Séance du 20 mai 1998






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Dépôt du rapport d'une commission d'enquête (p. 1 ).

3. Candidatures à un Office parlementaire (p. 2 ).

4. Protocoles au traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Hongrie, de la République de Pologne et de la République tchèque. - Adoption de trois projets de loi (p. 3 ).
Discussion générale commune : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères ; Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères ; Jacques Chaumont, Claude Estier, Jean-Luc Bécart, Daniel Hoeffel, Nicolas About. M. Alain Richard, ministre de la défense.
Clôture de la discussion générale commune.

PROJET DE LOI RELATIF À LA RÉPUBLIQUE DE HONGRIE (p. 4 )

MM. Christian de La Malène, Jacques Habert.
Adoption, par scrutin public, de l'article unique du projet de loi.

PROJET DE LOI RELATIF À LA RÉPUBLIQUE DE POLOGNE (p. 5 )

Adoption de l'article unique du projet de loi.

PROJET DE LOI RELATIF À LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE (p. 6 )

Adoption de l'article unique du projet de loi.

5. Traité d'amitié, d'entente et de coopération avec l'Azerbaïdjan. - Adoption d'un projet de loi (p. 7 ).
Discussion générale : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères ; Emmanuel Hamel.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

6. Accord avec le Qatar sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements. - Adoption d'un projet de loi (p. 8 ).
Discussion générale : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; Daniel Goulet, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

7. Accord-cadre de coopération entre la Communauté européenne et le Chili. - Adoption d'un projet de loi (p. 9 ).
Discussion générale : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; Daniel Goulet, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

8. Accord avec le Liban sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements. - Adoption d'un projet de loi (p. 10 ).
Discussion générale : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; Serge Vinçon, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

9. Accord avec la Tunisie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements. - Adoption d'un projet de loi (p. 11 ).
Discussion générale : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; Bertrand Delanoë, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

10. Accord avec la Russie relatif à la coopération dans le domaine de l'espace. - Adoption d'un projet de loi (p. 12 ).
Discussion générale : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; Claude Estier, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

11. Conventions fiscales avec la Namibie et la Russie. - Adoption de deux projets de loi (p. 13 ).
Discussion générale commune : MM. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes ; Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances.
Clôture de la discussion générale commune.
Adoption des articles uniques des deux projets de loi.

12. Nomination de membres d'un Office parlementaire (p. 14 ).

13. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 15 ).

14. Dépôt d'un rapport (p. 16 ).

15. Dépôt de rapports d'information (p. 17 ).

16. Ordre du jour (p. 18 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE
DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

DÉPÔT DU RAPPORT
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

M. le président. M. le président a reçu de M. Henri Revol un rapport fait au nom de la commission d'enquête chargée de recueillir les éléments relatifs aux conditions d'élaboration de la politique énergétique de la France et aux conséquences économiques, sociales et financières des choix effectués, créée en vertu d'une résolution adoptée par le Sénat le 19 novembre 1997.
Ce dépôt a été publié au Journal officiel, édition des Lois et décrets, d'aujourd'hui, mercredi 20 mai. Cette publication constitue, conformément au paragraphe III du chapitre V de l'instruction générale du bureau, le point de départ du délai de six jours nets pendant lequel la demande de constitution du Sénat en comité secret peut être formulée.
Ce rapport sera imprimé sous le n° 439 et distribué, sauf si le Sénat, constitué en comité secret, décide, par un vote spécial, de ne pas autoriser la publication de tout ou partie du rapport.

3

CANDIDATURES À UN OFFICE
PARLEMENTAIRE

M. le président. L'ordre du jour appelle la nomination de membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
J'informe le Sénat que le groupe socialiste propose les candidatures de MM. Gérard Miquel et Jean-Luc Mélenchon pour siéger en qualité, respectivement, de membre titulaire et de membre suppléant à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, s'il n'y a pas d'opposition, dans le délai d'une heure.

4

PROTOCOLES AU TRAITÉ DE L'ATLANTIQUE NORD SUR L'ACCESSION DE LA RÉPUBLIQUE DE HONGRIE, DE LA RÉPUBLIQUE DE POLOGNE ET DE LA RÉPUBLIQUE TCHE`QUE

Adoption de trois projets de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 384, 1997-1998) autorisant la ratification du protocole au traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Hongrie, du projet de loi (n° 385, 1997-1998) autorisant la ratification du protocole au traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Pologne et du projet de loi (n° 386, 1997-1998) autorisant la ratification du protocole au traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République tchèque. [Rapport n° 430 (1997-1998).]
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion générale commune de ces trois projets de loi.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'élargissement de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, l'OTAN, fait partie d'un processus plus général d'ouverture à l'Est des institutions européennes et euro-atlantiques, qui fait suite à la fin de la confrontation Est-Ouest en Europe et à l'effondrement du bloc soviétique.
C'est ainsi que le Conseil de l'Europe, l'OTAN, l'Union européenne et l'Union de l'Europe occidentale ont entamé leur élargissement selon des modalités et des rythmes différents, mais avec un même objectif, celui de l'effacement des fractures issues de la guerre froide et de l'unification progressive du continent.
Dès le début des années quatre-vingt-dix, les pays d'Europe centrale et orientale, en pleine transition vers l'économie de marché et la démocratie, ont fait de leur intégration à ces structures européennes et euro-atlantiques, et notamment à l'OTAN, la priorité de leur politique étrangère.
Au-delà du souci évident de sécurité et de stabilité, cette motivation profonde traduit également l'aspiration de ces pays à trouver leur place dans la communauté euro-atlantique et à en partager les valeurs.
Dans cette perspective, les pays candidats à l'OTAN, conscients que leur adhésion exigeait de se présenter non seulement en demandeur mais aussi en fournisseur de sécurité, ont fourni de réels efforts pour adapter leur outil militaire à la nouvelle donne stratégique, et surtout pour améliorer de façon significative leurs relations de voisinage.
Il était donc nécessaire et souhaitable de répondre aux attentes légitimes des pays d'Europe centrale et orientale. Dès lors, les Alliés, en plus des ouvertures sur l'extérieur que constituaient le Conseil de coopération Nord-Atlantique en 1991, le partenariat pour la paix en 1994 et le Conseil du partenariat euro-atlantique en 1997 - enceintes ouvertes à l'ensemble des partenaires de la zone euro-atlantique - ont lancé, dès 1994, les études relatives à l'élargissement de l'OTAN.
La mise en oeuvre de la décision d'élargissement de l'Alliance a posé et pose encore aujourd'hui quatre séries de questions.
La première série a concerné la gestion de la relation avec la Russie et l'Ukraine.
Les perspectives d'élargissement de l'OTAN n'ont, semble-t-il, pas suscité de grandes émotions au sein de la population russe, dont les préoccupations prioritaires sont, chacun le sait, d'une autre nature. Au sein de la classe politique russe, différentes opinions se sont manifestées. En revanche, au sein de la Douma, un consensus des différentes forces politiques contre l'élargissement existait.
Les Alliés - sous l'impulsion du Président de la République et du Gouvernement ainsi que du Chancelier Kohl, qui ont fait partager cette opinion au Président Clinton - sont tombés d'accord pour considérer tout à la fois que la Russie n'avait pas de droit de veto à l'égard de l'élargissement et que l'élargissement ne devait pas être conduit de façon à humilier la Russie ou à lui donner le sentiment d'être tenue à l'écart de la réorganisation de l'architecture européenne de sécurité. En d'autres termes, il fallait éviter le passage en force.
C'est pourquoi deux séries d'actions ont été menées.
D'une part, l'élargissement de l'OTAN a été précédé de la signature, lors d'un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des Seize et de la Russie, le 27 mai 1997, à Paris, de « l'Acte fondateur sur les relations, la coopération et la sécurité mutuelles entre la Fédération de Russie et l'OTAN ».
Cet accord est réellement historique dans la mesure où, au-delà des engagements pris par l'OTAN dans le contexte de son élargissement, il jette les bases d'un véritable partenariat de sécurité entre les deux anciens adversaires en mettant en place des structures de coopération et de concertation, en particulier le Conseil permanent conjoint OTAN-Russie.
D'autre part, les Alliés sont convenus d'élaborer, dans le cadre de l'OSCE, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, une charte de sécurité européenne destinée à renforcer les principes communs en matière d'organisation de la sécurité en Europe.
Pour ce qui est de l'Ukraine, les problèmes à résoudre n'étaient pas de même nature ni de même ampleur que ceux qui se sont posés dans la relation avec la Russie. En effet, l'Ukraine n'a pas manifesté, pour sa part, d'opposition à l'élargissement de l'OTAN. Sa préoccupation tenait à son souci - tout en n'étant pas candidate à l'adhésion - de ne pas se retrouver dans une situation d'isolement. Aussi une charte de coopération spécifique a-t-elle été conclue à Madrid entre l'OTAN et l'Ukraine qui prévoit, elle aussi, des mécanismes particuliers de consultation et de coopération.
S'agissant du choix des pays à inviter, les candidatures de la Pologne, de la Hongrie et de la République tchèque ont été soutenues par l'ensemble des Alliés lors du sommet de Madrid, en juillet 1997.
Une majorité d'Alliés, dont la France, souhaitaient que ce premier élargissement comprenne également la Roumanie et la Slovénie, pour des raisons politiques - je pense à leurs mérites propres en termes de démocratie et à la nécessité d'éviter une division Nord-Sud en Europe - et pour des raisons stratégiques, avec la nécessité de renforcer le flanc sud de l'OTAN.
Un consensus sur une première vague de cinq pays n'a pas été possible à Madrid.
Le compromis s'est dégagé autour de plusieurs éléments.
Tout d'abord, une invitation adressée à la Hongrie, à la Pologne et à la République tchèque à entamer les négociations d'adhésion.
Ensuite, l'affirmation du principe du maintien de la porte ouverte, c'est-à-dire que l'Alliance continuera à accueillir de nouveaux membres au-delà de ce premier élargissement et que ces considérations s'appliquent aux futurs candidats, quelle que soit leur situation géographique.
Par ailleurs, l'engagement de réexaminer la question de l'élargissement en avril 1999, lors du sommet organisé à Washington à l'occasion du cinquantième anniversaire du traité de Washington.
Enfin, la mention dans ce contexte « des développements positifs intervenus dans le sens de la démocratie et de la primauté du droit intervenus dans un certain nombre de pays d'Europe du Sud-Est, en particulier la Roumanie et la Slovénie ».
Les négociations d'adhésion avec la Pologne, la République tchèque et la Hongrie se sont déroulées rapidement et de façon satisfaisante. Les trois candidats ont ainsi adressé en novembre 1997 à l'Alliance atlantique des lettres confirmant leur souhait de rejoindre l'OTAN. Ils y déclarent partager les objectifs et les valeurs de l'Alliance ; ils prennent l'engagement d'accepter son acquis juridique et politique, de participer pleinement à ses activités politiques et militaires, de ne pas bloquer de futurs élargissements et de contribuer, selon une clé de répartition définie, aux dépenses communes.
Dès lors, les protocoles d'adhésion proprement dit, signés par les ministres des affaires étrangères de l'Alliance, le 16 décembre 1997, à Bruxelles, en présence de leurs homologues des trois futurs Etats membres, se présentent sous la forme de trois textes courts, distincts mais identiques.
Sous réserve de la ratification de ces protocoles par les seize alliés, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque devraient être invitées à rejoindre effectivement l'Alliance atlantique d'ici au sommet de Washington, en avril 1999.
La question de l'évaluation du coût financier de l'élargissement pour l'OTAN a, un temps, donné lieu à des analyses quelque peu fantaisistes, dans la mesure où ont été mêlés trois types d'évaluations : d'abord, le coût à supporter par les candidats pour mettre leur système de défense aux normes OTAN et renouveler des matériels majeurs qui, à l'horizon des cinq ou six prochaines années, deviendront obsolètes : ensuite, les conséquences pour les membres actuels de l'Alliance de l'extension du champ d'application de l'article V en termes de capacité de projection et de renforcement ; enfin, les coûts communs pour l'OTAN de l'élargissement, notamment en termes d'infrastructures, d'interopérabilité et de communications.
En fait, les travaux conduits au sein de l'Alliance en 1997 ont conclu que seuls les coûts communs, c'est-à-dire les dépenses financées collectivement par les membres de l'OTAN selon la clef de répartition agréées, devaient être pris en considération.
S'agissant des deux autres types de dépenses, les futurs membres sont en mesure d'apporter une importante contribution à leur propre défense, les lacunes actuelles de leurs capacités devant être traitées par eux progressivement ; quant aux membres actuels de l'Alliance, ils disposent d'ores et déjà de moyens suffisants, notamment en termes de projection et de renforcement, pour faire face aux obligations liées à l'élargissement, étant précisé, en outre, qu'il s'agit là d'éventuelles dépenses à la charge de l'allié concerné.
Les coûts communs pour les alliés du fait de l'adhésion des trois pays invités ont ainsi été évalués à 7,7 milliards de francs au total sur une période de dix ans, soit, en moyenne, environ 9 % par an du budget total de l'OTAN.
Il est prévu de financer ces dépenses additionnelles par des redéploiements et par des économies, qu'il s'agisse des économies résultant de l'allégement des structures militaires de l'OTAN ou de celles qui résultent de l'étalement de certains programmes d'infrastructure. Les études à ce sujet démarrent à l'OTAN.
De plus, bien évidemment, les nouveaux Etats membres participeront à l'ensemble des dépenses, selon une clé de répartition définie : Pologne, 2,48 % ; République tchèque, 0,9 % ; Hongrie, 0,65 %.
Enfin, il était nécessaire de prévoir l'adaptation du traité sur les forces conventionnelles en Europe.
L'évolution de la situation stratégique en Europe, notamment la dissolution du Pacte de Varsovie, rendait en tout état de cause nécessaire une adaptation du traité sur les forces conventionnelles en Europe, traité qui, comme on le sait, est fondé sur un principe d'équilibre quantitatif - un plafond collectif - pour certains équipements conventionnels majeurs - chars, artillerie, véhicules blindés de combat, hélicoptères d'attaque, avions de combat - entre deux groupes de pays, ceux de l'Alliance atlantique et ceux du Pacte de Varsovie. L'élargissement de l'OTAN rend cette adaptation encore plus nécessaire.
En effet, tout d'abord, l'élargissement n'est pas compatible avec le maintien des limitations liées au plafond collectif. Si tel était le cas, l'élargissement serait beaucoup plus difficile puisque les Alliés devraient faire une place aux équipements des nouveaux membres sans dépasser les plafonds collectifs tels qu'ils existent pour les Seize.
Mais - c'est la deuxième considération - l'OTAN entend aussi tenir compte de certaines préoccupations russes, à savoir que l'élargissement ne se traduise pas par une accumulation de forces à ses frontières.
Les Alliés sont convenus de prendre en compte cette préoccupation, mais sans pour autant accepter de dispositions qui pourraient être discriminatoires à l'égard des nouveaux membres de l'Alliance.
Des solutions sont actuellement en cours de définition dans le cadre de la révision de ce traité.
Je veux, en conclusion, appeler l'attention sur les trois points suivants :
Tout d'abord, la décision d'adhérer à l'OTAN bénéficie, en Hongrie, en Pologne et en République tchèque, d'un large appui populaire. Pour ces pays, c'est au moins aussi fondamental que l'adhésion future à l'Union européenne.
Par ailleurs, la décision d'élargissement n'a pas eu de conséquences négatives sur la relation OTAN-Russie, comme elle n'a pas eu non plus de conséquences négatives sur les relations avec la Russie des trois pays qui ont signé, en décembre 1997, leur protocole d'adhésion. La relation et la coopération OTAN-Russie se sont, au contraire, développées, comme en témoigne la participation de la Russie à l'opération conduite par l'OTAN en Bosnie.
Enfin, les discussions n'ont pas encore repris dans l'Alliance sur la façon de poursuivre le processus d'élargissement. Il s'agit là, à l'évidence, d'une question politique majeure pour les prochains mois.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appellent les protocoles d'accession à l'OTAN de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque, qui font l'objet des projets de loi aujourd'hui proposés à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, il me revient d'indiquer, en préambule, que le débat en commission sur les trois textes aujourd'hui soumis à l'approbation de la Haute Assemblée a révélé des réserves, voire des inquiétudes, chez certains de nos collègues, sur le rôle et la nature futurs de l'Alliance atlantique. L'Europe que nous construisons y trouvera-t-elle son compte ? Ne nous associons-nous pas à une démarche qui servirait plutôt les intérêts américains ? La sécurité européenne elle-même sortira-t-elle renforcée ou affaiblie par une OTAN élargie ?
De fait, monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'élargissement de l'OTAN, contrairement à celui de l'Union européenne, n'allait pas de soi. En effet, on pouvait concevoir qu'une organisation de défense collective, créée contre un ennemi identifié, à l'époque, et aujourd'hui devenu un partenaire politique et commercial, disparaisse avec la fin de la guerre froide.
Il n'en a rien été. Afin de procéder à son actuel élargissement, l'Alliance atlantique s'est donné de nouvelles missions ; elle a rénové sa structure de commandement et prépare un nouveau concept stratégique.
Dès lors que l'OTAN survivait au contexte qui l'avait fait naître, elle devait répondre à une double exigence : en premier lieu, proposer une offre de sécurité adaptée au nouveau contexte ; en second lieu, éviter de reconstruire une nouvelle ligne de fracture en Europe.
Je commencerai par traiter de ce second point.
Tout d'abord, en décidant de ne s'élargir, dans un premier temps, qu'à trois pays, sur les douze candidats, l'OTAN a sans doute créé une certaine frustration chez les exclus de la « première vague ». Dans ces pays, en effet, c'est l'espoir même d'une intégration aux instances occidentales, comme l'OTAN et l'Union européenne, qui a justifié et légitimé les efforts menés pour restaurer de vraies démocraties et transformer les économies.
La deuxième raison est plus stratégique. S'il est des risques d'instabilité en Europe, c'est moins en Europe centrale que dans l'Europe du Sud-Est, où la démocratie s'installe plus laborieusement et où est apparue la première grave crise militaire européenne depuis cinquante ans. C'était d'ailleurs pour éviter une telle fracture entre l'Europe du Nord et l'Europe du Sud que la France et certains de ses alliés avaient plaidé pour que la Roumanie et la Slovénie figurent dans le premier élargissement.
La Russie constituait un second risque de fracture : pour beaucoup de Russes, l'extension de l'OTAN à leurs frontières non seulement consacrerait la défaite d'une idéologie, mais symboliserait la défaite de la Russie elle-même. L'opposition russe à l'élargissement de l'OTAN reste d'ailleurs vive au sein de la Douma.
L'Alliance atlantique est néanmoins parvenue à conjurer ces risques de deux façons.
Elle a tout d'abord créé un « deuxième cercle » autour des seize et bientôt, peut-être, à l'issue de nos votes, des dix-neuf membres de plein exercice. Grâce aux instruments de dialogue mis en place avec chacun de ses vingt-huit partenaires dans le cadre du partenariat pour la paix et du Conseil du partenariat euro-atlantique, l'OTAN crée des habitudes de travail, inspire des réformes dans les secteurs de la défense, bref, établit un maillage qui permet aux pays en attente d'intégration de n'être plus complètement en dehors de l'orbite de l'OTAN.
Elle a ensuite mis en place avec la Russie, et à un moindre degré avec l'Ukraine, un processus de coopération et de consultation sur les questions de sécurité européenne. C'est l'objet du conseil permanent conjoint, créé par l'acte fondateur OTAN-Russie.
L'acte fondateur va d'ailleurs au-delà de la coopération qu'il instaure. Il comporte plusieurs dispositions qui précisent les limites que l'OTAN pose elle-même à son élargissement à venir. Ces limites concernent le non-déploiement d'armes nucléaires et le non-stationnement permanent de forces importantes sur les territoires des nouveaux membres.
L'acte fondateur fait, enfin, référence à l'adaptation nécessaire de certaines dispositions du traité sur les forces conventionnelles en Europe.
J'évoquerai à présent le second aspect de l'évolution de l'OTAN à travers ses nouvelles missions.
Le principe de défense collective, qui a constitué la clé de voûte de l'OTAN et qui a forgé sa structure militaire intégrée, demeure évidemment, et doit demeurer, au sein de la solidarité atlantique.
L'action de l'OTAN évolue cependant aujourd'hui davantage vers de « nouvelles missions » dites « non-article 5 ».
Dès 1991, l'Alliance s'est en effet tournée vers la gestion des crises liées à l'émergence des « nouveaux risques ». Elle a d'ailleurs adapté et réformé sa posture militaire et sa structure de commandement en conséquence. Le fait que le premier engagement militaire de l'OTAN en Europe ait été effectué dans ce cadre est significatif, et l'Alliance entend valoriser au mieux sa gestion militaire de la crise bosniaque.
L'OTAN a de vastes ambitions : ses « nouvelles missions » l'affranchissent de facto de ses limites géographiques traditionnelles. Elle est portée à s'investir dans des domaines qui dépassent désormais la seule notion de « défense territoriale ». A ce sujet, la concurrence avec l'ONU pourrait d'ailleurs, dans ce cadre, revêtir un caractère aigu et conduire l'OTAN à se dispenser d'un mandat du Conseil de sécurité pour agir, sujet sur lequel la France a un point de vue radicalement différent.
Au demeurant, ces différents thèmes font aujourd'hui l'objet de la négociation du nouveau concept stratégique, dans lequel la France et les Européens sont à même de jouer un rôle essentiel.
Sur le plan militaire, nos trois futurs alliés ont décidé, comme d'ailleurs pour la plupart des armées, une réduction substantielle de leurs effectifs. Chacun des trois Etats affectera par ailleurs l'essentiel, sinon la totalité, de ses forces à l'Organisation atlantique.
La Pologne, la Hongrie et la République tchèque, dont nous pouvons saluer des représentants dans les tribunes, ont engagé un effort budgétaire très significatif pour réformer leur système de défense et moderniser leurs forces armées. Les économies de fonctionnement progressivement engendrées par les réductions d'effectifs et la rationalisation d'infrastructures devraient permettre un nouvel équilibre indispensable au renouvellement des matériels.
L'ambition d'une industrie de défense européenne devra trouver là, avec l'appui de nos nouveaux alliés, l'occasion d'un engagement politique exemplaire.
Vous avez, enfin, monsieur le ministre, abordé très clairement la question du coût de l'élargissement, que le rapport écrit précise par ailleurs. Je n'y reviendrai donc pas.
Avant de conclure, je me dois, en qualité de rapporteur, de rappeler les perplexités, les interrogations, voire les oppositions, qu'a révélées notre débat en commission.
Plusieurs commissaires se sont ainsi émus de voir l'Alliance atlantique évoluer et changer de façon aussi significative. Sans doute regrettent-ils que le Parlement n'y ait pas été, préalablement, davantage associé. Des inquiétudes se sont fait jour sur le retour à un partenariat privilégié entre les Etats-Unis et la Russie pour la gestion de la sécurité européenne, au détriment du cadre spécifiquement européen que nous souhaitons promouvoir.
Ne prendrait-on pas un risque majeur à engager un processus qui provoque une crispation aussi évidente en Russie, surtout lorsque l'actuel exécutif aura cédé la place à de nouveaux responsables ? N'engageons-nous pas, enfin, une démarche dont le véritable objectif serait de favoriser des intérêts politiques ou économiques américains ?
Ces questions devaient être posées. J'évoquerai pour ma part les incertitudes suivantes.
En premier lieu, l'élargissement renforcera-t-il ou fragilisera-t-il l'identité européenne de défense au sein de l'OTAN ?
Certes, les adaptations internes de l'Alliance décidées en décembre 1997 ont fait droit à certaines des demandes en faveur de l'identification d'un pôle européen de défense au sein de l'Alliance. Cependant, un vrai rééquilibrage des responsabilités entre Européens et Américains au sein de l'Alliance reste à réaliser, dans des conditions qui, demain, ne seront pas nécessairement plus faciles qu'aujourd'hui.
En deuxième lieu, jusqu'à quel point le futur concept stratégique de l'OTAN pourrait-il modifier l'architecture générale de la sécurité européenne ?
La gestion des crises internationales, surtout lorsqu'elles impliquent des engagements militaires, relèvent prioritairement de la compétence du Conseil de sécurité de l'ONU. Or ce principe, auquel souscrivent de nombreux pays, à commencer par la France, devient l'un des sujets sensibles de la négociation engagée sur le futur concept stratégique. Le principe d'un contournement des compétences du Conseil de sécurité modifierait significativement les règles d'action de la communauté internationale.
M. Jacques Chaumont. Très bien !
M. André Dulait, rapporteur. Dans une logique de « sécurité globale », l'OTAN, pour certains, devrait devenir l'instance centrale de coopération diplomatique et de gestion militaire des crises. Or, sans méconnaître le rôle de l'OTAN, celle-ci ne saurait éclipser ni l'ONU ni l'OSCE, Office statistique des Communautés européennes, enceintes au sein desquelles la répartition plus équilibrée du poids politique de chaque nation préserve l'expression des souverainetés nationales ou régionales.
En troisième lieu, comment évoluera désormais la position de la France à l'égard de l'OTAN ? Si notre pays, depuis les décisions du 5 décembre 1995, a repris une place active et délibérative au sein de certaines des instances qu'il avait quittées en 1966, il a décidé, en décembre 1997, de ne pas poursuivre la même démarche en ce qui concerne la structure militaire, arguant notamment de son rééquilibrage insuffisant entre Américains et Européens.
L'Espagne ayant, pour sa part, intégré la structure militaire et les trois nouveaux pays ayant vocation à le faire sans réserve, la France gardera une position dont la singularité n'en sera que plus visible.
Certes, cette position n'empêche pas la France d'être impliquée là où il faut l'être, en particulier dans les structures de commandement mises en place au cas par cas dans le cadre des « nouvelles missions », comme en Bosnie-Herzégovine, et notamment au sein des GFIM. Symétriquement, l'appartenance à une structure militaire intégrée, conçue et organisée dans le cadre de la guerre froide, n'a plus la même signification ni la même utilité qu'autrefois.
Militairement cohérente, la position de la France pourrait cependant se révéler politiquement délicate, en tout cas difficilement compréhensible pour nos nouveaux partenaires. Une spécificité est souvent un atout ; elle peut aussi être un poids si, aux yeux des autres, elle devient synonyme d'isolement.
J'ai la conviction que la position de la France demeure cohérente tout en restant spécifique en raison de son histoire stratégique. A n'en pas douter, nos partenaires, y compris les nouveaux, continueront d'entériner cette spécificité au service de l'Europe et qui n'a jamais entamé la solidarité de la France avec les autres Européens sur les différents théâtres d'intervention depuis quarante ans.
Mes chers collègues, par-delà ces questions, si votre commission vous propose d'adopter aujourd'hui les trois projets de loi qui nous sont soumis, c'est que l'élargissement de l'OTAN à la Pologne, à la République tchèque et à la Hongrie, en symbolisant la réconciliation européenne, non seulement s'inscrit dans un déroulement positif de l'histoire, mais participe également, au-delà même des trois nouveaux Etats, au renforcement de la sécurité et de la confiance sur un continent européen qui a profondément évolué.
Trois raisons au moins justifient cette appréciation.
L'OTAN - et la France a tenu à cet égard un rôle qui mérite d'être salué - est parvenue, en échange de contreparties justifiées et contrôlées, à réduire, sinon à supprimer l'hostilité initiale de la Russie. Ce pays ne saurait en effet être tenu à l'écart d'aucune démarche tendant à consolider la sécurité en Europe. Comment pourrait-il d'ailleurs en être autrement, à l'heure où la libéralisation commerciale et économique conduit les partenaires de la Russie à multiplier les cadres de coopération avec ce pays, y compris dans le domaine militaire ?
De même, à l'égard des pays qui n'ont pas été retenus pour ce premier élargissement, l'OTAN pourra mettre à profit les mécanismes de coopération créés par le Partenariat pour la paix et le Conseil de partenariat euro-atlantique, et qui constituent en quelque sorte - cela a déjà été indiqué - le « deuxième cercle » de l'OTAN. Le processus engagé ne doit pourtant pas marquer le pas, et les négociations en vue de futures invitations à l'horizon du sommet de Wastington d'avril 1999 devraient reprendre au plus vite pour ne pas faire de la politique entamée de la « porte ouverte » une promesse n'engageant que ceux qui l'ont reçue.
Enfin, l'offre de sécurité par l'OTAN correspond aux besoins européens dans l'avenir prévisible. Plus que de moyens traditionnels de riposte à une agression territoriale caractérisée, les pays européens s'appuieront ensemble, dans le cadre de coalitions, sur des capacités de gestion des crises, avec des forces de réaction réduites, mobiles, flexibles et multinationales. Cette orientation est d'ailleurs, rappelons-le, cohérente avec les principes qui ont fondé notre propre réforme militaire. Aujourd'hui, l'élargissement de l'Alliance répond surtout au souci d'associer pleinement nos nouveaux alliés aux responsabilités de la paix et de la stabilité en Europe.
Après le débat approfondi et complet que j'ai déjà rappelé, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, convaincue que notre pays ne saurait manquer le rendez-vous historique qui lui est donné, a adopté ces trois projets de loi. Je vous invite vivement, mes chers collègues, à faire de même. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants).
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le Sénat est aujourd'hui invité à examiner, en première lecture, les trois protocoles d'adhésion de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque au traité de l'Atantique Nord. Comment mieux mesurer le chemin parcouru depuis huit ans, quand l'Europe commençait à se réconcilier avec elle-même ?
Les excellentes interventions de M. le ministre et de notre rapporteur, M. André Dulait - que je tiens à remercier pour la qualité du travail qu'il a accompli au nom de la commission - auraient pu me dispenser de toute intervention. Mais j'ai tenu à souligner brièvement la signification et la portée exceptionnelles de ces protocoles d'apparence modeste.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, consciente de l'enjeu, a examiné ces textes de façon approfondie. Elle a souhaité étayer sa réflexion par des informations recueillies auprès de représentants et d'experts du ministère des affaires étrangères, de celui de la défense, et du monde universitaire. M. le rapporteur et moi-même avons naturellement rencontré les ambassadeurs des trois pays concernés, que je suis heureux de saluer à nouveau dans cet hémicycle.
La commission a enfin adopté les trois projets de loi qui nous sont soumis à l'issue d'un débat aussi animé qu'approfondi. Je dois cependant à la vérité de dire, après M. le rapporteur, qu'à l'occasion de cet examen d'importantes réserves ont été formulées et que de nombreuses interrogations ont été posées.
De quoi s'agit-il ? Après avoir assuré avec succès leur transition démocratique, la Pologne, la Hongrie et la République tchèque ont su conclure avec leurs voisins des accords bilatéraux qui ont mis fin à des différends anciens. Ils constituent, désormais, un pôle de stabilité qui bénéficiera à l'ensemble de la zone centre-européenne. Dans le même temps, ces trois pays ont engagé un processus de longue haleine qui verra la réforme de leur système de défense et la mise à niveau de leurs forces aux standards requis par l'appartenance à une alliance militaire. Nous sommes conscients des efforts budgétaires, et donc politiques, que cette ambition représente.
A la vérité, l'Alliance atlantique, une fois révolu le temps de la guerre froide, ne pouvait demeurer en l'état. Je ne crois pas excessif de penser que, pour elle, l'alternative était simple : la dissolution ou l'élargissement. En retenant, à mes yeux à juste titre, cette dernière option, les membres de l'Alliance ont fait droit à trois exigences.
L'exigence de l'histoire, tout d'abord, qui faisait obligation d'effacer toutes les traces de la fracture de Yalta et de la guerre froide.
L'exigence de la solidarité politique entre démocraties européennes et nord-américaines, ensuite, qui est l'un des fondements majeurs de l'Alliance atlantique.
L'exigence de la sécurité, enfin, à laquelle l'OTAN doit sa création et qui anime encore, malheureusement, l'actualité souvent tragique de certaines parties de notre continent. Les conditions de cette sécurité ont certes radicalement changé, mais elle n'en demeure pas moins la préoccupation quotidienne de nos diplomaties et de nos armées.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'élargissement de l'OTAN constitue-t-il une chance pour l'Europe ?
Je suis de ceux qui le pensent, pourvu que certaines conditions soient remplies, à la réalisation desquelles il nous appartient de travailler dès aujourd'hui.
Première condition : éviter que le processus d'élargissement de l'OTAN ne devienne un nouvel instrument de division de l'Europe entre ceux qui vont adhérer, ceux qui adhéreront plus tard et ceux qui n'adhéreront pas du tout. Ainsi demeure-t-il à mes yeux plus que jamais nécessaire de déployer rapidement à seize, et bientôt à dix-neuf, les efforts diplomatiques nécessaires à l'ouverture de négociations d'adhésion avec notamment la Roumanie et la Slovénie, mentionnées explicitement dans les conclusions du sommet de Madrid.
L'outil de sécurité que constitue l'OTAN ne saurait entériner une nouvelle fracture entre une Europe centrale apaisée et une Europe du Sud-Est dont la stabilisation n'est pas encore assurée. Les efforts consentis à Madrid par la France et par nombre de ses partenaires européens n'ont pu avoir raison de la détermination des Etats-Unis à limiter étroitement ce premier élargissement, même si le principe de la « porte ouverte » a été, heureusement, réaffirmé. Il convient qu'à l'avenir les préoccupations des uns et des autres soient mieux prises en considération.
Deuxième condition : faire de « l'acte fondateur » entre l'OTAN et la Russie un véritable mécanisme de coopération entre deux acteurs majeurs de la sécurité européenne. En consacrant le rôle, au demeurant évident, de la Russie dans les questions de sécurité européenne, cet accord a permis de réduire une hostilité qui - soyons-en conscients - demeure malgré tout vivace à l'encontre de l'élargissement de l'OTAN.
Il importe en particulier que les mécanismes de dialogue et de confiance qui s'instaureront progressivement, grâce au Conseil permanent conjoint et dans le cadre du Conseil du partenariat euro-atlantique, permettent d'élaborer pour les Etats baltes, singulièrement pour l'Estonie et la Lettonie, un statut sécuritaire qui réponde à leurs préoccupations propres.
Troisième condition : renforcer l'Europe dans l'Alliance. Si celle-ci a, en effet, su prendre en compte partiellement, dans ses nouvelles structures, l'identité européenne de sécurité et de défense, beaucoup reste à faire. A cet égard, les décisions du Conseil atlantique de décembre 1997, comme d'ailleurs l'élargissement qui commence, sont non pas un aboutissement, mais bien davantage une étape vers un rééquilibrage plus sensible entre Européens et Américains dans le partage des responsabilités.
Mieux affirmer l'Europe au sein de l'Alliance implique des choix politiques, militaires, mais aussi industriels. Qu'il me soit permis de rappeler le rôle qui revient à nos alliés polonais, hongrois et tchèques pour oeuvrer, dès aujourd'hui, à la mise en place d'une industrie européenne de la défense. Les choix technologiques et commerciaux qu'ils auront à faire, dans le cadre de l'inter-opérabilité et de la rénovation de leurs forces armées, symboliseront - je n'en doute pas - leur engagement en faveur d'une Europe qui, dans ce domaine crucial, se doit d'être autonome et ambitieuse.
Avant de conclure, je souhaiterais formuler trois brèves observations.
La première sera pour rappeler que les deux processus d'élargissement, de l'OTAN, d'une part, et de l'Union européenne, d'autre part, répondent à des ressorts politiques, des mécanismes juridiques et des modalités techniques profondément différents. Les liens entre les deux processus n'en sont pas moins évidents. Et ce n'est naturellement pas le fruit du hasard si la Hongrie, la Pologne et la République tchèque viennent également d'engager le long et complexe processus de négociations qui doit les conduire, d'ici à quelques années, à rejoindre l'Union européenne. Mais nous devons apprécier à sa juste mesure l'ampleur des efforts que ces pays doivent consentir pour mener à bien cette double démarche d'intégration.
Ma deuxième observation sera pour évoquer d'un mot la position de la France au sein d'une OTAN élargie et discrètement triomphante. Cette position française - nous le savons - demeure singulière et nous continuons d'estimer insuffisant le rééquilibrage, nécessaire, au sein de l'OTAN, entre Européens et Américains...
M. Philippe Marini. Très bien !
M. Xavier de Villepin, président de la commission. Mais des progrès ont été accomplis et la France doit - c'est ma conviction - rester ouverte à toute proposition qui permettrait d'aller plus loin. C'est dans cet esprit aussi que la France doit, à mes yeux, participer pleinement au réexamen du « concept stratégique » de l'Alliance qui devra, en particulier, respecter le rôle qui revient aux Nations unies dans la définition du mandat des opérations de maintien de la paix. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Je rappelle enfin que nous attachons une importance toute particulière à ce que l'entrée de la Pologne, de la République tchèque et de la Hongrie dans l'OTAN se fasse dans de bonnes conditions. La France devra ainsi assumer pleinement ses responsabilités au sein de l'Alliance en ce qui concerne le financement des infrastructures collectives nécessaires. L'évaluation financière enfin agréée par les Seize du coût de l'élargissement, après des estimations pour le moins surprenantes, permet de penser que l'essentiel de ce financement devrait pouvoir être assuré par redéploiement.
Mes chers collègues, les débats au sein de notre commission ont révélé bien des incertitudes et bien des interrogations. Pour légitimes que soient ces réserves et pour toutes les raisons que je viens d'indiquer, je partage avec notre rapporteur et la majorité de la commission la conviction que l'élargissement de l'OTAN répond à la situation de l'Europe dans le contexte de l'après-guerre froide et à une légitime attente des pays candidats que nous ne devons pas décevoir.
C'est dans cet esprit que la commission vous demande d'adopter les trois projets de loi qui nous sont présentés. Je ne doute pas que le Sénat sera, une nouvelle fois, à la hauteur de l'enjeu. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Chaumont.
M. Jacques Chaumont. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, voilà quelques jours, après de longs débats, vingt sénateurs américains se sont opposés à l'élargissement de l'OTAN à la Pologne, la République tchèque et la Hongrie. En Italie, la majorité qui soutient le gouvernement de Romano Prodi est sérieusement menacée par le problème de l'élargissement. En Allemagne, la coalition conduite par Gerhart Schröeder connaît, sur ce même sujet, de très graves dissensions. En Russie, enfin, le parti communiste bloque, à la Douma, la ratification du traité Start 2, en raison de cet élargissement.
Il est donc surprenant que cet élargissement historique - comme l'a rappelé M. de Villepin - ne soulève, dans notre pays, qu'indifférence, et que le Parlement lui-même traite ce dossier non pas à la sauvette, mais sans solennité particulière.
Ce problème est l'un des plus importants de notre décennie. En effet, de notre participation à l'OTAN et de la structure de cette organisation dépendent, pour une part, le format de nos forces armées, nos choix budgétaires et, en définitive, la sécurité de notre pays et de l'Europe.
MM. Philippe Marini et Christian de La Malène. Très bien !
M. Jacques Chaumont. Participant depuis près de vingt ans aux réunions de l'Assemblée parlementaire de l'Atlantique Nord, je voudrais, messieurs les ministres, mes chers collègues, formuler quelques observations.
Premièrement, la chute du mur de Berlin aurait dû entraîner, en bonne logique gaulliste, la dissolution parallèle de l'OTAN et du pacte de Varsovie. Or c'est la volonté des Américains de conserver leur influence sur l'Europe mais aussi la pression des Etats d'Europe centrale et orientale qui ont maintenu en vie puis donné une nouvelle vitalité à l'OTAN, car il était clair, au début de cette décennie, que la Russie n'était pas encore engagée de manière suffisamment irréversible dans la voie de la démocratie et que la menace d'une reconquête post-soviétique semblait plus crédible qu'elle ne l'est actuellement.
Mais il faut aussi reconnaître, comme l'écrivait Zbigniew Brezinski dans un article récent, que le désir des pays d'Europe centrale d'être admis dans l'OTAN visait à la fois l'Union soviétique, ou ce qu'il en restait, mais aussi, et peut-être surtout, l'Allemagne.
On sait combien la Pologne a toujours vécu avec angoisse ses relations avec ses deux puissants voisins.
De ce point de vue, l'expansion de l'OTAN a marqué une étape considérable dans la réconciliation entre la Pologne, la République tchèque et l'Allemagne. Les sondages d'opinion les plus récents publiés en Pologne montrent que l'Allemagne est maintenant classée par les Polonais pratiquement au même niveau d'appréciation et d'amitié que les Etats-Unis. Les craintes polonaises d'une Allemagne trop puissante se sont diluées dans l'ancrage très fort de l'Allemagne dans l'Alliance euro-atlantique. C'est un aspect positif.
Dans une autre région couverte par l'OTAN, on peut espérer que l'appartenance de la Grèce et de la Turquie à l'organisation puisse permettre de détendre les relations complexes entre les deux pays et de réduire les tensions en mer Egée.
D'une certaine manière, comme l'a indiqué M. de Villepin, l'élargissement de l'OTAN peut donc être de nature à consolider la sécurité en Europe centrale et orientale.
Ma deuxième observation a pour objet de vous indiquer, messieurs les ministres, plus spécialement à vous, monsieur Richard, que, dans les négociations qui doivent s'ouvrir en 1999 sur la définition d'un nouveau concept stratégique de l'OTAN, il vous faudra faire preuve d'une particulière vigilance. Le discours américain est, en effet, d'une simplicité biblique.
Selon nos amis, le nouveau concept stratégique de l'OTAN doit reposer sur l'interopérabilité des forces armées. Cette interopérabilité implique que la République tchèque, la Pologne et la Hongrie se débarrassent de leur système d'armes démodées, généralement d'origine soviétique, et acquièrent des armes américaines.
Nos amis américains précisent leur pensée en affirmant que le problème de la sécurité en Europe est non pas le problème des Américains, mais celui des Européens. Comme la République tchèque, la Pologne et la Hongrie sont des pays trop pauvres pour s'acheter des systèmes d'armes modernes, c'est aux pays européens les plus riches d'acheter les systèmes d'armes dont ces pays devront se doter.
Je participais récemment, à Norfolk, à une réunion de l'Assemblée de l'Atlantique Nord. Avec plusieurs parlementaires européens, nous avons fait remarquer à nos amis américains que l'Europe produisait aussi des armes et que l'on pourrait concevoir de doter les pays d'Europe centrale des systèmes d'armes européens. Nos partenaires nous ont très froidement indiqué que les armes américaines étaient disponibles, qu'on pouvait les acheter sans difficultés, qu'elles étaient meilleures que les armes européennes et que, les sommes consacrées par les Etats-Unis à la recherche et au développement étant infiniment supérieures à celles que consacrent les pays européens, nos systèmes d'armes seraient très rapidement obsolètes et qu'acheter des armes européennes serait donc un mauvais investissement.
Ces propos ont été tenus sous une forme à peu près identique, voilà deux jours à l'IHEDN, par l'ambassadeur des Etats-Unis en France.
M. Philippe Marini. Ils sont inquiétants !
M. Jacques Chaumont. Il a évalué l'écart technologique entre les Etats-Unis et l'Europe à 20 % et constaté que ce gap technologique posait un véritable problème pour l'interopérabilité des forces à l'intérieur même de l'OTAN, non seulement vis-à-vis des pays qui vont bénéficier de l'élargissement, mais également vis-à-vis des pays comme le nôtre. Il a émis le désir que s'instaurent une concertation des groupes d'armements européens entre eux et, ultérieurement, des partenariats avec les sociétés américaines. Sinon, selon lui, il n'y aurait plus d'interopérabilité possible.
Messieurs les ministres, cela m'amène à vous interroger, comme l'ont fait mes prédécesseurs, sur le coût réel de l'élargissement pour la France. Je voudrais aussi savoir si, à travers la notion d'interopérabilité des marchés, l'avenir de nos arsenaux et de nos industries d'armements n'est pas subrepticement remis en cause.
Faire payer par les Européens des armements américains, c'est effectivement une stratégie très satisfaisante pour les Etats-Unis. Nos amis américains ont d'ailleurs fait comprendre aux pays candidats qu'ils n'avaient qu'une option - cela, nous le tenons des parlementaires de ces trois pays - ou acheter les systèmes d'armes américains s'ils voulaient entrer dans l'OTAN, ou ne pas les acheter et rester en dehors de l'OTAN. Ils l'ont dit très simplement et très brutalement.
C'est une pression que je trouve personnellement choquante. Je pense, monsieur le ministre, qu'il faut, dans ce domaine, instaurer une véritable transparence des marchés, faire qu'ils soient répartis entre les différents partenaires, de manière que l'avenir de nos industries d'armement ne soit pas compromis. Il faut peut-être aussi, malgré tout, apporter à nos industries d'armement un dynamisme et des moyens accrus.
Ma troisième observation rejoint le propos de MM. Dulait et de Villepin : l'OTAN ne doit pas procéder à un déploiement trop important de ses forces conventionnelles à proximité de la Russie - il ne faut pas créer un nouveau mur - et provoquer chez eux une inquiétude très forte ; cela renforcerait les tenants d'une ligne dure qui, face à des déploiements conventionnels massifs, seraient conduits pour rééquilibrer les forces et restaurer un équilibre, à concevoir l'option nucléaire comme le seul moyen de préserver l'indépendance de la Russie.
Cela étant, le général Lebed, lui, s'est prononcé pour l'élargissement de l'OTAN, pariant sur le fait que plus les membres de l'OTAN seront nombreux, plus le risque de zizanie, de débats et de dissensions internes sera grand. Son arrivée au Conseil de la fédération montre que faire campagne pour ou contre l'OTAN n'a pas une incidence majeure sur le vote de l'électeur russe de base.
Ma quatrième observation est que l'élargissement de l'OTAN doit nous amener à nous interroger sur le rôle et l'avenir de cette institution.
L'intervention de l'OTAN dans l'ex-Yougoslavie a marqué un changement dans la nature de l'institution. Des évolutions sont donc à définir. L'OTAN peut conserver son rôle actuel et servir de manière occasionnelle de bras séculier à l'ONU. Cela impliquerait de ne pas reproduire les erreurs passées, de définir de manière précise les missions de l'OTAN et de ne plus avoir trente-six chaînes de commandement. L'OTAN peut aussi avoir une vocation autre qu'euro-atlantique et être présente partout dans le monde, en particulier au Proche et au Moyen-Orient.
Comme l'ont souligné mes collègues, s'il y a une dissociation entre l'action de l'OTAN et les résolutions du Conseil de sécurité, on ne voit pas très bien quel contrôle s'exercera sur l'OTAN.
Le gouvernement américain a demandé une étude sur ce sujet, monsieur le ministre. Des experts doivent fournir à votre homologue américain leurs conclusions dans quelques semaines, voire dans quelques mois, pour dire quelle est la vision que l'OTAN doit avoir du point de vue américain et quelle doit être sa mission.
Seulement, je crois, pour ma part, qu'il serait inacceptable que les missions des Nations unies, organisme parfois incontrôlable, soient lentement, insidieusement diminuées au profit d'une OTAN à vocation mondiale, dont la soumission aux orientations stratégiques américaines est totalement acquise.
En conclusion, messieurs les ministres, mes chers collègues, on peut avoir le sentiment que l'Europe se construit actuellement autour de sa monnaie. Je crains, au contraire, qu'elle ne se dilue de plus en plus dans une zone de libre-échange sans politique extérieure ni militaire communes. L'Europe a été incapable de définir une politique commune au Moyen-Orient, dans les Balkans et, comme nous le voyons actuellement, au Kosovo.
Tant que nous n'arriverons pas à créer une véritable Europe politique, l'Europe restera, pour sa défense, dépendante des Américains. D'ailleurs, nous voyons bien qu'actuellement seuls les Etats-Unis sont capables d'imposer une « pax americana » quelconque, y compris en Europe.
Dans un article vieux de vingt-cinq ans, j'ai appelé de mes voeux une véritable politique européenne de défense. Je crois que nous n'en avons jamais été aussi loin. Le 15 mai dernier, Tony Blair indiquait dans un article paru dans le Herald Tribune que le rôle de la Grande-Bretagne était d'être un pont entre les Etats-Unis et l'Europe pour dire aux Européens : « Reconnaissez la valeur du leader-ship américain dans le monde » et pour dire aux Américains : « Croyez-moi, n'écoutez pas les mauvais esprits, tous les peuples apprécient votre leadership ».
Certains de nos partenaires ont donc la volonté claire de renforcer le lien transatlantique, et l'incapacité de l'Europe continentale à définir une politique extérieure commune fait qu'il n'y a pas d'autre alternative crédible à opposer à M. Tony Blair, dont le discours est très exactement celui que tenait en son temps M. Macmillan.
M. Philippe Marini. C'est la tradition !
M. Jacques Chaumont. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne pouvons pas faire de l'OTAN un club réservé aux anciens alliés de la guerre froide, un club fermé aux nouvelles démocraties qui se créent. C'est la thèse de Mme Madeleine Albright, qui, je crois, a raison. La France a trop de liens historiques, trop de liens affectifs et trop de liens économiques avec la Pologne, avec la Hongrie et avec la République tchèque pour leur dire « non », mais, monsieur le ministre, l'Europe dont nous avons rêvé il y a trente ans est en train, je le crains, non pas de se faire, mais de se défaire ; aussi je forme des voeux ardents pour que le Gouvernement, sous l'autorité du Président de la République, fasse tout ce qui est en son pouvoir pour créer une véritable Europe de la défense. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Messieurs les ministres, les textes que nous soumet aujourd'hui le Gouvernement pour l'élargissement de l'Alliance atlantique à trois nouveaux pays illustrent bien, comme l'a rappelé M. le président de Villepin, tout le chemin parcouru depuis 1989 et la chute du mur de Berlin.
Voilà moins de dix ans, l'Europe était encore divisée : deux superpuissances régnaient sur un monde bipolaire. Sous la guerre froide, une multitude de guerres chaudes proliféraient dans le tiers-monde. Une Europe divisée en deux blocs : le pacte de Varsovie et l'Alliance atlantique ; c'était hier...
Nous sommes donc devant une réalité nouvelle, et parce que cette réalité-là est présente dans nos esprits, le groupe socialiste, je le dis d'emblée, est favorable à l'adoption de ces textes et donc à l'accession de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque au traité de l'Alliance atlantique.
Je voudrais cependant, comme l'ont fait mes collègues, profiter de ce débat pour faire quelques remarques.
La première concerne la méthode choisie pour l'élargissement de l'Alliance atlantique.
L'élargissement de l'OTAN fait partie d'un processus plus général d'ouverture à l'Est des institutions européennes et euro-atlantiques. Toutefois, il ne faut pas confondre l'élargissement de l'Alliance et l'élargissement de l'Union européenne, qui doit se faire au rythme voulu par l'Union, avec les partenaires choisis par l'Union et selon un calendrier déterminé par l'Union.
L'élargissement de l'Union est l'affaire des Européens, l'élargissement de l'Alliance atlantique, en revanche, a montré le poids des Etats-Unis dans sa réalisation. Cela étant dit, nous ne pouvons qu'accueillir avec sympathie nos amis polonais, hongrois et tchèques. Il est vrai que cet élargissement, que nous aurions souhaité, comme vous, plus généreux et prenant mieux en compte les besoins de défense de l'Europe, traduit surtout l'aspiration des pays d'Europe centrale et orientale à trouver leur place dans la communauté euro-atlantique.
Nous concevons ce premier élargissement de l'Alliance comme un processus ouvert à tous les candidats européens. A Madrid, les Alliés ont pris l'engagement ferme de maintenir la porte ouverte à d'autres adhésions. Mais sommes-nous sûrs que tous les membres de l'Alliance partagent ce sentiment ?
Nous savons que les représentants français sont intervenus avec force et ont obtenu que soit mentionnée dans le communiqué de Madrid, au-delà de la Roumanie et de la Slovénie, la nécessité de prendre en compte l'Europe du Sud-Est lors des prochaines échéances liées à l'élargissement de l'OTAN. En effet, tous les Etats de cette région - la Macédoine, par exemple - qui font acte de candidature ont vocations à intégrer, à terme, l'Alliance. Il convient d'ouvrir l'OTAN à toute l'Europe du Sud, une région qui revêt pour nous tous une grande importance politique et stratégique.
Cette Alliance élargie qui se construit actuellement ne doit pas introduire une nouvelle division en Europe, une sorte de fracture entre les intégrés et les exclus. Cristalliser une séparation entre deux catégories des pays d'Europe centrale et orientale n'est évidemment pas souhaitable.
Un aspect de l'élargissement, peu débattu jusqu'à présent, nous préoccupe. On nous assure - vous l'avez dit tout à l'heure encore, monsieur le ministre - que son coût sera supportable pour les seize pays membres. Collectivement et individuellement, nous n'aurions pas - ou guère - à effectuer de dépenses supplémentaires. Soit !
Cependant, il en va tout autrement pour les nouveaux futurs membres. Pour eux, des difficultés sérieuses sont à prévoir. Le secrétaire général de l'OTAN, M. Javier Solana, écrit dans le dernier numéro de la Revue de l'OTAN : « Si les trois futurs alliés ont fait des gros efforts pour satisfaire les critères d'adhésion à l'OTAN, ils doivent néanmoins aller plus loin encore dans leurs réformes afin d'élever leurs armées au niveau de celles des pays membres actuels ». Il ajoute : « Tous trois ont confirmé que leurs dépenses de défense seront considérablement accrues dans les prochaines années afin de moderniser leurs forces armées et de mieux répondre aux critères d'adhésion à l'OTAN ». Rien de moins !
On peut se demander si, dans les situations économiques et sociales difficiles dans lesquelles ces pays se trouvent, ils n'ont pas autre chose à faire que de mettre leurs armées au niveau des armées de l'Europe occidentale ! D'où cette double interrogation, messieurs les minsitres : leurs efforts actuels pour redresser leurs économies ne risquent-ils pas d'être obérés par le coût d'une intégration dans l'OTAN, et ce coût lui-même ne risque-t-il pas d'entraîner un retard dans leur entrée dans l'Union européenne ?
On peut aussi se pencher, comme vient de le faire M. Chaumont, sur les conséquences de l'élargissement en matière de marchés d'armement. N'est-ce pas une façon pour les Américains de s'ouvrir de nouveaux marchés ? Il existe un lien entre l'élargissement de l'OTAN et le marché de matériels. Un seul exemple : la Pologne doit privatiser en 1999 toute son industrie d'armement. Le géant américain Lockheed-Martin négocie actuellement l'achat de PZI Varsovie-Okecie, le plus grand groupe polonais. Cela permettra aux Américains d'être incontestablement bien placés pour emporter les marchés relatifs à la mise à niveau et à la modernisation des forces armées et des infrastructures polonaises. On aimerait savoir si, dans ce cas précis, l'Europe avance en ordre dispersé ou s'il est possible d'aborder cet aspect apparemment secondaire, mais important économiquement, des adhésions avec une politique commmune des Européens.
Ma deuxième remarque concerne des pays qui n'entrent pas dans l'OTAN. Elle sera brève dans la mesure où le rapport de notre collègue M. Dulait retrace fort bien la situation. Je ne reviendrai donc pas sur les relations entre la Russie, l'Ukraine et l'Alliance atlantique. Je pense, en effet, que le risque existe toujours d'un retour des anciennes craintes ; surtout si l'on donne l'impression de construire une machine militaire, défensive certes, mais qui incorpore certains et en exclut d'autres. L'émergence d'un monde multipolaire ne doit pas être vécue par certaines nations dans la frustration ou le repli.
Le partenariat stratégique avec la Russie est très important. Mais il n'est pas seulement l'exclusivité de l'OTAN. Nous, Européens, devons développer sans complexes une politique ouverte vers ce grand pays, en dépit des vicissitudes politiques plus ou moins inquiétantes de sa conjoncture.
A cet égard, nous avons apprécié la rencontre trilatérale - Russie, Allemagne, France - qui a eu lieu le 26 mars dernier. Ce partenariat passe bien évidemment par la reconnaissance du rôle qu'il incombe à la Russie de jouer dans la sécurité européenne. Au moment où l'Union européenne engage son propre élargissement, nous devons avoir tous conscience de l'importance de développer une véritable relation confiante, amicale et constructive entre l'Union européenne et la Russie.
Il en va de même des relations avec la Pologne. Les liens tissés dans le cadre du « triangle de Weimar » sont un exemple d'une politique extérieure commune qui en est à ses balbutiements et qui revendique de traiter, sans tutelle d'aucune sorte, de toutes les questions intéressant les Européens.
Ma troisième remarque a trait aux relations entre notre pays et l'OTAN. Nous savons maintenant que la France maintient, en ce qui concerne sa place au sein de l'OTAN, la position explicitée en décembre 1997, à savoir la volonté d'un véritable nouveau partage des responsabilités entre les Européens et les Américains dans le cadre de l'Alliance avec l'affirmation de l'identité européenne de défense.
On ne peut pas dire que les initiatives menées par la France depuis 1995 en direction de l'OTAN aient été couronnées de succès. Loin de là ! Une certaine intransigeance de nos partenaires a finalement convaincu le Président de la République, qui avait proposé une politique de rapprochement accéléré avec elle, d'arrêter ce mouvement en décembre 1997, comme cela a été rappelé avant moi.
Certes, dans la rénovation de l'Alliance, il y a eu des avancées. Désormais, les Européens pourront mener des opérations, sous la conduite de l'UEO, en faisant appel aux moyens de l'OTAN. Ils pourront s'appuyer sur un dispositif de commandement européen cohérent. On a fait un premier pas, qui est la possibilité pour l'Europe d'utiliser les moyens de l'OTAN dans des opérations militaires qui n'intéressent pas les Américains et auxquelles ils ne veulent pas participer. Cela suppose naturellement l'existence, dans cette hypothèse, d'une ligne de commandement proprement européenne. Le principe en est acquis, il faut encore le mettre en oeuvre.
Aussi, il nous semble que le Gouvernement français, tout en réaffirmant la loyauté de la France à l'égard de ses alliés, a bien agi en n'allant pas plus loin dans le rapprochement avec l'OTAN.
Ma quatrième remarque concerne la sécurité européenne.
Certains voient dans l'OTAN « trop d'Amérique et pas assez d'Europe ». Mais il convient de ne pas oublier que les moyens de l'OTAN restent très largement des moyens américains. Tous les pays européens sont-ils disposés à assumer toutes les conséquences d'une sécurité autonome ? Il semble plutôt que les Européens n'aient guère brillé jusqu'à maintenant par leur volonté de mener une politique de sécurité commune.
Pourtant, le système européen dans son ensemble a la possibilité d'offrir pour la première fois aux Etats-Unis un partenariat équilibré. Il est clair que l'achèvement de l'Union économique et monétaire est un signe important pour nos amis américains. L'Europe avance ! Notre Europe, à l'aube du troisième millénaire, connaîtra une monnaie unique, et cette réalité aura des conséquences considérables sur l'ensemble de la vie économique, bien sûr, mais aussi sur la vie sociale et politique, et même dans le domaine de la politique étrangère et de la sécurité commune.
Il est une réalité incontournable : nos partenaires européens ont concentré l'essentiel de leurs moyens militaires au sein de l'Alliance atlantique et ils sont déterminés à les y maintenir. Nous savons aussi que les pays non membres qui ont participé au sommet de Madrid en juillet 1997 n'avaient qu'une idée : se rapprocher de l'OTAN, qui est, à leurs yeux, synonyme de modernité et de réinsertion dans la communauté internationale.
Renforcer la capacité d'agir de façon autonome des Européens en cas de besoin peut sembler aujourd'hui une utopie, tant la dépendance de certains pays européens à l'égard des Etats-Unis est grande. L'émergence d'une politique européenne commune de sécurité est une question plus de volonté que de moyens. Elle est surtout et avant tout l'affaire des Européens ; nous ne pouvons évidemment pas demander aux Américains de la développer à notre place !
Ce n'est pas à vous, messieurs les ministres, que je rappellerai que, pendant des années, la France a été seule porteuse de l'idée d'une défense européenne. Il faut persévérer, en faisant preuve de pragmatisme, et poursuivre inlassablement les actions pour l'émergence de l'identité européenne de défense avec nos partenaires de l'Union européenne et de l'UEO, tout en maintenant notre participation originale à l'Alliance atlantique.
Mon dernier point concerne l'avenir de l'Alliance, et en particulier le processus de révision du concept stratégique.
La nécessité d'un nouveau concept stratégique semble être une évidence pour tout le monde. La question pourrait être formulée autrement : une nouvelle Alliance, pour quoi faire ? Les évolutions de la situation géopolitique, la disparition de l'Union soviétique, l'apparition de nouveaux risques et de menaces qui n'appellent pas tous un traitement militaire, la désintégration plus ou moins violente d'Etats européens exigent des réponses novatrices et de l'imagination politique. Au moment même où l'Europe fait disparaître ses fractures et où un espace nouveau s'ouvre aux peuples de l'Atlantique à l'Oural, on ne peut pas se contenter d'un simple ravaudage de façade destiné à assurer la survie de cet organisme. La France a manifesté sa volonté de prendre une part très active au processus engagé, l'objectif étant d'aboutir lors du sommet de l'OTAN à Washington en juin 1999, à l'occasion du cinquantième anniversaire du traité de l'Atlantique Nord.
Ailleurs, le débat est déjà bien engagé. Selon M. Solana, que je citais tout à l'heure, les missions de l'OTAN vont au-delà de la défense collective des Etats membres. L'ancien secrétaire américain à la défense William Perry, lors d'une récente audition au congrès, avait défini la zone géographique des intérêts de l'OTAN comme étant « n'importe où au monde où l'agression menace les membres de l'Alliance », et le secrétaire d'Etat, Madeleine Albright, voudrait « étendre la sécurité de l'OTAN du Proche-Orient à l'Afrique centrale ».
Quelques interrogations s'imposent : peut-on accepter que l'Alliance devienne une « organisation globale » chargée des missions militaires tous azimuts ? Est-ce que la nouvelle Alliance deviendra le bras militaire des Nations unies ? Est-ce qu'on peut accepter que les missions de l'Alliance aillent au-delà de la défense de ses membres et du maintien de la stabilité en Europe ? Veut-on d'un organisme militaire multinational pouvant offrir ses services aux Nations unies, à l'OSCE, à l'OUA ?
Messieurs les ministres, je pense que ces interrogations trouvent leur place dans vos réflexions ; je vous demande d'informer régulièrement la représentation parlementaire de l'état d'avancement du processus de révision du concept stratégique de l'Alliance afin que le Parlement puisse, le moment venu, donner son avis sur cette importante question.
En conclusion, je résumerai de la façon suivante la position du groupe socialiste.
Nous voulons une relation transatlantique renouvelée, renforcée et équilibrée.
Nous pensons que la France doit récuser l'idée qu'il y aurait une division du travail : à l'OTAN, la sécurité, et à l'Union européenne, l'économie. Une telle conception paralyserait la volonté politique de l'Europe.
Nous avons la volonté d'inscrire l'élargissement dans un processus plus global de recomposition géopolitique de l'Europe, qui prenne en compte les impératifs de sécurité de l'ensemble européen et de son voisinage.
Nous soutenons la politique du Gouvernement visant à développer des relations étroites avec les pays d'Europe centrale et orientale et avec la Russie. La qualité de nos liens à tous les niveaux avec ces pays constitue en effet l'une des clés de la stabilité de notre continent.
Je profite de l'occasion pour saluer les efforts et les sacrifices réalisés par les peuples de ces pays, efforts les conduisant sans cesse vers le partage d'un même avenir avec les membres de l'Union européenne.
On sait que les socialistes sont très attachés à la construction européenne. La dimension de sécurité et de défense constitue un élément important de l'édifice européen. En votant les textes d'adhésion à l'Alliance atlantique de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque, nous souhaitons qu'ils s'inscrivent justement dans une perspective européenne réaffirmée. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'OTAN, structure héritée de la guerre froide, a survécu à la disparition de la menace qui a créé les conditions de cette alliance.
Elle contribue à maintenir le leadership politico-militaire américain sur la partie la plus développée de l'hémisphère nord.
Le renforcement des compétences et l'élargissement géographique de cette organisation marquent la volonté de poursuivre dans ce sens.
Après l'écroulement du Pacte de Varsovie, en 1990, la situation stratégique de l'Europe centrale et orientale demandait à être abordée d'une manière totalement nouvelle.
Le président Vaclav Havel, tout nouvellement élu, fut l'un des premiers chefs d'Etat à préconiser, en 1990, un système de sécurité collective fondée sur ce qui s'appelait encore la CSCE, en remplacement des systèmes d'alliance existant jusque-là.
Pour éviter que cette idée, de bon sens, ne se répande trop profondément, risquant de mette à mal l'Alliance atlantique, la diplomatie américaine, relayée par ses alliés européens les plus proches, eut tôt fait de mettre l'accent sur les faiblesses de ladite CSCE, faiblesses savamment entretenues, comme chacun sait.
L'absence d'alliance avait été assez vite assimilée à un vide de sécurité demandant à être comblé.
Le Conseil de coopération euro-atlantique, inventé dans la foulée, en 1991, et étendu aux pays d'Europe orientale et aux Etats issus de l'ex-Union soviétique, lançait déjà le mouvement vers l'élargissement.
Toutefois, de 1991 à 1993, le processus fut mis en sommeil, de la volonté même des Américains et de plusieurs capitales européennes, jusqu'au moment où le ministre allemand de la défense affirma publiquement son souhait d'un élargissement rapide de l'OTAN.
L'Allemagne était et reste désireuse de ne plus se trouver à la périphérie géographique de l'Alliance et de jouer un rôle moteur dans l'intégration des pays d'Europe centrale et orientale, les PECO, chasse gardée privilégiée de l'économie allemande.
Les Américains avaient été surpris, dans un premier temps, par l'écho positif rencontré auprès des pays de l'ex-Pacte de Varsovie, par leurs efforts diplomatiques et par la demande formulée avec force d'adhérer à la cause américaine. Ils avaient également été rendus prudents dans leur volonté d'avancer dans la voie de l'élargissement par les premières réactions russes face à cette nouvelle dynamique mettant en mouvement Polonais, Roumains, Hongrois, Slovènes, Tchèques, Ukrainiens, pays Baltes.
Mais, en 1994, à l'occasion de la campagne législative américaine, rompant avec la prudence affichée sur le sujet par l'administration Bush, le parti républicain, espérant mettre en difficulté l'administation Clinton en voulant démontrer son incapacité à saisir cette chance historique d'accroître l'influence américaine en Europe, se saisissait avec vigueur de la question de l'élargissement large et rapide de l'OTAN dans son manifeste électoral.
Ayant répliqué à cette campagne en faisant le choix de prendre le train en marche, l'administration Clinton, à l'image de M. Richard Holbrooke, chargé des affaires européennes, se mit, elle aussi, à mener campagne pour une extension rapide de l'Alliance.
Si le gouvernement américain avait adopté l'autre option, continuant à mettre l'accent sur les risques stratégiques d'un élargissement rapide, ce qui était fort possible, sinon souhaitable, nous ne serions pas ici aujourd'hui à discuter de tout cela.
Il est vrai que, placés par la géographie entre les masses allemandes et russes, étouffés par plus de quatre décennies de dépendance vis-à-vis du Kremlin, les pays d'Europe centrale et orientale ont, depuis longtemps, un sentiment d'insécurité foncière.
Les spectres de Munich et de Yalta marquent encore fortement la conscience collective de leurs peuples.
Cette demande forte de se mettre sous le parapluie du vainqueur de la guerre froide et d'échapper à une éventuelle domination russe s'explique évidemment, même si, à échéance prévisible, la sécurité de ces pays n'est en rien menacée.
Ajoutons que certains pays trouvent là matière à régler des comptes avec Moscou : l'attitude de la Pologne, semblable à celle du petit faisant des pieds de nez aux Russes à l'abri du plus grand de la classe, illustre assez bien la situation.
Ce qui, en revanche, ne s'explique pas, c'est la non-perception, dans ces mêmes pays, de l'intérêt pour l'Europe centrale et orientale que la Russie soit pleinement associée sur les plans économique, politique et sécuritaire aux structures de coopération européenne. C'est aussi, d'ailleurs, l'intérêt de l'Europe occidentale.
Or l'élargissement de l'OTAN, dont on sait que les Russes pensent qu'il est dirigé contre eux, ne peut que contribuer à repousser la Russie hors des enceintes de coopération et de sécurité européenne et à regarder plus en direction de la Chine, de l'Iran ou de l'Inde.
L'élargissement de l'OTAN, dont on nous dit qu'il s'agit aujourd'hui d'une première étape, par les tensions réelles ou potentielles qu'il crée et ne manquera pas de créer avec la Russie, ne va pas dans le sens de la garantie des exigences de sécurité et de stabilité des PECO.
Il porte en lui-même un encouragement au développement en Russie du sentiment de frustration, de revanche anti-occidentale ; il induit des tendances centrifuges à l'intérieur des républiques périphériques de la Fédération ; il influe de manière provocante sur la politique des Etats voisins à son égard et contribue au développement d'un état d'esprit défavorable à la coopération avec un Occident jugé égoïste et dominateur, qui profite de la faiblesse de la Russie pour l'humilier et miner son intégrité.
Ne sous-estimons pas, mes chers collègues, les crispations russes immédiates et à venir, leurs conséquences sur la période de l'après-Eltsine et les nouvelles menaces qu'elles pourraient engendrer.
Le maintien ferme du refus du Parlement russe de ratifier le traité Start 2 devrait faire réfléchir plus d'un supporter enthousiaste de l'élargissement de l'OTAN.
Dans certains milieux politiques outre-atlantiques, on souhaite ouvertement, avec cet élargissement, « titiller » la Russie pour, en retour, souder les alliés européens autour des Etats-Unis.
Ces « faucons » de nouvelle génération estiment, dans leur logique, que toute crispation russe rendra plus difficile le développement d'une identité de défense et de sécurité sur le Vieux Continent. Cela vaut ce que cela vaut, mais ce n'est pas complètement faux.
Passant par-dessus l'UEO et l'OSCE, l'élargissement court-circuite les initiatives et les volontés exprimées en vue d'approfondir les coopérations politico-militaires en Europe.
Les précautions prises pour essayer d'atténuer les réactions russes, avec la création d'un conseil permanent conjoint OTAN-Russie, aboutissent en fait à renforcer, pour reprendre les termes du rapport de notre collègue André Dulait, « la marginalisation des Européens dans la construction sécuritaire du continent ».
Je pense plus que jamais que les Américains ne sont pas disposés à lâcher quoi que ce soit d'important allant dans le sens de l'émergence d'une défense commune et autonome en Europe. Leur hégémonie politique et industrielle - ils représentent près de 60 % du marché mondial de l'armement - dépend trop de leur position dominante dans l'OTAN.
Autre sujet d'inquiétude : la volonté affichée de renforcer les compétences de l'OTAN au détriment de celles de l'ONU.
Le rapport d'André Dulait analyse ce point, comme beaucoup d'autres, avec pertinence. Il est dommage, monsieur le rapporteur, que nous nous séparions aussi nettement sur la finalité. Mais cela de m'enpêche pas de reconnaître la grande qualité de votre travail.
Il est particulièrement inquiétant de constater que, parallèlement à ce premier élargissement, il est envisagé de passer éventuellement outre l'avis et le veto du Conseil de sécurité de l'ONU pour engager une intervention hors du territoire des Etats membres de l'OTAN.
Il est impératif de mettre en échec cette tentative de dérive, qui réduirait à néant les règles d'action de la communauté internationale. Pour ce faire, nous comptons sur la fermeté du Gouvernement et sur sa capacité à convaincre nos principaux partenaires européens.
La nouvelle donne en Europe rend encore plus nécessaire le dépassement de la logique des blocs, l'OTAN apparaissant comme une structure dépassée et inadaptée pour assurer la sécurité sur le continent européen, qui a besoin d'une autre structure, regroupant tous les pays européens sans aucune exclusive, selon la bonne vieille formule : « de l'Atlantique à l'Oural ».
Tout cela peut très bien se développer en respectant les alliances et les coopérations extra-européennes actuelles.
Vous le savez, nous souhaitons voir l'OSCE jouer ce rôle, une OSCE rénovée, agissant en tant qu'organisation régionale de l'ONU.
Nous sommes persuadés qu'une telle évolution irait dans le sens des intérêts de notre pays et favoriserait un nouveau développement des solidarités politiques et militaires en Europe.
Mais, pour l'heure, nous ne pouvons pas voter ces trois projets de ratification. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le groupe de l'Union centriste votera unanimement les trois projets de loi autorisant l'accession de la Pologne, de la Hongrie et de la République tchèque à l'Alliance atlantique.
Nous approuvons l'argumentation et l'esprit de l'excellent rapport présenté par notre collègue André Dulait, tout comme nous approuvons la position défendue tout à l'heure par M. le ministre des affaires européennes.
Nous sommes en faveur de cet élargissement de l'OTAN parce qu'il correspond, à notre avis, à une nécessité absolue. Nous sommes cependant conscients des problèmes que peut poser un élargissement sélectif en Europe de l'Est. Nous savons aussi que l'accentuation de l'influence des Etats-Unis qui en résulte rend plus réelles encore les préoccupations relatives à l'identité européenne.
L'élargissement est indispensable parce que la disparition du rideau de fer et la fin de la guerre froide ne doivent pas être considérées comme l'aboutissement d'un processus ; la fin du funeste partage décidé à Yalta, si elle ne conduisait pas à une réunification du continent européen, déboucherait inévitablement sur une multiplication de conflits du type de ceux qui ébranlent les Balkans.
Il faut qu'il y ait, par-delà l'ancienne ligne de séparation entre l'Europe de l'Est et l'Europe de l'Ouest, un maximum de liens, de ponts économiques, politiques, culturels et de défense. Toutes les grandes institutions - cela a été rappelé tout à l'heure - l'ont compris, qu'il s'agisse de l'Union européenne, qui a entamé des négociations en vue de son élargissement, du Conseil de l'Europe, qui englobe aujourd'hui quarante pays de l'Atlantique à l'Oural et un peu au-delà, de l'UEO, qui a fait de dix pays de l'Europe de l'Est des associés partenaires.
L'OTAN ne peut rester à l'écart d'un processus d'unification et de démocratisation, inséparable du légitime souci de sécurité, et cela passe par une politique de sécurité préventive.
Les faits que je viens de rappeler sont autant d'expressions de notre devoir de solidarité à l'égard de l'Europe centrale et de l'Europe de l'Est.
On ne saurait reprocher à la Pologne, à la Hongrie et à la République tchèque de vouloir adhérer à une organisation qui, pendant quarante-cinq ans, a été, il faut tout de même le rappeler, la garante de la préservation de la paix et de la liberté en Europe occidentale.
Cela étant, il est évident que l'entrée de trois nouveaux pays dans l'OTAN, alors que beaucoup d'autres pays candidats sont maintenus à l'extérieur, peut effectivement poser problème. Un sentiment d'insécurité fait éprouver à ces autres pays le besoin de ne pas rester à l'écart d'organisations qui leur garantissent sécurité et paix. Je pense, en particulier, aux pays Baltes, qui ont payé - toute annexion est douloureuse - un lourd tribut aux cours du dernier demi-siècle, qui comptent d'importantes minorités russes et qui connaissent de ce fait des tensions génératrices d'inquiétude.
L'OTAN a su remédier à cette situation en créant un deuxième cercle grâce au Conseil du partenariat atlantique, et grâce aussi à une charte de partenariat entre les Etats-Unis et les pays Baltes.
Psychologiquement rassurant, ce lien entre l'OTAN et les candidats non admis laisse peut-être présager un élargissement ultérieur. Nous ne devons pas leur fermer notre porte.
Le cas de la Russie est particulier. Tout doit être fait pour éviter que la Russie ait le sentiment d'une mise à l'écart et d'un isolement. Elle fait partie de l'Europe et elle doit être traitée comme telle. Elle y a sa place ; le Conseil de l'Europe l'a clairement reconnu en l'admettant comme membre en 1996. J'ai, ce jour-là, voté sans réserve pour son admission au sein de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.
En concluant en 1997 une charte spécifique avec la Russie, l'OTAN s'est inspirée des mêmes principes.
Cela rend d'autant plus opportune l'approbation de l'élargissement de l'OTAN puisque la volonté, non agressive à l'égard de la Russie, de l'alliance que représente l'OTAN, est ainsi démontrée.
Ma dernière remarque concerne un sujet déjà évoqué par l'ensemble des intervenants : la compatibilité entre l'accentuation de l'influence des Etats-Unis liée à l'élargissement de l'OTAN et la quête de l'identité européenne sur le plan de la défense.
Le rapporteur a affirmé tout à l'heure à juste titre que « le rééquilibrage des responsabilités entre Européens et Américains au sein de l'Alliance reste à faire » et que, « en entrant dans l'OTAN, les nouveaux membres semblent souscrire davantage à une garantie américaine qu'à une protection européenne ».
On peut, on doit regretter cet état de choses, mais on doit constater que l'Europe n'a pas su, dans l'ex-Yougoslavie, démontrer sa capacité d'intervenir efficacement seule pour rétablir la paix sur son propre continent. Et nous sommes, hélas ! encore loin de discerner son aptitude à mettre au point une politique de défense véritablement européenne.
On peut déplorer que l'élargissement de l'OTAN conduise de nombreux pays européens à recourir à des équipements de défense américains, faute d'une politique européenne suffisamment intégrée ; notre collègue M. Jacques Chaumont, en particulier, a abordé ce sujet.
Face à ce constat, il faut que l'Europe réagisse et qu'elle accélère le processus de mise au point d'une Europe politique, d'une Europe de défense, d'une Europe de sécurité. Seule cette avancée lui permettra de rétablir son influence par rapport à celle des Etats-Unis. On ne peut à la fois refuser l'élargissement de la zone d'influence de l'OTAN et s'opposer à un renforcement de l'intégration de l'Union européenne.
Telles sont les considérations qui conduisent notre groupe à approuver l'accession de nouveaux pays au traité de l'Atlantique Nord.
Il y a dix ans, personne n'y aurait cru. Aujourd'hui, la ratification qui nous est proposée représente un grand espoir. Elle est synonyme d'une liberté et d'une démocratie retrouvées, reconquises. Elle illustre le rétablissement de liens de confiance entre trois pays d'Europe centrale et l'Europe occidentale. Elle représente une étape importante sur la voie qui doit mener à l'unité de l'Europe.
Les gouvernants et les peuples de l'Europe de l'Est, en particulier de la Pologne, de la Hongrie et de la République tchèque, nous tendent la main. Sachons leur donner la nôtre ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'an dernier, au cours du sommet d'Amsterdam, marqué par l'incapacité des Quinze à réformer leurs institutions, était venue d'outre-Atlantique l'annonce brutale de la liste des pays de l'Est pouvant prétendre adhérer à l'OTAN : Pologne, République tchèque, Hongrie. Cette adhésion est aujourd'hui soumise à notre approbation.
Cette décision unilatérale n'était pas étonnante. Elle était même prévisible puisque cette première vague correspond aux intérêts stratégiques et économiques des Etats-Unis.
Cette décision illustre également le résultat de quarante années d'atlantisme dans le domaine de la sécurité européenne, à savoir la stérilisation politique des Européens.
Ces remarques préliminaires suffisent à cerner les véritables enjeux de l'élargissement de l'OTAN à l'Est et les risques qu'il comporte pour la sécurité européenne.
Fondé sur une conviction erronée qui veut que le monde de demain sera toujours constitué d'ennemis « classiques » et que, à ce titre, « il faut préparer la guerre pour sauvegarder la paix », ce projet, alimenté par certains mythes, permet de rassurer les pays d'Europe centrale et orientale face à un ennemi tout désigné : c'est la « menace russe ».
Devant l'indifférence et le silence des Européens, il apparaît urgent de débattre sérieusement de l'avenir de la sécurité européenne afin d'éviter que certains processus, véritables contresens historiques, que d'autres appellent « erreur historique », ne soient achevés. Si l'étude de ces conventions aujourd'hui nous met devant le fait accompli, elle donne néanmoins l'occasion de développer quelques éléments de réflexion.
Après avoir hésité un temps, sous l'effet Gorbatchev, les Américains ont décidé de maintenir une force militaire en Europe, aussi nombreuses qu'en Asie, au moment même où l'Amérique se tournait vers le Pacifique, après la disparition de l'URSS. L'Amérique prend alors conscience de l'importance stratégique et économique que revêt une implantation durable en Europe, continent en voie d'unification et de pacification. Malgré les protestations régulières de Moscou, les Américains proposent l'élargissement de l'OTAN à l'Est, sous la pression des minorités d'Europe centrale présentes aux Etats-Unis, mais également sur les conseils du Pentagone et de la CIA.
La nouvelle secrétaire d'Etat, Mme Albright, d'origine tchèque, l'a d'ailleurs réaffirmé avec force, l'élargissement à l'Est de l'OTAN sera le grand chantier de la diplomatie américaine. Devant la commission des affaires étrangères du Sénat américain, elle a clairement affiché ses ambitions : « faire en sorte que l'Amérique reste une puissance européenne » !
Officiellement, bien sûr, il s'agit d'étendre à l'Est la sécurité et la stabilité que connaît l'Europe de l'Ouest, mais les objectifs souterrains de la diplomatie américaine sont davantage de nature économique et technologique. La sécurité des pays d'Europe centrale et orientale n'est pas, pour l'instant, menacée par l'armée russe, au regard de ses résultats en Tchétchénie. Jamais les pays d'Europe centrale et orientale n'ont été dans un environnement régional aussi pacifique ; les menaces qui pèsent sur ces Etats sont internes et sont liées à leur évolution politique et économique, mais aussi aux exigences des minorités nationales ainsi qu'à la sécurité nucléaire et à la lutte contre les mafias.
A cet égard, l'adhésion à l'Union européenne, communauté de sécurité et de prospérité depuis cinquante ans, répond davantage à ces défis, la crise albanaise nous l'a prouvé tragiquement. Il faut également souligner que Washington se contente d'un élargissement à l'Est limité à trois pays. Leur adhésion à l'OTAN ne leur apportera aucune garantie supplémentaire en termes de sécurité. Pourtant, ce mythe, entretenu par Washington, est à l'origine de l'enthousiasme de ces pays à l'égard de l'Alliance.
En revanche, les pays d'Europe orientale, comme les pays Baltes, la Roumanie ou l'Ukraine, sont rejetés dans une zone grise qui ne leur assure aucune stabilité. Boris Eltsine a rappelé, lors du récent G 8, que ces pays se situaient au-delà d'une ligne rouge qu'il ne fallait pas franchir.
Il faut donc croire que le souci de Washington est non pas tant la sécurité de ces pays que leur dépendance politique et technologique à l'égard de l'OTAN, donc du commandement américain. Quant au coût de cet élargissement, on peut se demander si ces sommes n'auraient pas pu être utilisées pour le développement économique de l'Europe de l'Est et de la Russie.
D'autre part, en poussant les frontières de l'OTAN à l'Est, on maintient, malgré les gages offerts aux Russes, la Russie dans sa fonction d'« ennemi potentiel ». On s'attaque donc aux effets ; on prétend répondre aux inquiétudes des pays d'Europe centrale et orientale quant à l'éventuelle agressivité des Russes à leur égard, mais on ne s'attaque pas aux racines de cette menace que sont le contrôle du pays par les mafias et l'appauvrissement de la population.
Au cours du débat au Sénat américain, à la fin du mois d'avril, de nombreuses personnalités, élus démocrates, diplomates, journalistes et historiens, ont mis en exergue cette contradiction de l'élargissement : un but affiché mais une voie inadaptée. Ainsi, M. Cohen, fondateur du groupe des hommes d'affaires pour des priorités sensées, coalition de plus de quatre cents cadres dirigeants soucieux de l'avenir des écoles et des villes américaines, a posé la seule question qui vaille : pourquoi les Etats-Unis élargiraient-ils une alliance née de la guerre froide contre une Russie qui veut faire partie de l'Europe occidentale, quand toutes ces ressources et toutes ces énergies pourraient être utilisées bien plus efficacement chez soi et ailleurs, à l'étranger ?
En fait, la prévention de cette poudrière russe voudrait que l'on établisse un plan de stabilisation économique, un programme de coopération policière et militaire contre les mafias, un traité supplémentaire sur le désarmement conventionnel et nucléaire et, dans le cadre de l'OSCE et non de l'OTAN, une charte régissant les relations entre les Etats européens et nord-américains, tout cela avec des mécanismes de prévention des conflits et, bien entendu, dans le respect de règles de bon voisinage.
La détermination de Washington dans sa conquête des marchés extérieurs des armements - les Français rappelons-le, viennent de perdre le marché de fourniture d'avions de combat aux Emirats arabes unis - prouvent que les Américains ne sont pas dans cette logique du désarmement. Au contraire, ils participent ainsi au surarmement de certaines régions, futurs foyers d'instabilité. Ils sont même incapables de lutter contre la prolifération nucléaire ; il est vrai qu'il est plus facile de faire pression sur l'Irak que sur l'Inde ou le Pakistan. Leur volonté d'étendre l'OTAN à l'Est illustre également leur souci de légitimer l'existence d'une alliance militaire qui n'a d'autre objet que de soutenir la restructuration de ses industries de défense et la sophistication des armements.
Les pays du groupe de Visegrad destinés à devenir membres de l'Alliance d'ici à 1999 sont les seuls à réussir leur transition économique. Devenus solvables et devant renouveler leur outil militaire, ils constituent un important marché pour les industries de défense d'outre-Atlantique, en quête de nouveaux contrats. Ils représentent par ailleurs plusieurs centaines de milliers d'emplois. Rien que dans le secteur des avions de combat, le marché à l'Est, dans les quinze années à venir, est estimé à plusieurs centaines d'appareils.
L'enjeu central de l'élargissement de l'OTAN à l'Est est donc bien d'ordre commercial et technologique, car toute alliance militaire entraîne de facto une certaine standardisation des équipements pour assurer l'interopérabilité des différentes armées qui la composent. Si la situation avoisine le quasi-monopole au niveau du fournisseur, elle engendre une dépendance politique. L'absence de diversification des matériels militaires constitue en effet un handicap et limite les marges de manoeuvre diplomatique du pays concerné. Après quarante années d'atlantisme, les pays d'Europe de l'Ouest disposent d'un matériel fortement américanisé ; certains d'ailleurs, il faut le dire, n'ont plus d'industrie de défense.
La lucidité et l'intelligence des Européens auraient dû les conduire à faire de l'OTAN le « bras armé » d'une OSCE aux pouvoirs étendus et offrant un rôle de partenaire, et non d'ennemi, à la Russie. Enfermées dans de vieux schémas hérités d'un glorieux passé diplomatique, les nations européennes ont préféré vivre dans la nostalgie et le confort de la tutelle américaine.
L'Acte fondateur signé à Paris entre l'OTAN et la Russie donne ainsi toute sa légitimité à cet élargissement, sans que l'on ait réfléchi aux conséquences des compensations offertes aux Russes. Ainsi, l'impuissance des Européens à gérer les situations de crise en Europe sert les Américains dans leur quête d'utilité pour l'OTAN et la prévention des conflits permet de légitimer noblement un processus aux desseins souterrains moins diplomatiques. La France, bien seule dans sa croisade pour l'émancipation de l'Union européenne, doit désormais poursuivre son combat au sein de l'Alliance. C'est la seule possibilité pour notre pays de préserver son indépendance politique et technologique tout en offrant une alternative européenne crédible.
Conscient du symbole que cette adhésion représente pour ces trois pays amis, je ne voterai pas contre ces conventions. Pour autant, persuadé que ce processus est prématuré et inadapté face aux impératifs de la sécurité européenne, je m'abstiendrai à titre personnel. Le groupe des Républicains et Indépendants, soucieux d'assurer l'adoption de ce texte, le votera.
M. Emmanuel Hamel. Vous ne serez pas le seul à vous abstenir !
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, après avoir souligné le grand intérêt des propos qui viennent d'être tenus, j'aimerais rappeler, mais chacun ici s'en souvient, que le processus d'élargissement de l'Alliance atlantique résulte d'un accord politique engageant la France qui a été conclu, en notre nom, par le chef de l'Etat, voilà un peu moins d'un an, lors du sommet de Madrid. C'est de cela que nous discutons en cet instant.
Répondant notamment à M. About, j'insisterai sur le fait que l'adhésion à l'Alliance atlantique correspond à une volonté déterminée des trois pays concernés. Aussi est-il un peu vain d'affirmer à cette tribune qu'ils se trompent, d'autant que, même indépendamment de la plus élémentaire courtoisie diplomatique, il n'y a aucune raison de penser que les dirigeants de ces trois pays, et leurs oppositions respectives, font preuve d'une totale myopie sur la sécurité européenne et que quiconque ici sait mieux qu'eux quelles garanties et quelles alliances politiques ils doivent conclure pour assurer leur sécurité et leur avenir.
Je veux ajouter un argument à ceux qui ont été exprimés, souvent sur un ton très amical, en faveur de ces trois pays. Dans les facteurs qui ont présidé à leur choix en faveur de l'adhésion à l'OTAN, le souvenir de quarante et quelques années de souveraineté limitée a sans doute été déterminant. Pour certains, de surcroît, des siècles de déchirements font que le sentiment ou la réalité de la souveraineté limitée remontent loin dans l'histoire. On comprend qu'ils aient eu pour motivation profonde le souci de ne pas s'exposer à nouveau à un tel risque. A ce moment-là, monsieur About, le risque se calcule non pas sur dix ans mais sur une beaucoup plus longue durée.
Monsieur Chaumont, même si tous les parlements des pays alliés ne se sont pas encore prononcés, les Européens n'ont pas jusqu'à présent mesuré leur assentiment sur cet élargissement. Ainsi, contrairement à ce que j'ai pu entendre, le Sénat italien s'est-il déjà prononcé en faveur de l'élargissement, et à la quasi-unanimité.
Nous avons notre place à prendre dans un processus d'évolution de l'Alliance qui ne doit pas être considérée comme un moindre mal, comme une concession nécessaire, comme, au fond, la réaction un peu sceptique à une mode passagère.
Nous souhaitons sincèrement accueillir ces nouveaux alliés et nous entendons aussi poursuivre l'élargissement de l'Alliance atlantique à d'autres pays qui sont candidats.
Quant à la signification de notre rapport stratégique aux Etats-Unis, sur laquelle, je pense, nous reviendrons, je voudrais rappeler, parce que cela n'a pas encore été fait, que le Sénat américain a débattu d'un amendement tendant à l'introduction d'un moratoire dont l'adoption aurait eu pour effet de bloquer pour trois années tout nouvel élargissement de l'Alliance à d'autres pays européens. Cet amendement a été repoussé sans ambiguïté par le Sénat américain, l'administration américaine ayant également nettement pris position contre. Je ne crois donc pas que la poursuite de l'élargissement de l'Alliance, au cours des mois ou des années qui viennent, soit une bataille perdue. Nombre de nos alliés savent que ce sera l'un des sujets clés du sommet de Washington, qui se tiendra l'année prochaine. Par conséquent, sur ce sujet, la France ne court aucun risque d'isolement au sein de l'Alliance.
Il m'apparaît judicieux de revenir un instant sur les discussions avec la Russie en relation avec ce processus d'élargissement. Il est vrai que, en Russie, les pouvoirs publics, au sens large, affichent une certaine réticence, voire une opposition à cet élargissement. Il faut, toutefois, faire la différence entre certains propos tenus dans le cadre du débat démocratique en Russie et qui, à ce titre, sont respectables mais n'engagent pas les autorités russes, et le comportement extrêmement responsable et mesuré du président et du gouvernement russes, en fait des gouvernements russes successifs.
Certes, quand tout se passe bien, cela ne fait pas l'actualité. A nous donc d'aller un peu plus loin, ce que le Sénat, notamment sa commission des affaires étrangères, fait avec beaucoup de discernement. Mais enfin, depuis que les textes sur l'Acte fondateur entre la Russie et l'OTAN ont été signés, ils ne sont pas restés lettre morte. A chaque activité de l'Alliance, à chaque réunion s'instaure un véritable partenariat avec la Russie, ce qui veut dire que les autorités de ce pays en voient tout l'intérêt. Il y a eu non pas gel des relations entre les pays de l'Alliance atlantique et la Russie en matière de sécurité dans la région Europe au sens large depuis le début du processus d'élargissement, mais, au contraire, dynamisation.
Il faut avoir la lucidité de reconnaître aujourd'hui que ce sujet de l'élargissement, pour ceux qui conduisent effectivement la politique étrangère et de sécurité de la Russie, est derrière nous, derrière eux, et que l'on parle d'autre chose.
Donc, je ne crois pas que l'élargissement puisse aujourd'hui être perçu comme une pomme de discorde qui contrarierait tout développement de coopération et de politique négociée entre la Russie et les pays européens, notamment le nôtre. J'ai, au contraire, la conviction que, à travers le développement du partenariat avec la Russie, cela sera un facteur de dynamisme.
Bien sûr, nous gardons l'originalité de notre position au sein de l'Alliance. Il est logique que, dans une assemblée pluraliste comme la vôtre, riche de nombreux experts en politique internationale, s'expriment des visions quelque peu variées, voire contrastées, sur cette position.
Je voudrais souligner mon accord avec le rapporteur, M. André Dulait, qui a finement décrit la position actuelle de la France au sein de l'Alliance. Cette position est dynamique et, comme le suggérait le président de Villepin, nous sommes en train, en effet, de créer de nouvelles habitudes de dialogue et d'initiatives communes au sein de l'Alliance, qui préservent notre souci d'autonomie stratégique et qui ne nous empêchent pas d'être partie prenante, avec nos alliés, dans des actions contribuant à la sécurité européenne.
Ce n'est pas simplement de la théorie, c'est ce que nous faisons chaque jour en Bosnie. Ce n'est pas simplement par complaisance que tous nos alliés, qu'ils soient américains ou européens, soulignent l'importance de l'apport français au dispositif de la force de stabilisation en Bosnie. Nous y avons réussi. Tout en gardant notre position distincte par rapport à l'organisation militaire, nos hommes ont démontré, sur le terrain, la capacité de la France d'être côte à côte, efficace pour lutter contre des dangers et surmonter une crise, dans un théâtre difficile comme la Bosnie.
De même, nous sommes partie prenante dans le nouveau concept des groupes de forces interarmées multinationales, les GFIM, qui sont, en réalité, des esquisses d'états-majors de crise correspondant à des zones de troubles en Europe. L'accord politique pour le traitement de crises sous l'autorité de l'UEO avec les structures de commandement de l'OTAN est, à nos yeux, un acquis important de la dynamique européenne au sein de l'Alliance, et nous participons au travail de mise en oeuvre de cet accord.
S'agissant de la place de l'Europe, globalement, dans l'Alliance, on peut bien sûr accumuler les témoignages d'insatisfaction ; j'y reviendrai. Je centrerai plutôt mon propos sur l'état des discussions au sein de l'Alliance sur un certain nombre de sujets concrets et sur la disponibilité des différents partenaires.
Bien entendu, il peut y avoir des différends sur le concept stratégique, heureusement ! Le concept stratégique amène l'ensemble des pays de l'Alliance à s'intéresser aux problèmes de sécurité et de crises possibles dans leur environnement, et d'abord sur leur continent, au cours des dix ou vingt années à venir. C'est un vrai sujet de débat, qui s'est d'ailleurs engagé dès cette année.
Sur de nombreux sujets, les positions des Européens sont contrastées. Ce serait caricaturer et s'adonner à un pessimisme finalement générateur d'inaction que de croire que tous les Européens, hors la France, sont d'avance alignés sur toutes les propositions des Etats-Unis et n'ont plus aucune capacité d'initiative politique. Au contraire, cela donnera à la France une capacité créative mais ne la placera en aucun cas dans une position d'isolement, en situation de prêcher dans le désert.
Le débat sur le concept stratégique de l'Alliance sera riche et varié, et les positions ne sont pas écrites à l'avance. C'est déjà une façon de reconnaître que l'Europe y tiendra une place significative.
Il est vrai que, aujourd'hui, aucun Etat ne s'est engagé. Certains préconisent un élargissement, difficilement contrôlable, des capacités d'initiative de l'Alliance dans la gestion des crises. Ils se heurtent à la position très stricte que la France a adoptée et qui tend à préserver la primauté du Conseil de sécurité à l'égard de tout mandat politique de traitement d'une crise en dehors de l'article 5, c'est-à-dire du territoire des pays concernés. Nous ne serons pas non plus isolés sur ce sujet et plusieurs pays européens, même s'ils ne sont pas nécessairement membres permanents du Conseil de sécurité, par souci de préserver l'équilibre mondial et de ne pas voir l'Europe s'isoler, notamment des continents voisins, défendront une position analogue.
Le coût économique global de l'adhésion, sur lequel le Gouvernement s'est engagé en informant le Sénat, est de 9 milliards de francs. Il sera réparti entre l'ensemble des partenaires ; vous connaissez la clé de répartition. Après une période qui, comme l'a laissé entendre M. le rapporteur, était un peu pittoresque en matière d'évaluation des coûts de l'élargissement, on est aujourd'hui en possession de chiffres très réalistes. La position française, partagée par plusieurs de nos alliés européens, selon laquelle ce coût peut être absorbé par redéploiements, est crédible. C'est certainement celle qui sera appliquée.
Pour les pays adhérents, cela suppose, bien sûr, par rapport à la situation actuelle, une augmentation de leur effort financier en matière de défense. Voilà dix ans ou douze ans, la comparaison n'aurait peut-être pas été dans le même sens. En effet, dans le cadre du Pacte de Varsovie, ces pays étaient soumis à un très lourd effort financier de défense. Aujourd'hui, dans leur réorganisation économique, ce coût est réduit.
Je voudrais souligner, cela a d'ailleurs été dit par plusieurs d'entre vous, que ces pays connaissent, dans le même temps, une croissance rapide. Nous savons tous, en égrenant année après année les discussions budgétaires, que lorsqu'un pays est en situation de croissance il dispose de marges pour renforcer certaines de ses capacités budgétaires, qui peuvent bénéficier à la défense comme à d'autres fonctions collectives.
Certes, ces pays vont constituer des marchés de défense nouveaux.
Dans les discussions que nous avons avec les représentants des trois pays nouvellement adhérents, nous percevons bien que la charge de modernisation de certains de leurs équipements, notamment des plus lourds, va être étalée dans le temps. D'ailleurs, les normes de l'OTAN permettent de garder pendant une assez longue période certains matériels qui font aujourd'hui partie des équipements de défense de ces pays.
Donc, je ne crois pas que, par rapport à ce que représentent globalement les marchés de défense européens, l'introduction de la Pologne, de la Hongrie et de la République tchèque dans des marchés de renouvellement change radicalement la donne. Si on doit faire preuve de vigilance à l'égard des pays européens qui achètent du matériel américain, cela ne concerne pas uniquement les trois pays nouvellement adhérents à l'Alliance, car c'est le cas de beaucoup de pays alliés, et depuis longtemps.
Nous avons, au contraire, la conviction que les trois pays regardent avec beaucoup d'attention et de vigilance non seulement les coûts, mais aussi les dépendances technologiques que peuvent entraîner leurs décisions en matière de renouvellement de matériels. Au côté d'autres alliés européens, je pense que nous pourrons faire des propositions de renouvellement d'équipements de défense à ces pays qui ne tourneront pas nécessairement à la confusion pour les entreprises européennes.
Je voudrais m'associer aux propos du président de Villepin et de M. Estier sur la nécessité de progresser dans l'organisation d'une industrie de défense européenne. Mais, vous le constatez, nous sommes en train de prendre des initiatives et de réaliser des avancées en ce domaine.
Pour que, à l'avenir, l'équilibre des forces dans l'Alliance atlantique soit plus compatible avec nos souhaits, il faudrait une volonté européenne accrue. Je crois, comme M. Hoeffel, que cette volonté doit être partagée. J'ai entendu avec beaucoup d'intérêt et de sympathie l'expression de la tradition gaulliste telle que l'a prononcée tout à l'heure M. Jacques Chaumont, mais alors il faut parler de partages de souveraineté. Si nous voulons une vraie Europe de la défense, cela suppose que nous acceptions de franchir le pas des partages de souveraineté. Si, dans la comparaison d'efficacité, que M. Bécart a évoquée tout à l'heure, entre l'OTAN et l'OSCE, au début des années quatre-vingt-dix, les pays concernés ont eu le sentiment d'opter pour la crédibilité et la sécurité en choisissant l'OTAN, c'est parce que l'Alliance atlantique, même si elle n'est pas équilibrée entre les différentes puissances, est un véritable lieu de partage de souveraineté.
Si l'Europe pense pouvoir progressivement prendre plus d'importance et d'autonomie dans la définition de ses objectifs et de ses moyens de défense au sein d'un ensemble euro-atlantique, il faut que tous ses membres, nous y compris, soient disposés à des partages de souveraineté. Cette idée fait, me semble-t-il, son chemin, grâce à l'euro, grâce aux politiques économiques de plus en plus partagées et grâce à des volontés politiques qui s'expriment notamment face aux crises. Le conflit en Bosnie a certainement fait prendre conscience à nombre d'Européens de la nécessité de s'engager ensemble et, par conséquent, de ne pas être sûrs d'avoir raison seul contre tous les autres Européens.
Nous sommes donc en bonne voie pour aller vers ce rééquilibrage.
Je voudrais, au nom du Gouvernement, démentir les propos un peu pessimistes selon lesquels on est plus loin que jamais de l'Europe de la défense. Je ne crois pas que ce soit le cas.
Ce qui est en jeu aujourd'hui, c'est la confirmation de notre lien d'amitié et de confiance avec les trois pays qui ont souhaité et négocié cette adhésion à l'Alliance. A cet égard, la commission a bien fait, en plus de tout le travail de préparation qu'elle a accompli, de souligner l'importance de cet engagement en demandant un scrutin public sur le choix qui va maintenant intervenir. C'est une décision politique majeure. Le Parlement se prononcera ainsi en toute responsabilité sur cette évolution significative de l'architecture de la défense européenne.
Répondant à la suggestion de M. Estier, je dirai que le Gouvernement entend poursuivre le dialogue avec les deux chambres du Parlement sur la suite de l'évolution de l'Alliance atlantique, parce qu'il en va en effet de nos intérêts en matière de sécurité et de notre participation au nouvel équilibre mondial. Comme aujourd'hui, le Sénat continuera à faire du bon travail en réfléchissant sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...

La discussion générale commune est close.

PROJET DE LOI RELATIF À LA RÉPUBLIQUE DE HONGRIE

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi autorisant la ratification du protocole au traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Hongrie.
« Article unique . - Est autorisée la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Hongrie, signé à Bruxelles le 16 décembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Je vais mettre aux voix l'article unique.
M. Christian de La Malène. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. de La Malène.
M. Christian de La Malène. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les trois projets de loi dont nous sommes saisis m'ont plongé et me plongent toujours dans une grande perplexité, à la fois pour des raisons de forme et de fond, les deux d'ailleurs se rejoignant.
Il s'agit, nous l'avons senti tout au long du débat et nous le savions d'ailleurs, de questions tout à fait fondamentales pour l'avenir de notre pays, pour la paix, la sécurité, l'avenir du continent et les rapports avec la Russie. Et voilà que ces questions fondamentales ont été traitées sur une feuille recto verso ! Cela me paraît un peu léger pour des questions aussi lourdes de conséquences pour notre avenir. Mais mon ami Jacques Chaumont ayant traité ce sujet, je n'y reviendrai pas.
Je voudrais féliciter M. le rapporteur d'avoir, contrairement à ce que fait le projet de loi, abordé relativement longuement les questions de fond qui sont posées.
J'ai écouté attentivement le débat, et je remercie MM. les ministres d'avoir fait un effort pour apporter les explications et les réponses qui ne figuraient pas dans les documents dont ils nous avaient saisis.
Il demeure que l'organisation de ce débat au Parlement n'est pas à la mesure de l'enjeu, et je le regrette.
Je rappellerai quatre questions fondamentales.
La première question porte sur la répartition des responsabilités au sein de l'OTAN. Depuis des années, la France demande sans succès qu'il y ait une amélioration à cet égard, compte tenu de la transformation du monde. En fait, on va élargir sans rien changer ! Je ne suis pas contre les élargissements, mais je suis contre le statu quo des responsabilités. Or, l'élargissement, que vous le vouliez ou non, n'est qu'une confirmation du statu quo . Telle est ma première question ; elle n'a pas de réponse.
La deuxième question concerne la place de la sécurité, de la défense européenne dans ce schéma. Il est question sans doute de défense ; il est même question de défense en Europe ; mais il n'est pas question de défense de l'Europe. Il n'est pas place, dans ce débat, pour ce pour quoi la France essaie de se battre, c'est-à-dire pour faire naître, par tous les moyens, à tous les niveaux, le point de départ d'une défense non pas en Europe, mais de l'Europe. Or, nulle référence n'est faite, dans ce document, à l'Europe, à l'UEO. C'est ma deuxième question, elle demeure aussi sans réponse.
La troisième question vise ce que l'exposé des motifs du projet de loi appelle un accord « historique », qualificatif avec lequel je suis d'accord. C'est le partenariat russo-OTAN, que j'appellerai plutôt « américano-OTAN », compte tenu de la situation des responsabilités au sein de l'Alliance, situation qui ne change pas et ne s'améliore pas. Certes, cet accord est historique ; mais où cela va-t-il nous mener ? Quelle liberté restera-t-il à l'Europe ? On peut et on doit s'interroger à cet égard, sans conclure trop vite. L'Europe n'a pas besoin de tutelle, elle n'a pas besoin de condominium.
La quatrième et dernière question a déjà été évoquée longuement par M. le rapporteur. Comment faire en sorte que cette OTAN, qui se modifie non pas dans ses responsabilités mais dans sa dimension et dans ses concepts, n'occupe pas progressivement sur la planète toute la place diplomatique et militaire ? Au service de qui ? Au service de quoi ? Il y a là un grave problème pour la paix.
Je ne suis pas contre les élargissements et j'y serais même plutôt favorable. Mais ils posent des problèmes très graves. Par conséquent, n'ayant pas reçu de réponse satisfaisante à mes quatre questions, je ne pourrai quem'abstenir lors du vote de ce texte. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Habert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, tout a été dit sur ce sujet important. Nous en remercions tout spécialement le rapporteur, M. Dulait, et le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. de Villepin.
Nous saluons également le fait que deux ministres aient bien voulu se déplacer et venir parmi nous pour apporter les éclaircissements que nous demandions. Je n'ajouterai donc rien à ce qui a été exposé, à l'exception d'une remarque.
Parlant sous le contrôle de M. Chaumont, président de notre groupe d'amitié France-Russie, je rappellerai la visite, voilà cinq jours seulement, de M. Egor Stroev, président du Conseil de la Fédération de Russie, et de plusieurs conseillers, équivalents des sénateurs, de ce grand pays.
Ils nous ont fait part de leur perplexité, d'abord, de leur mécontentement, ensuite, et de leurs inquiétudes à certains égards, enfin, face au développement de l'Alliance atlantique et à son extension jusqu'à leur frontière, sur le pas de leur porte !
C'est vrai pour les pays que nous admettons aujourd'hui, tout particulièrement pour la Pologne. Mais ce sera plus vrai encore, demain, si certains autres pays, comme la Roumanie, sont admis dans cette alliance.
Au moment où nous allons ratifier ce traité, il faut que nous entendions les appréhensions qui nous sont exprimées et les observations qui nous sont faites. Les Européens que nous sommes n'ont aucune hostilité envers la Russie nouvelle, au contraire ! Nous formons des voeux pour sa démocratisation et pour la reprise de rapports normaux avec ce grand pays.
Nous voulons être sûrs que tous les partenaires de l'Alliance atlantique se trouvent dans les mêmes dispositions. Il nous revient à nous, Français, de veiller en particulier à ce qu'il en soit ainsi.
Je voudrais donc dire ici à nos amis russes que nous ne voudrions à aucun moment qu'ils ressentent comme la moindre menace, comme la moindre hostilité, les développements de l'Alliance atlantique qui vont s'effectuer. Telle est la recommandation que je voudrais faire.
Il va sans dire que les sénateurs non inscrits voteront avec la grande majorité du Sénat pour la ratification des trois traités que nous examinons.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 91:

Nombre de votants 317
Nombre de suffrages exprimés 315158
Pour l'adoption 299
Contre 16

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste. - M. le président de la commission et M. le rapporteur applaudissent également.)

PROJET DE LOI RELATIF À LA RÉPUBLIQUE DE POLOGNE

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi autorisant la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Pologne.
« Article unique. - Est autorisée la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Pologne signé à Bruxelles le 16 décembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

PROJET DE LOI RELATIF À LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi autorisant la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République tchèque.
« Article unique. - Est autorisée la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République tchèque, signé à Bruxelles le 16 décembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

5

TRAITÉ D'AMITIÉ, D'ENTENTE
ET DE COOPÉRATION AVEC L'AZERBAÏDJAN

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 349, 1997-1998) autorisant la ratification du traité d'amitié, d'entente et de coopération entre la République française et la République d'Azerbaïdjan. [Rapport n° 420 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le traité d'entente, d'amitié et de coopération entre la République française et la République azerbaïdjanaise a été signé en décembre 1993 à l'occasion de la première visite officielle en France du Président Heïdar Aliev, qui préside toujours aux destinées de ce pays. Presque simultanément, des traités similaires ont été signés avec l'Arménie et la Géorgie.
Il paraît aujourd'hui nécessaire de mener à bien la procédure de ratification de ce traité, marqué en particulier par deux éléments.
Tout d'abord, le Gouvernement a entrepris de relancer nos relations politiques avec l'ensemble de la région du Sud-Caucase. Les visites de haut niveau, longtemps absentes de notre dialogue bilatéral avec les pays de cette région, se sont récemment multipliées : ainsi, en 1997, nous avons reçu en visite officielle les présidents Aliev, Chevardnadze et Ter-Petrossian.
Le Président de la République se rendra en République azerbaïdjanaise et dans les deux autres Etats du Caucase du Sud en septembre 1998. Ce sera la première visite d'un chef d'Etat français dans cette région.
Nous marquons ainsi notre intérêt et notre amitié pour les pays de cette région. Je salue d'ailleurs la présence dans nos tribunes de Mme l'ambassadeur d'Azerbaïdjan. (Applaudissements.)
En second lieu, le développement de nos relations bilatérales est favorisé par le maintien, depuis près de quatre ans, d'un cessez-le-feu entre Arméniens et Azerbaïdjanais dans le conflit du Haut-Karabagh et par l'ouverture d'un processus de négociation dans lequel nous jouons un rôle actif.
Nous avons en effet répondu à l'appel lancé par l'OSCE, en décembre 1996, pour qu'une impulsion nouvelle soit donnée par la communauté internationale à la recherche d'une solution négociée.
Notre objectif est de réconcilier les deux peuples afin qu'ils tournent leurs efforts vers la construction d'un avenir régional prospère et pacifique.
Sur le plan économique, nous avons conclu un important contrat pétrolier, confiant à nos compagnies Elf et Total l'exploration d'une vaste zone de la mer Caspienne située au large des côtes sud de l'Azerbaïdjan et nous participons, à un moindre niveau, à deux autres contrats pétroliers.
La France est ainsi entrée de plain-pied dans la compétition entre les plus grandes compagnies pétrolières internationales pour l'exploitation des ressources de la mer Caspienne. Cette dernière devrait devenir l'une des grandes régions pétrolières du XXIe siècle, avec des réserves au moins comparables à celles de la mer du Nord.
Par ailleurs, l'Azerbaïdjan devra faire face à des besoins considérables en matière d'industrie parapétrolière, de transport, d'infrastructure urbaine.
Plusieurs de nos grandes entreprises ont déjà présenté des projets, notamment pour l'alimentation en eau de la capitale, la construction d'aéroports, les cimenteries, etc.
Sur le plan culturel, la visite du Président Aliev a permis la signature d'une déclaration commune visant à encourager les actions conjointes en faveur de la langue, de la culture, de la science et de la technologie françaises en Azerbaïdjan, où notre langue est la troisième langue étrangère enseignée, après le russe et l'anglais.
Ce traité d'entente, d'amitié et de coopération, conclu pour une durée de dix ans et renouvelable par tacite reconduction, vise à encourager les contacts réguliers entre les hautes autorités des deux pays. Il prévoit ainsi que les parties se consulteront et s'efforceront d'adopter une position commune en cas de situation représentant une menace pour la sécurité de l'une d'entre elles.
Il conviendra naturellement d'interpréter ce mécanisme dans le cadre de nos responsabilités au sein du processus de négociation, comme coprésident du groupe de Minsk.
Nous menons déjà, dans ce cadre, d'étroites consultations avec l'Azerbaïdjan - comme avec l'Arménie - pour mettre fin au conflit et permettre ainsi à l'Azerbaïdjan de retrouver une situation de paix et de sécurité.
Ce traité mentionne également les différents domaines du développement de notre coopération bilatérale tels que l'agriculture, l'énergie, la culture ou la défense.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle le traité d'amitié, d'entente et de coopération entre la République française et la République azerbaïdjanaise, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce traité d'amitié est l'un des traités classiques que nous mettons en place avec les nouvelles républiques issues du démantèlement de l'URSS en 1991.
Ce traité comporte, bien entendu, comme les autres traités du même type, la mise en place d'un dialogue politique régulier et il est clair que les perspectives d'exploitation du pétrole sont, comme l'a souligné M. le ministre, de nature à intéresser non seulement l'Azerbaïdjan, mais également notre pays.
Les domaines ouverts à la coopération bilatérale sont notamment, comme dans tous les traités similaires, des domaines culturels. A cet égard, la diffusion du français semble déjà assez dynamique et pourrait se développer.
En ce qui concerne la coopération institutionnelle, il nous faut souligner la bonne coopération juridique et judiciaire qui fait l'objet d'une demande de l'Azerbaïdjan.
Nous pouvons également, mes chers collègues, rappeler combien les relations interparlementaires développées par notre collègue Jean Boyer ont été de nature à rapprocher l'Azerbaïdjan et la France. Il est important, à cet égard, de souligner le rôle du groupe d'amitié du Sénat au côté du Président Aliev.
M. Emmanuel Hamel. Juste hommage rendu à notre collègue !
M. André Dulait, rapporteur. S'agissant de la coopération d'ordre économique, ce traité doit encourager le développement des investissements dans un contexte très favorable.
Les ressources pétrolières évoquées tout à l'heure sont de nature à encourager nos entreprises. Nous n'avons pas été présents dans les premiers consortiums, mais nous le sommes valablement dans les derniers. Ce traité d'amitié devrait, précisément, contribuer à l'existence d'un bon climat entre les acteurs économiques.
Ce sont les raisons pour lesquelles votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné, à l'unanimité, un avis favorable à la ratification de ce traité.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Je me réjouis, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que ce texte soit un traité d'amitié car, bien au-delà des relations économiques, il est fondamental d'intensifier les relations d'amitié entre ce noble pays et le nôtre.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique . - Est autorisée la ratification du traité d'amitié, d'entente et de coopération entre la République française et la République d'Azerbaïdjan, signé à Paris le 20 décembre 1993, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

6

ACCORD AVEC LE QATAR SUR L'ENCOURAGEMENT
ET LA PROTECTION RÉCIPROQUES
DES INVESTISSEMENTS
Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 289, 1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat du Qatar sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble une annexe). [Rapport n° 355 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les différents accords d'encouragement et de protection réciproques des investissements proposés aujourd'hui à votre approbation ont pour objet d'établir un cadre juridique sûr, qui permette de favoriser l'activité de nos entreprises.
Les trois textes qui vous sont présentés aujourd'hui sont presque identiques. Ils contiennent les grands principes qui figurent habituellement dans les accords de ce type et qui constituent la base de la protection des investissements, telle que la conçoivent aujourd'hui les pays de l'OCDE. C'est pourquoi j'en rappellerai les principaux traits communs, avant de dire quelques mots sur chacun des pays concernés.
Ces accords contiennent les dispositions suivantes : l'octroi aux investisseurs d'un traitement juste et équitable, conforme au droit international et au moins égal au traitement accordé aux nationaux ou à celui de la nation la plus favorisée ; une garantie de libre transfert des revenus et du produit de la liquidation des investissements ; le versement, en cas de dépossession, d'une indemnisation prompte et adéquate ; la faculté de recourir à une procédure d'arbitrage international en cas de différend ; enfin, la possibilité pour le Gouvernement français d'accorder sa garantie aux investissements que réaliseront à l'avenir nos entreprises dans ces pays.
Comme vous le voyez, les principes auxquels nous sommes attachés et qui fondent la protection des investissements sont inscrits dans les différents textes que nous avons signés.
Je crois également utile de souligner l'intérêt que présentent ces accords dans nos rapports avec les Etats signataires.
Ils procèdent du souci d'offrir la plus grande sécurité possible à nos investisseurs. C'est ainsi que nous avons pu passer des accords de ce type avec plus de soixante-dix autres Etats.
L'accord du 8 juillet 1996 avec le Qatar a été signé avec un Etat dont les ressources en hydrocarbures sont loin d'être négligeables. Ainsi, des entreprises françaises sont impliquées dans l'exploitation du gisement de North Dome, qui représente 6 % des réserves mondiales de gaz naturel, soit le troisième gisement mondial.
Le Qatar constitue pour la France, immédiatement après les Emirats arabes unis, un point d'ancrage important dans la région du Golfe.
Un accord de défense nous lie à ce pays depuis le 1er août 1995 et près de 80 % des principaux équipements et matériels des forces armées qatariennes sont d'origine française.
Enfin l'émir du Qatar, Cheikh Hamad Ibn Khalifa, doit effectuer une visite officielle en France les 2 et 3 juin prochains.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat du Qatar sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, signé à Doha le 8 juillet 1996, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Goulet, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'accord d'encouragement et de protection réciproques des investissements signé le 8 juillet 1996 à Doha entre la France et le Qatar se situe dans la lignée des textes analogues qui nous lient déjà à plus de soixante pays.
Il reprend les clauses habituelles dans ce type d'accord, en particulier sur le traitement « juste et équitable » des investissements étrangers, la protection de ces investissements et la liberté des transferts de revenus qui leur sont liés, ou encore l'indemnisation en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique.
Il s'inscrit également dans le cadre des relations très étroites que le Qatar entretient avec la France depuis plus de vingt ans.
En effet, dès son indépendance acquise, en 1971, le Qatar s'est tourné vers notre pays, en raison tout autant de la francophilie de ses dirigeants que de fortes convergences de vues entre nos deux États ; très préoccupé par la défense de sa souveraineté et soucieux de mener une politique extérieure indépendante, le Qatar s'est souvent reconnu dans les positions françaises sur la scène internationale, particulièrement pour ce qui est des questions relatives au Moyen-Orient.
Ces bonnes relations ont trouvé une traduction privilégiée dans le domaine de la coopération militaire, puisque les quatre cinquièmes des matériels de l'armée du Qatar sont d'origine française, qu'il s'agisse de blindés, de missiles ou d'avions de combat.
C'est surtout dans le domaine économique que nos relations se révèlent les plus prometteuses.
Je rappellerai tout d'abord que, si le Qatar est l'État le moins peuplé des six pays du Conseil de coopération du Golfe, avec un peu plus de 500 000 habitants, il est aussi l'un des plus prospères, grâce à l'exploitation de ses ressources en hydrocarbures.
Si le pétrole fournit aujourd'hui 90 % des revenus du Qatar et lui assure son haut niveau de vie, à l'avenir, l'essentiel des ressources proviendra du gaz naturel. Le champ gazier de North Field, situé dans le Golfe, dont l'exploitation vient à peine de débuter, permet au Qatar de disposer des troisièmes réserves mondiales de gaz naturel, après la Russie et l'Iran.
Dans ce contexte, nos relations commerciales avec le Qatar ont été marquées par une forte progression des exportations françaises, qui sont passées de 700 millions de francs en 1994 à 1,4 milliard de francs en 1996, alors que, sur les seuls six premiers mois de 1997, le milliard de francs était déjà dépassé. Ce sont, bien sûr, les ventes d'équipements liées à l'exploitation gazière et aux industries pétrochimiques qui sont à l'origine de cette progression.
Ces résultats placent la France au rang de septième fournisseur du Qatar, mais le poids des ventes françaises est plus fort car beaucoup de nos produits transitent par les Emirats arabes unis, d'où ils sont réexportés.
Une trentaine d'entreprises françaises sont déjà présentes au Qatar, surtout dans les domaines de l'équipement militaire et des hydrocarbures, et d'autres encore sont en mesure de postuler pour les projets industriels que le Qatar souhaite développer à partir des revenus gaziers.
Je conclurai en soulignant que ces perspectives renforcent l'intérêt d'un accord d'investissement qui doit faciliter l'implication de nos entreprises au Qatar. Il s'agit aussi de consolider les positions de la France dans ce petit pays avec lequel elle entretient des relations traditionnellement étroites et confiantes, que le Président Chirac a d'ailleurs soulignées lors de sa visite au mois de juillet 1996 et qui seront confirmées, vous l'avez dit, monsieur le ministre - et nous n'en doutons pas - lors de la prochaine venue de l'émir du Qatar à Paris.
C'est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à adopter le présent projet de loi.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat du Qatar sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble une annexe), signé à Doha le 8 juillet 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(le projet de loi est adopté.)

7

ACCORD - CADRE DE COOPÉRATION

ENTRE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE

ET LE CHILI

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 259, 1997-1998) autorisant la ratification de l'accord-cadre de coopération destiné à préparer, comme objectif final, une association à caractère politique et économique entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part (ensemble une annexe). [Rapport n° 354 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'accord-cadre de coopération qui vous est présenté aujourd'hui est destiné à préparer, comme objectif final, une association à caractère politique et économique entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part. Cet accord, qui a été signé à Florence le 21 juin 1996, se substituera, dès son entrée en vigueur, à l'accord-cadre de coopération en date du 20 décembre 1990 entre la Communauté et le Chili.
En pratique, il constitue la première phase d'un processus en deux temps. La seconde étape, qui représente un objectif de moyen terme, doit permettre l'établissement d'une association à caractère politique et économique entre la Communauté européenne, ses Etats membres et le Chili.
En termes de calendrier, il est prévu que les parties détermineront, sur la base des travaux effectués dans le cadre du présent accord, l'opportunité et le moment du passage à la deuxième phase, qui fera l'objet d'un nouvel accord.
S'agissant du contenu de l'accord-cadre, son tout premier article, relatif au fondement de l'accord, rappelle que le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'homme constitue un élément essentiel.
Sur le plan politique, l'accord prévoit la mise en place d'un dialogue régulier sur les questions bilatérales et internationales d'intérêt commun.
Dans le domaine commercial, les parties s'engagent à renforcer leurs relations afin de promouvoir le développement et la diversification de leurs échanges. Elles doivent préparer par ailleurs la libéralisation progressive et réciproque de ces échanges.
L'accord vise, en outre, à créer un environnement et des conditions favorables à l'établissement, à terme, d'une association à la fois politique et économique respectant les règles de l'OMC et qui tienne compte de la sensibilité de certains produits.
S'agissant du cadre institutionnel, cet accord-cadre prévoit la mise en place d'un conseil conjoint, au niveau ministériel, chargé de superviser son application. Ce conseil conjoint sera assisté d'une commission mixte et d'une sous-commission commerciale.
Pour la France, qui avait clairement appuyé, dès 1994, le processus de renforcement des relations entre la Communauté et le Chili, l'intérêt de cet accord est d'établir, via l'Union européenne, un lien institutionnel privilégié, assorti d'engagements concrets, avec un pays ayant renoué avec les règles de la démocratie et dont l'économie est aujourd'hui particulièrement dynamique.
De surcroît, le Chili est lié au Mercosur, le Marché commun du Sud, qui compte parmi les ensembles économiques régionaux les plus prometteurs et avec lequel l'Union a conclu un accord de même nature.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les principales caractéristiques de l'accord-cadre de coopération entre la Communauté européenne, ses Etats membres et le Chili, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Goulet, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'accord-cadre de coopération signé le 21 juin 1996, à Florence ; entre le Chili et l'Union européenne aura, comme son intitulé le laisse entendre, un caractère provisoire. Il a pour mission de définir des méthodes et des objectifs en vue d'une grande ambition : l'établissement, à terme, d'une association à caractère politique et économique entre le Chili et l'Union européenne.
La conclusion de cet accord traduit donc l'importance que revêtent, pour l'Europe, l'Amérique latine en général et le Chili en particulier. Ce pays s'implique de plus en plus, désormais, dans les structures commerciales régionales. Ainsi est-il associé au Mercosur, avec lequel l'Union européenne elle-même a d'ailleurs passé, en décembre 1995, un accord interrégional qui présente des caractéristiques comparables à celles que nous examinons concernant le Chili.
L'Union européenne est un partenaire commercial privilégié du Chili. Les échanges entre les deux parties se développent rapidement, permettant au Chili d'obtenir avec l'Europe un excédent commercial substantiel.
A la tête de l'Etat chilien depuis 1993, M. Eduardo Frei a donné la priorité au développement et à la lutte contre la pauvreté. La vie politique chilienne se ressent en effet d'une situation sociale précaire : salaires faibles, forts écarts de rémunérations, législation sociale minimale n'offrant guère de protection aux salariés, chute de la dépense sociale affectant notamment la santé et l'éducation, secteurs où les conflits sociaux se développent depuis deux ans et dans lequels le Président Frei entend investir en priorité.
M. le ministre vient de préciser les objectifs et les principales dispositions de cet accord euro-chilien. Je n'y reviens donc pas dans le détail.
Cet accord est l'occasion d'étendre la coopération actuelle, déjà très active, à de nouveaux domaines tels que les investissements, les services, la propriété intellectuelle, les douanes, les marchés publics, l'information et les télécommunications.
La coopération commerciale euro-chilienne s'appuie sur un flux d'échanges commerciaux qui, depuis 1992, a connu une croissance très significative : plus 70 % en ce qui concerne les importations de produits européens par le Chili ; plus 25 % s'agissant des importations de produits chiliens par l'Union.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on ne peut contester l'intérêt majeur que constituera une libéralisation significative des échanges entre deux ensembles commerciaux parmi les plus dynamiques et les plus prometteurs de la planète. Après l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur, celui qui est conclu avec le Chili souligne un peu plus l'utilité de l'implication européenne en Amérique latine.
Pour ces raisons, j'invite le Sénat à adopter le présent projet de loi.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée la ratification de l'accord-cadre de coopération destiné à préparer, comme objectif final, une association à caractère politique et économique entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République du Chili, d'autre part (ensemble une annexe), fait à Florence le 21 juin 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

8

ACCORD AVEC LE LIBAN
SUR L'ENCOURAGEMENT ET LA PROTECTION
RÉCIPROQUES DES INVESTISSEMENTS

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 288, 1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République libanaise sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres). [Rapport n° 356 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les dispositions générales des accords sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements viennent de vous être exposées ; je ne les répéterai donc pas, s'agissant de l'accord signé avec le Liban le 28 novembre 1996.
Comme vous le savez, nous entretenons depuis très longtemps une relation particulière faite d'amitié, de valeurs et d'intérêts communs avec ce pays.
Depuis la fin des hostilités, le Liban s'est engagé dans une vaste et courageuse entreprise de reconstruction. Nous y avons apporté notre aide financière. La France, avec ses entreprises, se place au premier rang, en termes de parts de marchés, des grands contrats liés à la reconstruction. Nous avons dégagé, en 1997, avec 4,5 milliards de francs, notre quinzième solde commercial excédentaire.
Certes, la situation économique du Liban, marquée notamment par d'importants déficits internes et externes, paraît aujourd'hui fragile. Les autorités libanaises, qui en sont conscientes, sont en train d'engager des réformes de structure.
Symbole des liens particuliers qui unissent nos deux pays, les entreprises françaises sont restées présentes tout au long des affrontements.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord aujourd'hui soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Vinçon, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes invités à autoriser la ratification d'un accord d'encouragement et de protection réciproques des investissements conclu entre le Liban et la France. Notre position de premier investisseur au Liban confère tout son intérêt à un accord qui participe également au renforcement des liens de toute nature qui unissent nos deux pays.
Le Liban poursuit sa lente normalisation politique et économique. Les données économiques démontrent la réalité des progrès accomplis : une inflation ramenée à 9 %, une croissance soutenue et un triplement du PIB en sept ans. Cela étant, cette croissance se fait au prix d'un déficit interne et externe qui pèse désormais lourdement sur l'économie.
La France est un partenaire économique majeur du Liban. Avec environ 130 implantations, elle est, de loin, le premier investisseur dans le secteur industriel et dans les services.
Avec 12,6 % du marché, la France est le deuxième partenaire commercial du Liban, derrière l'Italie. Nos exportations ont été multipliées par quatre depuis 1990. La participation des entreprises françaises à la reconstruction du pays est très significative puisque le montant total des affaires attribuées à des entreprises françaises depuis 1992 dépasse 7 milliards de francs.
Chacun, ici, connaît les dispositions des accords de protection et d'encouragement réciproques des investissement. Je n'y reviens donc pas.
Mes chers collègues, le Liban, qui se reconstruit, reste, sur la scène régionale, un acteur diminué : la Syrie contrôle étroitement sa diplomacie, ce qui pèse lourdement sur le règlement du contentieux israélo-libanais quant au devenir de la partie sud du pays. Les récentes propositions israéliennes d'un retrait conditionné de cette « zone de sécurité » pourraient malgré tout laisser entrevoir l'amorce d'une évolution.
Pour l'heure, cependant, la priorité demeure la poursuite de la reconstruction économique du pays. Le présent accord, en offrant une meilleure garantie juridique aux investisseurs français, contribue à cet objectif.
C'est pourquoi, au nom de la commission, j'invite le Sénat à adopter le présent projet de loi.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République libanaise sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres), signé à Paris le 28 novembre 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

9

ACCORD AVEC LA TUNISIE
SUR L'ENCOURAGEMENT ET LA PROTECTION
RÉCIPROQUES DES INVESTISSEMENTS

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 348, 1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres). [Rapport n° 419 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de ne pas répéter les caractéristiques générales de l'accord franco-tunisien sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.
Cet accord a été signé le 20 octobre 1997, à l'occasion de la visite d'Etat en France du président Ben Ali. Il s'inscrit, à ce titre, dans une volonté commune des deux pays de renouveler le cadre de leur coopération et de leurs relations, et de l'adapter au nouveau contexte du partenariat euro-méditerranéen et des progrès économiques en Tunisie.
La Tunisie a été le premier Etat méditerranéen à signer avec l'Union européenne un accord d'association, qui est entré en vigueur le 1er mars dernier et dont la mise en oeuvre implique un renouvellement du régime des échanges, avec l'établissement progressif d'une zone de libre-échange.
En tant que premier partenaire économique de la Tunisie, la France souhaite encourager ce pays à poursuivre ses réformes de mise à niveau économique et à soutenir ses efforts, notamment par la promotion des investissements français en Tunisie.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bertrand Delanoë, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet accord a effectivement tous les aspects des autres accords de protection des investissements. Son intérêt particulier, aujourd'hui, au regard des relations entre la France et la Tunisie, c'est qu'il se place dans le cadre d'un partenariat euro-méditerranéen mais aussi entre l'Union européenne et la Tunisie.
La Tunisie s'est attelée à un gros effort d'adaptation de son industrie, qui nécessite de nombreux investissements privés. Il fallait donc que les conditions soient créées pour que ces investissements privés permettent cette adaptation industrielle du pays.
Pour nous Français, le champ industriel tunisien actuel appelle surtout l'investissement des PME-PMI. Les grands groupes se débrouillent plutôt bien. Cet accord était nécessaire pour que nos entreprises petites et moyennes puissent se lancer dans la modernisation de l'appareil industriel tunisien. Il est donc de l'intérêt des deux pays de réussir l'application de cet accord.
Une autre caractéristique, plus politique, rend cet accord judicieux : le contentieux qui existe entre la France et la Tunisie depuis l'indépendance sur les biens immobiliers des Français acquis avant l'indépendance.
Dans la mesure où cet accord permet, d'abord, de ne pas limiter dans le temps les investissements auxquels il s'applique, où il permet, ensuite, la libre circulation des capitaux qui sont le produit d'une vente, où il permet, enfin, la suppression de l'autorisation préalable, qui existait jusqu'ici pour nos compatriotes qui possédaient des biens acquis avant l'indépendance, son application devrait, en théorie, permettre d'apurer le dernier contentieux qui existait entre la France et la Tunisie depuis l'indépendance.
Si cet accord est bien appliqué de part et d'autre, il doit ouvrir une nouvelle étape du partenariat économique et politique entre la France et la Tunisie.
C'est pourquoi la commission recommande au Sénat de l'autoriser.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres), signé à Paris le 20 octobre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

10

ACCORD AVEC LA RUSSIE
RELATIF À LA COOPÉRATION
DANS LE DOMAINE DE L'ESPACE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 398, 1997-1998) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace à des fins pacifiques (ensemble une annexe). [Rapport n° 421 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la coopération entre la France et la Russie dans le domaine spatial est ancienne puisqu'elle remonte au début des années soixante. Le 30 juin 1966 a été signé un accord franco-soviétique « relatif à la coopération pour l'étude et l'exploration de l'espace à des fins pacifiques », qui a fourni la base juridique, pendant près de trente ans, aux travaux menés en commun.
L'évolution très rapide de l'exploration spatiale et de ses applications a conduit les deux gouvernements à signer, en 1989, un protocole additionnel à l'accord de 1966, élargissant le champ de la coopération.
Mais les évolutions politiques, les changements structurels et les développements technologiques extrêmement rapides des industries spatiales et de leurs applications ont ouvert de nouvelles perspectives de coopération très prometteuses.
De ce fait, des négociations ont été entreprises, dès 1992, avec les Russes en vue de rédiger un nouvel accord intergouvernemental.
Ce nouvel accord, signé le 26 novembre 1996, désigne le Centre national d'études spatiales, le CNES, et l'Agence spatiale russe en qualité d'« organismes compétents » chargés de développer et de mettre en oeuvre la coopération prévue.
Ces organismes compétents concourront, selon les termes de l'accord, à instaurer et à développer d'un commun accord une coopération entre les entreprises ou les organismes industriels et commerciaux, publics ou privés, des deux Etats.
Chacune des parties s'engage à ne pas exercer de recours à l'encontre de l'autre pour les dommages occasionnés.
Une exemption des droits et taxes sur les marchandises importées du territoire d'une partie dans le territoire de l'autre partie est prévue quand un lancement est effectué dans l'espace extra-atmosphérique à partir de pas de tir utilisés par l'une et l'autre partie.
Un protocole additionnel, actuellement en cours de négociation, traitera des autres aspects relatifs au passage des marchandises aux frontières douanières des deux Etats et des conditions dans lesquelles les technologies, les savoir-faire, les informations, les données et les services seront transférés, dans le cadre de la coopération prévue par l'accord, du territoire d'un Etat vers celui de l'autre.
Une annexe à l'accord précise, enfin, de quelle façon sera assurée la protection des droits de propriété intellectuelle et de la confidentialité des informations et résultats de travaux qui découleront de cette coopération.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord, accompagné d'une annexe, du 26 novembre 1996 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'exploitation de l'espace à des fins pacifiques, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Claude Estier, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en vous renvoyant à mon rapport écrit, qui retrace l'histoire importante et ancienne de la coopération dans le domaine spatial entre la France et, hier, l'Union soviétique, aujourd'hui, la Russie, j'insisterai seulement sur un point.
L'accord qui nous est aujourd'hui soumis, et dont M. le ministre vient de rappeler l'essentiel, revêt un enjeu commercial et industriel très important, si l'on considère qu'il permettra d'appliquer aux échanges commerciaux liés à la mise en oeuvre de la coopération spatiale bilatérale le régime de franchise prévu par la législation française. Or, l'entrée en vigueur du présent accord tardant à être effective à cause, il faut bien le dire, des lenteurs de la procédure française - la Douma l'a ratifié dès septembre 1997 - la Russie refuse d'appliquer, au nom du principe de réciprocité, les stipulations fiscales et douanières de l'accord. Nos sociétés - il s'agit principalement d'Alcatel Espace et de l'Aérospatiale - sont donc confrontées, dans leurs échanges avec la Russie, à d'importants surcoûts qui affectent leur compétitivité face aux concurrents américains, qui, eux, bénéficient du régime de franchise prévu par les accords américano-russes.
Il importe donc que nous achevions au plus vite notre procédure interne de ratification, non seulement pour mettre fin aux difficultés de nos entreprises engagées dans la coopération spatiale franco-russe, mais aussi pour confirmer l'importance que la France attache à la coopération spatiale avec la Russie.
C'est pourquoi, mes chers collègues, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, je vous invite à adopter le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord franco-russe du 26 novembre 1996.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace à des fins pacifiques (ensemble une annexe), signé à Paris le 26 novembre 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux vois l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Il nous reste deux conventions fiscales à examiner.
Je vous propose, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, de les soumettre à une discussion générale commune. (M. le ministre et M. le rapporteur acquiescent.)

11

conventions fiscales
avec la namibie et la russie

Adoption de deux projets de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion commune :
- du projet de loi (n° 233, 1997-1998) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole). [Rapport n° 340 (1997-1998)] ;
- et du projet de loi (n° 202, 1997-1998) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. [Rapport n° 339.]
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les sénateurs, la France et la Namibie ne sont, pour l'heure, liées par aucune convention fiscale en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, et cette lacune est d'autant plus regrettable que la Namibie, indépendante depuis 1990, dotée d'un remarquable régime démocratique, est un Etat au potentiel économique intéressant.
Le secteur minier y est le plus important. Par ailleurs, les grandes exploitations agricoles du sud du pays lui permettent d'exporter de la viande de boeuf, y compris vers l'Europe grâce aux accords de quotas qui ont été conclus.
Les ressources de la pêche sont également potentiellement abondantes.
Enfin, la Namibie dispose d'un réseau de transport et de communication performant, d'un secteur financier moderne, et d'une industrie touristique en plein essor.
Conscient que le marché namibien ne pouvait par lui-même suffire à attirer les investissements étrangers, le Gouvernement namibien a entrepris de valoriser les atouts du pays pour en faire un tremplin vers la communauté de développement de l'Afrique australe dont la Namibie est l'un des membres les plus actifs. Il mise pour cela sur le développement du port de Walvis Bay.
Nos relations politiques bilatérales sont excellentes et confiantes, et le Président de la République, qui se rendra en visite officielle en Namibie le 25 juin prochain, ne manquera pas de le rappeler.
Je tiens, toutefois, à souligner que nos relations économiques ne sont pas à la hauteur du capital de confiance dont nous jouissons en Namibie. Notre pays n'y détient, en effet, qu'une part de marché marginale de 1 %. De même, les investissements français n'y représentent que 1 % des investissements étrangers.
Sur le plan des principes, la convention fiscale franco-namibienne respecte pour l'essentiel le modèle de l'OCDE, que vous connaissez. La France a accepté de limiter à six mois la durée au-delà de laquelle un chantier de construction est considéré comme un établissement stable et est donc imposable localement. Elle a obtenu en contrepartie des taux de retenue à la source en matière de dividendes, d'intérêts et de redevances relativement favorables : 5 % ou 15 %, selon les cas, pour les dividendes, 10 % pour les intérêts et les redevances, avec de nombreux cas d'exemptions de retenue.
Cette convention fiscale complétera le réseau de conventions déjà conclues par la France dans la région avec l'Afrique du Sud et le Zimbabwe.
C'est donc à l'ensemble de ces titres que le Gouvernement vous recommande aujourd'hui d'autoriser l'approbation de la convention franco-namibienne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune qui a été signée à Windhoek, le 29 mai 1996.
S'agissant de la France et de la Fédération de Russie, elles ont conclu à Paris, le 26 novembre 1996, au cours de la deuxième session de la commission des premiers ministres, une nouvelle convention en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.
Cette nouvelle convention est appelée à se substituer à la convention franco-soviétique du 4 octobre 1985 en matière d'impôt sur le revenu encore en vigueur entre nos deux Etats.
Le texte de la nouvelle convention est, dans son économie générale, tout à fait conforme au modèle de l'Organisation de coopération et de développement économiques que vous connaissez. Ce point mérite toutefois d'être souligné, car il témoigne des efforts dont font preuve nos partenaires, la Russie ayant par ailleurs manifesté le souhait d'adhérer à l'OCDE.
Par rapport à la convention franco-soviétique, le texte de la convention qui vous est présentée aujourd'hui améliore le traitement des flux d'investissements par l'absence de retenue à la source sur les redevances qui a été reconduite ; par le traitement fiscal des intérêts qui a, quant à lui, été amélioré puisque toute retenue à la source a été supprimée ; enfin, on peut affirmer que le traitement des dividendes a également été amélioré. On passe en effet d'un régime à un taux unique de 15 % à un régime à trois taux.
J'ajouterai, pour achever la présentation des dispositions de la convention que cette dernière est complétée par un important volet d'assistance administrative.
Je voudrais, enfin, souligner l'intérêt économique de cette convention.
La Russie commence à retirer les bénéfices des réformes courageusement engagées depuis maintenant six ans. Cette Russie est une Russie ouverte : elle est désormais notre premier débouché en Europe orientale. Nos exportations, ces deux dernières années, ont témoigné d'un exceptionnel dynamisme permettant de réduire de moitié le déficit structurel de nos échanges commerciaux.
La France soutient les projets des entreprises françaises en Russie par une politique financière volontariste.
Il convenait donc également d'accompagner l'effort des entreprises françaises par la mise au point d'un régime fiscal favorable. Ce sera chose faite si la convention en vue d'éviter les doubles impositions conclue le 26 novembre 1996 recueille l'approbation de votre assemblée. La présente convention contribuera, en effet, à créer un cadre juridique sûr et stable pour nos investisseurs ; elle constituera un encouragement au renforcement de la présence économique française en Russie.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie qui fait l'objet du projet de loi soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'agissant, tout d'abord, de la convention fiscale avec la Namibie, je souligne, comme l'a fait M. le ministre, que les relations entre nos deux pays sont excellentes et que deux institutions auxquelles je suis personnellement attaché, la Caisse française de développement et PROPARCO, travaillent maintenant en Namibie.
La Namibie offre des perspectives commerciales intéressantes : installations aéroportuaires, matériel aéronautique et militaire, recherche pétrolière, notamment.
Nous avons donc examiné cette convention dans l'esprit le plus favorable. Elle est tout à fait conforme au modèle de l'OCDE et elle conforte, de surcroît, les aménagements que la France essaie d'obtenir dans les conventions qu'elle conclut.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, la commission des finances vous invite à l'adopter.
Quant à la convention fiscale avec la Russie, elle s'inscrit dans les limites d'une réforme globale du système fiscal russe.
Un projet avait été élaboré avec l'assistance technique de l'OCDE et du FMI, mais - comme vous le savez - cette réforme fiscale est au centre de vastes discussions politiques ; elle semble actuellement bloquée à la Douma.
A titre provisoire, le décret présidentiel du 23 mai a défini le principe de taxation, de sanctions et de contentieux. Malgré tout, le droit fiscal russe est un droit provisoire. Par ailleurs, suivant les régions, les Républiques et les gouvernements, il est, semble-t-il, appliqué de manière un peu inégale et en quelque sorte à géométrie variable.
Dans ces conditions, il est indispensable que nos entreprises aient le moins d'incertitude possible dans la mesure où elles réalisent des échanges commerciaux ou des investissements en Russie.
Cette convention, comme l'a souligné M. le ministre, est de type classique OCDE. Je vous renvoie à mon rapport écrit pour une analyse très technique.
Cette nouvelle convention a pour objet essentiel de consolider et d'améliorer le traitement des flux d'investissement et le traitement fiscal des dividendes. Comme l'a indiqué M. le ministre, celui-ci a été amélioré. Ce point a fermement été débattu lors de la négociation avec les Russes. Le Premier ministre de l'époque avait d'ailleurs été amené à intervenir auprès de son homologue russe.
Finalement, dans ce contexte, l'accord auquel sont parvenus les deux gouvernements nous a semblé satisfaisant. C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous invite, au nom de la commission des finances, à adopter ce projet de loi.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.

CONVENTION FISCALE AVEC LA NAMIBIE

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi relatif à la convention fiscale entre la France et la Namibie.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Windhoek le 29 mai 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

CONVENTION FISCALE AVEC LA RUSSIE

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi relatif à la convention fiscale entre la France et la Russie.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à Paris le 26 novembre 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

12

NOMINATION DE MEMBRES
D'UN OFFICE PARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle au Sénat que les candidatures présentées par le groupe socialiste à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ont été affichées et n'ont fait l'objet d'aucune opposition.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Gérard Miquel et Jean-Luc Mélenchon respectivement membre titulaire et membre suppléant de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

13

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président. J'ai reçu de M. Pierre Fauchon une proposition de résolution tendant à modifier l'article 24, alinéa 3, du règlement du Sénat.
La proposition de résolution sera imprimée sous le n° 441, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

14

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de M. François Lesein un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage (n° 416, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le n° 442 et distribué.

15

DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Jean Bizet un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur les organismes génétiquement modifiés.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 440 et distribué.
J'ai reçu de M. René Régnault un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification sur le colloque organisé le 2 avril 1998, sur les perspectives à moyen terme de l'économie mondiale.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 443 et distribué.

16

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 26 mai 1998 :
A neuf heures trente :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 311, 1997-1998) de M. Michel Dreyfus-Schmidt, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sur la proposition de loi (n° 13, 1997-1998) de M. Michel Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés tendant à compléter l'article L. 30 du code électoral relatif à l'inscription sur les listes électorales en dehors des périodes de révision.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 25 mai 1998, à dix-sept heures.
2. Discussion en deuxième lecture de la proposition de loi (n° 294, 1996-1997), modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à protéger les acquéreurs et propriétaires d'immeubles contre les termites et autres insectes xylophages.
Rapport (n° 428, 1997-1998) de M. Gérard César, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 25 mai 1998, à dix-sept heures.
A seize heures :
3. Eloge funèbre de Bernard Barbier.
4. Suite de l'ordre du jour du matin.

Délais limites pour le dépôt des amendements

Nouvelle lecture du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 26 mai 1998, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage (n° 416, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 27 mai 1998, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quinze.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





NOMINATION DE RAPPORTEURS

COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Pierre Fauchon a été nommé rapporteur :
- du projet de loi n° 434 (1997-1998) relatif aux alternatives aux poursuites et renforçant l'efficacité de la procédure pénale ;

- de la proposition de loi n° 270 (1997-1998) de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues relative à la délégation aux greffiers des attributions dévolues par la loi aux greffiers en chef.

OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES
(Loi n° 83-609 du 8 juillet 1983 portant création d'une délégation parlementaire dénommée Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques)
Lors de sa séance du mercredi 20 mai 1998, le Sénat a nommé MM. Gérard Miquel et Jean-Luc Mélenchon pour siéger, respectivement en qualité de membre titulaire et de membre suppléant, au sein de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Conditions de stationnement des grands voyageurs

289. - 20 mai 1998. - Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur les conditions de stationnement des grands voyageurs qui, périodiquement, recherchent en région parisienne un lieu d'accueil organisé. Elle lui fait remarquer que l'absence d'aires d'accueil suffisantes en surface, organisées en équipements, surveillées et fonctionnelles, entraîne des difficultés de vie pour ces grands voyageurs, des incompréhensions de la part des Franciliens et des oppositions conduisant de plus en plus souvent à des rejets. Elle lui demande de lui faire connaître les mesures nouvelles permettant la création, l'organisation d'aires régionales, disposant des moyens de fonctionnement et de surveillance, permettant une dignité de vie reconnue et organisée de celles et ceux-ci en bonne harmonie avec les populations franciliennes.



ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 20 mai 1998


SCRUTIN (n° 91)



sur l'article unique constituant l'ensemble du projet de loi autorisant la ratification du protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'accession de la République de Hongrie.

Nombre de votants : 317
Nombre de suffrages exprimés : 314
Pour : 298
Contre : 16

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE REPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DEMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPEEN (23) :

Pour : 23.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA REPUBLIQUE (93) :

Pour : 91.
Abstentions : 2. _ MM. Philippe de Gaulle et Christian de La Malène.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Pour : 74.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 57.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES REPUBLICAINS ET INDEPENDANTS (45) :

Pour : 44.
Abstention : 1. _ M. Nicolas About.

SENATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE ( 9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


François Abadie
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Guy Allouche
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Michel Bécot
Henri Belcour
Jacques Bellanger
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Pierre Biarnès
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
William Chervy
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Yvon Collin
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Marcel Debarge
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Bertrand Delanoë
Jean-Paul Delevoye
Gérard Delfau
Jacques Delong
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe Francois
Jean Francois-Poncet
Yann Gaillard
Aubert Garcia
André Gaspard
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Roland Huguet
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Serge Lagauche
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Dominique Larifla
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lèguevaques
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Claude Lise
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Kléber Malécot
André Maman
Michel Manet
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Marc Massion
Paul Masson
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Gérard Miquel
Louis Moinard
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Michel Pelchat
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Alain Peyrefitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Bernard Plasait
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Roger Quilliot
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
René Régnault
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Roger Rinchet
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Gérard Roujas
André Rouvière
Michel Rufin
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Fernand Tardy
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Basile Tui
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade


André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Henri Weber

Ont voté contre


Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
Jean Derian
Michel Duffour
Guy Fischer


Pierre Lefebvre
Paul Loridant
Hélène Luc
Louis Minetti
Robert Pagès
Jack Ralite
Ivan Renar
Odette Terrade
Paul Vergès

Abstentions


MM. Nicolas About, Philippe de Gaulle, Christian de La Malène,

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 317
Nombre de suffrages exprimés : 315
Majorité absolue des suffrages exprimés : 158
Pour l'adoption : 299
Contre : 16

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.