M. le président. Par amendement n° 58, Mme Dieulangard, MM. Huguet et Peyronnet, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Un fonds est créé au niveau de chaque département afin de prendre en charge les indemnités des salariés qui apportent leur aide aux bénéficiaires de la prestation spécifique dépendance à domicile lorsque ceux-ci perdent leur emploi pour des raisons d'hospitalisation ou de décès de ces derniers. »
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous proposons la création d'un fonds à l'échelon de chaque département afin de gérer les indemnités des salariés apportant leur aide aux bénéficiaires de la prestation spécifique dépendance à domicile perdant leur emploi pour raison d'hospitalisation ou de décès du bénéficiaire.
Nous avons déjà eu l'occasion de souligner à plusieurs reprises les dangers et les carences de la contractualisation de gré à gré lorsque l'aide est apportée à domicile, notamment du fait de l'absence d'un véritable statut et de garanties d'emploi.
Par cet amendement, nous proposons une solution pour remédier à la précarité presque inhérente à cette relation de travail un peu particulière puisqu'elle concerne par nature des publics très fragiles physiquement et psychologiquement. Il convient de donner des garanties minimales aux personnes qui interviennent à domicile et qui peuvent être licenciées, parfois au bout d'une très courte période d'emploi, par exemple à la suite d'une hospitalisation de leur employeur, d'une évolution de sa santé, d'une diminution de sa prestation ou, plus tristement, de son décès.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission estime qu'à travers son amendement Mme Dieulangard soulève un véritable problème. Il est vrai que la situation actuelle mérite réflexion.
Je l'ai dit tout à l'heure, j'ai d'ailleurs appelé l'attention de M. le ministre sur le fait que de plus en plus de contentieux devant les prud'hommes étaient liés à des relations de travail entre personne âgée et intervenant à domicile.
Par ailleurs, l'intervenant qui perd son emploi du fait du décès de son employeur, lorsqu'il s'agit d'un emploi direct, est pénalisé dans la mesure où le décès n'est pas considéré comme un cas de force majeure, ce qui le met dans une situation particulièrement difficile.
Il s'agit donc d'un véritable problème mais la solution que vous préconisez, madame Dieulangard, ne me paraît pas suffisamment élaborée pour être recevable en l'état.
La commission est donc défavorable à cet amendement, bien qu'elle reconnaisse le bien-fondé des inquiétudes des auteurs de cette proposition.
J'espère, monsieur le ministre, que nous parviendrons à trouver une solution à ces problèmes, dus, en fait, aux exonérations de charges accordées aux personnes âgées recrutant directement des personnes pour les aider à domicile.
Cela étant, convenons que la personne âgée lorsqu'elle décide ainsi de recruter une aide à domicile le fait en toute connaissance de cause et peut être éclairée tant par les membres de sa famille que par les associations auxquelles, souvent, elle ne manque pas de faire appel.
Par conséquent, il ne faut pas déresponsabiliser les personnes qui font ce choix.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Absolument !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Peut-être faut-il les éclairer dans leur choix afin qu'elles ne rencontrent pas de telles difficultés. Pour autant, faut-il légiférer pour résoudre ce problème ? Je n'ai pas la réponse à cette question. Peut-être convient-il d'examiner la manière de mieux conseiller les personnes âgées.
Cela étant dit, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable.
Le problème soulevé par Mme Dieulangard me donne l'occasion de préciser que le passage par les associations présente un intérêt certain.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Effectivement !
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Je suis de ceux qui pensent - et je parle en tant que président de conseil général - que le partenariat associatif s'impose. Progressivement, grâce aux abattements de charges sur les salaires en bas de la hiérarchie, on aboutit aujourd'hui à une quasi-équivalence entre le coût du travail d'une personne qui est directement employée par la personne âgée et celui d'une personne qui est embauchée par le biais d'une association.
J'estime sincèrement que M. le rapporteur a apporté une première réponse tout à fait pertinente. On ne peut pas demander aux personnes âgées qui souhaitent vraiment recruter directement une aide de ne pas assumer une part du risque que cela représente. Je reste convaincu que, à l'avenir, le secteur associatif devra, sinon avoir le monopole des emplois d'aides aux personnes âgées, du moins couvrir la plupart des cas. Certains restent toujours à régler mais, comme l'a dit M. le rapporteur, il faudra alors que les personnels soient informés de cette situation.
Cela démontre, me semble-t-il, que le passage par le tissu associatif est, en la matière, nettement préférable. De plus, cela permet de garantir que les personnels concernés recevront une formation.
La question que vous avez posée n'en est pas moins réelle, mais c'est dans cet esprit qu'il faut essayer d'avancer. L'expérience dira s'il faut en effet, dans certains cas, remédier à la situation.
Il me paraît prématuré d'adopter un tel amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 58.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je partage tout à fait l'opinion de M. le ministre, selon laquelle les associations sont tout à fait aptes et bien mieux positionnées pour employer ces salariés qui interviendront auprès des personnes âgées.
Aujourd'hui, tous les dispositifs qui sont mis en place pour inciter à la création d'emplois favorisent la contractualisation de gré à gré. En commission, ont été déposés des amendements visant à placer les associations dans les mêmes conditions de concurrence - même si le mot ne me plaît pas trop - que les salariés individuels.
On connaît la fragilité des personnes âgées et leur incapacité souvent à être des employeurs. Certes, les associations sont plus aptes, mais rien n'incite à la contractualisation dans le cadre des associations. C'est une première remarque.
Ma seconde remarque s'adresse à M. le rapporteur. Il faut effectivement ne pas déresponsabiliser les personnes âgées. Mais encore faut-il tenir compte de l'état dans lequel elles sont souvent.
Pour bénéficier de la prestation spécifique dépendance, il ne faudra pas disposer d'un revenu supérieur à 3 474 francs. Les personnes concernées devront constituer une réserve de fonds pour le paiement des indemnités de licenciement. L'effectivité de l'utilisation de la prestation spécifique dépendance sera contrôlée. Donc, ce n'est pas sur le montant de cette prestation qu'elles pourront mettre de l'argent de côté pour assurer le paiement desdites indemnités. Les arguments de M. le rapporteur et de M. le ministre sont tout à fait contestables.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. En matière de charges sociales, nous arrivons à une quasi-neutralité, à quelques francs près, grâce à la ristourne dégressive sur les salaires des emplois moins qualifiés.
Toutefois, force est de reconnaître qu'il reste des distorsions sur le plan fiscal. Personnellement, je pense qu'il faut arriver à une neutralité, même si je ne peux pas parler au nom de Bercy.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 4