Séance du 17 juin 1998







M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 2, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article 41-1 du code de procédure pénale et sa référence.
Par amendement n° 33, MM. Dreyfus-Schmidt, Badinter et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 41-1 du code de procédure pénale, de supprimer les mots : « , directement ou par délégation. »
Par amendement n° 32, le Gouvernement propose de supprimer le deuxième alinéa (1°) du texte présenté par cet article pour l'article 41-1 du code de procédure pénale.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Il se trouve malheureusement - mais c'est presque une circonstance fortuite - que cet article qui vient en tête du texte ne nous paraît pas à proprement parler nécessaire, ce qui peut donner une impression étrange.
Il suffit de lire cet article 1er pour comprendre l'opinion de la commission des lois.
« S'il lui apparaît qu'une telle mesure est susceptible d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou de contribuer au reclassement de l'auteur des faits, le procureur de la République peut, préalablement à sa décision sur l'action publique... ». Le procureur en est au stade où où il se demande s'il va classer sans suite ou renvoyer devant un tribunal et l'on éprouve le besoin de lui dire, par un texte de loi, que, parmi les choses qu'il peut imaginer de faire - et on ne les imagine peut-être pas toutes - il peut « directement ou par délégation :
« 1° Procéder au rappel auprès de l'auteur des faits des obligations résultant de la loi. » C'est encore heureux !
« 2° Il peut aussi : orienter l'auteur des faits vers une structure - magnifique langage ! - sanitaire, sociale ou professionnelle. »
Il peut encore : « 3° Demander à l'auteur des faits de régulariser sa situation au regard de la loi ou des règlements. »
Il peut enfin, et c'est plus substantiel : « 4° Procéder, avec l'accord des parties, à une mission de médiation entre l'auteur des faits et la victime. » Il peut renvoyer des affaires devant des organismes de médiation, dont on a déjà parlé et qui sont fort utiles si l'on en juge par l'expérience et par les échos que nous avons.
La commission des lois estime qu'il n'est pas nécessaire de faire ces rappels, qui pourraient se révéler fâcheux.
Il n'est pas nécessaire de préciser dans la loi que les procureurs peuvent faire ce qu'ils font déjà et qui n'est pas contesté. Par ailleurs, un tel rappel ne nous paraît pas relever du domaine législatif.
Si, demain, un procureur veut prendre une initiative qui ne figure pas dans la liste, il ne pourra pas le faire. La liste, qui semble ouvrir des possibilités nouvelles, les limite au contraire et bride sa créativité.
D'une manière générale, il faut s'efforcer de ne pas enserrer dans des règles trop précises l'action des responsables de l'action publique, de ces agents qui ne sont tout de même pas des agents d'exécution subalternes. Les procureurs, il faut leur laisser une marge d'appréciation.
Les procureurs sont chargés d'apprécier l'opportunité des poursuites, ce qui est une responsabilité très importante dont on pourrait quelquefois s'étonner. Mais notre système est ainsi fait et personne ne le conteste. Dans ce champ d'action qui leur est ouvert, il font ce qu'ils estiment devoir faire et il nous paraît réducteur, d'énumérer ce qu'ils peuvent faire.
Bien entendu, nous comprendrions très bien que, pour le fonctionnement interne des services de la justice, le garde des sceaux éprouve le besoin de rappeler ces possibilités, peut-être d'encourager le recours à telle ou telle d'entre elles. Ces précisions relèvent, en effet, d'une circulaire. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour défendre l'amendement n° 33.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Un de mes amis, ancien maire de Belfort et ancien député, disait un jour où il était ministre : « Quand on est ministre, on ferme sa gueule. »
Il m'arrive de me demander quelle doit être l'attitude d'un membre de la majorité nationale à propos d'un texte.
Je crois que le devoir d'un parlementaire est de dire très exactement ce qu'il pense, étant entendu que, sur les points essentiels, il ne doit évidemment pas manquer à une solidarité qui, là aussi, est nécessaire.
Je dis cela parce que, à titre personnel au moins, j'ai été navré de voir revenir la notion de compensation judiciaire, pour utiliser l'appellation qui prévaut pour l'instant.
A cet égard, la satisfaction de M. le rapporteur est significative. Il a dit qu'il avait regretté que le Conseil constitutionnel ait été saisi (M. le rapporteur fait un signe de dénégation), c'est-à-dire qu'il acceptait l'inconstitutionnalité du texte, et il a ajouté qu'il était très reconnaissant au Gouvernement de présenter aujourd'hui des dispositions proches de celles qu'il avait proposées et que le Conseil constitutionnel avait refusées.
A maintes reprises, dans son rapport, il dit que c'est la même chose, que cela revient au même, et il ajoute même qu'il existe une petite différence qui rend sans doute cette fois le texte constitutionnel, mais qui n'est que de forme car, dans la plupart des cas, évidemment, il y aura validation.
Nous reviendrons tout à l'heure sur la validation, mais je dois dire que la rédaction proposée par l'article 1er pour l'article 41-1 du code de procédure pénale ne nous paraît pas être la pire, elle ne fait pas vraiment de mal. Le texte proposé prévoit en effet ce qui existe depuis un temps immémorial : tous les procureurs de la République ont toujours pu faire dire aux intéressés qu'ils les poursuivraient si, par exemple, le préjudice n'était pas réparé. C'est ce qu'on appelle le classement sous condition. Cela a toujours existé.
Ici, on nous dit : vous allez limiter la marge d'action du procureur, qui ne pourra rien faire d'autre que ce que le texte énumère limitativement.
Je ne sais pas ce qu'il pourrait faire d'autre, mais ce qui nous ennuie, c'est que ce n'est pas seulement le procureur qui peut agir mais aussi son délégué.
Qui sera délégué ? Sans doute les officiers de police judiciaire, qui sont constamment dévalorisés. Là, nous nous posons la question de savoir si l'on peut accepter qu'une personne autre qu'un magistrat, par exemple, oriente un délinquant vers telle ou telle « structure » - je ne sais d'ailleurs pas ce que ce terme signifie et j'aimerais qu'on me l'explique - sanitaire, sociale ou professionnelle et qui peut être un organisme privé dont les prestations peuvent être payantes.
Le délégué pourra donc envoyer le prévenu vers une « structure » ou demander à l'auteur des faits de réparer le dommage résultant de ceux-ci.
Je sais bien que la décision de poursuivre ou non n'est pas encore prise et que ce n'est pas le délégué qui statue sur l'opportunité des poursuites. C'est en effet le procureur qui seul peut le faire. Toutefois, le délégué - un agent de police ou n'importe qui d'autre, sans doute - pourrait donc, de son propre mouvement, préparer le terrain pour que le procureur ait ensuite tendance à classer l'affaire, alors que lui-même n'a pas encore pris connaissance du dossier.
Il nous est dit que cette procédure présente un avantage : elle suspend la prescription.
Je suis quelque peu étonné par cet argument. Je croyais que ce texte était fait pour accélérer les procédures et voilà que l'on a peur que la prescription n'atteigne les affaires dont il est question.
Quoi qu'il en soit, je préférerais que l'on supprime les mots : « par délégation ». C'est ce que nous proposons dans notre amendement.
J'attends les explications que vous nous donnerez à cet égard, madame le garde des sceaux, mais, pour le reste, nous accepterons l'article 41-1 du code de procédure pénale si le Sénat ne le supprime pas, comme le demande la commission.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux, pour présenter l'amendement n° 32 et donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 2 et 33.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Si vous le voulez bien, monsieur le président, je donnerai d'abord mon avis sur l'amendement n° 2, tout en présentant l'amendement n° 32, avant de répondre aux auteurs de l'amendement n° 33.
Je voudrais dire pourquoi le Gouvernement s'oppose à l'amendement n° 2, présenté par M. le rapporteur, et pourquoi il a souhaité, sur le point qui a été soulevé, déposer l'amendement n° 32.
Je considère, il est vrai, que la consécration dans la loi des différentes formes de classement sous condition constitue aujourd'hui une nécessité, non seulement pour donner une impulsion nouvelle à ces pratiques, mais également pour qu'elles soient mieux encadrées.
C'est la raison pour laquelle l'article 1er du projet de loi tend à insérer dans le code de procédure pénale cet article 41-1, qui prévoit les différentes mesures auxquelles le procureur de la République peut procéder préalablement à sa décision sur l'action publique.
Les arguments que vous avez avancés, au nom de la commission des lois, monsieur le rapporteur, ne me paraissent pas convaincants. Je rappelle, en effet, qu'en 1992 le Sénat a accepté de consacrer la médiation pénale, et je me demande pourquoi, aujourd'hui, on refuserait d'achever cette réforme.
A la réflexion, votre proposition m'amène toutefois à considérer qu'il n'est ni utile, ni opportun d'inscrire dans le code de procédure pénale que le procureur pourra procéder auprès de l'auteur d'une infraction à un simple « rappel à la loi ». Cela reviendrait en effet à inscrire dans la loi qu'on demande le respect de la loi !
En revanche, il paraît nécessaire de préciser que le procureur pourra procéder à des mesures tendant à l'orientation de l'auteur des faits vers une structure sanitaire sociale ou professionnelle, à la régularisation de la situation de ce dernier, à la réparation par la personne du dommage qu'elle a causé ou à une médiation entre cette personne et la victime, tout en indiquant, bien entendu, que la mise en oeuvre de ces mesures, dont l'accomplissement peut prendre un certain temps, suspend la prescription de l'action publique.
Je crois, en effet, que l'inscription dans la loi de ces mesures donnera un fondement légal plus solide aux articles réglementaires qui prévoient aujourd'hui, au titre des frais de justice, la tarification des indemnités dues au délégué du procureur ainsi qu'à ceux qui prévoient leur habilitation.
Ces précisions seront d'ailleurs le support d'une circulaire de politique pénale que la Chancellerie adressera aux juridictions pour détailler les conditions d'application des nouvelles dispositions dont la légitimité ne pourra, dès lors, pas être contestée, alors qu'en l'absence de lois certains peuvent aujourd'hui estimer que ces mesures ne relèvent pas des missions de l'autorité judiciaire.
Voilà pourquoi je souhaite que le Sénat repousse l'amendement n° 2 de la commission des lois et adopte l'amendement n° 32 du Gouvernement, qui supprime la mention du rappel à la loi.
Le Gouvernement n'est pas non plus favorable à l'amendement n° 33, qui a été défendu par M. Dreyfus-Schmidt au nom du groupe socialiste et qui tend à supprimer la possibilité donnée au procureur de procéder, par l'intermédiaire d'un délégué, à des mesures préalables à un classement sans suite comme, par exemple, la médiation.
D'abord, c'est exactement ce qui se pratique actuellement dans des conditions qui sont jugées satisfaisantes, même si je reconnais qu'elles peuvent être améliorées. Je pense notamment à l'intervention de l'avocat qui doit être facilitée. C'est pourquoi, dans le projet de loi relatif à l'accès au droit que vous examinerez bientôt, il est prévu l'indemnisation des avocats qui participeraient à la mise en oeuvre de telles mesures, c'est-à-dire qu'ils pourront faire appel à l'aide juridictionnelle, qui est aujourd'hui réservée aux actions devant les tribunaux.
Je voudrais faire observer par ailleurs que c'est l'un de mes prédécesseurs, Michel Vauzelle, qui, par un décret du 4 novembre 1992, avant même que la loi du 4 janvier 1993 vienne consacrer la médiation pénale, a prévu l'indemnisation, au titre des frais de justice, des médiateurs désignés par le procureur de la République.
Il serait donc paradoxal que le présent projet de loi fasse reculer notre procédure pénale de plusieurs années en en diminuant l'efficacité sans pour autant améliorer les garanties offertes au justiciable.
Je rappellerai enfin qu'il appartiendra toujours au procureur de décider s'il doit lui-même mettre en application ces mesures ou s'il peut déléguer cette mission à une personne habilitée. En aucun cas, ce n'est une obligation qui s'impose au procureur. Il est parfaitement libre de déterminer s'il choisit de déléguer ou non.
Telles sont les raisons qui me conduisent à vous demander de voter contre cet amendement n° 33.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 33 et 32 ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je m'exprimerai également sur notre amendement n° 2, en réponse à Mme le garde des sceaux, de manière à ne pas avoir à redemander la parole.
La commission est obligée de persister dans sa demande de suppression du texte proposé par l'article 1er pour l'article 41-1 du code de procédure pénale, d'autant que l'amendement est au coeur du débat.
Comme le montre notre discussion, quand on se met à légiférer sur ce qui échappe à la réglementation, on voit surgir des difficultés de toutes sortes.
D'ailleurs, après avoir élaboré cet article, vous admettez qu'une partie de ce texte n'est pas utile. On se rend bien compte que c'est une démarche qui est difficile et qui n'est pas nécessaire.
Madame le garde des sceaux, vous avez dit qu'elle était nécessaire en matière de médiation pénale. Certes, pour autoriser un procureur de la République à s'engager dans la voie de la médiation pénale qui consiste à envoyer les plaideurs devant un médiateur investi d'une mission et en tirer ensuite les conclusions, il fallait effectivement un texte législatif, même si de telles pratiques existaient déjà. Une fois que les expérimentations menées ici ou là ont démontré leur intérêt, il est normal, s'agissant d'une démarche dans laquelle la justice délègue d'une certaine façon une partie, sinon de ses pouvoirs, du moins de ses reponsabilités, ce qui est tout aussi important, à des tiers extérieurs à l'appareil judiciaire, qu'il y ait un texte. Celui-ci existe d'ailleurs dans le code de procédure pénale, il s'agit de l'article 41.
Vous le reprenez, mais quand nous proposons de ne pas vous suivre dans cette voie, nous demandons par ailleurs le maintien du texte particulier sur la médiation, qui est nécessaire.
Je persiste à croire - et vous l'admettez vous-même - qu'il n'est point besoin d'un texte pour renvoyer les intéressés devant la fameuse structure sociale. Concrètement, est-il nécessaire d'inscrire dans la loi qu'untel devrait se rendre dans un centre de désintoxication, voir des psychologues qui tiennent une permanence à la mairie ou restituer, par exemple, un objet volé afin de réparer le préjudice causé ?
Quand on s'engage dans cette voie, on se heurte aux difficultés qui me permettent de répondre sur les amendements n°s 32 et 33.
Madame le garde des sceaux, quelle différence y a-t-il entre rappeler la loi à l'auteur d'infraction et le renvoyer devant un organisme de conseil ? Cela montre que cet article n'est pas indispensable et qu'il pourrait même être fâcheux de l'inscrire dans la loi.
S'agissant de l'amendement n° 33, je n'entrerai même pas dans le détail de la rédaction puisque je suis opposé à l'ensemble de l'article ! Je ne vois donc pas comment on pourrait l'améliorer. Si, par impossible, comme on dit lorsque l'on plaide une affaire, on devait le faire, il est tout à fait nécessaire que les procureurs puissent prendre de telles mesures par voie de délégation !
Dans les systèmes de traitement direct que nous connaissons, que se passe-t-il ? Comme l'ont constaté un certain nombre d'entre nous dans les parquets, les procureurs sont en liaison téléphonique avec les officiers de police judiciaire qui sont sur le terrain et qui les informent de ce qui s'y passe.
Les procureurs peuvent demandeur à ces OPJ de citer les auteurs de l'infraction tel jour à comparaître. C'est ce que l'on appelle le « temps réel », encore une expression que je trouve absurde, car plus le temps est court, moins il est réel, et vice versa !
Les procureurs peuvent aussi leur demander de sermonner l'intéressé et de le renvoyer chez lui parce qu'on ne peut pas poursuivre cette affaire.
Ils peuvent encore leur demander d'envoyer l'intéressé dans un centre de toxicomanie.
Il faut bien que ces procureurs puissent agir par délégation. Ils ne vont pas demander aux officiers de police judiciaire de leur amener les prévenus au siège du parquet, huit jours après, pour procéder eux-mêmes à toutes ces actions ! Ne tombons pas dans le ridicule !
Il est tout à fait utile que ces choses-là se fassent par délégation, sauf la médiation, qui, encore une fois, est une mesure très particulière. Elle doit relever de la responsabilité et des prérogatives propres du procureur.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de maintenir le texte actuel sur la médiation. Un amendement ultérieur permettra de maintenir la responsabilité des procureurs en ce qui concerne la décision de médiation. Il faut laisser ces derniers assumer leurs responsabilités - ils ne sont pas les premiers venus, loin s'en faut ! - dans les limites des lois qui sont suffisamment précises pour les guider et leur éviter de commettre des erreurs. Mais qu'on leur donne une marge d'appréciation, cela me paraît indispensable !
On a invoqué le problème de la prescription. Contrairement à ce que je croyais, notre ami M. Dreyfus-Schmidt n'a pas complètement répondu sur ce point.
La prescription est de un an pour les contraventions et de trois ans pour les délits. Si on n'a pas pris ces mesures dans l'année ou dans les trois ans, imaginez-vous qu'on va les prendre dans la quatrième année ? C'est inconcevable et je ne crois pas que l'argument de la prescription soit opérant en la circonstance ! Evidemment, ce sont des mesures qu'il faut prendre rapidement ou alors je ne vois pas comment peut fonctionner le système judiciaire.
M. Jacques Machet. Très bien !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je voudrais simplement faire remarquer à M. Fauchon que la médiation n'est pas plus contraignante que la réparation, la régularisation ou même l'orientation. La régularisation, par exemple, peut donner lieu à indemnisation.
Il s'agit d'obligations et, par conséquent, je ne vois pas pourquoi on les traiterait différemment.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Ce texte pose un problème de principe rédactionnel.
Nous sommes tous d'accord pour parvenir à une simplification des procédures et à un renforcement de l'efficacité des procédures pénales.
Je dois dire que cet article 1er commence mal. En effet, il tend à rigidifier de manière inutile des pratiques, qui sont monnaie courante et qui peuvent être rappelés de manière tout à fait pertinente aux procureurs qui, d'aventure, ne les appliqueraient pas déjà par la voie de la circulaire pénale.
Il n'est pas nécessaire d'introduire dans la loi des indications contraignantes alors que nous n'en avons pas besoin et que nous avons tous le souci d'éviter d'alourdir nos textes de dispositions inutiles.
C'est pourquoi je me permets de demander au Sénat, avec un peu d'insistance, de bien vouloir suivre la position de la commission.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il me semble que M. le rapporteur vient de commettre un contresens en ce qui concerne la prescription de l'action publique. Il n'est pas question d'attendre longtemps avant que le procureur ait recours à l'une des mesures prévues dans le texte proposé pour l'article 41-1 du code de procédure pénale. Mais, si l'application de ces mesures devait durer, le temps que l'affaire revienne devant le procureur de la République, la prescription pourrait être acquise. C'est du moins ainsi que je l'ai compris.
M. Pierre Fauchon, rapporteur La prescription est de trois ans tout de même !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est trois ans en matière de délit, mais la procédure peut être également utilisée en matière de contravention.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Essentiellement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je souhaite également faire remarquer à Mme la garde des sceaux que le procureur de la République n'agit pas par l'intermédiaire d'un délégué, mais par une délégation.
J'ai cru comprendre que cette délégation pourrait être générale ; si ce n'est pas le cas, il faut nous le dire. S'il agit par intermédiaire, ce n'est plus une délégation.
C'est tellement vrai que, aujourd'hui, le procureur de la République, qui prend connaissance de tous les dossiers, et qui décide de notifier à l'intéressé qu'il ne poursuivra pas si le préjudice est réparé, par exemple dans les trois ou quatre mois, le fait évidemment par l'intermédiaire de la police. Il ne le fait pas lui-même.
En revanche, lorsque je lis dans le texte que le procureur de la République peut faire ceci ou cela, par un délégué, je crains qu'il ne s'agisse d'une délégation générale et non spéciale. Aussi, je me permets de vous demander des précisions sur ce point, madame le garde des sceaux.
Enfin, vous nous dites qu'il pourra y avoir un avocat. Tant mieux, mais je ne crois pas que soit prévue la présence d'avocat - sauf demain, en matière de garde à vue, ce dont je me félicite - au stade de l'enquête de police.
Je dois cependant à la vérité de dire aussi que ce qui m'intéresse, c'est de savoir - vous avez omis de me répondre sur ce point, madame le garde des sceaux - qui pourrait être délégué. Ce serait intéressant de le savoir. Si c'est un officier de police judiciaire au sens où nous l'entendons aujourd'hui, cela peut se concevoir. Si c'est n'importe qui, il faut que nous le sachions, car cela nous gênerait beaucoup plus !
Au demeurant, ce n'est pas le principal souci que nous ayons à propos de ce texte et si l'amendement de la commission était repoussé, il n'est pas certain que nous maintiendrions l'amendement n° 33, qui avait surtout pour objet, madame le garde des sceaux, de vous demander des précisions quant à la délégation.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 41-1 du code de procédure pénale est supprimé, et les amendements n°s 33 et 32 n'ont plus d'objet.

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