ne constituent pas des catégories de notation distinctes mais indiquent si une compagnie se situe dans le haut, le milieu ou le bas du classement d'une catégorie.

2. Outre ces symboles de notation, Best's utilise également des coefficients de pondération qui se présentent sous la forme de lettres et fournissent des informations supplémentaires sur la notation effectuée.

3. Les lettres U et S sont utilisées uniquement dans le cas de notation ISI 107( * ) .

4. Les chiffres 1 à 10 indiquent pour quelle raison aucune note n'a été attribuée.

Source : Sigma n° 7/95.

On remarquera cependant qu'il existe un dénominateur commun entre les différentes agences qui consiste dans la répartition générale des catégories de notes en deux classes générales :

- forte sécurité financière ( secure )

- faible sécurité financière ( vulnerable ).

Au-delà de cette difficulté de lecture et de comparaison, on peut observer des divergences importantes (voir graphique 14) en se reportant au graphique ci-dessous, qui montre la répartition des notes attribuées par Standard & Poor's, Best et Moody's pour 186 assureurs américains des branches non-vie évalués par les trois agences (échelle de 1 à 6 en abscisse tirée du tableau précédent).

Graphique 14
Divergences importantes entre les notes attribuées
par chacune des agences

Nombre de compagnies



Etat fin décembre 1994.

On observe que :

- A.M.Best met nettement plus de compagnies dans le sommet du classement que Moody's et Standard & Poor's ;

- Moody's est l'agence la plus réticente à accorder la meilleure note ;

- un certain nombre de compagnies sont jugées vulnérables par Standard & Poor's : il s'agit de notations dites de " qualified solvency " ou notations involontaires (pour lesquelles trois catégories de notes sont utilisées seulement : BBBq, BBq, Bq).
En dépit de ces difficultés de lecture et de ces divergences d'interprétation, on peut observer dans les graphiques ci-après une tendance commune à la diminution du nombre d'assureurs notés AAA, ce qui traduit une fragilité accrue de ce secteur, à l'instar du secteur bancaire, quoique moindre (voir graphiques 15 et 16).

Le nombre d'assureurs notés " AAA " a diminué ces dernières années.

Graphique 15

Notes A.M. Best de 1987 à 1994

Nombre d'assureurs (%)



Source : Best's Review P/C, plusieurs années.

Graphique 16

Notes Standard & Poor's

Nombre d'assureurs (%)



Notations CPA uniquement, évaluation des groupes

Source : Michael Wetton Consultancy.

D'après Sigma, n° 7/1995.


Nous ne disposons malheureusement pas en l'état d'une comparaison des notations des compagnies d'assurance par pays.

En ce qui concerne la pertinence des notations, il est difficile de porter un jugement global comme il ressort de l'étude Sigma (n° 7/1995). On jugera d'après le schéma ci-après de l'évolution des notes accordées par Best's à des assureurs déclarés par la suite en cessation de paiements. Il en ressort que la plupart de ces compagnies se sont vu, soit retirer la note qu'elles avaient, soit refuser purement et simplement l'attribution d'une note (catégorie NA, note non attribuée, voir graphique comparatif des notations ci-dessus).

Graphique 17

Evolution de la notation des assureurs devenus insolvables

Nombre de compagnies



Total de 372 compagnies.

Source : A.M. Best, Best's Insolvency Study.

P/C-Insurers 1969-1990.

2. Le taux de défaillance s'est accru au niveau mondial depuis 1978.

Depuis 1978, tous pays confondus, 648 compagnies d'assurance ont été défaillantes dans les branches non-vie, avec un sommet en 1992. Des années 1970 au début des années 1990, le nombre de cas d'insolvabilité enregistrés a eu tendance à augmenter chaque année. Un net recul a cependant été observé en 1994, mais Sigma estime qu'il est trop tôt pour parler d'un retournement de tendance.

Les deux tiers des faillites enregistrées de 1978 à 1994 concernent des compagnies américaines. En Europe, les compagnies britanniques ont été les plus nombreuses à tomber en déconfiture, dans le cadre de la déréglementation que le Royaume-Uni a mis en place le premier.

Le taux de défaillance des assurances aux Etats-Unis est compris entre 0,5 % et 1,5 % chaque année, une tendance à l'augmentation pouvant être observée de la fin des années 1970 au début des années 1990. En Grande-Bretagne, la moyenne se situe autour de 0,5 % l'an, l'année 1992 faisant figure d'exception avec un taux supérieur à 2 % (en rapport avec les difficultés du Lloyd's et des compagnies de réassurance de 1988 à 1991) 108( * ) .

Il est à noter selon une étude effectuée par l'agence A. M. Best en 1991, que 80 % des compagnies d'assurances américaines devenues insolvables n'avaient enregistré aucune progression du volume des primes (augmentation inférieure à 5 % par an) au cours des trois années précédant l'insolvabilité, ou qu'elles avaient, au contraire, vu croître ce volume dans des proportions exceptionnelles (+ 25 % par an) 109( * ) . L'évolution du marché londonien confirme cette observation puisque le volume des primes a fortement augmenté en 1991 et en 1992.

Graphique 18

Augmentation mondiale du nombre de faillites dans l'assurance

Nombre de faillites

Source : Moody's, Standard & Poor's, A.M. Best.

E. SOLVABILITÉ DES ENTREPRISES D'ASSURANCE FAISANT PARTIE D'UN GROUPE D'ASSURANCE OU D'UN CONGLOMÉRAT FINANCIER

Nombreuses sont les entreprises d'assurance qui sont intégrées au sein d'entités économiques plus larges : groupe 110( * ) ou constellations d'entreprises des secteurs financiers ou industriels, appelés conglomérats. Si l'on prend en compte cette réalité économique qui n'a pas de véritable traduction juridique, le recensement des entreprises d'assurance tel qu'il est effectué par la Commission de contrôle des assurances (et repris dans le chapitre Premier, 6.1.1) se trouve sérieusement affecté : on peut considérer, à partir d'approches réalisées sur certains segments de marché seulement, qu'un quart environ du nombre total d'entreprises d'assurance correspond à des entités économiques réellement distinctes, soit sur près de 500 entreprises recensées à fin 1996, 150 entités d'assurances à peu près.

En allant plus loin et en s'en tenant aux grands groupes ou grands regroupements, on peut considérer que le marché français est partagé dans l'assurance des biens et des responsabilités entre quatre grands pôles :

- AXA-UAP,

- ALLIANZ-AGF-GPA

- Groupama-GAN

- les assurances mutuelles du GEMA, chaque pôle déterminant une part de marché de l'ordre de 15 à 16 %, tous segments (non vie) confondus.

Les quatre pôles représentent donc 64 %, les parts de marché unitaires des autres acteurs étant toutes inférieures à 9 % (sauf à regrouper par exemple les assurances mutuelles de la ROAM, avec la délicate question du côté où il faut classer la GMF).

Une surveillance prudentielle adaptée est nécessaire pour le suivi et le contrôle des groupes d'assurance et des conglomérats financiers, puisque, dans ces diverses situations, les raisonnements économiques et prudentiels appliqués aux entreprises en solo n'ont qu'une portée très limitée. Les différents acteurs ne sont pas à " égalité de chances " en matière de leviers de gestion et certaines pratiques financières peuvent permettre, en toute licéité aux plus " audacieux " de contourner certaines exigences prudentielles imposées au niveau " solo " de chaque entreprise d'assurance, sans que les autorités de contrôle n'aient de pouvoirs effectifs pour sanctionner les abus :

- capitaux utilisés plusieurs fois pour satisfaire à plusieurs niveaux de filiales au sein du groupe, aux exigences de fonds propres, et ne pouvant pas être appelés en cas de défaillance d'une des filiales (phénomène de double ou de multiple emploi de fonds propres) ;

- prêts d'une holding intermédiaires (non contrôlée) ou d'une entreprise de réassurance du groupe à des entreprises d'assurance du groupe, servant à financer leur participation dans leurs filiales d'assurance (autre forme d'effet de levier en capital) :

- transactions intra-groupe effectuées à des conditions préférentielles, etc.
Cette surveillance dite " solo plus " consiste à autoriser les autorités de contrôle à pratiquer, sur les entreprises d'assurance faisant partie d'un groupe, un test prudentiel supplémentaire appelé " calcul de solvabilité ajustée ", afin de disposer d'informations plus détaillées sur les opérations intra-groupe et d'éviter le double emploi des fonds propres.

Sur les conglomérats financiers, la Commission européenne avait pris une première initiative en faisant adopter en 1993 une directive dite " post BCCI ", suite au scandale financier de la banque du même nom. Ce texte a notamment élargi, pour les autorités de controle, les possibilités d'accès aux informations sur les différentes entreprises d'un même conglomérat et a imposé certaines obligations d'information de ces dernières à l'égard de leurs commissaires aux comptes.

Elle a ensuite donné priorité à son initiative sur les groupes d'assurance, les réflexions sur les conglomérats financiers se reportant dans d'autres forums, comme le forum tripartite du groupe de Bâle, qui réunit les autorités prudentielles des trois secteurs de services financiers des pays membres du G10.

De ces réflexions sont issues à ce stade des recommandations aux autorités de contrôle pour aborder la surveillance des conglomérats, qui techniquement sont analogues à celles sur les groupes d'assurance déjà décrites.

Il semble toujours dans les intentions de la Commission européenne de faire adopter une directive relative aux conglomérats financiers, dans la foulée de l'adoption de la directive des groupes d'assurance.

* *

*

Au total et en conclusion de ce chapitre, les analyses quantitatives et financières qui émaillent nécessairement les développements et les dires d'experts qui les colorent ou les complètent par une approche plus qualitative et expérimentale, font ressortir les forces et les faiblesses suivantes de l'assurance française dans le contexte de compétition européenne renforcée et de course internationale à la prédominance sur le marché de l'assurance entre les grands groupes d'assurance-réassurance.

Au crédit de l'assurance française, à la veille du passage à la monnaie unique, il convient de mettre :

- le niveau élevé de satisfaction du consommateur français d'assurance (même si par définition le consommateur national est incapable de comparer) qui correspond à une qualité objective de service rendu par l'assurance française et, jusqu'à présent, à un très bon rapport qualité-prix (délai de règlement des sinistres, étendue des garanties, niveau des primes, grande diversité de produits). Il renvoie aussi à un haut niveau de protection légale du consommateur. Le consommateur français d'assurances est certainement le principal bénéficiaire de la répartition de la valeur ajoutée, au lieu de l'actionnaire dans le monde anglo-saxon ;

- la diversité des acteurs de l'assurance qui a non seulement permis que la concurrence, largement animée à l'origine par les mutuelles d'assurance, aujourd'hui relayées par les bancassureurs, joue au profit du consommateur et fournit la meilleure protection naturelle contre des prises de parts de marché excessives par des acteurs européens ou internationaux dans le domaine des risques de masse ;

- la modernisation des relations entre agents généraux et sociétés d'assurance et la restructuration plus avancée en France de la profession des mandataires exclusifs ;

- la qualité de gestion et de " l'après-vente " ainsi que le sens de la relation dans la durée de l'industrie de l'assurance mutuelle et commerciale française et de ses intermédiaires (par opposition à une assurance anglo-saxonne très performante dans le marketing et la vente) même si parfois un manque de spécialisation aboutit à une duplication des tâches et à un chargement global alourdi ;

- une capacité industrielle et commerciale à prendre des parts de marché sur les autres grands marchés européens et notamment sur le marché allemand, du moins dans le domaine des risques de masse où la technologie française est particulièrement en pointe ;

- un bon niveau de provisionnement de ses engagements et donc de solvabilité effective, notamment par rapport à ses concurrentes continentales, qui a valu à l'assurance française un taux de défaillance extrêment bas, notamment par rapport à ses concurrentes anglo-saxonnes ;

- le bon positionnement de l'assurance française dans ses diverses facettes dans la branche complémentaire de l'assistance touristique où elle a joué un rôle de pionnier ;

- une restructuration sociale qui s'est faite sans drame, même si elle n'est pas encore achevée à ce jour.
A son débit, à une exception bien connue près, il convient de mettre :
- une situation financière moyenne relativement à la concurrence anglo-saxonne et notamment une faible rentabilité (liée à la fois au niveau très concurrentiel des tarifs et à des inefficacités de gestion) se répercutant sur la capacité d'assurance des groupes français dans le grand risque et se traduisant par le fait que l'assurance commerciale française sur ce segment est plutôt objet que sujet dans la restructuration financière de l'industrie européenne et mondiale de l'assurance ;

- une éviction lente des marchés du risque industriel et des grands comptes, renforcée par le rachat des grands courtiers français par les grands cabinets de courtage anglo-saxons qui accélère la " délocalisation " de la gestion des risques de l'entreprise, et les difficultés réglementaires et fiscales diverses, comme celles en particulier rencontrées par les groupes industriels français pour l'implantation en France de leurs filiales " captives " de réassurance ;

- un positionnement international sous-optimal au regard des marchés où la densité et la pénétration de l'assurance sont les plus élevées (Europe du Nord notamment) et une insuffisante internationalisation de bien des acteurs ;

- une insuffisante spécialisation des acteurs liée à une tradition de surbordination de la logique de rentabilité à la logique de la part de marché.

ANNEXES

Annexe 1 : Nature des conglomérats : domination bancaire ou financière

Annexe 2 : Rentabilité comparée des sociétés d'assurance dans six pays

Annexe 3 : Evolution des revenus financiers et des plus-values réalisées

Annexe 4 : Nombre de contrats d'assurance-vie par pays et évolution en %

Annexe 5 : Bilan simplifié d'une société d'assurance (vie ou non-vie)

Annexe 6 : Le contrôle de solvabilité dans l'Union européenne et aux Etats-Unis

Annexe 7 : La protection des assurés en Europe

Annexe 8 : Résultats des membres de l'Association des réassureurs français en 1997

ANNEXE 1

NATURE DES CONGLOMÉRATS :
DOMINATION BANCAIRE OU FINANCIÈRE








Nature des conglomérats en Europe

 

Banques, entreprises d'investissement détenues par une compagnie d'assurance.

Compagnies d'assurance détenues par une banque ou une entreprise d'investissement.

Banques, entreprises d'investissement et compagnies d'assurance filiales d'une entreprise mère commune

Autres

Belgique

Il n'existe pas de statistiques belges sur le nombre de conglomérats financiers. L'OCA se préoccupe d'en recueillir.

Allemagne

environ 5

environ 4

environ 2

Nombre exact inconnu

Danemark

1 (Alm. Brand)

2 (den Danske Bank, Bikuben)

0

3 (Baltica, Hafnia, Top)

Espagne

Il existe 28 groupes ou conglomérats.

 

Groupe Mapfre (2è en Espagne par encaissement des primes et fonds propres).

7 : BBV, Central-Hispano, La Caixa, Banesto, Santander, Argentaria et Caixa de Catalana + Caser (entreprise mère = une compagnie d'assurance contrôlée par des caisses d'épargne)

 
 

France

12 banques détenues par 9 groupes d'assurances.

32 sociétés d'assurance détenues par 12 groupes bancaires.

3 groupes d'assurance détenus par des sociétés-mères détenant d'autres participations financières ou industrielles.

Grèce

1

12 compagnies d'assurance détenues par 6 banques.

3 compagnies d'assurance détenues par un holding.

information non disponible.

Grande-Bretagne

17 groupes où les activités principales sont des activités d'assurance.

26 groupes où les activités principales sont de type bancaire.

Les entreprises d'assurance et les banques ne sont, en général, jamais membres d'un groupe contenant également des entreprises industrielles.

Une exception : BAT, qui contrôle Eagle Star et Allied Dunbar.

De même est-il rare qu'un groupe comprenne une société d'assurance et une société de courtage. Il existe cependant des exceptions notables.

Italie

8 ou 9

une vingtaine

 
 

Irlande

 

2

2

 

Luxembourg

D'une manière générale, il existe 4 conglomérats (banques/assurances) répondant au critère de participation retenu.

NB : Ne sont pas visés les conglomérats étrangers comprenant des filiales luxembourgeoises de compagnies d'assurances étrangères.

Pays-Bas

7 groupes financiers mixtes principalement engagés dans les activités d'assurance.

2 groupes financiers mixtes principalement engagés dans le secteur bancaire.

3 groupes financiers mixtes généraux.

 

Portugal

1 Bonança - 19,17 % - VSP (banque).

12

0

1 cas où un groupe bancaire détient des participations dans 3 sociétés d'assurances

et 2 sociétés de courtage (mais les relations d'actionnariat ne sont pas totalement " visibles ").

Source : CEA 1993

Importance des conglomérats financiers
(en % des encaissements totaux en assurance)

PAYS DE LA CEE

Belgique

Allemagne

Danemark

Part de marché calculée en encaissement en affaires directes pour l'ensemble des groupes constitués par ABB, AG, Assubel, CGER, La Patriotique, SMAP et Royale Belge, plus de 50 %

Entreprises détenant des participations financières dans des banques ou des entreprises d'assurance :

• participation d'au moins 10 % : 38 %

• participation d'au moins 25 % : 12 %

• participation d'au moins 50 % : 8 %

Assurance-vie : 37 %

Assurance non-vie : 52 %

Espagne

France

Royaume-Uni

Cinq des groupes dont la société mère est une banque (Caixa, BBV, Banesto, Central-Hispano, Caser) ont plus de 25 % du chiffre d'affaire total des 50 compagnies d'assurance les plus importantes. Les 28 groupes ont un montant total de fonds propres de 330.736 millions de Pesetas, soit 75 % du total du marché. Le pourcentage est semblable en ce qui concerne les encaissements de primes.

• Banques, entreprises d'investissement détenues par une compagnie d'assurance : 43 %

• Compagnies d'assurance détenues par une banque ou une entreprise d'investissement : 13 % (24 % du marché vie)

• Banques, entreprises d'investissement et compagnie d'assurance filiales d'une entreprise mère commune : 6 %.
Total : 62 %

Assurance-vie : 15 %

Grèce

Italie

Irlande

61 %

50 %

Assurance-vie : 60 %

Assurance non-vie : 33 %

Luxembourg

Pays-Bas

Portugal

Les deux plus grands assureurs du marché appartiennent à un conglomérat financier

• Groupes financiers mixtes généraux : 21,9 %

• Groupes financiers mixtes principalement engagés dans des activités d'assurance : 38,8 %

• Groupes financiers mixtes principalement engagés dans le secteur bancaire : 7,6 %
Total : 68,3 %

Sociétés d'assurances détenues par une banque ou une entreprise d'investissement : 49,92 %

Pays de l'AELE

Norvège

Suède

Finlande

Négligeable

25 % du marché de l'assurance

0 %

Source : CEA, 1993.

ANNEXE 2
RENTABILITÉ COMPARÉE
DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCE DANS SIX PAYS

1 - Résultats techniques en % des primes

Année

Etats-Unis

Japon

Allemagne

France

Grande-Bretagne

Suisse

1975

-8,83

-5,70

1,80

-7,91

-3,77

-6,04

1976

-3,83

-3,39

0,20

-8,13

-2,42

-6,64

1977

1,61

-2,55

1,10

-7,68

-0,77

-6,82

1978

1,65

-0,57

0,50

-8,79

-0,49

-6,58

1979

-1,50

-0,75

1,00

-10,09

-2,88

-6,43

1980

-3,55

0,59

0,30

-12,54

-4,17

-7,73

1981

-6,45

-0,77

-0,40

-14,59

-6,33

-7,66

1982

-10,08

1,16

-0,20

-14,70

-11,27

-10,53

1983

-12,43

1,31

0,60

-13,01

-11,18

-10,17

1984

-18,49

1,75

-0,20

-12,19

-15,54

-10,65

1985

-18,97

2,32

1,20

-12,51

-14,00

-11,57

1986

-9,99

4,08

0,60

-12,25

-7,47

-8,34

1987

-5,62

4,55

0,80

-11,18

-5,74

-7,31

1988

-5,90

4,21

2,10

-10,12

-2,59

-8,44

1989

-10,21

1,13

1,90

-9,60

-7,80

-7,48

1990

-10,20

0,10

1,20

-12,72

-19,43

-7,78

1991

-9,40

-1,40

-1,10

-15,49

-25,53

-10,74

1992

-15,44

-0,10

-2,20

-15,70

-15,65

-11,71

Moyenne

-8,20

0,33

0,51

-11,62

-8,72

-8,48

Volatilité

5,79

2,58

1,05

2,51

6,82

1,84

Moy/Vol.

-1,42

0,13

0,49

-4,62

-1,28

-4,61

Source : Sigma / Suisse de Réassurances 1/95.

Résultats techniques de 1993 à 1998

1993

 
 

-1,6

-3,6

 
 

1994

 
 

2,9

-1,1

 
 

1995

 
 

3,8

1,0

 
 

1996

 
 

-0,1

 
 
 

1997

 
 

P -2,3

 
 
 

1998

 
 

-1,3

 
 
 

Source : Sigma n° 6/1997.

2 - Produit des placements en % des primes

Année

Etats-Unis

Japon

Allemagne

France

Grande-Bretagne

Suisse

1975

8,97

12,46

9,90

10,61

10,01

8,40

1976

8,91

11,05

10,80

10,71

10,44

9,84

1977

8,92

9,66

9,40

11,08

10,65

9,32

1978

9,33

9,03

7,80

11,47

11,74

9,15

1979

11,02

8,82

7,40

11,95

13,06

9,13

1980

12,36

11,21

6,80

12,98

13,88

9,94

1981

13,86

11,85

7,60

13,95

14,87

10,02

1982

15,17

6,82

9,10

14,35

15,69

13,38

1983

16,87

6,71

8,90

14,75

15,67

12,99

1984

18,02

7,30

8,70

14,91

14,96

13,34

1985

18,74

6,48

9,80

15,04

14,01

14,43

1986

17,31

5,30

9,50

14,65

13,36

12,20

1987

14,44

6,28

7,90

14,04

13,34

10,41

1988

15,23

7,73

8,90

13,79

13,29

12,67

1989

17,35

9,59

9,40

13,70

14,04

11,19

1990

16,60

9,30

8,20

12,57

13,64

11,57

1991

17,60

7,90

7,90

11,98

13,54

14,46

1992

19,30

5,20

9,01

11,60

12,99

15,47

Moyenne

14,44

8,48

8,72

13,01

13,29

11,55

Volatilité

3,55

2,15

1,00

1,49

1,61

2,08

Moy/Vol.

4,07

3,95

8,76

8,75

8,24

5,54

Source : Sigma / Suisse de Réassurances 1/95.

3 - Rendement global en % des primes (rendement sur C.A.)

Année

Etats-Unis

Japon

Allemagne

France

Grande-Bretagne

Suisse

1975

1,29

4,83

6,80

2,70

6,24

2,36

1976

4,82

5,02

6,30

2,57

8,03

3,20

1977

9,06

3,95

5,50

3,40

9,87

2,50

1978

9,21

4,58

3,90

2,68

11,25

2,57

1979

8,49

4,05

4,50

1,87

10,19

2,70

1980

8,15

5,16

3,80

0,44

9,71

2,21

1981

7,37

5,12

3,80

-0,65

8,55

2,36

1982

5,75

3,77

4,80

-0,36

4,42

2,84

1983

5,56

3,88

4,60

1,74

4,49

2,83

1984

1,02

3,89

4,10

2,72

-0,57

2,69

1985

1,30

3,80

5,60

2,52

0,01

2,86

1986

7,67

4,23

4,80

2,40

5,89

3,86

1987

7,05

5,56

4,00

2,87

7,60

3,10

1988

7,48

5,91

5,50

3,67

10,70

4,23

1989

5,79

5,67

6,20

4,00

6,24

3,71

1990

5,01

4,40

5,50

-0,16

-5,79

3,80

1991

6,18

6,00

4,30

-3,50

-11,99

3,70

1992

3,17

2,20

5,80

-4,10

-2,67

3,76

Moyenne

5,80

4,56

4,99

1,38

4,56

3,07

Volatilité

2,55

0,93

0,91

2,26

6,21

0,60

Moy/Vol.

2,27

4,91

5,47

0,61

0,74

5,09

Source : Sigma / Suisse de Réassurances 1/95.

Rendement global en % des primes de 1993 à 1998

1993

8,4

1,7

 

0,1

5,5

3,9

1994

4,5

1,4

 

-0,0

11,3

3,6

1995

8,1

1,4

 

2,1

11,8

4,7

1996

9,2

0,9

 
 
 

nd

1997

8,7

0,8

 
 
 

nd

1998

7,6

1,4

 
 

nd

nd

Source : Sigma n° 6/1997.

ANNEXE 3

ÉVOLUTION DES REVENUS FINANCIERS
ET DES PLUS-VALUES RÉALISÉES

Sociétés françaises d'assurances vie

et de capitalisation


(en milliards de francs)



Source : FFSA.

Evolution des revenus financiers et des plus-values réalisées

Sociétés françaises d'assurances de dommages


(en milliards de francs)



Source : FFSA.

Solvabilité des sociétés vie

Source : FFSA.

Solvabilité des sociétés dommages

Source : FFSA.

ANNEXE 4

NOMBRE DE CONTRATS D'ASSURANCE-VIE
PAR PAYS ET ÉVOLUTION EN % DE 1993 À 1996111( * )

Nombre de nouveaux contrats souscrits

 

1993

1994

1995

1996

 

Total

Année antér.

Total

Année antér.

Total

Année antér.

Total

Année antér.

Allemagne

6 664 536

- 5,9 %

6 235 491

- 6,8 %

4 363 223

- 5,9 %

n.c.

 

France

4 754 200

 

5 047 455

 

5 695 918

 

3 851 387

 

Royaume-Uni

7 838 000

 

6 713 000

 

5 356 311

 

5 433 138

 

Italie

1 835 356

1,4 %

1 941 163

4,1 %

2 178 653

11,9 %

2 083 650

2,5 %

Pays-Bas

1 244 283

- 1,5 %

1 361 602

9,7 %

1 434 568

7,2 %

n.c.

 

ANNEXE 5


BILAN SIMPLIFIÉ D'UNE SOCIÉTÉ D'ASSURANCE112( * )

Bilan simplifié d'une société d'assurance (vie ou non-vie) 113( * )

Actif Passif

Provisions techniques nettes ou réserves mathématiques

Investissements
détenus en couverture
des provisions
techniques nettes

Recouvrables auprès des réassureurs

Investissements détenus pour des réassureurs ou investissements détenus par des réassureurs

Investis-

sements

Réserves d'égalisation

Investissements détenus en couverture des réserves d'égalisation

totaux

Passif à court terme

Investissements détenus en couverture des fonds propres

Capital minimum exigé

Actifs à court terme

Fonds propres libres

Bureaux et autres actifs immobilisés

Source : OCDE

ANNEXE 6


LE CONTRÔLE DE SOLVABILITÉ
DANS L'UNION EUROPÉENNE
ET AUX ETATS-UNIS

 

Union européenne

Etats-Unis

Principes

Principales dispositions financières des Etats membres harmonisées sur la base de normes minimales.

Contrôle financier effectué par l'Etat d'origine sur l'ensemble des activités. Reconnaissance mutuelle des systèmes de contrôle.

Principales dispositions financières harmonisées sur la base des normes minimales de la NAIC.

Contrôle financier effectué par chacun des Etats et limité à leur territoire respectif.

Fonds propres

Calculés en trois niveaux :

Formule du risk based capital (= norme de la NAIC, agréée par la plupart des Etats).

 

Marge de solvabilité : fonds propres nécessaires calculés par rapport aux recettes de primes annuelles (indice de primes) ou par rapport à la charge de sinistres moyenne des trois derniers exercices 1 (indice de sinistres). Le résultat retenu est le plus élevé des deux. Le calcul des primes et sinistres à prendre en compte, ainsi que le calcul des fonds propres effectifs sont réglementés très précisément.

Indice de primes :

18 % ou 16 % 2 des primes brutes

sinistres nets 3

x -----------------

sinistres bruts

Indice de sinistres :

26 % ou 23 % 4 des sinistres nets 3

Fonds de garantie : 1/3 de la marge de solvabilité

Fonds minimal de garantie : capital minimal, exprimé en ÉCU fixé dans l'absolu pour chaque branche.

Si les fonds propres tombent en dessous du minimum fixé, intervention des autorités à chaque niveau.

Calcul des fonds propres minimaux en fonction des catégories de risques suivantes :

- risque de placement (participations, actions, obligations)

- risque de crédit (réassurance, autres créances)

- risque de souscription (sinistralité, provisions techniques)

- risques hors bilan (croissance, risques sans effet sur le bilan)

capital pour risque = R0 + (R1 2 + ... + R5 2 )

R0 : Risk based Capital (RBC) pour les investissements dans les filiales

R1 à R5 : RBC pour chaque catégorie de risques après correction pour covariance

 
 

4 niveaux d'intervention plus ou moins coercitive des autorités de contrôle.

Provisions techniques

Directives de placement pour les provisions techniques :

- principe de congruence

- principe de diversification

- principe de localisation

Réglementation indirecte par le biais des dispositions du RCB.

1 Sept ans pour les risques suivants : crédit, tempête, grêle, gel.

2 18 % pour les recettes de primes jusqu'à 10 M ECU et 16 % pour les recettes de primes au-delà de cette sommes.

3 Le rapport sinistres nets/sinistres bruts ne doit pas être inférieur à 50 %.

4 26 % pour les sinistres bruts jusqu'à 7 M ECU et 23 % pour les sinistres bruts dépassant cette somme.

Source : Suisse de Ré, Sigma n° 7/1995.

ANNEXE 7

LA PROTECTION DES ASSURÉS EN EUROPE

1. Défaillance des sociétés d'assurance-vie en Europe 114( * )

 

France

Allemagne

Grande-Bretagne

Cantonnement juridique des actifs lors de la liquidation.

Non - L'actif est fongible et forme une unité juridique (exception contrats d'épargne retraite L 441.1).

Oui - Une partie des actifs est juridiquement cantonnée au bénéfice des assurés.

Oui - Cantonnement juridique (ring fencing). Le fonds des actionnaires est juridiquement distinct du fonds des assurés.

Décision de lancer les procédures de liquidation.

Seules les autorités de contrôle peuvent lancer les procédures de liquidation.

Uniquement les autorités de contrôle (BAV).

Les parties intéressées y compris des assurés peuvent demander en justice que la liquidation soit engagée.

Privilège des assurés

Oui - Les assurés sont remboursés avant la plupart des autres créanciers (sauf frais de liquidation, salariés, Etat et Sécurité sociale).

Oui.

La protection est donnée par le cantonnement juridique des actifs et par le fonds de garantie (voir ci-dessous).

Fonds de garantie pour rembourser les assurés ou mécanisme externe de support.

Non.

Non.

Un fonds de garantie (Policyholders Protection Board - loi de 1975 amendée en 1997) protège les assurés vie à hauteur de 90 % des engagements de l'assureur à leur égard.

2. L'expérience britannique d'un fonds de garantie des sociétés d'assurance 115( * )

Suite aux critiques du public émises après la défaillance de plusieurs sociétés d'assurance au début des années 1970, le gouvernement britannique introduisit en 1975 un mécanisme juridique destiné à offrir une protection aux assurés des entreprises d'assurance défaillantes. Ce dispositif fut mis en place dans un contexte de détérioration de la situation macro-économique et peu après la défaillance d'un grand assureur vie britannique, Nation Life.

Le texte législatif de 1975 (" Policyholders Protection Act " 1975) conduisit à la création du Policyholders Protection Board, fonds de garantie devant assurer la mise en place des garanties. Ce fonds est une entité indépendante dont les membres incluent des représentants des entreprises d'assurance et des consommateurs. L'une de ses principales fonctions est d'assister ou de protéger les assurés lésés par l'incapacité d'une entreprise d'assurance opérant au Royaume-Uni à remplir ses engagements. Les assurés vie de même que certains assurés non-vie (personnes physiques en particulier) reçoivent la protection du fonds. Le texte de 1975 autorise le fonds à prélever sur les entreprises d'assurance britanniques agréées les sommes nécessaires au remboursement des sinistres et à la couverture de ses propres frais de fonctionnement.

En ce qui concerne la protection des assurés vie, le fonds a -en termes généraux- un devoir de veiller à ce que soit payée à chaque assuré protégé une somme égale à 90 % des engagements britanniques d'une entreprise d'assurance-vie en liquidation. Une telle protection doit être assurée en recherchant en priorité le transfert des contrats en cours de l'assureur défaillant vers un autre assureur, ou le remplacement de ces contrats par des contrats similaires émis par un autre assureur, de telle sorte que les assurés protégés reçoivent 90 % des bénéfices futurs attendus de leurs contrats. S'il est incapable d'organiser un tel transfert, le fonds a pour devoir de payer 90 % de la valeur du contrat à l'assuré, ou 90 % des prestations devenues exigibles après le prononcé de la liquidation. Il n'y a pas de limite au montant que le fonds peut verser aux assurés.

Au début des années 1990, à la suite de plusieurs défaillances d'entreprises d'assurance non-vie, les observateurs comprirent que le texte de 1975 offrait une couverture substantiellement plus large qu'initialement attendu. Divers changements furent donc adoptés au Parlement en 1997 de manière à réduire la couverture géographique de la garantie et à moderniser certaines clauses relatives au traitement des défaillances d'assureurs non-vie. Le principal effet de ces modifications aura été de réduire le coût potentiel du dispositif pesant sur les assureurs britanniques.

En pratique, le fonds de garantie n'est utilisé en assurance-vie qu'en dernier recours dans la mesure où le dispositif prévoit que le transfert des polices doit être recherché en priorité, et pour cette raison la plupart des défaillances d'entreprises d'assurance-vie ont été résolues en organisant la reprise des engagements par d'autres assureurs. Depuis 1975, le fonds de garantie a assisté les assurés de 5 assureurs vie insolvables. En assurance non-vie, le coût pour le fonds de garantie a été nettement plus élevé, les assurés de 23 entreprises non-vie ayant fait l'objet d'une protection du fonds 116( * ) .

Fonds de garantie britannique de l'assurance
(en milliers de livres sterling)

Clôture de l'exercice : 31 mars

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Assurance-vie (Long Term Business) (Les assurés de 5 sociétés ont été assistés depuis 1975)

Versements aux assurés

47

87

74

161

278

191

Contributions des sociétés d'assurance

0

0

0

4 459

85

0

Encours du fonds de garantie

284

218

151

4 443

4 435

4 397

Assurance non-vie (General Business) (Les assurés de 23 sociétés ont été assistés depuis 1975)*

Versements aux assurés

2

1 165

4 564

126 409

62 001

32 572

Contributions des sociétés d'assurance

37 859

80 352

174 176

48 254

791

0

Encours du fonds de garantie

37 579

117 729

283 940

221 877

170 967

150 957

* Y compris les 5 filiales du groupe London United Investments (sociétés dites KWELM)

Source : rapports annuels du Policyholders Protection Board.

3. Europavie : que s'est-il passé ?

Bien que le code des assurances détaille la réglementation applicable en cas d'insolvabilité d'une société d'assurance-vie, ce n'est que maintenant que cette procédure est testée dans son intégralité. En effet, la CCA avait jusqu'à présent réussi à faire reprendre les engagements des assureurs en difficulté par d'autres entreprises d'assurance, évitant ainsi le recours à la liquidation. La communauté des assureurs a par ailleurs souhaité éviter de ternir la réputation du secteur en laissant une entreprise être liquidée. Toutefois, des difficultés surviennent occasionnellement, l'un des cas les plus récents étant celui de Prévoyance Sociale Vie, une petite société victime de manoeuvres frauduleuses de certains intermédiaires et qui s'était retrouvée incapable de réunir les ressources financières lui permettant de faire face à ses pertes : le portefeuille de l'assureur fut repris par une autre entreprise en 1996 sans perte pour les assurés.

En décembre 1997, cependant, la CCA n'a pas été en mesure de trouver un repreneur pour Europavie, et a donc dû engager les procédures de liquidation à son encontre 117( * ) . Les difficultés de cette société sont décrites comme suit.

• Europavie fut créée en 1987 sous forme d'une société anonyme, avec pour objectif de vendre des contrats en unités de compte investis dans l'immobilier (contrats Acavi). Les contrats étaient vendus soit par l'intermédiaire de courtiers, soit directement par les salariés de la sociétés.

• Au début des années 1990, cette société d'assurance souffrit de difficultés importantes suite à la chute du prix des actifs immobiliers. Ayant octroyé des garanties de rendement élevées sur des contrats investis dans l'immobilier, Europavie ne fut pas en mesure d'honorer ses engagements. L'entreprise s'était aussi engagée dans des opérations coûteuses et risquées, comme l'octroi de cartes électroniques de paiement aux assurés qui permettaient de demander facilement le rachat d'une partie des fonds investis.

• L'entreprise fut rachetée en 1994 par la société française non-financière Thinet & Cie (engagée dans l'immobilier et diverses activités industrielles), et continua à promouvoir la vente de contrats Acavi. En décembre 1996, Europavie avait des provisions techniques brutes de 300 millions de francs et avait réussi à doubler en un an le montant des primes collectées, le portant à 104 millions de francs pour 1996, représentant cependant toujours un très faible pourcentage d'un marché total de 490,8 GF.

• En 1997, l'entreprise d'assurance avait déposé une portion de ses actifs dans une autre filiale de Thinet & Cie, la banque allemande BVH (Bank für Vermogensanlagen und Handel AG). Cependant, cette banque était dans une situation financière délicate qui conduisit l'autorité de contrôle bancaire allemande à la sanctionner fin août, propageant ses difficultés à l'ensemble du groupe Thinet.

Groupe Thinet - Structure simplifiée

Thinet & Cie


Mise en redressement judiciaire en novembre 1997

Franciaflex

(Activités industrielles)

En cours de cession

EUROPAVIE

Agrément retiré en décembre

1997

BVH

( Banque allemande )

Sanctionnée en août 1997

SCPI

Placements immobiliers

• Les problèmes affectant BVH touchèrent rapidement Thinet & Cie et Europavie. La première fut mise en redressement judiciaire mi-novembre, tandis que la CCA nommait un administrateur provisoire chez Europavie en remplacement de l'équipe dirigeante - décision très rare de la part de l'autorité de contrôle française -. Après avoir sans succès cherché un repreneur pour les contrats gérés par l'assureur, la CCA retira les agréments de l'entreprise d'assurance début décembre, déclenchant automatiquement par cette décision les procédures de liquidation.

Selon la presse, Europavie pourrait avoir perdu de l'ordre de 100 millions de francs sur un actif total de 350 millions. Les actifs et engagements de l'assureur sont à l'heure actuelle en cours d'évaluation par le liquidateur, mais il apparaît d'ores et déjà clair que, pour la première fois en France, les assurés pourraient perdre une partie de leur épargne suite à l'insolvabilité d'une entreprise d'assurance-vie.

Europavie - Décomposition du chiffre d'affaires

(en millions de francs)

 

Croissance

 

1995

1996

1995/1996

Capitalisation

(francs ou devises)

1,7

4,8

176,1 %

Assurance-vie individuelle (francs ou devises)

29,9

53,7

79,3 %

Contrats collectifs

(francs ou devises)

-

-

-

Contrats en unités de compte

10,6

45,5

329,9 %

Acceptations en réassurance

-

-

-

Dommages corporels

-

-

-

Total Europavie

42,2

103,9

146,0 %

Total du marché - Ensemble des assureurs vie et mixtes

443 100,0

490 800,0

10,8 %

Source : Annuaire FFSA/GAP, d'après les états réglementaires C1.

* *

*

Le Gouvernement français devrait prochainement proposer au Parlement de mettre en place les principes de constitution d'un système de garantie destiné à préserver les droits des assurés en cas de défaillance d'une entreprise d'assurance régie par le code des assurances, constatée par la Commission de contrôle compétente

Ultérieurement, le Parlement devrait être saisi de dispositions analogues pour les adhérents ou sociétaires d'institutions de prévoyance relevant du code de la Sécurité sociale ou du code rural ou d'une mutuelle du code de la mutualité. Chacune de ces catégories devrait ainsi disposer de son propre système de garantie fonctionnant dans des conditions analogues pour offrir à l'ensemble des assurés un même degré de protection.

Le développement tant financier que qualitatif des assurances de personnes (assurance-vie, opérations de capitalisation, accidents, maladie) au cours des dernières années, et la part déterminante qu'y jouent les entreprises d'assurance justifient d'engager aujourd'hui la démarche à partir des entreprises d'assurances régies par le code de l'assurance. Le champ de ce système de garantie de l'assuré se limiterait aux assurances de personnes.

Le dispositif devrait également s'accompagner d'un renforcement du caractère préventif des dispositions du code des assurances, en particulier en prévoyant une collaboration étroite entre le système de garantie et la Commission de contrôle des assurances.

ANNEXE 8

RÉSULTATS DES MEMBRES DE L'ASSOCIATION DES RÉASSUREURS FRANÇAIS EN 1997

Primes brutes émises
(en milliards de francs)

Source : Association des réassureurs français - 12 mai 1998.

Primes brutes émises
(en milliards de francs)

 

Primes brutes 1996

Primes brutes 1997

Principaux actionnaires

AXA RE

8 294

9 088

AXA

CCR

4 091

3 909

Etat français

Corifrance

153

136

Terra Nova

CTR

2 608

1 331

Fairfax

MCR

1 694

1 504

Groupe Monceau

MMA

3 305

3 778

Mutuelles du Mans

SAFR

3 998

3 985

Partner Re

SCOR

13 814

15 447

Diversifié

Sorema

3 882

3 519

Groupama

TOTAL

41 839

42 699

 

Source : Association des réassureurs français - 12 mai 1998.

Solvabilité des réassureurs français 1991-1997

(sauf Mutuelles du Mans)


(en milliards de francs)

Source : Association des réassureurs français - 12 mai 1998.

Evolution des résultats techniques 1990-1997
(en milliards de francs)

Source : Association des réassureurs français - 12 mai 1998.

Composition du résultat annuel 1991-1997

(en % des primes nettes)

 

Produits financiers

Frais généraux

Résultat technique net

Résultat net

Primes nettes

Résultat net en % primes nettes

1991

4 697

1 514

- 2 274

+ 537

23 170

2,32

1992

5 008

1 577

- 2 617

+ 374

25 844

1,45

1993

5 530

1 691

- 2 049

+ 1 085

31 839

3,41

1994

5 212

1 800

-482

+ 1 527

37 649

4,06

1995

4 722

2 054

+ 341

+ 1 744

38 726

4,50

1996

5 848

2 203

+ 117

+ 2 399

36 097

6,65

1997

7 637

2 531

+ 549

+ 3 319

36 526

9,08

 
 
 
 
 
 
 

Source : Association des réassureurs français - 12 mai 1998

.

CHAPITRE III


EURO, MARCHÉ UNIQUE EUROPÉEN
ET DÉRÈGLEMENTATION : QUELLES INFLUENCES SUR LE MARCHÉ FRANÇAIS DE L'ASSURANCE
SUR LA FRONTIÈRE
ASSURANCE PUBLIQUE/ASSURANCE PRIVÉE ?

IIIIl n'est pas facile de séparer les effets distincts que vont exercer sur le secteur européen de l'assurance (5 400 sociétés 118( * ) gérant quelques 400 millions de clients potentiels et réalisant en 1995 un chiffre d'affaire de 490 millions d'écus avec un million d'employés) et les marchés nationaux de l'assurance :

- la libre prestation de services ou la liberté d'établissement dans toute l'Europe à partir d'un siège social unique,

- la fin des autorisations préalables en matière de contrats d'assurance,

- et l'euro.

Mais il convient cependant de signaler liminairement ces influences diverses a priori et in abstracto pour essayer ultérieurement de savoir quels effets dominent et pourquoi.

La troisième vague des directives européennes exerce deux effets complémentaires mais bien distincts :

- un effet de libéralisation de l'accès aux marchés nationaux lié au principe de l'agrément unique et du contrôle par le pays d'origine des succursales installées dans un pays membre, effet de libéralisation de l'accès, ou encore effet de " marché unique " ou effet " d'ouverture des marchés nationaux " ;

- un " effet de déréglementation " du contrôle administratif du marché de l'assurance, lié au démantèlement du contrôle " matériel " de l'assurance (liberté des conditions contractuelles et tarifaires) et à sa limitation au principe du contrôle de la solvabilité 119( * ) .

L'euro en tant que tel, en favorisant largement la comparabilité des produits et des tarifs, tend à la constitution d'un marché intérieur européen véritable du point de vue du consommateur. Il exerce donc un effet, distinct et propre, d'intégration.

Ces trois causes exercent et exerceront des effets solidaires et peu visibles en tant que tel. A ce titre, ils peuvent se fondre dans un " effet de libéralisation " du marché européen de l'assurance, dont il s'agit ici d'anticiper les conséquences.

Avant d'examiner l'impact de la libéralisation des règles du marché de l'assurance sur l'évolution des marchés nationaux (2), il est utile de tirer les leçons des expériences de libéralisation dans le domaine de l'assurance aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne (1). On étudiera ensuite les effets du marché européen de l'assurance sur les pratiques de placement des sociétés d'assurance française et le segment français du marché financier européen, les effets de la réglementation française sur la gestion actif/passif et sur la performance de la gestion d'actif (3). Il restera à spécifier les avantages et les handicaps fiscaux dont peuvent bénéficier ou pâtir les sociétés d'assurance française dans ce nouveau contexte concurrentiel européen (4). Enfin, une attention particulière sera consacrée aux effets du marché unique de l'assurance sur la frontière public-privé dans le domaine de l'assurance-maladie (5).

I. LES LEÇONS PARADOXALES DE L'EXPÉRIENCE ANGLO-SAXONNE

Alors que le marché intérieur européen prend comme modèle implicite ou explicite les Etats-Unis, il est intéressant de regarder, comme Sigma l'a fait 120( * ) , les principales caractéristiques du marché américain de l'assurance. Il est également intéressant de regarder l'expérience britannique de " marché déréglementé " de l'assurance depuis l'adoption du principe " freedom with publicity ", d'après lequel les société d'assurance sont libres de déterminer leurs tarifs et leurs conditions en contrepartie d'obligations très strictes de publication des comptes (les informations destinées à l'organe de contrôle sont accessibles au public) 121( * ) pour examiner s'il ne constitue pas un marché de référence pour l'Europe, qui vient à son tour d'adopter un modèle de contrôle proche, limité au contrôle de solvabilité dans un sens large toutefois.

A. LES PARADOXES DU MARCHÉ AMÉRICAIN DE L'ASSURANCE

Le marché américain de l'assurance répond-il à la projection " intuitive " du marché européen de l'assurance : unifié, homogène, en permanente concentration, bénéficiant aux acteurs globaux de l'assurance dotés de la taille critique ?

Non, tout au contraire. D'après l'étude de Sigma qui s'applique à l'assurance non-vie dans l'ensemble des Etats-Unis depuis 1988 :

- il n'y a pas de véritable marché national de l'assurance, mais une mosaïque de marchés parcellaires soumis à des systèmes réglementaires disparates 122( * ) ;

- il existe toujours une forte disparité de structure de l'offre selon les Etats ;

- on observe une consolidation (par fusion absorption) qui ne se traduit pas par un renforcement de la concentration du marché, au contraire en raison de la création et du développement de nombreux compétiteurs ;

- les analyses de segmentation détaillées en fonction de la taille montrent que " l'avantage est aux petits ".

Cependant, le marché américain se pratique avec une langue unique et des données de base communes en matière de droit et de principes généraux du droit.

Au-delà de sa taille, le marché américain est le premier marché national dans le classement mondial de l'assurance, et de ses caractéristiques conjoncturelles : faible croissance (la croissance réelle du volume des primes depuis 1988 est de 0 % en moyenne) capacité excédentaire et concurrence sur les prix, les spécificités du marché américain de l'assurance et de son évolution méritent d'être mises en relief.

Sa structure dépend d'abord bien sûr de la répartition démographique. Trente-huit pour cent du volume des primes aux Etats-Unis sont concentrés dans les cinq plus grands Etats (Californie, New York, Texas, Floride, Pennsylvanie).

1. Une mosaïque de marchés parcellaires...

Sigma constate que " l'hétérogénéité " des marchés parcellaires, constitués en fonction de zones géographiques, de branches et de critères réglementaires, se répercute sur la structure de l'offre. Les différences structurelles qui affectent les marchés, l'intensité de la concurrence, et donc les tarifs pratiqués, se reflètent également au niveau des résultats mesurés " en rendement moyen du marché dans chacun des Etats ", celui-ci va de 0 % à plus de 12 % selon les Etats 123( * ) .

2. Une concentration des marchés très variable suivant les Etats ...

On pense généralement que la concentration des offreurs est plus faible sur les grands marchés que sur les petits. Pour certaines branches d'assurance au moins (private passenger automobile, branche où l'on rencontre le plus de mutuelles) on ne constate cependant aucun lien entre la concentration et le volume du marché : les cinq premiers prestataires ont une part de marché de 37 % dans le Connecticut, de 86 % en Alaska ; dans les autres Etats, cette part se situe entre 50 et 70 %. Dans la branche industrielle " commercial multi peril ", la concentration est généralement faible et les petits marchés montrent une plus forte dispersion que les grands.

Il n'existe que très peu de compagnies d'assurance nationales. Cependant, on peut signaler l'existence de rares mais importants acteurs nationaux comme State Farm (équivalent américain de Groupama).

3. Une consolidation du marché sans renforcement de la concentration...

Tel est certainement le phénomène observé le plus paradoxal. Le nombre des fusions et des acquisitions s'est accru ces dernières années sur les marchés de l'assurance dommages, ce qui correspond à un processus normal de restructuration continuelle sur un ensemble de mille groupes d'assurance indépendants environ. Mais, parallèlement, de 1985 à 1991, le nombre des compagnies présentes sur le marché a augmenté d'à peu près 400. Le nombre total est à nouveau en recul depuis et, en 1995, 36 nouvelles compagnies ont été fondées pendant que 51 disparaissaient du marché. De sorte que, au total, on a observé entre 1990 et 1995 une tendance à la déconcentration du marché (sauf dans la branche " homeowners multi peril ").

Conclusion selon Sigma : " le processus de consolidation et de redistribution des cartes en train de s'accomplir, surtout dans le segment des très grandes compagnies (de façon très " médiatisée ") ne se fait pas au détriment des petits et moyens assureurs " 124( * ) .

4. Enfin la segmentation en fonction de la taille montre que l'avantage va aux petits...

Les petites compagnies (chiffre d'affaires inférieur à 250 m.usd) sont celles qui enregistrent la croissance la plus rapide de leur activité et qui ont, en moyenne, les meilleurs résultats. En effet, bien qu'elles produisent avec des ratios de charges plus élevés (qui sont ainsi un bon investissement), elles connaissent des rapports sinistres à primes nettement inférieurs (voir le tableau ci-après).

Ce résultat correspond aux analyses déjà citées et menées dans le passé par Swiss Re Economic Research 125( * ) selon lesquelles " les économies d'échelles sont secondaires dans le domaine de l'assurance " (on les observe tout au plus jusqu'à un volume de 400 à 500 millions de dollars). On échoue en effet à mettre en évidence des économies d'échelle, notamment dans le rapport sinistres à primes.

Tableau 42 : Analyse de segmentation du marché dommages américain (compagnies dont CA > 100 millions USD en 1995)

Total tous segments

Segment 1

Segment 2

Segment 3

Segment 4

Segment 5

Segment 6

340

 

Nombre de compagnies

2

20

62

86

80

90

 

Part de marché

en % des primes nettes

17

25,3

21,6

12,2

6,3

4,6

3,6

Total primes nettes

croissance des primes 91-95 1

4,8

1,8

4,7

2,3

5,3

5,0

212

 

en milliards USD 1995

41,7

61,4

52,5

29,6

15,1

11,2

8,3

Fonds propres

croissance des fonds propres 91-95 1

8,3

6,6

11,0

6,6

7,3

12,8

54,1

Liability

part en % des primes totales 2

53,6

54,1

53,0

55,0

54,8

56,5

2,3

 

croissance des primes 91-95 1

5,6

-1,1

3,9

0,9

4,7

3,8

21,8

Property

part en % des primes totales 2

34,3

16,6

20,7

19,0

19,9

20,4

4,4

 

croissance des primes 91-95 1

3,7

3,6

5,5

3,6

6,8

6,3

18,0

Combined lines

part en % des primes totales 2

8,3

25,1

17,8

17,3

18,9

15,9

4,9

 

croissance des primes 91-95 1

4,8

5,3

7,6

- 1,1

3,7

7,4

5,5

Other lines

part en % des primes totales

3,2

3,3

7,9

8,7

5,7

6,4

6,8

 

croissance des primes 91-95 1

-3,3

12,6

2,1

15,6

10,8

2,6

1,32

Solvabilité (primes nettes/Fonds propres)

moyenne 2

1,36

1,33

1,36

1,35

1,19

1,09

7,3

Rentabilité des fonds propes

moyenne 2

5,8

4,7

8,7

9,9

9,1

10,5

5,6

Ratio de marge bénéficiaire

en % de la moyenne des primes 2

4,4

3,8

6,5

7,4

7,7

9,8

 

Ratio de charges d'exploitation

variance

0,38

0,01

0,21

0,29

1,01

0,22

25,01

 

moyenne 2

19,6

25,37

24,87

29,32

28,93

26,9

 

Rapport sinistres à primes

variance

10,11

28,38

8,41

4,87

4,47

3,27

82,67

 

moyenne 2

85,4

85,9

82,0

78,2

76,9

76,7

 

Ratio combiné

variance

10,73

27,44

10,55

3,63

9,55

6,20

109,2

 

moyenne 2

105,5

113,0

108,9

109,0

106,9

105,3

1,5

Taux de distribution

moyenne 2

0,5

1,7

2,0

1,5

1,0

1,8

138,1

Taux de provisonnement

réserves/primes acquises

76,7

171,7

132,6

152,9

146,4

150,3

3,8

Réserves pour sinistres

croissance 91-95 1

5,5

2,9

4,1

3,5

5,2

3,4

 

Commissions conditionnelles (% des charges totales)

moyenne 2

0,1

1,6

1,8

3,0

3,3

2,8

1 Taux de croissance annuel moyen (compound average growth rate) 2. Moyenne de la période 1991-1995

Source : Suisse de Ré, Sigma n° 1/ 1997

Conclusion de Sigma : " Les critères qui pèsent le plus dans la réussite d'une compagnie, tels que la composition du portefeuille, le taux de provision et de solvabilité, sont des instruments de gestion qui dépendent bien plus de la stratégie individuelle et des diverses décisions de la direction que de la taille de l'entreprise elle-même " 126( * ) .

C'est par la spécialisation et la poursuite d'une consolidation bien réfléchie que les grosses compagnies pourront répliquer à la stratégie de contestation des nouveaux compétiteurs.

B. LE CAS BRITANNIQUE PRÉFIGURE-T-IL L'ÉVOLUTION EUROPÉENNE ?

Le marché britannique de l'assurance est " déréglementé " (absence de contrôle matériel) dans son fonctionnement depuis 1982, mais il est ouvert depuis toujours aux assureurs étrangers, d'où un profil d'offre très particulier (voir chapitre précédent) : un tiers du volume des affaires non-vie revient aux filiales et succursales étrangères. L'augmentation des implantations de succursales est importante dès 1982, année de l'entrée en vigueur de l'Insurance Company Act évoqué plus haut.

Les effets structurels de cette déréglementation ont été :

- un accroissement de la volatilité des résultats techniques et globaux de l'assurance britannique lié à la liberté budgétaire, qui a déclenché une pression à la baisse sur les tarifs ;

- l'évolution de la concurrence sur l'impulsion de nouveaux entrants et du risque accru de faillite : " dans un climat de déréglementation, la concurrence est arbitrée par les prix, les produits, les critères de souscription (dont l'étendue de la garantie), les formes innovatrices de distribution et la solvabilité " 127( * ) ;

- paradoxalement, la forte concentration sur le marché britannique s'est érodée au détriment des plus grands assureurs et au profit d'assureurs fortement spécialisés (sur un produit, une région ou selon un mode de distribution) ;

- la prise en compte accrue de la valeur actionnariale de l'entreprise, que la réduction des marges pousse vers une gestion nouvelle de ces capitaux et une productivité accrue ;

- la sélection des risques s'accroît sous le poids de la concurrence ;

- l'évolution du rapport qualité-prix et le dynamisme de l'offre se font au profit du consommateur, mais au risque, l'euro aidant ainsi que les comparaisons simplificatrices de la presse financière, d'accélérer le mouvement vers des produits d'assurance standards et bas de gamme en termes de garantie mais bon marché.

A ce stade, les effets de la déréglementation britannique de l'offre et de la liberté d'accès accrue sont encore faibles, comme le fait ressortir l'étude de la Cegos pour la Commission européenne " 128( * ) .

Bien que la liberté d'accès aux marchés nationaux sous forme de Lps ou d'établissement soit acquise pour certains risques depuis 1990 (comme les " grands risques ") et pour tous les risques depuis juillet 1994, sur cent entreprises interrogées par la Cegos :

- quatorze seulement pratiquent la libre prestation des services, qui sont spécialisées soit dans les grands risques, soit dans l'assurance-vie ;

- le flux de succursales (ou établissements) créées en vertu de la liberté d'établissement, a été plutôt négatif car les sociétés d'assurance préfèrent continuer à s'installer sous forme de filiales nationales comme elles le peuvent depuis 1973 et 1979, de sorte que le nombre total de succursales d'assurance de l'échantillon étudié par la Cegos en Europe n'a pas progressé :

Nombre total de filiales

 

Nombre total de succursales

1989

1994

 

1989

1994

210

232

 

162

161

Source : Single Market Review, Insurance.

Il aurait été préférable, évidemment, de bénéficier des chiffres un peu plus récents mais, sur son échantillon de cent entreprises, la Cegos ne pouvait aller plus loin en fonction des réponses fournies.

Les raisons évoquées pour cette faible utilisation des facilités offertes par la troisième génération de directives européennes sont que :

- la Lps ne correspond pas à la stratégie (61 % des réponses),

- des incertitudes légales sont encore associées à la Lps (29 %),

- il y a des problèmes de réglementation ou administratifs avec le pays hôte (25 %),

- des coûts spécifiques sont associés à la Lps : traduction, expertise fiscale.

D'une manière générale, les conséquences de la mise en place du marché européen de l'assurance ont été jusqu'à présent les suivantes :

- un mouvement de consolidation est effectivement observable, sans qu'il se traduise par une concentration accrue des marchés nationaux de l'assurance ;

- une tendance générale à la baisse des coûts d'exploitation est observée de 1989 à 1994 liée à la maturité des marchés 129( * ) ;

- de 1989 à 1995, la hausse médiane de la productivité (primes/employés) a été de 13,5 % en écus constants pour la France, le Luxembourg, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ;

- malgré cette hausse moyenne de la productivité, le ratio médian bénéfice net sur capital est passé de 12,06 % en 1979 à 9,5 % en 1995 (mais à partir d'un niveau de rentabilité élevée pour la moitié de l'échantillon en 1989) 130( * ) .

Les variations de tarifs assurantiels ont été jusqu'à présent loin de répondre aux objectifs du rapport Cecchini 131( * ) qui, en 1988, signalait l'importance des dispersions de prix entre pays pour les mêmes produits (voir tableau ci-dessous). Sur ce point, l'euro devrait être le véritable déclencheur du mouvement de convergence en rendant les comparaisons de tarifs plus faciles, sous réserve des différences contractuelles importantes qui demeurent et demeureront longtemps. En 1995, selon la Cegos, seules 5 sociétés (4 en 1989) sur 36 concernées ont choisi de vendre en Europe des produits identiques à des prix identiques.

Tableau 43

Divergence de prix pour un même produit d'assurance en Europe

 

Multiple

Pays les moins chers

Pays les plus chers

Assurance-vie

Multirisque habitation

Automobile

Vol et incendie

Risques industriels

2,45

2,25

2,98

4,06

2,89

Royaume-Uni

Belgique

Royaume-Uni

Luxembourg

Pays-Bas

Belgique-Italie

Royaume-Uni-Italie

Italie-Luxembourg

Italie-France

France-Italie

Source : rapport Cecchini

On est jusqu'à présent, comme le souligne l'étude Cegos, loin de l'effet de big bang auquel on pourrait penser eu égard à la quantité de commentaires sur les effets de la troisième génération de directives européennes.

Cependant, les priorités induites par l'existence du marché européen de l'assurance et la perspective de l'euro ont beaucoup évolué de 1989 à 1994 :

- le " re-engineering " et le raccourcissement des lignes hiérarchiques sont à l'oeuvre dans nombre d'entreprises ;

- le souci de réduction des coûts s'est accru (il concerne 83 % des entreprises en 1995, contre 66 % en 1989) ;

- l'objectif d'innovation et de restructuration de la gamme des produits et des services s'est généralisé (80 % en 1995, contre 61 % en 1989) 132( * ) .

Un certain nombre d'obstacles s'oppose encore à la pleine réalisation d'un marché unique de l'assurance 133( * ) .

- la persistance de différences, éventuellement importantes, au niveau de la fiscalité directe ou indirecte des prestations d'assurance (par exemple, déduction fiscale de primes d'assurances sur la vie réservée aux clients ayant souscrit leurs polices auprès d'assureurs nationaux comme la Belgique, le Danemark, l'Autriche et la Suède) ;

- le manque d'harmonisation des législations en matière de contrats, dont la convergence à ce stade paraît utopique.

II. L'EFFET SUR LES MARCHÉS NATIONAUX DEVRAIT ÊTRE FONCTION DU DEGRÉ DE RÉGLEMENTATION DES PAYS AVANT 1994

Trois pays sont étudiés par Sigma, classés ici par degré décroissant de réglementation avant l'effet global de libéralisation lié au cumul des effets de déréglementation, d'ouverture du marché et d'intégration du marché par l'euro : l'Allemagne, l'Italie et la France.

A. L'EFFET DE LIBÉRALISATION LE PLUS IMPORTANT CONCERNE LE MARCHÉ ALLEMAND134( * )...

La réglementation et le contrôle national des contrats d'assurance remontent en Allemagne à la loi de 1901 régissant le contrôle des assurances. Depuis cette date, les tarifs, les produits, les conditions et critères de souscription ont été, en règle générale, soumis à l'agrément préalable des autorités de surveillance.

La troisième génération de directives européennes représente donc pour le marché allemand de l'assurance, premier marché européen, une rupture importante, qui devrait avoir des conséquences, notamment sur le niveau et la rentabilité des résultats des entreprises d'assurance allemandes qui, comme on l'a vu dans le chapitre précédent, sont assez exceptionnels.

La libéralisation des conditions contractuelles et des prix donneront plus de poids aux agents indépendants et ainsi tendra à lever les principales entraves à l'accès au marché, liées à un système de distribution cloisonné et très spécifique (80 % des contrats sont distribués par des agents exclusifs, 10 % par les courtiers et agents généraux indépendants, 5 % par les banques) contrôlé en droit et en fait par les agents exclusifs. Cette organisation fait que la pénétration d'un assureur étranger passe par des intermédiaires indépendants. Or ceux-ci couvraient en 1993 moins de 3 % du marché allemand de l'assurance.

Jusqu'à présent, la concentration de l'offre sur le marché est faible par rapport à la Grande-Bretagne, la France ou le Japon, mais cette structure de l'offre " est d'une stabilité frappante " (selon Sigma) depuis 1980.

B. ...PUIS LE MARCHÉ ITALIEN135( * )...

Le contrôle matériel de l'Etat a également marqué le marché italien, quatrième marché européen, pendant plusieurs décennies avant 1994, notamment dans le domaine automobile (50 % du secteur non-vie). Les tarifs en particulier étaient soumis à l'agrément préalable des autorités, qui ont fixé en général des plafonds trop bas, ce qui s'est traduit, au contraire de l'Allemagne, par de mauvais résultats techniques et une rentabilité globale faible, voire négative, de 1990 à 1994.

Plutôt fragmentée, l'assurance italienne connaît une certaine tendance à la concentration de 1987 à 1994. La pénétration étrangère rencontre le même obstacle qu'en Allemagne : la domination d'organes de distribution liés aux compagnies, dont la part de marché est estimée à 50 % en assurance automobile. C'est donc jusqu'à présent par le contrôle capitalistique de sociétés italiennes que la pénétration du marché italien a eu lieu, ainsi que par la libre prestation de services par quelques compagnies, qui ont préféré abandonner leurs filiales.

La bancassurance se développe rapidement en Italie, tant à cause de l'inadaptation des acteurs traditionnels qu'en raison d'une nouvelle stratégie d'offre des banques italiennes.

Les effets attendus à ce jour sont le développement de la vente directe ainsi que la conquête de parts de marché par des compagnies étrangères via des intermédiaires indépendants.

C. ...ENFIN LE MARCHÉ FRANÇAIS

Le marché français est mieux préparé à la libéralisation en cours que les marchés allemand et italien dans la mesure où il a connu une liberté tarifaire et contractuelle et, de ce fait, une situation concurrentielle intense depuis le milieu des années 1980 sur les prix et les produits, bien que l'abrogation formelle du contrôle des prix ne remonte qu'au décret du 28 juin 1991.

La concentration de l'offre a contribué à diminuer cette intensification concurrentielle au niveau national. Les petites entreprises d'assurance ont souvent connu une plus forte croissance que les grandes.

En France aussi les circuits de distribution dans l'assurance non-vie sont dominés par les agents exclusifs, qui représentent 42 % en 1994, ce qui explique pourquoi les succursales étrangères jouent un rôle mineur (passées de 150 en nombre et 7 % du marché en 1980 à 75 en 1993 et moins de 3 % du marché).

Une des caractéristiques du marché français est la part croissante prise par les mutuelles sans intermédiaires (50 % dans le domaine automobile) qui maintiennent leurs coûts à un faible niveau et permettent ainsi de pratiquer des tarifs compétitifs qui gênent les entreprises classiques, françaises et étrangères.

L'assurance française connaît donc déjà l'impact négatif sur les résultats techniques et la rentabilité globale d'une pression concurrentielle intense. Elle est en ce sens mieux placée pour faire face à un nouveau choc concurrentiel. En revanche, elle est déjà affaiblie par une concurrence qui a mis à mal sa rentabilité, sa capitalisation boursière et donc ses capacités d'offensive et de développement.

III. L'IMPACT DU MARCHÉ EUROPÉEN DE L'ASSURANCE ET DE L'EURO SUR LES PLACEMENTS DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCES FRANÇAISES

L'internationalisation du passif des sociétés d'assurance liée à l'interpénétration progressive des marchés nationaux de l'assurance et à la mise en place d'un euro " financier " dès le 1er janvier 1999 exercera un effet important de réallocation de l'actif des sociétés d'assurance françaises.

Cette réallocation interviendra sur un fond de concurrence maintenue et accrue entre places financières (voir tableau 44 page suivante) et gestionnaires de fonds 136( * ) (voir également tableau 45) où la France fait figure de modeste troisième.

Tableau 44

Marchés financiers internationaux en 1996

(milliards USD ) 137( * )

 

Capitalisation boursière

Capitalisation obligataire

Paris

586

1 259

Francfort

665

1 868

UE 8 pays *

1 870

4 076

UE 13 pays**

2 672

6 703

Etats-Unis ***

6 842

1 1091

Tokyo

3 011

4 905

Londres

1 711

629

*8 pays : Allemagne, Autriche, Belgique, Finlande, France, Pays-Bas, Irlande, Luxembourg

**13 pays : 8 pays EU plus l'Italie, l'Espagne, la Suède, le Danemark , le Portugal

***Capitalisation boursière de la bourse new-yorkaise.

Source : FIBV.

Tableau 45

La gestion institutionnelle en Europe

Placements financiers en milliards USD (en stock) pour 1994
138( * )

EUROPE

Banques, Cies d'épargne et autres instit. financières

OPCVM

Sociétés assurances

Fonds de pension

Total

%

Royaume-Uni

715

202

852

706

2 475

29,8

Allemagne

791

273

655

111

1 830

22,1

France

497

479

436

50

1 462

17,7

Pays-Bas

67

43

171

287

568

6,8

Italie

352

74

109

23

558

6,7

Suisse

118

35

177

173

503

6,1

Espagne

176

88

43

11

318

3,8

Luxembourg

26

273

0

1

300

3,6

Belgique

197

17

65

7

286

3,4

TOTAL

2 939

1 484

2 508

1 369

8 300

100

Source : BNP-DEE/EFRP/CEA

A. STRUCTURES COMPARÉES DES PLACEMENTS DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCE

La structure actuelle des placements de l'assurance française est très caractéristique et confirme, comparativement, ce qui a été rapidement indiqué dans la partie introductive (voir précédemment rapide macro-économie de l'assurance française).

Les placements obligataires publics se taillent la part du lion dans les portefeuilles d'investissement des sociétés d'assurance française, en particulier dans l'assurance-vie en raison des garanties de rachat échelonnées dont sont assortis les contrats d'assurance en France et plus généralement en Europe continentale. C'est au contraire l'absence d'une telle obligation de rachat (avec il est vrai l'existence d'importants fonds de pension) qui explique la place des actions dans le portefeuille des sociétés britanniques. Encore faut-il relativiser pour les sociétés d'assurance françaises le chiffre global élevé d'obligations, qui correspond à une détention d'obligations très importante par les bancassureurs, mais beaucoup moins élevée pour les filiales vie des compagnies d'assurance, ne serait-ce qu'en fonction de leur rôle passé de holdings de participations industrielles stratégiques pour le compte de l'Etat.

Tableau 46
Répartition des actifs en assurance non-vie (fin 1995 en %)

Année 1995

Immobilier

Actions

Obligations

Prêts

Dépôts

+ TCN

Allemagne 22

5,7

11,8

19

47,5 *

16

Grande-Bretagne

4,7

33,8

56,5

2,8

2,2

France

13,7

29,2

45,2

1,4

10,5

Tableau 47
Répartition des actifs en assurance-vie (fin 1995 en %)

Année 1995

Immobilier

Actions

Obligations

Prêts

Dépôts
+ TCN

Allemagne 139( * )

4,8

4,6

14

63,8 *

12,8

Grande-Bretagne

7,6

62,9

25,6

1,6

2,3

France

6,7

12,8

71,6

1,8

7,1

* Sont rangés dans cette catégorie certains types d'obligations publiques et surtout les titres de créances hypothécaires (Pfandbriefe).

Source : Cardif.

Aux Etats-Unis, toutes les compagnies d'assurance confondues géraient en 1995 2 908 milliards d'actifs, dont 18 % d'actions, 60 % d'obligations à taux fixe, 22 % d'actifs divers 140( * ) .

Graphique 19

L'investissement total des grands marchés européens d'assurance



Source : CEA

Graphique 20
Répartition de l'investissement total des grands marchés d'assurance en 1996

Source : CEA.

B. LES EFFETS DE RÉALLOCATION POUR L'ASSURANCE FRANÇAISE SERONT PLUS GÉOGRAPHIQUES QUE CATÉGORIELS

L'élargissement des engagements des sociétés d'assurance lié au marché unique européen, ainsi que l'assouplissement des règles de placement qui revêtent désormais une préoccupation strictement prudentielle (de l'ordre du contrôle de solvabilité étendu) exerceront vraisemblablement un effet de diversification important des placements des entreprises d'assurance françaises.

Cette diversification se fera (et se fait déjà) au profit de titres européens en général dès la mise en place de l'euro, mais également au profit de titres de pays tiers étant donné l'effet de report international (y compris hors zone euro en Europe) exercé par l'assouplissement de la règle de congruence totale (article R 332-1-1 du code des assurances) depuis 1990 (20 % du passif en devises peuvent être couverts par des actifs non congruents c'est-à-dire libellés en une autre devise que la devise d'engagement).

Assez logiquement, les compagnies d'assurance françaises devraient profiter de la diversité des signatures (actuellement échelonnées en aaa et aa) et de l'élargissement des " spreads " sur le compartiment obligataire du marché financier européen dès lors que l'abondance de l'épargne domestique et la rareté des émissions en France limitaient le rendement de leur portefeuille obligataire. Il est cependant vraisemblable que cette diversification se fera à partir du flux de primes nouvelles et non pas sur le stock des actifs engrangés dans les portefeuilles d'assurance.

Les gestionnaires de portefeuille paraissent plus réservés sur l'importance de la diversification des placements des assurances au profit des actions dans la mesure où les règles françaises (ou l'application française des règles européennes) de garantie de rachat avec faible pénalité resteraient inchangées.

L'effet des mesures dites DSK consistant à pouvoir intégrer dans les unités de compte 141( * ) des fonds de placements à risque et des actions de sociétés non cotées, ainsi que la règle européenne limitant à 1 % la marge de solvabilité des contrats en unité de compte, dont le risque est porté par les assurés, devrait être, par conséquent, limité. On a cependant déjà enregistré en 1997 une forte croissance des contrats en unité de compte.

La règle française en matière d'actions (plafond à 65 % du portefeuille 142( * ) ) ne sera en tout cas pas contraignante à l'égard de la volonté éventuelle de diversification en actions européennes et françaises.

C. SPÉCIFICITÉS DE LA RÉGLEMENTATION FRANÇAISE EN MATIÈRE DE PLACEMENT ET CONTRAINTES RÉGLEMENTAIRES COMPARATIVES

Alors que les professionnels de l'assurance se réjouissent de certaines spécificités réglementaires françaises qui sont conceptuellement bonnes et d'une valeur durable, ils indiquent un certain nombre d'inquiétudes sur les disparités réglementaires dans ce contexte européen de compétition renforcée et de restructuration poursuivie.

1. Une partie de la réglementation française spécifique en vigueur est appréciée pour sa rigueur et son adaptation à ses objectifs

Cette appréciation des professionnels s'applique à la réglementation des placements de l'assurance qui est spécifiquement française dans son origine ou dans son application, qu'il s'agisse :

- de la comptabilisation au coût historique qui traduit un souci de vision à long terme (mais qui s'oppose à un usage étendu des produits financiers dérivés dans la gestion de l'actif) ;

- du caractère rigoureux de la réglementation des provisions techniques et de la réglementation des actifs admis en représentation des engagements réglementés (voir annexe 1 de ce chapitre) ;

- des nouvelles règles depuis 1990 de dispersion des risques, très proches des règles des pays voisins (article R 332-31 du code des assurances, voir annexe 2 de ce chapitre) ;

- du souci de lissage temporel que reflète la vieille règle de réserve de capitalisation concernant les actifs financiers à taux fixe ;

- de la prudence quant à la règle du plafonnement du taux minimum garanti (fixé à 60 % du TME) ;

- de la bonne mesure des règles de distribution des produits de l'assurance aux assurés (85 % contre 90 % en Allemagne et 80 % en Italie) ;

- de la possibilité de développer les contrats multisupports (c'est-à-dire combinant plusieurs types d'engagements alternatifs ou combinés en francs et en unités de compte) en adéquation avec un environnement financier plus volatile.

Cet ensemble de dispositions est jugé nécessaire, non excessivement contraignant et adéquat à son objet. Il n'en va pas de même pour un certain nombre de contraintes réglementaires en matière de placement qui pourraient handicaper sérieusement le cas échéant les entreprises d'assurance françaises vis-à-vis de leurs principales concurrentes européennes.

2. Certaines étroitesses réglementaires sont comparativement handicapantes

Les dispositions handicapantes de la réglementation française de l'assurance en matière de placement sont liées à des lacunes ou à des excès de précision de la réglementation existante, qui entravent la gestion d'actifs des sociétés d'assurance françaises.

En ce qui concerne les lacunes handicapantes, on peut mentionner :

- le caractère global de la règle de fonctionnement de la réserve de capitalisation combinée à la règle comptable FIFO, laquelle combinaison, en l'absence de dispositions souhaitables permettant de décloisonner les actifs par catégorie dans la réserve de capitalisation, incite les assurances à ne pas utiliser cette réserve de plus values pour y imputer en cas de besoin les moins values survenant comme c'est son objet ;

- l'impossibilité pour les compagnies d'assurance de prendre comme base d'indexation de leurs contrats en unités de compte 143( * ) les fonds d'investissement détenus en direct par les compagnies d'assurance, ce qui soumet les entreprises d'assurance qui gèrent le long terme à des règles coûteuses de valorisation quotidienne des contrats en unités de compte dont l'actif sous-jacent est de nature monétaire, sans grand intérêt pour les souscripteurs ou les assurés ;

- la non-déductibilité fiscale d'un certain nombre de provisions jugées indispensables par les assureurs pour une gestion prudente face à la tendance à l'aggravation de certaines sinistralités et des aléas financiers (provision d'égalisation, provision de gestion, provision pour aléa financier) 144( * ) ;

- enfin, les limitations qui sont actuellement imposées aux sociétés d'assurance en matière de gestion d'actifs, puisque les instruments financiers à terme ne peuvent à l'heure actuelle pas encore être utilisés en couverture des provisions techniques. S'ils devaient le devenir prochainement, se poserait alors la question de savoir comment les comptabiliser sans remettre en cause le principe de comptabilisation en coût historique des actifs qu'ils couvriraient, alors que prévaut par ailleurs une tendance à la généralisation d'une comptabilisation à la valeur de marché (" marked to market ") issue de la philosophie des normes comptables IASC, qui peut être jugée négativement dans la perspective de long terme propre à la gestion de l'assurance.

S'agissant des réglementations contraignantes par excès de dispositions, du moins dans un contexte comparatif et par rapport à l'objectif de performance à long terme des contrats d'assurance-vie qui est la référence principale du souscripteur dans le choix du produit et de la compagnie, on peut citer :

- les règles définissant les clauses à introduire dans tout contrat d'assurance-vie ou de capitalisation (article L 132-5, article L 132-51 et article R 132-4) qui se traduisent par des échéanciers de valorisation du contrat qui sont en même temps des tableaux de valeurs de rachat sur huit ans, de sorte que la gestion d'actifs d'une société tenue par ces engagements n'est pas en mesure de viser la performance à long terme ;

- les règles corrélatives (mêmes articles) de nature consumériste qui permettent un exercice facile de la faculté de résiliation sans pénalité par le souscripteur, qui se traduit par une option ouverte à tout moment sur le passif de la société d'assurance et se reflète par conséquent négativement sur les performances et la compétitivité des sociétés d'assurance françaises.

Le point commun de ces deux types de dispositions réglementaires concernant la gestion d'actifs par création d'obligations unilatérales excessives, du moins comparativement, est de privilégier le souci du court terme par rapport à celui du long terme. Dans la mesure où elles exercent leurs influences principales vis-à-vis de la branche assurance-vie de l'assurance, dont le souci et le métier sont la mutualisation et le lissage temporel dans une optique de long terme, on peut se demander si elles ne risquent pas de handicaper gravement les produits d'assurance et les sociétés qui les offrent par rapport à leurs rivales européennes et internationales. Il reste à savoir si l'éventuelle remise en cause de cette règle consumériste ne priverait pas les assureurs français d'un argument commercial majeur, également vis-à-vis des non-résidents.

On signalera ici l'effet positif pour la sécurité générale des assurés, dans le dispositif réglementaire français, du rôle joué par l'autorité de contrôle. En dépit de la faiblesse de ses moyens, du fait de l'articulation de son mode de contrôle en contrôle sur pièces et contrôle sur place (comme le contrôle bancaire), elle est amenée à avoir une vision d'ensemble de la société contrôlée, notamment dans son aspect humain et managérial, lui permettant souvent d'agir à titre préventif, ce qui est une des explications du faible nombre de défaillances visibles dans le secteur français de l'assurance. La Grande-Bretagne, qui se situe depuis toujours dans une tradition opposée de contrôle sur pièces, a d'ailleurs tout récemment décidé de transposer le modèle français de contrôle dual 145( * ) .

La philosophie française du contrôle semble avoir trouvé un point d'équilibre entre le système de contrôle britannique traditionnellement léger et qui protège mal le consommateur et un système allemand de contrôle poussé qui a bridé l'initiative des acteurs privés. C'est à ce titre globalement qu'elle a, au moins partiellement, influencé la réglementation européenne.

Le principal effet négatif, inattendu et cependant prévisible, pour le marché français de l'assurance et de la gestion d'actifs, semble lié à la localisation de la Banque centrale européenne, qui a déclenché une dynamique de compétition-coopération de places entre Francfort et Londres, qui laisse de côté la place de Paris.

IV. LE CONTEXTE CONCURRENTIEL RENFORCÉ PAR LES TROISIÈMES DIRECTIVES EUROPÉENNES FAIT RESSORTIR LES HANDICAPS FISCAUX ET RÉGLEMENTAIRES DU MARCHÉ FRANÇAIS DE L'ASSURANCE146( * )

Dans le domaine de l'assurance comme dans le domaine bancaire, la réglementation impose des contraintes particulières aux entreprises françaises par rapport à leurs concurrentes dans le domaine des garanties et plus généralement de la protection des consommateurs, comme on l'a vu précédemment dans le domaine de la réglementation des placements. Mais ces inconvénients sont autant d'arguments commerciaux vis-à-vis d'une clientèle versatile et soucieuse de sécurité et de liquidité dans un environnement institutionnel très instable (on regardera en ce sens l'annexe 3 de ce chapitre sur l'instabilité de la fiscalité de l'assurance-vie en France).

En revanche, il ne fait pas de doute que ce nouveau contexte concurrentiel fait ressortir l'aspect handicapant de la fiscalité spécifique de l'assurance. Cet handicap est surtout perceptible au niveau de la fiscalité des contrats, comme si le choix fiscal implicite de la France était de privilégier la taxation des assurés à celle des assureurs. Il est plus difficile de savoir si, comparativement à leurs concurrents européens, les assureurs français sont trop taxés et contribuent de manière disproportionnée au budget de l'Etat.

A titre complémentaire de l'analyse précédente de la réglementation liée à la gestion d'actif, on examinera le tableau comparatif des contraintes réglementaires et comptables propres à chaque pays et susceptibles d'affecter sa compétitivité.

Tableau 48
Liste des contraintes réglementaires et comptables spécifiques à chaque pays pouvant fausser les règles de concurrence entre les différents fonds généraux européens
Remarque : les cases non remplies signifient que nous ne connaissons pas à ce jour la règle locale


Pays

Amortissement

Surcote

Décote

Valorisation en prix d'achat avec plus values latentes

Réserve de capitalisation

Provision à constituer en cas de moins value latente globale sur titres non obligataires

Provisions pour dépréciation durable (ligne à ligne)

Provision pour baisse de rendement d'actif

Possibilité de transfert non contractuel de participation sur plusieurs exercices (type PPCA)

Minimum de participation à distribuer chaque année

Limites sur actions dans le fonds général

France

oui

oui

oui

oui

oui

oui

oui

oui (85 %)

oui (65 %)

Belgique

oui

oui

non

non

oui

non

oui

oui (80 %)

non

Luxembourg

oui

oui

non

non

oui

non

non

non

oui (20 %)

Italie

oui

oui

non

oui

oui

non

 
 
 

Allemagne

oui

oui

non

oui

 
 
 

oui (90 %)

oui (20 à 25 %)

Angleterre

non

non

non

non

non

non

oui

non

non

Espagne

oui

oui

non

non

 
 
 
 
 

Source : Cardif

A. LA FISCALITÉ DES PRODUITS D'ASSURANCE FRANÇAIS REPRÉSENTE UN DÉSAVANTAGE CONCURRENTIEL

Le tableau 49 n'appelle pas de nombreux commentaires tant son verdict implicite est clair, globalement ou par branche.

La France est le pays qui taxe le plus lourdement les contrats d'assurance, devant l'Allemagne, l'Italie, la Belgique, qui la suivent d'assez près, et loin devant la Grande-Bretagne (la fiscalité de cette dernière, non négligeable, s'applique sur les produits financiers) dont le niveau de fiscalité n'est pas sans rapport avec le niveau de développement de son marché de l'assurance.

La charge fiscale globale qui pèse sur les produits d'assurance est un élément du prix de revient qui peut exercer un effet de détournement du flux de demande adressée aux produits français, dans le cadre de la libre prestation de services où, en dépit de l'alignement fiscal auquel doit veiller le représentant fiscal en France de la compagnie étrangère, le contrôle sur la fiscalité réellement appliquée paraît difficile.

Il est certes possible de relativiser, d'un point de vue théorique, le point de vue soutenu par les assureurs du caractère spécialement nocif de la fiscalité de l'assurance-vie, puisqu'elle s'intègre dans un débat plus général de l'imposition des revenus du capital, où un certain consensus en faveur de cette imposition semble prévaloir au nom de " l'équité ". Sur cette base, selon Pierre Pestieau, " il n'existe pas beaucoup d'arguments économiques convaincants pour favoriser telle forme d'épargne plutôt que telle autre, à l'exception de l'assurance décès temporaire " 147( * ) .

Toutefois, au nom de l'efficacité, la taxation de l'épargne et donc de l'assurance-vie (a fortiori la remise en cause de ses avantages fiscaux à la succession) est critiquée par certains économistes, au nom du raisonnement selon lequel , un impôt sur le revenu global, affectant les revenus du travail et les revenus de l'épargne, reviendrait à une double taxation de ces derniers, à la différence d'un impôt sur la consommation. C'est notamment l'argument de Joseph Stiglitz 148( * ) , qui conclut que, sous certaines conditions, il n'est pas utile de taxer l'épargne si l'on applique une imposition non linéaire des revenus.

Par ailleurs, il semble qu'il soit difficile empiriquement de réfuter le lien entre fiscalité de l'épargne en général et niveau de l'épargne globale 149( * ) . Et l'argument en faveur de la taxation en principe ne répond nullement au " fait " de la concurrence fiscale renforcée par la mise en place d'un marché unique de l'assurance et d'un marché financier unifié. Il ne justifie pas non plus l'instabilité erratique de la fiscalité de l'assurance-vie au gré des politiques successives ou de l'évolution des problèmes budgétaires (voir en ce sens l'annexe 3 sur les variations de la fiscalité de l'assurance-vie).

Tableau 49 : Fiscalité et parafiscalité comparées dans les principaux pays de l'Union européenne en 1996

Chiffres en % ou en unités monétaires nationales T = taxes P = parafiscalité

Risques assurés

Incendie

et risques industriels

Santé

Automobile

Transport

Type d'impôt

 
 
 
 

RC

Dommages

 
 

T

P

T

P

T

P

T

P

T

P

Allemagne 8

10,00

8,00

0,00

0,00

15,00

0,00

15,00

0,00

15,00

0,00

Belgique

9,25

6,50

9,25

10,00

9,25

17,75

9,25

17,50

9,25

0,00

Espagne 7

0,00

5,50

0,00

0,50

0,00

3,50

0,00

0,50

0,00

0,50

Italie 6

21,25

0,10

2,50

0,00

12,50

8,10

12,50

8,10

7,50

0,00

Pays-Bas

7,00

0,00

0,00

0,00

7,00

0,00

7,00

0,00

7,00

0,00

Royaume-Uni 5

2,50

35 GBP

2,50

0,00

2,50

0,00

2,50

0,00

0,00

0,00

France 4

7-30 1 2

15 F

7,00 3

0,00

18,00

15,50

18,00 2

15 F

0,00

15 F

1. Tarif normal de 30 % : pour les risques professionnels et les pertes d'exportation : 7 %.

2. La loi du 02 février 1995 a institué, en outre, un prélèvement de 2,50 % assis sur les primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie " catastrophes naturelles " au profit du fonds de prévention et risques majeurs.

3. Le taux réduit de 7 % (au lieu de 9 %) s'applique uniquement lorsque la garantie prévoit le versement d'indemnités ou le remboursement de frais qui, par nature, entrent dans le champ d'application de la sécurité sociale.

4. L'assurance construction (RC, dommages) supporte des taxes de 9 % et une parafiscalité variable de 8,50 % à 25,50 % à laquelle s'ajoute une contribution de 0,40 % sur le chiffre d'affaires réalisé en France par les assujettis pour la période du 01 janvier 1991 au 31 décembre 1996. Dans les autres pays, le taux de droit commun de taxe s'applique généralement (Allemagne : 15 ; Belgique : 9,25 ; Espagne : 0,50 ; Royaume-Uni : 2,50  puis 4,0 ; Italie : 21,25 ; Pays-Bas : 7).

5. 4 % au lieu de 2,50 % à partir du 1 er avril 1997.

6. Une parafiscalité additionnelle de 0,10 % s'applique sur les cotisations des contrats contre les risques incendie, RC générale, auto " risques divers " et vol, pour alimenter un fonds de solidarité pour les victimes d'extorsion.

7. Des taxes parafiscales additionnelles s'appliquent avec des taux variables, faibles ou des montants fixés aux assurances de dommages aux biens automobile, assurances de personnes et sont destinées au fonds pour l'assurance des risques extraordinaires.

8. Par ailleurs, la taxe sur l'assurance multirisque habitation des particuliers est fixée à 14 % à laquelle s'ajoute une parafiscalité de 2 %.

Source : Encyclopédie de l'assurance, Jean-Pascal Beaufret, La fiscalité de l'assurance

La diversité et le poids des impôts ou de la parafiscalité sont frappants ainsi que la diversité des fonds qu'ils alimentent.

Tableau 50
Taxes et contributions
(fiscalité des contrats)

En MF

1994

1995

1996

Taxe sur les conventions d'assurance

24 308

25 330

26 076 1 2

Contribution à l'ACOSS sur les primes d'assurance automobile 3

5 761

6 150

6 278

Fonds de compensation des risques de l'assurance construction (CCR) 4

1 410

1 446

1 426

Fonds national de garantie des calamités agricoles (CCR) 5

579

594

610

Fonds commun des accidents du travail agricole 6

82

75

93

Fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse 7

727

290

199

Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions

538

607

880

Fonds de prévention des risques industriels majeurs

-

71

135

1. Prévision de 27,3 MdF en 1997.

2. Hors taxe sur les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire, versées à l'ACOSS et à la MSA en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996 relative aux mesures urgentes tendant au rétablissement de l'équilibre financier de la Sécurité sociale.

3. Article L.21381 du code des assurances.

4. Article L.451-14 du code des assurances.

5. Loi n° 64-706 du 10 juillet 1964 -

Article 38 de la LFR n° 91-1323 du 30 décembre 1991.

6. Loi n° 56-780 du 4 août 1956.

7. Article L.211-26 et R.421-37 du code des assurances.

Source : rapport " L'assurance française en 1995 " de la Ffsa, Dgi.

B. LA FISCALITÉ DES ENTREPRISES FRANÇAISES D'ASSURANCE REPRÉSENTE-T-ELLE UN DÉSAVANTAGE CONCURRENTIEL ?

Les sociétés d'assurance françaises sont soumises aux règles fiscales de droit commun :

- à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun de 33 1/3 %,

- au taux de 19 % sur les plus-values nettes à long terme de 10 %,

- et ces deux taux ont été majorés de 10 % depuis la loi de finances rectificative de 1995.

En 1995, l'impôt sur les sociétés payé par les organismes d'assurance représente 7,3 GF, soit près de 1 % des primes émises.

Elles sont, au-delà de cette fiscalité générale, soumises à une pression fiscale spécifique.

L'assujettissement à la TVA des opérations d'assurance a été écarté par la 6e directive européenne de 1977 en raison de ses implications sur l'assurance-vie. Les entreprises d'assurance ne payent donc aujourd'hui la TVA que sur les activités autres que l'assurance elle-même et sont donc, au regard de la TVA, traitées comme un consommateur final. Elles sont donc, en France, soumises à la taxe sur les salaires à un taux progressif qui va jusqu'à 13,6 % du montant brut des rémunérations et avantages en nature. En 1995, à ce titre, elles ont payé 2,5 GF, soit environ 10 % des rémunérations versées.

Par ailleurs, l'ensemble des provisions à constituer conformément au code des assurances n'est pas systématiquement et intégralement déductible.

D'autres impôts particuliers pèsent sur les sociétés d'assurance comme la " taxe sur les excédents de provisions " en assurances de dommages depuis 1983 (article 235 ter du code général des impôts) qui ne rapporte que 100 MF par an et dont l'intérêt principal est de " valider les règles spécifiques de constitution de provision ", comme " la contribution annuelle des institutions financières " qui s'applique aux établissements de crédit et aux sociétés d'assurance. En 1996, l'acquittement de cet impôt a coûté 800 MF aux sociétés d'assurance.

Il est difficile de conclure, sur la base de ces données purement françaises, que la fiscalité des entreprises d'assurance françaises soit comparativement handicapante.

Un dispositif fiscal plus favorable s'applique cependant aux institutions de prévoyance et aux mutuelles soumises au code de la mutualité :

- IS à taux réduit,

- exonération de la taxe d'apprentissage et de la taxe professionnelle.

La fiscalité française des contrats d'assurance pèse sur la compétitivité de l'industrie française de l'assurance dans le contexte du marché unique de l'assurance. A défaut d'une harmonisation fiscale européenne, il convient certainement de la réexaminer rapidement. Il convient également d'examiner à quelles conditions fiscales les groupes industriels français seraient susceptibles d'installer en France leurs filiales " captives " de réassurance qui sont systématiquement implantées aux Bermudes ou au Luxembourg.

V. ASSURANCE PUBLIQUE ET ASSURANCE PRIVÉE DANS LE DOMAINE DE L'ASSURANCE-MALADIE : QUELLES ÉVOLUTIONS POSSIBLES ?

Partant d'un constat, désormais général, de défaillance prévisible du système publique d'assurance contre le risque maladie (5.1), plusieurs scénarios d'évolution possible sont envisageables dans les rapports de l'assurance privée et de l'assurance publique allant d'une coopération organisée entre la Sécurité sociale et l'assurance, telle que celle proposée par le groupe AXA avec son projet de réseau médical d'assistance jusqu'au projet radical de mise en concurrence des caisses d'assurance-maladie avec les compagnies d'assurance et les mutuelles par l'assurance au premier franc du risque maladie, en passant par le modèle espagnol d'addition des systèmes d'assurance publique et privée entraînant la double cotisation pour la majorité des assurés (5.4). On examinera auparavant le rôle actuel de l'assurance privée dans l'architecture des systèmes d'assurance santé de plusieurs pays reflétant la diversité des situations nationales (5.2). L'expérience américaine, ses limites et ses évolutions récentes, est également instructive (5.3).

A. " UN BILAN QUI OBLIGE À UNE REFONTE DU SYSTÈME "150( * )

Tel est le titre de la première partie de l'article de l'Encyclopédie de l'assurance sur l'assurance-maladie de Gilles Johanet, ancien directeur de la CNAM.

Au-delà, en effet de " réussites incontestables " :

- élargissement au plus grand nombre de l'accès aux soins,

- progression de la consommation de soins,

- allongement de l'espérance de vie,

- très bon niveau de d'offre de soins en quantité et en qualité (non indépendant d'une assurance-maladie obligatoire),

lesquelles sont cependant " tout à fait comparables dans leur ampleur à celles obtenues par les autres pays développés ", il existe, selon Johanet, des " échecs patents ", qui doivent également être soulignés :

- coût élevé de la santé en France (avec 10 % du PIB consacré aux dépenses courantes de santé, la France se situe au troisième rang mondial après les Etats-Unis et l'Allemagne) 151( * ) , dont l'évolution réelle entre 1981 et 1995 s'élève à 4,8 % par an, alors que la moyenne de l'Union européenne est proche de 2,5 %),

- " absence quasi-totale de transparence " sur la qualité des soins rendant le principe d'égalité d'accès aux soins très largement théorique,

- inégalité croissante de la consommation de soins entre catégories socio-profesionnelles,

- inégalité croissante dans la tendance de baisse de la natalité (" entre 1981 et 1983 et entre 1989 et 1991, la baisse de la mortalité des adultes âgés de 25 à 64 ans a été dix fois plus rapide chez les cadres supérieurs et professions libérales que chez les ouvriers et employés ", p. 589).

En bref, en dépit d'un satisfecit national " glorifiant " sur le meilleur système de Sécurité sociale, le rapport qualité-prix du système français de santé et de financement des dépenses de santé est " régulièrement décroissant ".

Le système de Sécurité sociale reste donc à réformer, en dépit et au-delà des nombreuses tentatives rhétoriques pour le faire. En effet, toujours selon Johanet, " durant cinquante ans, l'Etat s'est avéré incapable de définir et mettre en oeuvre une régulation administrée qui soit efficace ". Et si " la spécification essentielle du plan de réforme amorcé le 15 novembre 1995 par Alain Juppé, Premier ministre, est de reconnaître que le vieux système, instauré en 1945, était mort ", le plan Juppé, qui " a fait (ainsi) le vide " n'a pas réussi " pour autant à le remplacer par un nouvel ensemble cohérent (idem, pp. 592-595). Le cercle de l'irresponsabilité décrit depuis longtemps de manière humoristique par Béatrice Majnoni d'Intignano 152( * ) , comme " nous consommons, ils prescrivent, elle paye " n'est toujours pas rompu.

Il est donc impératif, selon Johanet, de :

- " définir une logique de régulation,

- créer des mécanismes de responsabilisation ",

- et de reconfigurer l'ensemble par " l'établissement inévitable de la concurrence et de la sélection ".

B. ETAT DES RELATIONS ENTRE ASSURANCE SANTÉ PRIVÉE ET PUBLIQUE DANS PLUSIEURS PAYS D'EUROPE

Les pays retenus sont ceux qui permettent de dresser la typologie la plus complète des relations existantes entre assurance publique et privée dans le domaine de la couverture du risque maladie en Europe : comme le dit le CEA (dans la troisième version depuis 1983 de son étude sur l'assurance santé en Europe, qui s'attache plus particulièrement au glissement des frontières entre l'assurance sociale et l'assurance privée) à l'avenir, " au niveau national, les Etats vont expérimenter différents compromis se situant à la frontière du secteur public et du secteur privé " 153( * ) . A vrai dire, plusieurs le font déjà. Seront ici retenus les cas de l'Allemagne, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de l'Espagne et de la France.

1. L'assurance santé en Allemagne : système public subsidiaire et assurance privée substitutive 154( * )

Les dépenses de santé représentaient en 1993 10,6 % du PIB allemand.

L'assurance sociale allemande remonte à l'année 1881 où, suite à un message impérial, le Reichstag vote la création d'un triple régime d'assurances pour les ouvriers contre la maladie, les accidents et l'invalidité ou la misère dues à la vieillesse.

Elle est dans son principe " subsidiaire ", s'appliquant à ceux qui en ont véritablement besoin. Le reste est laissé à l'initiative privée, mais était principalement assuré hier, et l'est encore aujourd'hui, par des mutuelles où les assurés supportaient le risque économique global ".

L'ensemble de la population allemande, 99,9 %, est couverte contre le risque de maladie. Sur les 88,5 % assurés par le système d'assurance sociale, 85 % le sont à titre obligatoire, 15 % volontairement. " Ces derniers peuvent donc choisir entre l'assurance-maladie sociale (publique) et l'assurance-maladie privée. Environ 9 % de la population disposent exclusivement d'une couverture d'assurance-maladie privée, sous forme d'une " assurance frais de maladie " au premier franc ; 2,4 % de la population sont, à divers titres, couverts sous d'autres formes. Le reste de la population n'est pas couvert contre la maladie ".

L'assurance-maladie et accidents privée propose trois grands types de contrats :

- les assurances " frais de maladie " (couvrant les frais médicaux et de maternité) ;

- les assurances " allocation forfaitaire en cas d'hospitalisation ", qui garantissent le versement d'un montant journalier si l'assuré est hospitalisé ;

- les assurances indemnités journalières, qui assurent le versement d'indemnités en cas de perte de revenu résultant d'une incapacité de travail du fait d'une maladie ou d'un accident.

Le système privé est proche de celui de l'assurance-maladie sociale publique. Par ailleurs, le 1er janvier 1995, a été instauré un système général obligatoire d'assurance dépendance permanente, de nature privée. Les principaux acteurs de l'assurance privée substitutive sont les Betriebskrankenkassen (BKK), institutions paritaires d'entreprises voisines de nos institutions de prévoyance (et membres à ce titre de la même association européenne : l'Association européenne des institutions paritaires.

Le fondement du dualisme est lié à la disparition de l'obligation d'être assuré contre la maladie au-delà d'un certain seuil de revenu considéré comme le plafond d'assujettissement. Le dualisme repose aussi sur les exemptions possibles au système d'assurance sociale pour les étudiants, les stagiaires et les salariés à temps partiel.

Les 7 millions de personnes assurées exclusivement auprès d'une institution d'assurance privée le sont en fait auprès de 54 entreprises d'assurance spécialisées en assurance santé regroupées au sein de l'Association de l'assurance-maladie privée.

L'assurance-maladie privée allemande présente trois caractéristiques :

- les primes n'évoluent pas avec l'âge (même si le niveau de la prime est fonction de l'âge d'entrée) le sexe et l'état de santé ;

- les sociétés doivent constituer des provisions de vieillissement ;

- les polices d'assurance ne sont pas résiliables par l'assureur. Les cotisations sont prises en charge à moitié-moitié par les employeurs et les salariés. Les primes d'assurance-maladie sont, au même titre que d'autres dépenses de prévoyance, déductibles du revenu imposable.

La montée en puissance de l'assurance-maladie privée est la conséquence directe de " la crise de l'assurance sociale " allemande.

2. L'assurance santé en France : assurance-maladie obligatoire pour tous, pluralité des régimes publics et concurrence dans l'assurance complémentaire santé 155( * )

Le quasi monopole de la Caisse nationale d'assurance-maladie instituée en France en 1945 pour les salariés du commerce et de l'industrie s'est substitué à un régime obligatoire partiel d'assurance privée et s'est amalgamé au régime de protection sociale privée antérieure assuré par les sociétés de secours mutuelles. Il s'agit d'un quasi-monopole puisque cohabitent avec la CNAM un certain nombre de régimes autonomes d'assurance-maladie pour les salariés d'un certain nombre d'entreprises du secteur public non concurrentiel (EDF, GDF, SNCF, Poste, Banque de France ...). L'institution en 1961, puis en 1969, de régimes autonomes de protection sociale obligatoire en faveur des travailleurs non salariés (régime AMEXA et TNS) a également eu pour effet de cantonner l'intervention des assureurs privés dans le domaine de l'assurance des frais de soins à un rôle d'assureur complémentaire.

Un dispositif monopolistique public d'assurance santé a comme avantage de coût l'absence de coûts d'acquisition, et pour les bénéficiaires les plus exposés, l'absence de sélection du risque et même de toute tarification sélective de type bonus-malus.

Le financement de l'assurance-maladie légale est assuré pour l'essentiel par un système de contribution proportionnelle aux revenus des assurés (cotisations sur les revenus professionnels, cotisations sociale généralisée sur tous les revenus).

Les opérations d'assurance-maladie privée ne peuvent être pratiquées que par les sociétés d'assurance accidents (non-vie) ayant obtenu un agrément spécifique et, par dérogation à ce principe, par les sociétés d'assurance-vie, en accessoire à des contrats vie, pour les risques d'invalidité " toutes causes " et de décès par accident.

150 sociétés d'assurance, membres de la FFSA, pratiquent des opérations d'assurance contre la maladie sous forme de contrats individuels ou de contrats collectifs, sans qu'aucune ne cantonne exclusivement son activité dans cette branche.

L'intervention du secteur privé dans le domaine de la santé est donc limitée aujourd'hui à l'assurance complémentaire, à l'exception de la couverture au premier franc des risques d'incapacité et d'invalidité non couverts par les régimes légaux des non salariés et de l'assurance-maladie de catégories très limitées de la population non assujettie à un régime obligatoire (travailleurs frontaliers, français de l'étranger principalement).

Les garanties offertes par le secteur privé sont, globalement ou séparément :

- des prestations en nature (garantie de remboursement des frais de soin ou " ticket modérateur ") ;

- des prestations en espèces (garantie des risques " incapacité " et " invalidité " et allocation forfaitaire en cas d'hospitalisation, limitée à 365 jours le plus souvent ou à 2 ans) ;

L'assurance privée est financée en assurance individuelle par des primes variables en cas de contrat suivant l'âge de l'assuré, plus rarement par des primes constantes en fonction de l'âge de l'assuré à la souscription. Dans ce dernier cas, il appartient à l'assureur de constituer des provisions à risques croissants.

En assurance de groupe (2/3 des contrats), les primes assurent la couverture des risques par période successive d'un an. Les primes sont fixées le plus souvent en pourcentage du salaire et partagées entre l'employeur et le salarié dans des proportions de l'ordre de 60/40 ou 50/50. Elles ne dépendent ni de l'âge de l'assuré, ni de sa situation de famille, le risque étant totalement mutualisé.

Le financement de la consommation médicale, qui a quelque peu évolué de 1980 à 1985 est assuré en 1995 de la manière suivante :

- 73,9 % par les régimes obligatoires de Sécurité sociale (contre 74,5 % en 1980) ;

- 6,8 % par les mutuelles complémentaires (code de la mutualité et assimilées) contre 5 % en 1980 ;

- 3,1 % par les assureurs privés (dans lesquels sont incluses les institutions de prévoyance entrées dans le champ de l'assurance privée du fait de la transposition des troisièmes directives) contre 1,4 % en 1980 ;

- 0,8 % par l'Etat et les collectivités locales, contre 2,9 % en 1980 ;

- 14 à 15 % restant à la charge des ménages de manière stable.

Le principal problème posé, dans le contexte des deux types d'assurance-maladie publique et privée, est celui de l'adaptation permanente des primes à l'évolution du coût des risques.

3. L'assurance santé au Royaume-Uni : addition du " State Social Security System " et de l'assurance-maladie privée 156( * )

La loi de 1911 sur l'assurance nationale (" National Insurance Act ") a instauré un système légal et obligatoire destiné à compléter les prestations offertes par Friendly Societies (sociétés de secours mutuels), qui ont continué d'octroyer une couverture d'assurance aux ouvriers non visés par la loi de 1911.

En 1948 est créé, malgré l'opposition de certaines catégories de professions médicales, le " National Health Service " (Service national de santé), auquel l'ensemble des résidents peut recourir. Il propose à titre gratuit pour les patients des soins de médecine générale, des soins dentaires et ophtalmologiques, des soins de spécialistes dans les établissements hospitaliers de l'Etat, ainsi que des services médico-sociaux tels que soins à domicile, transport par ambulance etc.

Le NHS, qui absorbe au milieu des années 90, environ 40 milliards de livres par an, tire 83 % de ses ressources de l'impôt, 13 % de la part NHS des cotisations versées par les salariés, les employeurs et les travailleurs indépendants et 3 % du paiement direct par les patients.

Plusieurs polices d'assurance privée sont offertes au Britanniques :

- " l'assurance frais médicaux " qui couvre les frais de soins médicaux et englobe les garanties octroyées par les " Hospital Contributory Schemes ", vieux de plus d'un siècle, qui sont des entités à but non lucratif (au nombre de 29) participant au financement des établissements hospitaliers privés locaux, ainsi que les prestations versées par les " Hospital Cash Plans ", qui sont des assurances proposées par 16 institutions (soit " Provident Associations ", c'est-à-dire sociétés mutuelles de prévoyance, soit entreprises d'assurance) et dont l'objet est le versement d'allocations forfaitaires pendant les périodes d'hospitalisation (cette assurance est souscrite soit au profit des salariés, soit à titre individuel par 11 % de la population et est pratiquée par les " Provident Associations " ou les sociétés d'assurance) ;

- la " Permanent Health Insurance " (assurance incapacité de travail de longue durée) qui couvre la perte de revenu consécutive à une maladie ou à une incapacité de travail de longue durée, proposée depuis un siècle par deux compagnies d'assurance ainsi que par les " Friendly Societies " (le nombre total d'organisations favorisant cette assurance est passé de 400 avant 1948 à 30 après la création du, lesquelles font toutes partie intégrante, aujourd'hui, du secteur de l'assurance santé privée) ;

- " l'assurance accidents individuelle ", qui couvre la perte de revenu consécutive à une maladie ou une incapacité de travail de courte durée ;

- " l'assurance-maladies critiques " (" Critical illness "), qui prévoit le versement d'un montant forfaitaire en cas de diagnostic de maladies graves déterminées.

La demande d'assurance privée, loin de décroître après la création du NHS, n'a cessé de croître pendant cinquante ans.

Les primes d'assurance " frais médicaux " privée varient suivant l'âge et la statistique de l'ensemble des contrats individuels de la branche. Par conséquent, elles sont calculées suivant l'importance et le coût des sinistres enregistrés pour l'ensemble de la communauté. Les primes augmentent avec l'âge des assurés. La majorité des assureurs demandent à leurs futurs clients de remplir un formulaire de leurs antécédents médicaux, qui est étudié avec minutie par l'assureur. Lorsqu'elles ne demandent pas de " formulaire d'antécédents ", ce document est remplacé par un moratorium faisant état des soins précédemment reçus par le demandeur, qui ne peut donc bénéficier de prestations pour un traitement concernant directement ou indirectement ses antécédents médicaux (sauf à l'issue d'une période de deux années consécutives en principe).

Un nombre important de personnes assurées continue de faire appel occasionnellement aux soins partiels du NHS. Environ 15 % des patients du secteur privé ne sont pas couverts par une assurance et paient eux-mêmes l'intégralité des frais.

Contraint depuis sa mise en place par des problèmes de financement et de modernisation des équipements, le NHS, qui prodigue des services d'une grande qualité, a été conduit à établir des listes d'attente. Plus d'un million de personnes attendent en moyenne pendant une durée qui peut être de plusieurs mois. Il a été réformé en profondeur au début des années 90 : les fonctions d'acheteur et de vendeur de services médicaux ont été dissociées pour permettre une gestion plus efficiente.

4. L'assurance santé aux Pays-Bas : assurance publique subsidaire avec une forte composante d'assurance privée substitutive 157( * )

Les Pays-Bas semblent être le seul pays dans l'étude menée par le CEA (et composée à partir des descriptions pour chaque pays donné de son système d'assurance santé) à ne pas oublier que l'assurance-maladie, sous une forme organisée, est très ancienne et remonte en fait, vers la fin du Moyen-âge, à la création de guildes qui offraient une aide en nature et en espèces en cas de maladie. Avec leur dissolution au 18e siècle dans le contexte révolutionnaire anti-associationniste français et européen, ce système d'aide a disparu, le vide étant partiellement comblé par des institutions caritatives à caractère confessionnel, par des employeurs conscients de leurs responsabilités sociales, par les médecins eux-mêmes qui fondèrent, à l'aide des cotisations proportionnelles aux revenus de leurs clients, des caisses de médecin, et enfin par des mutuelles agricoles ou ouvrières.

En réalité, à quelques traits près, l'évolution sur la longue période du système d'assurance contre la maladie aux Pays-Bas est celle suivie par la plupart des pays européens : les systèmes d'assurance-maladie n'ont pas jailli au 19e siècle du néant, mais les systèmes d'assurance-maladie modernes sont nés sur les décombres des systèmes traditionnels d'assurance-maladie organisés et dans les espaces juridiques laissés vacants par les interdits anti-associationnistes issus de la révolution française.

Le système d'assurance-maladie néerlandais est marqué par la complémentarité des systèmes d'assurances publics et privés et la place importante de l'assurance privée, qui reste cependant minoritaire. " 37 % de la population néerlandaise ne sont pas couverts par le système général d'assurance-maladie obligatoire qui prend en charge les soins médicaux, les produits pharmaceutiques et les soins hospitaliers. Aussi, l'assurance privée est-elle amenée à jouer un rôle important ".

Les dépenses de santé représentent environ 10 % du PNB et ne cessent de croître, malgré les décisions gouvernementales de plafonnement de la hausse à 1,3 % par an.

63 % de la population sont assurés contre la maladie au titre notamment de la loi sur l'assurance-maladie (" volet 2 "), qui a institué avant la seconde guerre mondiale une assurance obligatoire pour toutes les personnes jusqu'à 65 ans dont le salaire annuel est inférieur à un plafond légal (60 750 Nlg en 1996) ainsi que pour les personnes de 65 ans et plus en dessous d'un plafond de revenus inférieur (38 300 Nlg depuis juillet 1997). Les cotisations à ce régime général, complété par divers régimes obligatoires pour les fonctionnaires des provinces, des communes et de la police (5 % de la population) sont assises sur le revenu. A la différence des caisses d'assurance-maladie sociale du régime général, qui payent directement les frais des soins des assurés aux producteurs de santé, selon le principe du tiers payant, ces régimes publics obligatoires fournissent leurs prestations selon le principe du remboursement des frais.

32 % de la population (5,5 millions de personnes) finalement ne sont pas assurés dans le cadre d'un régime obligatoire et presque tous ont fait le choix de souscrire à une assurance privée, qui offre une couverture identique à celle de l'assurance sociale (et est également classée dans le " volet 2 ") mais est financée différemment. Les primes versées aux assurances privées ne sont pas assises sur le revenu, mais sont fonction du risque propre aux assurés et de la nature de la garantie qu'ils choisissent. Les entreprises d'assurance peuvent pratiquer la sélection du risque. Cependant les assureurs privés sont tenus d'inclure une garantie répondant aux critères définis par la loi sur l'accès à l'assurance-maladie (WTZ), en vigueur depuis le 1er avril 1986, qui fixe les règles d'acceptation, réglemente l'étendue de la couverture et le niveau des primes. Cette police est appelée " paquet standard ". Ceci revient en réalité à peu près à l'interdiction de refus du risque élevé.

L'assurance-maladie complémentaire (dite " volet 3 ") est facultative et laissée à l'initiative des assurés et des assureurs privés.

Une loi sur l'assurance " des risques exceptionnels " (AWBZ dite " volet 1 ") a été introduite récemment, créant un régime spécifique d'assurance nationale obligatoire, qui a pour objet de couvrir les traitements de longue durée et les traitements onéreux, dont le risque ne peut être supporté par les individus ou directement couvert par l'assurance privée. Il couvre l'ensemble des résidents aux Pays-Bas, ainsi que les non-résidents employés aux Pays-Bas et soumis à l'impôt sur le revenu néerlandais. Il est géré à la fois par les caisses d'assurance-maladie sociale à but non lucratif et par des assureurs privés.

En 1995, le nombre des assureurs santé privés, dont la plupart sont des mutuelles, s'élevait à 47, et celui des caisses d'assurance-maladie sociale à 27. Toutes ces institutions, publiques ou privées, sont membres de l'Association des assureurs santé néerlandais.

5. L'assurance santé espagnole : addition des régimes public et privé et des coûts pour les assurés du secteur privé

Dans la première législation sur l'assurance en 1908, l'assurance-maladie (remboursement de frais ou prestations forfaitaires) est considérée comme une assurance à part entière et est placée sous la tutelle du ministère des Finances. L'assurance " assistance médicale " en revanche n'a été reconnue comme assurance qu'avec la loi sur les assurances de 1954. En vertu de cette loi, les entreprises médicales ont dû se transformer en entreprises d'assurance placées exclusivement sous le contrôle du ministère de la Santé. Par la loi du 30 janvier 1995, l'assurance assistance médicale est devenue une sous-branche de l'assurance-maladie et le régime juridique de l'assurance-maladie a été unifié.

Coexistent en Espagne un système national de santé et une assurance santé privée en train de se développer. Celle-ci en fait s'ajoute au système public pour parer à ses défaillances. C'est en ce sens que l'évolution du système de santé espagnol peut être considérée comme un anti-modèle.

93 % de la population espagnole est couverte par le système public, dont 10 % ont également souscrit une assurance auprès d'une entreprise privée pour couvrir les mêmes risques. Seuls les fonctionnaires civils et militaires, qui représentent 6,5 % de la population espagnole, ont la possibilité de choisir entre système public et assurance privée. Les autres citoyens sont soumis à une double contribution.

Le système sanitaire public garantit la couverture des soins primaires, spécialisés et hospitaliers (hors frais de soins dentaires, sauf extraction) ainsi qu'une partie des frais de produits pharmaceutiques prescrits sur ordonnance.

Le financement du système public repose essentiellement sur l'impôt et le budget général de l'Etat. Cependant la part de financement pour les cotisations sociales augmente et se substitue progressivement au financement budgétaire.

La principale assurance privée est l'assurance assistance médicale souscrite par 90 % des assurés à titre privé, qui offre le même type de couverture que le système public. Les soins dentaires sont le plus souvent assurés en complément (sauf extraction).

L'assurance santé privée est financée au travers de primes basées sur des bases actuarielles (nous ne disposons pas d'information plus détaillées sur ce point). Les cotisations encaissées par les mutuelles de fonctionnaires sont fixées après leur abondement partiel par le budget de l'Etat.

Le système de double contribution amène à un choix des assurés en faveur des prestations couvertes par l'assurance privée qu'ils ont souscrite afin de bénéficier de soins médicaux de meilleure qualité, plus rapides et plus personnalisés, ainsi que de prestations de confort. Dans ce cas, ils n'usent pas de leur droit d'accès au système public, qui leur reste cependant ouvert.

* *

*

Au-delà des variétés nationales, et de la place sensiblement différente prise par les assureurs privés dans le domaine de l'assurance-maladie selon les pays, on est d'abord frappé par la ressemblance des systèmes nationaux d'assurance santé en Europe. L'histoire, assez commune et marquée par la rupture de la seconde guerre mondiale, y joue un rôle plus important que la géographie.

Comme le relève le CEA, l'assurance-maladie, dans la majorité des pays européens, relève " jusqu'au début du 20ème siècle, presqu'exclusivement de l'initiative privée " 158( * ) .

Puis " les pouvoirs publics  ont joué un rôle croissant dans l'organisation de la santé et de son financement ... Après 1945, l'Etat a partout exercé une influence importante ".

" Cette politique a été progressivement remise en cause par l'accroissement endémique des frais de santé. Les gouvernements ont commencé à se demander s'il était indispensable que l'Etat finance lui-même les soins de santé. La plupart des pays recherchent un nouvel équilibre entre un financement public et un financement par l'économie de marché ".

Dans ce contexte, comme l'évoque le CEA dans sa réflexion liminaire : " la distinction entre assurance sociale et assurance privée pourrait s'atténuer dans l'avenir. Les assureurs privés sont à même de partager avec l'Etat la charge qu'impliquent les objectifs sociaux visés, sous réserve qu'ils puissent opérer sur des bases commerciales viables ". D'autant plus que le retrait de l'Etat dans la gestion des systèmes de santé peut justifier, au regard des directives européennes, une intervention des gouvernements visant à exercer un contrôle plus important sur les activités de l'assurance privée, à condition que soit respecté le principe de l'intérêt général.

Quoi qu'il en soit, ce programme fait ressortir le caractère commun des difficultés éprouvées par les systèmes de santé publics, qui les poussent tous, à des degrés divers et à des rythmes divers, vers la réforme. L'évolution de la gestion du système de santé aux Etats-Unis, plus ample et plus rapide, est en ce sens une expérience précieuse, ne serait-ce que pour tenir compte de certaines dérives récentes.

VI. L'EXPÉRIENCE AMÉRICAINE : ÉVOLUTION DU SYSTÈME DE SANTÉ DES ETATS-UNIS 159( * )

Le marché de la santé  aux Etats-Unis (c'est-à-dire les dépenses de santé américaines) est le plus important du monde développé, dans l'absolu, en pourcentage du PIB et par habitant. En 1996, ces dépenses représentent 1 000 milliards de dollars ou 14 % du PIB et croissent à un rythme rapide " (11 % en moyenne annuelle de 1960 à 1996 en valeur).

Il n'existe pas aux Etats-Unis de garantie publique de couverture du risque maladie, ni de garantie d'accès aux soins. De ce fait, en dehors des programmes publics comme Medicare qui assurent les soins pour les personnes âgées de plus de 65 ans 160( * ) , ou comme Medicaid qui prend en charge les dépenses de santé des personnes à faible revenu, et de la tradition de prise en charge des dépenses de santé pour les employeurs au travers de contrats collectifs (qui ne sont cependant pas obligatoires) une fraction importante de la population ne dispose pas de prise en charge formelle de ses dépenses de santé : en 1996, 41,7 millions d'Américains, soit 15,6 % de la population (fraction comparable à celle du Royaume-Uni). Ils ne payent pas non plus de cotisations à ce titre. Cependant, 10,8 millions, sur ces 42 millions, sont des enfants de moins de 19 ans (qui représentent 14,8 % de la population d'âge inférieur à 19 ans) qui n'ont donc pas nécessairement vocation à rester sans couverture. Un grand nombre des non assurés de plus de 19 ans sont également des jeunes qui choisissent l'auto-assurance et assument les risques associés à l'emploi. C'est cette situation d'articulation de la couverture des dépenses de santé qui rend particulièrement sensible la perte d'emplois aux Etats-Unis.

Il faut ajouter à ces remarques que l'assurance dommages finance entre 7 et 9 % des dépenses de santé totales aux Etats-Unis et apporte donc sa contribution à la couverture du risque des 41,8 millions de personnes qui n'ont pas accès aux soins selon les modalités " classiques " précédemment décrites. Ceci ne représente qu'une partie de financement total par l'assurance privée, qui s'élève en tout à plus d'un tiers des dépenses de santé en 1996 contre 20 % en 1960 (voir les acteurs du marché de la santé plus loin).

La structure du financement des dépenses de santé aux Etats-Unis se présente de la manière suivante en 1996.

Tableau 51

Structure du financement des dépenses de santé aux Etats-Unis

Dépenses personnelles :

171 G USD

Blue Cross/Blue Shield 40

Assurance dommages

Dépenses personnelles :

171 G USD

Dépenses courantes pour des

primes d'assurance inviduelle :21 G USD

Besoin de

financement

total des

Dépenses couvertes par les contrats d'assurance de groupes 316 G USD

Blue Cross/Blue Shield

dépenses

de

de santé :

Assurance employeurs

1 035

G USD *

Organismes de soins médicaux (MCO)

Dépenses publiques :

483 G USD

Medicaid : 148 G USD

483 G USD

Medicare : 203 G USD

Autres : 142 G USD

* milliards de dollars

Source : U. S. Health Care Financing Administration et Swiss Re Economic Research.

Au vu de cette situation de financement, il apparaît que le financement par l'assurance privée en général du système de santé est de 33 %, la part du financement public est de 47 %, le financement privé direct s'élevant à 17 %.

L'évolution de la structure du financement a été la suivante depuis 1960 :

Graphique 21

Evolution de la structure du financement des dépenses de santé aux Etats-Unis

Source : U.S. Health Care Financing Administration, à partir de Sigma n° 2/1998.

Les polices d'assurance santé individuelles sont apparues aux Etats-Unis depuis les années 1860, à la suite des polices d'assurance individuelles contre les accidents dans les années 1850. Les contrats d'assurance de groupe sont apparus dans les années 1910 et se sont développés dans les années 20 et les organismes de gestion de soins (" Managed Care Organisations " ou MCO) dans les années 30.

En 1940, seuls 2 millions de personnes, 9 % de la population américaine, bénéficiaient d'assurances privées.

C'est sur cet arrière-plan et des contraintes de gel des salaires que l'assurance santé souscrite par les employeurs s'est développée pendant la seconde guerre mondiale afin de retenir leurs salariés dans une période où la demande sur marché du travail était excédentaire. Les entreprises se mirent donc à offrir des avantages non salariaux (ou " wage benefits ") à leurs employés, qui étaient par ailleurs exonérés des impôts sur le revenu et de taxe de sécurité sociale. Ils devinrent rapidement un des sujets majeurs dans les négociations collectives. Ceci a permis d'accroître rapidement dans l'après-guerre le nombre d'Américains couverts par une assurance-maladie privée via leur entreprise, ce qui fait du système de couverture du risque santé un système unique dans l'ensemble des pays développés, comme l'ignorent souvent les Américains.

Graphique 22

Evolution de la place de l'assurance privée dans le financement de la santé aux Etats-Unis depuis la fin de la seconde guerre mondiale

Source :HIAA Source of Book of Health Insurance Data, 1997 à partir de Sigma n° 2/1998.

Le système de santé américain a connu un autre tournant dans les années 60. La pratique de l'assurance santé par les employeurs laissant un nombre croissant de personnes hors de toute couverture sociale, le gouvernement adopta le système Medicaid en 1965 et Medicare en 1966.

Dans les années 80 et surtout 90 s'est opéré une migration croissante entre la couverture par l'assurance privée (employeurs) et les organismes de gestion de soins dits " Managed care ", pour satisfaire aux besoins de couverture des employés auxquels les entreprises n'offraient plus de programmes d'assurance d'une part, et pour les salariés des petites et moyennes entreprises. En parallèle sont apparus également les organismes d'auto-assurance (" Self Insured Organizations ").

Le taux de pénétration du marché de l'assurance-maladie par les " Health Maintenance Organizations " 161( * ) (HMO, qui sont la principale forme de MCO, qui ont été traduites en Français par le terme " réseaux de soins assistés ") a pu s'élever dans certains Etats jusqu'à 68 % en 1996. Les HMO offrent une prise en charge totale des frais médicaux et d'hospitalisation contre une somme fixe d'argent par personne et par mois.

Les caractéristiques générales des MCO sont :

- de reposer sur des accords avec les prestataires de soins (médecins, hôpitaux) pour fournir un ensemble de prestations complet à leurs membres ;

- de définir explicitement les critères de sélection des prestataires de soins ;

- de mettre au point les dispositifs formels d'assurance de la qualité par l'évaluation des services ;

- d'intégrer des orientations financières pour que les membres des réseaux suivent les procédures et utilisent les prestataires prévus par l'organisme.

Dans un article sur la gestion du risque maladie, Claude Le Pen précise les sept techniques communes de gestion qui spécifient le " Managed Care " (HMO ou PPO pour " Preferred Providers Organizations " ou POS pour " Point of services ") :

- la limitation de l'accès des patients aux prestations agréées ;

- la sélection de ces prestataires sur la base d'un cahier des charges précis ;

- leur investissement financier aux économies réalisées ;

- la création d'un niveau obligatoire de soins primaires qui filtre l'accès aux soins de spécialité et à l'hôpital ;

- la tenue de profils de prescriptions et d'activité pour les médecins ;

- la publication de référentiels professionnels pour le traitement des pathologies les plus courantes ;

- le développement parmi les médecins et les patients d'une " culture organisationnelle " 162( * ) .

On notera les évolutions récentes du marché de la couverture des dépenses de santé et de la fourniture des soins.

Graphique 23

Evolution récente de la structure de financement des dépenses de santé aux Etats-Unis en volume de primes

(millions de $)



Source : HIAA Source Book of Health Insurance Data, 1997, à partir de Sigma n° 2/1998.

Cependant, le " Managed Care " a fait apparaître certaines dérives, ou du moins certaines limites lourdes, comme la pratique de la sélection du risque, qui ont amené à une nouvelle forme de concurrence dans l'offre de soins aux Etats-Unis.

Comme l'expose Sigma, " dans l'environnement de la gestion de soin (" Managed Care "), la gestion maîtrisée de la dépense passe par l'utilisation de médecins aiguilleurs (" gate-keepers ") qui interviennent en combinaison avec des protocoles médicaux explicites pour contenir la consommation médicale ". De ce fait, les prestataires des soins se trouvent mis par les financiers en première ligne pour la maîtrise des coûts et du contrôle de gestion de soin. Beaucoup ont eu le sentiment qu'ils perdirent le contrôle de la capacité à exercer une médecine de qualité et à prescrire librement les thérapies les plus adaptées selon les principes de la déontologie médicale.

Une réaction de médecins visant à obtenir à l'égard des intermédiaires et des organisateurs une plus grande latitude de mouvement et d'indépendance dans la pratique des soins. Ces initiatives médicales ont vu le jour récemment sous la forme variée de :

- PSO (Provider Service Organizations) organisations de prestataires de services ;

- PHO (Provider Hospital Organizations) organisations de prestataires de soins médicaux et hospitaliers ;

- PPM (Physician Practice Managers) gestionnaires de la pratique médicale ;

tous organismes nouveaux qui gardent la pratique des réseaux et la coordination des soins et ont pour point commun d'être dirigés par les médecins (provider driven and sponsored) et non plus par les financiers, dont le souci de rentabilité avait tendance à s'exprimer au détriment de la qualité (et de la quantité) des soins 163( * ) .

Ces organismes entrent maintenant en compétition directe avec les MCO et les assureurs classiques.

* *

*

Le plus frappant dans l'expérience américaine, au-delà de la spécificité générale du système de soins et du caractère volontaire de l'assurance-maladie, c'est sa très grande capacité à évoluer, son pluralisme, sa plasticité et sa capacité innovatrice au fur et à mesure que les problèmes associés à une forme d'offre de soins ou de financement se font jour. Ses plus grandes faiblesses sont de ne pas permettre la prise en compte obligatoire des risques difficiles ou d'avoir permis, en l'absence de cahiers des charges sur le fonctionnement des institutions de santé, que la concurrence s'exerce au détriment des patients. Au total, l'ensemble du système de santé américain, marqué par ce caractère facultatif de l'adhésion, est d'une très grande variété initiale et dans une évolution permanente qui ne fait cependant jamais disparaître la pluralité historique de l'offre, mais permet à de nouvelles formes d'organisation, répondant à des besoins nouveaux, de prendre pied sur le marché. C'est certainement ce caractère de bouillonnement expérimental qui présente un intérêt en Europe aujourd'hui, mutatis mutandis.

Tableau 52

Evolution de la prise de risque sur le marché de la santé
aux Etats-Unis

Avant la

2 e guerre mondiale

 

Années 1940 - Milieu  années 1960

 

Fin années 1960 -

Début années 1980

 

Milieu

années 1980 - Milieu

années 1990

 

Fin

années 1990

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Patient

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Patient

 

Employeur

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Patient

 

Employeur

 

Etat/contribuable

 
 

Patient

 
 
 
 
 
 

Patient

 
 
 

Assureur

 

Assureur

 

Assureur

 
 

Assureur

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Etat/contribuable

 

Autoassurance

 

HMO

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

HMO

 

Associations

de médecins

Source : Swiss Re, Sigma n° 2/1998.

A. GAMME DES SCÉNARIOS POSSIBLES D'ÉVOLUTION : DE LA COOPÉRATION À LA CONCURRENCE

L'évolution de l'assurance-maladie passe par une redéfinition des rapports entre l'organisme public d'assurance qu'est la Caisse nationale d'assurance-maladie et les autres prestataires d'assurance que sont les mutuelles et les compagnies d'assurance. Cette redéfinition, par voie d'expérimentation, peut passer par toute une gamme de solutions allant d'une étroite coordination, à créer selon le modèle de la proposition Axa, à une franche compétition entre l'assurance au premier franc entre acteurs publics et privés dans le domaine de l'assurance-maladie, sans mentionner la voie du cumul des systèmes privés et publics et des cotisations dans le contexte de faillite avéré du système public d'assurance-maladie, ce qui est l'issue (plutôt que la solution) espagnole.

En ce sens, il serait particulièrement intéressant d'évaluer précisément les systèmes GAMEX et RAM 164( * ) de gestion privée de l'assurance-maladie des exploitants agricoles et des professions indépendantes sous la tutelle du ministère de l'Agriculture et de la CANAM, qui fonctionnent depuis que les lois du 25 janvier 1961 et du 12 juillet 1966 ont rendu obligatoire l'assurance-maladie des exploitants agricoles et celle des professions indépendantes, tout en laissant concurrentielle leur gestion, à la différence du régime des salariés géré monopolistiquement par le CNAMTS depuis 1945.

1. La proposition d'expérimentation d'un réseau médical d'assurance santé par le groupe AXA165( * ) : scénario coopératif

La commission dite " Soubie ", créée par les ordonnances du 24 avril 1996 " Juppé " sur la Sécurité sociale, composée de 15 membres (5 représentants des médecins, 5 représentants des divers organismes de prise en charge directe ou déléguée de l'assurance obligatoire du risque santé : CNAMTS, MSA, CANAM, Mutuelles 45, assurances privées et 5 personnalités qualifiées) est chargée d'examiner et de donner son avis (sur la base d'un vote majoritaire) sur les expérimentations en matière de filières et de réseaux, qui ont besoin d'une dérogation à la législation existante pour fonctionner. C'est dans ce contexte que la proposition expérimentale d'AXA, ainsi que plusieurs autres, comme celle de la MSA et de Groupama, ont émergé. Seule la proposition de Groupama, en août 1998, a fait l'objet d'un avis positif de la commission et a été ce stade transmis au ministre des Affaires sociales pour décision.

On trouvera en annexe à des fins d'information exhaustive une présentation de l'architecture de la proposition d'expérimentation d'AXA, étant donné que ce projet a donné lieu à de nombreuses réactions a priori sans être nécessairement appréhendé dans son intégralité. On trouvera également en annexe un résumé des projets d'expérimentation de la MSA et de Groupama. C'est pourquoi l'on se contentera ici de n'en faire ressortir que les principales caractéristiques.

Il s'agit d'une proposition d'expérimentation à petite échelle à la mise au point de laquelle la profession médicale a été étroitement associée. Elle repose sur une étroite coordination de la Sécurité sociale et de l'assureur privé délégué qui est, dans le cadre du projet AXA, la Mutuelle AXA santé. Elle a pour ambition d'améliorer l'efficacité de l'ensemble " système de soins " et " système de financement " des dépenses de santé dans l'intérêt bien compris de tous les acteurs.

Cette proposition revêt un certain nombre de caractéristiques soulignées ici.

Le projet expérimental s'inscrit dans le cadre institutionnel de la Sécurité sociale et dans le contexte de la couverture maladie universelle. L'ensemble du risque maladie est couvert et il n'y a pas de sélection du risque.

Il repose sur la division entre un réseau d'assistance santé, qui assure l'orientation médicale 166( * ) par un médecin généraliste à partir d'un centre d'appel et la coordination des soins (en permettant le suivi de la chaîne des soins et en mettant en réseau informatique les médecins) et une société d'assurance à forme mutuelle qui gère le risque maladie.

Le projet respecte le principe de solidarité comme fondement du système de protection sociale français : les assurés de " Axa santé mutuelle assurance " sont également couverts au titre de l'assurance complémentaire, sans sélection ni questionnaire médical, et ils demeurent assujettis au versement des cotisations d'assurance-maladie ainsi que leur employeur.

Le pilier du projet est le suivant : les caisses primaires d'assurance-maladie allouent à la société d'assurance mutuelle, dans le cadre d'une convention de partenariat, une enveloppe financière globale qui correspond au remboursement a priori des dépenses de santé (ambulatoires et hospitalières) à la charge de la Sécurité sociale effectuées par la catégorie d'assurés concernés par l'expérimentation. A partir de là, la société d'assurance mutuelle assume le risque financier pouvant naître du dépassement de l'enveloppe et bénéficie de l'écart dans le cas contraire.

On rentrera de cette manière dans un processus de gestion itératif qui fait tout l'intérêt du projet. Par ce biais, en effet, la sécurité sociale est incitée à connaître ses risques, et ainsi à concourir à leur maîtrise en définissant une enveloppe plafond et en déléguant la gestion à un assureur.

Le dispositif est résumé dans le graphique 24 sur l'architecture du réseau médical d'assistance santé.

Graphique 24

Architecture du réseau médical d'assistance santé proposé par AXA

Mutuelle AXA Santé

- Praticiens - Imagerie médicale

- Hôpitaux - Biologie, pharmacie

- Spécialistes - Transport

Adhérent / client

Enveloppe allouée par la S.S.

Prime d'assurance complémentaire

RÉSEAU MÉDICAL D'ASSISTANCE SANTÉ

PATIENT

GESTION DE RISQUE

Coordination des soins

1. L'assurance par tous les acteurs au premier franc du risque santé : un scénario concurrentiel

Il s'agirait au fond de transposer dans le domaine de la santé les principes de l'assurance obligatoire combiné avec la liberté de choix de l'assureur tel qu'il existe dans divers domaines, comme le domaine automobile dans les risques de masse (sans introduction nécessaire d'un système de bonus-malus si l'on veut organiser au travers d'une mutualité plus large des populations une solidarité interindividuelle plus grande).

C'est le projet qu'appelaient de leurs voeux les professionnels de l'assurance en 1996 et auxquels pensent " in petto " de nombreux assureurs aujourd'hui. Il pourrait mettre, à certaines conditions, en pleine concurrence caisses primaires d'assurance-maladie (ou caisses régionales) avec les sociétés d'assurance privées autorisées à pénétrer le métier de l'assurance-maladie au premier franc.

Le système n'est pas incompatible avec un mécanisme national de solidarité assurant les écarts de risques entre les organismes d'assurance-maladie rendus insusceptibles par cahier des charges de pratiquer la sélection du risque et le refus du mauvais risque.

Il supposerait que la Sécurité sociale dans le domaine de l'assurance-maladie déplace le centre de gravité de son action pour définir les cahiers des charges, en assurer le respect par le contrôle des divers assureurs, évaluer l'action des divers acteurs et tirer les leçons de l'expérience.

Pour révolutionnaire qu'il soit, ce scénario n'est pas nécessairement impensable, pour peu que sa mise en oeuvre soit faite de manière prudente. Il convient même de savoir si ce scénario n'est pas le plus en phase avec la vision concurrentielle européenne qui prévaut aussi dans le domaine de l'assurance santé (voir en ce sens l'annexe 3).

C'est sur la base du droit européen qu'a d'ailleurs été introduite par le " Mouvement pour la liberté de la protection sociale " une plainte contre l'Etat français pour manquement à ses obligations de transposition des directives 92/49 et 92/96, interprétées comme ouvrant le champ de la concurrence à tous les acteurs, y compris dans le domaine de l'assurance santé.

2. Dynamisation de l'activité des caisses d'assurance-maladie

Face à ces scénarios de coordination ou de concurrence entre assurances privées et Sécurité sociale, il convient de ne pas négliger les ripostes potentielles, pour le régime d'assurance obligatoire et notamment dans l'assurance complémentaire santé, des caisses primaires régionales d'assurance-maladie, qui disposent d'un certain nombre d'atouts et qui pourraient, moyennant la création d'une véritable dynamique du service public, devenir aussi compétitives que d'autres structures. Quels résultats donneraient l'expérimentation d'une autonomie au niveau local des CPAM et des CPRM pour la mise en place de réseaux décentralisés de coordination de soins ? Pourquoi fixer par arrêté ministériel la rémunération des mutuelles chargées de la gestion des régimes obligatoires, et ne pas laisser le soin à la CNAM de négocier " les remises de gestion " ?

Les caisses d'assurance-maladie gèrent en effet à l'heure actuelle des flux de cotisations et de prestations santé, grâce à des équipements informatiques puissants, dont ne sont pas fréquemment dotées par exemple beaucoup de petites mutuelles. Elles disposent d'historiques des dépenses, de dossiers et de médecins conseils pour mettre en valeur cette richesse dormante dans les fichiers. Par ailleurs, les caisses d'assurance-maladie ont une connaissance de l'ensemble de la population couverte et du " risque santé " qui est incomparable, puisqu'elles ne pratiquent aucune sélection et prennent " tout le monde ". Elles pourraient développer, dans le cadre de l'objectif de la maîtrise des dépenses de santé, la pratique du " dialogue confraternel " entre médecins conseils des services de contrôle médical et médecins de ville, souvent isolés et preneurs de conseils en matière de savoir-faire thérapeutique, un savoir-faire qui est rassemblé par définition dans les mains des médecins conseil 167( * ) . Enfin, les caisses disposent d'un réseau de bureaux d'accueil très important, d'environ 40 guichets au minimum par département, et ont su mettre en place dans les campagnes des camions itinérants.

Il resterait à savoir dans quel cadre juridique, maintenu ou réformé, la Sécurité sociale, qui est la mieux placée en matière de connaissance du risque santé, pourrait être amenée à mieux valoriser ses atouts, si elle était dotée d'une plus grande autonomie de mouvement et autorisée à pratiquer l'assurance santé complémentaire. Il convient de rappeler ici que le statut du personnel des caisses d'assurance-maladie primaires et régionales est de droit privé. Seul le statut du personnel des caisses nationales qui sont des établissements publics administratifs est un statut de droit public.

* *

*

L'heure de l'expérimentation, en provenance de tous les horizons du champ de l'assurance-maladie, semble venue. Elle est d'autant plus souhaitable que ces expérimentations, limitées dans l'espace et dans le temps, ne seront pas étendues avant une évaluation précise de leurs résultats. Les résultats discutables, en termes de qualité de la santé, de la mise en place d'une concurrence des financeurs aux Etats-Unis, ne doivent pas empêcher l'Europe de faciliter une certaine concurrence dans l'offre de soins et la gestion de cette offre, à la condition donc que cela soit au profit de la qualité du service rendu à tous les assurés sociaux, et non à certains d'entre eux seulement.

Dans une Europe de la santé, caractérisée par la diversité et le mouvement, il serait regrettable, et certainement peu efficace à moyen terme, que la France se distingue par son incapacité à sortir du statu quo et par la stérilisation de la créativité. Même si " la logique et les limitations d'un comportement concurrentiel idéal dans les conditions d'incertitude nous obligent à reconnaître que la description de la réalité que fournit un système de prix impersonnels est incomplète " 168( * ) .

ANNEXES

Annexe 1 : Réglementation nationale des placements des entreprises d'assurance

Annexe 2 : Pourcentage maximum des fonds pouvant être affectés à une catégorie donnée d'investissement dans les pays de l'OCDE

Annexe 3 : Instabilité de la fiscalité de l'assurance-vie en France : les régimes d'imposition successifs depuis 1980

Annexe 4 : Projets d'expérimentation proposés à la commission " Soubie "

• Projet de la gestion déléguée par le groupe AXA

• Projet de réseau de soins ambulatoires par Groupama

• Projet de réseau gérontologie par la MSA
Annexe 5 : Les monopoles sociaux : les directives européennes d'assurance et le droit de la concurrence

Annexe 6 : Sociétés d'assurance-vie et fonds de pension dans la participation au capital des entreprises américaines sur longue période

ANNEXE 1

REGLEMENTATION NATIONALE DES PLACEMENTS DES ENTREPRISES D'ASSURANCE

Article R.* 332-1 (décret n° 90-700 du 8 août 1990)

1. Les engagements réglementés mentionnés à l'article R. 331-1 doivent, à toute époque, être représentés par des actifs équivalents.

2. Les engagements pris dans une monnaie doivent être couverts par des actifs congruents, c'est-à-dire libellés ou réalisables dans cette monnaie.

3. Les actifs mentionnés au 1 doivent être localisés sur le territoire (décret n° 94-635 du 25 juillet 1994) " d'un Etat membre de la Communauté européenne ".
Toutefois, les engagements pris dans le cadre de la coassurance communautaire, en exécution des dispositions de l'article L. 352-1, par une entreprise mentionnée à l'article L. 310-1 peuvent être couverts par des actifs localisés dans le pays de l'apériteur.
4. Les engagements pris par des entreprises mentionnées à l'article L. 3101 et résultant d'opérations réalisées en libre prestation de services au sens (décret n  93-469 du 23 mars 1993) " des articles L. 351-1 et L. 353-1 sont soumis aux règles du pays de situation du risque ou de l'engagement " lorsque ce dernier subordonne l'exercice de ces opérations à agrément. Assu . R . 328-1 s .
Article R. 332-1-1 (décret n° 90-700 du 8 août 1990)
I. Par dérogation aux dispositions du 2° de l'article R. 332-1, les entreprises d'assurance peuvent à concurrence de 20 % de leurs engagements, ne pas couvrir ceux-ci par des actifs congruents.

II. Les entreprises peuvent également ne pas représenter leurs provisions techniques par des actifs congruents si, pour satisfaire aux dispositions de l'article R. 332-1, elles doivent détenir dans une monnaie des éléments d'actifs d'un montant ne dépassant pas 7 % des éléments d'actifs existant dans l'ensemble des autres monnaies.
Article R. 332-2 (décret n° 90-981 du 5 novembre 1990)

En application des dispositions de l'article R. 332-1 et sous réserve des dérogations prévues à ce même article, à l'article R. 332-1-1 ainsi qu'aux articles R. 332-3-3 et R. 332-10, les engagements réglementés mentionnés à l'article R. 331-1 sont représentés par les actifs suivants :

A - Valeurs mobilières et titres assimilés

1°) (décret n° 96-8581 du 27 juin 1996) " Obligations et autres valeurs émises ou garanties par l'un des Etats membres de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) ainsi que les titres émis par la Caisse d'amortissement de la dette sociale instituée par l'article 1 er de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ; obligations émises ou garanties par un organisme international à caractère public dont un ou plusieurs Etats membres de la Communauté européenne font partie ; obligations émises ou garanties par les collectivités publiques territoriales d'un Etat membre de l'OCDE " ;

2°) obligations, parts de fonds communs de créance et titres participatifs inscrits à la cote d'une bourse de valeurs d'un Etat membre de l'OCDE autres que celles ou ceux visés au 1° ;

2° bis) titres de créances négociables (certificats de dépôt, billets de trésorerie, bons des institutions et des sociétés financières spécialisées) émis par des personnes morales autres que les Etats membres de l'OCDE, ayant leur siège social sur le territoire de ces Etats, à condition que ces titres soient négociés sur un marché réglementé en fonctionnement régulier d'un Etat membre de l'OCDE ;

3°) actions des sociétés d'investissement à capital variable et parts de fonds communs de placement dont l'objet est limité à la gestion d'un portefeuille de valeurs mentionnées aux 1°, 2° et 2° bis du présent article, dans les conditions fixées par l'article R. 332-14 ;

4°) actions et autres valeurs mobilières inscrites à la cote d'une bourse de valeurs d'un Etat membre de l'OCDE autres que celles visées aux 3°,5°, 5° bis, 8° et 9° bis ;

5°) actions des entreprises d'assurance, de réassurance, de capitalisation ayant leur siège social sur le territoire de l'un des Etats membres de l'OCDE ;

5° bis) actions des entreprises d'assurance, de réassurance, de capitalisation autres que celles visées au 5° ;

6°) actions, parts et droits émis par des sociétés commerciales et titres participatifs émis par des sociétés d'assurance mutuelles ayant leur siège social sur le territoire de l'un des Etats membres de l'OCDE, autres que les valeurs visées aux 2°, 2° bis, 3°, 4°, 5°, 5° bis, 8° et 9° bis ;

7°) parts des fonds communs de placement à risques du chapitre IV de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 ;

8°) actions des sociétés d'investissement à capital variable et parts des fonds communs de placement, autres que celles mentionnées aux 3° et 7°, dans les conditions fixées par l'article R. 332-14 ;

B - Actifs immobiliers

9°) droits réels immobiliers afférents à des immeubles situés sur le territoire de l'un des Etats membres de l'OCDE ;

9° bis) parts ou actions des sociétés à objet strictement immobilier, parts des sociétés civiles à objet strictement foncier, ayant leur siège social sur le territoire de l'un des Etats membres de l'OCDE, inscrites ou non inscrites à la cote d'une bourse de valeurs d'un Etat membre de l'OCDE, dans les conditions fixées par l'article R. 332-15 ;

C - Prêts et dépôts

10°) prêts obtenus ou garantis par les Etats membres de l'OCDE, par les collectivités publiques territoriales et les établissements publics des Etats membres de l'OCDE ;

11°) prêts hypothécaires aux personnes physiques ou morales ayant leur domicile ou leur siège social sur le territoire de l'un des Etats membres de l'OCDE, dans les conditions fixées par l'article R. 332-12 ;

12°) autres prêts ou créances représentatives de prêts consentis aux personnes physiques ou morales ayant leur domicile ou leur siège social sur le territoire de l'un des Etats membres de l'OCDE, dans les conditions fixées par l'article R. 332-13 ;

13°) dépôts, dans les conditions fixées par l'article R. 332-16. Les intérêts courus des placements énumérés ci-dessus sont assimilés aux dits placements. Assur. R . 421-47, R . 422-5, R . 431-35, R. 431-57.

Article R. 332-3 (décret n° 90-981 du 5 novembre 1990)

Rapportées au montant total des engagements réglementés mentionnés à l'article R. 331-1, toutes monnaies confondues, diminuée du montant total des actifs mentionnés aux articles R. 332-3-4 à R. 332-10, toutes monnaies confondues, la valeur au bilan de chacune des catégories d'actifs énumérées ci-après ne peut excéder, sauf dérogation accordée cas par cas par la commission de contrôle des assurances :

1°) 65 pour cent pour l'ensemble des valeurs mentionnées au 4° au 8° de l'article R. 332-2, dont 5 pour cent au maximum pour l'ensemble formé par les actions d'entreprises étrangères d'assurance mentionnées au 5° bis de l'article R. 332-2  et par les actions et parts mentionnées aux 6° et 7° de l'article R. 332-2 ;

2°) 40 pour cent pour les actifs immobiliers mentionnés aux 9° et 9° bis de l'article R. 332-2 ;

3°) 10 pour cent pour l'ensemble des valeurs mentionnées aux 10°, 11° et 12° de l'article R. 332-2.

Article R. 332-3-1 (décret n° 84-1023 du 14 novembre 1984 ; décret n° 90-981 du 5 novembre 1990)

Rapportée au montant défini à l'article R. 332-3, la valeur au bilan des actifs mentionnés ci-après ne peut excéder, sauf dérogation accordée cas par cas par la commission de contrôle des assurances :

1°) 5 pour cent pour l'ensemble des valeurs émises et des prêts obtenus par un même organisme, à l'exception :

a) (décret n° 96-581) du 27 juin 1996) " Des valeurs émises ou garanties ou des prêts obtenus par un Etat membre de l'OCDE ainsi que des titres émis par la caisse d'amortissement de la dette sociale instituée par l'article 1 er de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale " ;

b) des actions des sociétés d'investissement à capital variable et des parts des fonds communs de placement visées au 3° de l'article R. 332-2, dont le portefeuille est exclusivement composé des valeurs mentionnées ci-dessus. Le ratio de droit commun de 5 pour cent peut atteindre 10 pour cent pour les titres d'un même émetteur, à condition que la valeur des titres de l'ensemble des émetteurs dont les émissions sont admises au-delà du ratio de 5 pour cent n'excède pas 40 pour cent du montant défini à l'article R. 332-3.

2°) 10 pour cent pour un même immeuble ou pour les parts ou actions d'une même société immobilière ou foncière ;

3°) 0,5 pour cent pour les valeurs mentionnées aux 6° et 7° de l'article R. 332-2 émises par une même société ou un même fonds.

Pour l'application des dispositions du 5° de l'article R. 332-2, une entreprise ne peut affecter à la représentation de ses engagements réglementés plus de 50 pour cent des actions émises par une même société.

ANNEXE 2


POURCENTAGE MAXIMUM DES FONDS POUVANT ÊTRE AFFECTÉS À UNE CATÉGORIE DONNÉE D'INVESTISSMENT DANS LES PAYS DE L'OCDE


Pourcentage maximum des fonds pouvant être affectés à une catégorie donnée d'investissement dans les pays de l'OCDE

 

Actions d'entreprises résidentes (cotées)

Actions d'entreprises résidentes (non cotées)

Actions d'entreprises étrangères

Obligations et autres titres étrangers

Immobilier

Prêts

(hypothécaires)

Prêts

(non hypothécaires)

 

Non-vie

Vie

Non-vie

Vie

Non-vie

Vie

Non-vie

Vie

Non-vie

Vie

Non-vie

Vie

Non-vie

Vie

Allemagne

30

30

10

10

6

6

5

5

25

25

50 a

50 e

50 a

50 e

Australie

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

Autriche

30 a

30 e

5

5

30 a

30 e

-

-

30 a

30 e

-

-

0

0

Belgique

-

-

10 a

10 e

10 a 2

10 e 2

10 3

10 3

10 4

10 4

-

-

5 5

5 5

Canada

25 a

5-25 e

25 a

5-25 e

0

5-25 e

0

 

10

5-25 e

-

-

5

5

Danemark

40 a

40 e

10

10

40 a,d

40 d,e

-

-

-

-

-

-

10

10

Espagne

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

-

Etats-Unis (N-Jersey)

-

15 e

-

15 e

h

i

h

i

5

10

40

60

-

-

Etats-Unis (Delaware)

40 a

1

40 a

1

5

5

5

5

25

25

50

50

-

-

Finlande

20

20

0

0

0

0

0

0

-

-

-

-

-

-

France

65 a

65 e

65 a

65 e

65 a

65 e

-

-

40

40

10 b

10 f

10 b

10 f

Grèce

30 a

30 e

30 a

30 e

30 a

30 e

-

-

40

50

10 b

10 f

10 b

10 f

Irlande

50-60 a

55 e

20

2,5

50-60 a

55 e

-

-

60

25

15-30 b

10

15-30 b

45

Islande

40 a

40 e

10 b

10 f

40a

40 e

10 b

10 f

-

-

-

-

10 b

10 f

Italie

20

20

20

20

10

20

30

50

35

50

20

50

0

0

Japon

30 a

30 e

30 a

30e

30b

30 f

30 b

30 f

20

20

55 c

50 g

55 c

30 g

Luxembourg

10

10

5

5

5

5

10

10

40

40

10 a

10 e

0

0

Mexique

30

30

30

30

30

30

30

30

40

40

40

40

40

40

Norvège

20 a

20 e

20 a

20e

20 a

20 e

30 b

30 f

30 b

30 f

30 b

30 f

30 b

30 f

Pays-Bas

-

-

10 a

10 e

-

-

-

-

-

-

10 a

10 e

5

8

Portugal

25 a

25 e

10

10

25 a

25e

60

60

35

45

10

25

10

25

Royaume-Uni

-

-

10 a

10e

-

-

-

-

-

-

10 a

10 e

10 a

10 e

Suède

25 a

25 e

25 a

25 e

25 a

25 e

-

-

25 b

25 f

25 b

25 f

10

10

Suisse

30 a

30 e

30 a

30 e

25b

25 f

20 b

20 f

-

-

-

-

0

0

Turquie

-

-

10

10

-

-

-

-

20

20

20

20

20

20

a) Maximum pour l'ensemble de ces catégories d'investissements (non-vie), b) Maximum pour l'ensemble de ces catégories d'investissements (non-vie), c) Maximum pour l'ensemble de ces catégories d'investissements (non-vie), d) Dix pour cent si non cotées,e) Maximum pour l'ensemble de ces catégories d'investissements (vie), f) Maximum pour l'ensemble de ces catégories d'investissements (vie), g) Maximum pour l'ensemble de ces catégories d'investissements (vie), h) L'investissement ne doit pas dépasser la valeur des polices en cours dans le pays étranger,

i) Cinq pour cent pour l'ensemble, deux pour cent en tout dans des titres étrangers, sauf pour " les investissements étrangers garantis " définis dans les statuts.

Note : les maximum fixés en matière d'investissements étrangers sont distincts des conditions de congruence des devises utilisées pour les engagements vis-à-vis de l'étranger.

1. 250 pour cent (au prix du marché) des fonds propres et de l'excédent, 2. Uniquement les actions non cotées, 3. Uniquement les obligations d'Etat et d'entreprises hors zone A (cf. directive 89/647:CEE, 4. Placements dans un immeuble ou dans plusieurs immeubles proches qui constituent un seul investissement, 5. Cinq pour cent avec un maximum de un pour cent pour un seul prêt.

3

ANNEXE 3


INSTABILITÉ DE LA FISCALITÉ
DE L'ASSURANCE-VIE EN FRANCE :
LES RÉGIMES D'IMPOSITION SUCCESSIFS
DEPUIS 1980

Tableau synoptique des changements de régimes successifs de l'assurance-vie

Date

A la souscription

En cours de contrat

Dénouement en cas de vie ou rachat

Dénouement en cas de décès

 

Réduction d'impôt

Imposition sur la fortune

Prélèvements sociaux

Imposition sur le revenu

Prélèvements sociaux directs

Droits de succession

1 er janv. 1980

-

-

-

-

-

Institution principe d'imposition :

- souscription + 66 ans

- règle des 3/4

- abattement 100 000F

1 er janv. 1982

-

Création IGF

Imposition :

- primes soumises à 757 B pour contrats en cas de décès

- valeur de rachat, pour autres contrats

-

-

-

-

1 er janv. 1983

Création crédit d'impôt pour primes sur contrats en cas de vie

-

-

Institution principe d'imposition : IR ou PL 45, 25 et 15 % Exonération si DMP 6 ans

-

-

1 er janv. 1984

-

-

-

-

Création contribution sociale permanente (1%) applicable si rachat imposable

-

1 er janv. 1987

-

Suppression IGF

-

-

-

-

1 er août 1987

-

-

-

-

Création prélèvement social (1%) applicable si rachat imposable

-

1 er janv. 1989

-

Création ISF (même base qu'IGF)

-

-

-

-

1 er janv. 1990

-

-

-

IR ou PL 35 et 15% Exonération si durée 8 ans

-

-

1 er fév. 1991

-

-

-

-

Création CSG (1,1%) applicable si rachat imposable

-

20 nov. 1991

-

-

-

-

-

Suppression ancien régime : exonération (sauf modification substantielle) Nouveau régime :

- versement + 70 ans

- abattement 200 000F

Tableau synoptique des changements de régimes successifs de l'assurance-vie (suite)

Date

A la souscription

En cours de contrat

Dénouement en cas de vie ou rachat

Dénouement en cas de décès

 

Réduction d'impôt

Imposition sur la fortune

Prélèvements sociaux

Imposition sur le revenu

Prélèvements sociaux directs

Droits de succession

1 er janv 1992

-

Imposition :

- valeur de rachat pour contrats rachetables

- primes soumises à 757 B pour contrats non rachetables

-

-

Création taxe proportionnelle

(0,6 %) applicable si rachat imposable

-

31 déc. 1992

-

-

-

-

Suppression taxe proportionnelle

-

1 er juill. 1993

-

-

-

-

Augmentation du taux de CSG

(2,4 %)

-

20 sept. 1995

Ouvrent droit à réduction uniquement :

- primes périodiques sur contrats antérieurs

- primes des contribuables peu imposés

-

-

-

-

-

1 er fév. 1996

-

-

Création CRDS (0,5 %) applicable sur contrats F quand attribution de PB

-

Création CRDS (0,5 %) applicable sur rachats de

contrats UC

-

5 sept. 1996

Ouvrent droit à réduction uniquement primes périodiques sur contrats souscrits :

- avant 20.09.1995

- avant 05.09.1996 par des contribuables peu imposés

-

-

-

-

-

1 er janv. 1997

-

-

Augmentation taux (3,4 %) et changement assiette CSG applicable sur contrats F quand attribution de PB

-

Augmentation taux (3,4 %) et changement assiette CSG applicable sur rachats de

contrats UC

-

20 oct. 1997

Définition restrictive des primes périodiques

-

-

-

-

-

1 er janv. 1998

-

-

Augmentation taux CSG (7,5 %).

Création prélèvement social (2%) sur même base

Fin exonération après 8 ans IR ou PL 35, 15 ou 7,5 %

Augmentation taux CSG (7,5 %)

-

ANNEXE 4


PROJETS D'EXPÉRIMENTATION PROPOSÉS À LA COMMISSION "SOUBIE"

Projet de la gestion déléguée par le groupe AXA

Projet de réseau de soins ambulatoires par Groupama

Projet de réseau gérontologie par la MSA

I. PROJET DE LA GESTION DÉLÉGUÉE PAR LE GROUPE AXA

Le groupe AXA propose, à titre expérimental, la mise en place en Ile-de-France d'un réseau médical d'assistance santé. Ce projet s'appuie sur les articles L 162-31 et L 162-31-1 du code de la Sécurité sociale et respecte le cahier des charges établi par la Caisse nationale d'assurance-maladie.

Il s'inscrit dans le cadre du service public de la Sécurité sociale et dans le contexte de la couverture maladie universelle qu'il contribue à renforcer. Il a pour objectif d'améliorer la qualité et la sécurité des soins par la prise en charge globale du patient et d'infléchir l'évolution des dépenses de santé à la charge de la collectivité.

Une société d'assurance à forme mutuelle, " AXA santé mutuelle assurance ", gère le risque maladie et un réseau d'assistance santé assure l'orientation médicale et la coordination des soins.

Le projet respecte le principe de solidarité, fondement de notre système de protection sociale. Les assurés auprès de " AXA santé mutuelle assurance " sont couverts au titre de l'assurance complémentaire sans sélection, ni questionnaire médical. Ils demeurent assujettis au versement des cotisations d'assurance-maladie ainsi que leur employeur. Les caisses primaires d'assurance-maladie allouent à la société d'assurance mutuelle, dans le cadre d'une convention de partenariat, une enveloppe financière globale qui correspond au remboursement a priori des dépenses de santé (ambulatoires et hospitalières) à la charge de la Sécurité sociale. La société d'assurance mutuelle " AXA santé mutuelle assurance " assume la totalité du risque financier.

Le réseau s'organise autour d'un centre d'orientation médicale accessible 24 H/24. Il repose sur la coordination des soins entre les professionnels de santé et la mise en oeuvre d'actions de prévention. Des médecins non-prescripteurs orientent les adhérents en fonction des urgences et des besoins à travers la chaîne de soins. L'adhérent est libre de consulter à l'intérieur du réseau où il peut choisir un médecin personnel, généraliste ou spécialiste. Il est dispensé de l'avance des frais et peut, le cas échéant, bénéficier d'un second avis médical.

Les prestataires de soins sont accrédités et évalués sur la base d'un cahier des charges qui privilégie la qualité et le respect des bonnes pratiques médicales. Un système d'information assure les échanges de données et la communication entre le centre d'orientation et les professionnels de santé dans le respect des règles arrêtées par la CNIL. Il permet d'évaluer la coordination des soins. Le réseau est supporté par une entité juridique dont l'un des associés représente l'ensemble des professionnels de santé accrédités. Un comité des professionnels de santé assure la cohésion et l'animation du réseau.

Un conseil médical et un comité d'éthique, composés de personnalités indépendantes, assurent une mission d'expertise et veillent au respect de la déontologie, en liaison avec le Conseil national de l'ordre des médecins.

Les promoteurs de l'expérience proposent d'ouvrir les services du réseau à d'autres mutuelles et aux collectivités locales, afin d'en faire bénéficier notamment les populations relevant de l'aide médicale gratuite et de l'assurance personnelle. Ils suggèrent également la création, au niveau national, d'un " pool solidarité santé " pour permettre aux personnes non couvertes par une assurance complémentaire l'accès à ce service d'assistance santé.

Le groupe AXA est prêt à mettre le savoir-faire acquis au cours de la conception de ce projet à la disposition de la Caisse nationale d'assurance-maladie, afin que des expériences analogues soient conduites sous l'égide des caisses primaires.

* *

*

II. LES COMPOSANTES DU RÉSEAU MÉDICAL D'ASSISTANCE SANTÉ

- C entre d'appel (disponible 24 h sur 24)

- Système d'information

- Gestion de bases de données

- Réseau intranet
- Réseau médical
- Médecins, prestataires de soins, hôpitaux, etc.

- Accréditation à partir de :

• bonnes pratiques médicales

• performance des établissements de santé

III. PROJET DE RÉSEAU DE SOINS AMBULATOIRES PAR GROUPAMA

Principales caractéristiques

Þ Les partenaires

• Groupama mènera l'expérimentation en partenariat avec le régime obligatoire de protection sociale des agriculteurs.

L'expérimentation associera donc un régime obligatoire de prestations sociales et un assureur complémentaire.

• Groupama associera environ 350 médecins généralistes volontaires 169( * ) à la démarche, fondée sur une approche plus globale des besoins de santé des patients.

• Groupama proposera enfin à environ 40 000 personnes assurées en complémentaire maladie à Groupama, de s'associer volontairement à l'expérience.

Þ La méthode

L'expérience proposée a un caractère local et associatif.

Local parce que Groupama est un assureur de proximité décentralisé et que ses partenaires sont également en mesure de gérer localement les expérimentations proposées.

• Associatif parce que l'engagement des partenaires aura dans tous les cas un aspect volontaire et participatif qui doit permettre à chacun d'entre eux d'assumer une pleine responsabilité dans le projet.

Assureur mutualiste, Groupama est persuadé que cette méthode est la plus féconde pour réussir les expérimentations et bénéficier de l'apport le plus positif de tous.
Þ Le lieu

L'expérimentation proposée sera organisée dans cinq départements : l'Allier, les Côtes-d'Armor, les Pyrénées-Atlantiques et la Saône-et-Loire.

Le territoire concerné variera selon les départements et la population de quelques cantons à l'ensemble du département.

Groupama et ses partenaires disposent, du fait de leur implantation, des données nécessaires pour bien connaître les populations concernées.

Þ L'objet de l'expérimentation

Les partenaires rechercheront une amélioration globale de l'efficacité médicale et économique du système de soins ambulatoires.

Pour cela, les praticiens percevront un complément de rémunération, en contrepartie :

- de consultations les plus complètes possibles pour chaque patient aboutissant à établir les seules prescriptions médicalement justifiées ;

- de leur participation à des " groupes de progrès " visant à définir des actions de qualité des soins et de maîtrise des dépenses.
Le complément de rémunération devrait au final être plus que compensé par la maîtrise médicalisée des dépenses.

Les résultats recherchés

L'amélioration de l'efficacité globale du système des soins est l'objectif premier de l'expérimentation.

Le projet présente également plusieurs intérêts essentiels pour l'avenir du système d'assurance-maladie et de la politique de santé.

Un intérêt sanitaire améliorant la qualité de la santé des malades par une approche globale et aussi complète que possible de chaque patient.

• Un intérêt médical par le travail en équipe et l'échange d'expériences, ainsi que par des conditions plus sereines d'exercice de la pratique médicale.

• Un intérêt économique par le soutien financier de Groupama qui prendra en charge un complément de rémunération du médecin généraliste ; ce soutien sera compensé par une maîtrise médicalisée réussie des actes et des prescriptions.

• Un intérêt pour les patients dont les droits seront garantis et améliorés : tiers-payant généralisé, prévention, continuité et qualité des soins, dialogue avec l'équipe médicale.
En résumé, Groupama propose une expérimentation visant à améliorer l'efficacité du système de soins ambulatoires, par une approche globale des besoins de santé du patient et un travail de maîtrise médicalisée des prescriptions.

Cette expérimentation, appuyée sur des médecins généralistes volontaires et sur un régime de protection sociale obligatoire, se déroulera dans un cadre associatif propice aux échanges et à la prise de responsabilité de chacun.

Ce projet pourra évoluer et s'ouvrir à d'autres professionnels de santé.

IV. PROJET DE RÉSEAU GÉRONTOLOGIE PAR LA MSA

Diagnostic et objectifs

Le constat :

Une augmentation prévisible des personnes âgées dépendantes

Démographie

1990 : 11 330 400 personnes de plus de 60 ans

- 20 % de la population

- 900 000 personnes âgées dépendantes

2000 : 15 000 000 personnes de plus de 60 ans

- 25 % de la population

- 1 200 000 personnes âgées dépendantes

Le constat : Une population rurale âgée

Þ La part de la population rurale dans la population générale est de 26 %.

Þ 30 % des personnes âgées de 60 ans et plus vivent en milieu rural.

Þ Le nombre de personnes âgées de 60 ans et plus, par canton rural, est en moyenne de 1 130.

Þ Par canton rural, le nombre de personnes âgées de 60 ans et plus, dépendantes, est estimé à 100.

Les objectifs

Þ Améliorer la qualité des soins.

Þ Améliorer la satisfaction des patients.

Þ Maîtriser les coûts ambulatoires et hospitaliers.

Objectifs économiques

Þ Maîtrise des coûts actuels :

- éviter les actes ou les examens inutiles

- éviter des déplacements à répétition pour la personne âgée

- diminuer les hospitalisations de longue durée

- pratiquer des soins de proximité, moins coûteux que les soins en centre hospitalier spécialisé

Þ Anticipation sur les coûts futurs :

- éviter la création de structures et l'augmentation du nombre de places d'hébergement

Cf. politique menée par de nombreux pays européens (Danemark, Grande-Bretagne, Pays-Bas, Suède)

Les moyens

Une meilleure organisation des soins et des structures

Trois points forts :

Þ Rôle pivot du médecin généraliste coordonnateur du réseau pour ses patients.

Þ Coopération ville/hôpital pour favoriser le maintien à domicile, symbolisée par l'ouverture de l'hôpital au médecin généraliste.

Articulation entre le sanitaire et le social.

I

ANNEXE 5


LES MONOPOLES SOCIAUX
LES DIRECTIVES EUROPÉENNES D'ASSURANCE
ET LE DROIT DE LA CONCURRENCE

Les directives dont il est question ici sont les directives n° 92-49 et n° 92-96 du 18 juin 1992 et du 10 novembre 1992 qui parachèvent la réalisation en droit européen du marché unique de l'assurance. La directive n° 92-96 concerne l'assurance-vie et la directive n° 92-49 concerne l'assurance non-vie. Elles modifient et complètent les directives précédentes (n° 73-239 et n° 73-240 du 24 juillet 1973, n° 79-267 du 5 mars 1979, n° 88-357 du 22 juin 1988 et n° 90-619 du 8 novembre 1990) relatives à la liberté d'établissement et à la libre prestation de services en matière d'assurance non-vie et vie. Elles suppriment toute possibilité pour les Etats membres d'interdire l'activité d'une société d'assurances dans leur pays dès lors qu'elle est autorisée dans son pays d'origine. En contrepartie de cette ouverture, elles imposent un certain nombre de normes de fonctionnement et de contrôle que les Etats doivent introduire dans leur législation. Les directives sont applicables depuis le 1 er juillet 1994. Elles ont été à ce jour partiellement introduites dans la loi française (lois du 4 janvier 1994 et du 8 août 1994).

Ces directives ont-elles un effet sur les monopoles sociaux, c'est-à-dire, en France, le monopole des organismes d'assurances sociales dans la couverture obligatoire des risques maladie et vieillesse. Pourquoi la question est-elle posée ? Quelles réponses peut-on y apporter ?

Pourquoi la question est-elle posée ?

A l'occasion de l'entrée en vigueur des directives, des articles de presse ont annoncé à grand fracas la fin du monopole de la Sécurité sociale 170( * ) .

Aussitôt démentie par les autorités françaises et communautaires, l'information n'en a pas moins suscité des interrogations. Comment les directives n° 92-49 et n° 92-96 ont-elles pu lui donner naissance ? Le raisonnement, qui n'est pas si grossièrement inexact qu'il y paraît au premier abord, semble avoir été le suivant.

Dans une économie de marché, l'assurance est une activité concurrentielle comme toute autre activité économique. Le fait que l'assurance contre certains risques, et notamment les risques sociaux, soit soustraite au marché et à la libre concurrence est donc exorbitant du point de vue du droit commun économique et ne peut résulter que de lois spéciales dérogeant à ce droit commun.

Dès lors qu'il existe désormais (depuis le 1 er juillet 1994) un marché européen unique de l'assurance, et que ce marché est régi par des directives qui incluent expressément les risques maladie (directive d'assurance non-vie) et vieillesse (directive d'assurance-vie), ne doit-on pas considérer que, dorénavant, l'assurance-maladie et l'assurance-vieillesse relèvent de la libre concurrence entre organismes assureurs, quel qu'en soit le statut public, ou privé ? Les lois qui confèrent aux organismes de Sécurité sociale un monopole 171( * ) ne doivent-elles pas s'incliner devant ces directives, qui sont des textes de niveau juridique supérieur ? Autrement dit, ces directives n° 92-49 et n° 92-96 ne font-elles pas échec au monopole français des caisses de Sécurité sociale ?

Cette thèse est défendue vigoureusement par certains 172( * ) . C'est ainsi qu'une proposition de loi a été déposée : proposition de loi n° 665, présentée par Jean-Louis Beaumont et plusieurs autres députés, tendant à supprimer le monopole de la Sécurité sociale et à offrir un libre choix aux assurés entre les caisses et les différents organismes assureurs habilités. Cette proposition s'appuie notamment, dans son exposé des motifs, sur les directives n° 92-49 et n° 92-96. C'est ainsi également que des travailleurs indépendants, refusant d'acquitter les cotisations à leurs caisses obligatoires, ont reçu des injonctions de payer et ont fait opposition à ces injonctions devant le juge en se fondant aussi sur les directives. Ainsi s'est développée, sur la question posée, une jurisprudence d'abord française, puis européenne à la suite de questions préjudicielles posées par les juges nationaux à la Cour de justice des communautés européenne.

Quelles réponses peut-on apporter à la question posée ?

En droit français


Il n'est pas douteux que, dans le modèle français d'organisation de la protection sociale tel qu'il existe actuellement, les caisses d'assurances sociales ont un monopole pour la couverture des risques maladie et vieillesse relevant des régimes légaux de la Sécurité sociale. Le monopole s'entend au double sens de la non-concurrence des organismes de Sécurité sociale entre eux (les assurés sociaux n'ayant pas le libre choix de leur caisse), et avec les organismes d'assurances privés. L'assurance privée ne peut intervenir qu'en dehors de ces régimes. Il lui est interdit, par conséquent, de couvrir ces risques au premier franc 173( * ) .

Cette interdiction est même assortie de sanctions. L'article L 652-4 du code de la Sécurité sociale, introduit par une loi du 31 décembre 1991, frappe de nullité les contrats d'assurance-vieillesse et maladie dits " à 100 % ". Le décret d'application du 12 février 1993 (article R. 652-1 du code de la Sécurité sociale) punit les personnes qui auraient fait souscrire de tels contrats.

Les entreprises et les travailleurs assujettis à la Sécurité sociale ne peuvent, sauf à délocaliser leur activité, échapper à leurs obligations vis-à-vis de la Sécurité sociale en s'assurant à l'étranger.

Cet état du droit français est-il modifié par les directives n° 92-49 et n° 92-96 ?

Si les directives n'affectent pas les monopoles sociaux, il n'en existe pas moins un problème de définition de frontière entre assurance sociale et assurance privée pour l'application du droit de la concurrence.

· Les directives n'affectent pas le monopole actuel des caisses d'assurances sociales en France

La Cour d'appel de Toulouse a statué en ce sens par un arrêt du 20 janvier 1995. Le tribunal des affaires sociales de Tarn et Garonne avait, par un jugement du 7 juin 1994, rendu à propos du régime obligatoire de prévoyance des commerçants et artisans géré par la Cancava, posé au juge européen une question préjudicielle sur le point de savoir si les directives n° 92-49 et n° 92-96 concernent les régimes légaux de Sécurité sociale. La cour a considéré que ce renvoi au juge européen n'avait pas lieu d'être, le régime en question ne relevant pas des directives. L'arrêt sur ce point est très argumenté.

Il est vrai que ces directives sont de portée générale et concernent tous les risques, y compris maladie, invalidité et vieillesse. Mais elles excluent expressément les risques couverts par les régimes légaux de Sécurité sociale (articles 2-2 de la directive n° 92-49 et 2-3 de la directive n° 92-96).

Il est vrai que la directive d'assurance non-vie n° 92-49 traite dans son article 54 de " l'assurance-maladie substitutive ", qui permet de substituer l'assurance privée à l'assurance sociale pour la couverture du risque maladie. Mais il ne le fait que pour les Etats qui offrent actuellement de telles possibilités de substitution (Allemagne, Pays-Bas) et pour renforcer dans ce cas les contrôles sur les contrats d'assurance souscrits en substitution de l'assurance sociale. La directive ne crée aucune obligation pour les Etats d'adopter le modèle substitutif. Les Etats membres ont en effet toute liberté d'organiser comme ils l'entendent leur système de protection sociale. (arrêt de la CJCE du 7 février 1984 Duphar 238/82).

Dès lors, les assureurs des autres pays de l'Union européenne qui proposeraient en France, que ce soit en régime de libre établissement ou de libre prestation de services, des contrats d'assurance-maladie au 1 er franc le feraient, comme les assureurs français, en infraction aux dispositions de droit interne qui interdisent ce type d'assurance.

· Il n'en existe pas moins un problème de définition de frontière entre assurance privée et assurance sociale pour l'application du droit de la concurrence

Les organismes qui gèrent des régimes de Sécurité sociale sont-ils soumis au droit de la concurrence (ordonnance du 1 er décembre 1986) ? La jurisprudence française a répondu par la négative, légitimant ainsi la position de monopole de ces organismes 174( * ) . Qu'en est-il du point de vue du droit européen ?

Par rapport aux principes libéraux qui inspirent le traité de Rome, la concurrence est la règle, le monopole l'exception. Il résulte des articles 85 et 86 du traité que toute activité économique doit faire l'objet d'une libre concurrence par les entreprises qui l'exercent.

L'assurance est l'une de ces activités économiques. Les directives n° 92-49 et n° 92-96 excluent certes les risques relevant de régimes légaux de Sécurité sociale. Mais il n'existe pas de définition communautaire de ces régimes. Le règlement 1408/71 175( * ) ne donne pas de définition précise de la Sécurité sociale et des activités de Sécurité sociale. Il énumère seulement les risques pour lesquels des règles de coordination sont établies au niveau communautaire. Il ne suffit donc pas de qualifier un système de protection de " régime de Sécurité sociale " pour justifier que sa gestion échappe aux principes fondamentaux du traité. Encore faut-il démontrer que ce régime n'est pas une activité économique. La Cour de justice des Communautés européennes a statué sur ce point sur question préjudicielle du tribunal des affaires sociales de l'Hérault (jugements du 14 janvier et du 11 février 1991). Dans un arrêt de principe du 17 février 1993 (arrêt Poucet et Pistre), la Cour de Luxembourg a jugé que les organismes chargés de la gestion des régimes de Sécurité sociale ne sont pas des entreprises au sens du traité de Rome, dans la mesure où ces organismes n'exercent pas une activité économique, mais une activité exclusivement sociale obéissant au principe de solidarité.

On voit que l'arrêt Poucet et Pistre pose un principe, mais ne règle pas à lui seul le problème de frontière entre assurance sociale et assurance privée. Tout régime de couverture des risques maladie ou vieillesse n'est pas, par définition, exclu des règles de la concurrence. Il faut pour cela qu'il remplisse les conditions que pose la Cour de Luxembourg. Or ce n'est pas toujours évident. La notion de solidarité est floue et sujette à interprétation. Tout système d'assurance met en effet en oeuvre une forme de solidarité. Il sera intéressant à cet égard de connaître le dénouement d'une affaire jugée en première instance par le tribunal des affaires sociales de l'Aveyron (jugement du 26 janvier 1995) à propos du régime complémentaire obligatoire d'assurance-vieillesse des artisans géré par la Cancava. Le tribunal a donné raison aux artisans au motif que ce régime n'est pas un régime de solidarité, mais une simple " mutualité professionnelle ". Ce jugement est frappé d'appel.

Par ailleurs, le cas Poucet et Pistre concernait un régime de base et non les régimes complémentaires. Ces régimes sont-ils une activité sociale ou une activité économique ? Le fait qu'ils soient gérés par des organismes de Sécurité sociale suffit-il à les soustraire au droit de la concurrence applicable à toutes les entreprises ?

La Cour de cassation, chambre sociale, avait apporté une réponse par un arrêt du 10 mars 1994 176( * ) (Bayer France/IRPVRP, et autres) à propos d'un régime complémentaire d'assurance décès rendu obligatoire par extension d'une convention collective. La Cour considère qu'un tel régime et l'organisme qu'il gère sont en dehors du droit de la concurrence, comme les régimes de base de la Sécurité sociale.

A son tour, la Cour du Luxembourg vient de préciser sa position à propos cette fois d'un régime facultatif de retraite, le régime Coreva des agriculteurs. Créé par une loi n° 88-1202, du 30 décembre 1988, ce régime bénéficie d'une déduction fiscale de ces cotisations. Sa gestion a été confiée, par un décret du 26 novembre 1990, à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) avec le concours des caisses de MSA. Saisi par la FFSA et des sociétés d'assurances en vue d'obtenir l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret créant ce monopole de gestion, le Conseil d'Etat a posé à titre préjudiciel à la Cour de Luxembourg la question de savoir si un organisme à but non lucratif, gérant un régime facultatif d'assurance-vieillesse par capitalisation destiné à compléter un régime de base obligatoire, est une " entreprise " au sens du traité de Rome.

La Cour de Luxembourg, dans un arrêt du 16 novembre 1995 (C 244/94), rappelle que, dans le contexte du droit de la concurrence, la notion d'entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (voir arrêts du 23 avril 1991 Hofner et Elser, C 41/90), et Poucet et Pistre précité). Elle constate qu'au cas particulier le régime Coreva a le caractère d'une activité économique et que la CCMSA exerce cette activité économique en concurrence avec les sociétés d'assurances vie. Elle considère en conséquence, en réponse à la question préjudicielle du Conseil d'Etat, qu'un " organisme à but non lucratif, gérant un régime d'assurance-vieillesse destiné à compléter un régime de base obligatoire, institué par la loi à titre facultatif et fonctionnant dans le respect des règles définies par le pouvoir réglementaire, notamment en ce qui concerne les conditions d'adhésion, les cotisations et les prestations, selon le principe de la capitalisation, est une entreprise au sens des articles 85 et suivants du traité CE ". Rendue en matière de retraite, tout laisse à penser que cette jurisprudence serait la même pour les organismes d'assurance-maladie.

En d'autres termes, le fait qu'une activité d'assurance facultative soit exercée par un organisme d'assurance sociale ne le soustrait pas aux règles de la concurrence. Si cette activité a le caractère d'une activité économique, elle relève de la libre concurrence, ce qui exclut tout monopole.

* *

*

En conclusion, et en fonction de l'état actuel des textes et de la jurisprudence, on peut dégager les points suivants :

- qu'on s'en réjouisse ou qu'on le déplore, les directives n° 92-49 et n° 92-96 ne remettent pas en question les monopoles sociaux existant en France ;

- les Etats membres ont toute liberté d'organiser comme ils l'entendent leur système de protection sociale ;

- ils peuvent donc, comme le fait actuellement la France, retirer au marché l'assurance des risques sociaux pour les confier à un monopole ;

- toutefois, si un régime d'assurance ne répond pas aux critères d'un régime de Sécurité sociale, tels qu'ils sont définis par la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes, on doit alors, semble-t-il, considérer qu'il s'agit d'une activité économique d'assurance relevant de la libre concurrence et des règles nationales et communautaires posées pour en assurer le respect.

Ce constat juridique n'emporte évidemment aucun jugement de valeur sur l'efficacité comparée du modèle français d'organisation de la protection sociale obligatoire, fondé sur le monopole, et des modèles faisant place à la concurrence et au libre choix entre les organismes gestionnaires. On peut cependant observer que le modèle concurrentiel non seulement existe et fonctionne, mais encore qu'il tend à se développer en Europe (l'Allemagne va l'étendre, la Suisse vient de l'adopter). Ce modèle constitue l'un de ceux qui méritent examen dans la recherche de solutions permettant à la fois un rééquilibrage structurel de notre régime de protection sociale et une plus grande convergence des systèmes sociaux à l'intérieur du marché unique européen.

ANNEXE 6


SOCIÉTÉS D'ASSURANCE-VIE ET FONDS DE PENSION DANS LA PARTICIPATION AU CAPITAL DES ENTREPRISES AMÉRICAINES SUR LONGUE PÉRIODE

5

Répartition des actifs détenus par les institutions financières des Etats-Unis, 1860-1993


 

1860

1880

1900

1912

1922

1929

1939

1948

1960

1970

1980

1993

Banques commerciales

71,4

60,6

62,9

64,5

63,3

53,7

51,2

55,9

38,2

37,9

34,8

25,4

Caisses d'épargne

17,8

22,8

18,2

14,8

13,9

14,0

13,6

12,3

19,7

20,4

21,4

9,4

Compagnies d'assurance

10,7

13,9

13,8

16,6

16,7

18,6

27,2

24,3

23,8

18,9

16,1

17,4

Sociétés d'investissement

-

-

-

-

0,0

2,4

1,9

1,3

2,9

3,5

3,6

14,9

Fonds de pension

-

-

0,0

0,0

0,0

0,7

2,1

3,1

9,7

13,0

17,4

24,4

Sociétés financières

-

0,0

0,0

0,0

0,0

2,0

2,2

2,0

4,6

4,8

5,1

4,7

Courtiers en valeurs mobilières

0,0

0,0

3,8

3,0

5,3

8,1

1,5

1,0

1,1

1,2

1,1

3,3

Sociétés hypothécaires

0,0

2,7

1,3

1,2

0,8

0,6

0,3

0,1

a

a

0,4

0,2

Sociétés d'investissement immobilier

-

-

-

-

-

-

-

-

0,0

0,3

0,1

0,1

Total (%)

100

100

100

100

100

100

100

100

100

100

100

100

Total ($ trillon)

.001

.005

.016

.034

.075

.123

.129

.281

.596

1.328

4.025

13.952

CHAPITRE IV

DISTRIBUTION DE L'ASSURANCE EN FRANCE ET EN EUROPE : ADAPTATION PLUTOT QUE BOULEVERSEMENT

L'évolution des modes de distribution des produits de l'assurance est au centre des évolutions récentes du monde de l'assurance. Un défi a été lancé aux compagnies traditionnelles par les mutuelles sans intermédiaires dans l'assurance dommages, par les banques dans l'assurance-vie, ainsi que par les nouveaux canaux de distribution dans tous les domaines de l'assurance. Cette compétition a été largement favorisée par la libéralisation des courtages en 1989 et plus généralement par celle des tarifs.

Ce sont ces mêmes évolutions qui déterminent largement les enjeux sociaux de l'assurance évoqués dans le chapitre suivant de ce rapport.

Il serait cependant très inexact de se représenter le marché de l'assurance comme homogène et les modes de distribution comme parfaitement substituables en termes de produits et de clientèles. Il existe initialement une assez grande spécialisation des modes de distribution, classiques ou nouveaux. Elle répond à leur vocation historique, à leur statut et à leur positionnement. C'est cette complémentarité initiale qui sera évoquée à titre introductif sur l'exemple français ainsi que le rôle des nouvelles technologies dans ce processus (4.1), puis les raisons de cette évolution nationale (4.2) avant de procéder à une comparaison des structures de distribution en Europe (4.3) et d'examiner l'évolution prévisible des modes de distribution des produits d'assurance (4.4).

I. SPÉCIALISATION INITIALE DES MODES DE DISTRIBUTION DE L'ASSURANCE EN FRANCE

Même si chaque pays présente un certain nombre de spécificités, la complémentarité des modes de distribution de l'assurance en France est assez représentative, au plan des principes, de ce qui se passe ailleurs en Europe ou dans les grands pays développés.

Le graphique ci-dessous permet d'avoir une vue globale du poids respectif, en nombre, des divers canaux de distribution de l'assurance en France.

Graphique 25
Les canaux de distribution de l'assurance en France
1994

Y compris les guichets de la Poste

* Source : CAPA

A. INTERMÉDIAIRES CLASSIQUES : AGENTS GÉNÉRAUX ET COURTIERS

1. Proximité et dissemblances

Il y a plusieurs raisons de traiter ensemble ces intermédiaires théoriquement et statutairement opposés que sont les agents généraux et les courtiers. En effet, d'une part, le courtier est présenté comme le mandataire de l'assuré, et l'agent général exclusif comme le mandataire d'une compagnie 177( * ) , et d'autre part, le courtier est un commerçant immatriculé au registre du commerce propriétaire de sa clientèle alors que l'agent général est l'exploitant du portefeuille de clients détenu par une société d'assurance.

Cependant :

- ils sont tous les deux régis par le livre cinquième du code des assureurs en tant qu'intermédiaires d'assurances : " Agents généraux, courtiers et autres intermédiaires d'assurance et de capitalisation " (p. 487 et suivants) ;

- ils sont tous les deux rémunérés à la commission en provenance des sociétés d'assurance (grande différence avec les mutuelles sans intermédiaires) ;

- ils ont tous deux des mandats délivrés par les sociétés d'assurance (traité de nomination pour l'agent général, mandat spécial pour le courtier qui est cependant principalement et premièrement mandaté par son client) mais les conditions d'entrée dans la profession d'agent général sont plus strictes ;

- ils se confondent souvent sous la détermination commune et juridiquement floue d'assureur conseil (depuis 1996, la FNSAGA évite d'employer ce terme et se tient au terme d'agent général d'assurance).
Les agents généraux ont toujours exercé une activité accessoire de courtiers, qui est de plus en plus faible. 96 % de leur activité sont sous mandat, 4 % sont exercés au titre du courtage (dont 2 % représentent de la coassurance).

De par cette complexité, le public distingue mal ces deux catégories d'intermédiaires entre lesquelles la concurrence s'est accrue avec le temps mais qui au départ s'adresse à deux types de clientèles bien différenciées :
- les particuliers pour les agents généraux des assurances dommages et responsabilité (cependant 20 % de l'activité des agents généraux ont lieu avec des professionnels (15 %) et des entreprises (5 %) ;

- les entreprises pour les courtiers dans les domaines correspondants pour l'entreprise de l'assurance dommages.
Alors que la profession d'agent général a fait l'objet ces dernières années d'une concentration importante qui devrait se poursuivre étant donné les exigences de complémentarité et de taille minimale requise pour assurer l'avenir d'un métier très individuel traditionnellement, la population des courtiers tend à augmenter.

Lorsque Armand Braun, René Dessal et Denis Kessler rendaient leur rapport " Pour une modernisation des relations entre agents généraux et sociétés d'assurance " en septembre 1989, la population des agents généraux était de 21 300 pour l'année 1988 (employant 54 000 collaborateurs). Elle était en 1994 de 17 400 (-3 900, soit -18 % en cinq ans). Elle avait été de 35 000 dans la décennie 1960.

Le rapport du CAPA sur la distribution de l'assurance en Europe 178( * ) fait apparaître un chiffre de 2 400 courtiers en France en 1994 alors que Patrick Thourot n'en recensait que 1 700 en 1987.

Il paraît difficile pour cette profession de fournir des données précises sur son évolution. Selon la Fédération française des courtiers d'assurances et de réassurances (FCA), 179( * ) il existerait en 1996 2 500 cabinets de courtage employant 16 000 salariés. 85 % des cabinets de courtage emploient moins de 5 salariés. Le nombre de courtiers tend donc apparemment à augmenter.

Cette augmentation est à mettre en rapport avec la libéralisation des conditions d'accès en termes de compétence requise à la profession de courtier par le décret du 31 mars 1992. Celui-ci a ramené à un stage de 150 heures (4 semaines) la condition de délivrance d'un certificat de stage nécessaire à l'exercice de la profession de courtier (parallèlement, d'autres conditions, au moins théoriques, étaient requises comme l'obtention d'une garantie responsabilité civile professionnelle et une caution financière minimale de 750 000 F).

Ainsi les banques ont pu facilement inscrire le courtage d'assurance dans leur objet social ou créer des filiales ad hoc pour reconvertir une partie de leurs personnels.

Le dénombrement imprécis des courtiers est lié à l'absence " d'appellation contrôlée " du terme de courtier et au fait de la pluriactivité de certains courtiers d'assurance qui ne travaillent pas exclusivement pour des compagnies d'assurance ou sur des produits d'assurance.

Tableau 53
Evolution du nombre des distributeurs d'assurance 180( * )

 

1987

1995

Agents *

21 900

17 400

Courtiers *

1 700

2 400

Commerciaux " debout "

25 300

25 000

* salariés exclus

N.B. : Le nombre des guichets et des salariés de banque, du Trésor et de La Poste qui vendent des produits d'assurances vie ou IARD n'est pas connu précisément. Le nombre de salariés est évalué par la FFSA à 30 000 ou 40 000 personnes en 1995.

Source : FFSA, rapports annuels.

2. Crise de l'intermédiation classique dans l'assurance

Agents généraux et courtiers assurent traditionnellement un rôle prépondérant dans la distribution des contrats d'assurance dommages, mais les nouveaux entrants sur le marché, agents économiques à réseaux de distribution intégrés, réduisent la part de marché de ces intermédiaires classiques sans que ceux-ci puissent se rattraper, bien au contraire, sur le marché de l'assurance-vie, où leur position initiale est moins forte et qui est aujourd'hui dominée par la bancassurance.

Tableau 54
Evolution des parts de marché selon le mode de distribution (en %) (chiffres arrondis)

 

Vie-capitalisation

Dommages

 

89

91

95

96

97

89

91

95

96

97

Guichets *

41

42

56

59

61

0

1

4

5

6

Agents généraux

17

17

12

11

10

48

46

40

39

37

Courtiers

10

8

7

7

7

17

18

20

19

19

Salariés

25

27

19

17

16

4

4

4

4

3

Sociétés sans intermédiaires

-

-

-

-

-

28

28

29

31

32

Vente directe et autres

7

6

6

6

6

3

3

3

2

3

* Guichets des établissements de crédit, de La Poste et du Trésor

Source : rapports annuels de la FFSA.

Les intermédiaires classiques qui restent cependant le principal canal de distribution dans l'assurance dommages des particuliers ont été bousculés, loin de savoir en tirer parti, par les quatre tendances majeures sur le marché national de l'assurance évoquées dans le rapport de 1989 :

- les nouvelles conditions de l'offre, caractérisées par le découplage croissant entre la production et la distribution des services financiers et la disparition des cloisonnements institutionnels dans le monde financier 181( * ) laissant l'accès du marché de l'assurance à de nouveaux acteurs ;

- les nouveaux comportements de la clientèle, marqués par des exigences plus fortes, une demande plus sophistiquée notamment en termes de conseil, le souci de transparence sur les coûts et celui de la performance, une plus grande capacité d'arbitrage et une attente relationnelle plus grande ;

- les évolutions accélérées de la technologie, comme le développement des réseaux de transmission de données, l'apparition des outils d'intelligence artificielle dans l'aide à la décision, le développement de la télématique permettant en particulier l'apparition du téléachat ;

- l'ouverture des frontières et l'élargissement des marchés, qui ont entraîné avec les directives européennes, des évolutions réglementaires accélérées, une pression à la suppression des règlements d'ordre public (le statut public des agents généraux d'assurance est exceptionnel en Europe) et à l'atténuation des protections statutaires, changement des dimensions du marché et confrontation plus grande des cultures assurantielles 182( * ) .
a) L'adaptation du statut d'agent général

Les difficultés du canal classique de distribution de l'assurance avaient été soulignées, ainsi que la nécessité de réformer " les régimes " d'intermédiaires d'alors (le statut de 1949 en particulier, dans le rapport Cortesse sur " la distribution de l`assurance en France " dès 1984. C'est sur la base de cette vision programmatique de réforme que le rapport plus diplomatique de MM. Braun Dessal Kessler était intervenu en 1989 pour mettre d'accord les sociétés et les agents généraux sur les voies à suivre.

Les relations entre agents généraux et sociétés étaient dites, selon ce dernier rapport, reposer sur une double méprise de la part :

- " d'agents qui se veulent indépendants, mais en proie à l'incertitude, cherchent des sécurités et à la limite adoptent des revendications de salariés, plutôt que d'assumer les risques et les contraintes de l'adaptation aux marchés ;

- des sociétés qui, tout en affirmant l'indépendance de leurs intermédiaires, qualifiés de chefs d'entreprises, recherchent un contrôle beaucoup plus étroit des réseaux d'agents ... tout en explorant les voies et les moyens de s'en passer ".
Les auteurs de ce rapport soulignaient tout spécialement l'aspect contraignant du statut d'ordre public de l'agent d'assurance, tout à fait hors norme dans le contexte européen en particulier, ils critiquaient :
- la rigidité des clauses contractuelles définissant les relations agents-sociétés et le frein qu'ils mettaient au dynamisme commercial des agents généraux ;

- l'inadaptation du découpage territorial avec les techniques nouvelles de commercialisation (ventes de masse, VPC, publicité institutionnelle) ;

- l'obstacle que le statut oppose aux regroupements de sociétés qui faciliteraient une articulation plus facile de divers modes de distribution par les agents généraux.
Cette analyse révèle à tout le moins la lourdeur que représente pour les sociétés d'assurance classiques le fait de s'appuyer sur un réseau de vente indépendant. Cette lourdeur ou cette difficulté des entreprises à les faire fonctionner, face à la concurrence progressive des MSI ou soudaine des banques avec des réseaux de distribution salariés intégrés, peut devenir, sur un marché ouvert, un handicap majeur. Le glissement continu des parts de marchés de l'intermédiation traditionnelle, après la rénovation réglementaire de 1996 ainsi qu'après la signature le 20 février 1996 d'une convention nouvelle assouplissant les rapports entre agents et sociétés par la FFSA et FNSAGA, montre que le redressement, s'il est possible, n'est pas encore visible. Il reste donc à faire la preuve en pratique de l'argument selon lequel " in abstracto, un réseau d'indépendants devrait être plus efficace que les formes alternatives de distribution " 183( * ) .
b) Les difficultés du courtage français

La croissance des sociétés de courtage d'assurance accompagne la croissance et l'internationalisation de leurs clients (les entreprises) et de leurs fournisseurs (les assureurs) et, comme on assiste à une course à la taille critique, justifiée ou non, des compagnies d'assurance, on assiste à une course à la taille des grands courtiers internationaux.

A l'occasion de cette concentration internationale par fusions et acquisitions, la plupart des grandes sociétés de courtage françaises est passée sous contrôle étranger, au grand dam d'une partie de leur grande clientèle qui souhaite protéger leur entreprise contre les ressources multiples de l'intelligence économique, dont les courtiers peuvent être les agents efficaces étant donné l'ampleur et la qualité des informations qu'ils détiennent.

Le même phénomène s'observe dans le courtage français de réassurance, qui est de plus en plus international dans son activité, et a été éprouvé par la baisse des taux de ses commissions et n'a pas encore su acquérir des positions solides dans le domaine de la réassurance " facultative " 184( * ) .

Si ce contrôle est certes fluctuant et susceptible d'évoluer dans un autre sens à terme, il ne va pas sans laisser un légitime sentiment d'amertume dans la profession, notamment à l'égard des règles fiscales françaises qui ont donné, en la circonstance, un avantage certain au courtage anglo-saxon, qui domine le courtage au niveau mondial (bien que le courtage français soit le 3 e au plan mondial, il ne représente que 30 % du courtage britannique, traditionnellement très développé dans l'assurance du transport notamment).

En effet, alors qu'il est possible à une société de courtage américaine d'amortir en trois ans le coût d'acquisition d'une société de courtage ou du portefeuille de clientèles qu'elle rachète, cela est tout à fait impossible en France. Ce qui est fiscalement logique du point de vue des règles françaises aboutit en l'espèce, par le biais d'une concurrence fiscale très forte, à un avantage compétitif décisif pour le courtage anglo-saxon, qu'il serait bon de regarder de près, même si le mal est largement fait.

Or la spécificité du courtage français, qui n'est pas selon la Fédération des courtiers d'assurance " de vendre des contrats mais d'être un conseil en achat de contrats d'assurance pour son client ", mérite d'être défendu dans l'intérêt des entreprises. A la différence des courtiers anglo-saxons, qui sont de purs vendeurs et qui n'ont que le souci du vendeur, le courtage français est caractérisé par une spécificité de gestion en vertu de laquelle non seulement il émet les primes d'assurance, gère les encaissements et les relances, mais est aussi celui qui assure, comme le fait l'agent général, la gestion des sinistres et s'occupe du client en continu en cas de survenance du risque couvert. Il a, par rapport au " broker ", le souci global de son client, et cela d'autant plus que la profession de " risk manager " n'est pas encore très développée dans les entreprises françaises.

Cette spécificité est méritoire, mais elle est coûteuse et lourde à gérer, surtout comparativement, pour les courtiers. Elle se traduit par une moindre rentabilité du courtage français et donc par une moins bonne capacité d'autofinancement et de développement des sociétés de courtage français. Mais elle représente un service beaucoup plus important pour le client que les courtiers français sont susceptibles de pouvoir valoriser commercialement dans un contexte d'interpénétration des marchés nationaux européens.

On notera que le marché français est encore presque exclusivement fondé sur des prestations de courtage à la commission proportionnelle aux primes d'assurance, ce qui handicape les intermédiaires en période de baisse des prix. Le marché américain par exemple est davantage ouvert à des prestations sur honoraires, alors même que les courtiers font face à la concurrence des grandes mutuelles sans intermédiaires spécialisés dans le risque industriel.

3. Les nouveaux animateurs de la distribution
de l'assurance en France

Il est à vrai dire abusif de mettre sur le même plan les sociétés d'assurances mutuelles sans intermédiaires (de même que la bancassurance) alors qu'elles sont d'abord des structures de production, et qu'elles sont même les pionnières d'une industrialisation de la chaîne des métiers de l'assurance. Là aussi cependant, il paraît difficile de s'abstraire des schémas de présentation habituels dans un rapport qui n'a pas pour vocation de les remettre en cause ou d'en établir de nouveaux.

a) L'offensive réussie des MSI

Le développement de la part des mutuelles dans la distribution (longtemps réputées " sauvages " par les compagnies " traditionnelles ") s'est fait à partir de la multiplication de l'offre de produits d'assurance dommages, notamment automobile, par les mutuelles locales de Niort : MACIF, MAIF, MAAF, et la MATMUT de Rouen. Elles sont arrivées dans les années 1970 et 1980, à des parts de marché substantielles dans le domaine de l'assurance dommages, parts de marché qui continuent encore à progresser. Les mutuelles dites de " Niort " citées ci-dessus détiennent 36 % du marché automobile en encaissements (en incluant la GMF) et un peu plus si on se réfère aux particuliers. La majorité des encaissements sur le marché automobile n'est détenue que par l'ensemble des sociétés " non traditionnelles ", c'est-à-dire Groupama, les mutuelles du GEMA, les mutuelles locales et professionnelles (SMABTP, MACSF et la GMF) et les bancassureurs. Les MSI sont donc spécialisées dans la couverture des risques de masse sur le marché des particuliers moins exigeant en termes de réserves financières. Elles se sont diversifiées en assurance-vie dans les années 1980 en créant des filiales dont les produits sont distribués par leurs bureaux. A l'échelle des grandes années de développement de la bancassurance en assurance-vie, leur croissance a été significative et supérieure à la moyenne du marché, même si leur part de marché demeure modeste.

Elles ont développé leurs positions à partir de leurs atouts qui étaient avant tout :

- un réseau de distribution intégrée facile d'accès, en particulier dans les grandes villes grâce à leurs réseaux de boutiques ;

- un fonds de commerce très solide, et qui est le réel fondement de leur solidité financière en cas de pertes, grâce à la qualité de la relation avec leurs sociétaires qui leur assure une très grande fidélité et la confiance de ces derniers ;

- des coûts maîtrisés et ne supportant pas l'exigence du rendement minimal de fonds propres en provenance d'actionnaires, typique d'une organisation juridique sous la forme d'une société de capitaux.
Le GEMA, Groupement des entreprises mutuelles d'assurances, regroupe les mutuelles sans intermédiaires régies par le code de l'assurance et notamment les quatre plus grandes citées plus haut. A elles toutes, fin 1995, elles disposent de :
- 15 millions de sociétaires (400 000 nouveaux sociétaires en 1995),

- 2 000 points d'accueil employant 19 000 salariés.
On considérera dans le détail à l'aide des tableaux page suivante, les raisons en termes de coût, du succès des MSI par rapport aux compagnies traditionnelles disposant de réseaux ventes classiques avec intermédiaires. Ces données seront évoquées de manière plus globale dans les développements ultérieurs.

Tableau 55
Structures de coûts par ligne de produit
et par type de réseau de distribution en 1996 185( * )




Non vie - Automobile

Type du réseau

Coûts de

distribution

Coûts

de gestion

Sinistres/

Cotisations

Ratio

combiné

Mutuelles sans intermédiaires

6,57 %

5,01 %

87,16 %

98,75 %

Agents généraux

12,35 %

10,91 %

74,80 %

98,05 %

Courtiers

11,29 %

9,57 %

80,90 %

101,76 %

Traditionnelles (multicanaux)

13,93 %

9,95 %

80,52 %

104,40 %

Bancassureurs

11,71 %

4,02 %

86,75 %

102,49 %

Direct

83,14 %

30,90 %

98,98 %

213,01 %

Moyenne de l'échantillon

10,55 %

7,96 %

82,39 %

100,91 %

Non vie - Moyenne générale

Type du réseau

Coûts de

distribution

Coûts

de gestion

Sinistres/

Cotisations

Ratio

combiné

Mutuelles sans intermédiaires

6,73 %

5,60 %

83,94 %

96,27 %

Agents généraux

14,04 %

11,49 %

70,00 %

95,54 %

Courtiers

12,71 %

10,32 %

80,42 %

103,46 %

Traditionnelles

15,12 %

10,00 %

74,84 %

99,95 %

Bancassureurs (multicanaux)

14,78 %

6,14 %

76,42 %

97,33 %

Direct

69,51 %

29,30 %

93,77 %

192,58 %

Moyenne de l'échantillon

12,40 %

8,99 %

76,82 %

98,21 %

Vie - Capitalisation

Type

du réseau

Coûts de

distribution

Coûts

de gestion

Total des coûts

Mutuelles sans intermédiaires

0,84 %

5,02 %

5,86 %

Agents généraux

3,65 %

4,02 %

7,67 %

Courtiers

3,07 %

5,68%

8,75 %

Salariés

18,61 %

7,98 %

26,59

Traditionnelles(multicanaux)

9,62 %

3,11 %

12,73 %

Bancassureurs

2,32 %

3,00 %

5,32 %

Direct

NS

NS

NS %

Moyenne de l'échantillon

8,14 %

4,40 %

12,54 %

Source : Argus, 20 février 1998.

b) Les réseaux de salariés restent debout ...

Mais leur résistance est fragile. Avant d'être relancés comme riposte de l'assurance à la bancassurance par le concept d'assurfinance (dans le cadre des AGF notamment), les réseaux de vente debout sont un héritage de ce qui était avant-guerre le canal de distribution des produits de la branche dite " d'assurance populaire ".

Les forces de ventes salariées, y compris les mutuelles d'assurances, représentaient en 1994 le second réseau de distribution de l'assurance-vie en France, avec 14,4 % de la part de marché, résultat obtenu par 22 000 salariés. En terme d'assurance-vie, ils représentent, pour les compagnies traditionnelles, le réseau de vente le plus efficace.

Relancés par certaines compagnies comme un moyen de résister à la bancassurance, ces réseaux n'ont pas atteint leur objectif puisqu'ils ont cédé 9 points en part de marché aux bancassurances entre 1988 et 1994 186( * ) .

Les salariés sont en général rémunérés à partir d'un fixe salarial auquel s'ajoutent des commissions d'acquisitions, de stabilisation du portefeuille et, éventuellement, des primes de productivité. L'un des principaux problèmes posés par ce mode de distribution est l'instabilité des personnels.

Les exigences accrues des clients se traduisent par un acte de vente plus intelligent, plus technologique (besoin d'ordinateurs portables), plus comparatif.

C'est sur la capacité à répondre à une attente des clientèles qu'ils sont censés mieux connaître que les banques et sur la valeur ajoutée de l'offre que se déterminera l'avenir des réseaux de ventes salariés dans l'assurance traditionnelle, en particulier vis-à-vis des banques auxquelles les compagnies essayent d'échapper par cette stratégie.

Les réseaux de certaines compagnies, comme l'ancien réseau de l'UAP et du GAN paraissent particulièrement menacés.

c) Les gros bataillons de la bancassurance dominent le marché de l'assurance-vie

Sur la base de l'extension des opérations autorisées aux établissements de crédit par la loi bancaire de janvier 1984, les banques ont commencé à vendre des produits d'assurance-vie dans les années 1980 et sont devenues à la fin des années 1990 le premier réseau de distribution des produits d'assurance-vie comme le tableau 54 le montre bien.

En réalité, la prise de position rapide des réseaux bancaires sur ce marché, qui est d'ailleurs proportionnelle à la taille des réseaux, comme le montre le succès de la filiale PREDICA du Crédit Agricole (devenu le 3 e réseau national depuis 1994) est un cas d'école pour l'illustration du principe des économies de gamme.

La distribution d'un produit nouveau par un réseau bancaire se fait à coûts fixes pratiquement constants et à coût marginal très faible. Ainsi, la distribution de produits d'assurance nouveaux générant des recettes marginales pour les banques, se traduit par une forte sous-additivité des coûts marginaux, qui fait des banques un concurrent redoutable sur ce marché. C'est pour cette raison que les compagnies d'assurance ont essayé de faire des banques ou des réseaux concurrents comme La Poste les distributeurs de leurs produits dans le cadre d'accords de distribution ou en développant des liens capitalistiques avec certains réseaux. L'économie de gamme est telle que cette concurrence est en train de s'étendre avec retard aux contrats d'assurance dommages dans les risques de masse sur le marché des particuliers. La question se pose même de savoir ce qui peut freiner les banques à l'avenir dans leur conquête de part de marché sur les deux grands segments de marché de l'assurance.

d) L'arrivée timide de la vente directe sur le marché français

Il s'agit au sens strict de la vente sans réseau.

En mars 1993, une enquête SOFRES réalisée par le Groupement des assurances de personnes (GAP) à la FFSA montrait qu'en moyenne 14 % des contrats vie, capitalisation et santé en cours en 1993 avaient été souscrits par correspondance.

Selon une étude menée en 1994 par le CAPA sur un échantillon représentatif de 5 617 ménages, la pénétration de l'assurance directe était de 9,4 % (dont 5,6 % par l'assurance scolaire). 3,8 % des ménages auraient donc acheté au moins une fois un produit d'assurance en direct.

En termes de produits cependant, en dehors de l'assurance scolaire, le taux de pénétration de l'assurance directe reste inférieur à 2 % :

1,7 % pour le complémentaire santé ;

1,4 % pour l'habitation ;

1,3 % pour l'automobile ;

1,1 % pour les indemnités journalières ;

1 % pour l'individuelle accident.

La part de vente directe dans les affaires nouvelles assurance-vie serait cependant de 11 %. Des questions de définition restent posées pour une appréhension exacte du développement de ce mode de distribution.

Le profil des clients de l'assurance directe est assez typé : jeunes (25 à 35 ans) à niveau culturel élevé, appartenant à des CSP supérieurs, disposant de revenus importants et résidant le plus souvent en Île-de-France. Le profil ressemble comme à un jumeau à celui des clients de la banque directe, qui à ce stade a atteint un palier, faute d'avoir su combler le déficit relationnel qu'implique ce type de relation commerciale 187( * ) .

CARDIF du groupe Compagnie bancaire-Paribas, est un bon exemple de ces sociétés d'assurance directe, notamment vie, qui ont réussi à s'implanter durablement sur ce segment, plutôt appelé à se stabiliser ou à une croissance lente qu'au développement rapide sur lequel certains tablèrent. AXA est leader en France de l'assurance directe, notamment en matière automobile, et peut faire de cette portion la base d'un développement européen important, comme elle semble en faire la démonstration en Allemagne.

e) La grande distribution : un concurrent à fort potentiel

Selon l'analyse du CAPA, peuvent prendre pied sur le marché de l'assurance et s'y enraciner les acteurs qui ont une clientèle stable, avec une bonne relation de confiance, et qui disposent d'une base de données bien nourrie. D'où l'apparition récente d'IKEA sur le marché et plus généralement des grands réseaux de distribution comme Carrefour, Continent ou les Galeries Lafayette avec Cofinoga (mais aussi BHV, le Printemps, la Redoute, la FNAC, Conforama).

Ce type de distribution a été inaugurée en 1989 par Carrefour lançant l'expérience de " l'Épargne libre Carrefour ". Conformes au concept de la grande distribution, les produits d'assurance-vie lancés au départ sont de fonctionnement simple et accessibles au plus grand nombre.

Un mot peut être ajouté concernant l'impact médiatiquement amplifié des nouvelles technologies (ordinateurs, internet) sur la distribution de l'assurance. Certes, ces médias nouveaux vont permettre d'ouvrir un peu plus le marché à des prestataires de services lointains et, dans une certaine mesure, renforcer la pression compétitive en matière de qualité et de tarif de l'offre d'assurances, mais en fait il convient de se garder de " substantialiser " ces nouvelles technologies (qui ne sont pas le fait d'acteurs nouveaux le plus souvent, mais une autre manière de faire connaître et, parfois, de vendre ses produits), et de surestimer leur impact sur la structure préexistante des canaux de distribution.

En fait, ces nouvelles technologies deviennent de plus en plus complémentaires à l'acte d'intermédiation et, selon l'expression d'Henri Debruyne, il y aura " intégration des réseaux technologiques dans les canaux de distribution existants, plutôt que remplacement " (voir cependant l'annexe 2 de ce chapitre sur le commerce électronique dans l'assurance).

II. LES RAISONS DE L'ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE DE DISTRIBUTION DES PRODUITS D'ASSURANCE EN FRANCE

A nouveau, les raisons de cette évolution, étudiées dans le cas français, sont assez représentatives des raisons de l'évolution parallèle de la distribution de l'assurance en Europe, avec des spécificités nationales marquées (comme l'assurance directe dans le risque automobile en Grande-Bretagne).

Comme on le voit de manière très claire dans les tableaux et schémas qui suivent, la dynamique d'évolution des canaux de distribution est en rapport avec le niveau relatif du coût de distribution, même si l'assurance directe est bloquée dans son développement pour d'autres raisons. La structure des coûts est la clé de la compétitivité comparative des réseaux de distribution physiques, même si les modes de distribution à forte composante électronique sont mieux adaptés à des clientèles jeunes ou haute gamme.

Graphique 26

Coûts de distribution par type de réseau en assurance-vie-épargne 188( * )

(en pourcentage des primes émises)

Source : Solving International.

Graphique 27

Positionnement prix des réseaux de distribution

en assurance automobile 189( * )


(sans tenir compte des éventuels budgets de dérogation)

Source : Enquête annuelle Solving International sur la distribution en assurance des particuliers.

C'est la maîtrise des coûts, notamment de gestion et d'acquisition, et la volonté de traduire cette maîtrise en prix compétitifs, qui expliquent le succès des mutuelles sans intermédiaires en France. Le taux de frais généraux (charges d'acquisition et de gestion calculées en pourcentage des primes) des MSI était par exemple de 25,5 % en 1994, tandis que celui des sociétés " rémunérantes " (les sociétés à forme mutuelle, selon le décret de 1938, ayant recours à des intermédiaires et donc très proches des compagnies classiques) s'élevait à 31,4 %, soit un taux de 25 % inférieur pour les MSI 190( * ) .

Quant aux banques, au-delà du différentiel positif d'image dont la banque bénéficie par rapport à l'assurance, elles doivent le succès de leur percée sur le marché de l'assurance-vie à :

- la facilité d'assimilation par les réseaux bancaires de la culture du produit d'assurance-vie, produit d'épargne longue venant à point nommé compléter une gamme de produits d'épargne plutôt " courts " ;

- la capacité à offrir des produits simples dans des conditions de transparence sur les frais et la rémunération perçue par l'institution vendeuse ;

- un niveau de productivité commerciale allant de 1 à 5, voire de 1 à 10 entre intermédiaires traditionnels et réseaux bancaires (là où un agent général vend 1 ou 2 contrats vie par semaine, un chargé de clientèle Pacifica en vendra 3 ou 4 par jour) ;

- avoir, à partir de là, et certainement aussi grâce au soutien direct et indirect que la présence de réseaux existants a pu apporter à une comptabilité analytique arrangeante, des taux de chargement bas, voisins de 5 %, guère inférieurs à ceux des MSI, mais très inférieurs à leur principal canal concurrent sur ce type de produits que sont les réseaux salariés.
Sur le marché de l'assurance dommages, tout en ayant encore des coûts de distribution sensiblement supérieurs à ceux des MSI, elles ont réussi à s'implanter dans la couverture des risques de masse (automobile, MRH) grâce à :
- la séparation des processus opérationnels de gestion des ventes et de gestion des sinistres, avec centralisation au niveau régional du traitement des sinistres et gains de productivité associés ;

- une gestion rapide et humanisée des sinistres, c'est-à-dire grâce à la qualité du " back office " géré dans une perspective d'honorer les engagements et non pas de les discuter ;

- à la prestation de services et à la fidélisation de la clientèle (qui est également un des grands facteurs de succès des MSI).

Tableau 56
Armes des différents types de réseaux de distribution d'assurance
en France 191( * )

Armes

Types de réseau

de distribution

Prix

Trafic et fréquence de contact

Conseil à valeur ajoutée

Processus clients

Force et sens de la marque

Agents généraux

*

*

***

**

(au cas

par cas)

Courtiers

**

*

***

**

(au cas

par cas)

Salariés

*

(au cas

par cas)

(au cas

par cas)

**

(au cas

par cas)

Mutuelles sans intermédiaires

***

*

**

***

****

Bancassurance

**

****

**

****

***

Direct

****

*

*

****

*

Grande distribution

**

****

**

(au cas

par cas)

***

Groupes d'affinités

**

***

***

(au cas

par cas)

****

Source : Enquête annuelle Solving International sur la distribution en assurance des particuliers.

C'est sur des bases voisines de contrôle des coûts, de maîtrise des risques par la bonne connaissance de la sinistralité, de savoir-faire en matière de communication et de promotion, de prestations de services et de fidélisation de la clientèle, que l'assurance directe a pu conquérir une part de marché en France. Dans la mesure où les avantages étaient moins visibles que sur d'autres marchés par rapport à la concurrence, elle s'est moins développée ici et plus ailleurs, comme en Grande-Bretagne 192( * ) .

A partir des raisons, rapidement analysées, du succès des nouveaux modes de distribution, on peut voir comment la diversification de la distribution, avant même l'ouverture des marchés nationaux européens, contribue à créer un climat de compétitivité très favorable au " consommateur " d'assurances en matière d'étendue des garanties et de tarifs.

III. RÉPARTITION DES CANAUX DE DISTRIBUTION EN EUROPE ET ÉVOLUTIONS

A. L'ÉTAT DES LIEUX EST RASSURANT D'UN POINT DE VUE FRANÇAIS

La structure de distribution est très spécifique selon les pays ou selon les familles de pays. Elle s'inscrit sur fond d'une densité démographique assurantielle spécifique également assez marquée.

Tableau 57
Distributeurs d'assurances pour 10 000 habitants en Europe

Allemagne*

Belgique

Espagne

France

Italie

Angleterre

Pays-Bas

54,33

25,25

24,87

21,16

16,92

17,12

23,80

* Allemagne : ce chiffre inclut l'ancienne RDA et les 250 000 agents à temps partiel.

Source : CAPA + Risques - cité par F.-X. Albouy - Risques n° 8, décembre 1991.

Les tableaux ci-dessous, malheureusement un peu anciens, montrent la structure de distribution de l'assurance en Europe en 1992-1993. Il serait évidemment intéressant de disposer à la fois de chiffres plus récents et d'un point de référence plus ancien dans le temps pour mieux mesurer l'évolution et le rythme des évolutions selon les pays

Tableaux 58
Parts de marché des différents modes de distribution en Europe 193( * )

 

Assurance-vie (chiffres 1993 en %)

 

Agents

Courtiers

Commerciaux

Bureaux

Bancassurance

Direct

Autres

Allemagne

66

5

14

4

8

3

0

Belgique

17

43

5

0

20

0

15

Espagne

48

12

9

10

21

0

0

France

15

7

22

0

51

5

0

Italie

55

1

10

22

12

0

0

Pays-Bas

4

53

4

0

22

15

2

Royaume-Uni

15

37

25

0

18

2

3

Source : Limra, FFSA.

 

Assurance dommages (chiffres 1992 en %)

 

Agents

Courtiers

Commerciaux

Bureaux

Bancassurance

Direct

Autres

Allemagne

75

10

7

0

6

2

0

Belgique

12

70

6

0

1

0

11

Espagne

53

11

34

0

0

0

2

France*

45

18

4

27

3

3

0

Italie

77

15

6

0

2

0

0

Pays-Bas

5

46

7

0

13

29

0

Royaume-Uni

19

39

0

0

0

11

31

* Chiffres FFSA

Source : H. Debruyne et V. Torchet, CAPA.

Ces tableaux font ressortir plusieurs caractéristiques de la distribution de l'assurance en Europe :

- on retrouve, avec l'importance du réseau des agents généraux en Allemagne et en Italie, le cloisonnement étroit, jusqu'à il y a peu, du marché de l'assurance dans ces pays ;

- on remarque dans les pays traditionnellement ouverts au commerce international le rôle important des courtiers (Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique) et la place importante de l'assurance directe aux Pays-Bas et au Royaume-Uni ;

- la France, si tant est que l'évolution qu'elle a connue est annonciatrice de développements à attendre dans les pays restés plus inertes sur le plan concurrentiel interne, est nettement détachée devant ses concurrents dans le domaine de la bancassurance, à l'exception des Pays-Bas qui ont intégré complètement leur secteur financier et de l'Espagne qui a laissé s'accomplir le développement de la bancassurance en devenant même leader, tout récemment, en termes de flux, sur le marché de la bancassurance IARD.
Ce panorama instantané de la distribution en Europe est assez rassurant pour la France dans la mesure où il indique qu'une adaptation largement engagée ici est encore à venir dans plusieurs pays en risquant de fragiliser leur marché à un moment où les compétiteurs français, assureurs, mutuelles d'assurance, ou bancassureurs sont bien aguerris au jeu de la concurrence. Le marché français paraît le mieux placé, après celui de la Grande-Bretagne, marquée par une avance irrattrapable dans la couverture de certains grands risques (transports notamment).

B. QUELQUES COMMENTAIRES SUR LES DIVERS CANAUX DE DISTRIBUTION EN EUROPE

1. Les agents généraux sont partout en situation défensive pour des raisons comparables

L'étude du CAPA fait bien ressortir que "la population des agents généraux présente pourtant des caractéristiques homogènes bien marquées :

- une présence forte sur le marché des particuliers, avec une prédilection pour les assurances de dommages ;

- une baisse générale et régulière des parts de marché, au profit de nouveaux modes de distribution, certaines sociétés échappant à cette tendance depuis peu ;

- une productivité commerciale relativement faible ;

- des modèles d'organisation caractérisés par une proportion importante d'actes de gestion ;

- une population plutôt vieillissante, qui a du mal à évoluer avec son marché, et à adapter son offre commerciale à une clientèle plus exigeante qu'autrefois, donc plus volatile.
La conclusion pour cette forme classique de distribution est en forme de couperet : " moderniser est (partout) urgent et incontournable ". Mais le mode de rémunération des agents généraux ainsi que leur mode d'articulation aux compagnies et le coût et la productivité de l'ensemble, plus encore que pour les courtiers, sont au coeur de la problématique.

En effet, sur le marché français des risques de masse, les chargements moyens des compagnies sont de 17 %, le commissionnement moyen des agents est de 18 %. Ainsi à un chargement global de 35 % des réseaux classiques font face des taux de chargement de 29 à 27 % pour les mutuelles sans intermédiaires et de 19,2 % pour les assurances du Crédit mutuel 194( * ) . Cependant le taux de chargement le plus bas du marché est celui d'une mutuelle sans intermédiaire, la MATMUT, qui est de 18 %.

2. Les réseaux salariés de l'assurance en Europe

Ils sont plus importants qu'en France dans un certain nombre de pays comme le Danemark ou la Grèce où ils tiennent respectivement 50 % du marché dommages de particulier et 90 % du marché vie.

Le réseau salarié de l'assurance britannique est également puissant traditionnellement, représentant 25 % du chiffres d'affaires global de l'assurance-vie. Complétés par le réseau des " conseillers financiers indépendants " (financial advisers) qui draine 35 % des primes vie, ces deux réseaux dominent durablement le marché de l'assurance-vie britannique.

La part de marché détenue par les réseaux salariés en Allemagne, Italie, Espagne n'est pas non plus négligeable puisqu'elle s'élève à 10 ou 12 % du marché total de l'assurance-vie. Cependant, ces pays n'ont pas encore connu un développement important de la bancassurance.

3. Les assurances mutuelles

Nulle part en Europe le rôle que jouent les mutuelles d'assurance sans intermédiaires dans la distribution des produits d'assurance dommage n'est aussi élevé qu'en France 195( * ) , qui est pratiquement le seul pays où elles se soient développées à l'échelle nationale (voir tableau 59). En Belgique cependant, la société d'assurance mutuelle SMAP détient 16 % du marché en assurances dommages et se situe au 2 e ou 3 e rang selon les années. Sa part de marché en assurance-vie est également très élevée, et se situe à 25 %. En Allemagne, leur rôle est faible.

En matière de distribution, dans la plupart des pays européens, les mutuelles d'assurance ne se distinguent pas des autres acteurs puisqu'elles s'appuient elles aussi sur des réseaux d'agents généraux, de courtiers, des accords de bancassurance ou d'autres accords sur les nouveaux canaux de distribution, à l'instar en France de ce que font les mutuelles avec intermédiaires que sont les SAM affiliées à la ROAM.

En revanche, outre-Atlantique, comme le montre le tableau suivant, les mutuelles d'assurance sans intermédiaires jouent un rôle important, également dans le domaine du risque industriel. Il existe en effet aux Etats-Unis trois grandes mutuelles industrielles (Arkwright, Hartford Steamboiler, Allendale) qui opèrent à l'échelle nationale et sans intermédiaires, alors qu'elles opèrent avec intermédiaires en Europe où elles sont également présentes, notamment en France, en raison de la qualité de leurs noms et de celle de leurs services d'ingénierie de sécurité (the " Factory Mutual System "). Cela peut montrer que l'avantage donné en France par le consommateur au circuit court sur le segment des risques de masse a son pendant outre-Atlantique sur le segment des grands risques. Les deux systèmes ont en commun l'attrait pour la dimension sécurisante du service d'assurance, qui l'emporte en l'espèce sur la puissance financière de l'institution qui le propose.

Les choses s'inversent en matière d'assurance-vie, puisque la part de marché des mutuelles d'assurance françaises est très faible, alors qu'au Royaume-Uni, la part des mutelles s'élève à 30 %. Elle est encore plus importante aux Etats-Unis (37 %) et écrasante au Japon (95 %).

Tableau 59
Parts de marché des mutuelles sur plusieurs marchés nationaux 196( * )

En %

France

Royaume-Uni

Etats-Unis

Japon

Vie

4

30

37

95

Dommages

43

5

30

2

Source : estimations Société Générale Euro Research.

La comparaison des parts de marché des assurances mutuelles françaises en vie et non vie montre la différence d'implantation des assurances mutuelles sur ces deux segments du marché des particuliers (voir tableaux ci-après).

Tableau 60
Parts de marché des mutuelles en dommages (1996) 197( * )

Groupe

CA (en MF)

Classement

Part de marché (%)

GROUPAMA

23 704

2

10,0

MACIF

13 471

4

5,7

AZUR GMF

12 651

6

5,3

MMA

10 589

7

4,5

MAIF

9 094

8

3,8

MAAF

8 067

10

3,4

MATMUT

5 462

15

2,3

SMA-BTP

3 354

17

1,4

Source : Argus.

Tableau 61
Part de marché des mutuelles en assurance-vie (1996)

Groupe

CA (en MF)

Classement

Part de marché (%)

GROUPAMA

7 148

16

1,5

MMA

6 407

18

1,4

LA MONDIALE

5 215

20

1,1

Source : Argus.

Les évolutions des mutuelles d'assurance, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, vont-elles concerner le secteur français des mutuelles d'assurance françaises ?

On a en effet observé dans ces deux pays une certaine démutualisation comme dans le domaine bancaire.

En 1997, en Grande-Bretagne, deux grandes opérations de démutualisation ont eu lieu  : celle de Scottish Amicable reprise par Prudential et celle de Norwich Union par introduction en bourse. La démutualisation s'est faite par remise d'actions gratuites aux sociétaires, qu'ils pouvaient ensuite revendre. 20 millions de Britanniques auraient profité en 1997 de ces opérations, permettant aux ménages de réaliser un produit financier compris entre 30 et 35 milliards de livres (équivalent d'une baisse de 10 % de l'impôt sur le revenu) 198( * ) . La démutualisation dans l'assurance britannique ne porte que sur quelques unités et ne modifie pas significativement la statistique du nombre des mutuelles et de leur chiffre d'affaires, même si l'on a observé un succès accru des mutuelles auprès de sociétaires de la " onzième heure " spéculant sur leur éventuelle démutualisation.

Aux Etats-Unis, le processus est engagé depuis plus longtemps. La démutualisation aux Etats-Unis a concerné Guarantee Life Los, Allamerica Financial Corp, Equitable et, en 1997, American Life Holdings. La capitalisation boursière supplémentaire attendue de la démutualisation pourrait être de 20 milliards de dollars en 5 ans. Plusieurs mutuelles ont déjà annoncé leur changement de statut comme Mutual Life Insurance Co of New-York. Là aussi cependant le phénomène de démutualisation semble garder une ampleur limitée.

L'évolution française sera vraisemblablement différente, plus simple et plus diversifiée. En fait, elle est déjà largement entamée par certaines mutuelles qui ont créé des filiales commerciales, il est vrai faute d'alternative. C'est le cas par exemple de la MAAF qui a éclaté en deux sociétés en 1992 et peut désormais, grâce à une filiale commerciale, détenue à 99 %, recourir normalement au marché des capitaux.

4. La bancassurance en Europe

Elle s'est développée en Europe du Sud selon le modèle français, sans jouer encore un tel rôle, notamment dans la distribution de l'assurance-vie.

Les bancassurances hollandaises sont les premières bancassurances d'Europe, tous produits confondus, en parts de marché : 20 % en assurance-vie et 15 % en dommages. L'exemple est suivi de plus loin par la Belgique en assurance dommages, mais les bancassureurs tiennent aussi 20 % du marché de l'assurance-vie.

En Allemagne, le concept d'Allfinanz, typique des banques allemandes, a permis une intégration facile des produits d'assurance-vie dans la gamme des produits distribués par les banques, et les caisses d'épargne (17 000 points de vente) distribuent déjà une large gamme de produits " IARD ". Cependant, la part de marché des banques en assurance-vie individuelle est seulement voisine de 10 %.

En Grande-Bretagne, les banques et les " Building Societies " sont également entrées sur le marché de l'assurance-vie, mais par le biais de l'accession à la propriété et de " l'endowment mortgage " (assurance mixte souscrite au moment d'un achat immobilier). La part de marché des bancassureurs britanniques est de 20 % en contrats de vie individuels.

5. La vente directe en Europe199( * )

La vente directe s'est développée aux Etats-Unis dans les années 1950. En Europe, Norwich Union lance ce mode de distribution en Grande-Bretagne dès 1970. Plusieurs sociétés de vente directe d'assurances françaises sont créées en France : Concorde en 1972, Cardif, Fédération continentale et Cofinoga en 1973. A la fin des années 1970, la Société suisse lance un partenariat avec les Trois Suisses, et GMF vie et Mutavie sont créées.

C'est aux Pays-Bas, et pour les grands pays européens en Grande-Bretagne, que ce mode de distribution de l'assurance est le plus développé, alors que la vente directe semble devoir rester une niche en France, compte tenu du travail de proximité réalisé par les MSI en milieu urbain, et par ces grandes " MSI de la ruralité " (selon l'expression de Jean-Michel Cornudet) que sont Prédica et Pacifica, les filiales d'assurance du Crédit Agricole et avant elles, Groupama.

Graphique 28
Distribution par vente directe en 1994 en Europe (en %)

Source : CAPA.

En Grande-Bretagne, la part de marché de l'assurance directe est globalement de 15 %, mais elle a surtout effectué une percée extraordinaire dans l'assurance automobile où elle atteint en quelques années 30 % du marché, alors qu'elle était considérée avec un certain scepticisme au départ. Ce succès est d'abord celui de Peter Wood, qui a créé en 1984 la société Direct Line, filiale d'ailleurs de la Royal Bank of Scotland, qui a conquis deux millions de clients en dix ans en couverture du risque automobile. La rapidité de cette évolution s'explique notamment par l'absence de tacite reconduction dans les contrats d'assurance britanniques, un contexte de tarifs peu segmentés, le rôle informatif très grand des médias. Les assureurs directs britanniques cherchent désormais à se développer sur le marché de l'assurance habitation et de l'assurance-vie.

Aux Pays-Bas, les taux apparents de distribution par la vente directe étaient en 1994 de 15 % en assurance-vie et de 25 % en assurance dommages, mais une certaine surestimation intervient du fait de la comptabilisation en parts de marché de l'assurance directe de contrats distribués par certaines sociétés hollandaises auprès de leur personnel.

IV. TENDANCES DE LA DISTRIBUTION SUR LES DIVERS MARCHÉS DE L'ASSURANCE : COMPLÉMENTARITÉ ET SÉLECTION RENFORCÉES, REDISTRIBUTIONS LIMITÉES, COMPÉTITION ACCRUE PAR LES NOUVELLES TECHNOLOGIES ET L'INTERPÉNÉTRATION DES MARCHÉS

Doit-on simplement extrapoler les évolutions passées de la distribution sur le marché français de l'assurance ? Peut-on projeter les évolutions françaises récentes sur les autres marchés européens, plaçant alors implicitement la France en position de pointe sur le plan industriel et commercial ?

Aucun canal n'étant exclusif et appelé à se substituer totalement à un autre ou à tous les autres, la question est de savoir dans quel sens le remodelage de la distribution peut être amené à jouer désormais au profit relatif de quels canaux de distribution par rapport à tels autres canaux.

Ceci est particulièrement vrai des nouvelles technologies (Minitel, ordinateur, Internet) qui ne représentent pas à vrai dire de nouveaux canaux de distribution mais des formes diverses de l'assurance directe, et des vecteurs qui seront intégrés à un titre ou à un autre par l'ensemble des modes de distribution, comme on le voit dans d'autres secteurs. De la même façon, il est parfois artificiel de séparer l'assurance directe de la bancassurance ou de l'assurance classique dans la mesure où elle est un mode de souscription que l'un et l'autre acteur emploient. Il y a beaucoup moins de types d'acteurs ultimes que de modes concrets de distribution.

Si l'on considère que le cas des nouvelles technologies est ainsi réglé, qu'au demeurant l'assurance directe restera une niche sur le marché français de l'assurance compte tenu de la bonne implantation des MSI et de leur compétitivité, la question de l'avenir de la distribution se ramène à la rivalité entre l'assurance classique, avec ses modes de distribution intermédiaires que sont l'agence et le courtage et ses réseaux salariés, et la bancassurance avec sa distribution intégrée de réseaux de distribution bien implantés en zone urbaine et rurale (comme l'est en particulier le réseau de La Poste qui est cependant cantonné à la distribution de l'assurance-vie). Cette rivalité, ou cette complémentarité, dépend des marchés.

Les bancassureurs se sont développés sur le marché des particuliers en assurance-vie parce que la clientèle équipée par les compagnies traditionnelles était une clientèle réduite en nombre, plutôt fortunée. L'équipement des ménages en assurance-vie était très faible dans les classes moyennes. C'est ce segment de marché que les bancassurances ont travaillé. Ils ont " équipé " leur clientèle de masse en assurance-vie (un client sur trois du Crédit Agricole est " équipé " par Predica avec un contrat d'assurance-vie). C'est donc avant tout en développant le marché de l'assurance-vie que les réseaux bancaires ont pris une part de marché majoritaire, et non en prenant des clients aux assureurs traditionnels. En ce sens, la considération abstraite de l'évolution des parts de marché relatives des assureurs et des banquiers est trompeuse, si elle fait abstraction de la taille des marchés en volume de capital collecté (global et moyen) et en nombre de contrats.

Les banques ont démocratisé l'assurance-vie d'autant plus facilement qu'il s'agissait d'un contrat d'épargne financière homogène à la culture bancaire et qu'ils ont su le faire par substitution de produits, alors que la culture dominante des intermédiaires de l'assurance est une culture " IARD " peu évolutive dans un mode de distribution très fragmenté et individualiste. Il n'est pas étonnant que les réseaux de vendeurs debout, lorsqu'ils étaient formés à cet effet aient mieux résisté sur ce marché que les agents généraux notamment en assurance individuelle. Il est donc peu probable que la tendance se renverse sur ce versant du marché des particuliers qu'est l'assurance-vie individuelle.

Il n'en va pas de même pour les bancassureurs sur le marché de l'assurance des dommages, où le taux d'équipement initial des ménages en contrats d'assurance (multirisque habitation par exemple), auprès des compagnies commerciales est beaucoup plus élevé, et où la conquête de parts de marché nouvelles ne se fait pas sur un terrain vierge mais sur un marché occupé et couvert de manière serrée par une pluralité d'acteurs - compagnies et MSI pour l'essentiel - que leur compétition mutuelle a renforcées. C'est sans doute pour cette raison que les agents généraux détiennent toujours la part de marché la plus grande sur ce segment, l'assurance dommages des particuliers représentant 80 % du marché de l'assurance dommages. Il paraît difficilement imaginable que sur ce segment du marché des particuliers, les bancassureurs puissent jamais, en tout cas à un horizon visible de 2005, dépasser une part de marché d'environ 20 % 200( * ) voire de 25 % avec La Poste, alors qu'il est en 1997 voisin de 5 % (2,3 % pour le Crédit Mutuel, 2 % par le Crédit Agricole, le reste pour les autres banques dont la Société Générale).

Il est en revanche peu vraisemblable que le succès national des réseaux bancaires ou des MSI sur le marché français de l'assurance de masse annonce une extrapolation possible de ce succès sur les autres marchés nationaux européens, qui resteront d'abord eux-aussi des marchés nationaux.

En effet, le succès commercial est avant tout un effet de la bonne implantation des réseaux nationaux, qui sont par définition peu présents dans les autres pays (et l'on a vu le caractère vraisemblablement durable du faible effet de la LPS sur l'interpénétration des marchés nationaux). C'est la raison pour laquelle des OPA sont exercées sur les structures à réseaux comme les AGF par les grandes compagnies étrangères telle Allianz.

Il est plus probable que les techniques commerciales accumulées par les compagnies d'assurance dans la résistance aux offensives des mutuelles sans intermédiaires ou des réseaux bancaires trouveront là un champ d'application compensatoire leur permettant de développer leur part de marché par rapport à leurs homologues étrangères sur le marché domestique sur lequel elles cherchent à développer leurs affaires, notamment par le biais de l'assurance directe.

Sur les marchés professionnels, selon qu'il s'agit des risques des artisans, des commerçants, des professions libérales, des petites entreprises ou des risques industriels, la place des intermédiaires classiques de l'assurance paraît difficilement expugnable, même si tout risque de masse est susceptible d'une offensive en règle voisine de celle que les banques ont mené sur le marché des particuliers, comme le montre d'ailleurs les avancées de Groupama et de la MAAF sur ces segments de marché.

Aujourd'hui, grâce à la possibilité de sortir du statut public des années 1949-1950 accordée par le décret du 15 octobre 1996 201( * ) , l'organisation des relations entre agents généraux et sociétés d'assurance n'est plus monolithique et chaque réseau d'agents généraux est amené à organiser ses relations avec sa compagnie au travers d'un contrat reflété dans le traité individuel reliant l'agent et la société. Les agents généraux ont désormais la possibilité de se constituer en sociétés et ainsi la possibilité leur est offerte de s'associer et de se spécialiser par clientèles ou métiers au sein d'une même agence. Ils ont désormais les moyens institutionnels de se moderniser, de mettre en oeuvre eux-aussi les nouvelles technologies et de se hisser au niveau de leurs concurrents, tout en restant en possession de leurs atouts traditionnels.

C'est pourquoi la baisse du nombre d'agents généraux indépendants (qui ne seront peut-être plus que 12 000 vers 2005 ou même 10 000 selon des estimations extérieures à la profession) ne se traduira vraisemblablement pas par une diminution parallèle du nombre d'agents généraux et du chiffre d'affaires réalisé par ce mode d'intermédiation, qui peut trouver dans sa concentration les moyens de son redéploiement et de sa modernisation. En ce sens, 10 % déjà des agents généraux fonctionnent en association 202( * ) : on notera que la moyenne du chiffre d'affaires des agents était de 630 000 F en 1990 et de 861 000 F en 1996 (cependant 62 % des agents sont en dessous de ce chiffre) 203( * ) considéré pourtant comme le point mort.

En ce qui concerne la concurrence entre intermédiaires classiques, il est vraisemblable, qu'à la marge, le rôle relatif des courtiers sera plutôt accru sur le marché européen au détriment des agents généraux, y compris sur le marché de l'assurance individuelle sur lequel ils prennent pied efficacement grâce à leurs plateaux téléphoniques, dans la mesure où ils seront plus que jamais les vecteurs de la comparaison de la qualité des couvertures offertes par les divers assureurs et des prix exprimés en une seule monnaie. Son internationalisation, son rôle innovant, et la place qu'il est en train de prendre dans le placement de l'assurance directe 204( * ) sur le marché des particuliers, qui est ainsi réintermédiée, vont dans le même sens. On ne peut que regretter, dans ce contexte porteur pour le courtage, que la plupart des grands cabinets de courtage français aient été absorbés en quelques années. Par ailleurs, la complexification de la couverture des risques de l'entreprise et l'important processus de fusions acquisitions en cours au sein des PME françaises devraient conduire à l'abandon complet de ce segment par la plupart des agents généraux.

* *

*

Les évolutions de la distribution révèlent les attentes des consommateurs, les lacunes de l'intermédiation classique, les opportunités à saisir et les risques de déplacement des affaires liées à une insuffisante adaptabilité des canaux de distribution traditionnels.

Bien que " 52 % des consommateurs d'assurance-vie et 88 % d'assurés dommages se déclarent aujourd'hui satisfaits de leur assurance " 205( * ) , beaucoup de frustrations, d'attentes diverses non prises en compte, de souhaits d'initiatives récompensant la fidélité (" la fidélité est à sens unique, du client vers l'intermédiaire, mais jamais dans l'autre sens " dit un assuré interrogé par le CAPA) alimentent, derrière ce premier plan rassurant, un risque de volatilité accru du fonds de commerce des sociétés et des réseaux, que la dimension européenne du marché ne peut qu'accentuer. Un des enjeux de l'assurance et des réseaux classiques est de savoir capter à son profit les leçons et les tendances du marketing contemporain : " la vraie richesse des entreprises est dans leur capacité à gérer et à garder leur clientèle " ; " la maîtrise de la distribution a une incidence essentielle sur les résultats " (par le biais de son influence sur le " prix de revient du contrat d'assurance ").

Les risques encourus par l'assurance française, compte tenu de la séparation fonctionnelle entre distribution et production à laquelle la dimension européenne confère un nouvel enjeu, sont des risques de déplacements des centres de traitement et de concentration des compétences sur les marchés apportant l'environnement général le plus propice. L'exemple du déplacement de la gestion des risques industriels des AGF en Allemagne illustre bien le genre de risque auquel un marché ouvert de l'assurance peut exposer. Mais ce risque n'est pas nécessairement unilatéral.

Plutôt qu'à une substitution ou à un bouleversement de modes de distribution qui rivalisent mais aussi se croisent et s'imbriquent, ou même à un remplacement de chaque canal par une multidistribution généralisée, c'est à une sélection accrue à l'intérieur de chaque canal entre acteurs plus performants et acteurs moins performants que l'avenir nous réserve plutôt d'assister au sein d'un univers globalement plus compétitif et soumis à une culture consumériste croissante, la maîtrise des nouvelles technologies étant au centre de cette capacité à faire la différence par rapport aux autres.

ANNEXE

ASSURANCE ET COMMERCE ÉLECTRONIQUE
206( * )

" Le terme de commerce électronique désigne en général toutes les formes de transactions liées aux activités commerciales, associant tant les particuliers que les organisations, et reposant sur le traitement et la transmission de données numérisées, notamment texte, son et image. Il désigne aussi les effets que l'échange électronique d'informations commerciales peut avoir sur les institutions et sur les processus qui facilitent et encadrent les activités commerciales, comme la gestion des organisations, les négociations commerciales et les contrats, les cadres juridiques et réglementaires, les arrangements en matière de règlement de comptes ou la fiscalité 207( * ) .

Aujourd'hui, le commerce électronique est surtout utilisé concernant les échanges interentreprises. Cependant, force est de constater que le commerce électronique entreprises/consommateurs se développe rapidement. Et, à l'heure actuelle, c'est le réseau Internet, environnement d'information numérique universel, qui constitue les supports privilégiés du commerce électronique.

Les perspectives de croissance du commerce électronique paraissent impressionnantes.

Pour la France, selon le cabinet IDC, le marché du commerce électronique " business to consumer " passera de 50 millions de francs en 1996 à 9 milliards de francs en 2001. Le marché du commerce électronique " business to business " passera de 470 millions de francs en 1996 à plus de 48 milliards de francs en 2001.

Un distinguo s'impose donc entre le marché " business " à très fort taux de développement pour le court/moyen terme et le marché " business to consumer " qui ne prendra son essor qu'à moyen ou long terme.

Malgré la croissance exponentielle, voire explosive, prévue, ces chiffres méritent d'être relativisés. A titre de comparaison, le Minitel génère 5 à 7 milliards de francs chaque année et la VPC classique environ 55 milliards de francs en France (et 350 milliards de francs sur le marché américain).

Des perspectives semblables s'ouvrent dans les autres pays européens. Une des clés du développement du commerce électronique réside dans la disponibilité et l'utilisation des méthodes de paiement rémunérées.

Morgan Stanley, dans son rapport de l'été 1997 " The Internet Retailing Report " prévoit une croissance significative pour les secteurs suivants : l'assurance et les services financiers, le matériel et les logiciels informatiques, les voyages, les livres, la musique et la vidéo, les cadeaux et fleurs et l'automobile.

Selon ce même rapport, les deux secteurs de l'assurance et des services financiers auraient les produits les plus adaptés à la vente sur l'Internet. Le Net permet en effet d'offrir plus de services, de diminuer les coûts, et d'augmenter l'information vers les consommateurs.

Sur 200 G USD de chiffre d'affaires global du commerce électronique prévu pour l'an 2000, 23 seraient gérées par les activités de services financiers.

Le commerce électronique représente pour l'assurance l'émergence d'un nouveau (4 e ) canal technique de distribution de l'assurance.

On comptait environ 500 sites Web d'assurance dans le monde début 1997 (compagnies, agents, courtiers ...) dont : 200 aux Etats-Unis, 25 au Canada, 175 en Europe et 25 en Asie) 208( * ) .

Ces chiffres évoluent très rapidement. En effet, début octobre 1997, la France comptait 107 sites d'assurance.

Aujourd'hui, les secteurs de l'assurance sur l'Internet sont en retard par rapport aux autres activités de service (banque/finance et tourisme ...), notamment en terme d'interactivité et des services offerts (vente en ligne).

Aujourd'hui, les sites Web d'assurance français sont très nombreux et variés quant à leurs contenus et fonctionnalités. Sur les 107 sites d'assurance répertoriés par le CAPA à la fin de l'année 1997 209( * ) , seul un petit nombre d'acteurs s'est dores et déjà lancé dans la souscription et la vente de produits d'assurance entièrement enligne sur le Net.

Le courtier Assurland propose une assurance scolaire achetable en ligne depuis l'été 1997 et la CNP, Eurofil, LSN ont proposé des produits d'assurance d'octobre 1997 à janvier 1998 sur le Net dans le cadre de la galerie marchande expérimentale " Surf and Buy " d'IBM (http://www.surf-and-buy.com).

Aujourd'hui, la souscription et la vente en ligne sur l'Internet ne touchent que quelques produits d'assurance. Il s'agit de produits concernant la protection juridique, l'habitation, les matériels de communication, l'assurance scolaire et la prévoyance.

Ce paysage Internet français de l'assurance évolue très rapidement puisque, fin 1996 210( * ) , on ne comptait que 22 sites d'assurance en France. De plus, il était alors encore impossible d'effectuer un paiement de police d'assurance entièrement en ligne sur le NET.

Enfin, les acteurs de l'assurance sont aujourd'hui de plus en plus nombreux à proposer des devis et des simulations en ligne qui s'annoncent bien souvent comme les prémices avant le " grand saut " vers la vente totalement en ligne.

Le réel potentiel de l'Internet pour le secteur de l'assurance est certainement de permettre d'effectuer l'ensemble du processus de vente en ligne à moindre coût et de façon rapide et efficace.

Car l'Internet permet à tous les acteurs de l'assurance, à partir du même média, d'atteindre le consommateur directement, de l'informer, d'estimer ses besoins en assurance, de lui fournir un devis pour une police et de le faire souscrire et régler sa police d'assurance, tout cela en quelques " clics " de souris et à moindre coût.

CHAPITRE V

EMPLOI ET RELATIONS SOCIALES DANS L'ASSURANCE FRANÇAISE

Comment le secteur de l'assurance a-t-il traversé les évolutions fortes et diversifiées de ces dernières années, en matière d'emploi et de relations sociales ?

On s'intéressera dans un premier temps à la situation actuelle de l'emploi en analysant sa répartition professionnelle et géographique, ainsi que ses principales caractéristiques socio-économiques.

Les grandes évolutions de l'emploi en France seront ensuite étudiées et rapprochées avec celles des autres pays européens.

Les principaux facteurs de la relative stabilité constatée de l'emploi en France seront ensuite étudiés (formation, réduction et aménagement du temps de travail, coûts salariaux).

Enfin l'évolution des relations sociales de la profession des assurances sera appréhendée en analysant la convention collective nationale des sociétés d'assurance et l'accord sur l'exercice de la profession d'agent général entre la Fnsaga et la Ffsa.

I. ADAPTATION SANS TRAUMATISME DE L'EMPLOI CHEZ LES DIVERS ACTEURS DE L'ASSURANCE

A. UNE RELATIVE STABILITÉ DE L'EMPLOI MAIS DES TRANSFORMATIONS IMPORTANTES DES MÉTIERS

Le secteur de l'assurance n'est plus le créateur d'emplois qu'il a été dans les années 1970, cependant ses effectifs sont restés jusqu'à présent relativement stables. En parallèle, l'informatisation et l'introduction des nouvelles technologies ont eu un impact non négligeable sur la nature des emplois.

1. Diversité traditionnelle des métiers de l'assurance et évolutions récentes

On trouve dans l'assurance des métiers communs aux entreprises de tous les secteurs : secrétariat, informatique, communication, gestion financière etc... mais également des métiers spécifiques qui répondent aux différentes phases du déroulement du contrat. Deux des seize familles de métiers définis par l'observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance concentrent à elles seules pratiquement 60 % des salariés de la profession. Il s'agit de la famille " gestion des contrats " (27,4 % des effectifs) et de la famille " commercial " 211( * ) (32,3 % des effectifs).

Tableau 62
Répartition par familles de métiers en 1996

Familles de métiers

Poids en %

Effectifs

- Conception et adaptation des produits

- Contrôle technique et prévention

- Gestion des contrats

- Commercial

- Comptabilité

- Réassurance

- Administration

- Secrétariat et assistanat

- Communication

- Gestion des actifs

- Informatique et télécommunication

- Etudes et conseil

- Gestion et organisation

- Logistique

- Ressources humaines

- Direction

2,1

1,7

27,4

32,3

4,9

1

3

7,1

0,7

1

5,8

2,1

1,9

5,4

2,2

1,4

2 600

2 000

33 200

39 200

5 900

1 200

3 600

8 600

900

1 200

7 000

2 600

2 300

6 500

2 700

1 700

Ensemble

100

121 200 212( * )

Source : Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance - rapport 1997

Les changements de nomenclature (passage de familles d'emplois à des filières en 1994 peaufinées par la suite par la création de base de données de l'observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance) rendent difficile le suivi de l'évolution des métiers. La mise en parallèle des deux premières nomenclatures est d'autant plus déconseillée, que la première nomenclature s'est révélée à l'usage, selon la FFSA, trop floue, entraînant des affectations erronées dans certaines catégories de la part de certaines entreprises. Tout au plus peut-on constater :

- une stabilisation des effectifs en informatique et en gestion des ressources humaines ;

- une baisse des effectifs en travaux administratifs qui correspond à la suppression radicale de ces tâches par l'informatisation des procédures ;

- une diminution des personnels de secrétariat qui correspond à l'usage généralisé de l'informatique dans l'ensemble des emplois et à l'intégration des tâches ;

- une augmentation des effectifs en souscription, production, gestion des contrats qui correspond à un recentrage sur les métiers dits spécifiques. Ces métiers ont cependant fondamentalement évolué.

Ils ont été influencés par la performance croissante des systèmes informatiques de gestion des contrats et des clients associés au développement des télé-échanges d'information entre tous les acteurs. Les tâches de plus en plus complexes (pour la gestion des sinistres par exemple) et la technicité spécifique du métier sont intégrées aux logiciels sur le modèle des systèmes experts, ce qui tend à transformer le rôle de l'encadrement intermédiaire.

L'équipement informatique des réseaux a entraîné la suppression d'opérations traditionnelles réalisées au Siège et/ou dans des unités administratives spécialisées et a suscité la création de nouvelles fonctions de contrôle, de support et d'expertise.

Pour les métiers de gestion, une évolution importante concerne le développement de la polyvalence qui conduit à remplacer les tâches de masse répétitives et peu qualifiées par une mission plus globale de gestion d'un portefeuille de clients, dans toutes ses dimensions (produits, tarifs, contrats...).

Les mutations technologiques (et notamment les nouveaux modes de télécommunications) ont provoqué des changements d'organisation du travail. Sont aussi apparues de nouvelles formes d'organisations du travail telles que les plates-formes téléphoniques. En France cette activité ne concerne qu'environ 900 salariés soit 0,5 % des effectifs totaux de la profession, mais ces plates-formes téléphoniques devraient se généraliser au sein des compagnies d'assurance. Elles sont des outils de démarchage de clientèles nouvelles et de renseignement et de gestion des sinistres. Elles visent un renforcement de la proximité relationnelle.

Le télé-acteur gère la relation au client en temps réel ce qui nécessite une forte capacité d'initiative et de créativité. Il doit faire preuve d'engagement et de vivacité d'esprit afin d'établir une relation de confiance avec le client dans un laps de temps très court.

Le mouvement de mutations technologiques, l'intégration des tâches administratives, la nouvelle relation aux clients, ont provoqué des changements d'organisation du travail et de la structure qui implique aussi :

- une modification des modes de management et des modèles d'autorité ;

- un renouvellement et des relations avec le marché du travail et de la formation. On passe d'un système à entrée unique en termes de niveaux et de spécialités, sauf pour quelques experts (jusqu'aux années 1970, l'essentiel des recrutements s'opérait au niveau des études " générales " au mieux jusqu'en terminal) à un système à entrées multiples en terme de niveaux et de spécialités. Cette substitution dans les systèmes d'entrée rompt radicalement avec la tradition du secteur et conditionne une complète réorganisation du marché interne :

- le renouvellement des critères des modes de gestion du personnel.

2. La répartition actuelle de l'emploi dans les sociétés d'assurance et chez les agents généraux

En 1997 le secteur de l'assurance employait 207 800 personnes en France, dont 133 100 salariés dans les sociétés d'assurance et 74 700 intermédiaires indépendants.

Si on incorpore les 30 000 à 40 000 personnes qui opèrent en matière d'assurance dans les réseaux bancaires, ceux du Trésor, des Caisses d'épargne et de La Poste, les effectifs représentent environ 1 % de l'emploi national.

On considérera successivement la répartition professionnelle et géographique des salariés avant de s'intéresser à leurs principales caractéristiques (féminisation, ancienneté, recrutement...).

a) Répartition professionnelle et géographique des salariés dans l'assurance

Une des caractéristiques de la famille " commercial " réside dans une forte rotation plus importante que celle des autres familles (la proportion de salariés ayant une ancienneté de moins de un an est de 13,1 %, elle est de 28,7 % pour les moins de deux ans et l'ancienneté moyenne est de   9 ans). Ce sont les commerciaux " debout " (producteurs salariés et échelons intermédiaires) qui ont la plus forte rotation (Ancienneté moyenne : 6 ans contre 9 ans pour l'ensemble des commerciaux).

Graphique 29
Répartition du personnel
en % de l'effectif total salarié (1996)

*au sens des conventions collectives.

Source : FFSA.

Graphique 30
Répartition du personnel administratif des sociétés d'assurance
entre l'Ile-de-France et la province



Source : FFSA.

En 1997 les gestionnaires administratifs, qui représentent environ 109 700 salariés (82,4 %), travaillent majoritairement en Ile-de-France (pour 54 %). A l'inverse les commerciaux de terrain, au nombre de 23 400 (soit 17,6 % de l'ensemble des salariés), travaillent pour 81 % en province.

La répartition des agents généraux est exactement complémentaire géographiquement à celle des sociétés d'assurance et cela logiquement puisqu'ils en sont les réseaux commerciaux. C'est pourquoi les agents généraux sont essentiellement localisés en province dans les petites et moyennes villes selon les compagnies auxquels ils appartiennent.

Tableau 63
Répartition des agents généraux sur le territoire

 

Nombre d'agents
généraux

Commissionstotales (000F)

Commissions
moyennes (000F)

 

1995

1996

1996

Evolution
1995/1996

1996

Evolution 1995/1996

Alsace

435

432

401 103

2 %

928

3 %

Aquitaine

1130

1097

860 551

3 %

784

6 %

Auvergne

452

447

380 918

3 %

852

4 %

Bourgogne

562

555

480 344

0 %

865

1 %

Bretagne

890

877

766 065

5 %

874

7 %

Centre

869

839

708 882

1 %

845

5 %

Champagne-Ardennes

437

433

411 044

6 %

949

7 %

Franche-Comté

416

421

326 444

5 %

775

4 %

Languedoc-Roussillon

786

781

573 483

4 %

734

5 %

Limousin

289

288

227 053

4 %

788

4 %

Lorraine

700

684

616 419

1 %

887

4 %

Midi-Pyrénées

1025

976

750 147

2 %

769

7 %

Nord-Pas-de-Calais

901

907

860 992

4 %

949

3 %

Basse-Normandie

497

495

466 765

5 %

943

5 %

Haute-Normandie

534

526

510 567

6 %

971

8 %

Pays-de-Loire

921

909

809 156

3 %

890

4 %

Picardie

530

517

515 697

3 %

997

6 %

Poitou-Charentes

639

613

467 899

2 %

763

6 %

Provence-Côte-d'Azur

1604

1577

1 349 301

4 %

856

5 %

Rhônes-Alpes

1554

1509

1 262 901

3 %

836

6 %

Ile-de-France

1908

1856

1 633 916

1 %

880

4 %

DOM

48

42

72 607

23 %

1729

41 %

TOTAL FRANCE

17 127

16 781

14 441 254

3 %

861

5 %

Source: FNSAGA.

b) Autres caractéristiques de l'emploi dans l'assurance

Le taux de féminisation de la population totale salariée dans les sociétés d'assurance (52,9 % en 1996) recouvre de très fortes différences entre les deux catégories administratifs et commerciaux. En effet, alors que 62 % des effectifs salariés dans la gestion administrative sont des femmes, la catégorie des commerciaux de terrain est très largement masculine (82 % au total). Là encore les caractéristiques des commerciaux sont à rapprocher des agents généraux où seulement 10 % sont des femmes. Il faut cependant là encore souligner la spécificité de la catégorie " vente directe et souscription par téléphone " où l'on obtient un taux de féminisation de 68,8 %.

La féminisation de la profession semble se poursuivre si l'on se réfère à la proportion de femmes parmi les moins de 26 ans et, dans une moindre mesure les moins de 30 ans, dans les différentes familles de métiers, qui est supérieure à ce qu'elle est sur l'ensemble de la population de la même famille. Sur l'ensemble des familles de métiers, les femmes de moins de 26 ans représentent 61,1 % et celles de moins de 30 ans 55 % contre 52,7 % de femmes tous âges confondus 213( * ) .

Graphique 31
Evolution de la répartition de l'effectif total salarié
selon le sexe dans les sociétés d'assurance



Source : FFSA.

L'ancienneté moyenne est également très différente selon les deux catégories : 15 ans pour les gestionnaires administratifs contre 6 seulement pour les commerciaux de terrain.

Graphique 32
Pyramides des âges
Ensemble du personnel salarié des sociétés d'assurance



Source : FFSA/GEMAOEM données au 31 décembrre 1996 (enquête portant sur 87,7 % de l'effectif total salarié).

L'examen de la pyramide des âges révèle une concentration significative de ces personnels entre 40 et 45 ans.

Par ailleurs, l'âge moyen ainsi que l'ancienneté moyenne des salariés se sont accrus de trois, quatre, voire cinq ans en une dizaine d'années, à l'exception des cadres.

Ces phénomènes rendent d'autant plus nécessaire l'accueil de jeunes, afin d'apporter aux entreprises le sang neuf dont elles ont besoin. Il explique notamment le développement de l'accueil de jeunes en alternance ou en apprentissage.

En outre cette pyramide cache de fortes diversités, selon les familles des métiers et les problématiques de vieillissement et donc de besoin de renouvellement, d'expansion ou de déclin sont différentes.

Des problèmes de pyramide des âges seront ainsi pour certaines entreprises de création ancienne et notamment pour leur personnel administratif à gérer. Il existe en effet pour certaines entreprises une population en stock pour laquelle à moyen terme se poseront des problèmes d'opportunités pour les promotions, de plans de carrières encombrés et des charges de formation importantes.

Les agents généraux sont plus jeunes que par le passé. Ainsi selon la  Fnsaga :

- 42 % ont moins de 45 ans, (12 % ont moins de 36 ans, 30 % entre 36 et 45 ans , 40 % entre 46 et 55 ans et 18 % plus de 55 ans) ;

- 43 % ont entre 5 et 10 ans d'ancienneté dans la profession, (25 % moins de 5 ans, 18 % de 5 à 10 ans, 29 % de 10 à 19 ans et 28 % plus de 19 ans).

L'arrivée chaque année de 700 à 800 nouveaux professionnels sur le marché s'opère par des créations en augmentation de 17 % en moyenne annuelle, mais surtout par des reprises de portefeuille (83 %).

Chaque année, le secteur de l'assurance recrute près de 25 000 personnes, dont 15 000 entrent pour la première fois dans une société d'assurance. Parmi ces nouveaux entrants dans la profession, un tiers sont des jeunes de moins de 26 ans. Ils sont recrutés pour la plupart sous contrat de travail classique (Cdd et Cdi). Près de 1 800 sont actuellement accueillis dans le cadre d'une formation alternée sous forme de contrats de qualification, d'adaptation ou d'apprentissage. Plus de 400 sont apprentis.

Les familles de métiers où le taux de recrutement de jeunes est le plus élevé sont la gestion de contrats, l'administration, la réassurance et la communication. Celles où il est le plus faible concernent l'information, la logistique et les ressources humaines.

Tableau 64
Proportion selon les métiers, parmi les salariés des sociétés d'assurance ayant moins d'un an de présence
de ceux ayant moins de 26 ans et moins de 30 ans


(en % du total des salariés de la famille considérée ayant moins d'un an de présence)

Famille

Ensemble des moins d'un an de présence

(tous âges confondus)

Moins de 26 ans parmi les moins d'un an de présence

Moins de 30 ans parmi les moins d'un an de présence

 

Nombre (1)

Proportion

%

Nombre (2)

Proportion % (2)/(1)

Nombre (3)

Proportion % (3)/(1)

Conception et adaptation de produits

210

2,1

70

33,3

130

61,9

Contrôle technique et prévention

120

1,2

40

33,3

60

50,0

Gestion des contrats

1 690

16,6

810

47,9

1 240

73,4

Commercial

5 140

50,5

1 670

32,5

2 830

55,1

Comptabilité

360

3,5

120

33,3

210

58,3

Réassurance

110

1,1

40

36,4

80

72,7

Administration

220

2,2

120

54,5

160

72,7

Secrétariat et assistanat

520

5,1

170

32,7

270

51,9

Communication

60

0,6

20

33,3

40

66,7

Gestion des actifs

120

1,2

20

16,7

60

50,0

Informatique et télécommunication

580

5,7

100

17,2

220

37,9

Etudes et conseil

260

2,6

80

30,8

150

57,7

Gestion et organisation

210

2,1

70

33,3

110

52,4

Logistique

300

2,9

90

30,0

120

40,0

Ressources humaines

150

1,5

30

20,0

60

40,0

Direction

120

1,2

0

0,0

0

0,0

Ensemble

10 170

100,0

3 450

33,9

5 740

56,4

Source : Enquête FFSA-GEMA-OEM, données au 31 décembre 1996

En revanche le métier d'agent général correspond à une deuxième carrière. La profession présente en effet des opportunités pour des personnes souhaitant exercer une activité indépendante, en contact permanent avec des clients divers (particuliers, entreprises, collectivités...) et souhaitant s'investir dans le conseil et la vente des produits financiers et d'assurances.

Les candidats sont actuellement pour les 9/10 des salariés, en majorité des cadres (70 %) et ont acquis une première expérience le plus souvent dans les secteurs issus de l'industrie, de la finance ou de la distribution. En 1996, selon le FNSAGA :

- 19 % des candidats étaient issus de la banque ou d'établissements financiers ;

- 6 % d'entreprises commerciales ou industrielles ;

- 32 % de l'assurance.

*

* *

La majeure partie des embauches de personnel non confirmé des sociétés d'assurance concerne des jeunes diplômés dont le niveau est au moins égal à bac + 2.

Pour le recrutement des gestionnaires de contrats, les entreprises d'assurance font appel principalement à de jeunes titulaires d'un BTS assurance ou issus de filières juridiques. Pour le recrutement des commerciaux, les entreprises demandent des jeunes ayant un BTS action commerciale, un BTS force de vente, ou un DUT technique de commercialisation, ou même parfois un BTS assurance.

L'importance des flux de renouvellement de la population qui quitte la profession et ses caractéristiques qualitatives dépendent de nombreux facteurs dont la combinaison est très complexe. Ce sont pour l'essentiel l'évolution de l'activité économique du secteur, les besoins de renouvellement inhérents à la pyramide des âges, les effets sur ces besoins de l'évolution des techniques de traitement de l'information, le caractère plus ou moins riche en emplois des produits en phase de développement, les effets induits directs ou indirects des phénomènes de concentration, restructuration, création d'entreprises, etc...

On trouvera en annexe un récapitulatif des entrées-sorties des sociétés d'assurance.

En ce qui concerne les contrats, ils sont en grande majorité à durée indéterminée, 0,5 % d'alternance, 0,3 % d'apprentissage et 0,2 % d'autres contrats 214( * ) . Cependant de fortes disparités selon les métiers sont à noter, notamment parmi les commerciaux (au sens des familles de métiers définies par l'observatoire). Ainsi, il y a 89,1 % de CDI pour l'animation ou gestion de guichets, agences générales ou cabinets de courtage contre 99,9 % pour l'encadrement d'un réseau salarié.

Des différences selon la taille des sociétés d'assurance sont à noter. Ainsi, l'ancienneté moyenne est plus élevée dans les grandes entreprises (14 ans pour les entreprises d'au moins 2 000 salariés contre 9 pour celles de moins de 50 salariés). De même la proportion de salariés ayant moins d'un an d'ancienneté est plus faible dans les grandes entreprises (7,2 pour les sociétés d'au moins 2 000 salariés contre 24,2 pour les moins de 50 salariés). Le temps partiel est plus utilisé dans les grandes sociétés (12,7 % contre 5,8 % dans les petites). Les salariés sont plutôt moins diplômés que dans les moins grandes structures avec pratiquement 70 % de leurs salariés au niveau baccalauréat ou moins contre 40 % pour les sociétés de moins de 50 salariés. En fait, on retrouve les caractéristiques des fortes embauches réalisées par les grandes entreprises dans les années 1970.

Les grandes entreprises ont relativement plus de salariés dans la famille des métiers " commercial " (telle que définie par l'observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance). Ce phénomène s'explique par l'existence, dans ces entreprises, de réseaux de producteurs salariés et d'inspecteurs, à côté d'autres modes de distribution non salariée tels que les réseaux d'agents généraux et les courtiers, et, pour les mutuelles sans intermédiaires (MSI), par la distribution par bureaux. Les entreprises plus petites diffusent principalement leurs contrats grâce aux agents généraux et aux courtiers.

Tableau 65

Caractéristiques de l'emploi selon la taille

des sociétés d'assurance en 1996

Taille des entreprises concernées

1-50

50-100

100-500

500-2000

2000 et +

Ages moyens

Anciennetés moyennes

% d'ancienneté < 1 an

% de + 55 ans

% temps partiel

% Ile de France

37

6

24,2

4,8

5,8

79,8

40

11

10,3

7,5

7,7

50,7

39

10

16,5

5,8

10,6

68,6

40

13

8,4

6,1

7,6

53,5

40

14

7,2

5,6

12,7

38,8

Répartition par niveaux

de diplômes :

- supérieure à maîtrise

- licence à maîtrise

- BTS, DEUG, DUT...

- Bac, BP ...

- BEP, CAP, BEPC ...

- Fin scolarité obligatoire

17,1

25,4

17,4

14,9

18,7

6,5

9,5

10,9

14,2

22,1

30,8

12,5

9,7

13,7

16,2

20,2

32,8

7,4

9,5

11,8

12,5

24,1

31,2

10,9

9,4

8,3

13,2

24,4

24,9

19,8

Effectifs

800

1 600

12 000

20 400

86 400

Source : Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance

Nomenclature de l'Education nationale.

3. Evolution comparée de l'emploi en France et en Europe

Cette comparaison est rendue difficile du fait de l'hétérogénéité des données concernant l'emploi en France et en Europe. Nous disposons pour la France de données relatives à l'emploi total du secteur (hors bancassurance) alors qu'on ne dispose que de données concernant l'emploi salarié dans les sociétés d'assurance pour les autres pays d'Europe (hors intermédiaires).

On considérera d'abord l'évolution de l'emploi en France avant de rapprocher cette évolution avec celle des autres pays européens.

a) Evolution globale de l'emploi en France

L'emploi a augmenté régulièrement d'un peu moins de 1 % par an dans la seconde moitié des années 1980 avant de commencer à décliner depuis 1991.

Graphique 33
Evolution de l'emploi dans les assurances de 1984 à 1997



Données FFSA.

Cette baisse des effectifs est essentiellement due à celle concernant les agents généraux et leur personnel (-24 % depuis 1985). Cette baisse est la conséquence des changements importants intervenus dans les modes de distribution de l'assurance avec la progression des mutuelles sans intermédiaires, l'irruption de nouveaux modes de distribution, les fusions entre compagnies et la concurrence des banques entre 1985 et 1995. Bien que globalement le nombre de salariés des sociétés d'assurance soit resté relativement stable depuis le début des années 1990, celui des sociétés mutuelles d'assurance a augmenté de 35 % (depuis 1985).

Graphique 34
Evolution de l'effectif salarié des sociétés d'assurance depuis 1991
(hors GROUPAMA)



Source : FFSA.


On retrouve dans le tableau ci-dessous, les effets sur la structure des effectifs de cette baisse récente des agents généraux.

Tableau 66
Structure des effectifs du secteur des assurances 1985-1996
(en %)

 

1985

1991

1997

Salariés des sociétés d'assurance

. dont administratifs

. dont commerciaux

60,1

48,0

12,1

57,0

44,5

12,5

64,1

52,8

11,3

Agents généraux et leur personnel

32,8

32,5

24,9

Société de courtage

5,6

8,5

8,9

Experts

1,5

2,0

2,1

Total

100,0

100,0

100,0

Effectif total (en milliers)

207,2

217,2

207,8

Taux de croissance annuel moyen (en  %)

-

0,7

-0,7

Données : FFSA.

Si le secteur de l'assurance a à peu près maintenu globalement son volume d'emplois directs, c'est grâce à son expansion continue à un rythme sensiblement supérieur à celui du PIB depuis plusieurs décennies, malgré le développement de nouvelles technologies et les gains de productivité qui en ont résulté (cf.1 -des gains de productivité importants-).

On va retrouver la même stabilité relative de l'effectif salarié dans le secteur de l'assurance, globalement en Europe alors même que la période considérée est marquée par une crise majeure de l'emploi.

b) Evolution globale et comparée de l'emploi salarié en Europe

Pour l'Europe, non seulement on ne dispose que des effectifs salariés mais les données sont rares au delà de l'année 1993. Sur cette base incomplète les commentaires devront donc être prudents.

L'effectif des salariés des sociétés d'assurance est globalement en légère progression de 1989 à 1992 (voir graphique 35).

En 1995, la France représente 15 % de l'emploi de l'assurance européenne. De plus 57 % de l'emploi dans l'assurance de l'Europe des quinze est concentré dans les trois plus grands pays que sont l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France. Cette concentration est illustrée par le graphique 35.

On peut observer des évolutions contrastées de l'emploi selon les pays pour la période 1990-1993. On rapprochera en particulier de la stabilité française, les variations les plus fortes de l'emploi en Allemagne, en Espagne, en Grande-Bretagne et même en Italie (graphique 36).

Graphique 35
Evolution du nombre de salariés en Europe et
évolution de l'emploi salarié global entre 1989 et 1992

Source : Comité européen des assurances (CEA)

Graphique 36
Emploi salarié des sociétés d'assurance en Europe



Source : CEA.

Graphique 37
Evolution de l'emploi des sociétés d'assurance
en Europe 1990-1993



Source : CEA.

4. Les perspectives de l'emploi dans l'assurance française jusqu'en 2002215( * )

Alors que le mouvement de concentration devrait se poursuivre et malgré un rythme de croissance très ralenti du chiffre d'affaires métropolitain des sociétés d'assurance françaises, le BIPE dans ses prévisions sectorielles pour l'assurance jusqu'en 2002, ne s'attend pas à une baisse massive des effectifs dans l'assurance.

L'emploi total dans le secteur de l'assurance ne devrait pas se situer selon le BIPE, très en deçà de 205 000, ce qui correspondrait à un taux de croissance annuel moyen d'environ 0,4 %.

Les prévisions du BIPE doivent être considérées avec prudence. En effet il s'agit de la prolongation des tendances de ces dernières années marquées par une forte baisse du nombre des agents généraux. Or selon la FNSAGA, si le nombre d'agences doit continuer à baisser dans les années à venir, ceci ne devrait pas se traduire par une diminution parallèle du nombre d'agents généraux (cf. chapitre IV, partie 4).

Par ailleurs le BIPE intègre les effets favorables sur l'emploi de la réduction du temps de travail. Or si celle-ci devrait se faire sans trop de problèmes dans les grosses structures et pour le personnel administratif, de nombreuses difficultés seront à surmonter dans les sociétés d'assurance de petite taille et chez les commerciaux.

Graphique 38
Prévisions de l'emploi à l'horizon 2002

Source : BIPE

Il est intéressant de signaler que les prévisions d'économies de frais généraux annoncées par les sociétés d'assurance pour les années à venir laissent quelque peu perplexe quant à une prévision parallèle de stabilité des effectifs.

B. LES FACTEURS EXPLICATIFS DE LA RELATIVE STABILITÉ DE L'EMPLOI DANS LES ASSURANCES

En dépit de gains de productivité élevés liés par exemple au développement d'échanges de données informatisées et malgré certaines pertes sectorielles d'emploi importantes, on observe une relative stabilité de l'emploi dans l'assurance. Elle s'explique par un effort de formation important, une combinaison réfléchie de la réduction et de l'aménagement du temps de travail et par une modération particulière de l'évolution des coûts salariaux dans l'assurance. Elle s'explique également par une bonne anticipation des évolutions potentielles.

1. Des gains de productivité importants

Si l'on prend comme indicateur de productivité, le rapport chiffre d'affaires sur effectifs salariés totaux, on constate de forts gains de productivité ces dernières années.

Tableau 67
Evolution de la productivité individuelle dans
les sociétés d'assurance

 

1992

1993

1994

1995

1996

Chiffre d'affaires

en milliards

503,8

582,7

668

771,8

775,1

Effectifs salariés

122 800

121 700

120 500

121 600

121 200

C.A./Salarié

4,1

4,78

5,54

6,35

6,4

Données FFSA.

Cette croissance de la productivité est bien entendu fortement influencée par l'essor de l'assurance-vie qui nécessite moins d'effectifs (administratif et de gestion) que l'assurance dommages. En France, la part de l'encaissement vie par rapport à l'encaissement total est relativement fort (57 % contre une moyenne européenne de 49,1 % en 1993).

Pour réaliser ses comparaisons européennes, le Comité européen des assurances utilise l'encaissement annuel des cotisations en ECU réalisé par chaque salarié dans les entreprises d'assurance. Selon cet indicateur, la France a connu une forte croissance de sa productivité (22,3 % entre 1992 et 1993) bien supérieure à celle de la moyenne des pays européens (11,2 %).

Graphique 39
Encaissement annuel par salarié dans les compagnies européennes
(en ECU)

Source : CEA.

Il faut interpréter ce ratio avec prudence. En effet il varie fortement selon que les pays privilégient tel ou tel canal de distribution. Pour neutraliser cet élément il faudrait ramener l'encaissement aux seuls employés gestionnaires des compagnies, c'est-à-dire à l'exclusion des salariés commerciaux.

2. L'effort traditionnel de formation dans l'assurance a été renforcé et amélioré ces dernières années

Traditionnellement le secteur de l'assurance a largement développé une politique de formation.

La profession dispose d'un important dispositif de formation (Annexe I).

Le contenu de la formation et son organisation s'adaptent en permanence à l'évolution des besoins des entreprises et de leurs salariés.

Au cours des dernières années, d'importantes évolutions sont intervenues en concertation étroite avec le milieu professionnel parmi lesquelles on peut citer :

- la création du centre de formation d'apprentis (CFA) en 1995 sous l'égide de l'association pour l'enseignement de l'assurance (AEA) et du Conseil régional d'Ile de France ;

- la création de la formation reconnue par la délivrance du titre homologué de conseiller en assurance et épargne (niveau bac + 2) ;

- la réforme du brevet professionnel d'assurances et du brevet de technicien supérieur d'assurances ;

- l'essor des formations en alternance.

Dans le cadre de contrats d'adaptation, les jeunes préparent à 70 % un diplôme, généralement bac + 2. Dans le cadre de contrat d'adaptation, les formations dispensées portent à 62 % sur les techniques d'assurance et à 15 % sur les techniques de vente.

a) L'effort financier consenti par la profession en faveur de la formation continue s'est accru

Les sociétés d'assurance consacrent depuis de nombreuses années une part importante à la formation continue. Le taux de participation fluctue autour de 5 % de la masse salariale totale, alors que le seuil minimum conventionnel dans la profession est de 2 % depuis 1992 et le seuil légal national de 1,5 % (pour les entreprises de 10 salariés et plus). Ce taux de 5 % est considéré par l'INSEE 216( * ) comme un taux optimal. Ces 5 % représentent plus d'un milliard de francs en 1996 dont 7,8 % consacrés aux formations en alternance.

Graphique 40
Structure des dépenses de formation continue en 1996
dans les sociétés d'assurance

Source : FFSA.

Les taux de participation sont cependant très variables selon la taille des sociétés d'assurance.

Graphique 41
Evolution de la formation continue des salariés
des sociétés d'assurance selon leur taille
(1991-1996)



Source : FFSA.

Alors que pendant de très nombreuses années les sociétés " vie et capitalisation " avaient consenti le plus grand effort financier pour la formation continue, en 1996 elles sont rattrapées par les sociétés d'assurance dommages à l'exception de la réassurance.

Graphique 42
Evolution des pourcentages de participation par branche d'activité à la formation continue



Source : FFSA.

En 1996, 80 000 actions de formation (soit 66 %) ont été dispensées par les sociétés d'assurance. Les bénéficiaires sont pour 71 % des non-cadres, 51 % des hommes et environ 37 % des moins de 35 ans. La part des bénéficiaires de plus de 45 ans n'a cessé de croître passant de 19,9 % en 1992 à 27,6 % en 1996 et montre la nécessité pour un grand nombre de sociétés du secteur de former et de reconvertir les salariés recrutés dans les années 1960/1970 et dont le niveau de formation est estimé insuffisant. Il s'agit principalement de personnel administratif au profil type suivant : population en majorité féminine de 40-45 ans ayant 20 ans d'ancienneté, cantonnée dans des emplois aux tâches répétitives, et n'ayant pas bénéficié d'actions de formation continue.

Enfin 4,1 millions d'heures de stage ont été dispensées en 1996 et la durée moyenne des stages s'élève à 52 heures dans l'assurance contre 43,6 en moyenne nationale (en 1995).

Graphique 43
Evolution de la durée moyenne des actions de formation
par dispositif de formation dans les sociétés d'assurance



Source : FFSA.

Pour les agents généraux l'effort financier consenti pour la formation continue de leurs collaborateurs peut paraître moindre et représente 1,5 % de la masse salariale. Mais il faut considérer ce chiffre comme particulièrement élevé pour des très petites entreprises. Par ailleurs, des actions de formation professionnelle sont proposées aux agents généraux par les entreprises d'assurance, dans le cadre d'un plan de formation arrêté avec les syndicats professionnels d'agents généraux.

b) Les actions de perfectionnement à destination du personnel se sont développées

Les compagnies d'assurance se préoccupent des anciens recrutés dont le niveau de formation initiale est faible. Dans le cadre de la négociation de la convention collective nationale, il est prévu pour chaque salarié de tout niveau hiérarchique, ayant une formation initiale inférieure au Bac et au moins trois ans de présence un droit individuel de temps-formation de 400 heures. Ce capital formation est transférable d'une entreprise à l'autre dans la profession. En 1992, le champ d'application potentiel de cette mesure était très vaste (au moins 60 % des effectifs salariés). Présenté en 1992 comme un avantage social important, ce dispositif avait bénéficié, fin 1996, à 800 salariés des sociétés d'assurances. Un nouvel accord a été conclu en 1997 pour renouveler le précédent arrivé à expiration. Il prend en compte les dispositions légales et conventionnelles intervenues entre-temps, et permettant notamment de prévoir un financement du dispositif par l'OPCASSUR 217( * ) . L'accord conclu en juillet 1997 confirme la volonté des partenaires sociaux de développer le dispositif, et organise ainsi, à partir de 1998, un financement partiel mutualisé de ce capital de temps de formation par le biais d'OPCASSUR qui en assure la gestion.

Par ailleurs depuis 6 ans est mis en route avec la fédération nationale des agents d'assurance un programme très important d'environ 80 heures de formation pour les collaborateurs d'agents généraux d'assurance (secrétaires), ce qui représente une journée tous les 15 jours. Ce dispositif de rattrapage a très bien fonctionné.

Avec l'appui d'un cabinet de conseil en formation et en gestion des ressources humaines, une réflexion sur les évolutions des métiers de l'assurance a abouti à l'actualisation du référentiel de compétences des collaborateurs. Elle a permis d'adapter les recrutements et les parcours de formation.

Par ailleurs, la profession a demandé un audit du plan de formation destiné aux collaborateurs et il est actuellement opérationnel, et vise à identifier les atouts et limites du dispositif actuel (7 600 stagiaires formés depuis sa mise en place) et à préciser les besoins des salariés d'agences et leur évolution probable.

Enfin, un plan de formation de deuxième génération pour les collaborateurs d'agences a été mis en oeuvre. Un des objectifs défini est de favoriser l'insertion des jeunes dans l'entreprise.

c) Une attention particulière à la formation des jeunes et à leur insertion professionnelle

Chaque année, les sociétés d'assurance consacrent 0,5 % de leur masse salariale, soit environ 120 millions de francs d'assurance, au financement de l'apprentissage.

L'ADAP, organisme collecteur de la taxe d'apprentissage pour les sociétés d'assurance a reçu pour sa part en 1998 un peu moins de 22,1 millions de francs (+ 1,1 % par rapport à 1997). Les sommes collectées sont reversées intégralement à des centres de formation d'apprentis et à des établissements de formation initiale, désignés par les entreprises elles-mêmes ou soutenus par la profession (déduction faite de la part versée obligatoirement au Trésor public).

En outre 702 contrats d'insertion en alternance ont été financés par OPCASSUR dans les sociétés d'assurance (375 contrats de qualification dont 70 % diplômant  - bac + 2 -, et 327 contrats d'adaptation).

Selon une enquête OPCASSUR, une entreprise sur deux a embauché au moins un jeune à l'issue de son contrat de formation alternée et les embauches de jeunes à l'issue de contrats d'adaptation sont plus fréquentes que celles effectuées à l'issue des contrats de qualification.

Sur les 1 250 nouveaux contrats enregistrés par OPCASSUR en 1997, 34,7 % des contrats d'insertion en alternance financés par OPCASSUR ont été signés par des agents généraux d'assurance.

La profession des agents généraux s'est engagée dans des voies favorables à l'insertion. Elle a signé un accord d'aménagement et de réduction conventionnels du temps de travail dans le cadre de la loi du 11 juin 1996 et de la loi du 12 novembre 1996 relatives au développement de la négociation collective.

Un module spécifique destiné aux agents employeurs pour leur permettre de perfectionner leurs compétences de managers (animation d'équipe, accompagnement du développement des compétences des collaborateurs, etc.) a été conçu.

Enfin les engagements contractuels de formation des jeunes dans les sociétés d'assurance existent. Ils ont été pérennisés dans un accord national du 27 mai 1992 complémentaire à la convention collective. Cet accord ouvre aux jeunes sous certaines conditions un droit d'accès aux formations diplômantes de l'école nationale d'assurances (ENAss) et de l'association pour l'enseignement de l'assurance (AEA) sous forme notamment d'une autorisation d'absence et d'une obligation de prise en charge des frais d'inscription et du maintien de la rémunération par l'employeur. Cet accord a été reconduit le 20 décembre 1996 jusqu'au 30 juin 1998, puis le 26 juin 1998 jusqu'au 30 juin 2001.

3. Une combinaison bien adaptée de la réduction et de l'aménagement du temps de travail

En terme de durée annuelle du travail, la France se situe légèrement au dessus de la moyenne européenne (1 692 heures contre 1 660 heures pour l'Europe entière).

Graphique 44
Durée du travail dans les compagnies d'assurance en Europe en 1993



Source : CEA.

La durée du travail se situe aux alentours de 37 heures pour les administratifs des sociétés d'assurance. Pour les commerciaux, leur activité s'exerce en dehors de tout horaire contrôlable.

La convention collective prévoit une durée annuelle maximale de 1 712 heures : soit à titre d'exemple 38 h 21 sur cinq jours par semaine, 26 jours minimum de congés et 12 jours fériés et chômés.

La convention collective prévoit des possibilités d'aménagement du temps de travail. Ce système de gestion souple du temps de travail peut permettre de faciliter certaines formes de partage du travail 218( * ) .

La programmation de la durée annuelle de travail fait l'objet d'une négociation tous les ans au niveau de l'entreprise. Par accord d'entreprise, cette durée a été par exemple ramenée à 36 heures 45 à la GMF, 35 heures 27 à Norwich Union et sera prochainement de 34 heures à la COFACE.

Il est à noter que par circulaire de la FFSA, aux entreprises (3/11/97) il est précisé que la question du temps de travail est à traiter au niveau de chaque entreprise et qu'il n'y a pas lieu d'ouvrir des négociations de branche sur le sujet.

La convention collective prévoit l'obligation d'un accord d'entreprise pour avoir recours à certains modes d'organisation du temps de travail (ouverture du samedi, travail par relais...).

La profession des agents généraux a quant à elle affiché sa volonté de favoriser l'emploi par un accord d'aménagement et de réduction conventionnels du temps de travail.

En effet en octobre 1997, la FNSAGA a signé avec trois syndicats représentatifs de la profession des salariés des agences générales d'assurances un accord de branche permettant la mise en place de la loi Robien. Cet accord s'applique dans toute agence générale d'assurance de deux salariés au moins. Il concerne environ 18 000 collaborateurs salariés d'agences. Sur la base du volontariat, les agents généraux pourront ouvrir des négociations avec un de leurs salariés mandaté par une organisation syndicale. Cet accord manifeste la volonté des parties signataires de favoriser l'emploi, notamment des jeunes, par des embauches compensatrices à la réduction du temps de travail et à l'aménagement du temps de travail. Il introduit également une incitation aux gains de productivité par l'engagement d'une réflexion sur l'organisation et le développement des activités des agences.

4. Les partenaires sociaux ont pratiqué une politique salariale particulièrement raisonnable

Cette situation est liée à la négociation des salaires au niveau de chaque société qui favorise une meilleure prise en compte de ses caractéristiques propres.

Paradoxalement cette décentralisation de la négociation salariale a été contemporaine de la mise en place d'une grille unique professionnelle dans la nouvelle convention collective nationale. Les montants définis sont des minima indépendants des grilles et/ou des salaires réels appliqués dans les entreprises. Cela implique une négociation dans les entreprises, tenant compte des salaires réellement pratiqués.

Tableau 68
Rémunération annuelle brute théorique 219( * )
(chiffres 1996)



 
 

1er décile

Médiane

Dernier décile

 
 

H

F

H

F

H

F

Non

cadres

classe 1

classe 2

classe 3

classe 4

99 313

105 590

118 490

136 350

100 076

102 965

116 219

136 327

123 158

132 896

143 333

163 512

125 180

127 895

141 247

161 217

158 375

165 269

194 512

201 000

154 770

161 517

179 878

196 957

Cadres

classe 5

classe 6

classe 7

175 124

241 261

320 221

167 151

223 757

301 194

223 312

313 935

406 101

208 550

290 076

378 780

296 064

402 585

511 959

270 000

369 956

485 075

Source : Rapport établi par la FFSA et le GEMA à l'intention des organisations syndicales de personnel des sociétés d'assurance en application de l'article L 132-12 du Code du travail en vue des négociations collectives.

Dans un contexte d'évolution des prix mesurée par l'INSEE de 1,7 % en glissement annuel, l'accord du 26 février 1997, revalorise de 1,7 % les rémunérations minimales garanties par la convention collective de 1992. Les négociations collectives dans les entreprises ont permis de revaloriser les salaires réels de l'ordre de 1,3 % à 1,7 %. Il faut noter cependant, une tendance qui réserve la revalorisation générale aux salaires n'excédant pas 280 000 F-300 000 F.

Un bilan (couvrant environ 94 % du personnel administratif) des négociations salariales dans les sociétés en 1997, réalisé par la FFSA et le GEMA, montre que 44 % des négociations ont abouti à un accord. Ces accords concernent 68 % du personnel administratif.

- Une évolution favorable des coûts salariaux

Tableau 69

Evolution des coûts salariaux supportés par les sociétés d'assurance

de 1993 à 1998

 

Personnel administratif non cadre

Personnel administratifcadre

 

A

sommes supportées par l'entreprise

B

Salaire perçu par le salarié

B/A (%)

A

B

B/A

1993

1994

1995

1996*

1997*

1998*

159,9

160,3

160,3

159,7

159,4

159

80,8

79,1

78,9

78,6

78,4

79

50,5

49,3

49,2

49,2

49,2

49,7

162,1

163,4

163,1

161

160,5

160,3

80,4

78,8

78,6

78,9

78,8

79,4

49,6

48,2

48,2

49

49,1

49,5

Source : FFSA-GEMA

*Les variations enregistrées en 1996 s'expliquent pour partie par la fermeture du régime de retraite professionnel au 31.12.1995 et l'augmentation des cotisations au régime de l'UNIRS (accord professionnel du 2 février 1995). Les charges assumées par les entreprises au titre de la consolidation des droits du passé dans le régime de retraite professionnel (environ 11,5 milliards de francs) ne sont pas prises en compte. La cotisation patronale de 1 % pour les fonds de pension assurance, provisionnée par les sociétés est incluse.

Sur les années les plus récentes pour lesquelles on dispose de l'information les coûts salariaux supportés par les sociétés d'assurance ont connu une évolution telle que l'accroissement de l'encaissement par salarié a été 1,9 fois supérieur à l'accroissement du coût salarial, ce qui met la France dans une situation favorable par rapport à certains pays européens comme l'Autriche, l'Allemagne, l'Italie et dans une moindre mesure l'Espagne qui ont connu un accroissement du coût salarial supérieur à celui de l'encaissement par employé.

Graphique 45
Evolution comparée du coût salarial dans les compagnies d'assurance
en Europe (déflaté)



Source : CEA.

Graphique 46
Comparaison de l'évolution du coût salarial
et de l'encaissement par salarié entre 1990 et 1991
dans les compagnies d'assurance



Source : CEA.




Graphique 47
Coût salarial et emploi dans les compagnies d'assurance en 1993



Source : CEA.

5. Une bonne anticipation des évolutions : les métiers de la santé220( * )

La mise en place des systèmes d'échanges de données informatisées de la carte santé Pharma et du réseau Assurnet a déjà entraîné en moyenne une baisse des effectifs de 40 % à 50 % depuis la fin des années 1980.

Les problèmes sociaux ont été cependant peu nombreux et la réduction des effectifs a été réglée par des reconversions internes vers les autres branches en développement. Les sociétés qui avaient anticipé les évolutions avaient d'ailleurs évité ces problèmes en ayant recours à des contrats à durée déterminée et au travail intérimaire.

De nouvelles évolutions technologiques (carte Sésam-Vitale et carte de professionnel de santé) auront un impact sur l'emploi. Quantitativement, les conséquences directes de Sésam-Vitale pourraient se traduire par une baisse des effectifs affectés à la gestion du risque maladie obligatoire évaluée entre 15 et 20 %. Un petit nombre de sociétés d'assurance est concerné par ce risque (3 sociétés et deux organismes professionnels), et il est difficile aujourd'hui de mesurer les effets de ce dispositif sur l'ensemble des activités complémentaires des assureurs. Ce chiffre doit donc être considéré avec prudence. D'un point de vue qualitatif, les emplois dans la santé concerneront des tâches de plus en plus valorisantes : les métiers réclameront des connaissances plus nombreuses, une maîtrise de l'outil informatique, une capacité relationnelle avec la clientèle et avec les offreurs de soins et donc un niveau de compétence d'expertise médico-juridique accru.

La réflexion en matière de gestion prévisionnelle de l'emploi (formation, conversion, substitution) devra être menée dans ces métiers.

II. LES RELATIONS SOCIALES DANS L'ASSURANCE

L'évolution des relations sociales dans l'assurance est liée à la convention collective des sociétés d'assurance du 27 mai 1992 et est marquée par l'évolution des rapports entre agents généraux et sociétés d'assurance exprimée dans l'accord d'avril 1996 suite au rapport " Kessler " sur la modernisation des relations entre agents généraux et sociétés d'assurance.

A. L'ÉVOLUTION SOCIALE DE LA PROFESSION DES ASSURANCES DEPUIS CINQUANTE ANS

Trois phases successives d'évolution sociale de la profession des assurances doivent être distinguées.

La première, du lendemain de la guerre au début des années 1970, correspond à la construction d'un dispositif social propre à la branche professionnelle des assurances qui définit pour toutes les entreprises et tous les salariés, les relations et conditions de travail. Pendant cette période on assiste au processus de contractualisation collective des relations de travail pour l'ensemble des entreprises de la branche. Le dispositif contractuel de branche en matière de retraite et de prévoyance collective des salariés se construit. C'est également durant cette période que sont créées les institutions à caractère social (Comité interentreprises, fonds d'entraide des assurances, centre médico social).

La deuxième phase, du début des années 1970 au milieu des années 1980, dessine les prémices des changements liés à l'évolution générale économique et sociale. C'est ainsi qu'au milieu des années 1970, un accord sur un barème de rémunérations annuelles minimales était signé pour les cadres, que la pratique des horaires mobiles connaissait l'un de ses plus grands succès (le débat sur les horaires mobiles a d'ailleurs constitué à l'époque un très fort révélateur de l'inadéquation de certains concepts centralisateurs aux besoins réels et quotidiens des entreprises et de leurs salariés). En 1981, un accord national est conclu, instituant la durée maximale annuelle du travail et l'obligation pour les entreprises de négocier à leur niveau, les modalités d'organisation du temps de travail.

La troisième phase, encore en cours, a débuté dans la deuxième partie des années 1980 sur la base du constat de l'inadaptation d'une partie importante des règles contractuelles et des pratiques aux réalités de cette période. Elle a donné lieu à une révision profonde des règles du jeu, aussi bien entre les partenaires sociaux qu'entre les sociétés d'assurance et leurs intermédiaires exclusifs.

B. LA CONVENTION COLLECTIVE NATIONALE DES SOCIÉTÉS  D'ASSURANCE221( * ) A LARGEMENT DÉCENTRALISÉ LA NÉGOCIATION SOCIALE

L'évolution des relations sociales entre les partenaires de l'assurance est marquée par un paradoxe fondamental :

- D'une part, le cadre des relations sociales, au lieu d'être fixé comme auparavant par un ensemble de conventions régionales multiples complété par quelques accords nationaux est maintenant largement déterminé par une convention nationale unique, mais souple.

- D'autre part, la relation entre partenaires sociaux est passé très largement du niveau de la profession à celui de l'entreprise promouvant de cette façon les accords d'entreprises (2.1.1).

Cette décentralisation inscrite dans les textes a été largement mise en oeuvre en pratique par les partenaires sociaux, que ce soit par la négociation d'accords d'entreprises ou au travers de l'avancée des chantiers (2.2.2).

1. Principes et innovations de la convention

La nouvelle convention nationale fait glisser le centre de gravité de la négociation sociale de la profession vers l'entreprise. Elle révèle plusieurs innovations par rapport aux conventions précédentes et prévoit un certain nombre de chantiers de réflexion-discussion entre partenaires sociaux.

Tout en évitant un vide juridique (provoqué par la dénonciation en avril 1991 de l'ensemble des conventions régionales et accords nationaux existants) qui aurait ramené de nombreux droits fondamentaux des salariés au strict minimum légal du Code du travail, la convention nationale du personnel administratif de l'assurance (employés, agents de maîtrise et cadres) se veut porteuse de modernisation et de dialogue social. Elle veut donner de la profession une nouvelle image et un message d'avenir.

La convention collective a un caractère inventif en matière sociale. Elle prend le parti de l'équilibre en conciliant souplesse de l'entreprise et protection des salariés, encourageant une articulation entre négociation nationale et négociations d'entreprise. Alors qu'auparavant tout était centralisé entre les mains du pouvoir fédéral, la convention collective ménage des champs de négociation au niveau de l'entreprise : le rôle des directeurs des ressources humaines et des syndicalistes d'entreprise s'en trouve ainsi renforcé.

Dans un contexte de changement rapide, l'un des objectifs de cette convention collective consistait à mettre en place les moyens d'une gestion prévisionnelle des ressources humaines permettant de mieux adapter le personnel des entreprises aux besoins de demain. Il s'agissait, en adoptant une convention collective nationale unique, d'unifier la profession pour permettre la mobilité fonctionnelle et géographique.

L'un des outils dynamique et prospectif de la gestion des ressources humaines réside dans un nouveau système de classification. Ce nouveau système de classification des fonctions repose sur cinq critères de classement identiques pour les cadres et les non-cadres : formation-expérience, conception-résolution des problèmes, dimension relationnelle, autonomie et contribution aux résultats et à l'image de l'entreprise. Chaque critère est pondéré en fonction d'une grille comprenant six degrés. La pondération se fait par entreprise, avec des limites déterminées dans la convention. Le système comporte sept classes de fonctions (4 non-cadres et 3 cadres). Des classes intermédiaires supplémentaires peuvent être fixées par accord d'entreprise.

Cet outil d'évaluation des fonctions, suffisamment universel et souple pour prendre en compte la diversité des activités et des modes d'organisation, existant dans l'assurance ainsi que l'évolution des qualifications, positionne les fonctions les unes par rapport aux autres selon des règles communes et donne ainsi un support aux rémunérations minimales professionnelles applicables dans toutes les entreprises.

Dans cette nouvelle convention, la négociation collective est reconnue comme forme majeure du dialogue, tant au plan des entreprises que de la profession. Cela implique la reconnaissance du rôle essentiel des organisations syndicales comme interlocuteurs à la fois indépendants, critiques et constructifs. Cette attitude se traduit concrètement dans la convention par des moyens nouveaux et des mécanismes de concertation et de négociation dans les entreprises et au niveau professionnel.

Le point portant sur le contrat de travail a fait l'objet de discussions longues et difficiles. La nouvelle convention tout en reprenant les règles antérieures les a sensiblement modernisées et en a amélioré certains points (accès à la prévoyance, égalité hommes/femmes, conditions protectrices en cas de licenciement etc.).

Enfin la convention collective prévoit l'ouverture d'un certain nombre de " chantiers " d'études et de réflexion qui montre que la signature de cette convention n'est pas un aboutissement, mais le prélude d'une nouvelle dynamique des relations sociales dans l'assurance. Ces chantiers concernaient le régime de retraite professionnel, l'emploi, l'insertion professionnelle des jeunes, et les aspects sociaux de la construction européenne pour le personnel des sociétés d'assurance.

2. Un dialogue social rénové a permis d'aboutir à de nombreux accords

L'accord du 27 mai 1992 créant un capital temps-formation dans le cadre de la gestion des ressources humaines a été ainsi révisé en juillet 1997 (cf. partie consacrée à la formation ).

Parmi les accords complémentaires de la convention collective, quatre autres qui étaient arrivés à échéance ont été renouvelés en décembre 1996. Il s'agit de la contribution des employeurs au financement de la formation professionnelle continue, de l'accès aux formations diplômantes de l'ENASS et de l'AEA, de la vie contractuelle et les moyens pour les syndicats et du financement des activités sociales et culturelles des comités d'entreprise. Il est à noter que le renouvellement de ce dernier n'a été conclu que par une seule organisation syndicale.

Certains chantiers ont abouti à la signature d'accords. Il en est ainsi pour le chantier sur le régime de retraite.

Pour faire face aux difficultés démographiques et aux obligations nées de l'accord ARRCO de février 1993 (majoration de 50 % du taux obligatoire de cotisations à l'UNIRS d'ici 1999) et de la loi du 8 août 1994 sur la protection sociale complémentaire des salariés (obligation pour les régimes en répartition de provisionner ou de faire garantir les engagements), un accord entre employeurs et syndicats dans l'assurance a été conclu le 2 février 1995.

Cet accord prévoit :

- la fermeture du régime supplémentaire de retraite par répartition propre à la profession ;

- le transfert à l'UNIRS (ARRCO) d'une partie des charges de retraite de ce régime ;

- la constitution de provisions destinées à garantir les droits de retraite acquis dans ce régime et qui n'ont pas été transférés à l'UNIRS ;

- la mise en place d'un fonds de pension.

Par la suite un accord du 17 juillet 1996 relatif à la mise en oeuvre du dispositif professionnel de fonds de pension a été signé par la seule CFDT 222( * ) . Toutefois l'évolution générale de la question de l'épargne retraite en France depuis juillet 1996 (" loi Thomas " par exemple) avait conduit les signataires à en différer la pleine application. Afin de préserver les droits des bénéficiaires, les entreprises ont cependant provisionné dans leurs comptes la cotisation de 1 % des salaires. Dans la mesure où la mise en application des textes précédemment signés ne pouvaient plus être davantage différés, les négociations paritaires ont repris courant 1998 et abouti à la signature de deux nouveaux accords datés du 17 juillet 1998. Les modalités pratiques de mise en oeuvre du fonds de pension dans le cadre d'un mécanisme transitoire de coassurance ont été prévues. L'objectif de dispositions prises est de rendre opérationnelle la collecte des cotisations, la mise en place des comptes individuels et le versement des droits de retraite déjà dûs, au début de l'année 1999.

C. L'ACCORD SUR L'EXERCICE DE LA PROFESSION D'AGENT GÉNÉRAL ENTRE LA FNSAGA ET LA FFSA : UN PARTENARIAT RENOUVELÉ

La concurrence avec les nouveaux modes de distribution (banques, caisses de retraite, poste, mutuelles sans intermédiaires...) a justifié comme nous l'avons vu dans le chapitre consacré à la distribution, le renouvellement des modes de relations mieux adaptés aux spécificités des agents généraux et à leurs objectifs économiques et sociaux. La nature des nouveaux rapports est contenue dans la convention signée le 16 avril 1996 par la FFSA et la FNSAGA qui constitue le premier volet de l'accord.

D'une manière générale, les dispositions prévues dans la convention doivent faire l'objet d'accords contractuels avec chaque entreprise.

Si l'objectif affiché dans le préambule de la convention est " d'apporter aux agents généraux, dans l'exercice de leur métier, les avantages économiques leur permettant de développer leur activité et leur capacité professionnelle ", elle fixe également un certain nombre de dispositions qui se présentent comme étant au service de l'emploi (2.3.1).

D'autre part parallèlement à cette convention l'accord sur l'exercice de la profession d'agent général prévoit un volet concernant les régimes complémentaires de prévoyance et de retraite des agents généraux d'assurance.

1. Une convention entre la FNSAGA et la FFSA : un parteneriat renouvelé au service de l'emploi ?

Cette convention a été négociée du point de vue de la FNSAGA dans la perspective affichée de freiner l'hémorragie des effectifs de la profession. En effet depuis ce début des années 1990, les agents généraux et leur personnel 223( * ) ne cessent de perdre des effectifs. Ainsi de 70 500 environ en 1991, ils sont passés à 51 700 en 1997 (soit une baisse de plus du quart).

La convention signée en avril 1996 offre aux agents et sociétés d'assurance un cadre nouveau qui fixe les principes fondamentaux de leurs relations et introduit la souplesse nécessaire à leur adaptation. Les dispositions prévues doivent faire l'objet d'accords contractuels avec chaque entreprise.

Sont prévus des dispositifs qui doivent assurer la qualité des agents généraux en termes de :

- niveau de recrutement : le niveau minimum doit être un diplôme d'enseignement supérieur,

- transparence du projet individuel,

- formation initiale : un plan de formation des agents généraux doit être mis en place par les sociétés d'assurance en collaboration avec les syndicats professionnels, la durée de cette formation initiale est fixée à un minimum de 600 heures,

- la formation continue : engagement de la part des entreprises et des agents généraux de consacrer un pourcentage du montant des commissions à la formation permanente.
Enfin, afin de développer la communauté d'intérêt entre l'agent général et l'entreprise mandante, la convention prévoit la possibilité d'un système d'intéressement dans la rémunération globale de l'agent.

Cet intéressement était considéré en 1996 comme peu satisfaisant puisqu'il ne correspondait en moyenne qu'à 3 % de la rémunération globale d'un agent général. L'intéressement ne pourra être valablement mis en place que dans la mesure où des règles de transparence strictes seront édictées entre syndicats d'agents généraux et sociétés d'assurance.

Le nouveau cadre d'exercice ne s'applique de façon systématique qu'aux entrants.

Si tous les points signalés sont en théorie au service de l'emploi, la question se pose de savoir si en pratique la mise en oeuvre de ces nouveaux rapports va réellement pouvoir freiner la baisse tendancielle du nombre d'agents généraux. Il semble qu'il y ait plus d'optimisme à cet égard dans la fédération professionnelle que sur le terrain où l'on est un peu inquiet des conséquences de cette toute nouvelle " lune de miel " entre les sociétés d'assurance et leurs agents généraux. La relation directe entre la société et le client qui s'instaure en raison du nouvel accord et la perte de l'encaissement et de la gestion des sinistres pour les agents qu'il entraîne est assez plausiblement un facteur objectif d'inquiétude sur la pérennité du métier même d'agent général.

2. L'accord concernant les régimes complémentaires de prévoyance et de retraite des agents généraux d'assurance

Cette convention est accompagnée d'un accord visant à conforter la protection sociale complémentaire des agents.

En ce qui concerne la retraite complémentaire (confrontée à des difficultés du fait des évolutions démographiques), le dispositif de pérennisation du régime fait en sorte que toutes les parties concernées puissent avoir un rôle important (agents généraux actifs, agents généraux retraités et entreprises mandantes). Notamment les sociétés s'engagent à augmenter (de 3 % à 3,6 %) l'aide qu'elles apportent sous la forme de commissions majorées pour leur permettre de verser des cotisations accrues.

Il est à noter que les dispositions retenues pérennisent vraiment le régime que dans la mesure où l'accord conventionnel lui-même aura une réussite sur le plan économique.

En matière de prévoyance complémentaire, le financement des régimes et garanties relève des seuls agents généraux d'assurance.

Les entreprises d'assurances et les agents généraux peuvent convenir de la mise en place de mécanismes surcomplémentaires en capitalisation au niveau de l'entreprise.

Le 27 mars 1998, la FFSA et la FNSAGA ont signé une déclaration commune qui marque la fin de la mise en place formelle de l'accord conclu en 1996.

Cette déclaration confirme la nature de nouveaux rapports, fondés sur la confiance, le respect des droits et devoirs réciproques et la recherche de l'efficacité économique.

Désormais toutes les compagnies ont signé un accord avec leur syndicat d'agents (la dernière en date est celle de Winterthur).

Des divergences persistent cependant entre les deux fédérations, sur la manière d'appréhender le métier. Ainsi les agents souhaiteraient avoir plus de moyens à leur disposition et voudraient pouvoir utiliser commercialement les plates-formes de services à distance mises en place par les sociétés d'assurances. Ces dernières en réservent pour l'instant l'usage à leurs activités de vente directe.

ANNEXE 1

LE DISPOSITIF DE FORMATION DE LA PROFESSION

La profession dispose de nombreux prestataires de formations :

- L'association pour l'enseignement de l'assurance et l'école nationale d'assurance contribuent chaque année, à la formation d'environ 4 000 élèves et stagiaires. Elles contribuent notamment à la formation de très nombreux jeunes assureurs en accueillant soit en formation initiale, soit en formation en alternance, soit en formation continue, plus d'un milliers de jeunes.

Les jeunes de moins de 26 ans en formation
Groupe ENAss-AEA - année 1997-1998

 

Effectifs

%

Diplôme d'études d'Assurances de l'Ecole Nationale d'Assurances

85

6,07

Brevet de Technicien Supérieur d'Assurances

dont élèves sous contrat d'apprentissage 120 (8 % du total)

dont élèves sous contrat de qualification 39 (2,78 % du total)

662

47,30

Brevet Professionnel d'Assurances

477

34,07

Certificat d'Aptitude Professionnelle d'Assurance

118

8,43

Diplôme de l'Institut Supérieur de Réassurance

3

0,21

Diplôme de Conseiller en Assurance et Epargne

55

3,92

TOTAL

1.400

100

Source : ENASS-AEA

- A côté de l'ENASS-AEA qui organisent des formations diplômantes, la FFSA a créé l'ADAP en 1987 qui propose des actions de formation continue non diplômante de courte durée inter et intra entreprises (respectivement 35 % et 65 %) destinées au personnel des sociétés d'assurance, des agences et des cabinets de courtage.

Chaque année l'ADAP accueille 3 500 stagiaires et dispense environ 7 000 heures-groupe de formation. Les 2/3 des actions se déroulent en Ile de France.

L'ADAP propose également des outils spécifiques qui sont utilisés par les formateurs internes aux entreprises. Le centre de formation a ainsi conçu un guide d'animation sur l'euro tenant compte des particularités de l'assurance. Outil de démultiplication de la formation, il permet aux formateurs internes et à l'encadrement des entreprises du secteur d'animer des sessions de sensibilisation à la monnaie unique, destinées à l'ensemble de leurs collaborateurs.

- Les établissements de formation d'actuaires (ISFA, ISUP par exemple) proposent des formations de haut niveau (niveau d'admission minimum bac + 2).

- La profession a par ailleurs depuis 20 ans noué avec les facultés de droit des relations de partenariat qui se sont traduites par la création d'instituts des assurances et des DESS d'assurances. Chacun de ces instituts délivre chaque année un diplôme à entre 15 et 35 jeunes. L'intégration en entreprise de ces jeunes pour un premier emploi s'effectue en moyenne dans les 3 à 6 mois après l'obtention du diplôme.

- Enfin il existe d'autres formations universitaires qui préparent les jeunes à exercer leur activité professionnelle dans l'assurance (DUT, IUP, MST...).

ANNEXE 2

ENTREES-SORTIES DU PERSONNEL
DES SOCIETES D'ASSURANCE

Mouvements des effectifs salariés administratifs affiliés
enregistrés par l'UCREPPSA 224( * ) depuis 1992
(entrées)

 

1992

1993

1994

1995

1996

Total des entrées

21 549

19 065

17 628

17 750

17 506

Dont entrant pour la 1 ère fois dans une société d'assurance

10 747

(49,9 %)

9 766

(51,2 %)

9 197

(52,2 %)

9 419

(53,1 %)

9 257

(52,9 %)

Source : FFSA.

Mouvements des effectifs affiliés à l'IRTESA 225( * ) en 1995 et 1996
chez les commerciaux producteurs salariés de base
et échelons intermédiaires
(soit 79 % des commerciaux)

 

1995

1996

Total des entrées

6 909

6 433

Dont entrant pour la 1 ère fois dans une société d'assurance

5 628

(81,5 %)

5 082

(79 %)

Source : FFSA.

Effectifs de salariés administratifs enregistrés par l'UCREPPSA
depuis 1992 (sorties des sociétés d'assurance)

 

1992

1993

1994

1995

1996

Démissions et licenciements

19 483

(91 %)

17 425

(91 %)

16 630

(91 %)

15 136

(91 %)

14 322

(91 %)

Départs en retraite et décès en cours d'activité

1 925

1 619

1 580

1 474

1 406

Source : FFSA.

Producteurs salariés de base et échelons intermédiaires :
Sorties des effectifs affiliés à l'IRTESA en 1995 et 1996

 

1995

1996

Rupture du contrat de travail (toutes causes confondues, sauf départs en retraite et décès)

6 251

(96,3 %)

6 002

(95,6 %)

Départs en retraite et décès en cours d'activité

243

266

Source : FFSA.

CHAPITRE VI


L'AVENIR DE LA MUTUALITÉ EN FRANCE

Ce chapitre traite essentiellement des mutuelles du code de la mutualité, mais sans exclusive, dans la mesure où il y a un certain nombre de problématiques communes au monde mutualiste, quelle que soit la réglementation qui lui est appliquée.

Signalons ces caractères ou ces problèmes communs avant d'y revenir plus largement dans la suite :

- leur statut et leur mode de fonctionnement interne, notamment la dévolution du pouvoir y est identique, du moins théoriquement, et cela pose un problème coextensif au monde de la mutualité qui est un problème de gouvernement d'entreprise ;

- les mutuelles sont toutes des sociétés de personnes sans capital social (sans " capital actions " comme les sociétés de capitaux, ni de parts sociales comme les coopératives) et sans objectif lucratif et elles ne peuvent faire appel en principe à aucun partenaire extérieur pour augmenter leurs fonds propres, sauf à créer des filiales commerciales spécifiques, qui sont en dehors du champ de la culture mutualiste.
Par ailleurs le contexte des directives européennes, qui pousse à la création progressive d'un marché européen de l'assurance, accessible à tout acteur dans tous ses compartiments, bouscule le monde de la mutualité au sens étroit ainsi que ses modes de fonctionnement habituels.

Après avoir essayé de cerner l'avenir prévisible des mutuelles du code de la mutualité, on reviendra sur les problèmes communs du monde mutualiste, qu'il assure les personnel ou les biens.

I. L'AVENIR PRÉVISIBLE DES " MUTUELLES DE LA MUTUALITÉ "

Faute d'avoir pu négocier un statut européen de la mutualité, voulant sans doute éviter de tomber dans le " Charybde " du monde de la sécurité sociale, à l'installation duquel elles avaient réussi à survivre en 1945, les MCM se sont précipitées avec le souci de ne pas se priver d'opportunités, apparemment sans réelle nécessité de choisir 226( * ) vers le Scylla de l'assurance, désormais réglementé dans le cadre des directives européennes. Elles sont de ce fait dans une situation juridique et fiscale précaire, à la différence des institutions de prévoyance dont la réglementation a transposé les directives européennes. Elles n'éviteront pas, en toute hypothèse, une restructuration accélérée, accompagnée d'une certaine recomposition et indépendamment de l'agenda européen probable autour d'acteurs proches.

Après une description complémentaire des mutuelles de la mutualité, leur situation financière et leur rentabilité actuelles seront étudiées avant d'envisager les scénarios d'évolutions possibles de la mutualité.

A. DESCRIPTION DE LA MUTUALITÉ " 45 "

La description donnée ici complète la présentation rapide faite dans le chapitre introductif 227( * ) . (En annexe 2 de ce chapitre, figure également une brève histoire du mutualisme complémentaire à la chronologie réglementaire du chapitre introductif). On trouvera en encadré page suivante la présentation du régime juridique spécifique des sociétés mutuelles " 45 ".

A la différence des SAM, qui perçoivent des primes en rapport avec des risques, qu'elles gèrent cependant de façon plus mutualisante et solidariste que les compagnies traditionnelles, les MCM peuvent percevoir des cotisations proportionnelles aux revenus, comme le font les mutuelles de fonctionnaires, ce qui est en assurance santé une habile manière de rompre avec la solidarité intergénérationnelle. Rien n'empêche non plus les mutuelles interprofessionnelles d'introduire des cotisations variables en fonction de l'âge, comme certaines le pratiquent compte tenu du contexte concurrentiel dans lequel elles vivent.

A la différence également des SAM, elles interviennent dans le domaine de la protection sociale complémentaire, c'est-à-dire de la couverture des risques sociaux liés à la personne (maladie, maternité, incapacité, invalidité, dépendance, décès) qui s'ajoute à celle organisée par le régime de base obligatoire de la sécurité sociale. Certaines d'entre-elles (MGEN, MNEF) gèrent également le régime obligatoire pour le compte de la sécurité sociale et sont rémunérées à ce titre par des " remises de gestion ".


Régime juridique de la mutualité *

Les mutuelles sont des groupements à but non lucratif qui mènent dans l'intérêt de leurs membres et de leurs familles des actions de prévoyance, de solidarité et d'entraide.

Régies par le code de la mutualité, elles interviennent dans le champ de la protection sociale principalement pour fournir une couverture sociale complémentaire à l'assurance-maladie des organismes de sécurité sociale (1). Plus généralement, elles assurent les risques sociaux liés à la personne à l'exclusion des dommages survenant aux biens ou à des tiers. Leur activité se situe à mi-chemin entre celle des organismes de sécurité sociale et celle des compagnies d'assurance. L'Etat assure un contrôle juridique et financier des mutuelles.

L'adhésion à ces groupements est facultative, à la différence de l'affiliation aux régimes de sécurité sociale. Les membres acquittent des cotisations qui leur ouvrent droit à des prestations, ainsi que l'accès à différents services créés et gérés dans le cadre de l'action sociale des mutuelles. Ces réalisations sociales sont à caractère sanitaire, médico-social, social ou culturel (pharmacies, cliniques, dispensaires, maisons de retraite, centres de loisirs et de vacances, etc.).

Les mutuelles peuvent constituer entre elles des unions, elles-mêmes susceptibles de se regrouper en fédérations. Ces groupements ont notamment pour objet de gérer les réalisations sociales communes aux mutuelles adhérentes et de leur permettre de se réassurer ; par ailleurs, ils font mieux connaître la mutualité et assurent la coordination et la représentation des mutuelles auprès des pouvoirs publics.

Les groupements mutualistes versent également des rentes ou des capitaux correspondant aux risques accident, invalidité, vie-décès et vieillesse. Ce type de prestations ne peut être versé que par l'intermédiaire d'une caisse autonome mutualiste, seul groupement mutualiste habilité à gérer les risques à long terme. Ces caisses n'ont pas de personnalité juridique distincte de celle de la mutuelle fondatrice, mais tiennent une comptabilité complètement séparée.

Le terme de groupement utilisé pour désigner les mutuelles, les unions et fédérations rappelle leur appartenance à l'économie sociale aux côtés des associations et des coopératives. Les unités constituant ces familles juridiques sont des groupements de membres reposant sur un fonctionnement démocratique. Celui-ci implique la liberté d'adhésion et l'égalité des membres dans l'exercice de leur responsabilité pour le développement d'actions menées solidairement. Dans le cas des mutuelles, ce fonctionnement repose sur l'élection par l'Assemblée générale des membres d'un conseil d'administration et d'une commission de contrôle, tous deux constitués de bénévoles choisis parmi les adhérents.

(1) De nombreux organismes utilisent dans leur dénomination les termes " mutuel ", " mutualité ", ou " mutualiste " sans être régis pour autant par le code de la mutualité. Il ne s'agit donc pas de mutuelles à proprement parler même si historiquement ils sont issus du même mouvement d'entraide et de prévoyance. Ainsi la Mutualité sociale agricole gère le régime obligatoire de Sécurité sociale des agriculteurs et est régie par le code rural. Les sociétés d'assurance mutuelle, régies par le code des assurances pratiquent en plus de la prévoyance, l'assurance de biens et de responsabilité civile.

* Extrait du rapport présenté au Conseil supérieur de la mutualité et préparé par le secrétariat général de la CCMIP, janvier 1995.

Extraits du code de la mutualité

Art. L. 111.-1
Les mutuelles sont des groupements à but non lucratif qui, essentiellement, au moyen de cotisations de leurs membres, se proposent de mener, dans l'intérêt de ceux-ci ou de leur famille, une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide en vue d'assurer notamment :

1° La prévention des risques sociaux liés à la personne et la réparation de leurs conséquences ;

2° L'encouragement de la maternité et la protection de l'enfance, de la famille, des personnes âgées ou handicapées ;

3° Le développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs membres et l'amélioration de leurs conditions de vie.

Art. L. 122-3 Les mutuelles sont tenues de mentionner dans leurs statuts, règlements, contrats, publicités ou tous autres documents qu'elles sont régies par le présent code.

Sauf exception résultant d'une disposition législative expresse, notamment du code des assurances, il est interdit de donner toute appellation comportant les termes : " mutuel ", " mutuelle ", " mutualité " ou " mutualiste " à des groupements dont les statuts ne sont pas approuvés conformément à l'article L. 122-5.

Toutefois, les organismes relevant du code des assurances autorisés à utiliser dans leur nom ou raison sociale le terme de " mutuelle " doivent obligatoirement lui associer celui " d'assurance ".

Il est également interdit à tous autres groupements de faire figurer dans leurs statuts, contrats, documents et publicités toute appellation susceptible de faire naître une confusion avec les groupements régis par le présent code.

Art. 122-5 Aucune mutuelle ne peut fonctionner avant que ses statuts adoptés par l'assemblée constitutive n'aient été approuvés par l'autorité administrative.

Sur 5 780 groupements mutualistes fin 1995, 4 500 mutuelles sont des petites mutuelles protégeant moins de 3 501 personnes et ne gérant pas d'oeuvres sociales. Les petites mutuelles, qui représentent 78 % du nombre des groupements mutualistes (terme générique pour mutuelles, unions de mutuelles, fédération d'unions mutuelles) versent moins de 3 % des 50 GF formant l'ensemble des prestations, en laissant de côté les prestations des caisses autonomes (5 GF) et la valeur des flux de services et de produits des " réalisations sociales " (9,5 GF).

1 280 groupements mutualistes financent donc plus de 97 % des prestations mutualistes et gèrent l'ensemble des réalisations sociales des mutuelles. A l'intérieur de ces 1 280 groupements mutualistes, 7 financent un quart des prestations, 43 en financent la moitié, 128 les trois quarts : la concentration du secteur mutualiste est donc en réalité beaucoup plus grande que les apparences n'inclinent à le penser. Cette concentration est encore plus poussée dans les mutuelles de fonctionnaires, qui sont au nombre de 79 et constituent 5 des 7 groupements mutualistes les plus importants. Elles dominent largement le monde de la mutualité dont l'organisme le plus représentatif est la FNMF (au sujet des divers mondes de la mutualité, voir l'annexe 3) bien que le nombre de leurs adhérents fédérés et représentés par la Mutualité fonction publique (MFP), à savoir 4,2 millions d'adhérents, soit inférieur à celui des adhérents des mutuelles interprofessionnelles (fédérés et représentés par la Fédération nationale de la mutualité interprofessionnelle (FNMI) qui, selon les chiffres mêmes de la FNMF, devrait représenter un nombre d'adhérents double de celui de la MFP.

L'assurance-maladie complémentaire au régime obligatoire de la sécurité sociale étant l'activité principale des mutuelles, les prestations lui correspondant représentent 94,2 % des 48,5 GF versés par les 1 280 groupements mutualistes. Il s'agit de prestations dites en nature, qui correspondent à des remboursements de soins et de biens médicaux. Le solde, 5,8 %, représente des prestations sociales (directes) en espèces. Les mutuelles détiennent environ 60 % du marché de l'assurance-maladie complémentaire.

On observera dans le tableau ci-dessous la répartition des groupements mutualistes de plus de 3 500 personnes protégées par sous-catégories :

- mutuelles professionnelles ou interprofessionnelles,

- mutuelles d'entreprises,

- mutuelles de fonctionnaires.

On remarquera que la prestation la plus élevée par personne protégée est celle assurée par les mutuelles de fonctionnaires.

Tableau 70
Activités des groupements mutualistes
de plus de 3 500 personnes protégées
Gestion de prestations et de réalisations sociales en 1995

Catégorie de groupements mutualistes

Nombre de groupe-ments

Prestations (MF)

Cotisations (a)

(MF)

Prestations par personne protégée

(F)

Presta-tions/Coti-sations (%)

Nombre de réalisa-tions sociales gérées

Mutuelles professionnelles à recrutement général, caisses chirurgicales

394

22 294

27 287

1 343

81,7

161

Mutuelles d'entreprise

175

4 466

4 961

1 396

90,0

28

Mutuelles de fonctionnaires

79

16 176

18 852

1 611

85,8

135

Ensemble des mutuelles " maladie " (1)

648

42 936

51 100

1 440

84,0

324

Mutuelles pour scolaires et sportifs

97

67

210

4

31,9

7

Mutuelles ne versant pas de prestations maladie (2)

192

87

362

8

23,8

24

Ensemble des mutuelles

937

43 090

51 672

///

83,4

355

Unions et fédérations

343

5 410

7 088

///

76,3

1 015

Total

1 280

48 500

58 760

///

82,5

1,370(3)

GMP : groupements mutualistes de plus de 3 500 personnes protégées.

(a) Ces montants comprennent les cotisations statutaires ordinaires, les participations des administrations des entreprises et des comités d'entreprises, les cotisations des membres honoraires, les droits d'admission, les recours contre tiers ; ils ne comprennent ni les cotisations techniques versées à un autre organisme (réassurance) ni les cotisations aux organismes supérieurs.

(1) Mutuelles versant effectivement des prestations maladie et qui ne sont pas réassurées.

(2) Mutuelles ne versant pas de prestations maladie ou réassurées pour ce risque.

(3) Chiffre d'affaires de ces 1 370 réalisations sociales : 10,4 GF.

Source : Informations statistiques et financières sur la mutualité, janvier 1995.


L'ensemble des 1 280 groupements mutualistes couvre 30 millions de personnes et regroupe 12,8 millions d'adhérents en principe volontaires à l'aide de 58 600 employés (hors bénévoles) représentant un effectif à temps plein de 55 500 emplois. Sur les 58 600 employés, 31 300 le sont par les mutuelles, 27 300 par les unions et fédérations. 4 % de cet effectif sont mis à disposition par les administrations et les entreprises. En 1995, l'effectif annuel moyen en équivalent temps plein a augmenté de 3 % (+ 4,4 % dans les unions et fédérations, 1,7 % dans les mutuelles).

B. RENTABILITÉ ET SITUATION FINANCIÈRE DE LA " MUTUALITÉ "

On ne peut que regretter de ne disposer en 1998, de chiffres concernant la mutualité que pour l'année 1995, alors que toutes les sociétés dont les chiffres sont consolidés par l'administration sociale sont certifiées et alors qu'à la même date, on dispose des chiffres 1997 pour les SAM et les compagnies d'assurance. Ceci contribue largement à l'opacité fréquemment invoquée du monde mutualiste.

Les résultats de ces groupements mutualistes jusqu'en 1995 sont les suivants :

Tableau 71
Evolution des comptes de résultat de la mutualité (en MF)

Compte de résultat global

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Total des produits d'exploitation

53 733,8

57 731,1

61 052,2

66 204,7

72 087,3

76 340,4

Total des charges d'exploitation

51 83,7

55 882,9

59 682,6

65 396,9

70 033,2

74 540,6 228( * )

Résultat d'exploitation

1 899,1

1 848,2

1 369,6

807,8

2 054,1

1 799,8

Résultat attribué à des opérations en commun

- 56,1

- 37,5

- 154,5

- 116,3

- 141,2

17,6

Résultat financier

1 810,2

2 228,6

2 487,4

3 121,1

1 387,8

2 352,7

Résultat courant avant impôt

3 653,2

4 039,3

3 702,5

3 812,6

3 300,7

4 170,1

Résultat exceptionnel

- 174,1

70,8

113,0

- 279,5

- 158,8

- 227,2

Impôt net sur les bénéfices et impôts assimilés

(-) 30,7

(-) 36,4

(-) 65,0

(-) 57,1

(-) 62,0

(-) 57,1

Résultat de l'exercice

3 448,4

4 073,7

3 750,5

3 476,0

3 079,9

3 885,8

Champ : ensemble des mutuelles ayant plus de 3 500 personnes protégées.

Source : Informations statistiques et financières sur la mutualité, janvier 1995.


L'excédent de 3,9 GF de 1995 est en augmentation de 26 % par rapport à 1994. Il renvoie à une rentabilité commerciale de 5,1 % et à un équivalent rentabilité financière (ROE) de 9 % à comparer à la rentabilité financière (ROE) du secteur de l'assurance de 7 % en 1997.

Comme le rapport pour le Conseil de la mutualité l'indique de manière très " mutualiste " : " le ratio prestations / cotisations a progressé de 81 % en 1991 à 82,4 % en 1994 et à 82,5 % en 1995 ". Jusqu'où progressera-t-il ?

On dispose également du bilan " cumulé " de la mutualité (au sens des 1 280 groupements mutualistes les plus importants).

Le bilan cumulé de la mutualité fait apparaître la solidité de la situation financière globale du monde mutualiste, avec des fonds propres représentant 55,5 % du total du bilan, un actif circulant plus de deux fois supérieur à l'ensemble de ses dettes totales, un niveau de plus de 15 GF d'immobilisations financières.

Tableau 72
Comptes cumulés de bilan
au 31 décembre 1995

ACTIF NET PASSIF



en millions de francs

IMMOBILISATIONS

27.400
CAPITAUX PROPRES

35,3 % 43.180 55,5 %

(dont résultat

dont 15.620 de l'exercice : +3890)

d'immobilisations

............

PROVISIONS

POUR

RISQUES ET

ACTIF CIRCULANT CHARGES

50.300

4.410 5,7%

64,7%

DETTES

23.910 30,8%

(dont dettes PRODUITS

provisionnées pour CONSTATÉS

prestations à payer en fin D'AVANCE

6.200 8,0%

TOTAL BILAN : 77.700 millions de francs

Champ : groupements mutualistes de plus de 3.500 personnes protégées et/ou gérant au moins une réalisation sociale

Source : Informations statistiques et financières sur la mutualité, exercice 1995

C. SCÉNARIOS D'ÉVOLUTION DE LA MUTUALITÉ : INDÉPENDANCE PRÉSERVÉE OU ABSORPTION PARTIELLE

La transposition très probable dans le code de la mutualité des règles prudentielles de la directive européenne et une certaine banalisation de la fiscalité des " mutualistes " vont accélérer un processus de concentration déjà largement en cours. Cette concentration arrivera-t-elle à se faire, comme le souhaitent vivement les représentants de la mutualité à l'intérieur du monde mutualiste, ou sera-t-elle l'occasion d'un regroupement d'un nombre important de mutuelles autour d'acteurs proches plus puissants, comme les institutions de prévoyance ou les mutuelles sans intermédiaires ?

Il existe une sorte de consensus d'après lequel la concentration du monde de la mutualité va vraisemblablement s'accélérer. Un scénario de restructuration de la mutualité du type " Caisses d'épargne " n'est pas à écarter 229( * ) .

Cette accélération est d'autant moins invraisemblable dans un contexte concurrentiel fortement accru pour des entreprises jusque là protégées par une fiscalité et une réglementation sur mesure ainsi que par des relations budgétaires floues avec les organismes, en particulier les administrations, dont elles sont issues, que leur concentration est déjà en marche depuis longtemps bien avant que ces règles protectrices, et souvent sclérosantes, ne soient appelées à disparaître. Le tableau ci-dessous le montre clairement.

Tableau 73
Evolution du nombre de groupements mutualistes

Années

1973

1982

1991

1995

95-91

Groupements mutualistes

8 635

7 047

6 400

5 780

- 620

dont < 3 500 PP

 
 

5 170

4 500

- 670

Source : Direction de la Sécurité sociale.

Jusqu'où cette concentration se fera-t-elle et comment ? Il est possible de poser quelques jalons :

- les petites mutuelles, en particulier les mutuelles d'entreprises, vont continuer à disparaître et se regrouperont vraisemblablement d'autant plus facilement autour des mutuelles interprofessionnelles qu'elles pourront devenir des sections locales de l'entité absorbante ;

- une fois les petites mutuelles, d'entreprises on interprofessionnelles absorbées ou regroupées au niveau départemental, il est vraisemblable que les regroupements de mutuelles se feront plus par affinité ou proximité au niveau régional ou interdépartemental, plutôt qu'au niveau départemental où prévaut une certaine rivalité gauloise ;

- les unions techniques, juridiquement consacrées ou non sous forme de GIE, conçues pour mettre en commun les moyens, ou pour pouvoir acquérir des équipements adaptés à une gestion performante et compétitive du risque, ou les délégations de gestion ne seront à terme qu'une des modalités pratiques de mise en oeuvre du processus de concentration par fusions ou absorptions.

Le seuil de viabilité que la " profession " s'accorde à considérer comme minimal en régime de croisière futur est de 100 000 adhérents. Un tel chiffre révèle qu'à un horizon de quelques années le nombre de mutuelles pourrait être divisé au moins par 5 ou par 6. Le passage à moins d'un millier de mutuelles dans un proche avenir est donc assez vraisemblable.

Par rapport à ce schéma, le scénario attrayant de mise en réseau des mutuelles proposé par la FNIM (par opposition à l'organisation pyramidale de la FNMF), théoriquement susceptible d'éviter une telle concentration, apparaît plus comme un scénario complémentaire qu'alternatif. La mise en réseau d'un certain nombre de mutuelles n'empêchera pas leur concentration. Mais leur concentration peut aussi les inciter à fonctionner autrement et à privilégier une plus grande indépendance par la mise en réseau.

Au-delà de ces quelques chaînons, la question se pose de savoir si la mutualité va pouvoir préserver son autonomie sur le nouveau marché français et européen unifié de l'assurance, comme la FNMF et la FMF le souhaitent 230( * ) fortement en fonction de l'attachement des élus et des personnels à l'esprit et à " la différence " mutualistes qu'ils sont certains de ne pouvoir retrouver ailleurs (sinon, de manière moins professionnelle, dans le monde associatif) ou si, au contraire, une partie des mutuelles ne va pas souhaiter s'allier à un certain nombre d'acteurs plus puissants.

Parmi ces acteurs plus puissants, susceptibles de devenir des pôles de regroupement, on mentionnera :

- les SAM, qui sont d'une certaine manière les grandes soeurs, juridiquement, des MCM et, quoique centrées principalement sur l'assurance dommages, rentrent elles-mêmes progressivement sur le marché de l'assurance-maladie complémentaire, et qui ont souvent accepté sur le terrain d'être des distributeurs des produits d'assurance complémentaire des mutuelles 45, quand elles ne comprennent pas directement dans leur périmètre d'influence des mutuelles de la mutualité (comme la MAAF) ;

- les groupes d'institutions de prévoyance, qui ont désormais surmonté le choc de l'adaptation aux directives européennes, qui sont engagés eux-mêmes dans la protection sociale complémentaire et qui, parfois, incluent dans leur périmètre un certain nombre de mutuelles 45 (comme le groupe Médéric) mais qui appartiennent au monde étranger du paritarisme plus proche de celui de la sécurité sociale.
Il semble en tout cas peu probable, a priori, que le regroupement de mutuelles soit imaginable autour d'acteurs plus lointains de la mutualité comme les compagnies d'assurance classiques, même si l'on ne peut oublier que le groupe AXA est issu du groupe Ancienne Mutuelle, constitué par André Sahut d'Izarn par regroupement de plusieurs mutuelles régionales de l'Ouest de la France 231( * ) .

II. RÉFLEXIONS SUR LES PROBLÈMES SPÉCIFIQUES DE LA MUTUALITÉ 45 ET LES PROBLÈMES COMMUNS À L'ENSEMBLE DES SOCIÉTÉS MUTUELLES

A. LA TRÈS PROBABLE TRANSPOSITION DES DIRECTIVES EUROPÉENNES DANS LE CODE DE LA MUTUALITÉ PERMETTRA-T-ELLE LE MAINTIEN D'UNE SPÉCIFICITÉ MUTUALISTE LÉGITIME ?

Lors de la préparation par la Commission des troisièmes directives assurance, à l'initiative de la mutualité en général et de la FNMF en particulier, le gouvernement français a demandé l'intégration des mutuelles dans le champ d'application des directives d'assurance en 1991. La conséquence de ce choix était, à certaines dérogations au statut juridique et fiscal des mutuelles près, l'alignement sur la réglementation du secteur de référence.

Conformément à ce voeu, un peu intempestif apparemment, et à cette demande, les " troisièmes " directives européennes (92/49/CEE du 18 juin 1992 sur l'assurance non-vie ", 92-96/CEE du 10 novembre 1992 sur l'assurance " vie ") ont intégré les mutuelles dans le champ de la réglementation européenne des assurances.

Selon la directive, les gouvernements nationaux devaient transposer en droit interne les dispositions des directives avant le 31 décembre 1993, ce qui a été fait pour les institutions de prévoyance par l'adaptation du code des institutions prévoyance intégré au code de la Sécurité sociale, mais n'a pas été fait pour les mutuelles du code de la mutualité.

Dans sa lettre de mise en demeure au ministre français des Affaires étrangères du 31 janvier 1996, le Commissaire européen Mario Monti écrivait que " la Commission ne dispose pas des éléments d'information lui permettant de conclure que les autorités françaises ont pris les mesures nécessaires transposant les dispositions en question " (des directives européennes) et que " la Commission, conformément à l'article 169 du traité CE, invite le gouvernement français à bien vouloir lui faire connaître ses observations sur le point de vue qu'elle à l'honneur de lui soumettre dans le délai de deux mois à compter de la réception de la présente lettre .... et se réserve d'émettre, s'il y a lieu, l'avis motivé prévu à l'article 169 du traité CE ".

Or, l'article 169 du traité prévoit que " si la Commission estime qu'un Etat membre a manqué à une des obligations qui lui incombait en vertu du présent traité, elle émet un avis motivé à ce sujet, après avoir mis cet Etat en mesure de présenter ses observations.

Si l'Etat en cause ne se conforme pas à cet avis motivé dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice ".

Le 5 mars 1997, la Commission adresse un avis motivé au gouvernement français sur l'absence de transposition des directives " assurances " dans le code de la mutualité.

En juin 1997, le Président de la République réaffirme la nécessité de respecter la spécificité de la mutualité en France. Le Gouvernement français transmet le 19 novembre et le 3 décembre 1997 des notes à la Commission rappelant que les spécificités des mutuelles ne sont pas incompatibles avec les objectifs des directives assurances et affirmait sa volonté de réaliser la transposition au cours de l'année 1998, en prenant en compte les spécificités mutualistes.

Dans ses réponses du 28 novembre et du 17 décembre 1997, la Commission émet des réserves sur ces propositions en indiquant que ce projet ne répondait pas aux objectifs poursuivis par principe posé par l'article 8b de la directive 73/235/CEE selon lequel les entreprises sollicitent l'agrément pour une activité relative à l'assurance directe autre que sur la vie doivent limiter " leur objet social à l'activité d'assurance et aux opérations qui en découlent directement, à l'exclusion de toute autre activité commerciale ". Il s'agit du rappel du fameux principe de spécialisation de l'activité d'assurance.

Une nouvelle note accompagnée d'un avant-projet partiel de loi de transposition est envoyée par les autorités françaises le 11 février 1998. Elle prévoit d'une part que les activités d'assurance mutualiste peuvent être exécutées sous forme de prestations en espèces et/ou en nature et d'autre part que les activités non assurancielles des mutuelles devront être gérées dans des mutuelles filiales régies par le droit mutualiste 232( * ) .

Après avoir rejeté ces nouvelles propositions, la Commission européenne a finalement décidé le 8 mai 1998 de saisir la Cour de justice des Communautés européennes pour transposition incomplète par le gouvernement français des directives européennes, la mutualité étant le seul secteur concerné par les directives d'assurance qui échappe encore à leur application et la mutualité française étant la seule en Europe à ne pas avoir pris en compte ces directives d'une manière ou d'une autre 233( * ) .

Il paraît donc difficile à ce stade, et en dépit des diverses positions de la mutualité française, d'imaginer que les " mutuelles 45 " puissent échapper aux conséquences d'un processus qu'elles ont elles-mêmes initié, qui devrait entraîner une évolution réglementaire et fiscale souhaitée depuis longtemps par la FFSA, non sans une certaine logique, comme l'alignement fiscal et réglementaire passé des SAM n'allait pas non plus sans une certaine logique. Cette évolution n'empêche d'ailleurs nullement le maintien d'une certaine spécificité réglementaire et fiscale liée soit aux modalités de fonctionnement propre à une société de personnes, soit aux contraintes sociales spécifiques qu'elles peuvent choisir d'assumer en liaison avec leur caractère non lucratif.

La transposition aux MCM des troisièmes directives est d'autant plus probable qu'elles ont elles-mêmes prévu d'exclure du champ de la transposition un certain nombre de mutuelles :

en non vie (dir. 92/49) :

1. les mutuelles dont le statut prévoit la possibilité de procéder à des rappels de cotisations (ou réduction des prestations), ne couvrant pas les risques responsabilité civile, crédit et caution, percevant moins d'1 million d'Ecus (6,5 MF de cotisations annuelles) et dont la moitié au moins des cotisations provient des membres affiliés ;

2. les mutuelles ne versant que des prestations d'assistance en nature et percevant moins de 200 000 Ecus par an (1,3 MF) ;

3. les mutuelles intégralement réassurées auprès d'une entreprise d'assurance de même nature ou pour lesquelles le cessionnaire se substitue à la cédante pour l'exécution des engagements ;
en vie (dir. 92/96) :
1. les mutuelles dont le statut prévoit la possibilité de procéder à des rappels de cotisations (ou réduction des prestations ou de faire appel au concours d'autres personnes ayant souscrit un engagement à cette fin) et ayant perçu moins de 0,5 million d'Ecus (3,2 MF) de cotisations annuelles pendant au moins 3 années consécutives ;

2. les mutuelles ne versant que des allocations pour frais d'obsèques.
En pratique, ces dispositions pourraient permettre d'exclure de très nombreuses petites mutuelles maladie dans la mesure où :
- soit le code de la mutualité serait modifié pour leur permettre de procéder à des rappels de cotisations (dans le sens du code des assurances - art. L. 322-26-1 - qui permet aux sociétés d'assurances mutuelles de recourir à une cotisation " fixe ou variable ") ;

- soit elles se réassureraient intégralement auprès d'une union de mutuelles 234( * ) , selon le schéma de réassurance adopté par GROUPAMA avec sa filiale de réassurance SOREMA, et qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, dans la mesure où cette filiale peut se réassurer elle-même auprès de toute société de réassurance.

C'est d'ailleurs l'orientation des solutions proposées par le rapport Bacquet, qui voyait mal, dès 1994, comment il était possible d'éviter une transposition extensive des directives européennes, laquelle n'empêchait toutefois pas un certain nombre d'aménagements. Mal reçu par le monde mutualiste à l'origine, ce rapport, extrêmement rigoureux et soucieux de préserver les activités de la mutualité, paraît aujourd'hui rétrospectivement recueillir l'assentiment de la plupart des acteurs de la mutualité.

Ce scénario pourrait éventuellement s'appliquer à une grande partie du monde de la mutualité.

Au demeurant, le monde de la mutualité est assez réceptif à un certain nombre d'arguments de la Commission comme :

- la filialisation pure et simple sous une forme juridique de droit commun ou mutualiste des activités commerciales exercées sous une forme mutualiste (tourisme, loisirs) l'activité sociale découlant directement de l'activité d'assurance pouvant être filialisée dans des mutuelles " soeurs " ;

- la remise en cause des relations anormales entre les administrations et leurs mutuelles et la prise en charge par celles-ci de la totalité de leurs coûts de fonctionnement (ce qui n'est pas à l'heure actuelle le cas, malgré l'autonomie juridique de ces mutuelles par rapport à l'administration) ;

- l'adoption d'une réglementation prudentielle commune, une réserve étant faite sur le niveau de fonds de garantie minimum à exiger des mutuelles eu égard au statut de société de personnes des mutuelles ;

- la limitation aux adhérents et à leur famille des services et des prestations offerts par les MCM, à l'exception des contraintes d'accueil hospitalier édictées par l'administration sociale ;



et, dans une moindre mesure comme :

- la liberté de transfert des portefeuilles, dès lors qu'étant volontaire, son bénéficiaire peut être décidé en assemblée générale (ce qui serait cohérent avec l'article L. 324-1-1 du code des assurances issu de la loi du 4 janvier 1994 qui permet aux MCM de recevoir des portefeuilles transférés par des assureurs non mutualistes) et à la condition que le prix du transfert soit gardé dans la mutuelle au niveau des réserves impartageables ;

- une certaine banalisation fiscale, pourvu qu'une décision soit prise permettant à la mutualité de savoir précisément ce qu'il en est et à quelle échéance et que soient prises en compte les contraintes particulières qu'elle assumerait effectivement le cas échéant comme le refus de sélection;

- la fin de l'obligation de réassurance dans le réseau mutualiste (obligation très mal ressentie à l'heure actuelle par un certain nombre de mutuelles à la base) à partir du moment où cette liberté ne concernerait que l'organe de réassurance interne au réseau mutualiste 235( * ) . Il n'est toutefois pas inimaginable que certaines fédérations mutualistes accordent la liberté de réassurance interne aux mutuelles qu'elles fédèrent.
D'autres réquisits comme la mise en cause de l'unité juridique des mutuelles et de leurs réalisations sociales (maisons de retraite, de convalescence, centres de soins, etc.) à des fins de spécialisation et de cantonnement prudentiel de l'activité assurancielle 236( * ) sont en revanche ressentis comme des remises en cause de la vocation même des mutuelles qui, selon le code de la mutualité sont " des groupements à but non lucratif ", se proposant " de mener, dans l'intérêt des membres ou de leur famille, une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide " (alors même qu'il serait peut-être plus rigoureux de se concentrer sur l'autonomie juridique des caisses autonomes porteuses de risques lourds dans une certaine opacité pour l'adhérent assuré).

Or, cette action de prévoyance, de solidarité et d'entraide passe par la mutualisation des diverses activités, la possibilité de subventions croisées, dans le cadre d'un équilibre global, entre les activités génératrices d'excédents et les réalisations d'entraide et de solidarité génératrices susceptibles de générer des déficits plus ou moins durables comme justement l'assurance complémentaire santé.

On ne peut qu'être sensible à un tel argument, invoqué par des représentants de structures à but non lucratif dont les diverses activités, qui sont aujourd'hui suivies de manière bien individualisée sur le plan de la gestion, n'ont pas vocation à être toutes des centres de profit, si l'on reste dans un contexte mutualiste. L'argument serait d'ailleurs encore plus pur, s'il était techniquement possible de sortir le cas échéant du statut mutualiste et qu'ainsi le maintien dans le statut mutualiste soit bien l'expression d'un choix constamment réaffirmé par les sociétaires (on y reviendra plus loin).

L'argument est d'autant plus recevable dans un contexte où la population vieillit, la précarisation du salariat s'accroît, la place de la protection sociale sous forme de contrats de groupe liés à l'emploi est fiscalement favorisée (alors que la couverture sociale exercée par les mutuelles est majoritairement individuelle, y compris pour les populations fragilisées dont les mutuelles cherchent à maintenir la prise en charge) et dans un contexte où l'action sociale directe de l'Etat étant souvent tenue en échec compte tenu de sa rigidité, l'on songe à accroître le rôle de service public de la mutualité en faveur de l'exclusion.

Par ailleurs, la séparation juridique des réalisations sociales et des mutuelles dont l'activité essentielle consiste à faire des remboursements complémentaires en espèces irait à contresens de l'évolution du marché de l'assurance qui tend à réserver une part plus grande aux prestations en nature de type assistance 237( * ) , conformément aux souhaits profonds des assurés, qui préfèrent, en cas de difficulté, être pris en charge et assisté dans leurs besoins réels, plutôt que de percevoir une somme d'argent une fois pour toutes et sans appui ni conseil pratiques. Il y aurait donc quelque paradoxe à contraindre la mutualité à abandonner maintenant un type de prestations, relevant de la branche assistance de l'assurance (au sens de la directive européenne de 1984) par lequel elle semble avoir largement anticipé les évolutions du marché de l'assurance qui répond maintenant à ce type de besoins latents depuis longtemps pris en charge par le monde mutualiste.

Dans la mesure où la filialisation juridique n'est pas une condition de la transparence comme le soulignait le rapport CGP sur le système bancaire français à propos de la création de la filiale de la Caisse des dépôts et consignations " CDC Marché " et que la volonté de transparence, qui exprime aussi le souci de spécialisation juridique, peut être satisfaite par d'autres moyens, il n'est pas nécessaire d'envisager ce type de séparation, dont les conséquences seraient vraisemblablement socialement lourdes.

On peut imaginer une évolution de la gestion des réalisations sociales selon des modalités de type " caisse autonome ", en prévoyant une autonomie financière et comptable poussée et bien encadrée. Par ailleurs, il est possible de prévoir réglementairement que les transferts d'excédents d'une activité à l'autre doivent être explicitement présentés, justifiés et approuvés lors de l'assemblée générale annuelle. Il pourrait aussi être prévu qu'ils fassent l'objet d'un contrôle informel et a posteriori par l'autorité de tutelle.

Il paraît cependant difficile en l'état actuel du dossier européen que la Cour de Justice européenne fasse droit à un tel raisonnement comme le faisait bien ressentir Alain Bacquet dans son rapport.

L'adoption d'une telle position risquerait d'ailleurs de faire naître des distorsions de concurrence à l'égard des institutions de prévoyance qui pratiquent aussi l'assurance complémentaire santé et qui mettent également en oeuvre au profit de leurs membres participants une action sociale. Or la loi n° 94-678 du 8 août 1994 qui modifie le code de la Sécurité sociale et transpose les libertés d'assurance pour les institutions de prévoyance précise que, lorsque cette action sociale " se réalise par l'exploitation de réalisations sociales collectives, elle doit être gérée par une ou plusieurs personnes morales distinctes ".

Toutefois l'évolution des esprits, parmi ceux qui acceptent l'hypothèse de transposition, fait qu'il ne paraît pas impossible d'accéder à cette exigence européenne (comme évoqué plus haut) en créant des mutuelles soeurs.

B. LA DYNAMISATION DU DROIT DE LA MUTUALITÉ EST UNE RÉPONSE AUX PROBLÈMES COMMUNS DES SOCIÉTÉS MUTUELLES

En dehors des échéances européennes qui les concernent à titre spécifique, les MCM ont en commun avec les assurances mutuelles (sans intermédiaires ou avec intermédiaires) des spécificités et des problèmes communs liés au régime juridique des sociétés mutuelles et à ses conséquences sur les relations avec les sociétaires et les tiers.

Il en va ainsi notamment du recrutement des fonds propres par d'autres moyens que l'autofinancement et la dotation du fonds de réserve, qui, compte tenu du caractère collectif et non individualisable pour chaque sociétaire des fonds propres, est considéré comme un revenu par le fisc taxé au taux de l'impôt sur les sociétés. C'est un inconvénient volontiers mis en avant par les sociétés d'assurance mutuelles en particulier.

Il en va également ainsi du fonctionnement théoriquement démocratique et " idéal " de toutes les sociétés mutuelles (la " démocratie " est un des trois piliers de la mutualité avec la " responsabilité " et la " solidarité ") qui, par délégation successive de pouvoirs et dans le cadre d'un droit non rénové des sociétés appliqué aux sociétés mutuelles, peut en pratique se transformer en centralisme démocratique, aboutir à une gestion trop " politique " des affaires et ainsi poser de sérieux problèmes de gouvernement d'entreprise. Moins mis en avant par les divers acteurs de la mutualité, ce problème existe objectivement comme le montre un nombre suffisant d'exemples appartenant à l'un ou l'autre sous-ensemble du monde mutualiste (GMF, MSA, MNEF, etc.).

Les développements qui suivent répondent au souci assez consensuel de trouver les moyens d'une pleine concurrence entre les modes d'organisation de la coopération interindividuelle aussi concurrents et hétérogènes qu'individuellement légitimes que sont les sociétés de capitaux ayant le profit pour objectif principal et non exclusif et les sociétés de personnes à but non lucratif 238( * ) , mais qui ont besoin d'excédents pour vivre prudemment et se développer.

1. Les limitations des mutuelles dans l'appel public à l'épargne, déjà assouplies, sont logiquement dépendantes de leur forme juridique spécifique et d'ailleurs contournables par la démutualisation

Si l'on veut respecter l'esprit du statut des sociétés mutuelles, en tant qu'elles sont des sociétés de personnes, qui renvoie implicitement à une taille de société raisonnable, c'est plutôt par une forme ou une autre de " démutualisation " que la recherche d'un égal accès aux fonds propres extérieurs paraît devoir être légitimement trouvé.

Les sociétés mutuelles sont des sociétés de personnes, caractérisées par la responsabilité personnelle et solidaire des associés et, pour cette raison juridique, par un fort " affectio societatis ", qui exerce en principe un impact limitatif sur la taille de telles sociétés. Elles ne disposent pas de capital social mais d'un fonds d'établissement constitué à fonds perdus par les fondateurs et les sociétaires. Leurs excédents non ristournés aux adhérents appartiennent à la " collectivité indivise et intemporelle des sociétaires ". Ceux-ci sont à la fois individuellement assurés et collectivement assureurs. Selon la belle formule d'Edmond Proust, premier président de la MAIF : " A la fois bénéficiaires et responsables des garanties accordées, les adhérents d'une mutuelle ne sont bien assurés que s'ils sont bons assureurs " 239( * ) .

C'est pour dépasser ces limites propres aux sociétés de personnes que les sociétés de capitaux, et en particulier les sociétés anonymes, ont été autorisées puis banalisées à partir de 1867. Il n'est pas illogique que les sociétés mutuelles subissent les contraintes propres à leur statut. D'autant plus qu'un certain nombre d'assouplissements en matière de renforcement des fonds propres leur a déjà été accordé, et que les mutuelles peuvent par ailleurs déjà se constituer en groupes.

En effet, selon l'article L.124-5-1 du code de la mutualité (en vertu de la loi 93-121 du 27 janvier 1993, art. 49-VI) les mutuelles peuvent émettre des titres participatifs dans les conditions de la loi sur les sociétés commerciales du 24 juillet 1966 (art.283-6 et 283-7).

Quant aux sociétés d'assurance mutuelles, si leur statut le prévoit, elles peuvent constituer un fonds social complémentaire par emprunt auprès des sociétaires après accord de l'autorité de tutelle. Elles peuvent également émettre des titres participatifs, qui ne sont remboursables qu'en cas de liquidation de la société ou, à son initiative, à l'issue d'un délai non inférieur à 7 ans. Depuis l'article 8 de la loi DDOEF du 12 avril 1996, les SAM sont également autorisées à émettre des titres de créances sous forme de titres subordonnés à durée indéterminée - TSDI - ou d'obligations à l'instar des sociétés anonymes après approbation de l'assemblée générale 240( * ) . Il est vrai cependant que la mise en oeuvre de ces possibilités d'émission est en pratique limitée par la notation des titres par les agences de notation qui n'ont pas une bonne connaissance des sociétés d'assurance qui ne sont pas cotées en bourse.

Par ailleurs, rien n'interdit aux sociétés mutuelles de créer des filiales commerciales. Les sociétés d'assurance mutuelles font d'ailleurs déjà largement appel à cette possibilité, à vrai dire parce qu'elles n'ont pas en l'état du droit positif, d'autre possibilité.

Mais on pourrait imaginer, pour les mutuelles qui le souhaitent, de faciliter la possibilité institutionnelle de démutualisation qui est aujourd'hui juridiquement impossible, compte tenu des règles de dévolution de l'actif net résiduel en cas de dissolution volontaire ou forcée d'une mutuelle. En effet pour les SAM d'un côté, selon l'article L.322-26-5 du code des assurances, en cas de dissolution, l'excédent de l'actif net des sociétés mutuelles est dévolu, soit à d'autres sociétés d'assurance mutuelles, soit à des associations reconnues d'utilité publique. Pour les mutuelles régies par le code de la mutualité de l'autre, l'article L.126-5 prévoit que " le surplus éventuel de l'actif social est attribué au Fonds national de solidarité et d'action mutualistes ".

Il suffirait donc d'élargir les possibilités de dévolutions de l'actif net des sociétés mutuelles en cas de dissolution vers des sociétés de statut coopératif, qui seraient en l'espèce, vraisemblablement, des Unions d'économie sociale (UES), ou vers des sociétés commerciales comme les sociétés anonymes (voir en annexe 4 les caractéristiques des divers types de regroupement en économie sociale) pour que la démutualisation soit possible, pour les sociétaires ou les dirigeants de mutuelles qui le voudraient. Dès lors les possibilités d'appel public à l'épargne seraient les mêmes. Cette faculté ne serait d'ailleurs en rien une contrainte ni une incitation à la démutualisation qui, en l'état du droit, est impossible.

Contrairement aux souhaits de renforcer l'étanchéité du monde commercial et du monde mutualiste, la possibilité juridique de la démutualisation paraît être le test véritable et l'occasion que s'exprime, notamment par la voix des sociétaires, la volonté de faire perdurer l'esprit mutualiste. Faire en sorte que la mutualité ne se survive le cas échéant qu'au moyen de contraintes réglementaires, même traditionnelles, serait prendre le risque de laisser penser que l'esprit mutualiste n'est pas le seul intérêt en cause.

Divers tenants du monde mutualiste soulignent qu'une telle éventualité serait non seulement un contresens économique, et que la simple possibilité de démutualisation introduirait une fragilité permanente des structures mutualistes, qui pourraient être confrontées, à chaque assemblée générale, à une motion de démutualisation. Ils s'appuient sur le précédent britannique, où cette faculté aboutit à une mobilisation permanente du management pour le maintien du statut mutualiste, au détriment de la gestion quotidienne. Au demeurant, le verrou français à la démutualisation intéresse de plus en plus un certain nombre d'organisations mutualistes d'autres pays.

Comme une telle évolution aboutirait à un changement d'habitudes profondément ancrées, elle ne pourrait résulter que d'un large débat autour de la nécessité de faire évoluer ou non le droit de la mutualité sur ce point crucial. Il devrait en particulier porter sur la légitimité de l'appropriation sous forme de parts sociales ou d'actions par une génération particulière de sociétaires d'un actif net accumulé par les générations successives sous une forme individuellement non appropriable, et sur la palette des attributions possibles en cas de démutualisation.

2. Conjurer le risque de dérive " autocratique " du gouvernement d'entreprise mutualiste en mettant à niveau le droit des sociétés mutuelles avec le droit des sociétés et en le modernisant

Les sociétés anonymes et les entreprises nationalisées n'ont pas le monopole du risque de dérive autocratique souligné par le rapport Viénot. Les sociétés mutuelles n'en sont pas exemptes, plusieurs exemples viennent l'illustrer. Quoiqu'il en soit, attirer l'attention sur les problèmes de direction des sociétés mutuelles ne revient pas à porter un jugement de valeur sur la gravité relative du problème selon la nature juridique de la société.

Toute évolution, réglementaire ou statutaire, qui permettra d'améliorer la gestion des mutuelles et de leurs réalisations sociales, de la rendre plus rigoureuse, plus transparente et surtout moins aléatoire et dépendante de la décision de l'échelon politique suprême ou local paraît devoir être encouragée. Il en va ainsi de la modernisation du statut de l'élu dans un sens plus réaliste, qui permettrait de prendre en compte la nécessaire professionnalisation de l'échelon de contrôle de la structure managériale et d'éviter les tentations liées à la cohabitation du bénévolat et du pouvoir dans un monde non dépourvu d'argent et où sa liberté d'affectation est particulièrement grande 241( * ) .

Compte tenu du relâchement des liens entre mutuelles et sociétaires dans un contexte où les mutuelles d'assurance ont atteint la taille de compagnies d'assurance et de la substitution progressive chez les adhérents d'une attitude consumériste à un esprit mutualiste parfois un peu instrumentalisé, les moyens de relancer concrètement la flamme mutualiste en développant selon diverses modalités de nouveaux rapports plus transparents, plus participatifs, plus réactifs entre les mutuelles et les sociétaires pourraient également être trouvés et le monde mutualiste dans son ensemble s'en préoccupe 242( * ) .

La question de l'évolution des rapports des MSI et des MCM avec les intermédiaires (le plus souvent courtiers) et de l'abandon du principe de non commissionnement des salariés est plus délicate, dans la mesure où aller dans ce sens serait reconnaître que l'on est largement entré dans une logique commerciale et qu'il convient d'en tirer les conséquences statutaires.

Il paraît en tout cas nécessaire de mettre à niveau le droit des sociétés mutuelles par rapport au droit des sociétés, qui a évolué sans que les codes spécifiques régissant le droit des sociétés mutuelles le prennent en compte. Ainsi en va-t-il de la possibilité offerte depuis longtemps par le droit des sociétés commerciales de collégialiser le pouvoir dans les sociétés anonymes en adoptant la forme du directoire et du conseil de surveillance (ou du moins en généralisant la dissociation du rôle du président et du rôle de directeur général) où les structures de direction et de surveillance sont également plus nettement séparées et où le contrôle de la direction pourrait être mieux effectué dans l'intérêt des sociétaires. Le statut des sociétés mutuelles ainsi aligné sur le droit des sociétés, les décisions capitales, concernant par exemple les choix stratégiques de placements ou d'investissements qui ont pu amener bien des déboires, ne pourraient plus être le fait d'un seul homme en pratique. Le développement de postes d'administrateurs indépendants au sein des sociétés mutuelles en général, bien qu'il ne paraisse guère souhaité par les sociétés mutualistes, est aussi de nature à exercer un contrôle préventif profitable. Ces diverses évolutions sont considérées par certains comme allant dans le sens de l'esprit mutualiste, sauf l'hypothèse d'administrateur indépendant qui est assez unanimement rejetée.

Cette mise à niveau du droit des sociétés mutuelles par rapport au droit commun des sociétés n'interdit nullement de songer par ailleurs à une évolution propre du droit de la mutualité dans le sens d'une plus grande souplesse pour permettre par exemple l'émergence de groupes mutualistes, pourvu que l'esprit mutualiste de l'ensemble soit respecté, que les caractéristiques de sociétés de personnes à but non lucratif y prévalent encore, et que ces innovations juridiques ne soient pas seulement le moyen d'éviter les froides contraintes de l'actionnariat.

ANNEXES

Annexe 1 : Panorama des mutualités européennes et mutualités de l'association internationale de la mutualité (AIM).

Annexe 2 : Brève histoire du mutualisme.

Annexe 3 : Représentativité des grandes fédérations nationales de la mutualité.

Annexe 4 : Caractéristiques des différents groupements de l'économie sociale.

ANNEXE 1


PANORAMA DES MUTUALITÉS EUROPÉENNES ET MUTUALITÉS DE L'ASSOCIATION INTERNATIONALE DE LA MUTUALITÉ (AIM)243( * )



 

Activités

Structures

Belgique

Gestion du RO (*) maladie. Gestion du RC (*) des TI (*). Action sociale à travers ces filiales associatives.

Cinq unions nationales sous-divisées en fédérations régionales.

RFA

Gestion du RO maladie.

Cinq entités fédérales coiffant un millier d'organismes.

Danemark

Assurance-maladie complémenaire.

Une caisse complémentaire unique.

Espagne

Maladie, vieillesse, invalidité, décès, obsèques.

Deux types d'organismes :

- les mutuelles " de prévoyance sociale ",

- les mutuelles " accidents travail ".

France

Gestion des RO. Gestion des RC. Prévoyance et action sociale.

1 000 mutuelles importantes, plusieurs milliers de groupements.

Royaume-Uni

Assurance-maladie volontaire, complémentaire maladie, vieillesse, assurances populaires et vie.

Deux types d'organismes :

- les sociétés de secours mutuels,

- les sociétés de prévoyance.

Grèce

 

Aucune structure fédérative, les organismes sont particulièrement nombreux dans le secteur bancaire.

Italie

Assurance-maladie, assurance complémentaire, épargne et crédit.

Trois entités fédérales : FIMIV, Fédermutue, Fédération des mutuelles de commerçants - 1000 mutuelles dont 200 spécialisées.

Irlande

Assurance volontaire des " non assujettis ", alternative des assurances obligatoires.

Un seul organisme, le VHIB.

" Conseil d'assurance-maladie libre ".

Luxembourg

Assurance-maladie complémentaire.

L'essentiel de l'activité est réalisé par une caisse chirurgicale coexistant avec plusieurs dizaines de sociétés de base.

Pays-Bas

Gestion de l'assurance-maladie obligatoire et libre.

Deux organismes fédérateurs au plan national : VNZ et ZK.

Portugal

Complémentaire maladie, prévoyance, fourniture de médicaments et petit crédit.

Une union nationale, une cinquantaine de mutuelles de moyenne importance, plusieurs dizaines d'organismes de petit taille.

(*) RO : Régime obligatoire - RC : Régime complémentaire -

TI : Travailleurs indépendants.

Source : Association internationale de la mutualité, organismes adhérents.

Les mutualités de l'Association internationale

 

Organismes adhérents

Sociétaires

 
 
 

Nombre de chefs de famille (en milliers) (1987)

 

République fédérale d'Allemagne 19 003

 

Verband der Angestellten-Krankenkassen

11 892

 
 

Verband der Arbeiter-Ersatzkassen

563

 
 

Bundesverband der Betriebskrankenkassen

4 356

 
 

Bundesverband der Innunskrankenkassen

1 916

 
 

Bundesrverband der Landwirtschaft Krankenkassen

376

 

Belgique 5 263

 

Alliance nationale des mutualités chrétiennes

2 530

 
 

Union nationale des mutualités libérales

450

 
 

Union nationale des mutualités neutres

305

 
 

Union nationale des mutualités professionnelles

650

 
 

Union nationale des mutualités socialistes

1 328

 

Danemark 680

 

Danmark Fortsaettelsessygekasse

680

 

Espagne 8 500

 

Confederacion Nac. de Entidades de Prev. Social

1 500

 
 

Fed. Espanola de Mutuas Patronales de Acc. de Trab.

7 000

 

France 13 500

 

Fédération nationale de la mutualité française

11 861

 
 

Union des caisses centrales de la mutualité agricole

1 639

 

Irlande 378

 

Voluntary Health Insurance Board

378

 

Italie 350

 

Federmutue

350

 

Luxembourg 206

 

Conseil supérieur de la mutualité

206

 

Pays-Bas 4 710

 

Vereniging van Nederlandse Ziekenfondsen

4 350

 
 

Zilveren Kruis

360

 

Portugal 700

 

Uniao des Mutualidades Portuguesas

700

 

Royaume-Uni 1 457

 

British United Provident Association

1 457

 

Ensemble CEE 54 747

Ensemble AIM environ 60 000

dont Israël 1 030

Suisse 4 071

ANNEXE 2

DES SOCIÉTÉS DE SECOURS MUTUELLES AUX MUTUELLES DU CODE DE LA MUTUALITÉ244( * )

Cette annexe est présentée de manière complémentaire à la chronologie de la réglementation du chapitre introductif

Les principes mutualistes remontent à l'Antiquité. En France , les confréries, les corporations puis les compagnonnages sont à l'origine des sociétés de secours mutuel apparues dans quelques villes à la fin de l'Ancien Régime.

1821 - Naissance de la première union départementale mutualiste avec la création du grand conseil des sociétés de secours mutuel des Bouches-du-Rhône.

1850 - Le 15 juillet, la loi sur les sociétés de secours, tout en maintenant la liberté d'association, rend possible une forme de contrôle par l'Etat grâce à la " reconnaissance d'utilité publique ".

1852 - Napoléon III soumet les sociétés de secours mutuel au régime d'autorisation en distinguant trois catégories. Les sociétés autorisées sont reconnues d'utilité publique, placées sous tutelle et réglementées. Les sociétés approuvées ont des statuts soumis au préfet, des effectifs limités et un président nommé par l'Empereur lui-même ou le préfet du département. Elles ont des avantages fiscaux et financiers. Les sociétés libres, en nombre restreint et dépourvues de capacité juridique, ne peuvent recevoir de subventions. La mutualité impériale repose non pas sur une base professionnelle mais territoriale : les communes apportent un soutien matériel. Fin 1852, on comptait moins de 2 500 sociétés de secours mutuel, pour à peine 250 000 membres.

1870 - Près de 6 000 sociétés de secours mutuel couvrent en tout environ 800 000 sociétaires. Il s'agit en grande majorité de sociétés " approuvées ".

1881 - Première proposition de loi sur la mutualité déposée par Hippolyte Maze.

1883 - Le 1 er congrès national des sociétés de secours mutuel à Lyon. 110 000 sociétaires y sont représentés par 251 sociétés. La mutualité " approuvée " domine largement, laissant peu de place à la mutualité ouvrière.

1890 - Constitution de la Ligue nationale de la prévoyance et de la mutualité sous l'impulsion d'Hippolyte Maze.

1893 - Loi sur l'assistance médicale gratuite.

1898 - La loi du 1 er avril 1898 octroie à la mutualité un véritable statut. Elle autorise, sur simple déclaration, la création de sociétés libres. En donnant à la mutualité la possibilité d'organiser des unions et de créer des caisses autonomes, la loi lui ouvre notamment tous les champs d'activité de la protection sociale : assurance-vie, assurance invalidité, retraite, oeuvres sanitaires et sociales (dispensaires et pharmacies par exemple), allocations chômage.

1901 - 15 000 sociétés de secours mutuel protègent 2,6 millions d'adhérents.

1902 - Le 28 septembre, la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) voit le jour.

1904 - Première fête nationale de la mutualité sous le patronage du président de la République Emile Loubet.

1914 - Le ministère de l'Intérieur dénombre 4,5 millions de mutualistes.

1928 - Loi instituant les assurances sociales.

1930 - Loi définitive sur les assurances sociales. Malgré leurs réticences initiales, les mutualistes vont jouer un rôle de premier plan dans leur gestion.

1932 - Législation obligatoire pour les allocations familiales.

1939 - Le nombre de mutualistes dépasse les 8 millions.

1941 - La FNMF, qui n'est pas dissoute, se prononce curieusement en faveur de la Charte du travail en octobre 1941.

1944 - Le 15 mars, le Conseil national de la résistance adopte un programme préconisant un plan complet de Sécurité sociale.

1945 - A la Libération, le contexte politico-social est favorable aux organisations syndicales, au détriment du mouvement mutualiste. L'ordonnance du 22 février instaure les comités d'entreprise dans les sociétés de l'industrie et du commerce employant au moins 100 ouvriers (seuil abaissé à 50 dès 1946). On confie désormais à ces comités la gestion des oeuvres sociales. La Sécurité sociale est instituée par l'ordonnance du 4 octobre. Léon Heller, alors président de la FNMF, désapprouve ce système de protection sociale obligatoire.

L'ordonnance du 19 octobre 1945 abroge la Charte de la mutualité de 1898 et définit de nouvelles orientations aux " sociétés mutualistes ", en complémentarité avec la Sécurité sociale.

1946 - La loi du 26 avril étend la Sécurité sociale à l'ensemble de la population. Celle du 19 octobre sur la Fonction publique assujettit l'ensemble des fonctionnaires. De puissantes mutuelles vont alors se constituer : Fédération nationale des mutuelles de fonctionnaires et agents de l'Etat (FNMFAE), Mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN), la Mutuelle générale des PTT (MGPTT)...

1947 - La loi du 27 février fait participer la mutualité au fonctionnement de la Sécurité sociale en lui reconnaissant le droit de gérer certains de ses centres. La loi du 9 avril confie aux mutuelles de fonctionnaires la gestion de leur régime spécial de Sécurité sociale.

1948 - La FNMF tient son premier congrès national depuis 1939, sur le thème " La Mutualité a-t-elle un avenir ? ". Les mutualistes prennent conscience de leurs possibilités d'action en matière de complémentarité, de création d'oeuvres sociales et de prévention.

1955 - Publication du code de la mutualité.

1960 - Naissance de la Fédération nationale des mutuelles ouvrières (FNMO). Henri Raynaud, de la CGT, en devient le premier président.

1964 - La mutualité d'entreprise commence à se structurer au sein de la FNMF.

1967 - Le congrès de la FNMF en mai marque la reconnaissance définitive de la mutualité d'entreprise et du bien fondé d'une coopération avec le syndicalisme. Les quatre ordonnances Jeanneney du 21 août sur la Sécurité sociale majorent les cotisations, réduisent les prestations, suppriment les élections aux caisses primaires, séparent les régimes famille, maladie et vieillesse en trois caisses nationales autonomes. Mutualistes et syndicalistes manifestent ensemble contre cette réforme.

1968 - La FNMO devient la Fédération nationale des mutuelles de travailleurs (FNMT). Leurs adhérents peuvent rester membres de la FNMF (système de la double appartenance jusqu'en 1985).

1970 - Le congrès de la FNMF adopte une résolution en faveur d'une coopération active avec les syndicats.

1971 - La FNMT propose à la FNMF la réunification du mouvement mutualiste.

1972 - Création par la mutualité agricole d'une société d'assurance-vie, SORAVIE, qui deviendra Groupama Vie en 1992.

1976 - Signature d'un protocole d'accord pour l'union des deux fédérations.

1977 - La réunification est rejetée par une minorité de blocage.

1979/80 - Le gouvernement Barre, qui envisage la mise en place d'un " ticket modérateur d'ordre public " (non remboursable par la protection complémentaire maladie), doit y renoncer sous la pression des mutualistes.

1983/84 - Alors que le gouvernement augmente la part du ticket modérateur pour de nombreux médicaments et instaure un forfait hospitalier, les discussions entre la FNMF et la FNMT reprennent sur l'unité mutualiste. En vain.

1985 - La loi modernisant le code de la mutualité réduit les contrôles étatiques. Elle élargit le champ d'action sociale des mutuelles et les autorise à pratiquer, comme les institutions de prévoyance et de retraites, des opérations de prévoyance collective (contrats de groupe). La FNMT, qui réclamait le monopole des prestations complémentaires maladie pour les mutuelles, n'obtient pas gain de cause.

1986 - La FNMT devient la Fédération des mutuelles de France (FMF).

1989 - La loi du 31 décembre, entérinant un état de fait, légalise la concurrence entre mutuelles, institutions de prévoyance et compagnies d'assurance en matière de prévoyance. Jusque là, les compagnies d'assurance se servaient de paravents juridiques pour intervenir dans la prévoyance.

1990 - Création de deux nouvelles fédérations nationales : la Fédération nationale interprofessionnelle des mutuelles (FNIM) et le groupe Pasteur Mutualité.

1995 - Tandis que la FNMF soutient le " plan Juppé " portant réforme de la Sécurité sociale, la FMF s'y oppose.

ANNEXE 3

SOCIÉTÉS D'ASSURANCE VIE ET FONDS DE PENSION DANS LA PARTICIPATION AU CAPITAL DES ENTREPRISES AMÉRICAINES SUR LONGUE PÉRIODE

1) La Fédération nationale de la mutualité française (FNMF), ou Mutualité française

Fondée en 1902, la FNMF est la fédération nationale la plus importante, puisqu'elle regroupe environ 80 % des mutuelles régies par le code de la mutualité et protège 30 millions de personnes (15 millions d'adhérents et leurs ayants-droit) 245( * ) . La FNMF et ses mutuelles adhérentes sont animées par 100 000 élus et emploient 55 000 salariés.

La FNMF compte quelques " poids lourds " comme la MGEN, la MGPTT ou la MNEF (Mutuelle nationale des étudiants de France). Elle estime à près de 70 GF le poids économique global de ses 3 000 mutuelles adhérentes. Ce chiffre inclut :

- les cotisations perçues par les mutuelles au titre de la complémentaire santé ;

- les 1 500 établissements médicaux, paramédicaux et sociaux, créés et gérés sur tout le territoire par les mutualistes de la FNMF ;

- l'activité de ses caisses autonomes qui offrent des contrats collectifs ou individuels de prévoyance.

Les mutuelles de la FNMF mènent par ailleurs des actions de prévention (contre le sida, la toxicomanie, les maladies cardio-vasculaires...).

2) La Fédération des mutuelles de France (FMF)

Elle fédère 750 mutuelles et " affiche " 1,5 million d'adhérents, 4 millions de personnes protégées en assurance complémentaire maladie. 15 000 bénévoles et salariés animent les Mutuelles de France qui s'efforcent de répondre aux besoins sanitaires et sociaux des familles. Elle revendique 700 000 abonnés au magazine Viva, qui traduit la priorité qu'elle accorde à l'information, ainsi qu'à la prévention.

Elles sont présentes dans les entreprises privées et le secteur public (EDF-GDF, SNCF, fonctionnaires territoriaux et hospitaliers) mais aussi chez les commerçants, artisans et professions libérales.

Les Mutuelles de France disposent de plus de 300 établissements sanitaires et sociaux dans toute la France. Les Mutuelles de France s'impliquent dans des actions de prévention des risques professionnels, des risques majeurs ou encore dans la prise en charge de vaccins avant qu'ils ne deviennent obligatoires.

3) La Fédération nationale interprofessionnelle des mutuelles (FNIM) ou Nouvelle mutualité

Née en décembre 1989, la FNIM a regroupé une mutuelle interprofessionnelle de Saint-Omer et l'Union interprofessionnelle technique des sociétés d'étudiants mutualistes. Cette fédération revendique 1,3 million d'adhérents et 2,5 millions de personnes protégées.

La FNIM, porte-parole des mutuelles qui y adhèrent librement, oeuvre dans les domaines suivants :

- les aspects juridiques de la Mutualité ;

- l'évolution de la protection sociale ;

- le " bien-être " mutualiste.

La FNIM conseille aussi ses mutuelles en matière juridique, économique, fiscale, informatique...

4) Groupe Pasteur Mutualité

Fondé en 1990, il est constitué par le regroupement de trois unions, représentant une centaine de mutuelles:

- l'Association générale des médecins de France (AGMF),

- l'Union mutualiste des professions libérales (UMPL),

- et l'Union mutualiste interprofessionnelle de France (UMIFRA).
Il regroupe 200 000 ou 270 000 adhérents selon les sources et concourt à la protection de 425 000 personnes, et veut développer son activité dans toutes les catégories socio-professionnelles. Il propose notamment à ses adhérents des produits et des services en matière de prévoyance et de complémentaire maladie.

ANNEXE 4

CARACTÉRISTIQUES DES DIFFÉRENTS TYPES DE GROUPEMENTS EN ÉCONOMIE SOCIALE *

* Extrait du Guide de l'administrateur de la FNMF, 1996

Caractéristiques des différents groupements de l'économie sociale





 

Groupements mutualistes

Caisse de sécurité sociale

Associations

Coopératives

Sociétés d'assurance mutuelles

Caisses de mutualité sociale agricole

Mutuelles 1900

Statut

Code de la Mutualité (loi du 25 juillet 1985 et textes d'application)

Code de la Sécurité sociale

Loi du 1 er juillet 1901

Loi du 10 septembre 1947

Loi du 7 mai 1917

Code des assurances (notamment L. 322-26 1 et 5)

Code rural

Code des assurances et Code rural

Champ d'action

Couverture et prévention des risques sociaux liés à la personne. Actions sociales diverses dans le cadre de la prévoyance, de la solidarité et de l'entraide

Gestion du régime obligatoire d'assurances sociales

Toutes les activités humaines licites (sauf celles réservées à d'autres groupements par des textes particuliers, dont le Code de la Mutualité)

Amélioration du sort économique des adhérents (réduction des prix de revient ou des prix de vente de certains produits)

Assurance des personnes et des biens

Gestion de régimes obligatoires d'assurance des agriculteurs

Couverture des risques professionnels des agriculteurs

Participation financière des adhérents

Cotisation préalable librement déterminée dans les statuts du groupement

Cotisations fixées et recouvrées par voie d'autorité

Cotisations, mais aussi, éventuellement, prix des services ou prestations fournis

Paiement d'un prix

Cotisations

Cotisations fixées par voie d'autorité

Cotisations

Situation des excédents de recettes

Utilisation par les groupements à des objectifs sociaux

Affectation aux Caisses nationales d'assurance-maladie

Affectation des bénéfices au but, ou à l'oeuvre, poursuivi en commun

Répartition entre les membres, sous forme de ristourne

Répartition de principe entre les assurés

Intégration dans le budget annexe des prestations agricoles

Répartition entre les membres

Conditions de recrutement

Liberté d'adhésion. (1) Conditions d'admission fixées par les statuts. (1) cf. toutefois cas adhésion obligatoire art. L121.2 du code

Assujettissement obligatoire

Liberté d'adhésion. Conditions d'admission fixées par les statuts

Liberté d'adhésion. Certaines coopératives de consommation vendent même aux consommateurs non sociétaires

Liberté d'adhésion

Assujettissement obligatoire

Liberté d'adhésion

Ministères de rattachement

M tère de la Solidarité, de la Santé et de Protection sociale

M tère Solidarité, Santé & Protection sociale

Ministère de l'Intérieur

Ministère de l'Industrie

Ministère de l'Economie, des Finances et du Budget

Ministère de l'Agriculture

Ministère de l'Agriculture

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Tableau des assurances

Tableau 2 : Nombre d'entreprises d'assurance contrôlées par la CCA

Tableau 3 : La mutualité en 1995

Tableau 4 : Valeur ajoutée des assurances et des organismes financiers en valeur et en pourcentage du PIB (1959-1997)

Tableau 5 : L'intermédiation des financements offerts aux agents non financiers

Tableau 6 : Emissions brutes de valeurs immobilières

Tableau 7 : Evolution comparée des parts de marché mondial de l'assurance(1985-1996)

Tableau 8 : Structure régionale du marché mondial de l'assurance en 1995 et en 1996

Tableau 9 : Classement mondial de l'assurance en 1995

Tableau 10 : Classement européen de l'assurance en 1995

Tableau 11 : Nombre total d'entreprises d'assurance en 1995

Tableau 12 : Nombre d'entreprises d'assurance selon leur statut en 1993

Tableau 13 : Nombre et poids des mutuelles d'assurance en Europe

Tableau 14 : Place des principaux produits d'assurance dommage

Tableau 15 : Classement européen des compagnies d'assurance en 1995

Tableau 16 : Classement français des compagnies d'assurance 1996 avec reclassement (proforma). Montant des cotisations

Tableau 17 : Taux de croissance annuel moyen en valeur des primes d'assurance (1981-2002)

Tableau 18 : Densité et pénétration de l'assurance sur divers marchés en 1995

Tableau 19 : Densité et pénétration de l'assurance sur divers marchés

Tableau 20 : Croissance des cotisations et élasticité par rapport au PIB de 1985 à 1995

Hors numérotation Parts de marché français détenues par les sociétés d'assurance sous contrôle étranger en % (sans AGF, Athena et GAN) en 1996

Hors numérotation Parts de marché français détenues par les sociétés d'assurance sous contrôle étranger en % (y compris AGF, Athena, mais sans GAN) en 1996

Tableau 21 : Structure de l'offre d'assurance dans certains pays de l'Ocde

Tableau 22 : Classement des dix premiers groupes (1990-1998)

Tableau 23 : Mouvements dans l'assurance européenne en 1996-1997 : assureurs

Tableau 24 : Mouvements dans l'assurance européenne en 1996-1997 : réassureurs

Tableau 25 : Les principaux prédateurs du secteur de l'assurance en Europe

Tableau 26 : Les principales cibles cotées du secteur en Europe

Tableau 27 : Total des transactions bancassurance 1992-1997

Tableau 28 : Accords domestiques avec des banques et autres distributeurs

Tableau 29 : Transactions bancassurance : rachat d'assureurs par des banques 1992-1997

Tableau 30 : Les cinq premières transactions : rachat d'assureurs par des banques

Tableau 31 : Transactions bancassurance : rachat des banques par des assureurs 1992-1997

Tableau 32 : Les cinq premières transactions : rachat des banques par des assureurs

Tableau 33 : Efficacité relative des sociétés d'assurance-vie (1993)

Tableau 34 : Efficacité relative des sociétés de l'assurance non-vie (1993)

Tableau 35 : Résultats techniques des sociétés d'assurance (non-vie) 1975-1992

Tableau 36 : Comparaison des rentabilités financières des principaux groupes d'assurances européens

Tableau 37 : Total des capitaux propres et solvabilité effective nationale en 1993-1995

Tableau 38 : Résultats des sociétés vie, capitalisation et mixtes

Tableau 39 : Provisions techniques brutes

Tableau 40 : Montant des investissements

Tableau 41 : Difficile comparaison des notes attribuées par chaque agence

Tableau 42 : Analyse de segmentation du marché dommages américain

Tableau 43 : Divergence de prix pour un même produit d'assurance en Europe

Tableau 44 : Marchés financiers internationaux en 1996

Tableau 45 : La gestion institutionnelle en Europe. Placements financiers en milliards USD (en stock) pour 1994

Tableau 46 : Répartition des actifs en assurance non vie (fin 1995)

Tableau 47 : Répartition des actifs en assurance-vie (fin 1995)

Tableau 48 : Liste des contraintes réglementaires et comptables spécifiques à chaque pays pouvant fausser les règles de concurrence entre les différents fonds généraux européens

Tableau 49 : Fiscalité et parafiscalité comparées dans les principaux pays de l'Union européenne en 1996

Tableau 50 : Taxes et contributions (fiscalité des contrats)

Tableau 51 : Structure du financement des dépenses de santé aux Etats-Unis

Tableau 52 : Evolution de la prise de risque sur le marché de la santé aux Etats-Unis

Tableau 53 : Evolution du nombre des distributeurs d'assurance

Tableau 54 : Evolution des parts de marché selon le mode de distribution

Tableau 55 : Structures de coûts par ligne de produit et par type de réseau de distribution en 1996

Tableau 56 : Armes des différents types de réseaux de distribution d'assurance en France

Tableau 57 : Distributeurs d'assurances pour 10 000 habitants en Europe

Tableau 58 : Parts de marché des différents modes de distribution en Europe

Tableau 59 : Parts de marché des mutuelles sur plusieurs marchés nationaux

Tableau 60 : Parts de marché des mutuelles en dommages (1996)

Tableau 61 : Parts de marché des mutuelles en assurance-vie (1996)

Tableau 62 : Répartition par familles de métiers en 1996

Tableau 63 : Répartition des agents généraux sur le territoire

Tableau 64 : Proportion selon les métiers parmi les salariés des sociétés d'assurance ayant moins d'un an de présence de ceux ayant moins de 26 ans et moins de 30 ans

Tableau 65 : Caractéristiques de l'emploi selon la taille des sociétés d'assurance en 1996

Tableau 66 : Structure des effectifs du secteur des assurances 1985-1996

Tableau 67 : Evolution de la productivité individuelle dans les sociétés d'assurance

Tableau 68 : Rémunération annuelle brute théorique

Tableau 69 : Evolution des coûts salariaux supportés par les sociétés d'assurance de 1993 à 1998

Tableau 70 : Activité des groupements mutualistes de plus de 3 500 personnes protégées

Tableau 71 : Evolution des comptes de résultats de la mutualité (en MF)

Tableau 72 : Comptes cumulés de bilan au 31 décembre 1995

Tableau 73 : Evolution du nombre de groupements mutualistes.

LISTE DES GRAPHIQUES

Graphique 1 : Croissance réelle des primes par rapport à l'année précédente

Graphique 2 : Parts nationales du marché mondial de l'assurance en 1995

Graphique 3 : Répartition des entreprises d'assurance de l'EEE selon le type d'entreprise

Graphique 4 : Encours des réserves mathématiques d'assurance (RMA)

Graphique 5 : Densité de l'assurance par pays

Graphique 6 : Pénétration de l'assurance dans chaque pays

Graphique 7 : Ratio combiné en 1994 de l'assurance non-vie

Graphique 8 : Eléments du résultat dans l'assurance

Graphique 9 : Evolution de la rentabilité globale de l'assurance française 1975-1996

Graphique 10 : Evolution de la rentabilité globale de l'assurance en Grande-Bretagne 1975-1996

Graphique 11 : Evolution de la rentabilité globale de l'assurance allemande 1975-1996

Graphique 12 : Evolution de la rentabilité globale de l'assurance italienne 1975-1996

Graphique 13 : Comparaison des résultats globaux de l'assurance après intégration de la volatilité

Graphique 14 : Divergences importantes entre les notes attribuées par chacune des agences

Graphique 15 : Notes A. M. Best de 1987 à 1994

Graphique 16 : Notes standard & Poor's de 1984 à 1994

Graphique 17 : Evolution de la notation des assureurs devenus insolvables

Graphique 18 : Augmentation mondiale du nombre de faillites dans l'assurance

Graphique 19 : Investissement total des grands marchés européens d'assurance

Graphique 20 : Répartition de l'investissement total des grands marchés d'assurance en 1996

Graphique 21 : Evolution de la structure du financement des dépenses de santé aux Usa

Graphique 22 : Evolution de la place de l'assurance privée dans le financement de la santé aux Etats-Unis depuis la fin de la seconde guerre mondiale

Graphique 23 : Evolution récente de la structure de financement des dépenses de santé aux Etats-Unis en volume de primes

Graphique 24 : Architecture du réseau médical d'assistance santé Axa

Graphique 25 : Les canaux de distribution de l'assurance en France. 1994

Graphique 26 : Coûts de distribution par type de réseau en assurance-vie-épargne

Graphique 27 : Positionnement prix des réseaux de distribution en assurance automobile

Graphique 28 : Distribution par vente directe en 1994 en Europe

Graphique 29 : Répartition du personnel en % de l'effectif total salarié (1996)

Graphique 30 : Répartition du personnel administratif des sociétés d'assurance entre l'Ile-de-France et la province

Graphique 31 : Evolution de la répartition de l'effectif total salarié selon le sexe dans les sociétés d'assurance

Graphique 32 : Pyramide des âges. Ensemble du personnel salarié des sociétés d'assurances

Graphique 33 : Evolution de l'emploi dans les assurances de 1984 à 1997

Graphique 34 : Evolution de l'effectif salarié des sociétés d'assurance depuis 1991

Graphique 35 : Evolution du nombre de salariés en Europe et évolution de l'emploi salarié global entre 1989 et 1992

Graphique 36 : Emploi salarié des sociétés d'assurance en Europe

Graphique 37 : Evolution de l'emploi des sociétés d'assurance en Europe 1990-1993

Graphique 38 : Prévisions de l'emploi à l'horizon 2002

Graphique 39 : Encaissement annuel par salarié dans les compagnies européennes

Graphique 40 : Structure des dépenses de formation continue en 1996 dans les sociétés d'assurance

Graphique 41 : Evolution de la formation continue des salariés des sociétés d'assurance selon leur taille (1991-1996)

Graphique 42 : Evolution des pourcentages de participation par branche d'activité à la formation continue

Graphique 43 : Evolution de la durée moyenne des actions de formation par dispositif de formation dans les sociétés d'assurance

Graphique 44 : Durée du travail dans les compagnies d'assurance en Europe en 1993

Graphique 45 : Evolution comparée du coût salarial dans les compagnies d'assurance en Europe (déflaté)

Graphique 46 : Comparaison de l'évolution du coût salarial et de l'encaissement par salarié entre 1990 et 1991 dans les compagnies d'assurance

Graphique 47 : Coût salarial et emploi dans les compagnies d'assurance en 1993.

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ANNEXE 3 : Avis n° 98-A-03 du Conseil de la concurrence concernant la situation de la concurrence dans le secteur de l'assurance

ANNEXE 4 : Rapport du Commissariat Général du Plan sur la situation et les perspectives de l'assurance française

ANNEXE 3

AVIS N° 98-A-03 DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE CONCERNANT LA SITUATION DE LA CONCURRENCE DANS LE SECTEUR DE L'ASSURANCE

A 228

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Avis n° 98-A-03

du 24 février 1998

relatif à une demande d'avis de la Commission des finances du Sénat

concernant la situation de la concurrence dans le secteur de l'assurance

Le Conseil de la concurrence (formation plénière),

Vu la lettre enregistrée le 27 octobre 1997 sous le numéro A 228, par laquelle la Commission des finances du Sénat, par son président, a saisi le Conseil de la concurrence, sur le fondement de l'article 5 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, d'une demande d'avis sur l'état de la concurrence dans le secteur de l'assurance ;

Vu le Traité du 25 mars 1957 modifié, instituant la Communauté européenne ;

Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifiée, relative à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 86-1309 du 29 septembre 1986 modifié, pris pour son application ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des assurances  ;

Vu le code de la mutualité ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code rural  ;

Vu la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 modifiée relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit ;

Vu la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ;

Les rapporteurs, le rapporteur général et le commissaire du Gouvernement entendus, le secrétaire général de la Commission de contrôle des assurances, les représentants de la Fédération française des sociétés d'assurance et de la Fédération nationale de la mutualité française entendus conformément aux dispositions de l'article 25 de l'ordonnance précitée ;

Est d'avis de répondre à la demande présentée dans le sens des observations qui suivent :

La Commission des finances du Sénat a saisi le Conseil de la concurrence, sur le fondement de l'article 5 de l'ordonnance du 1 er décembre 1986, d'une demande d'avis sur l'état de la concurrence dans le secteur des assurances en France.

La Commission des finances, qui a constitué un groupe de travail sur la situation et les perspectives du secteur des assurances, a souhaité recueillir l'avis du Conseil sur les conséquences, au regard des règles de la concurrence, d'une part, des différences statutaires et des différences de traitement fiscal et comptable existant entre les acteurs de ce secteur - tenant notamment à la non-transposition des troisièmes directives européennes d'assurance dans le domaine des mutuelles - et, d'autre part, de l'existence de plusieurs types de circuits de distribution des produits d'assurance (notamment agents généraux d'assurances, courtiers, réseaux de distribution particuliers comme La Poste et le Trésor public). L'avis du Conseil de la concurrence a également été demandé sur les conséquences sur la concurrence des différences fiscales et réglementaires existant en matière d'assurance à l'intérieur de la Communauté européenne, dans la perspective du passage à l'euro.

III. LES DIFFERENCES D'ORGANISATION ET DE FONCTIONNEMENT EXISTANT ENTRE LES ACTEURS DU SECTEUR DE L'ASSURANCE-CONSTAT ET EFFETS SUR LA CONCURRENCE

Le premier thème soumis à l'examen du Conseil porte sur les différences statutaires, fiscales et comptables existant entre les acteurs du secteur de l'assurance. La Commission des finances du Sénat a demandé au Conseil d'évaluer l'impact de ces différences sur les conditions de la concurrence et d'examiner les effets de la non-transposition actuelle des " troisièmes directives " en matière d'assurance en ce qui concerne les mutuelles du code de la mutualité.

Il est précisé que les mécanismes de la coassurance et de la réassurance ne seront pas abordés dans le cadre du présent avis.

A. CARACTERISTIQUES PRINCIPALES DU SECTEUR DE L'ASSURANCE

1. Définition de l'assurance

L'assurance est généralement définie comme l'opération par laquelle une personne, l'assureur, s'engage à exécuter une prestation au profit d'une autre personne, l'assuré, en cas de réalisation d'un événement aléatoire, le risque, en contrepartie du paiement d'une somme, la prime ou cotisation.

Deux caractéristiques principales s'attachent à l'opération d'assurance :

- d'une part, elle n'est pas isolée : elle ne peut exister que parce qu'elle est incluse dans un ensemble d'opérations de même nature, l'assureur ne pouvant exécuter ses prestations que parce qu'est opérée une mutualisation des risques par répartition de leur charge sur l'ensemble des assurés ;

- d'autre part, l'opération d'assurance se traduit par la formation d'un contrat, dans lequel, face à un risque donné, le cocontractant de l'assureur obtient une garantie en versant une prime.

2. Le poids économique du secteur de l'assurance en France

Selon les chiffres publiés par la Fédération française des sociétés d'assurance (F.F.S.A.), le secteur de l'assurance représentait en 1996 un chiffre d'affaires total (cotisations collectées) de 775 milliards de francs, en progression de 6,7 % par rapport à 1995 (717,4 milliards de francs). Depuis le début des années 1980, l'assurance française connaît une forte croissance (progression moyenne de 12,4 % par an sur la période 1984-1994), due notamment à l'assurance vie. Le chiffre d'affaires mondial (total des cotisations collectées par les sociétés d'assurance opérant en France et par les filiales et succursales de sociétés françaises opérant à l'étranger) dépasse 1 000 milliards de francs, plaçant l'assurance française au quatrième rang mondial (6,1 % des cotisations collectées dans le monde), après le Japon (29,7 %), les Etats-Unis (29,1 %) et l'Allemagne (7,2 %). L'encours des placements des sociétés d'assurance s'élevait en 1996 à 3 089 milliards de francs (valeur d'acquisition), en augmentation de 16,4 % par rapport à 1995.

L'assurance vie représente actuellement près des 2/3 du total des cotisations collectées (493 milliards de francs en 1996), alors que jusqu'à la fin des années 1980, le chiffre d'affaires de l'assurance se répartissait de façon à peu près égale entre l'assurance vie et l'assurance de dommages. La France se situe aujourd'hui au troisième rang mondial pour la collecte de cotisations d'assurance vie, derrière le Japon et les Etats-Unis. Le rythme de progression constatée au cours de la période récente devrait se ralentir dans les prochaines années en liaison avec l'évolution de la fiscalité de ce type de produit.

Près de la moitié du chiffre d'affaires des assurances de dommages est constitué par les cotisations de l'assurance automobile (46,7 % en 1996). Les contrats multirisques habitation viennent en deuxième position, représentant en 1996 14,6 % du total des cotisations collectées en assurance de dommages.

A la fin de 1996, on recensait en France 570 entreprises d'assurance relevant du code des assurances (dont 107 succursales établies en France de sociétés étrangères) : 148 opérant en assurance vie et 422 en assurance de dommages. La concentration du secteur, qui se poursuit, est comparable en France à ce qu'elle est dans la plupart des autres pays de l'Espace économique européen. Les dix plus grands groupes d'assurance réalisaient en 1996 58,4 % du chiffre d'affaires total du secteur. Le nouvel ensemble né de la fusion entre les sociétés U.A.P. et AXA est le plus grand groupe français (près de 300 milliards de francs de chiffre d'affaires). La Caisse nationale de prévoyance (C.N.P.), deuxième assureur français, est le premier groupe d'assurance vie (93 milliards de francs de chiffre d'affaires en assurance vie en 1996). Deux banques intervenant dans le domaine de l'assurance (le Crédit agricole avec ses filiales d'assurance Prédica et Pacifica et la B.N.P. avec Natio-Vie) figurent dans la liste des dix plus grands groupes d'assurance.

Le secteur de l'assurance emploie en France environ 250 000 personnes relevant de plusieurs conventions collectives différentes. Le personnel salarié des sociétés d'assurance, représentait 135 000 personnes en 1996 et les intermédiaires d'assurance (agents généraux, courtiers, experts techniques et leur personnel salarié) environ 75 000 personnes. Les autres emplois du secteur de l'assurance sont générés par l'activité d'assurance des réseaux bancaires, des mutuelles et des institutions de prévoyance.

3. Les produits d'assurance

En raison de la multiplicité des risques assurables, liée à l'évolution technologique et au besoin accru de sécurité, il existe une grande variété de produits et de contrats proposés. Ils répondent aux besoins de couverture des risques exprimés à la fois par les particuliers (risques de masse) et par les professionnels (risques industriels ou grands risques).

Les directives européennes distinguent deux branches principales au sein du secteur de l'assurance : la branche vie (assurances vie, décès, bons de capitalisation, fonds de retraite) et la branche non-vie. Selon une classification habituelle de la profession, les produits commercialisés relèvent soit de l'assurance de personnes soit de l'assurance de dommages.

Les assurances de personnes regroupent plusieurs catégories d'opérations :

- l'assurance en cas de vie, permettant la constitution d'une épargne et le versement de celle-ci sous forme de capital ou de rente si l'assuré est en vie au terme du contrat ;

- l'assurance en cas de décès, garantissant le versement d'un capital en cas de décès avant le terme du contrat, quelle qu'en soit la cause ;

- les assurances mixtes, offrant à la fois et de façon alternative une garantie en cas de vie et une garantie en cas de décès ;

- les bons de capitalisation, opération d'épargne-assurance garantissant le versement d'un capital déterminé à l'échéance du contrat ;

- les assurances de dommages corporels, regroupant plusieurs types de garanties : le remboursement des frais de soins en complément des régimes obligatoires d'assurance maladie, le versement d'un capital en cas de décès par accident, d'indemnités en cas d'incapacité de travail ou d'invalidité.

Les assurances de personnes peuvent donner lieu à des contrats d'assurance de groupe, souscrits par des chefs d'entreprise, des associations ou des établissements de crédit au profit de personnes qui viendront ultérieurement adhérer à la convention (article L.140-1 du code des assurances).

Les assurances de dommages se subdivisent en deux catégories : les assurances de biens, qui ont pour objet la garantie d'un risque relatif à un élément d'actif patrimonial, et les assurances de responsabilité, qui couvrent les dettes liées à l'obligation de réparer les dommages causés à autrui, y compris éventuellement les dommages corporels.

Les principales assurances de dommages sont les suivantes :

- l'assurance des biens des particuliers, donnant lieu notamment aux contrats multirisques habitation ;

- l'assurance des biens professionnels, concernant les risques des entreprises industrielles, des agriculteurs, commerçants, artisans et prestataires de services, des collectivités locales, etc. ;

- l'assurance construction ;

- l'assurance automobile ;

- l'assurance transports (assurances ferroviaire, maritime, fluviale, aérienne, spatiale, marchandises transportées) ;

- l'assurance de responsabilité civile ;

- l'assurance crédit ;

- l'assurance de protection juridique.

Certaines assurances, généralement des assurances de responsabilité, sont rendues obligatoires par un texte législatif ou réglementaire, le plus souvent dans le souci de protéger les victimes contre l'éventuelle insolvabilité des auteurs des dommages. On dénombre actuellement près d'une centaine d'assurances obligatoires (responsabilité civile automobile, responsabilité civile construction, transport de matières dangereuses, garantie des catastrophes naturelles, responsabilité de certains professionnels, etc).

B. LE CONSTAT DES DIFFÉRENCES

1. Les différences statutaires

Peuvent effectuer des opérations d'assurance, d'une part, les entreprises d'assurance régies par le code des assurances et d'autre part, certains organismes intervenant dans le domaine de la protection sociale complémentaire : les mutuelles régies par le code de la mutualité et les institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale ou le code rural.

a) Les entreprises d'assurance relevant du code des assurances

Le code des assurances impose aux entreprises d'assurance françaises d'être constituées sous forme soit de société anonyme, soit de société d'assurance mutuelle (article L.322-1).

Les sociétés anonymes d'assurance sont soumises pour l'essentiel, tant en ce qui concerne leur constitution que leur fonctionnement, au droit commun des sociétés commerciales. Certaines règles spécifiques s'appliquent toutefois à ces sociétés : le montant du capital social doit être au moins égal, selon les branches pratiquées, à 5 millions ou 3 millions de francs ; elles ne peuvent commencer leurs opérations qu'après avoir obtenu un agrément administratif ; les opérations de prises ou de cessions de participation d'une certaine importance doivent faire l'objet d'une déclaration auprès du ministre de l'économie et des finances préalablement à leur réalisation ; les transferts de portefeuille d'une entreprise d'assurance à une autre doivent être autorisés par l'autorité administrative ; des procédures spécifiques d'alerte, de redressement et de sauvegarde sont prévues, qui se superposent aux procédures de prévention et de redressement judiciaire de droit commun.

Les sociétés d'assurance mutuelles se distinguent des sociétés anonymes, non par la mutualisation des risques, qui est inhérente à toute opération d'assurance, mais par le fait que les assurés, regroupés sur une base socio-professionnelle afin d'élaborer leur propre assurance, sont les seuls détenteurs de l'entreprise. L'adhérent est à la fois sociétaire et assuré.

Les sociétés d'assurance mutuelles, qui interviennent principalement dans le domaine de l'assurance de dommages, sont des sociétés de personnes qui, de par la loi, ont un objet non commercial et fonctionnent sans capital social (article L.322-26-1 du code des assurances). Le capital est remplacé par un fonds d'établissement constitué par les apports des sociétaires ou par emprunt, et d'un montant au moins égal, selon les opérations pratiquées, à 2,5 millions ou 1,5 million de francs. Les statuts des sociétés d'assurance mutuelles peuvent prévoir soit la distribution des excédents aux sociétaires, soit la mise en réserve de ces excédents qui viennent alors alimenter les fonds propres.

En cas de dissolution, l'excédent de l'actif net sur le passif ne peut être dévolu qu'à d'autres sociétés d'assurance mutuelles ou à des associations reconnues d'utilité publique (article L.322-26-5 du code des assurances). Cette disposition a pour effet de rendre pratiquement impossible la transformation d'une société d'assurance mutuelle en société anonyme, les excédents non distribués ne pouvant être utilisés à la constitution du capital d'une telle société. En revanche, il n'est pas interdit à une société d'assurance mutuelle de céder son portefeuille de contrats à une société anonyme.

Jusqu'à une date récente, les sociétés d'assurance mutuelles étaient handicapées dans leur développement par les difficultés où elles se trouvaient d'augmenter leurs fonds propres (absence de capital, taxation des excédents intégrés au fonds d'établissement, possibilités d'emprunt limitées, notamment pour la constitution d'un fonds social complémentaire). La loi n° 96-314 du 12 avril 1996 (article 8, codifié aux articles L.322-2-1 et L.322-26-2-2 du code des assurances) les a autorisées à émettre, outre des titres participatifs, des emprunts obligataires et des titres subordonnés remboursables, éventuellement par appel public à l'épargne.

Il existe plusieurs formes particulières de sociétés d'assurance mutuelles : les sociétés mutuelles d'assurance, qui ont un caractère régional ou professionnel, ne peuvent avoir recours à des intermédiaires pour vendre leurs contrats, doivent répartir l'intégralité des excédents entre les sociétaires et ne peuvent pratiquer les activités d'assurance vie ; les sociétés à forme tontinière et les sociétés ou caisses d'assurance et de réassurance mutuelles agricoles (article L.322-26-4 du code des assurances).

Toutes les entreprises d'assurance relevant du code des assurances, ayant leur siège social en France, sont soumises au contrôle de la Commission de contrôle des assurances, autorité administrative indépendante instituée par la loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989. En application des dispositions des directives européennes d'assurance (articles 8 des directives n° s 73/239 et 79/267 246( * ) , modifiés par les directives n° s 92/49 et 92/96) 247( * ) , elles doivent limiter leur objet social à l'activité d'assurance et aux opérations qui en découlent directement, à l'exclusion de toute autre activité commerciale (principe de spécialisation). Lors de leur demande d'agrément, elles doivent préciser la ou les branches d'assurance qu'elles souhaitent exercer. Elles ne peuvent être agréées à la fois pour effectuer des opérations relevant de l'assurance vie et des opérations relevant de l'assurance non-vie (article L.321-1 du code des assurances).

b) Les organismes spécifiques de la protection sociale complémentaire

Ces organismes, mutuelles du code de la mutualité et institutions de prévoyance, ne sont pas soumis aux dispositions du code des assurances, mais effectuent des opérations qui entrent dans le champ d'application des directives européennes d'assurance. Ils interviennent dans le domaine de la protection sociale complémentaire. Celle-ci peut être définie comme la couverture des risques sociaux liés à la personne (maladie, maternité, incapacité, invalidité, dépendance, décès) s'ajoutant à celle organisée par le régime de base obligatoire de sécurité sociale.

Les pouvoirs de contrôle sur ces organismes sont exercés par une autorité spécifique, la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance, créée par la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 dite loi Evin.

- les mutuelles du code de la mutualité

Les mutuelles relevant du code de la mutualité sont des groupements à but non lucratif qui se proposent de mener, dans l'intérêt de leurs membres et principalement au moyen des cotisations de ceux-ci, une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide (article L.111-1 du code de la mutualité). Ce sont des organismes sans capital social et qui ne peuvent distribuer à leurs membres leurs excédents éventuels.

Le remboursement complémentaire à celui du régime d'assurance maladie obligatoire constitue leur activité principale (environ 70 % du chiffre d'affaires total des mutuelles). Les mutuelles qui proposent en outre la couverture des risques vieillesse, accidents, invalidité, décès ainsi que le service de prestations au-delà d'un an doivent, sauf si ces activités restent accessoires, constituer en leur sein une caisse autonome ou transférer à la Caisse nationale de prévoyance la gestion de ces risques (article L.321-1 du code de la mutualité). Les caisses autonomes permettent d'isoler la gestion des risques longs, mais n'ont pas de personnalité juridique distincte de celle de la mutuelle fondatrice (article L.321-3 du code de la mutualité). Depuis 1985, les mutuelles sont autorisées à effectuer des opérations de prévoyance collective.

Certaines mutuelles proposent également des services associés à la couverture des risques (" réalisations sanitaires et sociales " ou " oeuvres sociales ") : elles gèrent des établissements de soins, des centres dentaires et d'optique, des pharmacies, des maisons de retraite, etc. Ces établissements n'ont pas de personnalité juridique propre (article L.411-2 du code de la mutualité). Dans certains cas, les services proposés n'ont qu'un rapport lointain avec " la prévention des risques sociaux liés à la personne et la réparation de leurs conséquences ", objet principal de l'activité mutualiste, mais se rattachent plutôt à l'objectif très large de " développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs membres et l'amélioration de leurs conditions de vie " également poursuivi par les mutuelles (article L.111-1 du code de la mutualité) : centres de vacances et de loisirs, cautionnement de prêts, tarifs réduits sur des produits culturels, etc. Grâce à des accords passés avec des sociétés d'assurance mutuelles, certaines mutuelles du code de la mutualité laissent aussi entendre à leurs adhérents qu'elles sont en mesure de les faire bénéficier de conditions avantageuses sur des produits d'assurance de dommages (en particulier assurance automobile et garantie multirisques habitation).

Par leur inspiration et leurs modalités d'organisation, les mutuelles du code de la mutualité se rapprochent des sociétés d'assurance mutuelles. Ce qui les distingue de ces dernières, c'est, d'une part, leur champ d'intervention plus limité et, d'autre part, le fait qu'elles sont fondées sur le principe d'égalité de traitement des adhérents (article L.121-2 du code de la mutualité). Les cotisations ne sont pas fixées en fonction du risque mais peuvent l'être éventuellement en fonction du revenu des membres.

Les mutuelles les plus importantes sont celles qui regroupent, à l'échelon national, des fonctionnaires d'un même secteur (Mutuelle générale de l'éducation nationale, Mutuelle générale des P.T.T., Mutuelle nationale des hospitaliers et des personnels de santé, Mutuelle générale du personnel des collectivités locales, etc.). D'autres sont constituées à l'échelon local et peuvent se regrouper dans des unions départementales. Le mouvement mutualiste est également important dans le secteur privé, avec des mutuelles d'entreprises, regroupant les salariés appartenant à une même entreprise, ou des mutuelles constituées sur une base professionnelle ou interprofessionnelle. Le nombre total des mutuelles est supérieur à 6 000, mais tend à diminuer en raison d'une tendance de plus en plus marquée au regroupement des petites mutuelles.

Il est important de noter également que pour des raisons d'ordre historique (existence d'un mouvement mutualiste puissant au moment de la création de la sécurité sociale en 1945), certains groupements mutualistes participent à la gestion des régimes obligatoires d'assurance maladie. Les mutuelles d'une certaine importance peuvent être habilitées en qualité soit de correspondants locaux, soit de sections locales, pour la gestion du régime général (article L.211-3 et L.211-4 du code de la sécurité sociale). S'agissant du régime d'assurance maladie obligatoire des exploitants agricoles, les articles 1106-1 et suivants du code rural prévoient que les exploitants agricoles peuvent être assurés, à leur choix, soit par les caisses de la mutualité sociale agricole, soit par des mutuelles du code de la mutualité ou des institutions de prévoyance, soit par tous autres organismes d'assurance. Pour la gestion du régime obligatoire des travailleurs non salariés non agricoles, les caisses mutuelles régionales confient le soin d'assurer pour leur compte l'encaissement des cotisations et le service des prestations soit à des organismes régis par le code de la mutualité, soit à des organismes régis par le code des assurances, conventionnés à cet effet (articles L.611-1 et R.611-124 et suivants du code de la sécurité sociale). Enfin, dans le cadre des régimes spéciaux de sécurité sociale des fonctionnaires et des étudiants, le service des prestations est obligatoirement assuré par des mutuelles du code de la mutualité, qui créent à cette fin des sections locales (articles L.712-6 et L.381-9 du code de la sécurité sociale). Ces sections constituent des services de la mutuelle, sans autonomie juridique mais dont la comptabilité doit être séparée de celle des autres activités de la mutuelle.

Les mutuelles chargées de la gestion de régimes obligatoires d'assurance maladie reçoivent, pour cette activité, des remises de gestion versées par les caisses primaires d'assurance maladie (articles R.252-11 et R.712-1 du code de la sécurité sociale). Pour leurs autres activités, et notamment leur activité d'assurance, les mutuelles peuvent bénéficier de subventions. D'une part, en effet, il existe un fonds national de solidarité et d'action mutualistes, qui, notamment, " contribue aux dépenses de promotion et d'éducation mutualistes ainsi que, sous forme de prêts, aux réalisations sociales mutualistes " (article L.522-1 du code de la mutualité). D'autre part, en vertu de l'article R.523-2 du code de la mutualité, l'Etat peut accorder aux mutuelles de fonctionnaires et d'agents de l'Etat et des établissements publics nationaux " des subventions destinées notamment à développer leur action sociale et, dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la mutualité et du ministre chargé des finances, à participer à la couverture des risques sociaux assurée par ces mutuelles ". D'après les informations recueillies, ces subventions peuvent représenter pour les mutuelles concernées jusqu'à 25 % des cotisations versées par les adhérents. Par ailleurs, les mutuelles de fonctionnaires bénéficient de facilités pour l'exercice de leur activité (locaux, matériel de bureau parfois prêtés par l'administration), les plus grandes d'entre elles employant, en outre, dans une mesure non négligeable, des personnels fonctionnaires détachés ou mis à disposition.

Les mutuelles d'entreprises bénéficient aussi parfois de versements patronaux, mais ces subventions ont une nature différente de celles des mutuelles des fonctionnaires car il s'agit alors de la prise en charge partielle par les employeurs des cotisations de leurs salariés à des régimes complémentaires rendus obligatoires par accord d'entreprise ou convention collective. Cette prise en charge a fiscalement le caractère d'un complément de salaire et entre dans l'assiette des cotisations sociales dues par l'employeur.

- les institutions de prévoyance

Il existe trois grandes catégories d'institutions à gestion paritaire régies par le code de la sécurité sociale (livre IX) ou - pour celles qui interviennent dans le domaine rural - par le code rural (article 1050).

- les institutions de retraite complémentaire, qui gèrent des régimes de retraite complémentaire obligatoire par répartition dont la plupart font l'objet d'une compensation interprofessionnelle au sein de l'A.G.I.R.C. ou de l'A.R.R.C.O.,

- les institutions de retraite supplémentaire - antérieurement " régimes surcomplémentaires " -, qui gèrent des régimes collectifs de retraite par capitalisation, notamment dans les entreprises publiques et dans le secteur pétrolier (on en dénombrait 125 au 31 décembre 1995) ;

- les institutions de prévoyance (87 au 31 décembre 1995), qui effectuent essentiellement des opérations de prévoyance collective (couverture complémentaire maladie, risques maternité, invalidité, décès), mais qui peuvent intervenir aussi dans le domaine de l'assurance vie.

Seuls ces deux derniers types d'institution réalisent des opérations entrant dans le champ de l'assurance et sont soumises au contrôle de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance. Toutefois, le contrôle de la Commission s'exerce également sur les quelques institutions de retraite complémentaire ne faisant pas l'objet d'une compensation interprofessionnelle.

Les institutions de prévoyance sont définies comme des personnes morales de droit privé ayant un but non lucratif, administrées paritairement par des membres adhérents - des entreprises - et des membres participants - salariés de ces entreprises (articles L.931-1 et L.931-3 du code de la sécurité sociale).

Elles sont constituées sur la base d'une convention collective, d'un accord d'entreprise ou d'un accord entre des membres adhérents et des membres participants. Elles gèrent le plus souvent des contrats de groupe, souscrits par des entreprises au profit de leurs salariés. Selon ce qui est prévu dans le règlement de l'institution ou le contrat d'adhésion, l'affiliation des salariés à l'institution peut être libre ou obligatoire. Il existe aussi des possibilités d'adhésion individuelle de salariés pour la couverture des mêmes risques que ceux qui sont couverts dans le cadre des opérations collectives.

Pour pouvoir exercer leur activité, les institutions de prévoyance doivent avoir obtenu un agrément délivré par le ministre chargé de la sécurité sociale. Cet agrément est subordonné notamment à la constitution préalable d'un fonds d'établissement d'un montant minimal, selon les activités pratiquées, de 2,5 millions de francs (principalement assurance vie et capitalisation) ou de 1,5 million de francs (maladie, accident, chômage). Depuis que les directives européennes ont été transposées en ce qui les concerne, les institutions de prévoyance sont soumises, comme les entreprises relevant du code des assurances, au principe de spécialisation.

2. Les règles prudentielles et comptables

a) Les entreprises d'assurance relevant du code des assurances

Le livre III du code des assurances définit un ensemble de normes prudentielles et comptables que doivent respecter les entreprises d'assurance, destinées à faire en sorte que celles-ci soient toujours en mesure de tenir leurs engagements envers les assurés et à contrôler la situation réelle des entreprises.

C'est ainsi que doivent figurer au bilan des entreprises d'assurance des provisions techniques suffisantes pour le règlement intégral de leurs engagements vis-à-vis des assurés. Les principales provisions sont, en assurance de dommages, la provision pour sinistres à payer et la provision pour risques en cours et, en assurance sur la vie, la provision mathématique (différence entre les valeurs actuelles des engagements respectivement pris par l'assureur et par les assurés).

Ces provisions techniques et les autres engagements réglementés doivent, à toute époque, être couverts par des actifs équivalents (article R.332-1 du code des assurances). Le choix des placements doit obéir à des règles de sécurité, de dispersion et de liquidité.

Les entreprises d'assurance doivent en outre disposer d'une marge de solvabilité suffisante, destinée à protéger les assurés contre les aléas de l'activité d'assurance. Cette marge est exprimée en montant de fonds propres et éléments assimilés (réserves, bénéfices reportés, titres ou emprunts subordonnés, etc.). Pour les entreprises d'assurance de dommages, le montant minimal de la marge de solvabilité est égal au plus élevé des deux termes suivants : montant annuel des cotisations, charge moyenne annuelle des sinistres au cours des trois derniers exercices. En assurance sur la vie, il doit notamment représenter 4 % des provisions mathématiques.

Dans son rapport 1990-1992, la Commission de contrôle des assurances notait que " les entreprises d'assurance prises dans leur ensemble satisfont largement aux exigences de solvabilité : dans la branche I.A.R.D., la marge réelle de solvabilité des sociétés est couramment comprise entre deux et cinq fois le minimum ; en assurance vie et capitalisation, il y a également excédent de marge, quoique de moindre ampleur en valeur relative ".

Depuis le 1 er janvier 1995, en application de la directive n° 91-674 du 19 décembre 1991, introduite en droit français par le décret n° 94-481 du 8 juin 1994, les entreprises d'assurance doivent se conformer à un nouveau plan comptable particulier à l'assurance et à la capitalisation, prévoyant notamment une nomenclature comptable spécifique (29 catégories d'opérations définies - article A.344-2 du code des assurances).

b) Les institutions de prévoyance

La loi n° 94-678 du 8 août 1994 et les décrets d'application n° S 96-294 du 2 avril 1996 et 96-800 du 9 septembre 1996 ont adapté le régime financier des institutions de prévoyance aux nouvelles exigences découlant de leur inclusion dans le champ des directives européennes d'assurance.

Désormais, les règles prudentielles et de solvabilité que doivent respecter les institutions de prévoyance sont identiques ou d'une rigueur comparable à celles qui s'appliquent aux entreprises régies par le code des assurances.

L'adaptation du cadre comptable des institutions de prévoyance n'est pas encore entièrement réalisée. Elle implique en particulier l'application à ces organismes du plan comptable de l'assurance.

c) Les mutuelles régies par le code de la mutualité

Les articles 8 des directives du Conseil n° s 73/239 du 24 juillet 1973 et 79/267 du 5 mars 1979, dans leur rédaction issue des directives n° s 92/49 du 18 juin 1992 et 92/96 du 10 novembre 1992, disposent que les entreprises d'assurance qui sollicitent l'agrément doivent adopter certaines formes juridiques. Pour la France, outre les sociétés anonymes, les sociétés d'assurance mutuelles et les institutions de prévoyance, sont mentionnées les mutuelles régies par le code de la mutualité.

A ce jour, et malgré une mise en demeure et un avis motivé de la Commission européenne, ces dispositions n'ont pas été transposées pour les mutuelles du code de la mutualité.

En l'absence de cette transposition, qui impliquerait l'adoption d'un régime financier en adéquation avec leur statut d'entreprises d'assurance, les mutuelles du code de la mutualité sont actuellement soumises à des règles financières, prudentielles et comptables moins strictes que celles que doivent respecter les autres opérateurs du secteur, même si des améliorations ont été apportées par les lois n° s 85-773 du 25 juillet 1985 et 89-1009 du 31 décembre 1989 en ce qui concerne le contrôle technique et financier.

Les mutuelles qui ne proposent que la couverture complémentaire santé ont seulement l'obligation de disposer d'une marge de sécurité minimale, qui peut être constituée dans un délai de trois ans après la création de la mutuelle.

Comme le souligne la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance dans son rapport 1994-1995, l'exigence de sécurité financière est plus forte pour les organismes qui garantissent des prestations à versement différé que pour ceux qui ne versent que des prestations maladie.

Les caisses autonomes, créées pour la couverture des risques longs (vieillesse, accidents, invalidité, vie - décès), doivent disposer d'un fonds d'établissement et justifier d'une marge de sécurité minimale égale à 14 % des cotisations nettes de réassurance et 4 % des provisions techniques nettes de réassurance qu'elles doivent constituer (article R.322-7 du code de la mutualité).

Certaines caisses autonomes gèrent des régimes de retraite complémentaire facultative par répartition, activité que les experts interrogés estiment extrêmement risquée car impliquant une solidarité entre les générations que seul le caractère obligatoire de l'affiliation peut véritablement garantir. Quelques dispositions spéciales du code de la mutualité concernent ces caisses autonomes prévoyant, notamment que leur provision technique doit représenter la somme des prestations de l'exercice en cours et des prestations à verser au titre des quatre exercices suivants.

D'une façon générale, les experts interrogés soulignent la relative inefficacité des règles de solvabilité applicables aux mutuelles en raison de leur non-spécialisation empêchant la séparation des risques.

Sur le plan comptable, les mutuelles du code de la mutualité appliquent le plan comptable général et non le plan comptable particulier de l'assurance.

3. La fiscalité

Depuis 1992, toutes les entreprises d'assurance relevant du code des assurances, qu'elles soient constituées sous forme de sociétés anonymes ou de sociétés d'assurance mutuelles, sont soumises aux mêmes règles fiscales. La fiscalité de droit commun des entreprises leur est applicable : elles sont assujetties à l'impôt sur les sociétés et à la taxe professionnelle. Les opérations d'assurance ne sont pas soumises à la T.V.A., mais elles sont assujetties à la taxe sur les salaires.

En outre, certaines taxes spécifiques frappent les entreprises d'assurance relevant du code des assurances : la contribution des institutions financières (article 235 ter y du code général des impôts), également acquittée par les établissements de crédit (montant pour 1998 évalué à 2,6 milliards de francs), la taxe sur les excédents de provisions (article 235 ter x du même code), qui s'applique depuis 1983 aux entreprises d'assurance de dommages (110 millions de francs en 1995), ainsi que des contributions à différents fonds de garantie (fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse, fonds de prévention des risques naturels majeurs, etc).

Il existe par ailleurs une taxation qui pèse sur les assurés et qui prend la forme, en assurance de dommages, d'une taxe sur les conventions d'assurance (article 991 du code général des impôts). Cette taxe, qui a représenté en 1996 un montant de 26 milliards de francs, frappe annuellement les cotisations, à des taux différents selon les types de garantie concernés : 7 % sur les contrats d'assurance maladie complémentaire, 18 % sur les contrats d'assurance automobile, 30 % sur les contrats d'assurance incendie des particuliers, etc. Certains types de contrats sont exonérés de la taxe : il en est ainsi notamment des contrats d'assurance transport (navigation aérienne, maritime et fluviale, marchandises transportées), des contrats couvrant certains risques agricoles et des contrats d'assurance maladie complémentaire des agriculteurs, des contrats d'assurance automobile relatifs aux véhicules utilitaires de plus de 3,5 tonnes. Depuis le 1 er juillet 1990, la taxe sur les conventions d'assurance ne frappe plus les contrats d'assurance vie.

Quant aux mutuelles du code de la mutualité et aux institutions de prévoyance, elles se voient appliquer des règles fiscales différentes, qui découlent de leur statut d'organismes à but non lucratif et qui apparaissent plus favorables que celles auxquelles sont soumis pour les mêmes activités les autres opérateurs du secteur.

Les mutuelles du code de la mutualité et les institutions de prévoyance sont exonérées de la taxe professionnelle et de la contribution sociale de solidarité des sociétés. Elles échappent également, en vertu d'instructions administratives, à la contribution des institutions financières, qui frappe normalement toutes les entreprises d'assurance. Elles sont assujetties à l'impôt sur les sociétés aux taux réduits de 24 % ou de 10 % selon les produits concernés, et certains de leurs revenus échappent à toute imposition (dividendes d'actions, gains en capital). Il faut noter toutefois que l'imposition à l'impôt sur les sociétés porte sur les revenus réalisés, quels que soient les résultats comptables, et non sur les excédents.

Par ailleurs, les contrats d'assurance maladie complémentaire souscrits auprès de mutuelles du code de la mutualité ou d'institutions de prévoyance sont exonérés de la taxe sur les conventions d'assurance.

En mars 1993, la Fédération française des sociétés d'assurance (F.F.S.A.) a saisi la Commission européenne de deux plaintes dirigées contre la France à raison du régime fiscal accordé à ces deux catégories d'organismes et de l'exonération de taxe sur les conventions d'assurance dont bénéficient leurs contrats d'assurance maladie complémentaire. Pour la F.F.S.A., ce régime fiscal constitue une aide de nature à fausser les conditions de la concurrence et, dès lors, prohibée par l'article 92 du Traité de Rome. L'instruction de ces plaintes est en cours.

C. ANALYSE AU REGARD DES REGLES DE LA CONCURRENCE

1. L'application du droit de la concurrence au secteur de l'assurance

En dépit des spécificités de l'activité d'assurance, du fait notamment de l'incertitude qui existe sur le montant exact des sinistres couverts au titre des risques assurés, il n'est aujourd'hui plus discuté que les règles communautaires et nationales de la concurrence s'appliquent au secteur de l'assurance. Dans un arrêt du 27 janvier 1987 (affaire 45/85, Verband der Sachversicherer c/Commission), en particulier, la Cour de justice des Communautés européennes a expressément jugé que le régime communautaire de la concurrence, tel qu'il résulte principalement des articles 85 et 86 du Traité de Rome et du règlement d'application n° 17/62 du 6 février 1962, s'applique pleinement au secteur des assurances. La Commission de la concurrence puis le Conseil de la concurrence ont également, à plusieurs reprises, eu l'occasion de faire application des règles de la concurrence à des entreprises opérant dans ce secteur (notamment avis de la Commission de la concurrence des 10 mai 1979 - assurance incendie des risques industriels - et 16 décembre 1982 - assurance I.A.R.D. - ; décisions du Conseil de la concurrence n° s 87-D-26 du 7 juillet 1987 - assurance construction - et 94-D-40 du 28 juin 1994 - assurance liée à la pratique du ski).

Les directives européennes d'assurance excluent de leur champ d'application " les assurances comprises dans un régime légal de sécurité sociale (1) " (article 2-1-d de la directive n° 73/239 du 24 juillet 1973 et article 2-4° de la directive n° 79/269 du 5 mars 1979). Les organismes chargés de la gestion de tels régimes n'appartiennent pas au secteur des assurances et ne sont pas soumis aux règles de la concurrence, comme l'a indiqué la Cour de justice des Communautés européennes dans l'arrêt Poucet et Pistre du 17 février 1993 (affaires C. 159/91 et C. 160/91). La Cour a en effet jugé que les organismes qui géraient des régimes obligatoires de sécurité sociale, fondés sur des principes de solidarité nationale et dans lesquels les prestations versées sont définies par la loi et indépendantes du montant des cotisations, n'exerçaient pas d'activité économique et n'étaient donc pas des entreprises au sens des articles 85 et suivants du Traité de Rome. Cette exclusion des organismes et régimes de sécurité sociale du champ d'application des directives d'assurance a été rappelée récemment par la Cour de justice des Communautés dans l'arrêt Garcia c/Mutuelle de prévoyance sociale d'Aquitaine du 26 mars 1996 (affaire C.238/94). Toutefois, la Cour a considéré que la Caisse nationale d'assurance vieillesse mutuelle agricole, chargée par le législateur français de la gestion d'un régime complémentaire facultatif d'assurance vieillesse des exploitants agricoles fonctionnant selon le principe de la capitalisation, exerçait une activité économique en dépit du caractère non lucratif du statut de cet organisme et était donc une entreprise soumise aux règles de la concurrence (arrêt F.F.S.A. et autres du 16 novembre 1995, affaire C.244/94).

Ces décisions mettent en lumière que ce qui distingue les organismes gérant des régimes de sécurité sociale des entreprises d'assurance, c'est la finalité sociale de leur activité et la mise en oeuvre d'une solidarité entre les personnes affiliées à ces organismes. Cette solidarité, se manifestant notamment dans les régimes d'assurance vieillesse par la prise en charge des pensions en cours par les travailleurs en activité (système de répartition) et dans les régimes d'assurance maladie par la garantie de prestations identiques pour tous les bénéficiaires " indépendamment de leur condition de fortune et de leur état de santé lors de l'affiliation " (arrêt Poucet et Pistre), implique nécessairement que cette affiliation soit rendue obligatoire par une décision des pouvoirs publics.

Toutes les entreprises effectuant des opérations d'assurance, quel que soit leur statut, sont donc soumises aux règles de la concurrence. Il en est ainsi notamment des mutuelles du code de la mutualité pour toutes leurs activités d'assurance qui ne sont pas liées à la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale. Les systèmes de prévoyance qu'elles proposent interviennent en complément des régimes légaux et n'ont pas de caractère obligatoire. Dans un arrêt récent du 21 octobre 1997 (Chambre syndicale des pharmaciens c/Société Mutualité de l'Anjou), la chambre commerciale de la Cour de cassation a rappelé que le régime juridique des mutuelles comme le caractère non lucratif de leur activité n'était pas de nature à les exclure du champ d'application de l'ordonnance du 1 er décembre 1986 dès lors qu'elles procèdent à des activités de production, de distribution et de services.

C'est essentiellement sur le terrain de la protection sociale complémentaire, et particulièrement sur le marché de l'assurance maladie complémentaire, que les mutuelles du code de la mutualité sont en concurrence avec les autres entreprises d'assurance.

Dans une décision n° 91-D-04 du 29 janvier 1991 relative à certaines pratiques de groupements d'opticiens et d'organismes fournissant des prestations complémentaires à l'assurance maladie, le Conseil de la concurrence a identifié un marché du remboursement complémentaire à l'assurance maladie sur lequel interviennent des opérateurs relevant de statuts et de régimes fiscaux différents.

L'article 1 er de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989, modifié par la loi n° 94-678 du 8 août 1994, autorise trois catégories d'opérateurs à intervenir dans ce domaine : les entreprises régies par le code des assurances, les institutions de prévoyance relevant du code de la sécurité sociale ou du code rural et les mutuelles relevant du code de la mutualité.

Le marché de l'assurance maladie complémentaire représentait un volume d'affaires de 81 milliards de francs en 1996, soit 11,5 % du total des dépenses de santé. Ces dépenses, estimées à 705 milliards de francs sont financées à 73 % par la sécurité sociale (un des plus faibles taux en Europe), une part de l'ordre de 15 % restant à la charge des ménages ou de l'Etat.

Le marché de l'assurance maladie complémentaire a connu au cours des vingt dernières années un développement rapide, lié principalement à la diminution des taux de remboursement par la sécurité sociale. En 1994, 83 % de la population bénéficiait d'une couverture complémentaire maladie (49 % en 1970 et 69 % en 1980), obtenue soit par la souscription de contrats individuels, soit par le biais de la prévoyance collective des entreprises. Ce sont les mutuelles du code de la mutualité qui ont la part la plus importante de ce marché, de l'ordre de 60 %, suivies par les sociétés d'assurance (22 milliards de francs, soit 27 % du marché).

2. Le droit des ententes et des positions dominantes

Les dispositions du titre III de l'ordonnance du 1 er décembre 1986, dont le Conseil de la concurrence a pour mission de contrôler le respect, prohibe les ententes entre entreprises et les abus de domination d'entreprises ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché.

a) La prohibition des ententes

La diversité des structures et des conditions de fonctionnement des entreprises du secteur de l'assurance pourrait favoriser l'établissement d'accords ou la mise en oeuvre de pratiques concertées entre des opérateurs de même forme juridique au détriment des autres catégories d'opérateurs. Il peut s'agir par exemple de pratiques de répartition de marchés ou d'entraves à l'accès au marché.

C'est ainsi que dans sa décision précitée du 29 janvier 1991, le Conseil de la concurrence a déclaré anticoncurrentielles, dans des conventions conclues entre des unions de mutuelles et des syndicats d'opticiens pour la mise en place de systèmes de délégation de paiement et l'aménagement de conditions de remise sur les prix, les clauses qui interdisent aux mutuelles affiliées à ces unions de négocier des conventions à titre individuel, de telles clauses ayant pour objet et pouvant avoir pour effet de protéger chaque société mutualiste de la concurrence éventuelle d'une société de la même union.

De même, dans l'affaire ayant donné lieu à la décision du Conseil de la concurrence n° 93-D-07 du 28 avril 1993 - décision d'irrecevabilité pour absence d'éléments suffisamment probants, confirmée par la Cour d'appel de Paris -, la partie saisissante dénonçait des pratiques de répartition de marchés au sein de la Mutualité Fonction publique, et tout particulièrement l'existence d'un " pacte d'union " signé entre toutes les mutuelles sectorielles et aboutissant au partage du marché de la fonction publique.

Dans un avis n° 92-A-01 du 21 janvier 1992, le Conseil de la concurrence, interrogé par le Syndicat français des assureurs-conseils à propos de la désignation par une convention collective étendue de l'organisme chargé à titre exclusif de gérer le système de prévoyance mis en place et auquel les entreprises assujetties à cette convention ont l'obligation d'être affiliées, a considéré qu'en procédant ainsi, les partenaires sociaux exercent la liberté de choix normale du demandeur à l'égard des prestations de services offreurs. Il a cependant ajouté que " rien ne s'opposerait à ce que les parties à la convention fassent appel à différents offreurs soit avant d'adopter la clause relative au régime de prévoyance soit à l'occasion de la révision de celle-ci ".

Certaines catégories d'accords entre entreprises d'assurance pouvant comporter des restrictions de concurrence susceptibles d'affecter le commerce intra-communautaire, sont relevées de l'interdiction de principe qui les frappe, par un règlement d'exemption de la Commission européenne du 21 décembre 1992, pris en application de l'article 85 §3 du Traité de Rome. Il s'agit notamment : des accords relatifs au calcul de la prime de base sur une base statistique, dès lors qu'ils permettent d'améliorer la connaissance de l'évaluation des risques et facilitent ainsi l'activité des petites entreprises ; des accords relatifs à l'établissement et à la diffusion de conditions-types de contrats d'assurance, à condition que cette diffusion mentionne le caractère indicatif des documents ; des accords relatifs à la couverture en commun de certains risques (groupements de coassurance ou de coréassurance).

b) La prohibition des abus de position dominante

L'application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance du 1 er décembre 1986 implique que soit établie au préalable l'existence d'une position dominante sur un marché économiquement pertinent.

S'il n'appartient pas au Conseil, dans le cadre du présent avis, de se prononcer sur la délimitation des divers marchés de l'assurance - question qui exige un examen au cas par cas dans le cadre de procédures contradictoires -, il peut toutefois être observé qu'il n'y a pas nécessairement correspondance entre la délimitation des marchés et la classification des opérations d'assurance en branches et sous-branches (article R.321-1 du code des assurances) ou en catégories comptables (article A.344-2 du code des assurances), que dans certains cas une même offre de garantie regroupe plusieurs risques, considérés comme liés (exemple des contrats multirisques habitation) et que dans d'autres, une même branche peut recouvrir plusieurs marchés, délimités en fonction du type de clientèle visée ou de caractéristiques structurelles propres aux offreurs.

Ainsi, on pourrait se demander si l'existence de fortes spécificités sectorielles dans l'assurance maladie complémentaire ne devrait pas conduire à définir plusieurs marchés distincts au sein de ce domaine d'activité. Dans le cadre d'une telle analyse, un marché de l'assurance des fonctionnaires et un marché de l'assurance des étudiants pourraient par exemple être identifiés en raison de l'existence de clientèles homogènes et du fait que seules des mutuelles du code de la mutualité peuvent être habilitées à gérer le régime obligatoire d'assurance maladie de ces catégories de population. On pourrait se demander également si les opérations de prévoyance collective ne se situent pas sur un autre marché que celles qui donnent lieu à des souscriptions individuelles de contrats.

Si, dans le cadre d'une saisine contentieuse, il était établi qu'un opérateur du secteur de l'assurance, exerçant ou non par ailleurs une mission d'intérêt général, détenait une position dominante sur un marché économiquement pertinent, il conviendrait alors d'examiner s'il en fait une utilisation abusive, en tirant parti des avantages que lui confère cette position pour tenter d'affaiblir un concurrent, de l'éliminer du marché ou de l'empêcher d'y accéder. Les pratiques abusives, prohibées par le 1 de l'article 8 de l'ordonnance du 1 er décembre 1986, peuvent consister en conditions de vente discriminatoires, en refus de vente, en ventes liées (souscription obligatoire de plusieurs garanties) ou encore en la fourniture de prestations non demandées par les bénéficiaires. Il peut s'agir aussi de pratiques de prix prédateurs, c'est-à-dire de ventes soit à des prix inférieurs aux coûts moyens variables, soit à des prix supérieurs aux coûts variables mais inférieurs aux coûts moyens totaux, lorsqu'il est établi qu'une telle stratégie est fixée dans le cadre d'un plan ayant pour but d'éliminer un concurrent. Il pourrait s'agir encore, pour un opérateur exerçant par ailleurs une mission d'intérêt général comme la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale, du fait de ne pas dissocier suffisamment dans son offre les services en concurrence de ceux qui ne le sont pas.

Lorsqu'une entreprise détenant une position dominante sur un marché exerce à la fois des activités d'intérêt général et des activités ouvertes à la concurrence, le contrôle du respect des règles de la concurrence nécessite que soit opérée une séparation claire entre ces deux types d'activités, de manière à empêcher que les activités en concurrence ne puissent bénéficier pour leur développement, au détriment des entreprises opérant sur les mêmes marchés, des conditions propres à l'exercice des missions d'intérêt général.

Dans ce cas, la mise en place de comptes distincts par type d'activité, s'appuyant sur une comptabilité analytique aussi fiable et transparente que possible, constitue une condition nécessaire à l'exercice du contrôle du respect des règles de la concurrence. En raison des difficultés qu'implique l'établissement d'une comptabilité analytique de qualité, cette condition n'est pas toujours suffisante pour permettre un contrôle effectif des comportements au regard des règles de la concurrence et il peut être nécessaire d'opérer une séparation juridique entre les activités d'intérêt général et les activités concurrentielles. Cette séparation juridique peut éventuellement être effectuée par voie de filialisation, en isolant chaque type d'activité exercée dans une structure autonome fonctionnant de préférence avec un personnel et des moyens matériels propres. Il convient cependant de souligner que les coûts des opérations d'assurance ainsi identifiés ne pourraient être comparés qu'à ceux d'entreprises opérant sur les mêmes marchés de produits et disposant du même type de clientèle.

3. L'existence et la justification de droits exclusifs en matière d'assurance

L'article 90 du Traité de Rome dispose que : " les Etats membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles du présent traité, notamment à celles prévues aux articles 7 et 85 à 94 inclus. Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles du présent traité, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté ".

Ces dispositions, telles qu'elles ont été interprétées par la Cour de justice des Communautés européennes (notamment dans les arrêts Corbeau du 19 mai 1993 et Commune d'Almelo du 27 avril 1994), peuvent être invoquées à certaines conditions par les Etats membres pour justifier l'octroi à une entreprise chargée de la gestion de services d'intérêt économique général, de droits exclusifs faisant obstacle au libre exercice de la concurrence. Pour que l'octroi de tels droits soit compatible avec le Traité, il faut notamment que les restrictions de concurrence soient indispensables à l'accomplissement de la mission d'intérêt général impartie à l'entreprise. En d'autres termes, il faut qu'en l'absence des droits exclusifs, la mission confiée à l'entreprise ne puisse pas être réalisée dans des conditions économiquement viables.

Le Conseil d'Etat a fait récemment application des dispositions de l'article 90 du Traité de Rome pour annuler plusieurs dispositions du décret du 26 novembre 1990 relatif au régime complémentaire facultatif d'assurance vieillesse de personnes non salariées des professions agricoles (décision du 8 novembre 1996, Fédération française des sociétés d'assurance et autres). Le Conseil d'Etat a en effet considéré qu'en confiant à la seule Caisse nationale d'assurance vieillesse mutuelle agricole (C.N.A.V.M.A. - dont l'activité avait été qualifiée d'économique par la Cour de justice des Communautés européennes, interrogée à titre préjudiciel (décision précitée du 16 novembre 1995) - la gestion de ce régime auquel était réservé un avantage fiscal (la déductibilité du revenu imposable des cotisations versées), le décret en question avait accordé des droits exclusifs à cet organisme. Après avoir indiqué que l'octroi de ces droits exclusifs avait créé au profit de la C.N.A.V.M.A. une position dominante dont cet organisme était amené, du fait même de cette exclusivité, à faire une exploitation abusive, le Conseil d'Etat a jugé que l'exclusion ou la restriction de la concurrence sur le marché des produits de retraite complémentaire des exploitants agricoles n'était pas justifiée par l'accomplissement de la mission particulière impartie à la C.N.A.V.M.A. Il a ainsi admis implicitement que la gestion du régime d'assurance vieillesse complémentaire en cause, à supposer même qu'elle constitue une mission d'intérêt économique général, n'impliquait aucune contrainte particulière et qu'elle pouvait être assurée dans des conditions économiques normales par d'autres opérateurs.

On ne peut exclure qu'il existe d'autres exemples de droits exclusifs injustifiés conférés à des organismes pour la gestion de mécanismes d'épargne-retraite ou d'autres dispositifs de protection sociale complémentaire assortis d'avantages fiscaux.

Pour déterminer si certains organismes peuvent être dans ce cas, il faut d'abord examiner si les droits exclusifs ont été accordés pour la gestion d'un régime de protection sociale situé hors du champ de la concurrence ou d'un mécanisme d'assurance normalement soumis aux règles de la concurrence.

C'est ainsi que les droits exclusifs conférés aux mutuelles du code de la mutualité pour assurer le service des prestations d'assurance maladie dans les régimes de sécurité sociale des fonctionnaires et des étudiants ne sont pas susceptibles de relever des dispositions de l'article 90 du Traité de Rome dès lors qu'ils ont été accordés pour la gestion de régimes échappant aux règles de la concurrence. En revanche, une activité de gestion d'un système de retraite complémentaire facultative fonctionnant en tout ou partie par capitalisation constitue, au sens de la jurisprudence communautaire, une activité concurrentielle à laquelle s'appliquent, en cas d'octroi de droits exclusifs à une entreprise pour l'exercice de cette activité, les dispositions de l'article 90 du Traité de Rome.

La question de la justification des restrictions de concurrence pourrait se poser en particulier à propos de la gestion exclusive des systèmes de retraite complémentaire des fonctionnaires par trois organismes, la Caisse nationale de prévoyance de la fonction publique (PREFON), le Comité de gestion des oeuvres sociales des établissements d'hospitalisation (C.G.O.S.) et l'Union nationale des mutuelles de retraite des instituteurs et des fonctionnaires de l'éducation nationale et de la fonction publique (U.N.M.R.I.F.E.N.-F.P., proposant les produits C.R.E.F. et Force +). Ces dispositifs de retraite complémentaire facultative fonctionnant entièrement ou partiellement par capitalisation, ne relèvent pas du champ de la protection sociale, mais sont des produits d'assurance assortis d'un avantage fiscal, la déductibilité du revenu imposable des cotisations versées, qui place les organismes auxquels est réservée, en droit ou en fait, la distribution de cet avantage dans une situation plus favorable que les opérateurs proposant d'autres produits d'épargne retraite, sans que ces restrictions de concurrence soient nécessairement justifiées par la mission particulière confiée à ces organismes. Même si ces derniers se voient imposer certaines contraintes liées à la finalité sociale alléguée de ces régimes de retraite, il n'est pas certain que ces contraintes impliquent nécessairement une absence de rentabilité économique, alors, par ailleurs, que l'existence de l'avantage fiscal facilite la commercialisation du produit. On peut d'ailleurs relever qu'il y a quelques années, une société d'assurance avait demandé l'autorisation de distribuer ce produit réservé aux fonctionnaires.

Un raisonnement de même type pourrait être fait à propos des rentes des anciens combattants dont la constitution est réservée aux groupements mutualistes (article L.321-9 du code de la mutualité), alors que ces produits d'épargne retraite complémentaire facultative par capitalisation ouvrent droit à plusieurs avantages consentis par l'Etat, une majoration de la rente et son non-assujettissement à l'impôt sur le revenu (article 81-12° du code général des impôts), ainsi que la déductibilité du revenu imposable des cotisations versées. Dans ce cas, l'exclusivité n'est pas accordée par les pouvoirs publics à une entreprise, mais à une catégorie déterminée d'opérateurs.

4. L'exigence d'une concurrence non faussée

Dans plusieurs arrêts (en particulier, 19 mars 1991, République française c/Commission, affaire C-202/88 et 13 décembre 1991, Régie des télégraphes et des téléphones, affaire C-18/88), la Cour de justice des Communautés européennes a souligné qu'un système de concurrence non faussée, tel que celui prévu par le Traité de Rome, ne pouvait être garanti que si l'égalité des chances entre les différents opérateurs économiques était assurée. Le Conseil de la concurrence a précisé à cet égard, dans son avis du 17 septembre 1996 relatif aux conditions de concurrence dans le secteur bancaire et du crédit, que le bon fonctionnement de la concurrence sur un marché n'impliquait pas nécessairement que tous les opérateurs aient des conditions d'exploitation identiques, mais supposait toutefois qu'aucun d'entre eux ne bénéficie pour son développement de facilités que les autres ne pourraient obtenir et d'une ampleur telle qu'elles lui permettent de fausser le jeu de la concurrence, en empêchant des concurrents aussi efficaces de progresser sur ce marché, sauf à ce que ces facilités soient justifiées par des considérations d'intérêt général.

Comme pour ce qui concerne l'activité bancaire, il convient tout d'abord de rappeler que le législateur a voulu que l'activité d'assurance puisse être exercée par des entités de nature juridique différente, le domaine de la protection sociale complémentaire où se trouvent en concurrence des entités relevant de trois corps de règles différents (code des assurances, code de la mutualité, code de la sécurité sociale) étant à cet égard le plus ouvert.

L'inclusion de toutes ces catégories d'organismes dans le champ des directives européennes d'assurance porte en germe l'égalisation des conditions de concurrence dans ce secteur. La transposition des troisièmes directives en ce qui concerne les institutions de prévoyance a eu pour effet d'aligner en grande partie leur mode de fonctionnement sur celui des sociétés relevant du code des assurances. Si cette transposition intervient pour les mutuelles du code de la mutualité, elle devrait conduire au même résultat et permettre, en particulier, l'adoption de règles prudentielles et comptables adaptées à leur statut d'entreprise d'assurance.

Actuellement, les mutuelles du code de la mutualité sont les opérateurs du secteur de l'assurance dont le mode d'organisation et de fonctionnement est le plus éloigné de celui des sociétés anonymes d'assurance :

- étant des groupements sans capital, elles n'ont pas d'actionnaires à rémunérer mais se trouvent, sur ce plan, dans la même situation que les sociétés d'assurance mutuelles ;

- elles sont soumises au régime fiscal des organismes sans but lucratif et les contrats d'assurance maladie complémentaire qu'elles commercialisent sont, comme ceux des institutions de prévoyance, exonérés de la taxe sur les conventions d'assurance ;

- le plan comptable des assurances n'est pas applicable à leur comptabilité et les règles prudentielles qu'elles doivent respecter, moins contraignantes que celles des autres entreprises d'assurance, ont été conçues pour la gestion de risques courts (protection complémentaire maladie), en dépit du fait que la couverture de risques longs représente une part croissante de leur activité (environ 12 % du chiffre d'affaires global en 1995) ;

- elles exercent à la fois des activités relevant du domaine de l'assurance et d'autres qui relèvent de l'action sanitaire et sociale ;

- les mutuelles de fonctionnaires et d'étudiants sont chargées du règlement des prestations du régime d'assurance maladie de la sécurité sociale, disposant ainsi d'une clientèle captive pour leur offre de produits d'assurance complémentaire ;

- les mutuelles de fonctionnaires de l'Etat bénéficient pour l'ensemble de leurs activités de prévoyance, sans distinction entre celles qui relèvent du champ de l'assurance et celles qui relèvent de l'action sociale, de subventions et de facilités diverses (mise à disposition de personnel, prêts de locaux et de matériel).

Ces particularités d'organisation et de fonctionnement sont liées au rôle dévolu aux mutuelles dans la gestion de la sécurité sociale et dans le domaine de la solidarité, de la santé publique et de l'action sociale, et les facilités qui leur sont accordées représentent pour une part la contrepartie des sujétions qui découlent de l'accomplissement de leurs missions. Dans le cadre de leur activité concurrentielle, les contraintes imposées aux mutuelles sont principalement de deux ordres :

- elles ne sont pas autorisées à effectuer d'autres opérations d'assurance que celles qui entrent dans le champ de la protection sociale complémentaire ;

- elles doivent respecter une certaine égalité de traitement entre les assurés, ne pouvant introduire des discriminations que si elles sont " justifiées par les risques apportés, les cotisations versées ou la situation de famille des intéressés " (article L.121-2 du code de la mutualité).

Si les mutuelles soulignent également qu'elles ne pratiquent pas " l'exclusion des mauvais risques ", cette attitude les oppose moins qu'il n'y paraît à première vue aux sociétés d'assurance, dans la mesure où il fait interdiction à ces dernières, en matière d'assurance maladie complémentaire, de dénoncer le contrat ou d'augmenter la prime " lorsque l'état de santé de l'assuré se trouve modifié " (article L.113-4 du code des assurances). En outre, depuis la loi Evin, les assureurs ne peuvent plus après l'expiration d'un délai de deux ans, refuser à un assuré acquittant normalement ses cotisations le maintien des garanties maladies et accident souscrites, quelle que soit l'évolution de son état de santé. A l'inverse, les mutuelles ont la possibilité de moduler leurs tarifs en fonction non seulement du revenu des assurés mais aussi des " risques apportés ", notamment de l'âge au moment de l'adhésion. Certaines d'entre elles subordonnent l'adhésion à partir d'un certain âge soit au versement de droits d'entrée, soit à la souscription de plusieurs garanties liées à la couverture maladie (invalidité, dépendance, décès).

Les sujétions imposées aux mutuelles, somme toutes limitées, ne paraissent pas pouvoir justifier l'ensemble des facilités qui leur sont accordées pour l'exercice de leurs activités. On peut s'interroger en particulier sur la justification, d'une part, de la discrimination concernant l'assujettissement à la taxe sur les conventions d'assurance, au bénéfice des mutuelles et des institutions de prévoyance qui commercialisent des contrats d'assurance maladie complémentaire, et, d'autre part, des subventions et aides diverses accordées aux mutuelles de fonctionnaires. Ces deux caractéristiques pourraient s'analyser comme des avantages concurrentiels dès lors qu'ils profitent directement à des activités ouvertes à la concurrence et que, ne représentant pas la contrepartie d'une contrainte d'intérêt général précisément identifiée et chiffrée, ils introduisent un déséquilibre, dans le cadre d'une compétition par les mérites, entre les opérateurs qui en bénéficient et ceux qui ne peuvent y prétendre.

L'avantage fiscal est accordé, directement, comme il a été dit plus haut, à deux catégories d'opérateurs, les mutuelles et les institutions de prévoyance. Les sociétés d'assurance ne sont pas complètement exclues de son bénéfice puisque les contrats de prévoyance collective sont exonérés de la taxe, quel que soit l'opérateur qui les propose, lorsque la part des cotisations se rapportant au risque maladie n'excède pas 20 % (article 998-1 du code général des impôts). C'est donc sur les segments du marché de l'assurance maladie complémentaire constitués par les contrats individuels et par les contrats de groupe n'entrant pas dans le champ de l'exonération que cette exonération sélective met les organismes qui en bénéficient en mesure de pratiquer pour les produits concernés des tarifs inférieurs à ceux de concurrents aussi performants qu'eux mais ne pouvant y prétendre. La F.F.S.A. qui, comme il a été indiqué plus haut, a saisi en 1993 la Commission européenne, de deux plaintes relatives au régime fiscal des institutions de prévoyance et des mutuelles du code de la mutualité, évalue le montant global de l'avantage lié à l'exonération de la taxe sur les contrats d'assurance maladie complémentaire à près de 3 milliards de francs par an.

Les subventions accordées aux mutuelles de fonctionnaires et agents de l'Etat et des établissements publics nationaux peuvent contribuer au financement de leurs activités d'assurance pour lesquelles elles sont en concurrence. Non seulement, en effet, l'article R.523-2 du code de la mutualité n'exclut pas la possibilité d'employer ces subventions pour l'activité de couverture des risques sociaux, mais l'application du principe de non-spécialisation auquel restent attachées la plupart des composantes du mouvement mutualiste rend très difficile le contrôle de l'affectation des aides publiques dont bénéficient les mutuelles.

Dans ce cas, le risque d'atteinte à la concurrence est double : d'une part, l'attribution, sans justification clairement définie, de subventions publiques à des activités d'assurance ouvertes à la concurrence peut avoir pour effet direct de fausser le jeu de la concurrence sur les marchés d'assurance concernés, en défavorisant artificiellement les concurrents ; d'autre part, l'absence d'une nette séparation entre les diverses activités mutualistes fait courir le risque de subventions croisées, et en particulier de transferts financiers des activités protégées vers les activités concurrencées, permettant de proposer les produits d'assurance à des prix plus bas, à niveau d'efficacité équivalent, que ceux des entreprises concurrentes.

Ce risque n'est pas théorique et la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance elle-même, dans son rapport 1994-1995, mentionnait l'existence de transferts de ressources parfois importants au sein des groupements mutualistes, soit que le " compte prestations/cotisations (...) contribue à financer d'autres réalisations, notamment des réalisations sociales, soit au contraire qu'il bénéficie des excédents de certaines réalisations sociales ". De tels transferts, quand ils existent, rendent illusoire l'exercice du contrôle de solvabilité. La " souplesse " du système actuel de gestion, ne dissuadant pas la réalisation de compensations financières entre les activités déficitaires et les activités bénéficiaires, constitue d'ailleurs l'une des raisons principales de l'opposition de certaines fédérations mutualistes à la transposition des directives d'assurance à l'égard des mutuelles.

A cet égard, il faut souligner qu'un examen des tarifs pourrait éventuellement être effectué sur le fondement de l'article 10-1 de l'ordonnance du 1 er décembre 1986 prohibant les pratiques de prix abusivement bas.

Les transferts de ressources à l'intérieur des mutuelles peuvent avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence non seulement sur les marchés des assurances, mais aussi sur les marchés des prestations sanitaires et médico-sociales sur lesquels interviennent les mutuelles. C'est ainsi que plusieurs opticiens indépendants ont saisi récemment le juge administratif de recours en annulation contre des arrêtés autorisant la création et la gestion par des unions de mutuelles de centres d'optique mutualistes, en invoquant pour ce faire l'effet direct des dispositions des directives européennes interdisant aux entreprises d'assurance l'exercice d'une activité commerciale autre que l'activité d'assurance.

Une banalisation du régime fiscal des produits d'assurance commercialisés par les mutuelles du code de la mutualité paraît d'autant plus s'imposer que le comportement de certaines grandes mutuelles s'apparente de plus en plus à celui des sociétés commerciales : notamment, gestion pour le compte de tiers d'activités commerciales ne relevant pas des objectifs mutualistes et donnant lieu à rémunération sous forme de commissions ; recours dans certains cas à des intermédiaires rémunérés pour le placement de leurs produits ; publicité commerciale émanant soit des fédérations de mutuelles, soit même de certaines mutuelles. De même, il est souhaitable qu'intervienne une clarification des relations entre l'Etat et les mutuelles de fonctionnaires.

IV. LA DISTRIBUTION DE L'ASSURANCE

La Commission des Finances du Sénat a demandé au Conseil de la concurrence d'évaluer l'impact sur les conditions de la concurrence des points suivants :

- " l'existence de réseaux de distribution distincts des circuits marchands (La Poste et le Trésor public) ;

- les éventuelles distorsions de concurrence affectant la distribution de certains produits par les agents généraux d'assurance et les courtiers ".

Ces deux thèmes portent sur la distribution des produits d'assurance, qui, contrairement à la distribution d'autres produits, est soumise à une réglementation, après le rappel de laquelle il sera successivement répondu aux deux questions ci-dessus.

Pour distribuer leurs produits, les entreprises relevant du code des assurances peuvent recourir à une grande variété de modes de distribution, faisant appel à des intermédiaires, tels les agents généraux ou les courtiers, ou bien réservant la distribution de leurs produits à leurs propres réseaux de salariés.

Dans un souci de protection du consommateur, les conditions de distribution des produits d'assurance ont été strictement réglementées. Cette réglementation de la distribution d'assurance n'a toutefois pas constitué un obstacle à la pénétration du marché par de nouveaux intervenants, telles les banques et les sociétés sans intermédiaires, qui concurrencent directement les distributeurs traditionnels de l'assurance que sont les agents généraux et les courtiers. La Poste et le Trésor constituent aussi, par leur activité de distribution d'assurance vie notamment, des opérateurs concurrents.

A. GENERALITES SUR LA DISTRIBUTION DE L'ASSURANCE

1. Cadre juridique

L'intermédiaire d'assurance peut intervenir en tant que présentateur ou en tant qu'indicateur. Tandis que l'indicateur se borne à mettre en relation l'assuré et l'assureur, le présentateur est personnellement impliqué dans le processus de formation du contrat.

L'article R.511-1 du code des assurances définit la présentation d'une opération d'assurance comme " le fait, pour toute personne physique ou morale, de solliciter ou de recueillir la souscription d'un contrat d'assurance ou de capitalisation ou l'adhésion à un tel contrat ou d'exposer oralement ou par écrit à un souscripteur ou adhérent éventuel, en vue de cette souscription ou adhésion, les conditions de garantie d'un tel contrat ".

En vertu de l'article R.511-2 du code des assurances, les produits des entreprises relevant de ce code ne peuvent être présentés que par quatre catégories de personnes :

- les courtiers ;

- les agents généraux ;

- les salariés des courtiers, agents généraux ou entreprises d'assurance ;

- les mandataires non salariés des courtiers, agents généraux ou entreprises d'assurance .

Ces personnes doivent en outre remplir des conditions d'âge, d'honorabilité et de capacité professionnelle et, pour les courtiers, des obligations d'assurance de responsabilité civile et de garantie financière.

Par dérogation aux principes généraux, la distribution de produits d'assurance peut aussi être réalisée par des intermédiaires occasionnels énumérés aux articles R.512-3 à R.512-5 du code des assurances, pour certaines opérations particulières ou accessoires à d'autres contrats. Les prêteurs peuvent ainsi adosser au contrat de prêt un contrat d'assurance décès, invalidité, incapacité temporaire de travail et perte d'emploi ; les agences de voyage assortissent leurs prestations de voyage d'une offre de contrat d'assistance ou de garantie des bagages ; enfin, les vendeurs d'objets mobiliers distribuent des assurances garantissant contre le vol ou la perte des objets vendus par leurs soins.

Les associations de chasse, de pêche ou sportives peuvent proposer à leurs membres d'adhérer à un contrat de groupe auquel elles ont souscrit. Le souscripteur d'une assurance de groupe définie à l'article L.140-1 du code des assurances peut aussi présenter des adhésions. Le chef d'entreprise est souvent le souscripteur d'un contrat de groupe de prévoyance pour ses salariés.

La Commission de contrôle des assurances peut, en vertu de l'article L.310-12 du code des assurances, " décider de soumettre à son contrôle toute personne physique ou morale ayant reçu d'une entreprise (d'assurance) (...) un mandat de souscription ou de gestion, ou exerçant, à quelque titre que ce soit, le courtage d'assurance ".

2. Aspects économiques

La France se caractérise ainsi par une grande variété de modes de distribution des produits d'assurance, entre lesquels la concurrence est vive. Les modes et canaux de distribution varient selon la nature des risques garantis (assurance de dommages, assurance vie) et aussi selon le type de clientèle (particuliers, risques des PME-PMI ou des grandes entreprises).

Tandis que les distributeurs traditionnels de l'assurance demeurent prépondérants en assurance de dommages (39 % des cotisations pour les agents généraux et 19 % pour les courtiers en 1996), suivis par les sociétés sans intermédiaires (31 %), la part prise par les guichets bancaires et financiers dans la distribution des produits d'assurance vie ne cesse de croître. Ils sont devenus les principaux distributeurs de ces produits, avec 59 % du chiffre d'affaires du secteur en 1996, contre 56 % en 1995 et 25 % en 1985.

Assurance de dommages :

 

1994

1995

1996

Agents généraux

42 %

40,2 %

38,9 %

Sociétés sans intermédiaires

28 %

28,5 %

30,8 %

Courtiers

19 %

20,1 %

19 %

Salariés

4 %

4,1 %

4 %

Guichets

4 %

4,8 %

5,2 %

Ventes directes

3 %

2,3 %

2,1 %

Assurance vie :
 

1995

1996

Guichets

56,1 %

58,8 %

Salariés

18,9 %

17,4 %

Agents

11,9 %

11,2 %

Courtiers

6,9 %

6,6 %

Vente directe et autres modes

6,2 %

6 %

Sociétés sans intermédiaires

-

-

(Statistiques de la Fédération française des sociétés d'assurance - F.F.S.A.)

B. LES DISTRIBUTEURS TRADITIONNELS : AGENTS GÉNÉRAUX ET COURTIERS

1. Les agents généraux

a) Caractéristiques principales de la profession

Les agents généraux d'assurance sont des professionnels indépendants qui représentent, en vertu d'un mandat dit traité de nomination, une ou plusieurs entreprises d'assurance. Considérés comme les mandataires de ces entreprises, ils leur apportent une clientèle, dont ils assument la gestion des contrats. La plupart d'entre eux exercent donc une double fonction : commerciale (de prospection) et administrative (d'encaissement de primes et d'indemnisation des sinistres). Ils ont le statut de profession libérale mais peuvent, depuis l'adoption du nouveau statut approuvé par le décret n° 96-902 du 15 octobre 1996, constituer des sociétés commerciales d'agents.

Ils sont rémunérés par des commissions comprenant une commission d'apport, qui rémunère l'acquisition d'une opération d'assurance et est fixée en pourcentage des primes, et une commission de gestion, contrepartie des travaux de gestion effectués par l'agent général. L'intéressement aux bénéfices des entreprises d'assurance est encore peu répandu (moins de 5 % de leur rémunération). Les taux de commissionnement s'inscrivent dans une fourchette qui va de 3 % du montant des primes d'assurance vie à 23 % pour les contrats d'assurance habitation ou professionnels. Le taux moyen s'établit à 18 %.

L'agent général n'est pas propriétaire du portefeuille de contrats qu'il apporte à sa compagnie mandante. Il détient en revanche des droits de créance sur les commissions afférentes au portefeuille de l'agence. Il récupère ces droits de créance lorsqu'il cesse ses fonctions, par la vente à titre onéreux de son agence à un successeur agréé par sa compagnie, ou bien par la perception d'une indemnité compensatrice à la charge de sa compagnie, en pourcentage des commissions.

Depuis une vingtaine d'années, le nombre d'agents généraux ne cesse de décroître. Ils étaient 16 781 au 31 décembre 1996, contre 22 600 en 1985. Avec leurs collaborateurs, ils constituent un ensemble d'environ 50 000 personnes.

Les dix premiers réseaux regroupaient en 1996 les trois quarts des agences générales et 86 % de l'ensemble des commissions d'agence, AXA, U.A.P., A.G.F. et le GAN réunissant à eux seuls 6 800 agences.

Selon une étude réalisée en 1997 par le Centre d'analyse et de prospective de l'assurance (C.A.P.A.), 40 % de la profession perçoit une commission comprise entre 300 000 et 735 000 francs par an, le seuil de viabilité d'une agence étant situé au-dessus de 300 000 francs. Ces agences sont fortement implantées en milieu rural ou dans les petites villes ; elles sont spécialisées dans l'assurance de dommages à 91 % (habitation et automobile).

Le tiers des agences perçoit des commissions comprises entre 735 000 francs et 1,6 million de francs. Elles sont situées principalement dans les moyennes agglomérations et ont une clientèle professionnelle (13 % en dommages et 15 % en vie).

10 % des agences ont un chiffre d'affaires supérieur à 1,6 million de francs. Le niveau moyen de leurs commissions s'élève à 2,6 millions de francs. Leur clientèle est composée essentiellement de professionnels et d'entreprises.

La tendance est à la progression de la taille des agences et du chiffre d'affaires moyen (de 453 000 francs en 1985 à 861 000 francs en 1996). Principalement présents en assurance des particuliers, des artisans et des PME, les agents généraux dominent encore la vente de l'assurance de dommages avec 38,9 % de part de marché, bien qu'ayant perdu 8 points en 6 ans. En assurance vie, ils ne détiennent plus que 11,2 %. Leur objectif est de consolider leurs parts en assurance de dommages et de pénétrer le secteur porteur des assurances de personnes (retraite, santé, dépendance et prévoyance), en complément des systèmes de base. Ce secteur est encore peu investi par les entreprises d'assurance traditionnelles, à cause de la concurrence des mutuelles du code de la mutualité. Les agents généraux étant en contact avec un assuré sur deux, ils disposent d'atouts pour développer ces produits complexes, par leur rôle de conseil.

b) Le nouveau statut des agents généraux

Les conditions d'exercice de l'activité de l'agent général étaient traditionnellement régies par les statuts I.A.R.D. (incendie, accidents et risques divers) et Vie, définis dans les décrets du 5 mars 1949 et du 28 décembre 1950. Ces statuts ayant un caractère d'ordre public, il n'était pas possible d'y déroger conventionnellement, sauf dans un sens favorable à l'agent général. Ils étaient considérés par la profession comme des facteurs de rigidité et comme des obstacles à la modernisation des entreprises traditionnelles.

En vertu des articles 3 de ces statuts, les agents généraux devaient, sous réserve de certains tempéraments exposés ci-dessous, réserver l'exclusivité de leur production à leur société mandante. En contrepartie, les agents I.A.R.D. bénéficiaient d'une exclusivité territoriale à l'intérieur d'une circonscription déterminée par leur mandat. Cette exclusivité leur assurait une protection contre la concurrence d'autres intermédiaires mais interdisait aux sociétés représentées par un réseau d'agents généraux de se faire apporter des contrats par un autre intermédiaire (courtier par exemple) dans la même circonscription.

Depuis l'entrée en vigueur du nouveau statut, approuvé par le décret n° 96-902 du 15 octobre 1996, l'organisation des relations entre les entreprises d'assurance mandantes et les agents généraux d'assurance nommés à compter du 1 er janvier 1997 repose sur une nouvelle architecture, comportant quatre niveaux :

- le nouveau statut des agents généraux, réduit à trois articles, approuvé par le décret du 15 octobre 1996 ;

- la convention-cadre signée le 20 février 1996 entre la Fédération française des sociétés d'assurance (F.F.S.A.) et la Fédération nationale des syndicats d'agents généraux d'assurance (F.N.S.A.G.A.) ;

- les accords au sein de chaque entreprise, entre l'entreprise et le syndicat professionnel des agents généraux de l'entreprise ;

- le traité de nomination conclu entre l'agent général et son entreprise mandante.

Les agents généraux en fonction avant le 1 er janvier 1997 continuent, sauf option contraire, à être régis par les dispositions d'ordre public des statuts I.A.R.D. et Vie définis dans les décrets du 5 mars 1949 et du 28 décembre 1950.

Le nouveau régime des agents généraux est moins contraignant que l'ancien puisqu'il ouvre une large place à la voie contractuelle. Par ailleurs, il renforce les relations d'exclusivité des agents généraux avec leur société mandante.

Le statut I.A.R.D. de 1949 permettait en effet aux agents généraux de proposer aux assurés les produits d'autres sociétés d'assurance que leur société mandante principale, en garantie de certains risques, soit dans le cadre de mandats dits " mandats de complément " délivrés par ces autres sociétés avec l'accord de la société mandante principale lorsque ces sociétés pratiquaient les mêmes catégories d'opérations, soit, sans autorisation préalable dans le cadre d'une activité de courtage accessoire. Les risques concernés étaient notamment les risques non pratiqués par la société mandante principale, non souscrits par elle en totalité, résiliés ou refusés. Le statut Vie permettait de semblables dérogations au principe d'exclusivité.

Le nouveau statut de 1996 ne mentionne plus ces dérogations au principe d'exclusivité. La convention-cadre du 20 février 1996 renvoie aux accords d'entreprise la faculté éventuelle de prévoir le placement des risques résiliés ou refusés, semblant définitivement abandonner la possibilité de placement des risques non pratiqués ou non souscrits en totalité.

Or, les accords d'entreprise conclus en application de cette convention du 20 février 1996 sont très restrictifs sur ce point.

L'accord Axa/Interaxa du 25 juillet 1996 interdit la pratique du courtage ou du mandat de complément, sauf " dérogation transitoire au principe d'exclusivité (par la compagnie) lorsqu'apparaît indispensable une adaptation locale de sa politique générale ". L'accord Azur/Force Azur du 18 septembre 1996 dispose que le placement des risques non pratiqués, refusés ou résiliés par la compagnie doit se faire par l'intermédiaire d'une structure de courtage dépendant de la compagnie. L'agent peut aussi être autorisé ponctuellement à placer telles ou telles catégories d'affaires pour des risques connexes à au moins deux contrats du même sociétaire .

L'exclusivité territoriale n'est plus mentionnée ni dans le statut, ni dans la convention-cadre. L'assouplissement de cette contrainte commerciale était demandé depuis longtemps par les sociétés d'assurance traditionnelles. L'agent général devra donc négocier individuellement dans son traité de nomination une circonscription territoriale, à moins qu'un accord d'entreprise ne lui en définisse une.

2. Les courtiers

Avec un chiffre d'affaires de 81 milliards de francs en 1996, le courtage français se place au troisième rang mondial après les courtages américain et anglais. Les cent premiers cabinets de courtiers réalisent 9 milliards de francs de chiffre d'affaires, les deux premiers Cecard et Jutheau et Gras Savoye dépassant chacun le milliard de francs.

Les courtiers constituent un ensemble hétérogène de près de 2 500 cabinets, regroupant 16 000 salariés. Ils exercent à titre individuel, ou constituent des sociétés de taille variable, filiales de sociétés étrangères et de banques. Ils sont principalement implantés dans les grandes villes (60 % à Paris), 88 % ont moins de 5 salariés, 26 cabinets ont plus de 100 salariés et représentent 9 % du marché.

Le grand courtage est spécialisé dans les risques d'entreprises (76 % du chiffre d'affaires total) et les risques spéciaux (assurances maritimes, transports aériens...) ; le petit courtage intervient principalement dans le domaine des risques des particuliers.

Les courtiers ont le statut de commerçants (article 109 du code de commerce). Ils sont les mandataires de leurs clients auxquels ils proposent les produits des quelques sociétés qui leur ont confié des pouvoirs de souscription, de gestion et de règlement des sinistres. Ils exercent des activités connexes de courtage de réassurance, de gestion de risques ou d'audit en assurance.

Ils ne sont pas régis comme les agents généraux, par un statut, mais par un ensemble d'usages suivis par la profession. Ils sont, bien que considérés comme les mandataires des assurés, généralement rémunérés par des commissions versées par les compagnies d'assurance.

3. Les concurrents des distributeurs traditionnels

Comme les agents généraux, les courtiers sont concurrencés en tant que distributeurs par les établissements bancaires. La distribution sans intermédiaire est aussi venue menacer leur prépondérance, qu'il s'agisse de la distribution effectuée pour leur propre compte par les mutuelles sans intermédiaires, qui ne peuvent statutairement avoir recours à des intermédiaires rémunérés, ou qu'il s'agisse de la vente directe.

a) L'assurance directe

L'implantation des assureurs directs en France s'est réalisée par vagues successives, depuis les années 70. La part de la vente directe est faible en France et progresse peu depuis une dizaine d'années. En 1996, elle ne représenterait que 2,1 % de l'ensemble des assurances de dommages et 6 % des assurances vie (contre respectivement 2,3 % et 6,2 % en 1995). Cette forme de distribution a sans doute peu d'avenir en France, la concurrence par les prix étant devenue très vive depuis l'apparition des mutuelles sans intermédiaires. En outre, le coût d'installation (marketing, publicité) est très élevé, sans pouvoir attendre un retour sur investissement avant 5 ans. Enfin les acheteurs par vente directe constituent une clientèle très volatile (personnes jeunes aux revenus élevés) dont la sinistralité est supérieure à la moyenne.

b) Les sociétés sans intermédiaires

Les sociétés sans intermédiaires ont pénétré le marché de l'assurance de dommages dans les années 70. Grâce à une bonne sélection des risques et à l'adoption d'une gestion standardisée, elles ont proposé des tarifs inférieurs de 30 % à ceux des sociétés traditionnelles. Ce différentiel tend à s'amenuiser, les sociétés traditionnelles ayant amélioré leur compétitivité. Leur part de marché semble stagner.

Les mutuelles du code de la mutualité distribuent essentiellement des produits d'assurance santé ou de prévoyance qui concurrencent directement les fournisseurs traditionnels des agents généraux et courtiers, à savoir les entreprises d'assurance du code des assurances. Les agents généraux sont donc gênés dans leur volonté de développer la commercialisation de ce genre de produits.

c) La " bancassurance "

Le mot de " bancassurance " désigne les établissements bancaires qui se sont impliqués dans des activités d'assurance.

Au début des années 70, les groupes bancaires ont commencé à constituer des filiales d'assurance vie et de capitalisation, dont les produits étaient distribués par les réseaux des guichets bancaires.

Plusieurs facteurs expliquent le développement de la "bancassurance".

Le cadre juridique était favorable. En effet, si les banques ne peuvent exercer directement une activité de production de produits d'assurance, à l'exception des activités de caution, elles peuvent cependant créer des filiales d'assurance ou distribuer des produits d'assurance.

L'article 5 de la loi bancaire n° 84-46 du 24 janvier 1984 leur permet d'exercer des opérations connexes aux opérations de crédit, à savoir le placement, la souscription, l'achat, la gestion, la garde, la vente de valeurs mobilières et de tout produit financier, ce qui englobe la commercialisation des produits d'assurance vie.

Elles peuvent en outre, dans certaines limites, intervenir en qualité de mandataires, courtiers ou commissionnaires pour le compte d'une filiale ou d'une compagnie d'assurance. Les profits bruts tirés de la présentation, pour le compte d'une filiale de produits d'assurance, ne peuvent toutefois excéder 10 % du produit net bancaire, conformément au règlement du comité de réglementation bancaire n° 86-21 du 24 novembre 1986.

Les banques filialisent rarement leur activité de distribution de produits d'assurance et préfèrent étendre leur objet social à l'activité de courtage. Elles concluent avec les compagnies d'assurance ou avec leurs filiales d'assurance, des accords commerciaux aux termes desquels elles distribuent leurs produits par l'intermédiaire de leurs guichets, moyennant le versement de commissions.

Les banques se sont vues contraintes de rentabiliser leurs réseaux de guichets, confrontés à l'informatisation et à l'automatisation croissante. Les commissions versées au réseau par les filiales bancaires ou les compagnies d'assurance qui ont conclu avec la banque un accord de partenariat constituent un revenu supplémentaire pour les banques.

L'investissement à réaliser au départ s'est avéré modéré, puisque principalement limité à la formation du personnel. Les salariés de la banque qui présentent les opérations d'assurance doivent en effet, conformément au code des assurances, recevoir une formation adéquate et obtenir la carte professionnelle de courtiers. Les dirigeants de la banque doivent également accomplir un stage professionnel.

Le développement de la "bancassurance" correspond aussi à la demande de la clientèle en matière d'offres financières globales.

Enfin, la forte croissance, dans les années 80 du marché des produits d'assurance vie a incité les banques à investir ce marché. Les produits d'épargne bancaire étant moins rentables, elles ont reconverti une part de leurs actifs en épargne vie. Un traitement fiscal privilégié explique le succès connu par cette forme d'épargne. Les produits d'assurance vie sont désormais parfaitement intégrés à la gamme des produits d'épargne à long terme.

Si l'assurance vie est distribuée à près de 59 % par les guichets bancaires, la part des établissements financiers dans l'activité de distribution de l'assurance de dommages est beaucoup plus faible, mais est en constante augmentation.

Les " bancassureurs " affichent d'ailleurs l'ambition de conquérir, d'ici 2005, 25 % du marché des assurances de dommages du particulier. Le C.A.P.A. évalue quant à lui à 15 % la part de marché potentielle des " bancassureurs ".

La plupart des banques à réseau distribuent déjà ou s'apprêtent à distribuer des produits d'assurance de dommages, pour des raisons allant de la fidélisation de la clientèle à la nécessité d'exercer des activités rentables et peu soumises aux fluctuations des marchés financiers. Le premier banquier à s'être lancé dans la "bancassurance" est le Crédit mutuel de l'Est qui a créé une filiale, les Assurances du Crédit mutuel en 1972. Le Crédit agricole a créé une filiale d'assurance de dommages en 1989, Pacifica, puis ont suivi le Crédit lyonnais (accord avec Allianz), les Banques populaires (accord avec la Maaf), la B.N.P. (avec l'U.A.P.) , la Société générale (avec les A.G.F. et Commercial Union) et le C.C.F. Les deux derniers venus, les Caisses d'épargne (avec les Mutuelles du Mans Assurances) et le C.I.C. (avec le GAN), disposent d'un réseau important (4 200 agences pour les Caisses d'épargne).

d) Analyse concurrentielle

- L'existence de formes variées de distribution, la présence d'un grand nombre de distributeurs ainsi que la multiplicité des produits sont favorables à la concurrence.

- Les sociétés sans intermédiaires ont des coûts de distribution et de gestion inférieurs à ceux des sociétés traditionnelles, ce qui rend leurs produits plus compétitifs que les produits des sociétés ayant recours à des intermédiaires classiques. La part de leurs frais généraux sur leur chiffre d'affaires est de 25 % inférieure à la moyenne du marché, selon le C.A.P.A.

La comparaison des coûts des produits proposés par les mutuelles sans intermédiaires et par les sociétés qui ont recours à des intermédiaires est difficile. Les agents généraux et les courtiers effectuent une prestation différente des services rendus par le personnel d'une mutuelle sans intermédiaires. Ils présentent des contrats " sur mesure ", généralement plus flexibles que ceux des mutuelles . Le service personnalisé rendu par l'agent ou le courtier, fonction de conseil, de modification des clauses mal adaptées, d'octroi de facilités de paiement, d'aide à l'accomplissement des démarches, justifie le paiement d'une prime plus élevée. En outre, les produits ne sont pas toujours comparables, les sociétés sans intermédiaires distribuant essentiellement des contrats multirisques habitation ou des contrats d'assurance automobile.

Les établissements bancaires disposent quant à eux de deux atouts par rapport aux réseaux traditionnels de l'assurance.

En premier lieu, les établissements bancaires bénéficient, par rapport aux réseaux traditionnels des agents généraux et des courtiers, d'une implantation géographique remarquable.

Une étude du C.A.P.A. réalisée en 1997, a comparé l'implantation des agences générales à celle des autres distributeurs de produits d'assurance. De cette étude, il résulte que 34 % des agences sont situées dans des arrondissements de moins de 50 000 habitants et sont particulièrement présentes dans des zones semi-rurales, les campagnes et les villes moyennes où elles sont en concurrence directe avec les banques régionales à forme mutualiste (à savoir le Crédit agricole, le Crédit mutuel, les Banques populaires), les banques affiliées à l'A.F.B. étant essentiellement situées en zones urbaines et les mutuelles sans intermédiaires étant systématiquement absentes des arrondissements de moins de 30 000 habitants. 70 % de la clientèle des agents généraux se situe en zone rurale ou dans des villes dont la population est inférieure à 100 000 habitants.

La densité moyenne des points de vente d'assurance s'élève, pour 10 000 ménages, à 2,3 guichets de Caisses d'épargne, 5,5 guichets de banques mutualistes, 5,3 guichets de banques A.F.B., 7,2 agences générales, 0,9 bureau de mutuelles sans intermédiaires et 7 guichets de La Poste.

En second lieu, les filiales vie des banques et les compagnies d'assurance partenaires des banques bénéficient de taux de chargement plus bas que leurs concurrentes compagnies traditionnelles, car elles commercialisent leurs produits par l'intermédiaire des guichets bancaires et bénéficient de l'expérience du personnel qui y est affecté en matière de gestion de l'épargne.

Les avantages comparatifs dont jouissent les " bancassureurs " par rapport aux réseaux traditionnels de distribution de l'assurance ne constituent pas en eux-mêmes des distorsions de concurrence, en l'absence de discriminations en leur faveur et en l'absence de prix prédateurs avérés. Les banques ont adopté, conformément à la loi, le statut de courtier pour distribuer les produits d'assurance. Elles exercent cette activité de courtier dans les mêmes conditions qu'une société de courtage traditionnelle, sans qu'aucun avantage particulier ne leur soit conféré.

- Les relations d'exclusivité qui existent sur le marché de la distribution de produits d'assurance ne semblent pas remettre en cause son fonctionnement concurrentiel.

La distribution exclusive qui caractérise les mutuelles sans intermédiaires de par leur statut, et les agents généraux, ne limite pas le choix du consommateur, la concurrence s'exerçant entre tous les opérateurs.

C'est ainsi que le renforcement de l'exclusivité de production de l'agent général et la limitation subséquente de son pouvoir de placement n'apparaît pas a priori de nature à constituer un obstacle majeur à la commercialisation des produits d'assurance. En effet, une société d'assurance peut recourir à de multiples circuits pour distribuer ses produits d'assurance (ses salariés, des courtiers, des guichets bancaires). En outre, la concurrence s'opère entre distributeurs. Enfin, cette activité accessoire ne représenterait, selon la F.N.S.A.G.A., que 3 à 4 % du chiffre d'affaires des agents généraux (dont 3 % en coassurance).

Il faut cependant souligner que le resserrement des liens d'exclusivité entre l'agent et sa société mandante pourrait contraindre l'assuré à recourir à d'autres intermédiaires que l'agent général pour les risques non assurés par cette société. Par exemple, si la compagnie mandante plafonne le montant des risques assurés, ce qui est fréquent pour la couverture des risques industriels, l'agent général ne pourra proposer aucune assurance complémentaire pour couvrir le montant des risques non couverts par cette entreprise.

- La profession d'agent général s'est assainie et modernisée et le chiffre d'affaires moyen réalisé par agence a cru notablement durant ces dix dernières années. Disposant d'une formation de plus en plus poussée, les agents généraux et courtiers disposent d'atouts pour la distribution des produits d'assurance complexes (clientèle professionnelle, risques industriels, assurance de personnes), tandis que les banques et les mutuelles continueront à distribuer des produits relativement simples et standardisés, accessibles avec un minimum de formalités.

- Plus préoccupante est en revanche l'existence alléguée de pratiques de ventes liées, consistant par exemple, pour le " bancassureur ", à lier une offre de prêt à la signature d'un contrat d'assurance multirisques habitation. Ces pratiques, si elles étaient démontrées, seraient susceptibles d'être qualifiées sous l'angle de l'article 7 de l'ordonnance du 1 er décembre 1986 ou de l'article 85 §1 du Traité de Rome.

Par ailleurs, l'utilisation, pour l'activité de distribution d'assurance, des fichiers bancaires contenant des données personnelles (par exemple des informations confidentielles contenues dans les bulletins de virement) prohibée par les dispositions protégeant le secret bancaire et par la législation sur la protection des données a été stigmatisée par le Bureau international des producteurs d'assurances et de réassurances (B.I.P.A.R.), notamment en Allemagne et en Belgique.

C. LES RÉSEAUX DE LA POSTE ET DU TRÉSOR PUBLIC

Au sein des grands réseaux bancaires et financiers de distribution des produits d'assurance vie, La Poste et, dans une moindre mesure, le Trésor figurent en bonne place en ce qui concerne le nombre de leurs guichets ainsi que leurs parts dans la collecte de l'épargne.

Réseaux

Nombre de guichets

Collecte vie en 1996 (MdsF)

Evolution 96/95

Collecte vie par guichet

Crédit agricole

8 100

54,6

+ 8 %

9,1

La Poste

17 000

39,0

+ 17 %

2,3

Caisse d'épargne

5 500

37,7

+ 31 %

6,85

Société générale

1 850

22

+ 35 %

11,9

B.N.P.

2 000

23,5

+ 14,5 %

11,75

Crédit lyonnais

2 000

17,9

+ 9,1 %

8,95

Banques populaires

1 600

8,07

+ 11 %

5,04

Trésor public

4 500

7,3

+ 20 %

1,62

CCF

400

5,3

+ 28 %

13,25

(Source : La vie des agences, décembre 1997, n° 5, p. 64)

La Poste et le Trésor distribuent des produits d'assurance vie de la C.N.P., exclusivement pour le Trésor et principalement pour La Poste, et bénéficient d'un réseau national.

1. Distribution de produits d'assurance par La Poste

a) Cadre juridique

La Poste est présente depuis longtemps dans la distribution des produits d'assurance vie et de capitalisation. Depuis 1868, elle commercialise à travers ses bureaux de poste les produits d'assurance vie de la Caisse nationale de prévoyance, qu'elle était habilitée à distribuer sur le fondement de l'article R.433-10 du code des assurances. Cet article a été abrogé par la loi n° 92-665 du 16 juillet 1992 qui a modifié le statut de la C.N.P. et en a fait une société anonyme relevant du code des assurances et appartenant au secteur public. Il autorisait la C.N.P. à utiliser, pour la présentation de ses contrats et l'exécution de ses opérations, les services des administrations du Trésor et des Postes.

La loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 a fait de La Poste une personne morale de droit public dotée d'une personnalité juridique distincte de celle de l'Etat, dénommée exploitant public. Selon ce texte, La Poste exerce à la fois des activités de service public, pour lesquelles elle bénéficie d'un monopole légal, et des activités appartenant au domaine concurrentiel, principalement les services financiers.

L'article 2 de la loi habilite La Poste à " offrir, dans le respect des règles de la concurrence, des prestations (...) relatives à tous produits d'assurance ". Son activité peut donc désormais s'étendre en vertu d'une habilitation législative générale, à la commercialisation en propre ou pour le compte de tiers de produits d'assurance de dommages.

L'article 13 du cahier des charges de l'exploitant public décrit ce nouveau champ d'activité sous le titre " offre de produits d'assurance " : " La Poste est habilitée à offrir, pour son propre compte ou pour celui de filiales créées et agréées à cet effet, tous contrats d'assurance et de capitalisation. Elle peut commercialiser les produits de la Caisse nationale de prévoyance. Elle peut également distribuer, comme intermédiaire d'assurance, les produits d'autres entreprises d'assurance, dans le respect des règles de présentation des opérations d'assurance. La Poste, seule ou en partenariat, peut créer ou acquérir des filiales ou prendre des participations dans les entreprises régies par le code des assurances dans les conditions prévues à l'article 32 du présent cahier des charges ".

La liberté commerciale de La Poste est toutefois limitée puisqu'en vertu de l'article 12-2° de son cahier des charges, le lancement de tout nouveau produit d'assurance est soumis à l'accord préalable du ministre chargé des postes et télécommunications ainsi qu'à l'agrément du ministre chargé de l'économie et des finances. En théorie, cet accord a seulement pour but de vérifier que La Poste demeure cantonnée dans le champ d'activités définies à l'article 8 du cahier des charges et que la protection des épargnants est bien assurée.

En 1992, La Poste a adopté le statut commercial privé de courtier en produits d'assurance, en s'immatriculant à cette fin au registre du commerce de Nanterre.

Toutefois, à ce jour, La Poste ne commercialise que des produits d'assurance vie. Il convient donc d'examiner les conditions dans lesquelles elle commercialise ces produits et de s'interroger sur les motifs de son absence sur le secteur de l'assurance de dommages.

b) Place de l'activité de distribution d'assurance dans l'activité globale de La Poste

- Distribution de produits d'assurance vie

Au 31 décembre 1996, le poids de l'assurance vie dans l'encours des produits financiers de La Poste représentait 22 % (contre 8,5 % en 1992), soit 185 milliards de francs. Cet encours a quadruplé depuis 1990. Avec un chiffre d'affaires supérieur à 38,6 milliards en 1996, elle détient une part de marché supérieure à 9 %, évaluée à 10,8 % pour 1997 et occupe la seconde place derrière le Crédit agricole et devant les Caisses d'épargne.

Sur le secteur de la distribution de produits d'assurance, La Poste est en concurrence avec les autres intermédiaires d'assurance, à savoir les agents généraux d'assurance, les courtiers, les guichets bancaires et le réseau du Trésor ainsi qu'avec les salariés ou mandataires des opérateurs sans intermédiaires.

La Poste distribue principalement des produits d'épargne, de retraite et des garanties de prévoyance de la Caisse nationale de prévoyance, mais aussi des produits d'assurance vie du groupe A.G.F. (produit Valorea).

La Poste a conclu un accord de partenariat avec la C.N.P. en 1994 pour une durée de dix années. Les engagements respectifs des partenaires sont précisés dans cet accord qui garantit à la C.N.P. un volume minimal d'activité. Le chiffre d'affaires réalisé avec La Poste par la C.N.P. s'élevait en 1995 à 33 milliards de francs et en 1996 à 39 milliards de francs. Le partenariat avec La Poste est aussi organisé dans le cadre de la filiale Préviposte, dont le chiffre d'affaires réalisé avec la C.N.P. est de 5,6 milliards de francs. Les produits sont élaborés par la C.N.P. à la demande de La Poste qui définit ses besoins. Le contrat le plus largement commercialisé par le réseau est le produit " Poste Avenir ".

Certains actes de gestion sont directement effectués aux guichets par le personnel des bureaux de poste, grâce à des outils informatiques mis à disposition du réseau par la C.N.P.

La C.N.P. a versé en 1996 1,3 milliard de francs à La Poste en rémunération de son activité de distribution, dont 820 millions sur flux et 456 millions en encours, soit un pourcentage de 3,3 % des primes collectées.

C'est au sein du même réseau (composé de 17 000 bureaux et agences) et avec l'aide du même personnel que La Poste exerce l'activité de service public du courrier et son activité financière appartenant au secteur concurrentiel, dont la distribution de produits d'assurance fait précisément partie.

- Distribution de produits d'assurance de dommages

La Poste a envisagé de développer la distribution de produits d'assurance de dommages ainsi que son nouveau statut l'y habilite.

Elle a ainsi conçu en mai 1997 un projet de constitution d'une filiale commune avec les A.G.F. pour la distribution de produits I.A.R.D. La Poste revendique un statut de " bancassureur ", et estime qu'à terme, les " bancassureurs " détiendront environ le quart du marché de l'assurance I.A.R.D. L'exploitant public estime en effet que l'avenir est au service financier universel, les produits I.A.R.D. banalisés tels l'assurance automobile et l'assurance multirisques habitation constituant des produits d'appel et aussi des instruments de fidélisation de la clientèle des banques.

Le projet de La Poste s'est heurté à l'opposition des agents généraux, des compagnies d'assurance et des " bancassureurs ", au premier rang desquels le Crédit agricole. Devant cette opposition, la direction du Trésor n'a pas avalisé le projet et le prochain contrat de plan ne contiendrait, selon La Poste, aucune mention de cette activité. Lors de son discours de clôture du 16 décembre 1997 aux Entretiens de l'assurance, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a manifesté son opposition à ce que La Poste s'engage, dans le prochain contrat de plan, dans l'assurance de dommages, n'excluant pas cependant des expériences en matière d'assurances de personnes, localisées, et en tout état de cause, non systématiques.

La distribution d'assurances de dommages par La Poste apparaît cependant à beaucoup inéluctable à terme. L'intérêt d'une telle activité a été souligné dans plusieurs rapports officiels, tels le rapport de la mission Delfau de septembre 1990 et le rapport Larcher de 1997. Il convient de noter que certaines postes européennes distribuent déjà des produits d'assurance de dommages, telle La Poste belge qui distribue les produits de la Royale Belge.

c) Analyse concurrentielle

La Commission européenne, puis le Tribunal de première instance des Communautés européennes se sont prononcés sur l'allégement fiscal dont bénéficie La Poste en contrepartie de ses contraintes d'intérêt général. Le Conseil de la concurrence a pour sa part défini les conditions d'application des règles de la concurrence aux services financiers de La Poste.

L'article 21 de la loi de 1990 prévoit que La Poste bénéficie, en contrepartie des contraintes d'intérêt général imposées par l'Etat, à savoir la contrainte de desserte de l'ensemble du territoire national et de participation à l'aménagement du territoire, d'un abattement de 85 p. 100 sur les bases d'imposition de la fiscalité locale (taxe foncière, taxe professionnelle). Cet allégement fiscal a fait l'objet d'une plainte de la F.F.S.A., de Groupama, du B.I.P.A.R. et de la F.N.S.A.G.A. devant la Commission européenne, pour violation de l'article 92 du Traité de Rome, car il aurait été de nature, selon les requérants, à créer des distorsions de concurrence dans le domaine des assurances.

Par décision du 8 février 1995, la Commission a refusé de qualifier l'avantage fiscal dont bénéficie La Poste d'aide d'Etat au sens de l'article 92 susvisé, le montant de cet avantage (1,196 milliard de francs) ne dépassant pas le surcoût généré par l'accomplissement de ses missions de service public, évalué entre 1,32 et 1,82 milliard de francs et ne pouvant par conséquent pas bénéficier aux activités concurrentielles de l'exploitant public. La Commission a toutefois invité La Poste à présenter des comptes séparés de chacune de ses activités, ouvertes à la concurrence et non concurrentielles.

Cette décision a fait l'objet d'un recours devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes, qui a statué par arrêt du 27 février 1997.

Le Tribunal a relevé que La Poste s'est vu confier la gestion d'un service d'intérêt économique général et que les contraintes de desserte et de participation à l'aménagement du territoire devaient être considérées comme des missions particulières au sens du 2 de l'article 90 du traité. Il a considéré que l'avantage fiscal constituait une aide d'Etat au sens du 1 de l'article 92 du traité, bien que ne comportant pas un transfert de ressources d'Etat.

Le Tribunal a estimé que les aides d'Etat pouvaient bénéficier de la dérogation prévue à l'article 90 du traité, et ainsi échapper à l'interdiction de l'article 92 : " à condition que l'aide en question ne vise qu'à compenser les surcoûts engendrés par l'accomplissement de la mission particulière incombant à l'entreprise chargée de la gestion d'un service d'intérêt économique général et que l'octroi de l'aide s'avère nécessaire pour que ladite entreprise puisse assurer ses obligations de service public dans des conditions d'équilibre économique ".

L'aide étant inférieure au surcoût généré par les missions de service public de La Poste, le Tribunal a considéré qu'elle pouvait bénéficier de la dérogation prévue au 2 de l'article 90. En outre, nonobstant l'absence d'une comptabilité analytique permettant de distinguer entre les différents secteurs d'activité de La Poste, et en l'absence de preuve contraire à la charge des requérants, le Tribunal a estimé que la Commission avait à bon droit déduit l'absence de subventions croisées de cette supériorité du surcoût sur l'avantage fiscal.

Saisi par l'Association française des banques d'une demande d'avis sur le fonctionnement des services financiers de La Poste, le Conseil de la concurrence a défini, dans un avis n° 96-A-10 du 25 juin 1996, les conditions d'application des règles de la concurrence à ces services. Les conclusions dégagées par le Conseil dans cet avis sont applicables à l'activité de distribution de produits d'assurance par La Poste, partie intégrante de ces services financiers.

Le Conseil n'a pas contesté le principe de l'exercice concomitant par La Poste d'activités sous monopole (le courrier) et d'activités exercées en concurrence (les services financiers), à condition que ces activités concurrentielles " ne puissent bénéficier des conditions propres à l'exercice de la mission de service public définie dans le cadre du monopole " et qu'ainsi l'exploitant public n'utilise pas sa position dominante sur le secteur non concurrencé (courrier) pour pratiquer des prix de prédation sur la partie concurrencée de son activité (services financiers), destinés à éliminer ses concurrents.

Il a souligné que les disparités dans les modes de fonctionnement entre les services financiers de La Poste et ses concurrents, ainsi que l'absence de séparation entre les activités sous monopole et les activités exercées en concurrence, rendaient difficile l'examen comparatif des conditions de concurrence. La Poste est un opérateur avantagé par un réseau de guichets sans équivalent et par le prestige attaché à l'image du service public, mais elle supporte des contraintes de desserte et de participation à l'aménagement du territoire et son autonomie commerciale est limitée.

Le Conseil a estimé que la mise en place d'un système de comptabilité analytique fiable et transparent était nécessaire pour pouvoir contrôler la tarification pratiquée par La Poste pour ses services financiers et démontrer son caractère éventuellement abusif, en permettant une meilleure identification des coûts de chacune des activités de La Poste et au sein de chacune de ces activités, des gammes de produits distribués par l'exploitant public. Le Conseil a précisé que cette comptabilité devait notamment permettre :

- l'imputation à chaque activité du coût d'utilisation du réseau ;

- la distinction entre coûts fixes et coûts variables en fonction de l'activité ;

- la mise en place de normes par l'autorité de tutelle permettant une analyse des coûts à usage externe.

Le Conseil a toutefois ajouté que quelles que soient les améliorations qui pourraient être apportées à la comptabilité analytique de La Poste, le contrôle effectif du respect des règles de la concurrence resterait difficile à effectuer tant que ne serait pas intervenue une séparation juridique des activités sous monopole et des activités concurrentielles, par exemple dans le cadre d'une filialisation des services financiers.

Ces aménagements sont d'autant plus urgents qu'ils sont aussi préconisés, pour certains d'entre eux, par la Commission européenne dans sa décision du 8 février 1995, ainsi que par la directive concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté.

2. Distribution de produits d'assurance par le Trésor public

a) L'activité de distribution du Trésor public

A côté de ses missions régaliennes, le Trésor public exerce une activité de distribution de produits financiers et d'assurance. Depuis la création de la Caisse nationale de prévoyance, les services des administrations du Trésor distribuent, avec les services de La Poste, les produits de la C.N.P. Il s'agit de produits d'épargne et de retraite ainsi que des garanties de prévoyance.

L'article R.433-10 du code des assurances habilitait la Caisse nationale de prévoyance à utiliser les services des administrations du Trésor et des Postes pour la présentation de ses contrats et l'exécution de ses opérations. L'article 6 de la loi n° 92-665 du 16 juillet 1992 portant adaptation au marché unique européen de la législation applicable en matière d'assurance et de crédit et modifiant le statut de la C.N.P., ayant abrogé cet article, les agents du Trésor ne détiennent plus aucune habilitation législative exprès pour distribuer ces produits.

L'administration a habilité pour la distribution des produits d'assurance dans les postes comptables 4 357 agents spécialement formés et qualifiés de mandataires non salariés, au sens de l'article R.511-2-4° du code des assurances. Ces agents perçoivent des commissions pour chaque contrat placé, dont le montant n'a pas été communiqué 248( * ) .

L'offre de services d'assurance du Trésor public est faite dans le réseau de ses 4 500 postes comptables. Ceux-ci, aux termes d'instructions de la direction de la comptabilité publique, non transmises aux rapporteurs et qui n'ont pas été communiquées au Conseil, ne peuvent utiliser pour ces activités des informations de nature fiscale et notamment le fichier de la direction générale des impôts. Cette activité constitue, selon la loi du 25 juin 1928, une activité privée, exercée sous la responsabilité personnelle des trésoriers payeurs généraux.

L'Etat, pris en la personne du Directeur de la comptabilité publique, a signé le 5 mai 1995 un accord de partenariat avec la C.N.P. pour une durée de 10 années. Aux termes de l'article 1 de cette convention, " la société C.N.P. Assurances et ses filiales utiliseront le réseau du Trésor public pour la présentation de leurs contrats et l'exécution de leurs opérations (...) ".

" Les conditions financières de cette mise à disposition, dont le principe est la compatibilité avec les règles normales de la concurrence, sont définies dans une convention financière signée entre les deux parties ". Cette convention n'a pas été communiquée aux rapporteurs.

Le chiffre d'affaires réalisé avec le Trésor par la C.N.P. s'élevait en 1995 à 6 milliards de francs et en 1996 à 7,3 milliards de francs, dont 605 millions dans le cadre d'Investissement Trésor Vie (I.T.V.), filiale commune des deux institutions. Ceci représente une part de 1,6 % du marché de l'assurance vie. Les produits les plus largement commercialisés par le réseau sont les produits d'épargne " Trésor-Vie ", complétés par des contrats de retraite et de prévoyance.

Une décision implicite du ministre de l'économie rejetant une demande tendant à réglementer les conditions dans lesquelles le réseau du Trésor distribue les produits de la C.N.P. a fait l'objet le 8 février 1994 de la part de la Fédération nationale des agents généraux d'assurance, d'un recours devant le Conseil d'Etat. Ce recours est pendant.

Selon la requérante, l'interdiction posée par le statut général de la fonction publique, de cumul entre emploi public et activité privée lucrative semble interdire la distribution de produits d'assurance par les agents du Trésor, sauf texte exprès. Elle estime que, en outre, les conditions dans lesquelles sont distribués les produits sont de nature à perturber le jeu de la concurrence. En effet, les agents du Trésor utiliseraient les moyens logistiques de l'administration, la franchise postale ainsi que les données dont ils disposent dans le cadre de leur activité publique. Leur fonction " d'autorité " leur confèrerait au surplus une influence hors du commun qui paraît de nature à perturber le jeu normal de la concurrence. L'envoi de lettres au domicile des contribuables, portant l'en-tête du Trésor public, serait au surplus de nature à induire dans l'esprit des contribuables, la croyance à une caution financière de l'Etat. Le Conseil d'Etat a par ailleurs, déjà condamné de véritables pressions exercées sur les contribuables (arrêt du 18 février 1983, F.N.S.A.G.A., Rec. Leb. P.71), estimant que " l'ancien article R.433-10 du code des assurances n'autorisait pas un agent du Trésor, dans une lettre proposant la souscription par son intermédiaire d'un contrat auprès de la C.N.P., à faire état de l'attention particulière avec laquelle il suit le règlement des factures du destinataire, fournisseur habituel de l'administration, ni à se référer à l'avertissement relatif à l'impôt sur le revenu d'un contribuable pour lui suggérer qu'il aurait intérêt à souscrire un contrat d'assurance sur la vie ".

b) Analyse concurrentielle

Dans un avis n° 88-A-15 du 28 septembre 1988, le Conseil de la concurrence a apprécié les effets sur la concurrence de l'exercice par des fonctionnaires de l'Etat d'activités concurrentielles :

Les ingénieurs des directions départementales de l'équipement et de l'agriculture sont habilités par la loi à effectuer des travaux d'ingénierie au profit des collectivités locales, moyennant l'allocation d'honoraires à la charge des intéressées. Ils concurrencent directement les cabinets d'ingénierie privés qui réalisent une part importante de leur activité avec les collectivités locales, et ce d'autant plus que leur rémunération est, pour des missions comparables, de l'ordre de 25 à 30 % moins élevée.

Le Conseil a relevé que les services de l'Etat bénéficiaient d'une position privilégiée par rapport à leurs concurrents et que les conditions de fonctionnement du marché étaient faussées par leur présence sur celui-ci, en raison de la possibilité qui leur était conférée d'accomplir des prestations de service selon des règles ne relevant pas d'une logique de marché (tarifs fixés par voie réglementaire).

De la même façon, le Conseil, s'il n'a pas à apprécier l'opportunité de l'intervention d'agents de l'Etat dans la distribution de produits d'assurance, observe que les agents du Trésor bénéficient par rapport à leurs concurrents d'une position privilégiée pour la distribution de produits d'assurance vie. La notoriété attachée à l'image d'un service de l'Etat, la présence sur tout le territoire d'un réseau de postes comptables, l'utilisation des moyens logistiques de l'administration et la force de persuasion particulière de ces agents à l'égard d'éventuels " clients ", constituent autant d'avantages de nature à générer des distorsions de concurrence dans la distribution de l'assurance vie.

Ces distorsions de concurrence bénéficient en premier lieu à la C.N.P. qui dispose avec le Trésor d'un réseau privilégié et qui lui est entièrement dédié, le Trésor ne distribuant que les produits de la C.N.P. (7 % des produits de la C.N.P.), aux côtés des Caisses d'épargne (40 %), de La Poste (39%), des établissements financiers (6 %), des mutuelles de fonctionnaires (5 %) et des entreprises (3 %).

Ainsi que l'avait indiqué le Conseil dans un avis n° 96-A-12, portant sur les conditions de la concurrence prévalant dans le système bancaire, l'utilisation du réseau du Trésor, partagé entre des activités de service public et des activités concurrentielles, pose un problème identique à celui de La Poste et implique les mêmes préconisations de séparation comptable et éventuellement juridique des activités concurrentielles et non concurrentielles.

V. LES CONSÉQUENCES SUR LA CONCURRENCE DES DIFFÉRENCES FISCALES ET RÉGLEMENTAIRES EN MATIÈRE D'ASSURANCE À L'INTÉRIEUR DE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE ET DANS LA PERSPECTIVE DU PASSAGE À L'EURO

Depuis 1964 249( * ) , un marché des assurances aujourd'hui étendu à l'ensemble des pays de l'Espace économique européen (E.E.E.) s'édifie à travers une série de textes qui visent à faciliter la libre circulation des prestations et le libre établissement des opérateurs.

Un rappel de l'état d'avancement du processus d'unification du marché européen précédera l'analyse des conséquences de ce processus sur la concurrence, notamment dans la perspective de la future monnaie unique.

A. LE SECTEUR DES ASSURANCES BÉNÉFICIE D'UN CADRE JURIDIQUE PARTIELLEMENT HARMONISÉ

Nonobstant les directives générales concernant les opérations financières dont le champ d'application dépasse le seul secteur des assurances, près d'une trentaine de directives intéressant directement ce secteur ont été adoptées par le Conseil des communautés européennes. Ces textes qui ont permis l'émergence d'un marché unique de l'assurance laissent encore une place importante aux réglementations nationales. Parce qu'ils obéissent à des règles de fonctionnement très différentes, les secteurs de l'assurance des " grands risques 250( * ) ", de la réassurance et des opérations d'assurance crédit à l'exportation ne seront évoqués qu'incidemment dans des développements qui seront donc centrés sur les risques dits " de masse ".

1. La mise en oeuvre des principes de libre circulation

L'harmonisation des conditions d'exercice de l'activité d'assureur résulte, en premier lieu, de dispositions de portée générale créant un environnement juridique influant sur les modalités de fonctionnement des entreprises. Par ailleurs, une harmonisation spécifique des conditions d'activité du secteur a été entreprise à travers des directives à portée variable.

Des dispositions adoptées dans le cadre de directives dites " horizontales ", c'est-à-dire créant les conditions minimales du fonctionnement harmonisé de différentes activités économiques, intéressent le secteur des assurances.

Tel est par exemple le cas de la directive n° 88/361 du 24 juin 1988 sur la libéralisation des mouvements de capitaux dont la Commission européenne estime qu'elle est susceptible de " perturber le marché de l'assurance sur la vie dans la mesure où elle a pour effet d'entraîner la libéralisation de la commercialisation de tous les produits financiers " 251( * ) . Il en est de même de la directive n° 95/26 du 22 juin 1995, concernant les services financiers (banques, assurances et services d'investissements), qui renforce les effets de l'existence de " liens étroits " entre l'opérateur concerné par un contrôle prudentiel et d'autres entreprises 252( * ) .

La liberté d'établissement des opérateurs et la liberté de circulation des prestations sont des objectifs définis par le Traité du 25 mars 1957 dont plusieurs directives assurent la réalisation en matière d'assurance.

a) Le libre établissement des opérateurs sur le marché intérieur

- Règles applicables aux entreprises d'assurance

La liberté d'établissement, prévue par les articles 52 et suivants du traité du 25 mars 1957, a pour conséquence de permettre à une entreprise dont le siège se trouve dans un Etat membre d'ouvrir une succursale ou une agence dans un autre Etat membre selon des conditions équivalentes à celles réservées aux entreprises du pays d'accueil.

Pour ce qui concerne les entreprises d'assurance, cette étape a été franchie en 1973 pour l'assurance directe non-vie et en 1979 pour l'assurance directe vie. Ces deux textes instituent, en effet, une liberté d'établissement par l'harmonisation des conditions d'accès à l'activité d'assurance subordonnée à l'octroi d'un agrément délivré dans tous les Etats membres selon des conditions juridiques et financières comparables et une procédure uniforme. Le contrôle financier des opérateurs est également harmonisé par l'instauration d'une marge de solvabilité minimale et d'un fonds de garantie uniformisés.

Les directives précisent les conditions auxquelles doivent satisfaire les entreprises qui sollicitent un agrément. Ces conditions tiennent dans la forme et l'objet social qui doit être limité à l'activité d'assurance et aux opérations qui en découlent directement, à la présentation d'un programme d'activité qui doit contenir un certain nombre d'informations concernant la nature des engagements que l'entreprise se propose de prendre (assurance vie) ou la nature des risques qu'elle se propose de garantir (non-vie) enfin, aux éléments constituant le fonds de garantie. L'entreprise doit s'engager à posséder la marge de solvabilité, à constituer les provisions techniques et, en assurance automobile, à adhérer aux fonds spéciaux du pays d'accueil.

Le renoncement à l'harmonisation systématique et préalable des réglementations nationales proposé par le " Livre Blanc " de la Commission de 1985, entériné par l'Acte Unique de 1986 et dont la Cour de justice des Communautés européennes a tiré les conséquences dans des arrêts du 4 décembre 1986 253( * ) , a facilité la poursuite du processus de libéralisation des échanges entamé par les premières directives. Depuis lors, la construction du marché intérieur européen est fondée sur une harmonisation minimale des seuls aspects considérés comme essentiels pour l'activité concernée et, pour le surplus, sur la reconnaissance des contrôles effectués dans chaque Etat.

Les directives n° s 88/357/CEE du Conseil du 22 juin 1988 et 90/169/CEE du Conseil du 8 novembre 1990 254( * ) ont complété et modifié les " premières directives ", et ouvert la deuxième étape de réalisation du marché intérieur européen de l'assurance en rendant effective en droit la liberté de prestation de services (L.P.S.) par une entreprise sur l'ensemble du territoire communautaire 255( * ) . Le régime créé par ces directives est ouvert à toutes les entreprises d'assurance bénéficiant de l'agrément délivré en vertu des premières directives.

S'agissant par exemple de l'assurance de dommages, ces textes permettent à une entreprise sise dans un Etat membre de couvrir un risque situé dans un autre Etat membre (art. 12-D.88/357) 256( * ) . Par ailleurs, deux catégories de risques, bénéficiant d'un régime de liberté variable, sont définies en fonction de la taille et de l'importance du preneur : les grands risques et les risques de masse. La liberté de prestation est également instaurée en matière d'assurance vie, pour laquelle est notamment posée la distinction entre L.P.S. active, dans l'hypothèse où l'opérateur démarchait le preneur dans un autre Etat membre et L.P.S. passive, situation dans laquelle le preneur vient à sa rencontre.

Les " troisièmes directives " sont entrées en vigueur le 1 er juillet 1994. Elles instituent un système de licence unique qui permet aux entreprises d'assurance agréées par l'Etat de leur siège social d'opérer tant en établissement (agence ou succursale) qu'en L.P.S. dans tout l'espace communautaire sur la base d'un agrément unique délivré par les autorités compétentes de l'Etat du siège et en étant soumises aux seuls contrôles, règles et pratiques en vigueur dans leur Etat membre d'origine. Ce mécanisme entraîne la suppression de l'approbation préalable et de la communication systématique des conditions et des tarifs d'assurance aux autorités chargées du contrôle, sauf pour les assurances obligatoires.

La suppression du contrôle matériel s'applique à l'assurance vie, comme à l'assurance non-vie ; l'Etat membre d'origine peut cependant continuer d'exiger la communication non préalable des bases techniques (tables de mortalité et taux d'intérêt techniques) utilisées pour le calcul des tarifs et provisions techniques, dans le seul but de contrôler le respect des dispositions nationales relatives aux principes actuariels. Un contrôle de la solvabilité de l'entreprise d'assurance, effectué à partir de normes minimales prudentielles applicables à tous les pays de l'Union compense cette suppression.

Le tableau ci-après récapitule les modalités d'activité autorisées par le dispositif :

Etat A

 

Etat B

 

Etat C

siège social

 

L.P.S.
succursale

 
 

siège social

 

succursale

 

L.P.S.

siège social

 

succursale

 
 

siège social

 

succursale

 

L.P.S.

L.P.S.

(Source : Comité européen des assurances/C.E.A.)

On observera qu'il est interdit à une succursale de proposer concurremment dans un même Etat membre ses produits en L.P.S. et en régime intérieur, alors qu'elle pourra opérer en L.P.S. vers un autre Etat membre.

- Règles applicables aux intermédiaires d'assurance

Les intermédiaires d'assurance ne bénéficient pas d'un mécanisme de licence unique et de contrôle du pays d'origine comparable à celui régissant l'activité des compagnies d'assurance. L'intermédiaire d'assurance qui opère dans un autre Etat membre que celui de son siège doit se soumettre intégralement à la législation de cet autre Etat.

La directive n° 77/92/CEE du Conseil du 13 décembre 1976 est une première étape sur la voie de l'intégration de ces opérateurs dans le marché intérieur. Elle vise à leur faciliter l'exercice effectif de la liberté d'établissement et de prestation en imposant aux Etats membres d'accepter comme équivalentes à leurs exigences nationales la formation professionnelle et l'expérience acquise par un intermédiaire étranger dans son propre Etat d'origine, les preuves d'honorabilité ou d'absence de faillite antérieure, etc. S'agissant cependant des obligations de garantie financière, de couverture de la responsabilité civile professionnelle ou de ses obligations commerciales (inscription au registre de commerce, désignation d'un représentant fiscal, etc.), l'intermédiaire reste soumis à la législation de l'Etat membre d'accueil relative à la médiation d'assurance.

La recommandation n° 92/48/CEE de la Commission du 18 décembre 1991 complète le texte précédent en encourageant les Etats membres à introduire dans leur législation nationale certaines dispositions qui favorisent une meilleure transparence des activités des intermédiaires et améliorent la sécurité des consommateurs. Il leur est ainsi conseillé d'introduire des dispositions relatives à la distinction entre intermédiaires d'assurance dépendants et indépendants, un niveau minimum de compétence professionnelle, une couverture responsabilité civile minimale et un système d'immatriculation obligatoire.

La France considère que sa réglementation satisfait aux conditions définies par la recommandation.

b) La libre circulation des produits

La détention de l'agrément instauré par les " troisièmes directives " permet aux entreprises d'assurance de développer leurs activités sur l'ensemble du territoire de la Communauté européenne, soit en régime d'établissement, soit en régime de libre prestation de services (L.P.S.). Il en résulte que tout contrat d'assurance proposé en un point de l'Union, devrait pouvoir être proposé dans les autres Etats membres, à moins qu'il ne soit contraire aux dispositions reconnues comme d'intérêt général en vigueur dans l'Etat où le risque est situé ou dans l'Etat d'engagement 257( * ) . Le droit d'agir en L.P.S. n'est cependant pas exempt de contrôles.

En effet, l'entreprise d'assurance qui souhaite agir dans un autre Etat membre doit indiquer aux autorités de contrôle de l'Etat de son siège, l'Etat dans lequel elle souhaite exercer et les services d'assurance qu'elle compte offrir ; le dossier ainsi constitué est ensuite transmis à l'autorité de surveillance de l'Etat de prestation qui ne peut exercer aucun contrôle a priori . Apparemment plus simple que le mécanisme de création d'une succursale puisque, dans ce dernier cas, les autorités de contrôle ont un délai de deux mois pour faire connaître les conditions dans lesquelles l'activité pourra être exercée dans le respect des règles d'intérêt général, le mécanisme de la L.P.S. soumet cependant l'opérateur à des contraintes de fonctionnement proches, puisque les articles 40 des " troisièmes directives " rappellent l'obligation faite aux entreprises opérant selon ce régime de respecter les règles de droit applicables dans l'Etat de prestation.

Ainsi, s'agissant par exemple de l'assurance automobile, l'article 6 de la " troisième directive non-vie " prévoit que l'entreprise d'assurance qui opère en L.P.S. participe au financement du fonds national de garantie de l'Etat membre de prestation.

Sur le terrain de la fiscalité indirecte frappant les produits, le dispositif de L.P.S. est censé préserver l'intérêt des Etats membres par application du principe de la territorialité qui conduit à grever tout contrat des impôts indirects ou taxes parafiscales applicables dans le pays où le risque est situé ou dans celui de l'engagement (assurance vie), les règles régissant cette localisation étant définis dans les directives 258( * ) .

En matière de fiscalité directe ce sont, dans le silence des textes particuliers, les principes généraux du droit communautaire qui gouvernent les solutions : non discrimination entre les preneurs ou les offreurs, proportionnalité des mesures visant à protéger l'intérêt général (assimilé en l'occurrence à l'efficacité des contrôles fiscaux et à la cohérence du système fiscal).

2. Une harmonisation inachevée

En raison de ses silences ou des divergences d'interprétation de son contenu, le droit communautaire des assurances n'offre pas de solution systématique aux problèmes rencontrés par un opérateur transfrontalier. Par ailleurs, le principe de l'adoption de règles communes minimales laisse nécessairement aux Etats membres, sous réserve de l'appréciation souveraine de la Cour de justice, la latitude de déterminer des règles complémentaires plus strictes applicables sur leur territoire à tous les opérateurs. Il en va en particulier ainsi dès lors qu'est en cause " l'intérêt général ", notion dont les contours restent à mieux préciser dans le secteur des assurances.

a) Les incertitudes subsistant

Les difficultés subsistant quant à l'interprétation des dispositions communautaires sont considérées par la Commission elle-même comme " portant un préjudice sérieux aux mécanismes mis en place par les troisièmes directives de coordination sur les assurances " dans la mesure où elles " sont de nature à dissuader certaines entreprises de faire usage des libertés créées par le traité ... " 259( * ) .

Tel est par exemple le cas de la démarcation entre droit d'établissement et L.P.S. Bien que les " troisièmes directives " aient eu pour effet de rapprocher les règles de contrôle et les conditions d'exercice des activités d'assurance en libre établissement et en L.P.S., des différences subsistent (procédure de notification, désignation d'un mandataire ou d'un représentant-sinistre, fiscalité des cotisations, moyens de contrôle et de sanction du pays d'accueil...) qui expliquent le maintien d'une distinction entre les deux régimes.

Une différence essentielle réside dans le caractère temporaire de l'activité de L.P.S. qui est autorisée en vertu de l'article 60 du traité du 25 mars 1957 dont le troisième alinéa dispose que le prestataire peut, pour l'exécution de sa prestation, exercer à " titre temporaire " son activité dans le pays où la prestation est fournie. Selon la jurisprudence de la Cour de justice, le caractère temporaire de la prestation doit s'apprécier par sa durée, sa fréquence, sa périodicité et sa continuité 260( * ) . Or ces éléments sont parfois insuffisants à séparer de façon nette L.P.S. et établissement car, comme l'admet la Commission dans un projet de communication interprétative du 10 octobre 1997 : " La frontière entre les deux notions de prestation de services et de liberté d'établissement n'est pas toujours facile à tracer. Certaines situations s'avèrent en effet difficiles à classer, en particulier lorsque l'entreprise d'assurance se sert, pour l'exercice de ses activités d'assurance, d'une infrastructure permanente dans l'Etat membre de la prestation. Il s'agit notamment des cas suivants : a) Recours à des intermédiaires indépendants ; b) Présence permanente du propre personnel de l'établissement ".

Certains opérateurs estiment que l'incertitude pesant sur la distinction entre les deux régimes est un frein à leurs activités transfrontalières dans la mesure où elle pourrait les conduire à un exercice illégal involontaire de leur activité.

Dans un registre voisin, se pose la question des divergences de qualification du démarchage publicitaire transfrontalier, certains Etats membres assimilant en effet ce type de publicité à une activité de L.P.S. et ce à l'opposé de la position de la Commission qui estime que " toute forme de publicité par quelque moyen que ce soit n'est pas soumise à la procédure de notification visée aux articles 34 et suivants des " troisièmes directives" ".

L'interprétation de la notion d'intérêt général est une autre source d'incertitude.

Dans ses arrêts précités du 4 décembre 1986, la Cour de justice, après avoir souligné que la liberté de prestation de services est " un principe fondamental du traité ", a précisé que l'exercice de ce principe pouvait néanmoins, en raison de la spécificité de certaines prestations, être soumis à des contraintes non discriminatoires et proportionnées " justifiées par l'intérêt général ". La Cour a considéré qu'il y avait dans la couverture des risques de masse, des intérêts légitimes dignes de protection et susceptibles de justifier des sujétions à l'encontre des prestataires.

La notion d'intérêt général apparaît à plusieurs reprises dans les " troisièmes directives ", par exemple en matière d'agrément d'une succursale, de contenu des contrats d'assurance (qui doivent respecter les dispositions d'intérêt général dans l'Etat du risque ou de l'engagement) et dans le cadre de certaines assurances maladie, etc.

Au motif de la protection de l'intérêt général, les Etats membres ont adopté des réglementations diverses dont certaines sont considérées par la Commission, sous réserve de l'interprétation souveraine de la Cour de justice, comme n'étant pas compatibles avec les règles du Traité du 25 mars 1957. Il en est ainsi de l'instauration de modalités de contrôle préalable ou systématique des conditions d'assurance, du système de " bonus-malus " dans la mesure où il constituerait une disposition tarifaire, de codes de bonne conduite édictés par les Etats membres, de l'imposition aux opérateurs étrangers de taux d'intérêt techniques maximaux ou de franchises obligatoires.

b) Le maintien de cadres juridiques nationaux

Les directives offraient aux Etats membres la faculté de choisir certaines options réglementaires. L'originalité de chaque droit national découlant de cette liberté optionnelle est renforcée par la liberté laissée aux Etats membres, en application du principe d'harmonisation des seules règles minimales, de maintenir des réglementations propres imposées aux opérateurs sur le fondement de l'intérêt général.

- L'exercice de la liberté optionnelle laissée par les directives

Certaines des options laissées aux Etats membres étaient communes aux deux séries de directives, d'autres non.


• Options communes aux assurances vie et non-vie


En matière de contrôle a priori, il peut être noté que l'Autriche, le Danemark, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas ne subordonnent pas l'exercice de l'activité à une approbation préalable des statuts des opérateurs.

Par ailleurs, l'ensemble des Etats membres a adopté des dispositions prévoyant la communication aux autorités de contrôle de tous les documents nécessaires à l'exercice de leurs contrôles. Ces dispositions sont cependant parfois limitées. Ainsi, en tant qu'Etat d'origine ou du risque, l'Autriche, l'Italie et les Pays-Bas n'ont pas prévu la possibilité pour leurs autorités de contrôle d'obtenir tout renseignement concernant les contrats détenus par les intermédiaires.

Dans le cas d'un transfert de portefeuille, l'Allemagne, le Danemark, la Grande-Bretagne et l'Irlande n'ont pas prévu la faculté pour les preneurs d'assurance de résilier le contrat dans un délai déterminé, à la différence des autres Etats.

S'agissant des règles prudentielles, il peut être retenu, par exemple, qu'en tant qu'Etats d'origine, l'Autriche, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, le Luxembourg et les Pays-Bas accordent des assouplissements aux règles relatives à la localisation des actifs telles que prévues à l'article 17 de la " troisième directive " non-vie. Cette position les distingue notamment de la France, du Danemark et de la Belgique.

Par ailleurs, les entreprises d'assurance ont l'obligation de ne pas placer plus d'un certain pourcentage du total des provisions techniques brutes dans certains types de placements (règle dite de dispersion des placements). La plupart des Etats membres ont adopté des règles plus précises que celles contenues dans les directives. Ainsi, par exemple, la Belgique, la France, la Grande-Bretagne, l'Italie, les Pays-Bas et le Portugal admettent à concurrence d'un certain pourcentage, la représentation des provisions techniques par des créances sur les réassureurs, à la différence de l'Autriche, du Danemark, du Luxembourg, etc. Ce pourcentage varie cependant de 3 % pour la Belgique en assurance transport, à 90 % pour l'Italie et 50 % pour la Grande-Bretagne, la France imposant pour sa part la fixation d'un pourcentage par réassureur en fonction de la part de ce dernier dans les provisions techniques de l'assureur.

Toujours dans le domaine des actifs admissibles en représentation des provisions techniques, lorsqu'il s'agit d'actifs qui représentent un investissement dans une entreprise filiale qui, pour le compte de l'entreprises d'assurance, gère tout ou partie des investissements de cette dernière, la France, l'Autriche, l'Allemagne et la Finlande refusent de tenir compte des actifs sous-jacents détenus par cette filiale pour l'application des règles de dispersion et d'utilisation des actifs admissibles. Lorsque les actifs comprennent des prêts à certains établissements de crédit ou des obligations émises par de tels établissements, seuls l'Italie et les Pays-Bas admettent que les actifs sous-jacents détenus par ces établissements puissent être pris en compte pour l'établissement des règles de dispersion des actifs.

La Belgique, la France, la Grande-Bretagne, le Luxembourg, la Hollande et le Portugal exigent, parmi les conditions d'utilisation des actifs admissibles, des sûretés réelles ou des garanties, notamment pour les créances sur les réassureurs.

Enfin, en tant qu'Etat de la prestation, seules l'Allemagne et l'Irlande dispensent les entreprises opérant en liberté d'établissement ou en L.P.S. de la transmission de la liste des contrats souscrits en régime de liberté communautaire. La Belgique et le Portugal exigent communication de la liste des contrats et la désignation d'un représentant fiscal, les autres Etats membres se contentant de la désignation d'un représentant fiscal domicilié sur le territoire.


• Options propres aux directives assurance non-vie


En tant qu'Etats d'origine, seuls la France, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas accordent un agrément par branche et non par groupe de branches. Dans le secteur de l'assistance touristique, la Finlande, la France, l'Allemagne le Portugal et l'Italie soumettent les entreprises sollicitant l'agrément au contrôle des moyens directs ou indirects en personnel et matériel.

En tant qu'Etats d'origine, de la succursale ou de la prestation, la Belgique pour les assurances obligatoires de risques de masse et l'Irlande de façon plus large, maintiennent en tant qu'élément d'un système général de contrôle des prix la notification préalable ou l'approbation des majorations des tarifs proposés. Dans le cas d'assurances obligatoires, la France, la Grande-Bretagne et la Hollande n'exigent pas communication des conditions générales et spéciales d'assurance préalablement à leur utilisation par les opérateurs.

S'agissant des conflits de lois, en tant qu'Etats du risque la France, l'Allemagne et le Luxembourg refusent aux parties, lorsque le preneur a sa résidence habituelle ou son administration centrale sur son territoire, de choisir la loi d'un autre Etat. La Grande-Bretagne laisse quant à elle toute liberté de choix de la loi du contrat aux parties, mais lorsque le litige est porté devant ses juridictions, elle refuse de donner effet aux dispositions impératives de la loi de l'Etat du risque ou de l'Etat qui impose l'obligation d'assurance, alors que selon le droit de cet Etat, ces dispositions sont applicables quelle que soit la loi régissant le contrat ; elle renonce également à imposer sa propre loi à un contrat d'assurance obligatoire aux dépens de la loi des parties.

En matière d'assurance automobile, tous les Etats en tant qu'Etats de la succursale ou de la prestation imposent aux entreprises opérant sur leur territoire en liberté d'établissement ou en L.P.S. d'être affiliées dans les mêmes conditions que les entreprises qui y sont agréées à tout régime destiné à garantir le paiement des demandes d'indemnisation aux assurés ou aux tiers lésés.


• Options propres aux directives vie


S'agissant de l'agrément des opérateurs, la France, le Luxembourg et les Pays-Bas n'accordent pas d'agrément simultané pour plusieurs branches d'assurance vie ; par ailleurs et en tant qu'Etats d'origine, l'Allemagne, l'Irlande, le Luxembourg et les Pays-Bas ne permettent pas aux entreprises agréées pour des activités d'assurance vie, d'obtenir un agrément pour les risques accident et maladie.

Dans l'hypothèse d'un cumul d'activité assurance vie, maladie et accident, la France, le Portugal, la Belgique et la Grande-Bretagne n'autorisent pas les opérateurs à utiliser les seules règles comptables régissant l'assurance vie. Pour sa part, la France impose la tenue d'une comptabilité par catégorie de risque.

La " troisième directive " assurance vie prévoit en son article 18. b. i 1. que : " Quand les contrats comprennent une garantie de taux d'intérêt, l'autorité compétente de l'Etat membre d'origine de l'entreprise fixe un taux d'intérêt maximal unique. Ce taux (...) ne peut pas être supérieur à 60 % de celui des emprunts obligataires de l'Etat dans la devise duquel est libellé le contrat ... ". Ce taux peut également être calculé en prenant en compte le rendement des actifs correspondants aux contrats actuellement en portefeuille, diminué d'une marge prudentielle et, pour ce qui concerne les contrats à prime périodique, en prenant au surplus en compte le rendement anticipé des actifs futurs. Cette dernière option a été choisie par l'Autriche, la Finlande, la Grande-Bretagne, l'Irlande, les Pays-Bas et le Portugal mais n'est pas ouverte aux sociétés françaises.

Certains contrats peuvent, selon le même texte, échapper aux règles relatives aux taux d'intérêt maximaux. Il s'agit des contrats en unités de compte, à prime unique d'une durée inférieure à huit ans, sans participation bénéficiaire ou des contrats de rente sans valeur de rachat. La France n'autorise les dépassements de taux que pour le second type de contrat.

S'agissant des réserves de solvabilité, en tant qu'Etats d'origine, la Belgique, le Danemark, la Finlande, la France, l'Italie et le Luxembourg refusent d'admettre comme élément de la marge de solvabilité, les réserves de bénéfices figurant au bilan lorsqu'elles peuvent être utilisées pour couvrir des pertes éventuelles et qu'elles n'ont pas été affectées à la participation des assurés.

En ce qui concerne la détermination de la loi du contrat, la Belgique, l'Allemagne (sauf en assurance par correspondance), le Luxembourg et la France interdisent aux parties, lorsque le preneur réside dans l'Etat dont il est le ressortissant, d'appliquer au contrat une autre loi que la sienne.

S'agissant de l'information du consommateur, l'Autriche, la France et le Portugal, en tant qu'Etats de l'engagement, interdisent la communication au preneur, pendant la durée du contrat et pendant la durée de celui-ci, d'informations rédigées dans une autre langue que la sienne.

Au delà des options laissées ouvertes par les directives, le maintien de réglementations nationales, en particulier au nom de " l'intérêt général ", accroît les différences d'exercice de l'activité selon les Etats membres.

- La défense de l'intérêt général


• Dispositions visant à la protection des intérêts fiscaux des Etats


Les directives adoptées à ce jour n'harmonisent pas la fiscalité des entreprises, des primes, des indemnités ou des revenus. Les Etats membres doivent cependant respecter le principe de non discrimination entre les preneurs ou entre les entreprises.

S'agissant des entreprises, la fiscalité frappant les bénéfices sociaux et d'une façon générale l'activité est librement déterminée par les Etats membres qui ne doivent pas adopter de mesures fiscales conduisant à défavoriser les opérateurs étrangers. Mais une différence objective entre non résident et résident est cependant de nature à justifier une différence de traitement fiscal. Tel est le cas des entreprises opérant en L.P.S. par rapport à celles opérant à partir d'une succursale, ainsi que l'a admis la C.J.C.E. dans une affaire Bachman 261( * ) . Statuant sur une législation belge interdisant la déduction en Belgique des primes d'assurance maladie, invalidité, vieillesse et décès si les cotisations étaient versées à des établissements situés dans d'autres Etats membres, la Cour, après avoir constaté que ce genre de mesure pouvait constituer une restriction à la L.P.S., a estimé qu'elle était cependant justifiée parce que non disproportionnée à la défense de l'intérêt général constitué par la cohérence du système fiscal belge et ce, dans la mesure où la déductibilité des cotisations avait pour contrepartie la taxation des capitaux ou du versement en fin de contrat.

S'agissant des contrats souscrits en couverture d'un risque dommage, lorsque le fondement du versement de l'indemnité est une réparation, celle-ci n'est généralement frappée d'aucun impôt. Lorsque des avantages fiscaux sont accordés aux cotisants (assurances maladie, vie, accidents) l'administration française exige de l'assureur étranger opérant en France un certificat fiscal garantissant que le contrat répond aux différentes conditions de l'avantage, l'Allemagne dispense de cette formalité que la Grande-Bretagne ne connaît pas faute de déductions possibles, les Pays-Bas imposant quant à eux que l'assureur soit établi.

Il a été dit que le principe retenu en matière d'impôts ou taxes indirects est celui de la territorialité fiscale, la loi applicable au contrat en vertu des règles spécifiques de conflit étant indifférente. La France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne ou le Luxembourg, sans préjudice de la situation en vigueur dans les autres Etats membres, imposent aux entreprises la désignation d'un représentant fiscal chargé d'effectuer les déclarations réglementaires.


• Les dispositions régissant l'exercice et le contrôle de l'activité


Les entreprises d'assurance sont soumises à des règles prudentielles, qui découlent directement de la transposition dans les droits des Etats membres des directives communautaires ; leur objectif est de protéger l'intérêt des consommateurs par la pérennité des entreprises. Lorsqu'ils en avaient la faculté, les Etats membres ont parfois choisi des options prudentielles d'une rigueur supérieure à celle imposée par les normes communautaires.

Deux domaines, qui peuvent influer sur le niveau de protection des souscripteurs, restent cependant incomplètement harmonisés : il s'agit des règles d'évaluation des actifs admissibles appréciées en relation avec les règles de publication des informations financières. La valorisation des actifs des entreprises d'assurance peut être effectuée selon plusieurs modalités, telles la valeur vénale ou historique. Dans le deuxième cas, l'existence de plus ou moins values latentes est une information indispensable à l'appréciation de la situation financière et donc de la solvabilité de la société d'assurance. Or, certains Etats considèrent cette information comme appartenant à la sphère du secret commercial et dispensent les entreprises de leur publication, obérant de ce fait la qualité de l'appréciation financière pouvant être portée par un observateur extérieur.

Sur le terrain des dispositions prudentielles, les " troisièmes directives " interdisent aux Etats membres de fixer des règles concernant le choix des actifs autres que ceux représentant les provisions techniques. La législation danoise aggrave cette interdiction puisqu'elle réglemente le placement non seulement des actifs représentatifs des provisions techniques mais aussi de ceux qui correspondent aux fonds propres de l'entreprise, ce qui crée une discrimination aux dépens des entreprises locales. En Suède, les compagnies d'assurance ne sont pas autorisées à détenir plus de 5 % des droits de vote dans le capital d'une même société par action. Cette règle s'appliquant également aux fonds propres de ces sociétés crée une discrimination de même nature que la précédente.

En matière de dispersion des actifs des sociétés d'assurance vie, la Grande-Bretagne a adopté des règles plus strictes que celles prévues dans les directives en interdisant par exemple les investissements en actifs " stratégiques " (industriels ou immobiliers) et en ne permettant pas que les actions d'une même société représentent plus de 2,5 % des provisions techniques nettes de réassurance. La France a adopté des règles plus souples.

S'agissant des pouvoirs conférés aux autorités de contrôle ou des modalités d'exercice du contrôle lui-même, les règles et les pratiques des Etats membres divergent alors même qu'une entreprise est contrôlée par son autorité nationale pour l'ensemble de son activité mondiale exercée en succursale ou L.P.S. Comme l'a souligné un des experts interrogés, " la reconnaissance mutuelle des contrôles est un acte de foi communautaire ".

La France, par exemple, qui dispose d'un corps de contrôle dont les agents sont dotés de moyens légaux d'investigation complets, privilégie le contrôle sur place. L'Italie pratique davantage le contrôle sur pièces, à l'instar de la Grande-Bretagne qui utilise même les services d'auditeurs externes. Les autorités de contrôle se distinguent aussi quant à leur attachement à la prévention des risques d'insolvabilité, certaines n'hésitant pas à imposer des dispositions de sauvegarde prévues par leurs législations nationales alors que d'autres, au contraire, attendent une détérioration sérieuse de la marge de solvabilité pour intervenir, estimant que le contrôle principal revient à l'actionnariat.


• Les dispositions contractuelles


La détermination des règles régissant la publicité précontractuelle, la langue et le contenu des contrats reste de la compétence des Etats membres.

Les obligations minimales mises à la charge des entreprises d'assurance en matière d'information précontractuelle par les directives communautaires diffèrent selon qu'il s'agit d'une assurance vie ou non-vie.

En matière d'assurance vie, l'annexe II de la " troisième directive " précise l'information qui doit être donnée au preneur avant la conclusion du contrat ou pendant sa durée ; une faculté de rétractation lui est également ouverte. Ces dispositions ont été transposées de façon homogène par les Etats.

En matière d'assurance non-vie, l'article 31 de la " troisième directive " prévoit seulement l'information minimale du preneur d'assurance personne physique sur la loi applicable et le régime juridique des plaintes. La France impose notamment la remise au preneur d'une fiche d'information sur les prix et garanties, et un exemplaire de projet de contrat ; la Grande-Bretagne demande dans le cas d'une souscription par une personne physique, la seule communication des dispositions relatives à l'examen des plaintes et le choix de la langue et du droit du contrat ; l'Allemagne impose, entre autres, une communication de l'identité de l'assureur, des conditions générales d'assurance, des éléments de tarification, du niveau de la prime de la loi applicable au contrat, à l'instar du Luxembourg.

S'agissant du contenu des contrats d'assurance non-vie, la France exige certaines mentions prévues aux articles L.112-4, R.112-2 et 112-3 du code des assurances, telle la nature des risques garantis, les conditions d'exclusion, le nom des autorités chargées du contrôle, le montant de la prime ou de la cotisation. Elle considère que les dispositions régissant les contrats (livre I du code des assurances) sont d'intérêt général. Le droit allemand est également très protecteur de l'information des consommateurs à la différence du droit britannique qui n'impose, s'agissant des personnes physiques, aucune disposition particulière autre que celle imposées par les directives en matière d'information préalable.

En matière d'assurance vie, les règles imposées par les Etats membres en application des directives, sont de façon générale plus strictes et homogènes.

S'agissant de la langue du contrat d'assurance, le droit allemand impose que les conditions générales soient rédigées en langue allemande ou dans la langue maternelle du preneur et d'une façon générale de manière lisible et compréhensible ; le droit français impose une rédaction en langue française, sauf dans le cas où la loi applicable choisie serait différente, mais, lorsque le contrat porte sur une assurance obligatoire, il est obligatoirement régi par la loi française et doit être rédigé en français. La Grande-Bretagne laisse aux parties le choix de la langue du contrat ; le Luxembourg admet les langues officielles du Grand-Duché ou la langue du preneur.

B. LES CONSÉQUENCES SUR LA CONCURRENCE

Théoriquement, les différences de réglementations fiscales, prudentielles ou comptables adoptées par les différents Etats membres peuvent avoir pour conséquence le transfert de la demande de prestation d'assurance vers l'Etat dont la réglementation sera la plus favorable aux preneurs, ou de transfert d'établissement vers celui qui proposera le plus faible prélèvement fiscal sur les opérateurs ou imposera des règles prudentielles moins sévères. Les effets sur la concurrence de ces différences réglementaires sont cependant difficiles à appréhender ; l'adoption de la monnaie unique ne pourra qu'en faciliter l'appréhension.

1. Des effets potentiels sur les marchés de l'assurance dont l'estimation est difficile

a) Quelques considérations sur les marchés

Outre la distinction vie/non-vie, les produits d'assurance font l'objet d'une classification par branches d'assurance qui est annexée aux " premières directives ". Selon le principe de spécialisation qui avait prévalu à l'origine, l'agrément ne pouvait être demandé que pour une ou plusieurs branches de risques appartenant au secteurs vie ou non-vie. Depuis 1992, le cumul est désormais possible mais les règles prudentielles applicables restent distinctes. Les opérateurs continuent, en pratique, de séparer ces activités et certains Etats membres tels la France, le Luxembourg ou les Pays-Bas, interdisent le cumul vie/non-vie.

C'est surtout en matière de contrôle des concentrations que les autorités communautaires ont été amenées à examiner le problème de la définition de marchés pertinents dans le secteur des assurances. Dans ses décisions, la Commission a établi une distinction première entre la réassurance, l'assurance vie et l'assurance de dommages. Les deux dernières peuvent en outre être divisées en marchés plus restreints qui peuvent, ou non, coïncider avec les branches d'assurance telles que décrites dans les directives.

Il a en effet été admis que les assurances couvrant des risques différents ne sont pas substituables du point de vue des consommateurs. La mise en oeuvre de critères de substituabilité plus précis a ainsi conduit la Commission à reconnaître l'existence d'un marché de l'assurance directe 262( * ) , de la prévoyance complémentaire et de l'assistance 263( * ) , des risques feu et transport 264( * ) , de l'assurance caution 265( * ) .

S'agissant de la délimitation géographique des marchés, la Commission a reconnu l'existence de marchés mondiaux dans le secteur de la couverture des dommages causés à l'environnement 266( * ) , de l'assurance spatiale 267( * ) , de l'assurance sur corps de navire 268( * ) et de la réassurance 269( * ) qui appartiennent à la catégorie des " grands risques ".

Tous les autres marchés examinés et en particulier ceux appartenant à la catégorie des " risques de masse ", ont été considérés comme des marchés nationaux. Dans sa décision du 2 décembre 1996 concernant la fusion entre les sociétés Axa et U.A.P., la Commission énonce à cet égard : " Les différents marchés d'assurance vie et de dommages demeurent encore pour une large part nationaux. En effet, bien que l'harmonisation du marché intérieur consécutive à la libre circulation des prestations de services conduise à une ouverture croissante des marchés de l'assurance à une concurrence communautaire, les conditions de concurrence perdurant sur les marchés nationaux ne sont pas homogènes, eu égard notamment aux canaux de distribution, aux comportements des consommateurs et aux législations nationales. Toutefois, la dimension nationale des marchés est particulièrement marquée dans le cas des services s'adressant aux ménages, les services d'assurance à destination des entreprises étant, pour une plus large part, soumises à une concurrence de dimension communautaire ".

Le caractère national de certains marchés de l'assurance n'exclut cependant pas l'existence de transferts d'activités ou de contrats, motivés par la recherche d'avantages tarifaires ou fiscaux du territoire d'un Etat vers celui d'un autre.

b) Les effets potentiels sur la concurrence des différences constatées dans les législations applicables au secteur

Sur un marché donné, la concurrence entre entreprises d'assurance opérant à partir du territoire concerné ou de celui d'un autre Etat membre, s'exerce par les tarifs, mais peut être affectée par les avantages fiscaux résultant d'une délocalisation des contrats. Cette situation porte en germe des distorsions de concurrence d'autant plus sensibles que le marché sera ouvert aux opérateurs étrangers.

- Les sources de distorsions potentielles

Les différences de traitement fiscal ou prudentiel subis par deux opérateurs peuvent avoir pour effet d'alourdir les charges d'un seul d'entre eux. Les modalités légales d'action des opérateurs ainsi que les régimes fiscaux des produits ou des sociétés peuvent être des sources de distorsions de concurrence entre opérateurs à l'intérieur d'un même Etat membre ou appartenant à différents Etats membres.


• Les modes d'exercice de l'activité


L'exercice de l'activité selon l'un ou l'autre des statuts résultant de l'application des directives place l'opérateur dans une situation variable vis-à-vis des obligations fiscales, comptables et réglementaires du pays d'accueil. Le tableau ci-après propose une comparaison sommaire des conditions d'exercice par la voie d'une filiale, d'une succursale ou en L.P.S.

 

Filiale

Succursale

L.P.S.

Agrément

oui

non

non

Avantage de proximité sur le marché envisage

oui

oui

non

Avantage en termes de fiscalité directe des cotisations (1)

oui

oui

non

Surveillance prudentielle

pays d'accueil

pays du siège

pays du siège

Fiscalité et comptabilité

pays d'accueil

pays d'accueil

pays du siège


• Lorsque les mesures d'incitation fiscale sont liées au versement des primes à un assureur établi (source : C.E.A.)


Ce tableau montre qu'il existe un certain équilibre entre les avantages et inconvénients de chaque situation statutaire, l'optimum étant celle dans laquelle l'opérateur bénéficie à la fois de l'avantage de proximité commerciale et des règles fiscales et prudentielles les plus légères qui lui donneront un avantage tarifaire, celles-ci pouvant être celles du pays d'accueil ou du pays d'origine.


• Les tarifs proposés


Les règles de fonctionnement technique et financier des entreprises varient en fonction des risques pris en charge. De façon simple, il peut être indiqué qu'en assurance de dommages, la prime couvrant un risque sur une période donnée est mutualisée en vue d'indemniser les sinistres alors qu'en assurance vie, au contraire, une fraction importante des primes payées par un assuré est créditée sur un compte dont le montant augmenté des intérêts acquis lui sera versé aux termes du contrat. Toute augmentation de charge fiscale ou d'exigence prudentielle supportée par l'entreprise doit normalement trouver sa contrepartie dans l'augmentation des primes ou cotisations.

Il ne semble pas que des comparaisons globales entre régimes fiscaux, directs ou indirects, pesant sur les sociétés d'assurance dans les différents pays de l'Union européenne aient été effectuées. Cependant et nonobstant les différentiels de taux d'imposition des bénéfices sociaux ou de la taxe professionnelle qui ne sont pas spécifiques au secteur des assurances, certaines dispositions fiscales constitueraient un handicap dans la concurrence opposant les opérateurs établis en France à leurs concurrents étrangers et constituent une spécificité française.

Il en est ainsi par exemple de la taxe sur les salaires (article 231 du code général des impôts) qui n'existe pas dans les autres Etats membres. Assise sur la masse salariale dont elle peut représenter jusqu'à 13,60 % du montant total, cette taxe entraînerait un prélèvement d'en moyenne 6 % du chiffre d'affaires des compagnies d'assurance. S'appliquant également aux courtiers, dont la part des salaires dans le chiffre d'affaires avoisine 70 %, elle constituerait un handicap sérieux dans la concurrence qui les oppose aux opérateurs étrangers non établis sur le marché de la couverture des grands risques.

A l'instar de la précédente, la contribution spéciale des institutions financières est une spécificité française. Les taxes sur les excédents de provision (article 235 ter x du même code) sont également considérées par les professionnels comme un handicap d'autant qu'elles peuvent revenir à sanctionner une gestion prudente.

D'un autre côté, une étude réalisée par le Comité européen des assurances et portant sur l'environnement fiscal de l'assurance santé montre que les sociétés françaises soumises au code des assurances ne sont frappées d'aucune taxe sur les bénéfices non distribués provisionnés pour assurer la solvabilité de l'entreprise ou pour maintenir le niveau des provisions d'équilibrage, à l'inverse des sociétés danoises, anglaises, italiennes ou portugaises.

Les règles prudentielles ont pour vocation de protéger les assurés contre les aléas de l'activité d'une société d'assurance dont les tarifs sont établis sur la base de l'expérience passée et avant que l'opérateur ne connaisse le prix de revient de ses services. Lorsque les bases du tarif ou les prévisions effectuées sont erronées, il en résulte des pertes qui peuvent entamer la solvabilité de l'opérateur. Des normes prudentielles et comptables moins strictes sont susceptibles de donner un avantage dans la concurrence aux entreprises de l'Etat membre qui les a adoptées dès lors qu'elles favoriseraient l'élaboration de tarifs moins élevés.

En matière d'assurance de dommages et de façon élémentaire, il peut être considéré que la somme des primes versées doit permettre de couvrir l'ensemble des charges de l'entreprise d'assurance pour l'année en cours : sinistres, rentes, frais de fonctionnement, etc. ; le tarif de l'assurance doit donc permettre d'assurer les recettes nécessaires à cette couverture. Les recettes tirées des primes seront donc provisionnées selon différentes normes afin de couvrir les sinistres présents et à venir, les tarifs proposés par les sociétés leur étant liés. A nombre et valeurs de sinistres constants, il peut donc être admis que plus le niveau de provision imposé par les règlements est élevé plus les tarifs de base seront élevés.

L'harmonisation des règles prudentielles résultant des " troisièmes directives " a rapproché les modalités de constitution des provisions techniques imposées aux sociétés d'assurance. Des différences demeurent cependant, ainsi que le montrent les exemples suivants ; elles sont toutefois considérées comme marginales par les experts.

Les modalités de calcul de la provision pour sinistres restant à payer, définie comme la valeur estimative des dépenses nécessaires au règlement de tous les sinistres survenus et non payés à la date de l'inventaire, en sont un exemple. Cette provision doit être suffisante au jour du règlement et non au jour de l'inventaire, ce qui implique une actualisation dont les procédés diffèrent selon les Etats membres et qui d'ailleurs, dans certains cas de contrats d'assurance à long terme, serait incomplètement réalisée par les assureurs. De plus, le rendement des actifs affectés à la représentation de cette provision constitue un produit financier affecté par les opérateurs appartenant à certains Etats membres au résultat final (France) alors que d'autres l'intègrent en déduction des engagements (Grande-Bretagne), ce qui favorise la baisse des tarifs.

De même, il a été dit que les provisions réglementées avaient pour contrepartie à l'actif du bilan de la société des créances sélectionnées, cette représentation permanente des provisions techniques par des actifs réels, d'une valeur au moins égale, permet aux entreprises de tenir leurs engagements envers les assurés. Or, les méthodes d'évaluation de ces actifs diffèrent (valeur historique, vénale ou actuelle), et l'écart de valorisation qui en résulte est susceptible d'influer sur le tarif final par le biais de l'estimation des plus ou moins values latentes qui entrent dans le calcul de la marge de solvabilité.

Dans le secteur de l'assurance vie, la prime est déterminée en fonction d'un facteur risque (durée de vie du preneur), d'un facteur intérêt (rémunération du capital versé) et des frais d'acquisition et de gestion du contrat (le " chargement ") ; elle est calculée de telle façon qu'à chaque instant, pour chaque groupe de contrats, la valeur actuelle des engagements de l'assureur soit égale à la valeur actuelle des engagements de l'assuré. Le législateur européen a reconnu la nécessité d'un principe prudentiel général applicable aux tarifs de ce secteur selon lequel les primes pour les affaires nouvelles doivent être suffisantes selon les hypothèses actuarielles raisonnables, pour permettre à l'entreprise de satisfaire ses engagements. Le tarif des entreprises d'assurance vie doit être bâti sur des données précises qui sont définies strictement par les Etats membres. Certains Etats membres (les Pays-Bas) n'en laisseraient pas moins les entreprises libres de fixer leurs tarifs sur des bases purement commerciales, considérant que l'on ne peut a priori exiger d'une entreprise des primes suffisantes pour financer intégralement la constitution des provisions mathématiques dès lors que cette sous-tarification serait compensée par des fonds propres substantiels. La France quant à elle ne tiendrait pas compte de la baisse des taux d'intérêt dans le calcul de certaines de ses provisions.

Enfin, il peut également être indiqué que de façon générale, la France détermine les plus ou moins values latentes de façon globale, alors que l'Allemagne ou le Luxembourg les déterminent ligne à ligne, ce qui est de meilleure prudence.

Au total, s'agissant de la fiscalité pesant sur les entreprises, il doit être souligné d'une part, que le taux de l'impôt sur les bénéfices des sociétés commerciales prélevé par l'Etat est supérieur, en France, au taux de 30 % préconisé par la Commission et que, d'autre part, les sociétés d'assurance sont assujetties à des impôts spéciaux qui ne semblent pas avoir d'équivalent dans les autres Etats membres.

Par contre, il n'apparaît pas que le niveau des exigences prudentielles adoptées par la France, place les entreprises dans une situation manifestement inégale par rapport à celle de leurs concurrents opérant sur le marché français.


• Le régime fiscal des conventions et revenus


Les impôts ou taxes frappant les primes ou cotisations sont très divers selon les Etats membres.

Le tableau ci-après montre les écarts constatés dans les pays de l'Union européenne de la France pour trois branches d'assurance :

LA FISCALITÉ DES CONTRATS D'ASSURANCE
DANS L'UNION EUROPÉENNE

( pour une cotisation de 1 000 unités )





(Source : F.F.S.A. - 1996)


En matière d'assurance vie, le taux d'intérêt technique garanti par le contrat est un élément important du choix du preneur. Or la liberté laissée aux entreprises dans la détermination de ces taux diffère selon les Etats. En France, pour des raisons prudentielles, le rendement garanti est plafonné selon plusieurs options ; cette règle, transférée dans le livre premier du code des assurances s'applique à tous les opérateurs ayant une activité sur le territoire français car elle est considérée comme étant d'intérêt général. Un souscripteur pourra donc avoir avantage à souscrire une assurance vie auprès d'une compagnie garantissant un rendement qui soit en rapport avec celui des actifs réels placés par l'entreprise (Grande-Bretagne ou Luxembourg), plutôt qu'auprès d'un de ses concurrents qui ne peut garantir qu'un rendement limité par exemple à un pourcentage du taux d'émission des emprunts d'Etat (France) ou tenu par un taux fixé uniformément (Allemagne).

Le niveau de prélèvement fiscal sur les revenus est également un critère de choix d'un contrat d'assurance vie, les revenus des contrats étant imposés dans la quasi totalité des pays. Le régime fiscal français a varié de façon importante dans un passé récent. Aujourd'hui, les revenus de ces contrats sont au moins soumis à la contribution sociale généralisée et à la contribution au remboursement de la dette sociale. A l'avenir, les revenus de certains de ces contrats pourront être grevés, après abattement, d'une taxe de 7,5 %. De tels prélèvements distinguent la France de certains Etats voisins qui ne prélèvent aucun impôt sur les revenus versés.

La déductibilité des revenus ou de l'impôt des fonds versés dans le cadre d'un contrat d'assurance vie ou un fonds de pension est une autre source de différenciation.

- Des effets difficiles à mesurer


• Des échanges encore entravés


Les entraves aux échanges avec l'extérieur diminuent le degré de concurrence sur un marché donné et il a été dit qu'en matière d'assurances de personnes, il pouvait être admis que les marchés étaient géographiquement circonscrits à chaque Etat membre. Le C.E.A. a dressé une liste des pratiques des Etats membres considérées comme susceptibles de limiter les échanges à l'intérieur du marché communautaire dont il convient de rappeler quelques éléments.

La difficulté de tracer une frontière précise et commune à tous les marchés entre liberté d'établissement et L.P.S. est un premier exemple qui a déjà été évoqué. La notification au titre de l'intérêt général de " paquets de législation " produirait les mêmes résultats. Sur certains marchés et nonobstant l'opacité des réglementations applicables, il est en effet constaté que les autorités de contrôle du pays d'accueil remettent une liste de législations et réglementations applicables en les déclarant toutes d'intérêt général ou en laissant le soin à l'opérateur de déterminer quelles législations, dans son cas d'espèce, doivent être appliquées.

Les disparités fiscales sont également considérées comme des sources d'entraves lorsqu'il existe des différences de traitement entre les contrats souscrits auprès des assureurs locaux ou étrangers ou même entre les différentes catégories d'opérateurs d'assurance d'un même Etat membre. Sont citées en exemple dans ce domaine, les distorsions fiscales en faveur de certaines catégories de mutuelles dans le domaine de l'assurance complémentaire maladie en France, en faveur des banques dans le secteur des fonds de pension en Espagne ou en faveur de la Caisse de prévoyance des médecins en Belgique.

Par ailleurs, la complexité des règles de conflit de lois adoptées pour pallier l'absence d'harmonisation des droits du contrat d'assurance rendrait très difficile l'exercice d'activité en licence unique et pratiquement impossible la rédaction de polices uniques commercialisables dans les mêmes termes sur les différents marchés européens. Les définitions variables des produits d'assurance vie ou décès auraient un effet identique.

Enfin, sont également considérées comme entravant la liberté des échanges : l'obligation de désignation d'un représentant fiscal, même en l'absence de taxation sur les primes, la limitation du bénéfice d'avantages fiscaux sur les cotisations d'assurance aux versements faits à des assureurs établis, l'obligation pour l'assurance vie de respecter des taux d'intérêt technique maxima ou les tables de mortalité du pays d'accueil, la communication préalable des contrats à l'autorité de contrôle, l'obligation de prévoir une valeur de rachat dans les contrats d'assurance vie, etc.


• La difficile mesure de l'effet des différences constatées


La mise à profit des différences réglementaires et fiscales existant entre les Etats membres peut susciter certains comportements des entreprises d'assurance comme des preneurs : transferts de siège ou création de succursales vers l'Etat membre " mieux-disant " réglementaire ou fiscal pour les premières, orientation de leur demande de prestations d'assurance vers les entreprises opérant à partir de ce même Etat pour les seconds. Plusieurs indicateurs sont susceptibles de permettre une appréciation de l'importance des transferts de contrats.

Le premier pourrait être constitué par le montant des primes recueillies par les 458 sociétés ayant déclaré leur intention d'opérer en L.P.S. en 1996. Or ce chiffre n'est pas disponible à ce jour pour des raisons qui tiennent à une absence de déclaration par ces sociétés dans leurs pays d'origine conjuguée à une absence de sélection et de centralisation de cette information par les services fiscaux chargés de l'enregistrement des taxes versées par les représentants fiscaux.

Les variations d'activité des filiales de sociétés étrangères opérant en France sont des indicateurs moins pertinents dans la mesure où les opérations qu'elles réalisent sur le territoire national sont soumises aux réglementations prudentielles françaises. L'interprétation des résultats est en outre délicate car les évolutions peuvent refléter l'évolution des différentiels tarifaires, l'entrée sur le marché de produits nouveaux ou la variation du périmètre consolidé.

Après un taux de croissance de 6,1 % en assurance vie et 14,4 % en assurance de dommages entre 1994 et 1995, années où elles atteignent respectivement 9,9 % et 18,1 % des cotisations totales, la part détenue par les sociétés étrangères se contracte en 1996, à 9,5 et 15,6 %.

La variation de l'activité des filiales ou succursales françaises opérant à l'étranger est un indicateur de l'ouverture des entreprises françaises vers l'extérieur, mais ne peut traduire des transferts de contrats dans la mesure où les mouvements constatés peuvent provenir des variations de la demande locale.

L'examen des évaluations par pays montre que le montant des primes collectées est affecté de variations importantes. Au Luxembourg par exemple, le chiffre d'affaires des filiales françaises pour l'année 1996 baisse de 30 % après une hausse exceptionnelle en 1995. Cette évolution s'expliquerait par le fait que l'année 1995 avait été marquée par un grand nombre d'opérations effectuées en L.P.S. liées à l'évolution de la dette publique de l'Etat belge et au remboursement de bons de caisse, placés sur le marché luxembourgeois.

L'attractivité du marché luxembourgeois, dont ont profité les filiales d'entreprises françaises, provient d'une absence de taxation des revenus et d'une meilleure rémunération des placements, protégée par un secret bancaire mieux gardé que celui des autres Etats membres. Elle se traduit par le fait que 72 % des primes encaissées proviennent de l'étranger et sont encaissées selon le régime de la L.P.S.

Au total, la mesure des transferts de contrats vers des pays dont la fiscalité est moins lourde ou les règles prudentielles moins sévères ne peut être faite précisément. Ceux-ci ne doivent cependant pas être surestimés car outre les difficultés résultant des entraves subsistant aux échanges intra-communautaires, la mise à profit des différentiels fiscaux ou tarifaires suppose que soient remplies plusieurs conditions qui se trouvent rarement réunies dans l'hypothèse des contrats de masse.

En premier lieu, quel que soit le risque couvert et nonobstant l'obstacle linguistique, le preneur doit trouver à la délocalisation de la couverture du risque un avantage suffisamment important pour en compenser le coût. Ceci suppose donc une connaissance précise des conditions d'exploitation ou des règles de protection du preneur en vigueur dans l'Etat d'accueil. Un tel comportement parie, en outre, sur la durée de l'avantage induit par le transfert qui doit être suffisamment stable dans le temps pour ne pas être anéanti par une modification de la réglementation des Etats d'origine ou d'accueil ; il est également soumis aux fluctuation monétaires.

Dans le secteur particulier de l'assurance vie, les transferts de contrats sont essentiellement le résultat des différences de rendement. Si l'on retient l'exemple français, et dans l'hypothèse d'un contrat souscrit avec une entreprise étrangère, trois situations peuvent donc se présenter :

- soit l'engagement est souscrit en France auprès d'une entreprise établie sur le territoire (siège social ou succursale) ; la réglementation fiscale française subordonne le bénéfice de la déductibilité fiscale qui est limitée à des déclarations obligatoires. Par ailleurs les rendements seront limités ;

- soit l'engagement est souscrit directement à l'étranger : l'administration fiscale ne peut alors être informée de l'existence du contrat que par la seule déclaration du souscripteur ; eu égard aux limites imposées à la déductibilité des primes et aux taxes dont sont frappés les revenus du contrat (contribution sociale généralisée ...), le souscripteur n'a intérêt au dépaysement que dans la mesure où l'investissement assure un rendement supérieur à celui résultant du mécanisme français de déductibilité ; il s'agit donc essentiellement de contrats de forte valeur. Dans la mesure où doit être déclarée à l'administration toute sortie du territoire d'une somme supérieure à un certain montant, il n'est pas exclu qu'une partie des fonds soit exportée en l'absence de toute déclaration ;

- dans l'hypothèse où le contrat est souscrit en L.P.S., le principe de territorialité fiscale veut qu'il soit frappé des impôts et taxes locales de l'Etat de l'engagement. Or, les contrats d'assurance vie ne donnent pas lieu au versement d'un impôt, seuls les revenus versés en seront frappés ; l'intérêt de la déductibilité accordée par la France se pose alors dans les mêmes termes que dans le cas précédent.

Les comparaisons tarifaires valent pour l'assurance de dommages, mais n'ont de sens qu'à niveau de prestation égal et il n'existe aucune étude précise sur ce point. D'un avis général, la France présente dans ce secteur une grande diversité.

Lorsqu'elles résultent d'une moins grande sévérité des règles prudentielles, les différences tarifaires ont une contrepartie qui est, théoriquement, une diminution du niveau de sécurité offert aux souscripteurs, l'exemple britannique récent des difficultés rencontrées par les Lloyds ou par plusieurs opérateurs du secteur des fonds de pensions est significatif à cet égard.

La marge de solvabilité est le reflet de la situation de l'entreprise au regard des règles prudentielles. Les dernières marges de solvabilité moyennes connues exprimées en pourcentage de la marge minimale réglementée, telles que présentées dans les rapports des autorités de contrôle de certains Etats membres, sont les suivantes :

 

France (1)

Allemagne (1)

Luxembourg (1)

U.K.

Belgique (2)

Dommage

115 %

249 %

178 %

non publié

348,3 %

Vie

228 %

190 %

185 %

non publié

271,5 %

Moyenne

n.c.

n.c.

182,45 %

non publié

n.c.

(1) hors plus-values latentes (2) plus-values latentes incluses

La comparaison des écarts montre que, dans l'ensemble, les niveaux de marge pratiqués sont supérieurs aux exigences réglementaires. Il convient d'ailleurs d'être prudent sur les conséquences à tirer de ces écarts car, comme le soulignent les travaux du C.E.A., " les problèmes induits par une insuffisance de marge ont été rares en Europe et les quelques défaillances enregistrées n'auraient pas pu être évitées par une augmentation des contraintes de marge. Dans la plupart des cas, ces défaillances ont été causées par de graves erreurs de management et/ou des investissements hasardeux... Généralement les compagnies en cause remplissaient leurs objectifs de marge et les contrôleurs ont été incapables d'anticiper les causes des défaillances lorsqu'elles survinrent " 270( * ) .

En matière d'assurance de dommages, la mesure de l'adéquation des politiques tarifaires aux charges résultant des sinistres est en partie fournie par l'examen du résultat technique.

La comparaison de ces résultats appréciés en pourcentage des primes nettes des sociétés d'assurance britannique, allemande et française montre des situations très diverses :

 

1980

1990

1994

France

- 12 %

- 12 %

- 11 %

Allemagne

0, 5 %

2 %

0,1 %

Grande-Bretagne

- 3 %

- 19 %

- 5 %

(Source : Sigma)

Le caractère négatif des résultats techniques des entreprises financières peut s'expliquer par une sous-évaluation des sinistres mais aussi des charges d'exploitation. A défaut des produits financiers qui rééquilibrent le résultat net, il traduirait une sous-tarification.

En conclusion, la mesure des effets des différences tarifaires ou prudentielles constatées aux dépens des entreprises françaises sur le marché de l'assurance des risques de masse apparaît difficile à effectuer. Sur le marché français des risques de masse, l'avantage dont pourrait bénéficier les opérateurs étrangers opérant en particulier en L.P.S. n'est pas net. Il semble même, au contraire, que les parts détenues par les opérateurs français progressent et que les tarifs qu'ils pratiquent ne leur créent pas un désavantage dans la concurrence.

- Conséquence sur la structure de l'offre de produits d'assurance du maintien de barrières à l'entrée sur les marchés

Les difficultés rencontrées par les succursales de sociétés d'assurance étrangères pour s'implanter sur le marché français de l'assurance des risques de masse peuvent s'expliquer par les caractéristiques d'une distribution dominée par la forte présence des agents généraux et des " bancassureurs ".

Cette situation n'est pas très éloignée de la situation des marchés allemands, sur lesquels la pénétration des succursales étrangères est estimée à 4 %, ou des marchés italiens. Dans ces deux pays les agents exclusifs détiennent près de 80 % du marché. La Grande-Bretagne se distingue par une plus grande ouverture aux activités des sociétés étrangères puisqu'elles collectent 33 % des primes alors pourtant que les intermédiaires indépendants assurent près de 70 % de la distribution ; cette situation est sans doute explicable par la prépondérance nette des courtiers sur les agents liés.

La forte présence des mutuelles sans intermédiaires constitue par ailleurs un obstacle à la pénétration des entreprises étrangères sur le marché de la vente directe. La faiblesse de leurs frais de chargement permet à ces opérateurs de maintenir leurs coûts à des niveaux relativement bas et de vendre leurs produits à des prix avantageux, d'autant qu'ils concentrent souvent leur offre sur certaines catégories professionnelles dont le taux de sinistre est inférieur à la moyenne 271( * ) .

Cette situation a conduit les assureurs étrangers désirant opérer en France à procéder à l'acquisition d'entreprises françaises de façon à bénéficier de leurs réseaux de distribution. Dans un passé récent, les opérations suivantes ont ainsi été réalisées :

- août 1994, rachat du groupe Victoire par la compagnie britannique Commercial Union ; cette opération s'est achevée par la fusion en 1996 des sociétés Sinafer et SEV au sein d'Abeille Vie, filiale de Commercial Union ;

- 1997, offre publique d'achat de la société allemande Allianz (n° 1 allemand) sur les A.G.F. (n° 3 français).

Cette opération, qui s'est accompagnée de la cession de la société Athéna au groupe italien Generali, aura également pour effet une prise de participation d'Allianz dans la COFACE.

A la fin de l'année 1997, trois des dix premières entreprises françaises étaient contrôlées par des compagnies étrangères ; elles représentaient 16,2 % du total des primes recueillies toutes assurances confondues, mais seulement 11 % dans le secteur de l'assurance vie. Ces résultats marquent une prédominance de l'activité des sociétés étrangères dans l'assurance de dommages qui n'est sans doute pas sans lien avec la prépondérance exercée par les courtiers d'origine étrangère, en particulier dans le secteur de la couverture des grands risques.

Dans ce dernier secteur, les parts de marché détenues par des sociétés d'origine étrangères seraient les suivantes :

- risques crédit 84 %

- risques industriels 50 %

- transports gros risques 40 %

En 1996, l'essentiel de ces risques était couvert par l'intermédiaire de maisons de courtage qui collectaient environ 76 % du montant des primes, contre 25 % pour les particuliers. La couverture des grands risques génère d'ailleurs plus de 80 % du chiffre d'affaires des douze premiers courtiers opérant sur le marché français, dont le premier est une filiale à 100 % d'un groupe américain et cinq d'entre eux sont des sociétés filiales à au moins 30 % de cabinets de courtage étrangers (britanniques ou hollandais). Deux filiales de banques distribuant des produits aux particuliers figurant également dans ce groupe.

Au total, il n'est pas démontré que les entreprises françaises subissent un désavantage important dans la concurrence qui les oppose aux opérateurs étrangers du fait des différences des législations fiscales ou prudentielles auxquelles elles sont soumises.

Lorsque de telles différences existent, comme par exemple en matière d'assurance vie, les risques de transferts de contrats sont cependant faibles, en raison notamment de la subsistance de nombreuses entraves aux échanges.

Au demeurant, les règles prudentielles ou fiscales ne sont qu'un élément entrant dans le processus d'élaboration des tarifs qui restent également dépendant de la politique de sélection des risques ou des modalités de distribution choisis par l'opérateur.

Les acquisitions d'entreprises françaises par des entreprises étrangères montrent d'ailleurs que ces dernières cherchent à bénéficier des avantages résultant de structures préexistantes plutôt que de tenter une pénétration du marché français par la seule promotion de leurs produits.

2. Les conséquences de l'instauration d'une monnaie unique

Les Etats membres de l'Union européenne se sont engagés en faveur d'une union économique et monétaire par la signature du Traité de Maastricht en février 1992, ratifié en France par référendum. Lors du Conseil européen de Madrid, en décembre 1995, les chefs d'Etat et de Gouvernement ont fixé le calendrier de l'introduction de la monnaie unique, l'euro :

- en mai 1998, les chefs d'Etat et de Gouvernement arrêteront la liste des Etats membres remplissant les conditions requises par le Traité de Maastricht ; les parités irrévocables des monnaies par rapport à l'euro seront fixées le 31 décembre 1998 ; le 1 er janvier 1999, l'euro deviendra la monnaie officielle des Etats participant et les marchés financiers devront l'utiliser ;

- au 1 er janvier 2002, les monnaies nationales disparaîtront et seul l'euro aura cours légal. Entre 1999 et cette dernière date, les entreprises et les particuliers auront la faculté d'utiliser l'euro ou la monnaie nationale, les administrations publiques ayant choisi de ne " basculer " leur comptabilité dans la monnaie commune que le 31 décembre 2001.

Le statut juridique de la monnaie commune est fixé depuis l'accord politique intervenu lors du Conseil européen de Dublin en décembre 1996 à l'occasion duquel ont été approuvés deux projets de règlements :

- le premier de ces textes 272( * ) , fondé sur l'article 235 du traité, contient les dispositions urgentes à arrêter " afin d'établir la sécurité juridique pour les citoyens et les entreprises dans tous les Etats membres ". Il prévoit : le remplacement avec effet au 1 er janvier 1999 des références à l'écu dans les contrats et autres instruments juridiques par des références à l'euro (au taux de un pour un), la continuité des contrats libellés en monnaie nationale ou en écus arrivant à échéance après le 1 er janvier 1999, les règles de conversion applicables entre chaque monnaie nationale admise et l'euro (fixés le 31 décembre 1998), enfin les règles d'arrondi pour les conversions entre les monnaies nationales et l'euro ;

- le deuxième, fondé sur l'article 104 L.4 du même texte, constitue la loi monétaire qui impose l'euro comme monnaie des Etats membres de l'Union économique et monétaire tant à l'égard des autres Etats membres de l'Union européenne que de la communauté internationale. Il sera formellement adopté, à l'unanimité des Etats membres qualifiés, au printemps 1998.

a) Les conséquences sur le fonctionnement des entreprises et pour les souscripteurs

L'introduction de l'euro entraînera une simplification du fonctionnement des entreprises en matière prudentielle et de gestion des actifs.

Dans un premier temps cependant, pendant la période transitoire, le passage à l'euro aura un coût logistique pour les entreprises dont aucune estimation n'a encore été proposée par les organisations professionnelles. Une question essentielle en la matière est de savoir si les banques, dont certaines filiales sont par ailleurs concurrentes des sociétés d'assurance, percevront ou non des commissions chaque fois qu'une conversion euro/franc sera nécessaire. Le fait pour celles-ci de percevoir de telles commissions aurait pour conséquence un accroissement de charges pour les compagnies d'assurance ou leurs clients. Cette situation pourrait placer les sociétés d'assurances dans une situation moins favorable dans la concurrence qui les oppose à ces mêmes banques, dès lors que celles-ci n'imputeraient pas des frais de change de façon identique à leurs filiales ou à leurs concurrents.

En matière prudentielle, les règles concernant la nature, la dispersion et l'allocation des actifs ne seront pas affectées par l'introduction de l'euro. Par contre, l'obligation de congruence qui impose de représenter des engagements exigibles dans une monnaie par des actifs libellés dans la même monnaie, n'aura plus d'application dans la zone euro où le risque de change aura disparu.

Enfin, la règle de la localisation des actifs trouvera une application étendue à l'ensemble des sites sur lesquels les titres pourront être mobilisés.

Dans le domaine de la gestion financière des actifs, l'euro devrait permettre d'évoluer de marchés financiers locaux segmentés par devises, vers un marché européen des capitaux. Le développement d'un marché obligataire européen sera favorisé par la transformation en euro des dettes publiques des pays membres et, sous réserve d'une harmonisation des conventions de marché et de place, les placements bénéficieront de la liquidité et de la performance accrue du marché financier qui résultera de cette expansion. L'introduction de l'euro devrait également favoriser la création d'un indice unique européen représentatif du marché des actions et contribuer à la mise en place d'un dispositif réglementaire français permettant l'utilisation des produits dérivés par les sociétés d'assurance. Une liquidité accrue et la disparition du risque de change devrait permettre le développement des investissements en actions qui pourront se fonder sur une approche sectorielle dont les contours seront plus larges.

S'agissant des relations entre assurés et assureurs, les conséquences de la substitution de l'euro aux monnaies nationales seront faibles.

Du point de vue contractuel, le principe de continuité juridique des contrats a été confirmé en décembre 1996 (accord de Dublin) : l'introduction de la monnaie unique ne pourra conférer à aucune des parties le droit de modifier les termes des contrats ni de les résilier unilatéralement ; une clause de " bascule " automatique doit être prévue dans les contrats se poursuivant postérieurement au passage à l'euro. La valeur de l'euro sera fixée par rapport à chacune des monnaies nationales des pays participant sur la base d'un taux de conversion à six chiffres significatifs, des règles d'arrondi étant précisées par le règlement et valant pour toutes les opérations.

Certaines difficultés peuvent cependant se poser en matière de contrats indexés. La profession préconise que soit effectuée une double publication des indices en franc et en euro pour les indices valorisés en francs pendant la période de transition. Pour pouvoir être opposables aux tiers de manière incontestable, les seuils et les plafonds utilisés devraient faire l'objet de tableaux de correspondance officiels. En cas de disparition d'un indice de référence, l'indice le plus proche devra s'appliquer conformément à la jurisprudence en vigueur en la matière.

En ce qui concerne les assurances de dommages, les contrats sont généralement de durée annuelle, reconduits tacitement. Le montant des garanties, des franchises, de la cotisation sera exprimé en euro par simple conversion lors du renouvellement du contrat. Pour les branches vie et capitalisation, les contrats en monnaie nationale ne seront pas affectés, il y aura simple substitution de monnaie sans influence sur la valeur du contrat.

b) Conséquences sur les échanges

Pour les preneurs, le passage à euro doit favoriser la transparence monétaire des offres en permettant une meilleure comparaison des prix sans avoir simultanément à apprécier l'évolution relative des taux de change. Même si, en particulier du fait des mécanismes de tacite reconduction, les souscripteurs français restent assez fidèles à leurs compagnies d'assurance, l'adoption d'une monnaie unique ne peut donc que favoriser les opérations transfrontalières dans la mesure où elle améliore la lisibilité de l'offre étrangère et diminue les coûts de transaction par la suppression des frais et des risques de change.

Cet accroissement devrait résulter en particulier d'une extension de la L.P.S., qui pourrait entraîner une standardisation des instruments d'épargne et un rapprochement du taux de rendement proposé. A défaut, il n'est pas exclu qu'il en résulte un déplacement de l'épargne vers des sociétés offrant la meilleure rentabilité. Seule une harmonisation ou tout au moins un rapprochement des législations fiscales pourrait alors contrecarrer un mouvement qui ne serait susceptible cependant que de concerner les plus gros souscripteurs potentiels, disposant de revenus élevés.

Des conséquences similaires peuvent être envisagées en matière d'épargne retraite : accroissement de la concurrence entre fonds de pensions restructurés autour des plus importants, utilisation plus importante des avantages fiscaux proposés par certains Etats membres, homogénéisation des règles prudentielles. Un développement de la concurrence transfrontalière peut également être envisagé dans le secteur de l'assurance santé.

Une tendance à la simplification et l'uniformisation de l'offre d'assurance de dommages devrait également résulter de la réforme monétaire.

CONCLUSION

1 - L'examen de la situation des opérateurs du secteur de l'assurance fait apparaître des différences de conditions d'exploitation relativement importantes. Certaines caractéristiques découlant des dispositions législatives ou réglementaires, lorsqu'elles facilitent l'exercice de l'activité d'assurance sans représenter la stricte contrepartie de contraintes d'intérêt général, peuvent créer un déséquilibre dans la concurrence en rompant l'égalité des chances entre les opérateurs bénéficiant de ces avantages et ceux qui ne peuvent y prétendre.

La transposition des directives européennes d'assurance, lorsqu'elle sera achevée, permettra de réduire les particularités de fonctionnement des mutuelles du code de la mutualité en les soumettant à des règles prudentielles et comptables comparables à celles des autres opérateurs.

Il apparaît souhaitable, par ailleurs, pour favoriser le bon fonctionnement de la concurrence sur les marchés de l'assurance, notamment sur ceux de la protection sociale complémentaire, que des opérations d'assurance identiques soient soumises aux mêmes règles fiscales, indépendamment de la nature de l'organisme qui les effectue, et qu'intervienne une clarification des relations entre l'Etat et les organismes titulaires de droits exclusifs ou bénéficiaires d'aides publiques.

2 - S'agissant de la distribution de l'assurance, il convient de relever que le cadre réglementaire contraignant dans lequel elle s'exerce n'a pas empêché l'arrivée de nouveaux opérateurs tels que les banques ou les sociétés sans intermédiaires.

Si les relations entre les distributeurs et les sociétés d'assurance sont dans certains cas marquées par des liens d'exclusivité de fait ou de droit, cette situation s'inscrit dans un contexte caractérisé par la diversité des systèmes de distribution, le grand nombre d'opérateurs et la variété des produits offerts. Les différences de conditions d'exploitation entre opérateurs ne génèrent pas en elles-mêmes de distorsions de concurrence au détriment des distributeurs traditionnels, courtiers et agents.

La distribution de produits d'assurance par La Poste et le Trésor public pose le problème spécifique du partage de leurs réseaux entre des activités concurrentielles et des activités de service public. Le Conseil ne peut sur ce point que réitérer ses recommandations tendant à ce qu'une comptabilité analytique transparente ou une véritable séparation juridique de ces activités permette de s'assurer que ces opérateurs n'utilisent pas les aides de l'Etat s'agissant de La Poste, ou les moyens logistiques de l'administration s'agissant du Trésor, dans des conditions faussant la concurrence.

3 - Si de nombreux facteurs interviennent dans l'élaboration des tarifs des produits d'assurance tels que la politique commerciale de l'entreprise en particulier en matière de sélection des risques, il n'en demeure pas moins que les différences de régimes fiscaux, prudentiels et comptables entre les réglementations adoptées par les pays de l'Union européenne peuvent conduire à des écarts tarifaires.

L'incidence de ces différences sur la concurrence que se font les opérateurs établis et les opérateurs non établis sur un même marché national est pour l'instant difficile à apprécier. Sa mesure devrait en tout état de cause être effectuée séparément pour chaque marché des produits d'assurance.

En outre, les particularités propres à la distribution des produits d'assurance, la prééminence des distributeurs liés et des assureurs directs et les avantages liés à la proximité restent des obstacles à la pénétration des produits d'origine étrangère, indépendamment des difficultés liées à la langue des contrats et à l'interprétation de leurs clauses.

Enfin, l'introduction de la monnaie unique, en permettant une meilleure comparaison des offres, ne pourra que favoriser l'information du consommateur sur les produits proposés dans d'autres Etats membres, ce qui devrait faciliter les transferts de contrat. Une telle conséquence, eu égard aux habitudes de consommation et aux obstacles aux échanges subsistant, ne pourra cependant qu'être progressive.

Délibéré sur le rapport de Mme Irène Luc, MM. Alain Dupouy et Loïc Guérin par M. Barbeau, président, MM. Cortesse et Jenny, vice-présidents, M. Bon, Mme Boutard-Labarde, MM. Callu, Gicquel, Marleix, Pichon, Rocca, Sargos, Thiolon et Urbain, membres.

Le rapporteur général, Le président,

Marie PICARD Charles BARBEAU



1 Note de la commission des finances : A la date de publication de ce rapport, M. Lambert est devenu président de la Commission des finances.

(2) Ancien directeur des risques d'entreprise aux AGF. Cette citation nous a été rapportée par Roland Nussbaum.

(3) D'après l'aide mémoire de l'assurance 1997 du Centre de documentation et d'information de l'assurance.

(4) " L'Assurance ", tome 1 de la collection de l'Ecole nationale d'assurance, " L'Argus ", 1985, cité par C. Marmuse et X. Montaigne, " Le management du risque ", Vuibert, 1989.

(5) Sur la notion de prix négatif, voir Gérard Debreu, Theory of Value, Yale University, 1959 : " The price Ph of a commodity may be positive (scarce commodity) null (free commodity) or negative ( noxious commodity). In the last case an agent for whom that commodity is an output, i.e., who disposes of it, makes a payment to the agent for whom it is an input, i.e., receives from the latter a negative payment. ", chapitre 2, p. 33. L'apparition de prix négatifs dénote qu'on passe de la zone des " biens " économiques à celle des " maux " économiques.

(2) George Lane, " La vérité sur l'assurance ", mémoire pour l'ALEPS, octobre 1997.

(6) Rapport général de la Commission de l'économie générale et du financement, Ve Plan, 1966-1970, annexe n° 14, 1965.

(7) Cité par James Flanigan, " Smart Money's in Insurance Industry for Many Good Reasons ", in The Colombus dispatch, 29 mars 1998 : " It's a business of taking in premiums today, paying out claims later (...) During that time the insurer invests the money ".

(8) Voir article " Assurances " in " Dictionnaire de l'économie politique ", Guillaumin Coquelin, Guillaumin, Paris, 1852. C'est ce qu'a pu souligner Henri Ford : " New York n'est pas la création des hommes, mais celle des assureurs. Sans les assurances, il n'y aurait pas de gratte-ciel, car aucun ouvrier n'accepterait de travailler à une pareille hauteur, en risquant de faire une chute mortelle et de laisser sa famille dans la misère. Sans les assurances, aucun capitaliste n'investirait des millions pour construire de pareils immeubles, qu'un simple mégot de cigarettes peut réduire en cendres. Sans les assurances personne ne circulerait en voiture à travers les rues. Un bon chauffeur est conscient de ce qu'il court à chaque instant le risque de renverser un piéton ", comme le rappelle Michel Albert dans " Le rôle économique et social de l'assurance " in " Encyclopédie de l'assurance ", éditée par François Ewald et Jean-Hervé Lorenzi, Economica, 1998.

(9) Frédéric Bastiat, " Harmonies économiques ", chapitre 14, Oeuvres complètes, tome 6, Guillaumin, 1850.

(10) Joseph Proudhon, " De la capacité politique des classes ouvrières ", 1865, livre 11, chapitre VI.

(11) Léon Walras, texte rédigé en 1898 pour l'Almanach publicitaire de la compagnie La Suisse paru en 1899, publié en extraits par Michel Lutfalla " Walras et l'assurance-vie ", in " Risques " n° 7 septembre 1991.

(12) " The contribution of the many to the misfortune of the few ".

(13) Voir " Risques " n° 1, juin 1990. Voir également la définition par le même de la " société d'assurance " comme " un intermédiaire financier qui accepte de porter les risques transférés par les agents économiques en les mutualisant ", idem.

(14) Frédéric Bastiat, idem.

(15) René Vandamme, " Enjeux et défis de la réassurance en France, Le risque catastrophique ", in " Risques " n° 34, avril-juin 1998.

(16) Voir à ce sujet George Priest, Les risques " catastrophes " intervention publique ou marchés concurrentiels, idem.

(17) Qu'il s'agisse d'une " first party liability insurance " ou d'une " third party liability insurance ".

(18) D'après Daniel Collignon, " Classification des assurances de personnes ", et Dominique Santini, " Tableau des assurances de dommages ", Encyclopédie de l'assurance, déjà citée.

(19) C'est cependant à tort qu'on identifie la naissance de l'assurance avec le prêt à la grosse aventure (qui incorpore cependant bien une part de prise de risque, de partage et de couverture du risque) : " L'Antiquité à connu des formules contractuelles intégrant la probabilité de dommages, comme le " prêt à la grosse aventure ", contrat mutuel par lequel un prêteur s'engage à fournir des fonds au capitaine ou maître d'un navire en relâche, pour réparer ses avaries et subvenir à ses besoins, moyennant un intérêt convenu, la " prime de grosse ". Le capitaine, de son côté, s'engage à rembourser le montant du prêt et de la prime à son arrivée à destination, et affecte à la garantie de son engagement le navire et, si nécessaire, le chargement et le fret. Si le navire est détruit ultérieurement, avant d'atteindre le port, l'emprunteur est libéré du capital et de la prime. En cas d'arrivée et de non paiement, le prêteur est privilégié sur les gages qu'il peut saisir et faire vendre. Une assimilation par trop hâtive a conduit à confondre le " contrat à la grosse " avec l'assurance. En réalité, le prêteur n'est pas un assureur, parce qu'il fournit son capital par avance et n'a droit à aucune prime en cas de sinistre ; il n'est pas davantage un assuré, puisqu'il ne paie pas de prime. De son côté, le capitaine, l'emprunteur, n'est ni un assureur ni un assuré, puisqu'il ne supporte aucun dommage dans le cas de perte du navire et qu'il ne paie aucune prime si cette perte a lieu. Les éléments constitutifs de l'assurance manquent complètement à cet arrangement. " Voir "  l'assurance-vie en France ",  sous la direction de Jean-Marie Thiveaud, Montchrestien, à paraître, page 13.

Il est vrai cependant que le développement de ce prêt au Moyen-âge introduit une " novation révolutionnaire ", proche de celle de la société anonyme qui le prolonge en rompant avec la tradition du prêt à gage et en lançant le concept d'association au risque de l'entreprise du prêteur qui, en contrepartie de son acceptation de perdre son capital sans recours, demande un droit de regard sur l'entreprise et le partage des résultats en cas de succès (voir Lucien Pfeiffer, " Libre entreprise et socialisme ", Encre, 1986).

(20) Voir Jean Delumeau, " Des grandes peurs fondatrices ", in " Risques " n° 1, juin 1990.

(21) On notera ici que la défiance révolutionnaire, d'essence individualiste à l'égard de l'association, est générale et aussi défavorable au développement du capitalisme que du mutualisme et des syndicats, puisqu'il faut attendre la fin du second empire pour obtenir l'affranchissement de la société anonyme.

(22) Pour la plupart de ces développements, voir Alain Plessis, " Histoire de l'assurance en France, une perspective longue ", in " Risques " n° 26, janvier-mars 1996.

(23) Henri Hatzfeld, " Du paupérisme à la sécurité sociale, Essai sur les origines de la sécurité sociale en France (1850-1940) ", librairie Armand Colin, 1971, page 111.

(24) Colbert, " Lettres instructives et Mémoires ", tome III, publiés d'après les ordres de l'Empereur par Pierre Clément de l'Institut, Imprimerie impériale, 1864.

(25) Voir Henri Hatzfeld, déjà cité et Nicolas Marques " L'intervention patronale dans le domaine social au XIXe  siècle ", note pour le Commissariat général du Plan, mai 1998.

(26) En même temps que les Églises ont été les premiers collecteurs de cotisations sociales, l'Eglise catholique a été le premier promoteur d'oeuvres sociales pour tous. C'est ainsi par exemple que l'évêque de Paris Landry, canonisé depuis, a fondé vers 650, le premier hôpital parisien : l'Hôtel-Dieu. Dans le mémento du mutualiste, édité par la mutualité de la Côte-d'Or, il est noté que : " En dépit de ses idéaux humanistes et libertaires, la Révolution de 1789 brise les sociétés de secours mutuel dans leur essor. L'assistance aux " citoyens malheureux " figure bien dans la déclaration des Droits de l'Homme (art. 23), elle est inscrite comme " l'un des devoirs sacrés de la Nation " dans de nombreux textes de l'époque, cependant en juin 1790, La loi Le Chapelier interdit toute forme d'association. Selon le contexte politique local, les sociétés de secours mutuels entrent dans une clandestinité plus ou moins complète, pour ne retrouver une existence au grand jour que sous le Consulat et l'Empire ".

(27) Laleuf, " L'assurance ", tiré de Alfred Sauvy, " L'histoire économique de la France entre les deux guerres " d'Alfred Sauvy, Divers sujets, Fayard 1972, page 261, cité par Nicolas Marques (voir ci-dessous).

(28) La Poste, Historique du partenariat Poste/CNP, février 1992.

(29) Gilles Johanet, Les conditions de mise en oeuvre d'une assurance maladie obligatoire, Encyclopédie de l'assurance.

(30) Jean-Louis Bellando, La réglementation et le contrôle de l'assurance du niveau mondial, Encyclopédie de l'assurance.

(31) Herman Couzy : " Les différents cadres juridiques de l'assurance ", Encyclopédie de l'assurance.

(32) Voir Georges Lane, " La vérité sur l'assurance ", chapitre 5 : " L'étatisation d'une fraction de l'industrie de l'assurance ", publication pour l'ALEPS.

(33) Voir André Burlot, 1947 : " Les assureurs exclus du secteur des accidents du travail ", in " Historia ", hors série, déjà cité.

(34) " Assurances obligatoires : fin de l'exception française " in " Risques " n° 12, octobre-décembre 1992.

(35) La CCA comprend 5 membres : un membre du Conseil d'Etat, un de la Cour de cassation, un de la Cour des comptes, deux membres choisis pour leur expérience en matière d'assurance et de questions financières. Ils sont irrévocables et nommés pour 5 ans par arrêté du ministre des Finances. Pendant leur mandat, et 5 ans après, il ne peuvent être rétribués par une société d'assurance.

(36) Voir Jean-Louis Bellando, " La réglementation et le contrôle de l'assurance au niveau mondial ", déjà cité.

(37) Voir en annexe 3 de ce chapitre le tableau de la réglementation européenne en matière d'assurance. Les troisièmes directives assurances ont été transposées en droit français :

- pour les sociétés d'assurance régies par le code des assurances, par la loi n° 94/5 du 4 janvier 1994, le décret n° 94/635 du 25 juillet 1994 et l'arrêté du 8 août 1994 ;

- pour les institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale, par la loi n° 94/678 du 8 août 1994, le décret du 2 avril 1996 et l'arrêté du 20 mai 1996.

(38) Note remise par le secrétariat général du Comité européen des assurances à l'occasion de l'audition de M. Lohéac par le Commissariat général du Plan, 23 juin 1988.

(39) Société Générale Equity Research, " Assurances, Marché unique : La route est encore longue ", juin 1988.

(40) Pour l'UAP, 94,6 millions d'actions, soit 79,7 % du capital détenu par l'Etat, sont cédés au prix de 152 F, la moitié étant réservée aux particuliers. Pour les AGF, 68 millions d'actions sont cédées à 102,4 F pour les salariés, à 128 F pour les particuliers, à 136 F pour personnes morales.D'une manière générale, pour ces développements, voir Jean-Louis Bellando " Un long chemin vers la dénationalisation " in " 50 ans d'assurance " Historia, numéro hors série d'octobre 1997.

(41) Jean-Louis Bellando, " Une nationalisation sans étatisation ", idem.

(42) " Les 200 en France et en Allemagne, deux modèles contrastés de détection-sélection-formation des dirigeants des grandes entreprises ". Dans la banque comme dans l'assurance, le modèle que les deux sociologues appellent " capitalisme directorial " joue pleinement. La part de " l'atout Etat " (et, au sein de celui-ci, de " l'atout  grands corps ") élimine totalement la part de " l'atout carrière " et de " l'atout carrière-maison " dans l'accès aux postes de commandement.

(43) Voir Claude Tendil, Agefi du 19 mars 1998. " Le chiffre d'affaires de 1996 était en régression de 8 %. Et cette tendance a continué jusqu'en avril 1997, mois où nous avons commencé à restructurer la gamme de produits. Nous avons alors renoué avec la croissance puisque nous terminons l'année avec un chiffre d'affaires stable ".

(44) Voir l'étude sur les  Assurances  de Société Générale Euro Research : " A l'heure des grandes manoeuvres ", janvier 1998, annexe 1.

(45) Le rapport pour l'Assemblée nationale du député Baert (enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 15 mai 1998) quoiqu'allusif, est cependant fort clair dans son diagnostic : " L'analyse des causes des pertes du GAN est maintenant solidement établie. On y retrouve hélas les caractéristiques de quelques autres sinistres bancaires et financiers récents. Tant dans l'immobilier que dans l'assurance, le GAN a mené une action de diversification et une politique agressive de conquête de parts de marché sans l'accompagner d'un dispositif de contrôle interne fiable, ce qui l'a conduit à assumer des risques de qualité très médiocre, à subir de plein fouet le retournement de la conjoncture immobilière et les aléas inhérents aux métiers de l'assurance. S'agissant plus précisément du cas de l'UIC, cette fuite en avant a atteint des proportions importantes sans que les différents contrôles externes (direction du Trésor, Commission bancaire, commissaires aux comptes) ne détectent ou ne mettent fin aux carences pourtant manifestes du management en place, notamment en matière d'appréciation des risques ". Selon la même logique que dans la banque, la part de marché a été systématiquement préférée à la rentabilité : " l'activité d'assurance du GAN s'est traduite par une politique de dumping en assurance automobile symbolisée par le " tarif bleu " orienté en principe vers les bons conducteurs et qui a permis au GAN de conquérir en quelques années 250 000 nouveaux clients. Cette politique aboutira à une perte de 4 milliards de francs entre 1992 et 1995 pour l'ensemble des activités dommages. Si l'on ajoute à ce montant les 30 milliards de francs de pertes de l'UIC et les 4,2 milliards de francs de pertes sur les actifs immobiliers détenus directement par les compagnies d'assurance du groupe, on obtient un total de pertes de l'ordre de 38,2 milliards de francs pour les exercices 1992 à 1996 ".

(46) " Assurances obligatoires : la fin de l'exception française " Risques n° 12, octobre-décembre 1992.

(47) Les assurances obligatoires, Encyclopédie de l'assurance, voir en particulier pour une classification et une analyse des forces et des faiblesses du système français ". Il n'existe pas de liste officielle complète et à jour des assurances obligatoires, auquel le livre II du code des assurances est consacré, mais qui cependant n'en regroupe et traite que 4 sur à peu près 100. Voir cependant liste en appendice du code Dalloz établie par le ministère des Finances.

(48) A l'origine étaient les assurances mutuelles agricoles. En effet
: c'est à partir de 1840 qu'on observe la naissance s pontanée des premières caisses d'assurances mutuelles agricoles au niveau local. La première est fondée en Isère par des agriculteurs en 1840 pour couvrir le risque incendie. En 1900, la loi du 4 juillet fixe le cadre juridique de l'activité des caisses d'Assurances mutuelles agricoles (AMA). En 1975, création de l'une des premières sociétés d'assistance du marché, SOS-AMA qui deviendra MUTUAIDE. En 1978, création par la mutualité agricole d'une société de réassurance, SORAMA, qui amorce l'ouverture internationale de la mutualité agricole. En 1986,naissance de la marque Groupama, qui fédère l'ensemble des AMA (extraits du dossier de presse de Groupama, fiche 150 ans d'histoire). Aujourd'hui, Groupama est le premier groupe d'assurance mutuelle sur le marché français avec un chiffre d'affaires en 1996 de 35,6 GF et forme une entité de 24 caisses régionales et 10 000 caisses locales, sous la houlette d'une caisse centrale actionnaire majoritaire de la Hoding Groupama SA qui a racheté le GAN.

La MAIF (Mutuelle d'assurance des instituteurs de France) a été fondée en 1934, inspirée par le modèle de la mutualité agricole observée sur le terrain par les instituteurs. Elle compte à fin 1996 en non-vie 1,6 million de sociétaires pour 7,9 GF de chiffre d'affaires. L'AMF (Assurance mutuelle des fonctionnaires) est fondée en 1936 pour garantir les risques spécifiques des comptables publics, puis elle s'est ouverte aux salariés du secteur public et para-public. Fin 1996, elle couvre près de 101 000 sociétaires pour 150 MF de cotisations. La MACIF (Mutuelle d'assurance des commerçants industriels de France et leurs salariés) est créée en 1960. Elle dispose à fin 1996 de 3,8 millions de sociétaires et a encaissé 13,4 GF de cotisations. Elle a émis en 1996, 3,9 GF de contrats d'assurance-vie auprès de 353 000 souscripteurs (18,6 GF de provisions mathématiques).

(49) Documentation interne du GEMA.

(50) Le domaine d'intervention de la Commission de contrôle des assurances inclut les entreprises d'assurance et de capitalisation établies en France, ainsi que, depuis le 1er janvier 1995, les entreprises de réassurance ayant leur siège social en France et les sociétés de participations d'assurance.

(51) " Les statistiques de l'assurance ", rapport du CNIS n° 39, année 1998, p. 10.

(52) D'après le rapport " Informations statistiques et financières sur la mutualité ", exercice 1994, pour le Conseil supérieur de la mutualité, du ministère du Travail et des Affaires sociales. Le tableau ne reflète que les groupements mutualistes de plus de 3 500 personnes protégées et/ou gérant au moins une réalisation sociale, qui assurent 97 % des prestations mutualistes et gèrent toutes les réalisations sociales.

(53) Voir rapport 1994-1995 de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance, dit rapport Holleaux, p. 15.

(54) André Billet, les Prévisions glissantes détaillées du BIPE, Assurance, Perspectives sectorielles 1996-2002, édition 1997.

(55) La Commission de contrôle des assurances a été instaurée par la loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989.

(56) La composition de la Commission est définie par l'article L 310-12-1 du code des assurances.

(57) En application de l'article L 310-16 du code des assurances.

(58) Article L 310-15 du code des assurances.

(59) Article L 310-12 du code des assurances.

(60) Article L 310-19 du code des assurances.

(61) Article L 310-23 du code des assurances.

(62) Extrait du rapport 1994-1995 de la CCMIP et du code de la mutualité.

(63) Extraits du code de la mutualité, livre V, titre III, contrôle, chapitre unique.

(64
) Le préfet de région en cas de contrôle déconcentré.

(65) " L'assurance mondiale en 1995 ", Sigma, n° 4/1997, 28 août 1997. Les données 96 de Sigma donnent une place moins importante au Japon du fait du taux de change yen/USD mais aussi du fait que les produits Kampo et Zenkyoren ont été inclus pour le Japon dans les chiffres 1995.

(66) Les prévisions glissantes détaillées du BIPE " Assurances, Perspectives sectorielles 1996-2002 ", volume XXXIV, édition 1997, p.11.


( 67 ) Etude BIPE déjà citée.

(68) A partir de " Statistiques des services d'assurance ", Eurostat, 1997.

(69) " Insurance in Europe ", Eurostat, 1995, publié uniquement en anglais.

(70) Idem.

(71) Ce poste recouvre en grande partie de l'assurance transport, navale et aérienne en particulier, très forte en Grande-Bretagne, au Luxembourg ou en Suède.

72 Voir pour cette périodisation et les données, Jérôme Cornu : "L'essor de l'assurance-vie", Risques n° 25, janvier-mars 1996

73 Patrimoine financier global des ménages.

74 Voir Prévisions glissantes détaillées du BIPE, " Assurances, Perspectives sectorielles 1996-2002 ", volume XXXIV, édition 1997.

75 Patrick Lefas : " L'assurance dans les marchés dominants : la triade ", Encyclopédie de l'assurance, déjà citée.

76 Repris de Patrick Lefas, idem.

77 Ce schéma est extrait de l'article de Michel Albert " Le rôle économique et social de l'assurance ", in Encyclopédie de l'assurance, déjà citée.

78 Ce schéma est extrait de l'article de Michel Albert " Le rôle économique et social de l'assurance ", in Encyclopédie de l'assurance, déjà citée.

79 François Bourguignon et Sébastien Faudemer : " Les marchés d'assurance dans les pays développés ", in " Risques " n 22, L'assurance dans le monde, avril-juin 1995.

80 Les chiffres sont tirés de l'agrégation effectuée par La Poste sur le marché IARD, 1996.

81 Jean-Hervé Lorenzi : " L'industrie de l'assurance ", à partir du tableau 8, Encyclopédie de l'assurance. Une certaine prudence dans l'interprétation de ces chiffres est requise puisqu'on obtient des points de vue très différents si on considère les entités juridiques ou les groupes.

82 Société Générale Euroresearch, " L'assurance à l'heure des grandes manoeuvres ", janvier 1998.

83 Gaël de Pontbriand (Coopers et Lybrand) : " La bancassurance et la restructuration du secteur financier ", Banque Stratégie, idem.

84 Voir étude Société Générale Euro Research, déjà citée, pp  2-4.

85 OPA menée à bien depuis le 15 avril  1998 et l'apport des titres aux offres principale (1,5 % à 320 F) et subsidiaire (77 % à un prix garanti de 360 F en juin 2000), qui permet à Allianz de détenir 50,8 % des AGF.

(86) Sur l'ensemble de cette section, voir étude Société Générale Euro Research, déjà citée, p. 5-6.

(87) Voir " Supermarket Banks Sound Great, but Only in Theory ", European Experiences Shows that One Stop Shopping can Prove Disappointing, All Things to all People ? Christopher Rhoads, Wall Street Journal Europe, 8 avril 1998. Voir aussi " l'opinion " de Ron Chernov, The Birth of a Bureaucratic Mastodont, WSJE, 15 avril 1998.

(88) " L'assurance en mouvement ", Banque Stratégie, mars 1998.

89 Mesures classiques de la performance en assurance. Voir par exemple les définitions de Sigma, in " Etude comparative des performances de l'assurance dans plusieurs pays : analyse des résultats intégrant le facteur risque ", n° 1/95. Les données provenant de sources différentes (Eurostat, Sigma) ne sont pas comparables.

(90) Les conclusions qu'on peut tirer des tableaux ci-dessus sont toutes relatives puisque la comparaison des taux de chargement n'est pertinente que dans la mesure où la gamme des produits commercialisés est comparable d'un marché à l'autre.

(91) " Insurance in Europe ", Eurostat, 1995, pp. 13-15, dernière étude comparative réalisée par Eurostat.
(92) La consolidation des résultats de l'assurance-vie et de l'assurance non-vie conduit à une vision un peu artificielle de la rentabilité globale des secteurs d'assurance nationaux dans la mesure où celle-ci est largement influencée par le poids relatif de l'assurance-vie sur chaque marché. Cependant, ces données ne sont pas au total dénuées de signification sur la rentabilité effective des diverses industries de l'assurance. Il n'en est pas moins vrai, par exemple, que l'assurance française souffre d'une rentabilité comparée insuffisante.

(93) Le rendement financier de rendement du placement des capitaux inclut, outre le produit des dividendes et des intérêts courants, les plus values et les pertes réalisées sur les variations du cours des devises et des actions.

(94) On ne dispose malheureusement pas pour l'ensemble des pays étudiés auparavant les données en matière de rentabilité globale, et l'on ne dispose de données à jour pour certains pays que sous la forme de diagrammes. On trouvera en annexe 2 de ce chapitre les données de rentabilité technique et globale des principaux pays de 1975 à 1992. Les diagrammes ci-dessus ont été repris de l'étude Sigma n° 7/1996 sur l' "ouverture des marchés et déréglementation de l'assurance européenne ", actualisée à partir des données de l'étude Thomas Hess et Thomas Trauth in " Towards a Single European Insurance Market ", paru dans l'International Journal of Business, printemps 1998.

(95) Le risque global est la volatilité propre à chaque marché national. Elle intervient comme un quotient divisant les résultats moyens sur la période d'étude (dans le graphique 1974-1993).

(96) Salomon Brothers : " Global Equity Research, Insurance, French Insurances ", First half Earnings Review, 12 septembre 1997.

(97) Voir à ce sujet en particulier Guy Simonet : " Une approche de la solvabilité de l'assureur dans les pays de la CEE, aspects fondamentaux de l'assurance ", OCDE, 1993.

(98) Les dispositions réglementaires en matière de solvabilité figurent aux articles L 334.1, B 334.1 à 39, A 334.1 à 3, et sont pour l'essentiel regroupées au chapitre IV " Solvabilité des entreprises " du titre III " Régime financier " du livre troisième " Les entreprises du code des assurances ".

(99) Rapport " Müller " de la Conférence des services de contrôle des assureurs des Etats membres de l'Union européenne, avril 1997, pp. 1-31.

(100) Le rapport " Müller " préconise d'introduire au-delà de " l'indice de primes et de l'indice de sinistres, un troisième paramètre calculé sur la base de la provision pour sinistres à payer, un indice de provisions ", qui puisse servir de base alternative au calcul de l'exigence minimum de fonds propres : le taux de provisionnement limite ou TPL. Il pourrait être compris entre 12 et 18 % (voir rapport pp. 20-21).

(101) Cyril Roux : article " solvabilité ", in Dictionnaire de l'économie de l'assurance, Risques n° 17, janvier-mars 1994.

(102) Sigma, n° 7/1995, étude déjà citée, p. 9.

(103) On aurait pu évoquer la notion de capital ajusté au risque (risk adjusted capital), selon laquelle le besoin en fonds propres est mesuré en fonction du risque commercial, c'est-à-dire en fonction de la distribution probable des résultats annuels des affaires, établie à partir de la distribution des résultats des diverses branches d'assurance et des résultats des placements. (Voir Sigma n° 7, 1995 et annexe 2 du rapport Müller : l'approche du risk based-capital aux Etats-Unis). Cette notion proche de celle du ratio Cooke pour les banques est utilisée aux Etats-Unis depuis qu'elle a été adoptée en décembre 1992 et décembre 1993 par la National Association of Insurance Commissioners dans l'assurance-vie, puis dans l'assurance non-vie. Elle n'a pas été retenue en Europe en raison de son relatif arbitraire et de sa complexité d'une part, ainsi que de l'incompatibilité d'autre part entre le rythme auquel les pondérations de risque devraient évoluer et le formalisme requis pour l'adaptation de la réglementation au niveau européen (voir annexe 2 de ce chapitre).

(104) L'indicateur de solvabilité ainsi que le ratio de provisions techniques étant généralement calculés sur la base de primes nettes, il est judicieux de tenir compte de la notion de " taux de rétention " : primes nettes/primes brutes, qui renseigne sur la dépendance par rapport à la réassurance et à la rétrocession. Plus il est élevé, plus la part de risque assumée est élevée et moins la compagnie dépend de la solvabilité de son réassureur.

(105) " Insurance in the EEA ", 1995. Statistiques des services d'assurance 1995 et 1996, Eurostat, ratios calculés par le CGP.

(106) Voir en particulier " Evolution de l'insolvabilité et importance de la solidité financière dans l'assurance ", Sigma n° 7, 1995. Dans cette étude, Sigma emploie de manière interchangeable les concepts d'insolvabilité et de défaillance. Ainsi, le risque d'insolvabilité est identique au risque de défaillance, le taux d'insolvabilité est équivalent au nombre de faillites rapportées au nombre des entreprises d'assurance. Compte tenu de la définition habituelle de la " solvabilité " et de l'insolvabilité, distincte de la liquidité et de l'illiquidité, il nous a paru préférable de privilégier le terme de " défaillance ".

(107) ISI signifie Insurance Solvency International. Jusqu'à sa reprise par S&P's en 1990, ISI était une agence de notation indépendante.

(108) Voir " Le marché londonien ", Sigma n° 2/1995. En trois ans, de 1988 à 1991, le Lloyd's a cumulé une perte totale de 7 milliards de livres, soit plus que l'encaissement total des primes de 1992. La mésaventure du Lloyd's est une bonne illustration des risques que l'inversion du cycle dépenses-recettes dans l'assurance peut receler, une bonne illustration également des risques d'insolvabilité associés à la guerre des tarifs pratiqués sur tous les segments du marché français de l'assurance au mépris de sa rentabilité.

(109) A.M. Best Company : Best's Insolvency Study, Property/Consualty Insurers 1969-1990.

(110) La notion de groupe s'applique tant aux sociétés de personnes de capitaux qu'aux sociétés de personnes, avec des définitions adaptées :

- contrôle exclusif ou partiel par le nombre d'actions et de droits de vote détenus sur une filiale,

- direction commune de sociétés soeurs,

- direction de fait en raison d'un lien de réassurance sur des sociétés réassurées à 100 %.

Au sujet de la notion de conglomérat, voir CEA INFO n° 1, Juillet 1993. Au sujet de la surveillance des conglomérats, voir le rapport de février 1998 du Comité de Bâle sur la " supervision des conglomérats financiers ".

(111) CEA ECO n° 3, septembre 1997, et FFSA, les marché européens de l'assurance-vie en 1996, janvier 1998, n° 75.

(112) D'après Pr. G.M. Dickinson et E. Dinenis : " Réglementation des investissements des sociétés d'assurance dans les pays de l'OCDE ", in Aspects fondamentaux des assurances, investissement fiscalité insolvabilité, OCDE, 1996.

(113) Ce bilan simplifié est présenté à l'anglo-saxonne, comme on peut le voir au fait qu'immobilisations et fonds propres sont présentés en bas de bilan, ainsi qu'au fait que les provisions techniques sont nettes des engagements cédés aux réassureurs.

(114) Extrait de " La protection des assurés dans le marché français de l'assurance-vie ", Moody's Investors Service, Global Credit Research, mars 1998.

(115) Extrait de " La protection des assurés dans le marché français de l'assurance-vie ", Moody's Investors Service, Global Credit Research, mars 1998.

(116) La supervision du secteur financier britannique fait à l'heure actuelle l'objet d'une réorganisation, un nouvel organisme, le Financial Services Authority (FSA) étant amené à regrouper les différents organes de contrôle, parmi lesquels le département " assurances " du Department of Trade and Industry. Le FSA a publié en décembre 1997 un document consultatif sur la protection des consommateurs et des discussions sont en cours afin de moderniser et d'harmoniser les mécanismes de protection en Grande-Bretagne.

(117) Europavie ne faisait pas partie de la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA).

(118) Vie, non-vie, composite et réassurance.

(119) Voir pour la distinction de deux derniers effets, " Ouverture des marchés et déréglementation de l'assurance européenne : vers un nouvel âge de la concurrence ", Sigma, n° 7/1996.

(120) Sigma n° 1/1997, Etats-Unis : Consolidation du marché sur fond de stagnation.

(121) Voir Sigma n° 7/1996.

(122) Il existe trois principaux types de systèmes réglementaires et d'intervention des autorités de tutelle :
- la procédure d'agrément préalable (prior approval),

- la procédure d'agrément modifié (modified prior approval ; flex rating),

- le contrôle a posteriori (file and use ; use and file)
Dans l'ensemble, le contrôle américain évolue du " contrôle matériel " vers le " contrôle de solvabilité ". Cependant, à ce stade, compte tenu de l'adoption de la troisième génération de directives, qui généralise l'abandon du contrôle matériel en Europe, le marché américain est globalement moins libéral que le marché européen.

(123) Sigma n° 1/1997, p. 11.

(124) Sigma n° 1/1997, p. 21. La parenthèse est nôtre.

(125) Sigma n° 4/91.

(126) Idem, p. 29.

(127) Sigma n° 7/1996, Ouverture des marchés et déréglementation de l'assurance européenne : vers un nouvel âge de la concurrence.

(128) " Impact on Services, Insurance ", " The Single Market Review ", Commission européenne, 1998. C'est une limite générale de cette étude effectuée en 1996 et 1997 et publiée en 1998 que de ne pas toujours fournir des données très actualisées. La comparaison d'un pays à l'autre des prix dans l'assurance est délicate : des comparaisons simplement faciales peuvent conduire à des conclusions erronées, en raison des disparités du pouvoir d'achat, des écarts de garantie ou de règles de rachat, des divergences des sinistralités (la sinistralité automobile au Royaume-Uni est très inférieure en moyenne à celle de l'Espagne ou de la France) des écarts de coûts de réparation en assurance automobile, des différences de fiscalité.

(129) " The Impact of the Single Market on Insurer's Cost ", " Single Market Review, Insurance ", p. 182.

(130) Single Market Review, id., p. 122-124.

(131) " The Cost of non-Europe in Financial Services ", dit " rapport Cecchini ", Commission européenne, 1988.

(132) SMR, p. 122-124.

(133) Sigma n° 7/1996, p. 10.

(134) Sigma n° 7/1996, p. 19-22.

(135) Sigma n° 7/1996, p. 23-26.

(136) La profession de gestionnaire de fonds est vraisemblablement la profession où les rendements d'échelles croissants jouent le plus, dans la mesure où l'élargissement de l'actif poussent à la fois à accroître la performance moyenne de gestion en favorisant une meilleure mutualisation géographique et professionnelle du risque de marché et des variations des valeurs individuelles.

(137) Extrait de " Insurance and the Euro ", Michel Albert et Patrick Lefas, The Geneva Papers on Risk and Insurance, juillet 1998.

(138) Extrait de Patrick Lefas, " L'assurance dans les marchés dominants ", La Triade, Encyclopédie de l'assurance.

( 139 ) D'après Moody's Investors Service, Global Credit Research, German Life Insurance, Industry Outlook, Avril 1997.

( 140 ) Country Information on Institutional Investors, Insurance Comittee, OCDE, 26 mai 1997.

(141) L'article 21 de la loi de finances pour 1998 a prévu une exonération d'impôt sur le revenu pour les contrats en unité de compte investis pour au moins 50 % en actions et dont l'unité de compte est constituée d'au moins 5 % d'actifs à risques. Un second texte, modifiant le code des assurances autorise les assureurs à utiliser comme supports de contrats en unités de compte les parts de fonds communs de placement à risque et les actions des sociétés commerciales, à condition que la part investie dans ces actifs soit limitée à 10 % (Assurer, n° 79, 8 juin 1998).

(142) Les autres plafonds fixés par l'article R 332-3 du code des assurances sont : 40 % d'actifs immobiliers, 10 % de prêts hypothécaires notamment.

(143) Selon la loi du 16 juillet 1992, addendum à l'article L 131-1 du code des assurances : " En matière d'assurance sur la vie ou d'opération de capitalisation, le capital ou la rente garantie peut être exprimé en unités de compte constituées de valeurs mobilières ou d'actifs offrant une protection suffisante de l'épargne investie et figurant sur une liste dressée par décret en Conseil d'Etat " (voir article R 332-2 du code des assurances en annexe de ce chapitre). Ainsi, les engagements contractuels des sociétés peuvent se revaloriser proportionnellement à la valeur des actifs sous-jacents. L'article R 131-1 (alinéa 2) précise que " le contrat peut se référer soit à une seule unité de compte, soit à la combinaison de plusieurs unités de compte. Dans ce dernier cas, la prime doit être ventilée entre les différentes unités de compte conformément aux dispositions du contrat ".

(144) L'obtention de la déductibilité fiscale de ces provisions suppose, comme corollaire, que la clarification soit faite sur la propriété de ces provisions et leur affectation ultime aux assurés ou aux fonds propres.

(145) De manière générale, la continuité de la conception française du contrôle s'est exercée au profit des clients de l'industrie de l'assurance (quoique sans doute avec une insuffisante discrimination selon la qualité de l'assuré). Cette philosophie du contrôle semble avoir trouvé un point d'équilibre entre le système de contrôle britannique traditionnellement détaché et qui protège mal le consommateur, et un système allemand de contrôle administratif poussé qui a excessivement bridé l'initiative des acteurs privés. C'est à ce titre qu'elle a, au moins partiellement, influencé la réglementation européenne.

(146) Voir sur ces développements, Jean-Pascal Beaufret, La fiscalité de l'assurance, Encyclopédie de l'assurance. Voir également L'assureur et l'impôt, Risques n° 27, juillet-septembre 1996.

(147) Pierre Pestieau, Fiscalité de l'épargne et de l'assurance-vie, Risques n° 27, L'assurance et l'impôt, juillet-septembre 1996.

(148) Joseph Stiglitz, Inequality and Capital Taxation, IMSSS Technicial Report 457, Standford University.

(149) James M. Poterba, Steven F. Venti, David A. Wise, Les programmes d'épargne retraite accroissent-ils l'épargne aux Etats-Unis ? Risques n° 27, déjà cité. Voir également, des mêmes, Contributions Crowd Out Personal Saving ? NBER, Working paper n° 4391, 1993.

(150) Voir Gilles Johanet, Les conditions de la mise en oeuvre d'une assurance-maladie obligatoire, Encyclopédie de l'assurance. Dans un langage plus direct encore, voir également Gilles Johanet, Sécurité sociale : arrêtons de gaspiller, Le Nouvel observateur, 28 mai 1998. Voir également l'impressionant rapport " Béraud " d'août 1992, écrit par un médecin conseil national mettant en cause notamment " trois catégories de dépenses inutiles : les excès, les abus et les fraudes ".

(151) Il est vrai que si le service était strictement proportionnel au coût, on pourrait voir dans ce classement une performance logique, voire appréciable, traduisant un libre arbitrage de consommation des Français.

(152) Béatrice Majnoni d'Intignano, Santé, mon cher souci, J.-C. Lattès, 1989, p. 239.

(153) Comité européen des assurances, Assurance santé en Europe, 1997.

(154) L'assurance santé en Europe, CEA, 1997, p. 30-33.

(155) L'assurance santé en Europe, CEA, 1997, p. 44-47.

(156) L'assurance santé en Europe, CEA, 1997, p. 48-51.

(157) L'assurance santé en Europe, CEA, 1997, p. 66-68. " Impact médecin quotidien " du 21 mars 1995 dans un article " Hollande : Sécurité sociale et assureurs en concurrence " résumait la situation hollandaise en indiquant que " chaque Néerlandais peut choisir de s'assurer auprès de la Sécurité sociale publique ou d'une compagnie d'assurance privée "...

(158) L'assurance santé en Europe, CEA, 1997, p. 7.

(159) Health Insurance in the United States : an Industry in transition, Sigma n° 2/1988.

(160) Une proposition a récemment été faite d'étendre Medicare à deux nouvelles populations :
- les personnes de 62 à 65 ans, moyennant le paiement de primes de participation ;

- les salariés de 55 ans qui ont involontairement perdu leur emploi et leur couverture sociale.
(161) Sur les différentes formes de HMO, on se reportera à l'étude Sigma n° 2/1988, p. 23-24.

(162) Claude Le Pen, Gérer le risque maladie, Risques n° 33, dossier " Risque santé ", janvier-mars 1998.

(163) Lors de la fête des mères en 1998, le président Clinton a fait passer un décret obligeant tout établissement de soins pratiquant l'accouchement à garder les parturientes pendant un délai d'au moins 48 heures.

(164) Dès la loi de 1961, les assurances gérant auparavant l'assurance-maladie des exploitants agricoles fondent au nombre de 58 une association commune chargée de gérer la partie obligatoire de leurs contrats d'assurance-maladie : le GAMEX, Groupement des assureurs maladie des exploitants agricoles. Après la loi du 12 juillet 1966 instaurant le régime obligatoire d'assurance-maladie des travailleurs non salariés pour les artisans, les commerçants et les professions libérales, dans la même logique que précédemment, mais en 1969 seulement, les assureurs créent le RAM : Réunion des assureurs maladie sous forme également associative, bénéficiant du savoir-faire technique et logistique du GAMEX. D'où la constitution du RAM-GAMEX couvrant en 1997 745 000 assurés et 1 100 000 bénéficiaires. Voir dossier RAM-GAMEX.

(165) AXA, Expérimentation d'un réseau médical d'assistance santé en Ile-de-France, résumé, mai 1988 (voir texte complet en annexe 4 de ce chapitre). Dans le cadre de l'assurance complémentaire, on signalera l'initiative de même inspiration de la CNP qui a lancé une expérience de maîtrise des frais médicaux avec l'opération " Carrés bleus " en janvier 1997 inspirée des HMO américains, mais en respectant les principes de confidentialité des données et en se centrant sur la prévention, le conseil et l'orientation. Voir Patrick Warin, la CNP et la gestion du risque santé en assurance complémentaire, Risques n° 33, déjà cité. Dans le même sens également, on notera le lancement du dispositif " Coopérations de santé " par les mutuelles " Mieux-Etre " du code de la mutualité. Voir à ce sujet L'argus du 13 février 1998.

(166) Le réseau s'organise autour d'un centre téléphonique d'orientation médicale accessible 24 H sur 24, à partir duquel les médecins non prescripteurs orientent les adhérents en fonction des urgences et des besoins à travers la chaîne de soins. L'adhérent est libre de consulter.à l'intérieur du réseau ou chez un médecin de son choix, à condition que celui-ci accepte de signer le cahier des charges proposé par le réseau. L'adhérent est dispensé de l'avance des frais.

(167) On se reportera ici à la troisième partie du rapport Béraud déjà cité qui explique " comment le service médical de la CNAMTS peut aider les professionnels à accroître la qualité de leur performance ".

(168) Kenneth J. Arrow, Incertitude et économie du bien-être des soins médicaux, Risques n° 26, avril-juin 1996, traduction d'un texte paru en 1963 dans l'American Economic Review sous le titre " Uncertainty and the Welfare Economics of Medical Care ".

(169) Les généralistes peuvent être inscrits ou non dans l'option conventionnelle du " médecin référent ".

(170) Voir, par exemple, " Le Figaro " du 30 juin 1994.

(171) Christian Mouly, " Sécurité sociale et concurrence : une réforme constitutionnellement possible ", rec. Dalloz Sirey, 1996, 4e cahier.

(172) Cf. Claude Reichman, " Sécurité sociale : le vrai mal français ".

(173) Sauf exception, comme pour les expatriés.
(174) Cass. crim., 17 mars 1992, Bull crim. n° 114, P. 298. Cass. com., 6 avril 1993, Bull. civ. V, n° 137, p. 93.

(175) Règlement communautaire relatif à l'application des régimes de Sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés, ainsi qu'aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté.

(176) Bull, civ. V, n° 87.
(177) L'organisation de la profession des agents généraux d'assurance est annexée au code des assurances Elle était réglementée, jusqu'au nouveau décret n° 96-902 du 15 octobre 1996, par les décrets du 15 mars 1949 pour l'assurance dommages et du 8 décembre 1950 pour l'assurance-vie ainsi que du 11 octobre 1966. En général, en contrepartie de l'exclusivité de la production à l'égard de son mandant ou de ses mandants, l'agent général reçoit une exclusivité territoriale. Voir Jean-Charles Naimi, Le courtage d'assurance, L'Argus éditions, 2e édition, 1995 et le code des assurances, Dalloz, 1997.

(178) CAPA, Panorama et évolutions de la distribution en Europe, 1997.

(179) La Fédération française des courtiers d'assurances et de réassurances s'est substituée en 1991 au SNCAR et en a modifié les statuts. La création du SNCAR remonte à 1896. Elle compte parmi ses adhérents les plus gros cabinets de courtage, mais 70 % des adhérents emploient de 0 à 4 personnes. En 1979 a été créé le Syndicat français des assurances conseils (SFAC) qui regroupe essentiellement des petits et moyens courtiers et joue un rôle complémentaire d'animation de la profession, par des réunions et par la formation.

(180) Extrait de Patrick Thourot, La distribution de l'assurance, Encyclopédie de l'assurance.

(181) Selon la loi bancaire du 24 janvier 1994, rentrent dans les opérations de banque " connexes " des activités telles que " le placement, la souscription, l'achat, la gestion, la garde et la vente des valeurs mobilières et de tout produit financier " (article 5, alinéa 3).

(182) Armand Braun, René Dessal et Denis Kessler, Pour une modernisation des relations entre agents généraux et sociétés d'assurance, 7 septembre 1989, rapport demandé en juin 1989 par la FFSA et la FNSAGA (Fédération nationale des syndicats d'agents généraux d'assurance).

(183) Idem, p. 110.

(184) La Tribune de l'assurance n° 10, février 1998.

(185) Extraits de Colette Fabre, Des réseaux et des charges, L'Argus, 20 février 1998. Les chiffres de l'Argus ne sont malheureusement pas ??? avec ceux du CAPA évoqués p. 253 - chap. 4 1.1.3.1. - et p. 258 - chap. 4 3.2.1.).

(186) Etude CAPA, déjà citée, p. 53-57.

(187) Voir étude citée du CAPA, p. 92-102.

(188) Extraits de Cyrille Chartier-Kastler (Solving International), La révolution de la distribution d'assurance en France, Banque Stratégie n° 14, mars 1998.

(189) Cette comparaison doit être interprétée avec réserve dans la mesure où les produits rendus et la sinistralité des clientèles respectives ne sont pas identiques d'un mode de distribution à l'autre.

(190) CAPA, étude citée, p. 68.

(191) D'après E. Sovignet et A. Augier, Les banques poussent les assureurs dans leurs retranchements, Banque Stratégie n° 147, mars 1998.

(192) CAPA, étude citée, p. 98. Voir également plus loin 1.3.2.5.

(193) Henri Debruyne et Véronique Torchet, Evolutions de la distribution, Risques n° 24, La distribution de l'assurance, octobre-décembre 1995.

(194) CAPA, idem, p. 45.

(195) Dans le sous-ensemble de l'assurance santé complémentaire, les mutuelles santé et les institutions de prévoyance relèvent également de la catégorie des entreprises d'assurance à statut de sociétés de personnes opérant " sans intermédiaires ". Ce mode de distribution intégré est également le fait des Friendly Societies en Grande-Bretagne, qui sont des caisses de secours mutuel spécialisées en prévoyance (délégataires jusqu'en 1997 de la gestion du système britannique de sécurité sociale) ou, en Allemagne, des mutuelles de fonctionnaires ou d'employés de chemin de fer.

(196) Les données européennes sur ce sujet sont lacunaires et il faut recourir aux ressources privées pour obtenir des estimations suffisamment fines du poids économique des mutuelles par pays à l'échelle européenne. Les fédérations internationales de mutuelles d'assurance, c'est-à-dire l'ICMIF (International Cooperative and Mutual Insurance Federation, dont l'ACME, Assureurs Coopératifs et Mutualistes Européens, est l'association régionale - qui ne comprend pas de représentant de chaque pays - et dont les affiliés en France sont Groupama et le GEMA) et l'AISAM (Association Internationale des Sociétés d'Assurance Mutuelles fédération mondiale à laquelle est affiliée en France la ROAM), qui réunissent ensemble environ deux cents sociétés ayant leur siège en Union européenne, se sont bornées à leur propre estimation, selon laquelle la part de marché moyenne des mutuelles d'assurance sur l'ensemble du marché de l'Union européenne, en vie et non vie, est légèrement supérieur à 20 %. Mais ce chiffre est sujet à discussions et reflète des réalités nationales et sectorielles très différentes. Les sociétés mutuelles de divers types ne sont-elles pas aujourd'hui devenues majoritaires en France ?

(197) Repris de l'étude Société Générale Euro Research, déjà citée.

(198) Voir Société Générale, Euroresearch, étude déjà citée.

(199) Voir CAPA, étude citée, p.91-102.

(200) Voir, par exemple, Jean-Daniel Cornudet, " L'assurance en mouvement ", in " Banque Stratégie " n° 147, déjà cité.

(201) Ce décret est la traduction de l'entente, enfin réalisée, sous forme de convention passée le 16 avril 1996, entre FNSAGA et FFSA, pour définir " les principes généraux des nouveaux contrats entre entreprises d'assurances et agents généraux ". Les deux fédérations considèrent comme un objectif le développement de l'intéressement dans la rémunération globale de l'argent. Voir appendice du code des assurances sur les agents généraux d'assurance.

(202) FNSAGA, " Comment devenir agent général d'assurances ", juin 1998.

(203) FNSAGA, dossier de presse, 4 novembre 1997.

(204) Voir Gras Savoye, " Champion de l'assurance directe ", " L'Argus " du 3 octobre 1997.

(205) CAPA, " Principales problématiques de la distribution d'assurance en France ", juillet 1997, p. 4.

(206) Annexe réalisée avec l'aide du CAPA.

(207) " Le commerce électronique : opportunités et défis pour les gouvernements ", les Editions de l'OCDE, Paris, 1997.

(208) Source : CAPA/LOMA.

(209) cf. "Panorama des sites d'assurance sur l'Internet en France", Nelly Brossard, CAPA Conseil, janvier 1998.

(210) Cf. " Panorama européen des services d'assurance sur l'Internet ", Nelly Brossard, CAPA Conseil, décembre 1996.

(211) Les Commerciaux au sens des familles des métiers de l'observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance sont les salariés ayant une activité commerciale (vente dans un réseau et encadrement d'un réseau, vente dans les bureaux-entreprises du GEM, vente directe d'animation de points de vente-bureaux, agences générales, cabinet de courtage). Les commerciaux au sens des conventions collectives (définition usuelle de la profession) sont les salariés commissionnés et dépendant des trois conventions collectives des commerciaux des assurances (producteurs, salariés de base, échelons intermédiaires - non cadres mais premier niveau d'encadrement -, Inpecteurs-cadres commerciaux).

(212) Groupama exclu.

(213) Enquête FFSA-GEMA-OEM, données du 31 décembre 1996.

(214) Rapport 1997 de l'Observatoire sur les métiers des salariés de l'assurance.

(215) Voir Prévisions Glissantes détaillées du BIPE.

(216) " Economie et Statistiques ", n° 303 : " La formation continue dans l'entreprise et son retour sur investissement ".

(217) L'OPCASSUR est, depuis 1995, l'organisme paritaire collecteur agréé pour l'ensemble du secteur de l'assurance et de l'assistance. Il collecte auprès de tous les employeurs les contributions finançant notamment les formations en alternance. Il est également agréé pour la collecte des fonds " formation continue " pour les collaborateurs d'agences générales et de fonds " capital de temps-formation " pour les sociétés d'assurance.

(218) Notamment lorsque l'on se trouve face à une organisation spécifique de type télé-activité dont le fonctionnement quasi continu, de 8 h à 22 heures tout au long de la semaine de 6 jours, implique la mise en place d'horaires diversifiés selon les salariés dont le travail se fait par rotation en équipes. Les entreprises cherchent à adapter la disponibilité des salariés aux variations de rythme de l'activité.

(219) Au sens de la rémunération minimale annuelle (RMA). N'entrent pas dans ce calcul les éléments qui ne sont pas pris en compte dans la composition de la rémunération minimale annuelle définie dans la convention collective nationale du 27 mai 1992.

(220) On se référera pour de plus amples informations à l'étude réalisée par l'Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance " Les métiers de la santé ".

(221) Il existe d'autres conventions collectives du travail pour les salariés de l'assurance parmi lesquelles les plus importantes sont : pour les commerciaux, la convention collective des échelons intermédiaires des services extérieurs de production des sociétés d'assurance, la convention collective de l'inspection d'assurance du 27 juillet 1992 et la convention collective des producteurs salariés de base des services extérieurs de production des sociétés d'assurance ; d'autres conventions concernent également les salariés telles que la convention de la Fédération nationale de la mutualité agricole, la convention du personnel des banques, la convention des institutions de retraites complémentaires, la convention des gardiens, concierges et employés d'immeubles, la convention des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, sociétés de conseil, etc.

(222) La CFDT a obtenu 33,6 % des voix aux élections des délégués du personnel en 1996-1997.

(223) Avec leurs collaborateurs, les agents généraux constituent un corps social de 48 781 actifs (dont 23 000 collaborateurs salariés, 6 000 conjoints collaborateurs et 3 000 sous-agents). 60 % des agents emploient des collaborateurs et 3 % emploient plus de 5 salariés.

(224) Union des caisses de retraite et de prévoyance du personnel des sociétés d'assurances.

(225) Institution de retraite des travailleurs extérieurs des sociétés d'assurance.

(226) Toutefois, la volonté de " ne pas rater le train " des directives européennes n'allait pas sans de bonnes raisons. A défaut de pouvoir créer une société mutualiste européenne, le risque était grand pour les mutuelles d'être peu à peu laminées par la concurrence commerciale et européenne, si elles étaient privées de la possibilité d'accompagner, par exemple, les entreprises françaises installées dans divers pays d'Europe en matière de contrats collectifs. Le marché des transfrontaliers était également susceptible de leur échapper.

(227) Elle est faite essentiellement à partir des " Informations statistiques et financières sur la mutualité ", exercice 1995, rapport présenté au Conseil supérieur de la mutualité, ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

(228) On notera l'écart entre ce chiffre de près de 75 GF et celui présenté dans le chapitre Premier (tableau 3) où le total des prestations s'élève, hors réalisations sociales, à 55 GF environ. L'écart est représenté par le coût des réalisations sociales, soit au moins 10,5 GF (puisque le coût est supérieur au chiffre d'affaires) par les frais généraux, et les charges d'amortissement.

(229) Rappelons qu'en 1978, il existait 478 Caisses d'épargne. Leur nombre a été ramené à une centaine dans les années 1980, avant d'être réduit par la fusion Mc Kinsey de 1990-1991 à 35 (d'après le rapport du Commissariat général du Plan sur le système bancaire français, publié en annexe du rapport " Lambert " de la Commission des finances du Sénat : " Banques, votre santé nous intéresse ", octobre 1996).
(230) Sur les quatre fédérations mutualistes, il apparaît que la FNIM et le groupe Pasteur mutualité sont pour l'application des directives (sous certaines conditions non négligeables pour le GPM) et travaillant d'ailleurs au sein du " groupe des 6 " à une refonte du code de la mutualité en harmonie avec les directives, la FNMF se prépare à leur mise en place en demandant certains aménagements et que la FMF propose que la mutualité soit mise hors du champ des directives européennes, en s'appuyant sur le caractère contingent du départ du dossier et l'absence d'intérêt communautaire dans cette question. Claude J. Berr, professeur de droit et jurisconsulte, sollicité par la FMF, propose une " solution de compromis " qui consisterait à modifier l'article L. 310-1 qui définit le champ d'application des sociétés contrôlées par la CCA du code des assurances de la façon suivante : " les mutuelles régies par le code de la mutualité demeurent soumises au présent code en ce qui concerne leurs opérations d'assurance au sens de l'article L.310-1 du présent code ". Est-ce l'oeuf de Christophe Colomb ? Voir Claude J. Berr, " Le problème de l'application des directives assurances aux mutuelles du code de la mutualité ", avril 1998.
(231) Claude Bébéar, André Sahut d'Izarn, " Historia ", déjà cité, p. 32. Ce dernier indiquait au premier à la fin des années cinquante à propos du groupe Ancienne Mutuelle qu'il devait lui léguer : " Nous sommes petits, riches, mais pas prospères. Car la prospérité demande bénéfice et croissance et notre croissance est trop modeste. L'avenir est aux grands groupes -il faut nous développer tout en restant profitables. L'avenir nécessite aussi l'internationalisation. Notre futur marché intérieur, c'est l'Europe ; il faut être présent dans tous les pays. Mais on ne peut pas échapper non plus à l'Amérique. Ce sera à vous de mener à bien cette politique ".

(232) Dossier de l'assemblée générale de la FNMF le 20 juin 1998 " Les enjeux européens : cartes sur table ", Fiche n° 1, historique du dossier " Directives ".

(233) Cette transposition ne concerne pas, au sens strict, seulement le code de la mutualité, mais également le code rural qui regroupe les dispositions concernant la mutualité agricole.
(234) Ces développements sont largement redevables au document de réponse au questionnaire proposé, qui a été remis par le secrétariat général de la CCMIP lors de l'audition par le Commissariat général du Plan le 26 juin 1998 du président et du secrétaire général adjoint de la CCMIP.
(235) Il reste à examiner le point de savoir si les modalités de recrutement d'adhérents par les mutuelles du secteur public en particulier respectent bien le principe d'adhésion facultative à la mutuelle d'assurance maladie complémentaire, principe qu'une simple mention selon laquelle l'adhésion à cette mutuelle n'est pas obligatoire au moment de la souscription initiale et à un intervalle régulier pourrait suffire à respecter.

(236) Dans la mesure où l'entretien de réalisations sociales n'aboutit pas à remettre en cause les ratios prudentiels, ce principe de spécialisation peut paraître excessivement exigeant dans un certain nombre de cas. Par ailleurs, l'autonomie juridique d'une filiale sociale garantira-t-elle vraiment, en cas de faillite de la filiale, la mise hors d'atteinte du patrimoine financier de la mutuelle maison-mère ? Ce n'est pas ce que démontre l'intervention d'un certain nombre de filiales non assureurs de groupes d'assurance dans le domaine de la promotion immobilière.

(237) Il reste à savoir si la notion de prestations en nature est bien dépourvue d'ambiguïté et si les activités sanitaires et sociales des mutuelles couvrant le risque de santé peuvent être considérées, partiellement ou totalement, comme des prestations en nature financées par les cotisations des mutualistes.

(238) On notera en effet la dimension doctrinale forte qui sous-tend l'action contemporaine de la plupart des dirigeants " mutualistes " fiers, comme le président de la MACIF, de démontrer par " le caractère incontestable de sa réussite (celle de la MACIF) que des hommes n'entreprennent pas que pour s'enrichir et qu'une activité économique valable n'a pas forcément comme motivation la seule recherche du profit " (texte de l'intervention de Jean Simonnet devant la Commission des finances du Sénat le 26 mars 1998, remis au Commissariat général du Plan lors de son audition le 29 juin 1998).

(239) Michel Chaumet, " MAIF, L'histoire d'un défi ", citation par Roger Belot, président directeur général de la MAIF, dans la préface de l'ouvrage, Le Cherche-Midi éditeur, 1998.

(240) Documentation GEMA.

(241) Voir à ce sujet les positions défendues par le GEMA sur la création d'un statut du mandataire mutualiste prévoyant notamment " une juste rémunération du temps consacré à sa mutuelle et des reponsabilités qu'il y exerce " (texte de l'audition de Michel Rémond, président du GEMA, pour la Commission des finances du Sénat le 4 mars 1998 ; texte communiqué au CGP par le GEMA.

(242) La FNMF en particulier a mené des travaux sur ce sujet dans le cadre de son congrès de Lille de juin 1997, et le GEMA a mandaté un groupe de travail sur la modernisation des statuts des mutuelles présidé par le directeur général de la MACIF.

(243) A partir du Guide de l'administrateur de la FNMF, 1996.

(244) Extrait du dossier sur le " Mutualisme aujourd'hui " de " La vie à défendre ", CFTC, juin 1998, et du dossier de presse de Groupama ((fiche " Groupama - 150 ans d'histoire ").

(245) Les données présentées dans cette annexe ont trois sources :

- le rapport au Conseil supérieur de la mutualité, exercice 1995 ;

- l'Annuaire de la mutualité, Panorama 98 des mutuelles, l'Argus éditions, juin 1998.

246 Directives n° 73/239/CEE du Conseil du 24 juillet 1973, modifiée, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, et son exercice (JO n° L 228 du 16 août 1973) dite " première directive non-vie " et n° 79/267/CEE du Conseil du 5 mars 1979 modifiée, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité directe sur la vie, et son exercice (JO n° L 163 du 13 mars 1979) dite " première directive vie "

247 Directive n° 92/49/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, et modifiant les directives n° s 73/239/CEE et 88/357/CEE (JO n° L 228 du 11 août 1992) et directive n° 92/96/CEE du Conseil, du 10 novembre 1992, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, et modifiant les directives n° s 79/267/CEE et 90/619/CEE (JO n° L 360 du 29 novembre 1992), dites " troisièmes directives "

248 Le montant total des commissions versées par la C.N.P. à ses partenaires  en 1996 s'élève à 1,8 milliard de francs

249 Directive n° 64/225/CEE du Conseil, du 25 février 1964, visant à supprimer en matière de réassurance et de rétrocession les restrictions à la liberté d'établissement et à la libre prestation des services (J.O., édition spéciale 1963/131 du 3 avril 1964)

250 On entend par " grands risques " : les assurances corps de véhicules ferroviaires, aériens, maritimes, fluviaux et lacustres, les assurances de marchandises transportées et la responsabilité civile des véhicules précités ; y figurent aussi les risques crédit et caution liés à des activités professionnelles, industrielles et commerciales des preneurs ainsi que certains autres risques lorsque le chiffre d'affaires du preneur professionnel dépasse les seuils fixés dans les directives (annexe A de la directive n° 73/239)

251 Cf. Exposé des motifs de la proposition de " deuxième directive " en matière d'assurance directe sur la vie

252 Cf. directive n° 83/349 du 13 juin 1983 relative aux comptes consolidés

253 Arrêt Commission c/Allemagne, aff. 205/84, Rec. 3755 ; arrêt Commission c/ Danemark, aff. 252/83, Rec. 3713 ; arrêt Commission c/ France, aff. 220/83, Rec. 3663

254 Directive n° 88/357/CEE du Conseil, du 22 juin 1988, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive n° 73/239/CEE (JO n° L 172 du 4 juillet 1988), dite " deuxième directive non-vie " et directive n° 90/169/CEE du Conseil, du 8 novembre 1990, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive n°79/267/CEE (JO n° L 330 du 29 novembre 1990), dite " deuxième directive vie "

255 La liberté d'établissement se caractérise par une dissociation entre l'Etat d'origine et l'Etat de la succursale, ce dernier coïncidant avec l'Etat d'engagement. La L.P.S. se caractérise par une dissociation entre l'Etat d'origine ou de la succursale et l'Etat de l'engagement (également appelé Etat de la prestation)

256 La question de la localisation du risque a été débattue ; par souci de sécurité juridique, les directives ont établi un système précis : localisation des immeubles pour les biens immobiliers, la localisation des véhicules automobiles résulte de leur immatriculation, les risques voyages sont réputés être courus dans l'Etat membre où ils ont été souscrits, dans tous les autres cas, les risques sont réputés localisés dans l'Etat membre où le preneur a sa résidence habituelle, cette dernière disposition valant aussi pour l'assurance vie

257 Cf. article 28 des " troisièmes directives " vie et non-vie

258 Articles 2-d de la " deuxième directive non-vie " et 2-2 de la " deuxième directive vie "

259 Cf. : Projet de communication interprétative de la Commission du 10 octobre 1997. Liberté de prestation de services et intérêt général dans le secteur des assurances

260 C.J.C.E. 30.11.95 Gebhard, Aff . C-55/94, Rec. I-1995 p. 4195

261 C.J.C.E. 28 janvier 1992, Bachman c/ Etat belge, aff. C-204/90, Rec. I-249

262 Déc. Allianz/Elvia et Lloyd Adriatico, du 3 avril 1995, IV, M. 539

263 Déc. Generali/Comit/Previnet du 26 juillet 1995, IV, M. 606

264 Déc. Winthertür/Schweize Rück du 14 mars 1995, IV, M. 518

265 Idem

266 Déc. Assurpol du 14 janvier 1992

267 Déc. Téko du 21 décembre 1989

268 Déc. Lloyd's Underwriters Association du 4 décembre 1992

269 Par exemple, déc. A.G.F./La Union y el Fenix Espanol du 25 avril 1994, IV, M. 403

270 Cf. C.E.A., replies to the European questionnaire to the insurance industry on solvency of insurance undertaking

271 Les sociétés d'assurance mutuelles détiennent environ 50 % du marché de l'assurance automobile

272 Il s'agit du règlement (CE) n° 1103/97 du Conseil du 17 juin 1997 fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro