Naissance :
11 juillet 1723 - Bort (Corrèze)
Décès :
31 décembre 1799 - Saint-Aubin-sur-Gaillon (Eure)
Profession ou qualité :
écrivain
Autres mandats :
Député au Conseil des Cinq-dents

Membre du Conseil des anciens du 1er prairial an V au 30 Floréal an VI

MARMONTEL (JEAN-FRANÇOIS), député au Conseil des Cinq-Cents, né à Bort (Corrèze) le 11 juillet 1723, mort à Saint Aubin sur Gaillon (Eure) le 31 décembre 1799, issu d'une famille obscure, fut destiné à l'état ecclésiastique. Un prêtre lui enseigna les humanités et l'envoya chez les jésuites de Mauriac, puis chez ceux de Toulouse. Il s'adonna à la littérature, et, peu de temps après, écrivit, pour les Jeux floraux, une ode sur l'Invention de la poudre à canon qui ne fut pas couronnée. Il éprouva beaucoup de dépit de cet insuccès et s'en ouvrit à Voltaire qui, plein de sollicitude pour les jeunes, lui envoya un exemplaire de ses œuvres à titre de dédommagement et le pressa de se rendre à Paris où, prétendait-il, il ne pouvait manquer de réussir. Ayant obtenu un prix à l'académie de Toulouse, il se décida à partir, à peine âgé de 23 ans, avec quelques écus en poche, et, durant le long voyage, traduisit la Boucle de cheveux enlevée de Pope. La vente de cette traduction, à son arrivée à Paris, le fit vivre quelque temps, mais il se trouva bientôt presque sans ressources. Il avait cependant fondé, avec Bauvin, l'Observateur littéraire, qui ne se vendit guère, car, comme il le dit lui-même, « nous n'avions ni fiel ni venin. » En 1745, l'Académie mit au concours : La gloire de Louis XIV perpétuée dans le raison successeur ; Marmontel y prit part et vit son œuvre couronnée. Voltaire, dit-on, se chargea de vendre ce poème et, après un séjour à la campagne, rapporta à son protégé « un chapeau plein d'écus ». Ce dernier, en reconnaissance, publia, en 1776, une édition très soignée de la Henriade, avec variantes et préface. Sur le conseil de Voltaire, il travailla ensuite pour le théâtre, et fit représenter Denys le Tyran en 1748, Aristomène en 1749, et Cléopâtre en 1750, tragédies envers qui n'eurent qu'un succès médiocre. L'aspic automate de Vaucanson, « clou » remarquable pour l'époque, ne put même sauver cette dernière pièce, La Guirlande et Acante et Céphise opéras, en 1751, les Héraclideset Egyptus tragédies, en 1752 et 1753, ne réussirent pas mieux, non plus du reste que Lysis et Délée et les Sybarites, dont Rameau pourtant avait écrit la musique. Le poème sur l'Établissement de l'École militaire et les Vers sur la convalescence du Dauphin, passèrent également presque inaperçus. Marmontel cependant était admis chez la marquise de Pompadour, et corrigeait en secret les ouvrages de l'abbé de Bernis; il fréquentait Quesnay et les beaux esprits. Mais on ne payait guère ses services et il s'en plaignait amèrement. Il éprouva d'autres déboires. A propos du Venceslas de Rotrou qu'on l'avait chargé de retoucher, il eut avec 1 acteur Le Kain une altercation violente. Sollicité alors par Boissy, pauvre écrivain qui venait d'obtenir le privilège du Mercure, il se décida à écrire ses Contes moraux. Il se trouva que cette publication, sur laquelle il ne comptait guère, excita un engouement subit ; Marmontel devint l'auteur à la mode, et désormais les soirées de Mme de Brionne et de Mme Geoffrin se disputèrent la primeur de ses petites histoires. Ce fut du reste pour peu de temps ; son nouvel opéra : Hercule mourant, avait assez piteusement échoué, en 1761, quand il s'avisa d'envoyer à l’Académie : Les charmes de l'étude, Épître aux poètes ; Boileau y était fort maltraité et Virgile s'y voyait préférer l'auteur de la Pharsale. Le travail de Marmontel fut cependant couronné, et l'auteur songeait déjà à poser sa candidature à l'un des fauteuils vacants, lorsqu'une lettre de cachet l'envoya à la Bastille. Le duc d'Aumont lui attribuait une satire imitée de Cinna, qui ridiculisait d'une façon piquante le gentilhomme de la Chambre, mais dont en réalité Marmontel n'était pas l'auteur. C'était un certain Cuny, intendant des Menus-Plaisirs, qui lui était bien connu ; mais il se garda de le dénoncer, et ce bel exemple de discrétion, que Morellet estimait à l'égal de son meilleur ouvrage, lui coûta cependant le privilège du Mercure, qu'il avait obtenu après la mort de Boissy; or, ce privilège rapportait 15,000 livres de rentes. Redevenu libre, Marmontel fit paraître la Poétique française (1763), qui lui ouvrit enfin les portes de l'Académie, où il fut reçu le 22 décembre de la même aunée. En 1766, il donna une traduction de la Pharsale, commencée à la Bastille, et Bélisaire, en 1767. Cet ouvrage acheva de fixer sur lui l'attention publique il fut traduit dans toutes les langues. La Sorbonne s'émut, protesta contre les tendances du livre, et finit par y découvrir un nombre considérable d'hérésies. Cet incident donna lieu à une pluie d'épigrammes, à laquelle le gouvernement royal mit un terme en nommant Marmontel historiographe de France. Cette situation ne lui fut probablement jamais à charge, car il ne publia qu'en 1775 la seule œuvre de toute sa vie qui puisse s'y rattacher, la Lettre sur le sacre de Louis XVI. Il était occupé ailleurs, et avait composé des opéras comiques qui réussirent assez bien, notamment le Huron et Zémire et Azor pour Grétry, Pénélope pour Piccini, Demophoon pour Cherubini. Il s'intéressait aussi à la querelle sur la musique qui divisait alors les salons et il publia, en 1777, un Essai sur les révolutions de la musique en France, qui souleva de vives protestations. Il remania aussi divers ouvrages de Quinault. Peu de temps après, les Incas, poème en prose, dédié à Gustave III, roi de Suède, avec lequel l'auteur entretenait une correspondance, firent quelque bruit, sans attirer, comme il l'avait espéré, l'attention de la censure ecclésiastique. Cet ouvrage, consacré à la défense de la liberté religieuse, précéda de peu de temps les Éléments de littérature parus en 1787, formés des articles revus, corrigés et augmentés que Marmontel avait jadis écrits pour l'Encyclopédie. Quelques rares critiques, Morellet entre autres, mettent ses Éléments au-dessus du Cours de Laharpe. Marmontel, qui avait été nommé, en 1783, secrétaire perpétuel de l'Académie française, en remplacement de D'Alembert, s'intéressa au mouvement politique de la Révolution. En 1789, il fut membre de l'assemblée électorale de Paris, mais sa candidature échoua alors contre celle de Sieyès. Pendant la Terreur, il vécut caché dans l'Eure, composant pour se distraire une nouvelle série de Contes moraux. Sous le Directoire, il participa aux secours accordés aux artistes et gens de lettres, et prononça, à l'Académie, des discours à propos des prix de vertu. Élu, le 23 germinal an V, député au Conseil des Anciens par le département de l'Eure, avec 303 voix (324 votants), il prit place parmi les modérés, et devint secrétaire du Conseil; mais, suspect de royalisme, il vit son élection annulée au 18 fructidor ; il avait été, en effet, compromis dans la conspiration de Brothier, dont la pièce n° VIII contient l'éloge de ce « cher Marmontel ». 11 achevait les Mémoires d'un père pour servir à l'instruction de ses enfants, quand il succomba aux suites d'une attaque d'apoplexie. En outre des nombreux ouvrages déjà cités, on a encore de lui : une édition de ses Œuvres (Paris, 1786-1787); des Œuvres posthumes qui contiennent : les Nouveaux contes. moraux; les Mémoires et les Leçons d'un père, et les Mémoires sur la régence du duc d'Orléans. Enfin l'abbé Morellet possédait une copie d'un poème lascif de Marmontel : la Neuvaine de Cythère, qui ne fut imprimé qu'en 1820.