Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Décès d'un ancien sénateur

CMP (Candidatures)

Loi de finances pour 2008 (Suite)

Allocution du Président

Interventions sur l'ensemble

Vote sur l'ensemble

CMP (Nominations)




SÉANCE

du mardi 11 décembre 2007

40e séance de la session ordinaire 2007-2008

présidence de M. Christian Poncelet

La séance est ouverte à 16 heures 5.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Décès d'un ancien sénateur

M. le président.  - J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue et ami Charles de Cuttoli, sénateur honoraire et membre honoraire du Parlement, qui fut sénateur représentant les Français établis hors de France de 1974 à 2001.

CMP (Candidatures)

M. le président.  - La commission des finances m'a fait connaître qu'elle a désigné les candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2008.

Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.

Loi de finances pour 2008 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.

Allocution du Président

M. le président.  - Nous voici parvenus au dernier jour de la discussion budgétaire. Quelle comparaison choisir ? Celle du marathon ou de la course de fond ?

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Celle de la course d'obstacles !

M. le président.  - En tout cas, ces trois semaines requièrent des qualités d'athlètes complets... (On approuve à droite) En notre nom à tous, je remercie une nouvelle fois Mme Lagarde et M. Woerth pour la qualité de leur écoute et la précision de leurs réponses (applaudissements à droite et au centre), le président et le rapporteur général de la commission des finances (« Bravo ! » et applaudissements à droite et au centre), dont la présence constante et la rigueur ont fait, une fois de plus, l'admiration de tous.

M. Adrien Gouteyron.  - Très juste !

M. le président.  - Pendant plus de cent trente heures, chacun a pu apporter sa pierre à l'édifice budgétaire. Sur les deux cent vingt six orateurs intervenus pendant cette discussion, cent trente quatre appartiennent à la majorité et quatre vingt douze à l'opposition. Sur les cent treize rapporteurs qui ont animé nos débats, quatre-vingt un sont issus de la majorité et trente deux de l'opposition. C'est donc une vraie diversité des points de vue qui, cette année encore, s'est exprimée.

Je souhaite remercier vivement tous ceux qui ont scrupuleusement respecté les temps de parole fixés par la Conférence des Présidents, conformément à l'appel que j'avais lancé. Grâce à vous, nos débats ont été sereins et riches, ce dont témoigne le large écho médiatique qu'ils ont reçus.

Comme chaque année, la discussion budgétaire a reflété tous les aspects de l'actualité des politiques publiques. A en juger par les amendements sénatoriaux, les thèmes abordés pendant cette discussion relèvent de l'inventaire à la Prévert, allant de la TVA sur les activités de déneigement aux aumôniers dans les prisons, de la fiscalité sur les biocarburants au monopole de l'État sur les ventes de tabac outre-mer, de la redevance télévision aux cessions d'ordinateurs par les entreprises, sans oublier, dans un registre plus technique, les plus-values à long terme des sociétés immobilières cotées ou l'exonération de charges pour les employeurs de service à la personne.

Et, une fois encore, a pu s'exprimer la spécificité de notre assemblée, représentant constitutionnel des collectivités territoriales et des Français établis hors de France. Les débats centrés sur les collectivités territoriales, sous oublier celles d'outre-mer, ont été particulièrement éclairants. Quant à nos collègues représentant les Français établis à l'étranger, ils ont fait preuve d'une forte implication dans les questions concernant les affaires étrangères et la culture.

Le travail que nous venons d'accomplir ne s'arrêtera pas avec la promulgation de la loi que nous allons voter. Dès le 1er janvier, il appartiendra au Gouvernement d'assurer l'exécution de ce budget, conformément aux orientations que nous avons fixées. Monsieur le ministre du budget, espérons que le taux d'application de cette loi dépassera les 35 %, qui constituent le taux moyen -et insuffisant- d'application des lois comme l'a souligné un récent rapport du Sénat. Vous pouvez faire mieux, je n'en doute pas !

Pour l'heure, profitons pleinement de ce moment solennel, convivial et républicain du vote sur l'ensemble du budget. Nous nous retrouverons bientôt pour le collectif ! (Applaudissements à droite et au centre)

Interventions sur l'ensemble

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.  - (Applaudissements à droite) Nous venons de vivre des débats toujours riches, intéressants, sereins, vous l'avez dit, monsieur le Président, et souvent exaltants. Mais c'est au moment de l'examen des amendements que l'intensité voire le suspense atteignent leur meilleur niveau, tout spécialement lorsque leurs auteurs sont inspirés par de fortes convictions, notamment celles acquises par des contrôles sur place et sur pièces. Nous avons pu le vérifier cette année, peut-être plus nettement encore que les années précédentes, le président Gouteyron, rapporteur spécial de la mission « Action extérieure » peut en témoigner.

Ainsi, je lance à nouveau un appel aux rapporteurs pour avis : puisque le contrôle est l'une de nos grandes prérogatives, unissons nos initiatives et nos efforts, organisons des missions conjointes des rapporteurs spéciaux de la commission des finances et des rapporteurs pour avis des autres commissions. Les constats, les données factuelles, sont des arguments déterminants pour convaincre le Sénat mais aussi le Gouvernement. Et le vote d'un amendement donne au débat son relief, son originalité, sa valeur ajoutée. Cessons de nous interroger sur les pouvoirs du Parlement et osons assumer la plénitude de nos prérogatives. C'est le meilleur service que nous puissions rendre au Gouvernement et à la sphère publique.

Dans ce cadre, le temps est venu de s'interroger sur la durée et la forme des discussions générales des trente-quatre missions du budget. Réduire la durée des séances dans l'hémicycle, libérer du temps pour les auditions publiques et les réunions de commissions dans le « petit hémicycle », et, surtout, revaloriser le projet de loi de règlement, telles sont les pistes de réflexion suscitées par nos débats des dix derniers jours, pour rénover le rôle du Sénat auquel chacun ici est légitimement attaché.

A l'évidence, nous avons examiné un budget de transition, dont la sincérité a été servie par un bel effort du Gouvernement. Cette sincérité révèle toute l'âpreté de la situation de nos finances publiques. C'est, au seuil de la nouvelle législature, un budget qui porte la marque des gestions antérieures et qui transcrit les mesures votées cet été dans la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat. Il serait donc vain d'y chercher la trace des réformes à venir.

Au cours de nos débats courtois et constructifs, nous nous sommes efforcés d'atténuer les conséquences de certains arbitrages. C'est ainsi qu'à propos des relations entre l'État et les collectivités territoriales, fidèles au bonus constitutionnel du Sénat, nous avons, non sans difficulté, gommé la brutalité des ajustements ciblés sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) et la compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties. Avec le rapporteur général, le rapporteur spécial Michel Mercier et le Gouvernement, une solution a été trouvée. Mais nous avons surtout mis en évidence la fin annoncée d'un mode de financement de l'État vers les collectivités territoriales et nous sommes convenus d'ouvrir, dès le début de l'an prochain, le chantier des modalités de répartition des 54 milliards de dotation. Arrivé au bout du rouleau, le système croule sous les contraintes et la complexité : toute péréquation est devenue impossible, pérennisant des injustices flagrantes.

M. Gérard Delfau.  - C'est vrai !

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Il est donc urgent d'y porter remède avec lucidité et courage.

Sur le fond, et sans préempter le bilan que le rapporteur général va dresser, ce budget nous invite à une triple réflexion. D'abord, comment retrouver l'équilibre des finances publiques d'ici 2010 ou 2012 ? Nous devrons faire 65 milliards d'économies qui, sans préjuger des résultats de la revue générale des politiques publiques, dépendront, pour une large part, du taux de croissance de notre économie récemment mis à mal. A l'évidence, l'augmentation durable du prix du pétrole ne va pas simplifier les choses, d'autant moins que la hausse du prix des matières premières offre de nouveaux champs d'action aux fonds souverains qui risquent de ne plus seulement investir dans notre dette souveraine !

Ensuite, comment redonner de la compétitivité au travail, aux entreprises, aux territoires afin de contribuer au dynamisme de notre économie ? C'est certainement le grand débat de l'année à venir, au moment où le tabou des délocalisations vient de sauter, comme en attestent les récentes déclarations des responsables de nos fleurons industriels, notamment dans l'aéronautique. Nous ne pouvons en aucune façon considérer que la désindustrialisation est une fatalité. Souvenons-nous du déficit record en octobre et sans doute pour 2007 de notre commerce extérieur. S'il est vrai que l'État dépense plus qu'il ne reçoit, les Français consomment plus qu'ils ne produisent ! La récente baisse du chômage accrédite le retour à une croissance plus robuste. Reste que d'importantes réformes structurelles, notamment sur les prélèvements obligatoires, sont nécessaires. Pour l'instant, nous attendons avec confiance les conclusions de la révision générale des politiques publiques. Dès demain, une première série d'arbitrages sera prononcée.

Enfin, le redressement économique, au-delà des efforts de la France, appelle l'Europe à un sursaut. A côté de l'Europe économique, symbolisée par la Banque centrale, il faut que l'Europe politique existe enfin. Comment, à la veille de la présidence française, faire entendre notre voix ? Par des réformes structurelles courageuses, trop longtemps ajournées. Retrouvons un rôle moteur : l'année prochaine porte toutes nos espérances.

Avant de conclure, je me fais, mes chers collègues, votre porte-parole en adressant mes très chaleureux et cordiaux remerciements à Philippe Marini, (Applaudissements à droite) notre rapporteur général qui, comme à son habitude, a mis sa maestria, la force de ses convictions et son sens de la pédagogie au service du Sénat. (« Bravo ! » et applaudissements à droite et sur divers bancs au centre) Je remercie aussi les quarante-trois rapporteurs spéciaux de la commission des finances et les soixante-quatre rapporteurs pour avis des cinq autres commissions permanentes qui, sous l'autorité de leurs présidents, ont su donner de l'interactivité, et même parfois de l'imprévu, à nos débats.

Merci également à tous nos collègues qui ont participé à nos discussions avec autant de conviction que de courtoisie républicaine, le tout dans le respect de nos légitimes différences, à l'image de ce que notre assemblée sait si bien faire. Nous avons ainsi connu plusieurs moments très appréciés d'unanimité. Je veux aussi saluer les ministres, dont un grand nombre se sont prêtés avec bonheur à notre dialogue en vous distinguant tout naturellement, monsieur le ministre du budget et des comptes publics. Mes remerciements vont bien évidemment à l'ensemble de vos collaborateurs et aux nôtres. Je remercie enfin la présidence, vous, monsieur le Président du Sénat et les six vice-présidents ainsi que les services de la séance et des comptes rendus. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.  - Nous voici arrivés au terme de la discussion de cette première loi de finances de la nouvelle mandature et, d'ici quelques jours, nous allons aborder le dernier obstacle avec le collectif budgétaire. Mais, à chaque jour suffit sa peine...

Aux soixante articles de la loi de finances initiale, nous avons ajouté cinquante-huit articles (murmures admiratifs à droite) dont l'initiative s'est harmonieusement répartie entre le Gouvernement et le Sénat et, au sein de notre assemblée entre la majorité mais aussi, et pour une part non négligeable, l'opposition. (On en doute à gauche) En ce qui concerne le budget, nous avons tenus nos engagements puisque nous n'avons pas alourdi le déficit, en dépit des multiples sollicitations dont nous avons fait l'objet. Et ce, malgré l'ajustement du droit à compensation lié au transfert de personnels aux collectivités, pour 110 millions d'euros. Nous avons même amélioré, à la marge, les dotations d'ajustement pour le financement des collectivités.

De nos délibérations ont découlé 600 millions de mouvements de crédits, sur treize missions. Nos rapporteurs spéciaux et pour avis ont été particulièrement actifs durant l'examen de la seconde partie, vigilants, soucieux d'apporter une contribution éclairée par les travaux qu'ils effectuent tout au long de l'année. A la demande du Gouvernement, nous avons supprimé 675 millions de crédits, mais aussi procédé à des ouvertures pour 170 millions. Autrement dit, l'élaboration du budget est itérative et interactive et les sénateurs en sont partie prenante et non pas spectateurs.

Merci à tous ceux qui ont, par leurs propositions, fait progresser le texte, MM. Lambert, Fréville, Gouteyron, Guené, Houel, Bizet, du Luart...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Vous en oubliez !

M. Philippe Marini, rapporteur général. - ...Mouly, Christian Gaudin, Adnot,...Dans l'opposition, je peux saluer M. Charasse (applaudissements sur quelques bancs UMP) pour sa démarche transpartisane, ainsi que, dans un rôle plus orthodoxe, MM. Domeizel, Marc, Mauroy, Pastor, Massion...

Sur la fiscalité de l'épargne et les marchés financiers, nous n'avons pu aller dans le sens des préconisations du groupe CRC (rires à droite), mais nous avons supprimé l'impôt de Bourse.

Mme Odette Terrade.  - C'est dommage !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Nous avons réduit la fiscalité des valeurs mobilières...

Mme Nicole Bricq.  - On peut le dire !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - ...Nous avons fixé le prélèvement libératoire à 18 %, un niveau vertueux. Nous avons aussi relevé le seuil d'imposition des cessions de valeurs mobilières (exclamations à gauche) et donné accès au prélèvement libératoire aux dirigeants d'entreprises non salariés détenteurs de titres. (Protestations sur les mêmes bancs)

Sur les biocarburants, à l'initiative du Gouvernement et de la commission, nous avons prorogé le remboursement d'une partie de la TIPP et de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel pour les exploitants agricoles. Nous avons aussi révisé en fonction de la conjoncture le barème des exonérations pour les différentes filières de biocarburants : nous avons réaffirmé la priorité donnée à cette diversification agricole.

Sur les dotations aux collectivités locales, la commission a beaucoup peiné...

M. Bernard Vera.  - Elle n'est pas en forme.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Nous avons aménagé les règles d'indexation de l'enveloppe normée, maintenu l'indexation sur l'inflation prévisionnelle, limité les baisses des variables d'ajustement et voté un mécanisme correctif. Ces 113 millions d'euros atténueront les difficultés à attendre en matière de compensation des exonérations de taxe foncière sur le non bâti et de taxe professionnelle.

Nous avons pris plusieurs dispositions concernant le régime des sociétés immobilières cotées et nous nous félicitons des innovations...

Mme Nicole Bricq.  - Il n'y a pourtant pas de quoi être fiers !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - En seconde partie, nous avons, à l'initiative du Gouvernement, apporté quelques modifications : crédit d'impôt recherche, jeunes entreprises universitaires, fiscalité locale. Surtout, nous avons consacré beaucoup de temps aux débats de principe et le Sénat a voulu affirmer sa place, prendre date et préparer les échéances prochaines : fiscalité écologique, avec l'amendement sur la récupération des imprimés et sur l'extension de Ecofolio, valorisation des déchets, efficacité de l'intercommunalité... Et sur le sujet crucial de l'autonomie des personnes âgées, nous avons suivi les orientations du Président de la République en faveur de la création d'un cinquième risque. Une mission commune est formée, commission des affaires sociales et commission des finances. Nous ne nous sommes pas dérobés sur ce difficile débat de la solidarité entre générations.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il n'était pas envisageable pour nous d'éluder la question de la récupération sur succession. Nous avons lancé la réflexion.

M. Guy Fischer.  - Vous voulez faire payer les pauvres ! C'est scandaleux !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Il n'est en rien scandaleux que de génération en génération, on se préoccupe de ses anciens. (Applaudissements à droite, exclamations indignées à gauche)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Scandaleux !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Nous nous sommes enfin attaqués aux niches fiscales, ces mauvaises herbes qui ont proliféré ces dernières années. L'Assemblée nationale et le Sénat ont des façons distinctes d'aborder la question -les députés souhaitent plafonner, nous voulons limiter dans le temps, voire supprimer- mais notre préoccupation est identique. Nous voulons une fiscalité plus lisible et plus propice à la création d'emplois et à l'investissement.

La première séance du Conseil de modernisation aura lieu demain sous l'autorité du Président de la République : des décisions importantes sur le système étatique seront annoncées avec, comme but, un meilleur service aux usagers.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Tout est déjà dans la presse !

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Nous ne sommes pas adeptes de l'État immobile : nous sommes dans un monde compétitif. Il faut assumer l'avenir, en disant la vérité à nos concitoyens. C'est ce que nous avons fait durant cette discussion budgétaire. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Marc Massion.  - (Applaudissements sur les bancs socialistes) Nous en avons cette année confirmation : il n'est de pire situation pour la droite au pouvoir que de succéder... à la droite. (Applaudissements sur plusieurs bancs socialistes ; M. Braye s'exclame) Le tandem Sarkozy-Fillon assume de façon fort critique l'héritage laissé par des gouvernements de droite dont ils ont été des acteurs essentiels.

Les chiffres sont là : le taux des prélèvements obligatoires est passé de 42,9 % du PIB en 2003 à 44,2 % en 2006, et la dette a progressé de huit points en cinq ans. D'où l'appel à la rupture ! Mais il y a deux façons de la faire, pour le mieux ou pour le pire ; vous avez choisi la deuxième voie et votre loi Tepa n'a fait qu'aggraver les choses. Résultat, le Chef du gouvernement évoque un État en faillite et le Président de la République clame que les caisses sont vides. C'est sûrement de la franchise, mais aussi un constat d'échec ! Ces propos sont-ils bons pour le moral des Français ? Qu'en pensent nos partenaires européens ? Le moins que l'on puisse dire, c'est que vous n'avez pas de leçon à donner.

Ce budget aggrave encore les inégalités. Vous avez fait semblant d'oublier que dans l'intitulé de votre loi Tepa, il y avait « pouvoir d'achat ». Des millions de Français ont espéré. Mais le candidat du pouvoir d'achat est devenu le Président d'un paquet fiscal destiné aux plus aisés, et maintenant celui des heures supplémentaires et des RTT, sans que l'État ait les moyens d'assumer son rôle de patron. Ces mesures ne sont que des injonctions aux entreprises.

Des millions de Français ne sont pas concernés par vos décisions. Vous aviez promis aux retraités, et particulièrement aux plus modestes, une augmentation des pensions de 25 % en cinq ans ; ce sera cette année 1,1 % ! (M. Fischer s'en désole). Et 800 000 d'entre eux paieront la moitié de la redevance télévision, alors qu'ils en étaient exonérés. (Applaudissements à gauche) Vous n'augmentez pas le pouvoir d'achat, vous le diminuez encore avec les franchises médicales ! Les chômeurs ne sont pas plus concernés, ni les RMIstes, toujours plus nombreux ...

M. Dominique Braye.  - C'est faux !

M. Marc Massion.  - ... ni les salariés à temps partiel. Que faites-vous pour les caissières de supermarché à 22 heures par semaine ? Délaissés aussi tous ceux qui n'ont pas la possibilité de faire ces fameuses heures supplémentaires, tout simplement parce que ce ne sont pas eux qui décident ! Imaginer le climat que cela va créer dans certaines entreprises : après les CDI, les CDD, les intérimaires, voici ceux qui pourront faire des heures supplémentaires et ceux qui ne le pourront pas ! Ce n'est pas de la cohésion sociale, mais de la dislocation sociale ! (Applaudissements sur les bancs socialistes) Cela fait décidément beaucoup d'exclus !

Vous avez pu, à l'occasion d'un conflit d'ailleurs encore en cours, évoquer l'équité. (Mme Borvo Cohen-Seat ironise) Dites-nous ce que ce mot veut dire dans le cadre d'une politique qui dresse les Français les uns contre les autres ! Allez sur les marchés, messieurs les ministres, sans caméra, simplement pour écouter : les Français modestes, ceux que vous ignorez, vous diront qu'ils ne peuvent plus acheter les produits alimentaires les plus courants ! Une situation à comparer avec telle auto-augmentation au plus haut niveau de l'État... Vous voulez aider les pêcheurs ? Faites que les consommateurs puissent acheter du poisson, ce qu'ils font de moins en moins -mais vous les en dissuaderez davantage avec votre nouvelle taxe. Vous êtes en réalité prisonniers de votre idéologie, qui oppose le pouvoir d'achat à la compétitivité des entreprises ; nous sommes nous aussi favorables à celle-ci, mais sans sacrifier celui-là. Cela s'appelle la justice sociale -mais le mot ne figure sans doute pas dans votre vocabulaire. La baisse des recettes de TVA est un mauvais signe.

Ce budget porte aussi un mauvais coup aux collectivités locales. Vous aurez beau triturer les chiffres, répartir autrement la pénurie, ce sont 400 millions qui leur manqueront, ce que le rapporteur général appelle « un pincement des ressources » qui leur sont consacrées. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Vous avez remis en cause le pacte de croissance et de solidarité, alors que les collectivités locales participent à hauteur de 72 % à l'investissement public. Si leur dynamique s'essouffle, que deviendra la croissance ? Elle est déjà faible, trop faible : c'est peu dire que le choc de confiance attendu n'a pas eu lieu. Dans ce projet de budget, la rupture est là, dans la politique en direction des collectivités locales qui, elles - et les régions en particulier- assument leurs engagements. Le Congrès de l'Association des maires de France a dénoncé une politique déconnectée de la réalité des obligations financières des collectivités -dont la dette, soit dit en passant, ne représente que 0,1 % du PIB. La péréquation est totalement oubliée.

M. Gérard Delfau.  - Très bien !

M. Marc Massion.  - Au cours de la discussion budgétaire, nous avons dit notre opposition à vos choix politiques. Vous ne traitez ni du logement, ni de l'éducation, ni de la ville -comme l'a relevé l'Association des Maires Ville et Banlieue, le budget de la ville et du logement régresse de 12,7 %. L'évolution annoncée du livret A laisse mal augurer du devenir du financement du logement social.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Son taux va augmenter !

M. Marc Massion.  - Vous remettez en cause le principe républicain de la progressivité de l'impôt et vous souhaitez, sans jamais oser le faire, supprimer l'ISF. A force de cadeaux aux plus favorisés, vous n'avez plus de marges de manoeuvre.

On nous dit, bien sûr, que nous ne sommes pas une gauche moderne. Mais pour vous, la gauche moderne, c'est celle qui adhère à votre politique, celle des quelques individualités qui vous ont rejoints. Mais ne comptez pas sur nous ! (On approuve vivement sur les bancs socialistes) Je me souviens d'un de mes professeurs de français qui nous avait interdit l'usage de deux mots : « formidable », mal employé, et « moderne », parce que ce qui est moderne un jour ne l'est plus le lendemain.

M. Gérard Longuet.  - La gauche n'est ni formidable, ni moderne !

M. Marc Massion.  - Nous devons certes nous adapter à un monde qui bouge ; mais nous restons campés sur nos valeurs, la solidarité, l'égalité des chances, la laïcité, la justice sociale, pour présenter nos propositions.

M. Dominique Braye.  - Les Français n'en veulent pas !

M. Marc Massion.  - Pour l'instant ! Nous ne voterons pas ce mauvais budget. Et le pire est à venir ! (Applaudissements à gauche et sur plusieurs bancs du RDSE)

M. Josselin de Rohan.  - (Applaudissements à droite) Des incertitudes peuvent retentir sur l'exécution de ce budget. La première est la hausse sensible des matières premières et énergétiques. Le prix à la production des céréales a été multiplié par deux en un an ; selon le rapporteur général, une augmentation de 10 dollars du prix du Brent coûterait à la France et à la zone euro 0,5 point de croissance.

La deuxième est le taux de change de l'euro ; un écart de 10 % coûterait un peu moins d'un point de PIB, mais pèserait sur un commerce extérieur déjà en déficit de 29 milliards et augmenterait le risque de délocalisations.

La troisième incertitude est la crise des subprimes, qui pourrait faire fléchir la croissance européenne après l'américaine, et pousser à la hausse des taux d'intérêt.

Nous héritons aussi de trois éléments indiscutables et pénalisants. Nous consacrons des sommes aussi importantes à compenser les effets des 35 heures qu'à encourager le travail. Quand on appuie simultanément sur l'accélérateur et sur le frein, on risque le tête à queue. Il faut mettre un terme définitif aux 35 heures ! (Applaudissements à droite)

M. Charles Gautier.  - Pourquoi ne le faites-vous pas ?

M. Josselin de Rohan.  - Le service de la dette de l'État équivaut au produit de l'impôt sur le revenu. L'État s'endette pour financer ses dépenses de fonctionnement. Il faut donc réduire la dépense publique.

Depuis sept ans, la production industrielle a progressé de 9 %, les importations de 66 %, la consommation de biens manufacturés de 23 %. La compétitivité de notre pays le place au dix-huitième rang des nations occidentales. Il faut travailler davantage, il faut travailler mieux.

Telles sont les orientations tracées par le Président de la République : privilégier le travail et l'effort, renoncer à l'augmentation mécanique de la dépense publique. Ce n'est qu'à ce prix que notre endettement passera sous les 60 % et que l'équilibre budgétaire sera atteint en 2012. Il faudra, dit le rapporteur général, trouver 85 milliards d'économies ; des sacrifices sont à venir.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Des sacrifices pour qui ?

M. Josselin de Rohan.  - Ce budget 2008 responsable et porteur d'avenir repose sur des hypothèses prudentes. Les dépenses n'évolueront pas au-delà de l'inflation, le déficit est stabilisé à 41,7 milliards. La réserve de précaution de 7 milliards décidée dès le début 2008 doit permettre de tenir ces engagements.

Ce budget traduit une réduction des effectifs de l'État très supérieur aux exercices précédents : 22 900 départs à la retraite ne seront pas remplacés, soit un fonctionnaire sur trois. La masse salariale ne diminue pourtant pas, du fait de l'augmentation des pensions. Sur 5,5 milliards d'augmentation des crédits à périmètre constant, 2 milliards sont préemptés par les pensions.

La priorité est donnée aux mesures valorisant le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat, l'innovation et la recherche. Les baisses d'impôt atteignent 7,5 milliards, pour mettre en oeuvre la loi Tepa, dont 57 % vont à l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires. Il s'agit donc bien de favoriser l'emploi, et il est tout à fait abusif de qualifier ces mesures de cadeaux aux riches ! (Exclamations à gauche, approbation à droite)

M. Dominique Braye.  - Exactement !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - On verra au résultat !

M. Josselin de Rohan.  - De même, les mesures sur les intérêts d'emprunt et les droits de mutation favorisent l'accession à la propriété des classes moyennes aujourd'hui pénalisées par l'envolée des prix de l'immobilier et la remontée des taux d'intérêt ou par des droits de succession qui découragent la transmission de patrimoines peu considérables ! Ces mesures élèvent le pouvoir d'achat de ceux qui en bénéficient ! Le Président de la République a annoncé des mesures complémentaires pour indexer les loyers sur l'inflation, supprimer les cautions, réduire à un mois la garantie, autoriser le rachat des jours de RTT et la conversion en argent des comptes épargne-temps.

Nous sommes loin des propositions démagogiques de M. Hollande et ses amis, qui ont cueilli dans leur brocante de vieux rossignols inefficaces depuis des lustres ! (Vives exclamations à gauche, rires à droite). Que proposent-ils ? Le blocage des loyers qui provoque des crises durables dans l'immobilier, le doublement de la prime pour l'emploi qui, comme le dit justement M. Arthuis, crée surtout des emplois en Chine, la TIPP flottante, dispendieuse pour le Trésor sans impact sur les prix à la pompe ! (Mêmes mouvements)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Sur la Chine, vous devriez y regarder de plus près !

M. Josselin de Rohan.  - Madame, conservez votre calme ! Le problème du parti communiste, c'est bien sa perte de poids électoral : avec 1 % des voix, il souffre de trop de « Buffet » et manque de coffre ! (Rires et applaudissements à droite, exclamations à gauche)

Où sont les solutions originales ? Il en est de la rénovation du parti socialiste comme du monstre du Loch Ness : on en parle beaucoup, certains l'ont entrevue, mais personne ne l'a jamais approchée !

L'enseignement supérieur et la recherche bénéficient d'un effort sans précédent, de 1,8 milliard, pour accompagner la réforme des universités adoptée cet été. Plusieurs dispositions favoriseront l'innovation : le crédit recherche simplifié et renforcé pour soutenir les efforts de recherche et de développement engagés par les entreprises, l'allégement de la fiscalité des brevets, la création du statut jeune entreprise universitaire qui accorde aux étudiants ou aux chercheurs montant leur entreprise les mêmes avantages fiscaux et sociaux que ceux qui sont applicables aux jeunes entreprises innovantes. L'investissement sera mieux encouragé, car l'épargne sera orientée davantage vers les entreprises, grâce à la réforme de la fiscalité des dividendes ; les investissements risqués, comme les actions, ne seront plus pénalisés par rapport aux produits qui le sont moins. Cette priorité donnée à la recherche, l'innovation et l'investissement traduit notre volonté de renforcer la compétitivité de nos entreprises et s'inscrit dans une démarche favorisant une croissance forte et durable au service de tous, fondée sur l'économie de la connaissance. Le progrès technique ouvre la voie au progrès économique et social.

Ce budget prépare aussi une meilleure administration de l'État et des collectivités locales. Les débats de notre Haute assemblée montrent la nécessité d'une réflexion globale sur les dépenses publiques et l'architecture des prélèvements. Nous avons mis au jour des gisements de productivité, tout comme la persistance d'obstacles et certains conservatismes. L'esprit de la Lolf n'est pas accepté de tous, la culture de la performance et du résultat a du mal à s'imposer. Notre système de prélèvements obligatoires souffre encore de 650 niches fiscales dont nous devons examiner la pertinence comme l'utilité. Des réformes structurelles profondes sont indispensables pour réduire les déficits publics et faire que notre pays relève le double défi de la mondialisation et du vieillissement. Nous devons dépasser la logique des moyens pour s'interroger sur la finalité des politiques publiques, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques. Nous soutenons également la révision générale des prélèvements obligatoires, qui va identifier les faiblesses de notre système afin de moderniser son architecture, en concertation.

Nos débats ont encore mis en évidence les limites de notre financement des collectivités locales, qui reflète l'extrême confusion qui règne dans l'organisation de notre administration territoriale. Jamais depuis l'Ancien régime, l'on n'a connu un tel empilement de structures, un tel enchevêtrement de compétences, une telle complexité des financements. L'opinion en est consciente et son apparente résignation peut laisser vite place au mécontentement ! Malgré le cadre contraint du nouveau contrat de stabilité, le Parlement a préservé la dotation globale de fonctionnement qui continuera d'évoluer au rythme de l'inflation plus la moitié du taux de croissance prévisionnel, soit 2,08 % en 2008. Le Sénat est parvenu à limiter la baisse des dotations de compensation, en particulier pour les départements les plus défavorisés. La complexité du dispositif révèle toutefois les limites d'un système qui fonctionne en circuit fermé. Les collectivités territoriales subissent des contraintes croissantes sur leurs recettes sans disposer d'une réelle maîtrise de leurs dépenses. Il est temps que l'État cesse de leur dire : « Je commande et vous payez, je serai généreux et vous en ferez les frais ». Sans réforme en profondeur des relations entre l'État et les collectivités territoriales, nous devrons recommencer l'an prochain l'exercice acrobatique auquel nous nous sommes livrés cette année !

Nous attendons beaucoup des suites qui seront données aux recommandations de notre collègue M. Lambert, qui appelle à une refonte des relations financières entre l'État et les collectivités locales et nous serons très attentifs aux travaux de la conférence nationale des exécutifs mise en place par le Gouvernement.

Le chemin de la croissance passe par les réformes de grande envergure. Ces réformes, que le Président de la République a voulues, sont la condition du redressement de nos finances publiques, du développement de notre économie et du progrès social. Nous nous devons de les mener à bien sans hésitation ni faiblesse, pour notre pays, mais aussi pour notre crédibilité en Europe et dans le monde ! Le Gouvernement peut compter sur notre soutien total dans cette grande entreprise, nous voterons ce budget sans réserve et avec confiance ! (Applaudissements à droite et au centre)

M. Thierry Foucaud.  - (Applaudissements sur les bancs CRC) Le Gouvernement obtient l'appui de sa majorité, pour ce budget qui incarne la rupture voulue par le Président de la République dans ce qu'elle a de plus injuste et de plus insupportable ! Les impôts baissent pour les contribuables qui acquittent l'ISF, pour ceux qui touchent des dividendes, pour les spéculateurs de l'immobilier. Mais baisser la TVA pour donner du pouvoir d'achat, cela ne fait pas partie de votre vocabulaire ! Les pertes de recettes fiscales, avec les 20 milliards de cadeaux de la loi Tepa, sont autant de moyens qui manquent à l'éducation, à la formation, à l'insertion sociale, au logement ou à la santé ! Le Gouvernement taille dans les dépenses de personnels, dans la politique de la ville, il rationne le droit au logement ! Il offre le budget sur un plateau d'argent aux grands groupes et aux familles aisées, qui n'ont pas besoin de l'argent public dans leur vie quotidienne. La révision du barème de l'impôt sur le revenu apporte 5 milliards, dont 3 payés par les salariés et 1 par les retraités : c'est dire que les salariés n'auront rien à gagner avec l'usine à gaz des heures supplémentaires !

Ce budget sert le projet réactionnaire que le Gouvernement entend mener à bien en abusant du mandat arraché au peuple français ! (Vives exclamations à droite)

M. Dominique Braye.  - Un peu de tenue, monsieur 1 % !

M. Thierry Foucaud.  - Regardez l'état du capitalisme dans le monde, il est partout en déclin ! Et les guerres ? Et la misère ? (Même mouvement)

M. Dominique Braye.  - Et le communisme ?

M. Thierry Foucaud.  - Le pacte de stabilité corsète un peu plus l'action des collectivités locales. L'État fait payer par les élus locaux une partie de ses déficits : encore 1 milliard de moins cette année ! (Approbation à gauche, exclamations à droite) Vous devrez bien un jour parler franchement avec ceux d'« en bas » : quand vous rencontrez des citoyens, vous êtes d'accord avec eux, mais une fois ici, vous votez des textes qui font le contraire de ce que vous prétendez vouloir ! (Mêmes mouvements, applaudissements sur les bancs CRC)

M. Dominique Braye.  - On laisse ça aux communistes !

M. Thierry Foucaud.  - On l'a encore vu, hier soir ! Vous votez sans cesse des dispositions qui reviennent à faire les collectivités locales. À quelques mois des municipales, c'est scandaleux : avec un tel budget, les élus locaux se trouveront plus démunis face aux besoins sociaux des populations. Je pense notamment aux élus des villes de banlieue privées du quart de la hausse de la DSU prévue, ou encore de plus de 150 millions au titre de la politique de la ville. Avec vous, que le peuple des banlieues et des villes laborieuses indiffère, il est bien mal engagé, le « Plan Marshall » des banlieues de Mmes Boutin et Amara ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame)

Ce budget ne prête aucune attention aux attentes des populations. Il suffit de regarder la longue série d'économies votées en seconde partie pour s'en rendre compte. Entre les missions « Ville » et « Logement », « Insertion sociale, Intégration, Travail et Emploi » ou « Santé », 2 milliards sont annulés ! On rogne sur l'APL, on s'attaque encore à l'aide médicale d'État, on tape dans les crédits de l'insertion par l'emploi, on sabre dans ceux de la Culture, tout est bon, tout est utilisé pour réduire encore et toujours la dépense publique ! Mais affaiblir la dépense publique, c'est affaiblir l'État et ce n'est pas ainsi que nous rétablirons la situation du pays.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Plus on aura de déficit, plus on sera forts ?

M. Dominique Braye.  - Ne l'embêtez pas, il y croit !

M. Thierry Foucaud.  - Oui, je crois à ce que je dis ! Ce n'est pas comme vous !

Certains budgets progressent, cependant. Nous en avons repéré au moins trois. Celui de la dette progresse de 1,6 milliard, au grand bonheur des spéculateurs financiers ! Celui des dégrèvements et remboursements progresse de plus de 6 milliards et demi, surtout consacrés à réduire l'impôt sur les sociétés et la taxe professionnelle, sans garantie quant à la création d'emplois. On rogne sur l'APL mais les allégements de cotisations sociales des entreprises augmentent de 3 milliards pour le plus grand plaisir des fanatiques de la précarité et des bas salaires ! M. de Rohan nous a encore tenu le discours, habituel depuis cinq ans, sur la nécessité de libérer l'initiative.

MM. Josselin de Rohan et Dominique Braye.  - Le Smic, vous ne l'avez pas augmenté !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Arrêtez de brailler !

M. Thierry Foucaud.  - Et le plus terrible, c'est que, malgré tout, le Premier ministre lui-même vient de nous faire part de son pessimisme dans un quotidien économique. Malgré ces cadeaux dispendieux aux grands groupes, aux grandes fortunes et aux ménages aisés, la croissance ne serait pas au rendez-vous, se limitant pour 2007 à 1,9 point et les perspectives pour 2008 ne sont pas encourageantes. Mais où est donc passé le choc de croissance annoncé pour cette année après l'adoption de la loi Tepa ? Le faible niveau de consommation du dispositif « heures supplémentaires » montre que l'activité n'est pas vraiment relancée. Le faible nombre d'emplois créés depuis le début de l'année prouve que les gains de productivité ne se traduisent pas en emplois nouveaux !

Et vous annoncez au monde du travail de nouvelles réformes d'inspiration réactionnaire : flexibilité accrue, allongement des durées de cotisation aux régimes de retraite, travail du dimanche...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Et la messe, alors !

M. Thierry Foucaud.  - ...remise en cause des 35 heures, précarisation renforcée des contrats de travail, tout cela creusera encore plus les inégalités sociales !

Rien n'est pire que de voir l'État se montrer incapable de répondre aux attentes de la population ! La cinquième puissance économique mondiale a largement les moyens de satisfaire les besoins sociaux, autrement qu'en bradant le patrimoine de la Nation comme on le fait en cédant des parts d'EDF, soi-disant pour financer les universités ! D'autres choix sont possibles qui allient efficacité économique, équité et justice fiscales, et qui répondent aux attentes collectives. Nous avons proposé au cours de ce débat de taxer les superprofits des compagnies pétrolières, de remettre en cause les avantages fiscaux de la spéculation immobilière et financière, de baisser la TVA ou encore de renforcer l'impôt sur le revenu.

Ce budget, contraint par les choix libéraux que vous impose Bruxelles et que vous demande d'adopter le Medef n'aura que la durée de vie limitée d'un budget d'affichage. Une bonne partie de ce qu'a voté la représentation nationale ne sera pas respectée puisqu'au 1er janvier, vous commencerez par mettre de côté la réserve de précaution que vous ferez disparaître en fin d'année.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - C'est fait pour ça !

M. Thierry Foucaud.  - Déjà se profile l'ombre de l'austérité pour le plus grand nombre ! Nous ne voterons pas ce projet de loi de finances 2008 ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Michel Baylet.  - Premier budget de la nouvelle législature, ce projet de loi de finances est sans réelle surprise. D'abord, il propose peu de mesures fiscales nouvelles puisque la plupart des engagements du Gouvernement ont été pris dans le cadre de la loi Tepa, votée l'été dernier. Ensuite, comme ce fut déjà le cas en 2003 et 2005, cette loi de finances perpétue des pratiques budgétaires qui entament sérieusement sa crédibilité. Le texte est fondé sur des prévisions de croissance trop optimistes. Vous misez sur un taux de2,25 % tandis que la plupart des conjoncturistes s'accordent plutôt sur le chiffre de 2 % pour 2008. Vous appuyez votre politique budgétaire sur le haut de la fourchette prévisionnelle alors que la flambée des cours du pétrole et la crise américaine des subprimes laissent entrevoir une décélération de la croissance au sein de la zone euro. Vous prenez donc le risque de moins-values fiscales et d'un dérapage du déficit.

Comment, dans ces conditions, allez-vous maîtriser les dépenses publiques ? On sait déjà que le déficit de 2007 pourrait être supérieur à celui de 2006. Va-t-on recourir une fois encore à des recettes exceptionnelles pour donner l'illusion d'un contrôle du déficit budgétaire ?

Certes, le budget est fortement contraint. Nos engagements communautaires nous obligent et, en particulier, le pacte de stabilité nous impose une gestion saine des comptes de la Nation. Dès lors, était-il bien utile de priver l'État de 15 milliards ? Car là aussi, les choix de la majorité sont constants, qui consistent toujours, depuis cinq ans, à soulager les impôts des plus favorisés. Du bouclier fiscal aux petits arrangements de l'ISF, en passant par la suppression de l'impôt de Bourse, on voit bien à quelle catégorie de Français s'adresse la politique gouvernementale.

Pendant ce temps, l'autre France souffre. Plusieurs millions de Français vivent avec 800 euros -ou moins- par mois. Pour eux, les 15 milliards de cadeaux fiscaux auraient trouvé un meilleur emploi. Le logement par exemple, devenu très inflationniste, méritait une attention plus soutenue dans ce budget. Vous auriez pu encourager davantage les propriétaires privés à créer des logements sociaux et favoriser la construction de logements coopératifs sur des terrains d'État ou municipaux. Comment peut-on affirmer, d'un côté, se préoccuper du pouvoir d'achat et, de l'autre, prendre toujours un peu plus dans le porte-monnaie des Français ? Nous attendons avec impatience la concrétisation des annonces du Président de la République, car la baisse du pouvoir d'achat, c'est le résultat de votre politique et de celle de vos prédécesseurs. La situation des ménages ne fait que se dégrader avec la multiplication des franchises médicales. Comme si cela ne suffisait pas, des parlementaires de la majorité ont tenté -en vain heureusement- d'augmenter le produit de la redevance. Dans le contexte actuel, il serait plus opportun de revenir sur la suppression, décidée en 2004, de l'exonération de redevance : désormais cette redevance devra être partiellement acquittée en 2008 par 780 000 foyers âgés modestes.

Ce budget perpétue une politique dont les Français les plus fragiles mesurent gravement les effets et il ne crée pas non plus les conditions d'une véritable reprise économique : les radicaux de gauche ne le voteront pas. (Applaudissements à gauche et sur certains bancs du RDSE)

M. Aymeri de Montesquiou.  - Le Président de la République a fait de l'attractivité de notre économie la condition de la croissance et du plein emploi.

M. Charles Gautier.  - C'est mal parti.

M. Aymeri de Montesquiou.  - Selon Jacques Attali, qui a conseillé le président Mitterrand, notre économie pâtirait d'un excès de pouvoir d'achat. Derrière cette provocation se cache une vérité : notre pays consomme plus qu'il ne produit, et donc s'appauvrit. Contrairement à nos concurrents, nous avons constamment reporté des réformes vitales. Notre politique budgétaire conforte une pesanteur administrative et fiscale qui étouffe l'esprit d'entreprise et l'initiative économique ; les ressources publiques, sollicitées à l'extrême, ne corrigent plus les inégalités de revenus.

Comment attirer les investisseurs étrangers avec un taux d'imposition sur les sociétés parmi les plus élevés de l'Union européenne ? Comment retenir les capitaux alors que nous sommes, avec la Finlande, le dernier État européen à conserver une imposition sur le patrimoine -mais avec des taux bien supérieurs ? L'ISF contribue-t-il vraiment à l'intérêt général ? Comment développer l'esprit d'initiative lorsque la puissance publique absorbe près de la moitié des richesses créées ? Monsieur le ministre, allez-vous mettre en oeuvre la TVA pour l'emploi afin de gommer les distorsions de concurrence ? Quid des audits initiés par votre prédécesseur ?

La fonction publique en France représente près de 25 % des effectifs salariés, contre 16 % en moyenne dans l'OCDE ; entre 1970 et 2001, les effectifs ont augmenté de 23 %, soit de neuf points de plus que dans le privé ! Cette charge administrative et financière représente une perte colossale d'énergie. Notre PIB se dissout toujours plus dans le labyrinthe d'une administration boursouflée, avec une incidence directe sur le pouvoir d'achat : le financement des administrations représente autant de revenus non redistribués, de bénéfices non réinvestis dans les entreprises, de revenus non consommés par les ménages.

L'État n'a ni la vocation, ni les moyens de combattre le chômage par des créations de postes massives. Nous ne sommes plus au temps des Ateliers nationaux ! Nous gaspillons des talents, nous sclérosons les énergies. Combien de fonctionnaires pourraient participer au développement des entreprises et des services ! La multiplication des emplois aidés n'est pas une solution contre le chômage.

Je salue le non-remplacement de la moitié des fonctionnaires partant à la retraite, notamment dans votre ministère. Je salue la loi Tepa, qui incite les assujettis à l'ISF à investir dans les entreprises innovantes, comme je salue l'extension de ce dispositif à l'investissement dans des incubateurs publics et privés. Je salue l'action de Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté...

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Très bien !

M. Aymeri de Montesquiou.  - ...qui, par le RSA, cherche à mettre fin aux trappes à pauvreté en valorisant les revenus d'activité. Je salue enfin l'adoption de l'amendement de M. Mouly sur la neutralisation des conséquences fiscales des transferts d'établissements à l'intérieur d'un même EPCI.

La France dispose de beaucoup d'atouts : notre pays jouit d'une situation géographique privilégiée avec trois façades maritimes, nombre des entreprises du CAC 40 sont parmi les premières au monde, la qualité de nos infrastructures n'est plus à démontrer et notre système éducatif produit des élites très bien armées. L'indispensable réforme des universités se met en place, mais il nous faut encore accepter la nécessité de la sélection. Chaque étudiant doit devenir un compétiteur en mesure d'exprimer son potentiel dans une économie ouverte et concurrentielle.

Six mois déjà ont passé. Or, un quinquennat, c'est court. Votre budget, monsieur le ministre, ne répond que très partiellement aux attentes de nos compatriotes. Il ne faut jamais hésiter entre réformer la France ou gagner les élections : les électeurs préféreront toujours sanctionner l'immobilisme. Il est urgent de sortir de l'inertie. Je souhaite que votre gouvernement trouve pour notre pays la même capacité d'initiative que s'est donnée le chef de l'État au plan international.

M. Jacques Mahéas.  - Surtout pas !

M. Aymeri de Montesquiou.  - La majorité du groupe du RDSE votera le projet de loi de finances pour 2008 mais attendait de votre budget plus d'audace, plus de courage, plus d'esprit d'entreprise. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Christian Gaudin.  - L'explication de vote sur le budget est toujours l'occasion de distribuer les bons et les mauvais points, dans un esprit constructif et responsable. Il faut impérativement réduire nos déficits publics, véritable fléau et défi pour les générations futures. Le redressement des finances publiques, sans aggravation de la pression fiscale et sociale, la justice sociale en matière d'impôt et de dépenses publiques, l'efficacité économique des mesures proposées tiennent les membres du groupe UC-UDF à coeur.

En matière de contrôle des finances publiques, les mentalités n'ont pas encore suffisamment évolué. Malgré un certain effort dans la gestion de la dépense publique, avec une clarification des relations financières entre l'État et la sécurité sociale, et une certaine aubaine en matière de recettes fiscales, ce projet de loi de finances reste un budget de continuité et d'attente. Le déficit public prévisionnel stagne à plus de 41,7 milliards, la dette des administrations publiques représente 64,2 % du PIB pour 2006. Nous attendons beaucoup de la fameuse Révision générale des politiques publiques : si la mise en place de la Lolf a été une date importante, son évolution et son adaptation à la réalité économique et financière s'imposent plus encore.

Le travail parlementaire a été de qualité. Toutefois, le temps que nous consacrons à l'étude des crédits des différentes missions pourrait sans doute être utilement réduit au profit des débats sur le projet de loi de règlement, qui représente désormais le véritable moment décisif de nos finances publiques.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Très bien !

M. Christian Gaudin.  - En loi de finances initiale, nous travaillons sur des prévisions économiques et sur des objectifs de performance. En loi de règlement, le Parlement peut véritablement exercer son pouvoir de contrôle. L'enchaînement des diverses lois de finances ne sera vertueux que si l'on tire les enseignements de chaque exercice. Notre travail de contrôle réclame du temps, nous devons le prendre en loi de règlement.

M. Jean Arthuis, président de la commission.  - Très bien !

M. Christian Gaudin.  - Mon groupe salue la hausse de 4,6 %, du budget de la justice et celle, de 8,4 %, du budget de l'enseignement supérieur et de la recherche, lequel s'inscrit dans une stratégie de relance de la compétitivité, avec l'allégement de la fiscalité des brevets et l'augmentation du crédit d'impôt recherche.

La Haute assemblée a adopté plusieurs amendements de notre groupe : extension aux DOM du monopole de l'État sur la vente des produits du tabac, à l'initiative de Mme Payet ; réduction d'ISF, sur proposition de M. Arthuis, pour l'investissement dans les PME et les entreprises solidaires qui exercent une activité de gestion immobilière à vocation sociale ; exonération de taxe professionnelle pour les industries techniques du cinéma et de l'audiovisuel ; solidarité accrue, à mon initiative, entre les établissements d'enseignement supérieur privés et agricoles. Nous serons très attentifs au sort qui sera réservé à ces amendements en CMP.

Toutefois, notre groupe regrette que ses propositions visant à réduire les déficits n'aient pas été mieux entendues. Notre amendement supprimant l'article 7 sur le crédit d'impôt des intérêts d'emprunt pour l'achat de la résidence principale a ainsi été rejeté. (M. le président de la commission le déplore)

Nous comprenons mal l'intérêt de cette mesure, dont le coût est évalué à 220 millions pour 2008 et à 840 millions en régime de croisière, et dont l'impact économique reste hypothétique.

Nous regrettons de même la diminution du remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les biocarburants, mesure pourtant incitative pour les entreprises qui innovent et investissent dans la recherche de biocarburants de deuxième génération. C'est donner un signal bien peu opportun, alors que les gouvernements successifs se sont engagés dans le soutien à cette filière et que le récent Grenelle de l'environnement a souligné la nécessité de développer de nouvelles sources d'énergie.

La grande majorité du groupe UC-UDF votera comme moi ce projet, les autres membres s'abstenant, compte tenu de la stagnation du déficit. (Applaudissements au centre, à droite et au banc des commissions)

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.  - Notre marathon budgétaire, tantôt course de plat, si l'on se réfère à la norme zéro volume, tantôt course d'obstacles, si l'on retient la montagne d'amendements que nous avons traités en deux semaines, s'est achevé tard dans la nuit. Je voudrais tout d'abord souligner la remarquable qualité de nos débats ; qualité technique, sur des sujets souvent complexes que nous avons pu développer en toute clarté -je pense notamment au débat sur les collectivités territoriales, au cours duquel le Sénat a montré la vigueur avec laquelle il assumait son rôle constitutionnel de représentant de ces collectivités ; qualité humaine aussi, car nous avons débattu dans un climat d'écoute et de respect mutuels. Ce fair play a permis, sur des sujets où les positions étaient parfois très éloignées, de trouver des solutions de compromis conformes à l'intérêt général.

Je remercie le président de la commission, M. Arthuis, pour la qualité de ses interventions et la précision de ses propositions qui ont parfois su aiguillonner le Gouvernement. Je remercie l'ensemble des rapporteurs, et au premier chef le rapporteur général, M. Marini, pour sa contribution intense, la pertinence de ses analyses et sa légendaire créativité. Mes remerciements vont également à tous les sénateurs, de la majorité comme de l'opposition, qui ont parlé avec talent et conviction. Merci, aussi, aux collaborateurs du Sénat et à ceux du Gouvernement, pour leur efficacité et leur réactivité. Enfin, je veux remercier tout particulièrement la présidence, qui a su gérer nos discussions dans le temps très court qui nous est imparti par la Constitution.

M. le président.  - La présidence vous remercie.

M. Éric Woerth, ministre.  - C'est grâce à ces conditions optimales que nous avons réussi, ensemble, à enrichir ce projet de loi sans aggraver le déficit. Ce n'était pas gagné d'avance. Tous les amendements adoptés par votre assemblée et qui affectent les dépenses ont en effet été financés sans dégrader le solde ; c'est ainsi que vous avez su, à l'article 12, trouver les ressources nécessaires pour financer les dotations d'ajustement du contrat de stabilité.

Avec ce budget 2008, nous procédons à une triple réduction : du déficit, des prélèvements obligatoires et du rythme d'évolution de nos dépenses publiques, grâce à l'élargissement de la norme dite du « zéro volume ». Cet effort de maîtrise des dépenses de l'État est d'autant plus notable qu'il s'inscrit dans un contexte de renchérissement de la charge de la dette et d'augmentation des dépenses de pensions, et qu'il s'accompagne d'une remise à niveau de la dotation des dispositifs sociaux financés par l'État, jusqu'ici sous-évalués.

Mais cet effort de maîtrise des dépenses n'est en rien aveugle. Il repose sur des redéploiements actifs, tenant compte de l'évolution du contexte économique et social, et, surtout, sur un effort de rationalisation de chaque ministère, qui anticipe les réformes à venir à l'issue de la révision générale des politiques publiques, dont le Conseil de modernisation, présidé par le Président de la République, tiendra demain sa première réunion pour une première salve de réformes structurantes. Il s'accompagne d'une politique visant à muscler la croissance en remédiant aux déficits de travail et de compétitivité de l'économie française, priorité plus que jamais justifiée, alors que la conjoncture internationale se révèle moins porteuse que prévu.

Ce cadre budgétaire serré ne vous a pas empêchés d'apporter des avancées notables au texte issu de l'Assemblée nationale. Vous avez ainsi procédé, à l'initiative de votre commission des finances, à un ajustement des dotations de l'enveloppe normée qui respectent le principe d'une évolution globale calée sur l'inflation, tout en répartissant mieux l'effort pour trouver le point d'équilibre le plus juste pour l'ensemble des collectivités. Mais je pense aussi au crédit d'impôt pour les intérêts d'emprunt immobilier ; au prélèvement libératoire, dont vous avez étendu le bénéfice aux dirigeants d'entreprises non salariés, quelle que soit l'importance de leur participation au capital ; à la suppression de l'impôt sur les opérations de bourse, que vous avez avancée au 1er janvier 2008 ; à la mensualisation possible de la prime pour l'emploi ; à la réforme du régime des sociétés immobilières ; aux amendements de M. Lambert sur les régimes des partages et des successions ; à la fiscalité sur les biocarburants.

Le Sénat a su faire preuve d'un grand courage dans ce débat, et d'un esprit de responsabilité qui mérite d'être salué.

Dans la deuxième partie, les budgets relatifs aux opérations extérieures et aux opérations de maintien de la paix, conformément à mes engagements, ont été abondés respectivement de 100 millions et de 85 millions supplémentaires.

M. Philippe Marini, rapporteur général.  - Très bien !

M. Éric Woerth, ministre.  - C'est donc un projet de loi de finances qui vous doit beaucoup que vous vous apprêtez à voter. C'est un projet qui respecte la parole donnée puisque nous tenons les engagements pris par le Président de la République devant les Français. (Exclamations à gauche) C'est un projet réaliste, qui retient des hypothèses de croissance raisonnables, des prévisions de recettes prudentes, tandis que les dépenses ont été évaluées au plus juste. C'est un projet de responsabilité, enfin, qui poursuit le redressement des finances publiques et met l'accent sur les dépenses d'investissement et la croissance. C'est ce projet au service de l'avenir de tous les Français que je vous demande maintenant de bien vouloir approuver. (Applaudissements à droite, au centre et au banc des commissions)

Vote sur l'ensemble

M. le président.  - Le Sénat va procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2008.

En application de l'article 59 du Règlement, le projet de loi de finances pour 2008 est mis aux voix par scrutin public à la tribune.

Le scrutin, ouvert à 17 h 55, est clos à 18 h 55.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 326
Nombre de suffrages exprimés 318
Majorité absolue des suffrages exprimés 160
Pour l'adoption 194
Contre 124

Le Sénat a adopté. (Applaudissements au centre et à droite)

CMP (Nominations)

M. le président.  - J'ai reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter. La liste des candidats établie par la commission des finances a été affichée. Je n'ai reçu aucune opposition. En conséquence, je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire : titulaires, MM. Jean Arthuis, Philippe Marini, Yann Gaillard, Roland du Luart, Aymeri de Montesquioux, Marc Massion, Thierry Foucaud ; suppléants, Philippe Adnot, Denis Badré, Michel Charasse, Philippe Dallier, Yves Fréville, Paul Girod et Michel Sergent.

Prochaine séance demain, mercredi 12 décembre 2007 à 10 heures.

La séance est levée à 19 heures.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mercredi 12 décembre 2007

Séance publique

A DIX HEURES

1. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, préalable au Conseil européen du 14 décembre 2007 ;

À 15 HEURES ET, ÉVENTUELLEMENT, LE SOIR

2. Discussion de la proposition de loi (n° 70, 2007-2008) relative aux personnels enseignants de médecine générale, présentée par M. Francis Giraud et plusieurs de ses collègues.

Rapport (n° 114, 2007-2008) de M. Jean-Léonce Dupont, fait au nom de la commission des affaires culturelles.

3. Discussion de la question orale avec débat n° 7 de M. Daniel Reiner à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur l'avenir du fret ferroviaire.

M. Daniel Reiner attire l'attention M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables sur l'avenir du fret ferroviaire. Alors que la SNCF a annoncé la fermeture de 262 gares au wagon isolé, le fret ferroviaire semble cet automne amorcer une légère reprise et les conclusions du Grenelle de l'environnement ont mis en évidence la nécessité de développer le fret ferroviaire. Pourtant, malgré les ambitions affichées, aucun budget supplémentaire n'est dégagé en faveur des infrastructures ferroviaires cette année encore, le Gouvernement n'étant pas même au rendez-vous s'agissant de la seule régénération du réseau, qui, nécessitant 500 millions d'euros, ne se voit créditer que de 400 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2008. Dans le même temps, les collectivités s'investissent, en suscitant la mise en place d'opérateurs de proximité et en soutenant la réalisation d'embranchements ferrés pour les sites industriels. La promotion du transport combiné, la création des nouvelles autoroutes ferroviaires, et une politique massive d'investissement en faveur de l'embranchement ferré des zones d'activité nécessiteront des efforts considérables de la part de l'État et des collectivités territoriales et la création de nouvelles ressources. C'est dans cet esprit qu'une mission d'information sur les infrastructures de transports terrestres, leur financement et leur fonctionnement s'est constituée au Sénat en septembre 2007. En outre, on sait qu'en la matière, les incantations ne suffisent pas. L'autoroute ferroviaire existante ne trouve pas son rythme de croisière ; quant à l'autoroute de la mer sur la Méditerranée, elle peine à s'imposer face à la route, malgré la qualité du service. Il faut donc, en plus de construire un véritable réseau national de fret, grande vitesse et secondaire, imaginer des incitations à l'usage de telles infrastructures. Ces chantiers législatifs et réglementaires ne sont pas même esquissés dans les conclusions du Grenelle de l'environnement. L'amélioration des prestations, l'incitation en direction des donneurs d'ordre ou des prestataires de services (entreprises et entreprises de transport) sont pourtant le pendant indispensable pour augmenter le report modal et ainsi optimiser les investissements de l'État et des collectivités locales. En conséquence, il demande au Gouvernement quelles sont ses intentions véritables en la matière. Entend-t-il développer ce secteur ou a-t-il décidé de donner à l'entreprise SNCF des ordres purement comptables et financiers ? Envisage-t-il des mesures pour augmenter l'offre de service de fret, et ainsi permettre aux entreprises de se tourner enfin plus fortement vers ce type d'approvisionnement ? Le Grenelle de l'environnement et le prochain CIADT transport seront-ils enfin l'occasion de présenter de réelles ruptures en la matière ?

Discussion de la question orale européenne avec débat n° 1 de M. Hubert HAENEL à Mme Rachida DATI, garde des Sceaux, ministre de la justice sur le rôle d'Eurojust et du réseau judiciaire européen.

À la suite de la communication adoptée par la Commission européenne, le 23 octobre 2007, sur le rôle d'Eurojust et du réseau judiciaire européen dans le cadre de la lutte contre le crime organisé et le terrorisme dans l'Union européenne, M. Hubert HAENEL interroge Mme la garde des Sceaux, ministre de la justice<QUESTION> sur le jugement que porte le Gouvernement sur le bilan de l'activité d'Eurojust depuis sa création par une décision du Conseil en date du 28 février 2002, sur les missions assumées par le réseau judiciaire européen et sur les perspectives de cette coopération judiciaire au niveau européen.

Il lui demande, en particulier, si les propositions formulées par la Commission européenne, en vue d'accorder des pouvoirs plus étendus aux membres nationaux d'Eurojust, de renforcer les pouvoirs du collège d'Eurojust et d'encourager une coopération accrue avec le réseau judiciaire européen, lui paraissent satisfaisantes.

Il lui demande également si le renforcement d'Eurojust ne doit pas être d'ores et déjà envisagé dans la perspective, ouverte par le « traité modificatif », de l'institution d'un véritable parquet européen et si la mise en place d'une coopération renforcée entre les États membres adhérant à cet objectif ne serait pas la voie la plus efficace pour avancer dans ce domaine.

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DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :