Délégations et Offices
Table des matières
OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES (OPECST)
Mercredi 27 octobre 1999
- Présidence de M. Henri REVOL, sénateur, président.
Santé publique et environnement - Les conséquences des installations de stockage de déchets nucléaires sur la santé publique et l'environnement - Examen du rapport
L'office a examiné le rapport de Mme Michèle Rivasi, député, sur les conséquences des installations de stockage de déchets nucléaires sur la santé publique et l'environnement.
Mme Michèle Rivasi, député, rapporteur, a indiqué que la réglementation relative aux déchets radioactifs et aux sites de stockage et d'entreposage nécessite d'être complétée et coordonnée, et que des solutions à long terme sont en attente, non seulement pour les déchets de moyenne ou haute activité pour lesquels la loi du 30 décembre 1991 a lancé un ensemble de recherches, mais aussi pour différents types de déchets de faible activité.
Le rapporteur a ensuite rendu compte de ses missions sur le terrain, notamment sur les sites miniers de Bessines, au centre de stockage de l'Agence nationale de gestion des déchets radioactifs (ANDRA) à Soulaines, et dans les sites du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) à Marcoule, Cadarache, Valduc et Saclay. Remerciant les exploitants nucléaires pour leur transparence, et soulignant que chacun d'entre eux assume ses responsabilités d'une manière satisfaisante, Mme Michèle Rivasi, député, rapporteur, a toutefois estimé qu'une meilleure cohérence doit être recherchée entre les initiatives des différents exploitants.
Le rapporteur a attiré l'attention des membres de l'office sur les stocks de déchets accumulés dans les installations de la Compagnie générale des matières nucléaires (COGEMA) à La Hague, faute d'exutoire national pour les déchets issus du retraitement des combustibles français, et du fait de réexpéditions très insuffisantes des déchets issus du retraitement des combustibles étrangers. Elle a indiqué, qu'à son avis, la stratégie de concentration et de rétention des radioéléments, et donc la réduction des rejets, devaient être choisies résolument par les exploitants nucléaires. Insistant sur la nécessité de mettre en place rapidement un site de stockage de déchets à très faible activité, le rapporteur a également estimé que la France devrait renoncer à l'option ouverte par la directive européenne n° 96/29 d'introduire des seuils de libération pour les matériaux ou matières faiblement contaminés. Au total, Mme Michèle Rivasi, député, rapporteur, souhaite que, grâce à une impulsion politique forte, répondant à la demande sociale et aux engagements internationaux contenus dans la directive européenne et la convention pour la protection de l'environnement marin de l'Atlantique nord-est, dite " convention OSPAR ", la France s'engage résolument dans la voie de l'avenir pour son industrie nucléaire.
M. Henri Revol, sénateur, président, après avoir souligné l'ampleur du travail d'analyse du rapporteur, a exprimé ses réserves sur les propositions soumises, et fait connaître que leurs formulations, sous forme de très nombreuses injonctions consistant à demander, avec précision et insistance, au pouvoir réglementaire de prendre des mesures dans son domaine d'attribution, n'étaient pas conformes à la mission de l'office.
M. Robert Galley, député, a indiqué qu'il soutenait, à titre de mesure de précaution, l'objectif de réduction des rejets, tout en demandant des précisions plus poussées sur les connaissances actuelles en matière d'effets des rayonnements ionisants sur la santé, et en marquant sa surprise face au décalage existant entre le contenu analytique du rapport et le caractère abrupt des propositions.
M. Yves Cochet, député, estimant nécessaire la relance de l'entreposage réversible des déchets nucléaires en sub-surface, a demandé, à propos du contrôle des stocks de déchets nucléaires, la mise au point d'un mécanisme permettant que le contrôleur soit indépendant du contrôlé. Il a fait connaître son accord global avec les propositions du rapporteur, à l'exception de celle sur la recherche, relative aux énergies renouvelables, qu'il souhaite voir conduite par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) plutôt que par le CEA.
M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, a indiqué qu'il avait étudié longuement la question des déchets radifères dans son rapport de 1992 sur les déchets de très faible activité, et s'est demandé si des progrès avaient réellement été accomplis, depuis lors, sur cette question.
Mme Michèle Rivasi, député, rapporteur, a alors répondu aux divers intervenants, en précisant les analyses qu'elle a faites de ces questions dans son étude.
Prolongeant les débats, M. Claude Birraux, député, a approuvé la spécialisation du CEA dans le nucléaire, et a indiqué, à propos de l'ANDRA, qu'un exploitant ne pouvait être chargé d'une mission de contrôle. La Direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN) lui paraît avoir les moyens d'imposer ses vues aux exploitants nucléaires. Il a, par ailleurs, rappelé son travail d'enquête à propos des décharges du CEA en région parisienne, et a regretté que des auditions publiques et contradictoires ouvertes à la presse, indispensables à une réelle transparence du travail de l'office, n'aient pas été organisées par le rapporteur.
Faisant valoir que le document soumis par le rapporteur exposait davantage ses propres vues que celles de l'office, M. Claude Gatignol, député, s'est également étonné que le texte ne produise pas, non plus, de relevés des auditions réalisées.
Mme Michèle Rivasi, député, rapporteur, a souligné que, si le CEA connaît des difficultés budgétaires et un manque de perspectives, le principal enjeu est qu'une volonté politique s'exprime par des directives claires aux exploitants quant à la gestion de leurs rejets et de leurs déchets radioactifs.
Relevant dans le rapport soumis à l'office des éléments intéressants, comme l'étude des rejets, des déchets étrangers ou des différents déchets spécifiques, M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, a souligné un décalage entre les propositions du rapporteur et ses conceptions personnelles. Or, l'adoption du rapport ferait, de ce dernier, la doctrine de l'office, dont le rôle est d'informer objectivement le Parlement sur les sujets dont il est saisi. Sur ce point, il a ajouté que si le corps du texte lui permettait de dire qu'il s'agissait d'un bon rapport, les propositions ne reflétaient ni ses propres conceptions sur de nombreux sujets -comme les seuils de libération, l'ANDRA ou l'Institut de protection et de sûreté nucléaires (IPSN)- ni celles de nombreux participants à la réunion, comme le montraient les débats.
M. Henri Revol, sénateur, président, a alors estimé que des études complémentaires devaient être réalisées sur ces différents sujets, d'une grande importance pour l'avenir du nucléaire, en identifiant les contraintes scientifiques et technologiques, et en estimant les coûts des différentes solutions envisageables.
Une discussion s'est ensuite engagée sur la méthode à suivre pour parvenir à cet approfondissement indispensable.
M. Serge Poignant, député, a indiqué qu'une nouvelle saisine permettrait une discussion nouvelle.
M. René Trégouët, sénateur, a fait observer l'importance de choisir une procédure non critiquable.
A l'initiative de M. Henri Revol, sénateur, président, et de M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, la proposition de reporter la décision sur l'adoption du rapport, après des auditions publiques et contradictoires ouvertes à la presse, organisées par l'office et présidées par le rapporteur, sur les principales questions portant à discussion sur les déchets et les rejets radioactifs, a été adoptée par sept voix contre une.