Conseillers départementaux

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires, et modifiant le calendrier électoral et le projet de loi organique relatif à l'élection des conseillers municipaux, des délégués communautaires et des conseillers départementaux. Il a été décidé que ces deux textes feraient l'objet d'une discussion générale commune.

Discussion générale commune

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur .  - Un tournant ambitieux. C'est bien de cela qu'il s'agit. La démocratie n'est pas un modèle figé, abouti, elle doit se moderniser, s'approfondir pour renforcer le lien si singulier entre nos concitoyens et leurs représentants, ce lien constitutif de notre histoire et de notre Nation, garant de la cohésion au coeur du pacte républicain. Nous débattons aujourd'hui d'une nouvelle phase de réforme pour donner un nouvel élan à notre démocratie locale. Il y a un an, le Sénat a adopté une proposition de loi abrogeant le conseiller territorial. Je salue cette initiative utile. Le président de la République, lors de son discours de Dijon, puis lors des états généraux de la démocratie en octobre, a fixé les grandes orientations -confiance, clarté, cohérence et démocratie- que le Gouvernement met en oeuvre notamment par ces deux projets de loi.

Dans nos collectivités locales, une culture démocratique s'est affirmée, faite de proximité et de dialogue, qui a permis de rapprocher nos concitoyens des décisions publiques. Pourtant, nous ne sommes pas allés jusqu'au bout. Il fallait au préalable revenir sur la création du conseiller territorial qui confondait deux échelons, région et département, qui n'ont ni la même logique de fonctionnement ni les mêmes perspectives d'action ; il aurait été source d'inefficacité. (Marques de dénégation à droite) Or, la démocratie exige transparence et clarté. Les citoyens doivent savoir qui fait quoi et qui décide de quoi. (Exclamations à droite) Le conseiller territorial était voué à faire des allers-retours permanents. (Mêmes mouvements) Or, l'élu local doit être au coeur de la réalité du terrain. Le mode de scrutin retenu était de plus défavorable au pluralisme, et surtout à la parité. Enfin, les économies attendues de la réforme n'ont jamais été démontrées. Bref, le conseiller territorial relevait de l'usine à gaz (exclamations à droite) : il compliquait là où il fallait simplifier et clarifier. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs) Il était d'ailleurs critiqué aussi bien à droite qu'à gauche...

Cette réforme était en fait l'expression d'une défiance à l'endroit de la démocratie locale et des élus. (Marques de dénégation à droite)

Le président de la République l'a rappelé lors des états généraux de la démocratie locale : les libertés locales sont une conquête républicaine ; les faire progresser, c'est faire progresser la République. Dans ce mouvement de conquête, le département a une place particulière.

M. Éric Doligé.  - De moins en moins !

M. Manuel Valls, ministre.  - En 1790, le découpage départemental a été le symbole d'une conception rationnelle de l'administration ; la loi de 1871 a été une grande avancée démocratique de la IIIe République naissante ; celle de 1982 a mis fin à la tutelle. La démocratie ne peut se concevoir comme un modèle figé : une nouvelle phase de la démocratie locale doit accompagner un nouvel élan de décentralisation. Fusionner les mandats de conseiller général et de conseiller régional relevait d'une volonté d'affaiblissement de la démocratie.

L'échelon départemental est un échelon de proximité, républicain par excellence ; il doit continuer à se moderniser. Chacun est conscient des lacunes du mode de scrutin actuel. Les trois cinquièmes des cantons sont les mêmes qu'il y a deux siècles. Or, depuis 1801, les territoires ont évolué, les populations se sont réparties différemment. L'écart entre le canton le plus peuplé et le canton le moins peuplé est de 1 pour 47 dans l'Hérault, supérieur à 1 pour 20 dans 18 départements, à 1 pour 5 dans 88 départements. Le principe constitutionnel d'égalité des citoyens devant le suffrage n'est plus respecté.

La sous-représentation des femmes -le mot est faible- dans les assemblées départementales n'est plus supportable. La parité a progressé dans les régions, les communes, au Parlement, mais pas dans les départements : seulement 13,5 % des femmes dans les conseils généraux ! (Marques d'indignation à gauche) Des mesures ont été prises mais rien n'y a fait. Les femmes n'ont représenté en 2011 que 23 % des candidats...

Les dernières élections cantonales ont démontré que le mode de scrutin actuel ne pouvait pas améliorer la situation. Après le renouvellement partiel de 2011, 14 départements n'ont élu aucune femme ; et, dans 3 départements, les assemblées sont restées exclusivement masculines. Du point de vue de la parité, il ne doit plus exister d'exception départementale.

Démocratiser, moderniser, ce n'est pas dénaturer. Le scrutin majoritaire garantit un lien fort entre l'électeur et le territoire : il faut le préserver. Proximité et parité, tels sont les principes qui ont guidé la rédaction de ce projet de loi. J'ai beaucoup consulté. Certains ont proposé un scrutin de liste sur le modèle régional. C'était répondre à l'exigence de parité mais renoncer à la proximité. D'autres ont prôné une élection par arrondissement -c'était faire fi, là encore, de la proximité- ou dans le cadre intercommunal -mais l'intercommunalité est jeune et sa carte est inachevée.

Le canton reste un espace électoral bien identifié et légitime : nous l'avons conservé. Un scrutin moderne et paritaire : c'est l'objectif du scrutin binominal majoritaire que propose le Gouvernement, après le travail de Mme André. Dans chaque canton seront élus solidairement deux conseillers de sexe différent ; le principe s'appliquera aussi aux remplaçants. 95 % des présidents de conseil général et 85 % des vice-présidents sont des hommes. Je vous proposerai, pour les commissions permanentes et les vice-présidents, les mêmes règles que pour les conseils régionaux.

La parité est un gage de représentativité mais elle ne suffit pas. Les cantons actuels ne représentent plus la réalité de la répartition de la population. Il est nécessaire de procéder à une refonte globale de la carte cantonale, tout en conservant un nombre d'élus proche de ce qu'il est aujourd'hui. Un critère clair est fixé dans la loi : l'écart de population d'un canton par rapport à la moyenne départementale ne devra pas dépasser 20 %. (Exclamations à droite)

M. Éric Doligé.  - Quelle catastrophe !

M. Manuel Valls, ministre.  - Cette limite n'a rien d'arbitraire, c'est celle appliquée par le Conseil constitutionnel en matière de redécoupage des circonscriptions législatives. (On le conteste à droite) Certains voudront assouplir cette règle ; je me refuse à ce que perdurent les inégalités actuelles. Mais je tiens à vous rassurer : des exceptions sont prévues, pourvu qu'elles soient fondées sur un motif géographique ou des considérations d'intérêt général -je pense en particulier aux îles et à la montagne. Mais elles devront être spécialement justifiées.

Il faudra aussi améliorer la lisibilité de cette élection, d'où la dénomination proposée de conseil départemental et de conseiller départemental. En outre, les conseils généraux seront renouvelés en totalité et non plus par moitié.

Il faut enfin créer les conditions d'une participation satisfaisante aux élections. A l'heure actuelle, cinq élections sont prévues en 2014, municipales, territoriales, européennes et sénatoriales, soit neuf tours de scrutin en quelques mois. Une faible participation aux élections est à craindre. C'est pourquoi nous proposons de reporter à 2015 les élections départementales et régionales. Le précédent gouvernement avait raccourci la durée des mandats pour créer le conseiller territorial. Nous ne ferons donc que rétablir ce qui avait été défait.

Cette entreprise de modernisation et d'approfondissement de la démocratie locale ne doit pas se cantonner aux seuls départements. Les communautés de communes et d'agglomération ont toujours davantage de responsabilités ; elles doivent s'affirmer comme une réalité démocratique. Les délégués communautaires seront élus au scrutin universel direct, le même jour et par le même vote que les conseillers municipaux. Dans le même temps, l'échelon municipal doit être néanmoins préservé car les Français y sont très attachés ; les élus municipaux sont les premiers représentants de la République devant nos concitoyens. Le texte initial prévoyait que les délégués communautaires étaient signalés parmi les premiers de chaque liste. Votre commission des lois souhaite que le principe de liberté dans l'établissement des listes l'emporte. Je salue son travail mais son texte me semble encore trop complexe. Il faudra y travailler encore.

Démocratiser l'intercommunalité, c'est aussi étendre cette élection par fléchage des délégués communautaires à un plus grand nombre de communes. Il convient en conséquence d'abaisser de 3 500 à 1 000 habitants le seuil de population au-delà duquel les conseillers municipaux seront élus au scrutin de liste. Il y va de la parité, quasiment atteinte dans les communes de plus de 3 500 habitants, là où s'applique l'obligation de constituer des listes paritaires. Dans les communes plus petites, la part des conseillères municipales est de 32 %... Abaisser le seuil, c'est aussi simplifier et rendre plus transparente l'élection municipale. Le panachage rend l'élection plus complexe. Rien ne justifie en outre que des règles telle l'obligation de dépôt de candidature ne s'appliquent pas dans les communes de plus de 1 000 habitants. Votre commission des lois a d'ailleurs étendu cette obligation à toutes les communes. Je sais que le seuil de 1 000 habitants ne fait pas l'unanimité ; nous en débattrons.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - 1 000 habitants, c'est un bon compromis !

M. Manuel Valls, ministre.  - Dans les petites communes, des listes complètes sont difficiles à établir -ce qui justifie le maintien d'un seuil.

Le projet de loi organique est pour l'essentiel lié à la question du vote des ressortissants communautaires aux élections municipales.

Aborder une réforme du mode de scrutin n'est jamais chose aisée. C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité que le Sénat en débatte en premier. Le président de la République a fixé de grandes orientations pour la démocratie locale. Veillons à donner un exemple de démocratie, pour ne pas alimenter le sentiment de défiance trop présent chez nos concitoyens, dont témoigne encore une étude très récente du Cevipof.

Nous allons avoir des débats, des oppositions, c'est normal. Je vous invite à mener ces débats avec la volonté de renforcer notre démocratie et l'intérêt général. Prenons le temps de bien négocier le tournant que nous abordons aujourd'hui, c'est important pour notre démocratie locale. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois .  - Le Sénat est saisi de deux projets de loi visant notamment à renforcer la parité dans le scrutin départemental et à concrétiser le principe de l'élection directe par les citoyens des délégués communautaires. La mixité progressera en outre au sein des conseils municipaux et se diffusera dans les intercommunalités. Ce sera un atout pour la démocratie locale.

La coopération intercommunale s'est affirmée tout au long de ces dernières années ; dans quelques mois, la carte intercommunale sera achevée. La démocratisation des instances intercommunales est l'aboutissement nécessaire de l'élargissement de leurs attributions et de leur poids financier croissant. Les citoyens éliront désormais en même temps que les conseillers municipaux les membres des organes délibérants des intercommunalités.

Le législateur est appelé à fixer les principes qui régissent l'administration des collectivités. La commission des lois a adopté l'article premier, qui modifie l'appellation des conseils et conseillers généraux. Symbolique, cette clarification n'en est pas moins indispensable. Sous réserve de modifications ponctuelles, la commission a adopté le principe du binôme au sein de cantons redélimités, pour favoriser la parité. Les articles 2 à 13 mettent ainsi fin au scrutin uninominal à deux tours. Le renouvellement par moitié sera remplacé par un renouvellement intégral qui favorisera la continuité des politiques locales. (Exclamations à droite)

L'article 5 prévoit qu'en cas d'égalité des suffrages, l'élection sera acquise au binôme comportant le candidat le plus jeune. C'est une innovation majeure. (Applaudissements sur les bancs socialistes) Sur ce point, la commission n'a pas intégralement suivi son rapporteur... (Sourires)

Le recours au suppléant sera possible pour tous les cas autres que la démission d'office par le représentant de l'État ou l'annulation de l'élection. La question de la vacance d'un siège devra être examinée.

M. Bruno Sido.  - Il n'y a pas de bonne solution...

M. Michel Delebarre, rapporteur.  - Le remodelage de la carte cantonale est le sujet le plus sensible. Il faut répondre à l'exigence constitutionnelle d'égalité du suffrage. De nombreuses craintes s'expriment : certains redoutent des cantons trop vastes, ou trop peuplés. Certes, l'article 23 prévoit des exceptions de portée limitée et justifiées par des considération d'intérêt général ou géographiques -territoires montagneux ou de faible densité, cantons comportant un nombre très important de communes...Ces règles permettent de respecter la jurisprudence et de prendre en même temps en compte la spécificité des territoires.

Enfin, la commission des lois a approuvé le report des élections départementales et régionales à 2015. Les premières élections prévues à la Martinique et en Guyane dans le cadre de la collectivité unique sont également repoussées à mars 2015.

La commission des lois a approuvé l'économie générale de ce projet de loi ; elle l'a complété pour en conforter la cohérence. Elle a retenu le seuil proposé par le Gouvernement pour élargir l'application du scrutin proportionnel ; 1 000 habitants est un étiage raisonnable qui autorise pleinement l'application de la proportionnelle, et donc de la parité dans les conseils municipaux qui comptent au moins 15 membres et permet sans grande difficulté la constitution des listes. En outre, la réduction du champ d'application du scrutin majoritaire unifie les modalités de vote en vigueur dans ce régime : y seront autorisées les candidatures isolées, les listes incomplètes et le panachage. La commission a en conséquence adopté l'article 16 sans modification et ses corollaires, les articles 17 et 18 -en prévoyant cependant pour le premier tour de scrutin une déclaration de candidature obligatoire dans les communes régies par le scrutin majoritaire. Elle a en outre inversé le principe d'attribution du siège en cas d'égalité des suffrages en retenant le critère du plus jeune.

Pour faciliter l'élection des conseillers municipaux dans les plus petites communes, elle a réduit de deux le nombre des membres de leurs assemblées délibérantes ; l'effectif du conseil municipal serait abaissé de 9 à 7 dans les communes de moins de 100 habitants et de 11 à 9 dans celles de moins de 499 habitants.

La commission a approuvé l'article 19, qui modifie la répartition des conseillers de Paris entre les secteurs : les principes de 1982 sont respectés et les modifications découlent mécaniquement de l'évolution démographique des vingt arrondissements de Paris.

Par coordination, la commission des lois a aligné, dans le projet de loi organique, le mandat municipal pris en compte au titre du cumul des mandats, pour tenir compte de l'abaissement du seuil à 1 000 habitants.

Elle a adopté le dispositif de fléchage pour l'élection au suffrage universel direct des délégués communautaires mais en a assoupli les modalités pour permettre aux différentes listes de mieux répartir entre leurs candidats les responsabilités au sein du conseil municipal et de l'organe communautaire. Elle a supprimé le blocage en tête de liste des candidats fléchés pour le conseil de l'intercommunalité, dispositif unanimement contesté. Le texte de la commission s'efforce de concilier la liberté du choix des candidatures fléchées et la sincérité du scrutin. Il est cependant complexe et perfectible...

Enfin, la commission a adopté le principe de la participation des citoyens des États membres de l'Union européenne autres que la France à l'élection des délégués intercommunaux ; ceux-ci seront désignés par le corps électoral des conseillers municipaux qui, depuis 1998, inclut les ressortissants communautaires.

Cette réforme marque une évolution importante pour la démocratie locale. Elle bouleversera les conditions d'exercice des mandats locaux et les habitudes des électeurs. Mais elle renforcera la légitimité des élus. Les conseillers intercommunaux seront élus au suffrage universel direct ; les femmes seront mieux représentées à tous les niveaux de collectivités ; la gestion départementale en sortira renforcée et modernisée.

La commission des lois soumet à la délibération du Sénat le texte qu'elle a établi pour le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes .  - Je me félicite que la conférence des présidents m'ait accordé un temps de parole dans ce débat. La délégation aux droits des femmes a consacré de nombreux rapports à la parité en politique. Dans les communes de plus de 3 500 habitants et les conseils régionaux, la parité est presque parfaite. En revanche, elle a peu progressé dans les élections au scrutin uninominal majoritaire.

Ce projet de loi apporte des réponses intéressantes pour l'élection des conseils généraux, pour les organes délibérants des EPCI à fiscalité propre et les communes de 1 000 à 3 500 habitants.

Le mode de scrutin proposé pour les élections départementales a suscité beaucoup de questions. Le mode de scrutin actuel dans les départements n'offre aucun avenir à la parité : les femmes ne représentent que 14 % des conseillers généraux et trois départements sont dirigés par un conseil exclusivement masculin.

Le Gouvernement propose de constituer des binômes pour ces élections, en divisant par deux le nombre de cantons. Ce mode de scrutin inédit permettra d'instaurer la parité. Les candidats seront solidaires dans l'élection, mais après ? Les deux conseillers deviendront indépendants l'un de l'autre. Les femmes ne risquent-elle pas de se trouver, une fois de plus, cantonnées aux questions sociales, d'éducation et de santé quand les hommes s'arrogeront le monopole des sujets économiques ? (Exclamations sur divers bancs)

M. Bruno Sido.  - C'est un procès d'intention !

M. Jean-Patrick Courtois.  - Scandaleux !

Mme Éliane Assassi.  - C'est pourtant la réalité aujourd'hui !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.  - La conjonction du critère démographique et de la réduction de moitié du nombre de canton ne risque-t-elle pas d'être défavorable à la ruralité et à la proximité, et d'accélérer la disparition des services publics ? (Marques d'approbation à droite)

Le binôme sera-t-il composé de conseillers issus de la même formation politique ? Seule l'expérience le dira mais on peut craindre un renforcement du bipartisme. Certains, dont je suis, estiment que le scrutin proportionnel s'imposait.

La délégation s'était demandé si le Conseil constitutionnel allait conserver le mode d'élection des conseillers territoriaux. Elle avait recherché une disposition pour favoriser la parité, afin de remédier aux inconvénients du scrutin majoritaire.

Dans les départements, les exécutifs locaux seront paritaires, sur le modèle des conseils régionaux. Nous nous en félicitons.

Pour les élections municipales, le seuil d'application du scrutin proportionnel est abaissé à 1 000 habitants, ce qui favorisera la parité.

Les délégués des EPCI à fiscalité propre seront dorénavant élus directement par les électeurs. La délégation s'est inquiétée du fléchage proposé par le Gouvernement, mais aussi du dispositif retenu par la commission, bien compliqués à ses yeux. Je me suis inquiétée personnellement de voir l'intercommunalité se développer au détriment des communes.

Telles sont les principales remarques que je voulais formuler au nom de la délégation. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRC ; Mmes Laurence Rossignol et Hélène Lipietz applaudissent aussi)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois .  - Merci, monsieur le ministre, de nous présenter ces textes qui, dans le cadre de la révolution tranquille de l'intercommunalité, constituent un pas essentiel.

Je me souviens qu'il y a une vingtaine d'année, j'avais eu l'honneur de présenter devant le Sénat la loi de 1992 sur les communautés de communes. Il y avait ici quelque scepticisme.

M. Bruno Sido.  - Il y en a toujours !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Chemin faisant, nous avons remarqué que la liberté était féconde. Les communautés ne portant pas atteinte aux communes, les périmètres n'étant pas imposés, de nombreuses communautés se sont créées.

Grâce à une loi que le Sénat a votée, il existe désormais des communautés de communes urbaines et d'agglomération dans toute la France. Ce modèle s'est donc généralisé.

La question de la démocratie est désormais posée : la Révolution française a fixé la règle que pour pouvoir lever l'impôt, il fallait être élu au suffrage universel direct. (M. François Grosdidier s'exclame) Or, la réalité, c'est que des communautés d'agglomération et urbaines ont des budgets qui représentent 70 % de la dépense publique alors que celui de la commune centre est bien inférieur. Dès lors, tous les élus intercommunaux découleront du suffrage universel. La révolution de l'intercommunalité aura enfin un support démocratique. Qui pourrait s'y opposer ?

Ce projet de loi marque un pas important. Je suis fier, monsieur le Premier ministre... (rires et applaudissements à droite) j'anticipe peut-être... (mêmes mouvements) monsieur le ministre, d'appartenir à la majorité qui va conforter cet acquis.

Il faut encore travailler, M. Delebarre l'a dit, pour clarifier les choses et rendre la loi intelligible. Certains ont imaginé des numérotations, voire des doubles numérotations. Il y a d'autres manières, plus simples, d'identifier les candidats pour siéger dans les intercommunalités. Disons les choses clairement.

Deuxième question, celle du département. Je vois le débat qui s'amorce : on va évoquer le monde rural... (Exclamations à droite) Nous y sommes tous attachés. (Nouvelles exclamations à droite) Nous sommes nombreux à vouloir tenir compte des évolutions démographiques de ces territoires.

M. Alain Fouché.  - Il n'y a aucun rapport entre les élus des villes et ceux des territoires !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Le seuil de 20 % est celui retenu pour les circonscriptions législatives ; c'est celui que retient le Conseil d'État. Dès lors que le Conseil constitutionnel fixe ce seuil, que le Conseil d'État le confirme, on s'exposerait, en votant autre chose, à un recours devant le Conseil constitutionnel.

M. Bruno Sido.  - Il y en aura un de toute façon !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Si vous ne tenez aucun compte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, il faut l'assumer et dire ce que vous proposez.

M. Bruno Sido.  - Nous le ferons ! (Exclamations à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nous irons au maximum de ce que l'on pourra faire pour prendre en compte les particularités géographiques et démographiques, dans les limites de ce principe. Je vois mal un gouvernement, une majorité, quels qu'ils fussent, qui pourraient justifier que l'on fît autrement.

La solution qui nous est proposée a le mérite d'instaurer la parité. Vous avez voté une révision de la Constitution qui a introduit cette notion.

M. Bruno Sido.  - Elle ne rend pas la parité obligatoire !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Il s'agit de la favoriser.

M. Henri de Raincourt.  - Bien sûr.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Le dispositif proposé permet également de maintenir l'attachement au territoire.

M. Bruno Sido.  - Je vous démontrerai le contraire !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - La proportionnelle, disent certains ? Elle coupe l'élu du terrain, disent d'autres. (On le confirme à droite)

J'attends les solutions alternatives qui soient compatibles avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d'État, qui favorisent la parité et qui préservent l'ancrage territorial.

M. Gérard Le Cam.  - Scandaleux !

M. François Grosdidier.  - Vous ne voulez même plus de la parité dans les familles !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Enfin, il y a la question des dates. Cinq élections la même année, dont quatre à deux tours, cela fait neuf tours de scrutin. C'est impossible à organiser.

M. Bruno Sido.  - Aux États-Unis, comment font-ils ?

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - La culture y est différente. Nous avons nos traditions françaises. (Exclamations à droite) Il faut trouver une solution. Peut-être pouvez-vous en préparer une autre ?

Sur le mode de scrutin départemental, une réforme est indispensable. Personne, à ce jour, n'a proposé de solution alternative.

M. Gérard Collomb.  - Si ! Si !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Nul ne peut contester que ce projet de loi constitue une avancée majeure vers la démocratie. J'espère qu'il emportera votre adhésion. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Rappel au Règlement

Mme Catherine Troendle .  - Mon rappel au Règlement se fonde sur l'article 29 ter du Règlement.

Ce texte a été déposé sur le bureau du Sénat le 28 novembre. Le rapporteur a été nommé le 5 décembre, le rapport a été publié le 19 décembre. Comment le rapporteur a-t-il pu réaliser dans un aussi bref délai un travail approfondi sur un texte aussi important (exclamations sur les bancs socialistes) qui concerne 101 départements, 4 056 cantons, 15 communautés urbaines, 202 communautés d'agglomération, 2 356 communautés de communes, 6 642 communes, soit 64 millions de Français ? La liste des personnes entendues est bien courte : cinq associations, la DGCL ; le rapporteur s'est contenté d'analyser des contributions écrites de trois associations d'élus : l'AMF, l'AMFR et l'ARF. Les partis politiques n'ont pas été entendus, sur un projet de loi électoral. Le travail est bâclé, la réflexion annihilée. C'est sûrement cela, le changement ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. François Rebsamen .  - Je ne vois pas en quoi l'article 29 ter peut fonder ce rappel au Règlement. Cet article concerne le temps de parole. Vous êtes hors sujet !

Mme Catherine Troendle.  - Pas du tout !

M. François Rebsamen.  - Il s'agit d'une intervention d'opportunité, vous pourriez la faire à un autre moment ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Discussion générale commune (Suite)

M. Philippe Adnot .  - J'étais favorable à la suppression de conseiller territorial.

M. Bruno Sido.  - Bien à tort.

M. Philippe Adnot.  - Je ne le regrette pas. Les départements avaient beaucoup à y perdre. Je suis favorable au redécoupage des cantons, qui était nécessaire. Les dérogations doivent toutefois tenir compte des contraintes géographiques, et aussi démographiques. Fallait-il pour autant modifier le mode de scrutin ? La sous-représentation féminine justifiait des modifications. Je propose la proportionnelle en milieu urbain, par exemple à partir de 100 000 habitants, tout en préservant le lien entre élu et territoire en zone rurale. Le Sénat compte bien des élus à la proportionnelle et des élus au scrutin uninominal ! Je sais que beaucoup sont favorables au système que je propose, qui mérite réflexion.

Les critiques faites au scrutin binominal méconnaissent le fait que les élus départementaux ne sont pas des gestionnaires locaux.

M. François Rebsamen.  - Absolument.

M. Philippe Adnot.  - Le système binominal serait acceptable, sous réserve que l'on fasse évoluer le seuil de 20 %. Je préfère toutefois ma solution, mais ce dont je ne veux en aucun cas, c'est de la proportionnelle intégrale. On sait comment sont faites les listes : dans les grandes agglomérations.

M. Roland Courteau.  - C'est bien vrai.

M. Philippe Adnot.  - Sur les municipales, je salue le passage de 500 à 1 000. Les communes préféreraient 1 500. M. le ministre a ouvert la porte ; c'est dans ce sens qu'il faut aller.

M. Jean-Jacques Hyest .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) On nous annonce une grande loi sur la décentralisation. Les engagements du président de la République sont assez flous... En attendant le cumul des mandats...

M. François Grosdidier.  - Avec M. Delebarre comme rapporteur ? (Sourires à droite)

M. Jean-Jacques Hyest.  - La loi de 1982 a été une grande loi.

M. Jean-Michel Baylet.  - Faite par la gauche.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Refusée par la droite.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Pas par moi : je n'étais pas élu, à l'époque.

A l'époque, le préfet dirigeait le département. C'est une chose qui nous paraît désormais inimaginable. Depuis, il y a eu la loi de 1992 dont parlait M. Sueur, puis la loi Chevènement, mais aussi la loi Raffarin, qui ont contribué à faire de notre pays une République toujours une mais plus décentralisée.

La mode chez les experts est de supprimer les petites communes et les départements. C'est le dada des grands ordonnateurs de la pensée unique qui ignorent ce qui existe au-delà du périphérique.

M. Yves Daudigny.  - M. Copé veut supprimer les départements.

M. Henri de Raincourt.  - Attali aussi.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Le président Sueur a rappelé le texte de 1793 sur le suffrage universel -en oubliant qu'il n'avait pas été question alors de distinguer entre suffrage direct et indirect. Le scrutin indirect n'est pas moins le scrutin universel, faut-il le rappeler ici ? A prendre au mot le président de la commission des lois, le Sénat ne serait pas apte à voter le budget...

Laissons un peu de souplesse dans l'élection des délégués. Beaucoup d'élus nous ont fait part de leurs préoccupations diverses.

Mme Jacqueline Gourault.  - Absolument !

M. Jean-Jacques Hyest.  - Pour les élections communales, nous pensons que le seuil de 2 000 habitants est pertinent ; c'est d'ailleurs celui que retient l'Insee pour définir les communes rurales.

La carte de l'intercommunalité est quasiment achevée ; elle a été confirmée avec le changement de gouvernement. Cela montre que les préfets sont au service de la République : ils ont fait leur travail honnêtement. La proposition de loi Richard devrait faciliter le processus.

Les départements ont résisté aux tentatives d'affaiblissement mais ils sont en grande difficulté financière. L'effondrement des DMTO va aggraver leur situation. La gauche a supprimé le conseiller territorial. C'était une véritable réforme, que votre conservatisme ne pouvait tolérer. (Exclamations à gauche)

M. Claude Bérit-Débat.  - Et la parité ?

M. Jean-Jacques Hyest.  - Beaucoup d'économies auraient pu être réalisées, moins sur les indemnités des élus qu'en évitant les doublons, toutes ces décisions purement clientélistes et d'affichage. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Aucun motif d'intérêt général ne justifie le report des élections régionales à 2015. Vos raisons sont à rechercher ailleurs. Il était légitime de les tenir en même temps que les européennes !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Ce ne sont pas les mêmes circonscriptions !

M. Jean-Jacques Hyest.  - L'argument ne vaut rien : ce ne sont pas non plus les mêmes circonscriptions pour les départements et pour les communes.

Vous inventez un mode de scrutin exotique et incompréhensible pour les électeurs, que vous couplez avec un redécoupage des cantons qui aura pour effet de supprimer cette spécificité des assemblées départementales qu'est la représentation des territoires ruraux.

Le retour au seuil de 10 % pour le deuxième tour, on sait ce qu'il signifie : favoriser les triangulaires.

M. Bruno Sido.  - Un cadeau au Front national.

M. Jean-Jacques Hyest.  - Encore une fois, vous ne recherchez que votre intérêt électoral. La moindre des choses aurait été de désigner, pour le découpage, une commission indépendante ! (Exclamations ironiques à gauche)

M. Alain Bertrand.  - La Cocoé ? (On s'amuse sur divers bancs)

M. Jean-Jacques Hyest.  - Le seuil de plus ou moins 20 % ne me choque pas dans le principe. J'observe toutefois que, dans certains départements, il aura pour effet que tous les conseillers généraux seront rassemblés au centre sans qu'il reste plus rien autour. (Applaudissements à droite)

Si votre scrutin binominal est si merveilleux, pourquoi ne pas l'appliquer demain aux députés ? (Rires approbateurs à droite)

L'approche du ministre était sympathique, comme d'habitude. Il nous dit en substance « Embrassons-nous Folleville ! ». Mais son projet risque fort d'éloigner encore un peu plus nos concitoyens des urnes. Je suis pour une opposition constructive : d'accord sur l'intercommunalité, pas du tout sur cette réforme des conseils généraux. (Applaudissements à droite)

Mme Éliane Assassi .  - Ce projet de loi a été déposé le 28 novembre dernier, le rapport présenté dès le 19 décembre en commission, sans que le ministre ait été entendu.

Mme Catherine Troendle.  - Absolument !

Mme Éliane Assassi.  - Cette précipitation ne nous a pas permis d'organiser une véritable concertation... (on renchérit bruyamment à droite) pour rapprocher les positions de notre majorité de gauche. Ce débat doit pourtant avoir lieu. Espérons que le Gouvernement évoluera et permettra à la majorité de se rassembler. Après l'abrogation du conseiller territorial, il suffisait d'un texte reportant les élections départementales et régionales à 2015 ; nous aurions alors eu le temps d'élaborer le meilleur système et de trouver un accord.

Malheureusement, les conditions d'examen de ce texte risquent de l'interdire. Nous espérons encore néanmoins trouver un accord.

Nous sommes favorables au report des élections régionales et départementales à 2015 ; le mandat avait été raccourci par la précédente majorité. Le scrutin municipal gagne à être autonome. Nous sommes également favorables au changement de nom des conseils généraux et à leur renouvellement intégral tous les six ans. D'accord aussi pour l'abaissement du seuil de la proportionnelle pour les élections communales, que nous souhaiterions voir généralisé. Nous vous proposerons d'élargir encore le champ de la réforme pour étendre cette avancée démocratique à 7 000 communes supplémentaires, avec un seuil à 500 habitants. Ce serait aussi une avancée en termes de parité.

Le scrutin binominal doit également renforcer la parité mais nous ne pouvons accepter le recul en termes de pluralisme : le bipartisme en sortira renforcé. (On le confirme à droite) Il faut à la fois la parité et le pluralisme, que seule garantit la proportionnelle par liste, avec une alternance entre les sexes. L'élection départementale que vous proposez serait un anachronisme démocratique ! Aussi nous vous demanderons, dans nos amendements, une représentation plus démocratique du pluralisme républicain. Faisons oeuvre d'intelligence pour inventer un mode de scrutin qui réponde à tous les objectifs.

Autre point de désaccord : l'élection des délégués communautaires, qui deviennent des « conseillers », c'est-à-dire des élus représentant leur commune au sein de l'intercommunalité. Ils changent de statut, comme si les intercommunalités étaient des collectivités locales à part entière.

Nous sommes inquiets des pouvoirs dévolus aux préfets, qui peuvent forcer les communes récalcitrantes à l'intégration. Les contentieux se multiplient d'ailleurs, comme dans la Loire. L'augmentation du transfert de compétences des communes aux intercommunalités nous inquiète également. Le fléchage des délégués est une première étape vers la disparition des communes. (M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, et M. François Rebsamen le contestent) Nous proposerons l'élection des délégués communautaires au scrutin de liste à la proportionnelle. Si nos amendements n'étaient pas retenus, difficile pour nous de soutenir ce texte, même si nous nous félicitons de la suppression du droit d'ainesse et la primauté donnée à la jeunesse en cas d'égalité des suffrages.

Malheureusement, votre projet ne va pas dans le sens du renforcement de la démocratie. Nous le regrettons. Pour l'heure, la porte est encore ouverte. (Applaudissements sur les bancs CRC ainsi que sur certains bancs UMP)

M. François Zocchetto .  - Mme Troendle et Mme Assassi ont eu raison de dénoncer les conditions d'examen de ce texte. Comment le Sénat peut-il examiner un texte aussi important et lourd de conséquences en un laps de temps aussi court ? Aucun membre du Gouvernement n'a été auditionné ! Il a fallu toute l'expérience et la dextérité de notre rapporteur pour remédier à ces insuffisances d'information. (Applaudissements sur les bancs UMP et UC-UDI) C'est un exemple de plus du manque de concertation entre le gouvernement et le Parlement. Même avec vous, monsieur le ministre, même en 2013 !

M. Manuel Valls, ministre.  - Je n'ai pas été invité.

M. François Zocchetto.  - Vous nous avez imposé ce calendrier.

M. Manuel Valls, ministre.  - Je vous ai reçu, monsieur Zocchetto.

M. François Zocchetto.  - Nul ne contestera à ce texte son mérite principal : la créativité. Le scrutin binominal est, pour le moins, pittoresque. C'est sans aucun doute une première mondiale.

M. François Rebsamen.  - Et le conseiller territorial ?

M. François Zocchetto.  - L'exception culturelle française se double d'une exception électorale. Le groupe UDI-UC est unanimement opposé au mode de scrutin retenu. Ce binôme est tout simplement absurde. La solidarité ne durerait que le temps de l'élection.

M. François Rebsamen.  - Qu'avez-vous à proposer ? Le conseiller territorial ?

M. François Zocchetto.  - Conjuguée au redécoupage des cantons, cette réforme va écraser la représentation des territoires ruraux. (Applaudissements à droite) Plutôt que d'empêcher les départements de fonctionner en organisant la zizanie sur leur territoire, autant annoncer d'emblée leur suppression !

Vous avez choisi de ne pas augmenter le nombre de conseillers généraux...

M. François Rebsamen.  - Vous les aviez supprimés !

M. François Zocchetto.  - Dans le Rhône, chacun des conseillers départementaux représenterait 80 000 habitants, quand une ville de 80 000 habitants est représentée par 54 conseillers municipaux !

Nous sommes donc enclins à combattre ce projet de loi. Certes, le redécoupage de la carte électorale s'imposait. Mais le pourcentage de 20 % est insuffisant pour toutes les zones à faible densité de population : des cantons gigantesques vont être créés au détriment de leur identité.

Vous n'avez pas intégré la notion de bassin de vie, de communautés de communes : quelle erreur ! (Applaudissements sur les bancs UC-UDI et UMP) Nous proposons la suppression de ce seuil pour laisser plus de souplesse au redécoupage. Puisque vous voulez des seuils, nous proposerons plus ou moins 50 %. (Applaudissements à droite) En la matière, la souplesse est la seule solution possible.

J'en viens au calendrier électoral. (« Ah ! » à droite) Il s'agit, dites-vous, d'éviter la concomitance des élections. L'organisation le même jour des cantonales et des régionales a-t-elle réduit la participation en 1992 ? Nous ne le croyons pas. En quoi l'organisation de la concomitance des élections cantonales et régionales impose-t-elle de modifier le calendrier électoral ? Vous allez nous dire que vous supprimez le conseiller territorial. La loi du 16 février 2010 est juridiquement indépendante de la création de ce conseiller. Quelles sont donc vos véritables motivations ? Les élections intermédiaires ont toujours été compliquées pour le pouvoir en place : pour modifier le calendrier, il faut des motifs valables. Quels sont les motifs pour repousser les élections régionales ? En outre, ces élections auront de grandes conséquences sur le collège des grands électeurs. (On le confirme à droite) Or les sénatoriales se tiennent en 2014... Vous avez le droit de le proposer, nous avons le droit de nous y opposer.

M. Bruno Sido.  - La ficelle est un peu grosse !

M. François Zocchetto.  - Le Conseil constitutionnel saura répondre sur ce point.

S'agissant du fléchage, je regrette le mécanisme ultra-compliqué qui a été prévu par la commission des lois.

Le mode de scrutin pour les élections municipales ? Nous préférons un seuil fixé à 1 500 habitants, plutôt qu'à 1 000 pour la proportionnelle.

M. François Rebsamen.  - 500 pour le conseiller territorial !

M. François Zocchetto.  - L'abaissement du seuil requis de 10 % des inscrits pour se présenter au deuxième tour ? Lors des dernières élections, cet abaissement aurait provoqué plus de 300 triangulaires. (Applaudissements à droite)

M. Bruno Sido.  - Là encore, la ficelle est un peu grosse !

M. François Zocchetto.  - Ce sont les candidats du Front national qui en bénéficieront, vous le savez bien. A l'UDI-UC, nous ne souhaitons pas de telles triangulaires. (Applaudissements à droite)

Vous modifiez le mode d'élection avant d'avoir modifié les missions des départements. C'est mettre la charrue avant les boeufs ! Pourquoi ne pas avoir redéfini les missions de chaque collectivité avant toute chose ?

Le groupe UC-UDI est fermement opposé à ce texte, non parce qu'il ne veut pas débattre mais parce votre système va porter atteinte aux territoires ruraux et désorganiser les départements. (Applaudissements sur les bancs UMP et UC-UDI)

M. Jacques Mézard .  - Le conseiller général est mort. Faut-il créer ici le conseiller départemental ? Nous passons de l'être électoral hybride au couple strictement hétérosexuel -au moment même où il est question du mariage pour tous. (Rires et applaudissements à droite) Que se passera-t-il quand le couple ne sera plus d'accord ?

Dans les deux partis politiques dominants, il y a des esprits suffisamment tortueux pour inventer soit le conseiller territorial, soit le conseiller binomial.

La constitutionnalité du scrutin binominal est-elle avérée ? Est-il possible de se soustraire à l'individualisation de l'élection ?

M. Bruno Retailleau.  - Bonne question.

M. Jacques Mézard.  - Le système modifiera les circonscriptions électorales dans tous les départements. Or, l'article 34 est clair sur ce point : le canton est la circonscription électorale des conseils généraux. Ce projet de loi modifie donc de façon générale la représentation du département.

Ce projet de loi présente des aspects positifs... et négatifs.

Sur la forme, la concertation n'a pas eu lieu. Le projet de loi ne tient pas compte de la mission Belot ni du rapport Gourault-Krattinger qui recommandait de faire confiance à l'intelligence de territoires. Le binôme n'a été défendu par personne. Les états généraux de la démocratie territoriale n'en ont soufflé mot. En revanche, grâce à ce texte, la parité sera totale et les déséquilibres seront corrigés. Ce que le Gouvernement refuse, c'est de dire clairement l'avenir qu'il réserve aux départements. (Applaudissements à droite) Allez-vous les diluer en douceur ? Il faudrait que le Gouvernement dise quels sont ses objectifs.

Une infime minorité de nos concitoyens savent qu'un canton sur deux va disparaître. Nombre de conseillers généraux ne savent pas que vous allez les faire bénéficier d'une retraite anticipée ! (Rires)

La diminution drastique du nombre de cantons entraînera des conséquences néfastes pour les territoires ruraux. Les 20 % seront un véritable carcan. Le découpage des cantons devrait se faire de façon équilibrée, en tenant compte de la démographie, mais aussi des zones géographiques.

L'article 40 a frappé nombre d'amendements, ce n'est pas acceptable. (Applaudissements sur les bancs UC-UDI)

Ce projet de loi aura des effets plus importants que vous ne le pensez. La concertation devrait se poursuivre. S'il s'agissait d'affaiblir le Sénat, le bicamérisme, ce serait vraiment dommage. Voyez ce qu'il en a été pour la péréquation en faveur des départements ruraux : le lendemain du vote à l'unanimité de notre amendement, le Gouvernement a déposé un amendement en sens inverse. (Applaudissements sur les bancs UC-UDI)

Ce texte ne doit pas aggraver la fracture territoriale qui se creuse.

Notre groupe vous a, à maintes reprises, soutenu mais il vous demande de répondre à ses questions pour se prononcer. (Applaudissements sur les bancs du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP)

Mme Hélène Lipietz .  - Enfin ! Nous attendions depuis un an une grande loi sur la décentralisation. Face à la mondialisation, comment faire en sorte que notre pays demeure un modèle démocratique ? Comment donner l'envie à nos concitoyens de voter ? Votez, ce n'est pas se soumettre, c'est prendre la parole pour changer le monde. Il n'y a pas de vote de chômeurs ou d'exilés fiscaux, de riches ou de pauvres : l'alchimie du vote permet à chacun de se faire entendre.

Enfin, la réforme arrive ! Nous commençons par le mode d'élection. Est-ce le sujet le plus facile ? Sans doute pas. Et nos concitoyens nous soupçonnent de vouloir magouiller parce que nous sommes juges et partie. A la démagogie qui accuse les élus de s'accrocher à leurs privilèges, il faut opposer la pédagogie pour justifier l'exercice : il faut adapter les modes de scrutin à la démographie et renforcer la parité.

Avec le binôme, toutefois, on crée un septième mode de scrutin...

Faisons preuve de pragmatisme en examinant ce qui fonctionne et ce qui dysfonctionne à chaque échelon institutionnel. Et faisons preuve d'honnêteté en ne favorisant pas notre propre camp et en donnant à nos citoyens une vraie représentation politique. Le projet de loi est taillé pour faire triompher la parité. Celle-ci est un moyen d'assurer la représentation, ce n'est pas son but en soi. (M. Bruno Retailleau approuve) Ce projet maintient un scrutin catholique dans un état laïc, celui qui permettait d'élire les abbés et les abbesses en écrasant les voix minoritaires. La parité et la pluralité sont possibles : nos amendements en témoignent. Pour les élections régionales, le mode de scrutin fonctionne. La peur du Front national ne doit pas nous empêcher de proposer ce qu'il y a de mieux en démocratie. Le Front national représente un Français sur cinq, nous ne pouvons les priver de toute représentation ! C'est par notre travail sur le terrain et par la pédagogie que nous ferons reculer les extrémismes ; c'est en rentrant dans les institutions que leurs défenseurs prouveront l'ineptie de leurs conceptions.

Le mode de scrutin prévu renforcera le clivage droite-gauche, au détriment des sensibilités différentes. Si le projet demeure en l'état, nous risquons de belles surprises lors des prochaines élections.

Enfin, ce système aura pour conséquence de créer des cantons immenses dans les zones rurales et minuscules dans les villes.

Nous présenterons donc trois amendements graduant le recours au scrutin proportionnel. Pourquoi ne pas instaurer le scrutin binominal pour les législatives, s'il est si merveilleux ? (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. Philippe Kaltenbach .  - Ce projet de loi poursuit un unique objectif : moderniser notre démocratie territoriale afin de rapprocher la décision du citoyen.

Pour accompagner l'acte III de la décentralisation, il fallait réformer les modes de scrutin et réaménager le calendrier électoral. Enfin, ce texte abroge le conseiller territorial, cet élu hybride qui aurait siégé dans deux assemblées distinctes. (Murmures de réprobation à droite) Certaines ont qualifié ce binôme de baroque, d'absurde. Mais que dire du conseiller territorial ? Son seul objectif était de permettre à l'UMP de gagner des sièges. (Exclamations à droite) On nous disait que les élus coûtaient trop cher, bel argument pour asseoir les pouvoirs des élus locaux !

Avec ce projet de loi, nous renforcerons la proximité, la parité et l'égalité devant le suffrage. Il a fallu beaucoup d'ingéniosité pour inventer le scrutin binominal qui garantit l'atteinte de ces trois objectifs.

M. Bruno Sido.  - Pour la proximité, c'est raté !

M. Philippe Kaltenbach.  - Les conseils départementaux seront renouvelés intégralement tous les six ans. La réforme du mode de scrutin est bienvenue.

M. Bruno Sido.  - A quand le Sénat ?

M. Philippe Kaltenbach.  - Nous en reparlerons sûrement dans quelques mois... Avec ce projet de loi, une véritable révolution se profile : dans les conseils généraux, il n'y a que 13 % de femmes élues et dans trois départements, aucune femme ne siège : Haute-Corse, Tarn-et-Garonne et Deux-Sèvres.

M. Bruno Sido.  - Ils sont de gauche ces trois départements !

M. Philippe Kaltenbach.  - Des élus de droite y siègent aussi. Sur ces questions, la gauche et la droite sont à égalité.

Avec le mode de scrutin préconisé par le Gouvernement, la parité deviendra une réalité.

On juge la proximité mise en cause. Mais la proportionnelle aurait éloigné bien plus l'élu de ses électeurs. Mieux vaut un grand canton que pas de territoire du tout. (Exclamations à droite)

La Constitution exige l'égalité devant le suffrage. La voix de tout citoyen doit peser du même poids. On ne peut accepter des voix qui pèsent 47 fois moins que d'autres, comme dans l'Hérault.

En Grande-Bretagne, il y avait, au XIXe siècle, les « rotten boroughs », ces bourgs pourris peu peuplés où quelques propriétaires élisaient des représentants conservateurs... Le Gouvernement a suivi les recommandations du Conseil constitutionnel et du Conseil d'État : il ne peut y avoir d'inégalité devant le suffrage. Le seuil de plus ou moins 20 % reflète la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Le groupe socialiste s'est longuement interrogé sur la possibilité de s'affranchir de ce seuil mais il a préféré s'abstenir pour ne pas risquer la censure du Conseil constitutionnel.

L'article 23 permet de s'affranchir de cette règle à titre exceptionnel. Nous proposerons un amendement pour en préciser l'application, mais les modifications ne pourront avoir lieu qu'à la marge.

Le mode de scrutin proposé est ingénieux et permet de répondre à ces trois objectifs.

Enfin, ce texte améliore le scrutin municipal en abaissant le seuil de la proportionnelle à 1 000 habitants. Les femmes ont beaucoup à gagner dans cette réforme. L'opposition sera également mieux représentée.

Le fléchage pour les élus communautaires ? C'est un bon système qui a été amélioré par la commission des lois, grâce à Alain Richard. L'aménagement du calendrier électoral déclenche les foudres de l'opposition, mais il s'agit d'éviter une explosion de l'abstention.

Reporter le vote aux départementales et aux régionales à 2015 permettra à nos concitoyens de s'exprimer en toute connaissance de cause. Le groupe socialiste a procédé à diverses auditions de représentants d'élus, qui semblent satisfaits par ce texte. Merci à M. le ministre pour son écoute. Le Sénat a mis une fois de plus son expertise au service des collectivités territoriales ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Paul Vergès .  - Nous sommes face à un rendez-vous important avec ces deux projets de loi. Le Gouvernement ne veut pas toucher à l'architecture de l'organisation administrative mais souhaite modifier les modes d'élection. Pour La Réunion, à 10 000 kilomètres de la France, la situation est bien différente. Nous nous acheminons vers une rupture historique de l'outre-mer.

Les quatre départements d'outre-mer sont régis par la loi sur les régions ultrapériphériques dans la communauté européenne. La Guadeloupe et La Réunion sont particulièrement concernées. La Martinique et la Guyane ont opté pour une collectivité unique tandis que la Guadeloupe et La Réunion ont préféré garder un conseil général et un conseil régional.

Comment réformer les collectivités territoriales ? L'essence même de cette réforme me pose problème : les quatre départements d'outre-mer sont monodépartementaux. La Martinique et la Guyane en ont tiré la leçon.

Comment, à La Réunion, pouvons-nous nous intégrer dans une telle réforme alors que nous sommes à 10 000 kilomètres de la métropole ? Madagascar, Maurice, les Seychelles, les Comores, proches de nous, vont signer des accords de partenariat économique avec l'Europe. Comment concilier notre intégration en France et dans l'Europe avec notre intégration dans notre environnement économique régional ? Une simple loi électorale conçue pour la métropole ne peut nous aider à répondre à cette question.

Contrairement à la Guadeloupe, La Réunion n'a pas le droit de faire connaître son opinion. Une loi a été votée en 1981 instituant une assemblée unique dans les quatre DOM mais une erreur de référence a fait annuler cette loi...

Le simple principe de précaution mériterait que l'on discute de cette réforme par les intéressés eux-mêmes. Devant l'absence de congrès à La Réunion, le Gouvernement doit consulter la population sur l'opportunité de cette réforme.

Je lance un appel au Gouvernement et à la population pour examiner la situation concrète, concilier le passé et l'avenir et réfléchir sur la réforme effectuée en Guyane et en Martinique pour instaurer une assemblée unique. Nous ne pourrons donc pas participer à ce vote. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Bruno Sido .  - Voici trente ans, la France a rompu avec sa tradition centralisatrice. Le mouvement a été lancé par le général de Gaulle dans les années soixante. Le passage de la France centralisatrice à la France des territoires, nous le devons aux lois Defferre, qui ont fait échapper les collectivités à la tutelle préfectorale et consacré le principe de leur libre administration.

Les élections cantonales se sont alors chargées d'un véritable sens. Or, ce projet de loi fragilise l'équilibre du dispositif né il y a trois décennies. Je soulignerai les limites et les dangers de ce projet et je proposerai des pistes de réflexion.

Président de conseil général, sénateur et président du groupe des départements de droite et du centre au sein de l'ADF, je mesure l'impact du mode de scrutin sur le fonctionnement de la démocratie locale, dans les conseils généraux en particulier. Cette question est de la plus haute importance. Je limiterai mon propos au titre I, relatif au conseil départemental. Selon l'exposé des motifs, il ne s'agirait que de prendre en compte les évolutions des territoires, de moderniser le système et de procéder aux adaptations strictement nécessaires sans remettre en cause ce qui fonctionne bien et depuis longtemps. Malheureusement, la réalité est tout autre avec le passage au scrutin binominal pour un même territoire. Une candidature individuelle, un élu pour un territoire, voilà qui était sans doute trop facile et insuffisamment subtil pour le Gouvernement. Que se passera-t-il si les deux élus cessent de parler d'une même voix ? La crédibilité du conseil départemental en sera affectée. J'ai passé l'âge de la candeur et cessé de croire que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles en politique...

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.  - Comme Pangloss !

M. Bruno Sido.  - Rien ne garantit que l'entente entre les membres du binôme va durer ; une fois passé le bonheur de la victoire électorale, chacun votera comme bon lui semble au sein de l'assemblée. L'innovation du binôme est une expérimentation hasardeuse, source de confusion. L'abaissement à 10 % du seuil pour se maintenir au deuxième tour ? La droite risque de ne pas être la seule victime des triangulaires, ne l'oubliez pas !

L'article premier de la Constitution fixe l'objectif d'égal accès des hommes et des femmes aux fonctions électives. C'est un idéal, non une obligation. Attention à l'excès -faut-il passer en 2015 d'un seul coup de 13 % à 50 % de femmes dans les conseils généraux ? Les conseillers généraux qui resteront sur le bord du chemin ne sont pas moins compétents que les femmes qui les remplaceront ! Je regrette que le Gouvernement confonde vitesse et précipitation. A-t-il pris la mesure des recompositions qui s'annoncent ?

Les exécutifs devront eux aussi être paritaires -on abandonne l'élection individuelle au profit d'une liste déposée par le président de l'exécutif que la majorité ratifiera ; je doute que la démocratie locale y gagne... Avant d'être homme ou femme, les élus sont des citoyens auxquels le corps électoral a fait confiance. Le principal gagnant de ce mode de scrutin illisible sera sans doute l'abstention...

Le Gouvernement entend préserver le lien entre l'élu et son territoire ? C'est le contraire qui arrivera. Le conseiller général est l'élu de proximité par excellence, le relais avec la préfecture et la région. Il est en prise directe avec tous les problèmes de nos concitoyens. Ce mode de scrutin va laminer la représentation des territoires ruraux, éloigner l'élu du citoyen.

Le Gouvernement entend remodeler la carte cantonale pour réduire les écarts de représentation. Il est vrai que les trois cinquièmes des cantons n'ont pas connu de modification de leurs limites administratives depuis 1801, alors que leur démographie a évolué. Le gouvernement Fillon avait proposé une solution appropriée avec le conseiller territorial... Il est anormal que dans la Haute-Marne, le canton de Chaumont Sud et ses 18 000 habitants ait autant de poids dans l'assemblée que le très charmant canton d'Auberive et ses 1 500 habitants... Le constat est clair et partagé.

Le Gouvernement autorise une variation de plus ou moins 20 % autour de la moyenne. Le plus petit canton de mon département comptera 9 202 habitants contre 1 440 aujourd'hui ; pour atteindre ces 9 202, il devra s'étendre sur 1 840 kilomètres carrés...

M. Yves Daudigny.  - Il y aura deux conseillers !

M. Bruno Sido.  - Pourra-t-on encore parler d'élus de proximité ? En Seine-et-Marne, le canton moyen comporterait 60 221 habitants, le plus petit, 40 177. Comment espérer une vraie représentation pour les zones rurales du département ? Allez expliquer après cela que le lien entre l'élu et la population est respecté ! (Applaudissements à droite) Seules des exceptions de portée limitée pourront être apportées. Les territoires de montagne, les territoires ruraux peu peuplés seront-ils concernés ? L'article 23 sera précisé par décret. Nous ne le verrons pas passer...

Le découpage sera fait par la voie réglementaire et non par la loi. Rien ne permet de penser qu'un taux différent de 20 % serait inconstitutionnel. Envisageons une variation de plus ou moins 40 à 50 %, la plupart des déséquilibres seraient corrigés sans créer de cantons démesurés. Prenons le temps d'examiner sérieusement cette possibilité qui n'a rien d'excessif.

La gauche, qui dénonçait hier, et avec quelle énergie, le conseiller territorial, au nom de la proximité, soutient aujourd'hui un texte qui va laminer la représentation de nombreux territoires et menacer l'équilibre entre monde urbain et monde rural. Je souhaite que le Parlement soit saisi du redécoupage des cantons ; l'article 34 le permet. La saisine pour avis des conseils départementaux éclairerait utilement le Parlement.

Tous affirment leur attachement au mandat de conseiller départemental, mais ce projet de loi en organise l'affaiblissement. Malgré quelques points positifs comme le renouvellement en totalité -à quand le Sénat ?-, il nous est impossible de voter un tel texte s'il n'est pas substantiellement modifié. (Applaudissements au centre et à droite)

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 16 janvier 2013, à 15 heures.

La séance est levée à minuit 45.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du mercredi 16 janvier 2013

Séance publique

A 15 heures et le soir

1. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur l'engagement des forces armées en réponse à la demande d'intervention militaire formulée par le président du Mali, en application de l'article 35, alinéa 2, de la Constitution.

2. Suite du projet de loi relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires, et modifiant le calendrier électoral (n°166 rect., 2012-2013) et du projet de loi organique relatif à l'élection des conseillers municipaux, des délégués communautaires et des conseillers départementaux (n°165 rect., 2012-2013).

Rapport de M. Michel Delebarre, fait au nom de la commission des lois (n°250, 2012-2013).

Textes de la commission (nos252, 2012-2013 et 251, 2012-2013).